Tuberculose chez les enfants infectés par le virus de l`immuno
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Tuberculose chez les enfants infectés par le virus de l`immuno
INT J TUBERC LUNG DIS 18(4):381–387 © 2014 The Union Tuberculose chez les enfants infectés par le virus de l'immunodéficience humaine débutant le traitement antirétroviral en Côte d’Ivoire * † ‡ ‡ * § A. F. Auld, M. Z. Tuho, K. A. Ekra, J. Kouakou, R. W. Shiraishi, G. Adjorlolo-Johnson, § * R. Marlink, T. V. Ellerbrock * Division of Global HIV/AIDS, Centers for Disease Control and Prevention (CDC), Atlanta, Georgia, USA; †Ministry of Health, National Programme for Medical Care of Persons Living with HIV/AIDS, Abidjan, ‡Division of Global HIV/AIDS, CDC, Abidjan, Côte d’Ivoire; §Elizabeth Glaser Pediatric AIDS Foundation, Los Angeles, California, USA ________________________________________________________________________________RÉSUMÉ CONTEXTE : En Côte d’Ivoire, plus de 2000 enfants âgés de <15 ans positifs pour le virus de l'immunodéficience humaine (VIH) ont débuté un traitement antirétroviral (TAR) entre 2004 et 2008. OBJECTIF : Estimer l’incidence de la tuberculose (TB) et ses déterminants chez ces enfants sous antirétroviraux. SCHEMA : Une étude rétrospective de cohorte, représentative au niveau national, sur 2110 enfants ayant débuté leur TAR entre 2004 et 2008 dans 29 établissements. RESULTATS : Lors de la mise en route du traitement, l’âge médian était de 5,1 ans, 82% étaient au Stade III-IV selon la classification de l’Organisation Mondiale de la Santé, le taux médian de CD4 était de 11%, 42% souffraient de malnutrition grave (score Z du rapport poids/âge [WAZ] <-3) et 7% (n = 150) recevaient un traitement antituberculeux. Le dépistage de la TB avant la mise en route du TAR a décliné de 63% à 46% de 2004 à 2008. Les enfants sous traitement antituberculeux lors du démarrage du TAR avaient un taux médian de CD4 plus bas (9% contre 11% ; P = 0,037) et une prévalence plus élevée de malnutrition grave (<-3) (59% contre 40% ; P < 0,001). Parmi les enfants considérés comme exempts de TB lors de l’inclusion, l’incidence de la TB a été de 6,28/100 enfants-années pendant les 90 premiers jours du TAR, tombant à 0,56/100 enfants-années au-delà de 180 jours. Les enfants dont le WAZ était plus élevé d’un degré ont eu une incidence de TB inférieure de 13% (aHR 0,87 ; IC95% 0,77-1.00 ; P = 0,047). CONCLUSION : La morbidité de la TB pendant un TAR pourrait être réduite à condition que le personnel de santé dépiste systématiquement la TB avant la mise en route du traitement et instaure le TAR précocement avant que les enfants ne souffrent d’une infection à VIH avancée et que leur état nutritionnel ne soit compromis. MOTS CLES : pédiatrique ; incidents de la tuberculose ; dépistage de la tuberculose ; Côte d’Ivoire _______________________________________________________________________________________ L’EPIDEMIE DU VIRUS de l’immunodéficience humaine (VIH) en Afrique subsaharienne a fait flamber l’épidémie préexistante de tuberculose (TB).1 L’augmentation du fardeau de la TB chez les adultes infectés par le VIH a été associé à une transmission accrue de la TB aux membres du foyer, notamment aux enfants.2,3 Les autopsies suggèrent que la TB est la cause majeure de mortalité chez les enfants infectés par le VIH, responsable de 12 à 18% des décès.4,5 Même si la TB est diagnostiquée et traitée, elle peut aboutir à une maladie pulmonaire chronique, notamment des bronchiectasies,6 responsables de pathologies tout au long de la vie. Evaluer le fardeau de la TB et ses facteurs prédictifs parmi les enfants infectés par le VIH débutant leur traitement antirétroviral ainsi que l’adhésion des cliniciens au dépistage de la TB avant le TAR peut aider les gestionnaires de programme TB-VIH à identifier les opportunités d’amélioration des programmes.7 Des études précédentes en Côte d’Ivoire se sont focalisées sur de petites cohortes d’enfants dans la capitale, Abidjan,8,9 ce qui limite l’utilité des résultats pour les gestionnaires de programmes TB-HIV nationaux. Nous avons réalisé une vaste étude de cohorte, représentative du pays auprès de 2 110 enfants démarrant le TAR en Côte d’Ivoire entre 2004 et 2008 dans 29 structures de santé afin d’évaluer la compliance des cliniciens aux directives de dépistage de la TB, la prévalence et les déterminants d’une TB active chez des enfants récemment mis sous TAR et l’incidence et les facteurs prédictifs de la TB pendant le TAR. METHODES Eligibilité au TAR Entre 2004 et 2008, les enfants âgés de 0 à 14 ans ayant eu un diagnostic de stade IV selon l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), de stade III de l’OMS s’ils étaient âgés de 12 mois ou moins, ou porteurs de certaines pathologies dont la TB, étaient éligibles au TAR quel que soit le pourcentage ou le nombre de lymphocytes T CD4+ (CD4). Les enfants non encore éligibles sur des critères cliniques pouvaient l’être en fonction des critères de pourcentage ou de nombre de CD4 selon leur âge comme les décrivent les directives de traitement 2006 de l’OMS.10 Les protocoles du TAR recommandés chez les enfants ayant une infection à VIH-1 incluent deux inhibiteurs des nucléosides de la transcriptase inverse (NRTI), et soit de la névirapine (NVP), soit de l’éfavirenz (EFV). Pour les enfants qui ont une coinfection TB, la NVP est remplacée par soit de l’EFV, soit un 3ème NRTI, en fonction de l’âge de l’enfant. Pour Auteur pour correspondance : Andrew F Auld, HIV Care and Treatment Team, Division of Global HIV/AIDS (DGHA), Center for Global Health (CGH), US Centers for Disease Control and Prevention (CDC), 1600 Clifton Road, Mailstop-E04, Atlanta, GA 30333, USA. Tel: (+1) 404 639 8997. Fax: (+1) 404 639 8114. e-mail: [email protected] [Traduction de l’article : « Tuberculosis in human immunodeficiency virus-infected children starting antiretroviral therapy in Côte d'Ivoire » Int J Tuberc Lung Dis 2014 ; 18(4): 381–387. http://dx.doi.org/10.5588/ijtld.13.0395] 2 The International Journal of Tuberculosis and Lung Disease les enfants infectés par le VIH-2, le TAR recommandée comprend en première ligne deux NRTI et un inhibiteur de la protéase stimulé par ritonavir. le traitement antituberculeux (pour une TB pulmonaire ou extra-pulmonaire) pendant le TAR ont été considérés comme des cas incidents de TB. Suivi du TAR Variables d’exposition Les directives de Côte d’Ivoire recommandent que les patients pédiatriques sous TAR soient vus fréquemment au début (après 2 semaines, chaque mois pendant 3 mois et tous les 3 mois ensuite) jusqu'à ce qu’ils soient stables et ensuite au moins tous les 6 mois,10 pour évaluer la progression ou l’amélioration de la maladie. Lors de chaque consultation, les dossiers médicaux standards recommandés par le ministère de la santé (MOH) sont remplis. Il est recommandé de noter lors de chaque consultation si le dépistage de la TB a été fait et les résultats de tout test de diagnostic de la TB. Les pratiques de dépistage de la TB recommandées pour les enfants incluaient l’évaluation 1) d’une reprise de poids insuffisante, 2) d’une fièvre persistante, 3) d’une toux chronique, 4) d’un antécédent de contact avec un sujet tuberculeux 5) de sueurs nocturnes. Les tests de TB recommandés pour tous les enfants suspects de TB incluaient 1) le test cutané de Mantoux, 2) deux échantillons de crachats (ou d’aspiration gastrique) examinés à la microscopie de frottis, 3) un échantillon de crachats (ou d’aspiration gastrique) envoyé en culture à la recherche de TB, et 4) une radio pulmonaire. Si l’on suspectait une TB extra-pulmonaire, une aspiration de ganglions, une ponction lombaire et une échographie abdominale étaient des examens diagnostiques complémentaires disponibles dans certaines structures. En réalité, seuls deux laboratoires offraient la culture TB ; très peu de patients suspects de TB ont donc eu des examens d’échantillons de crachats ou d’aspiration gastrique mis en culture. Toutes les variables figurant sur les dossiers TAR recommandés par le MOH ont été évaluées comme des facteurs de risque potentiels de TB (Tableau 1). Le poids a été noté comme score Z du poids pour l’âge (score WAZ), en utilisant les courbes de croissance du Centers for Disease Control and Prevention (CDC) pour les enfants âgés de 5 à 14 ans et les courbes de l’OMS pour les enfants âgés de 0 à 5 ans. Analyse Il s’agissait d’une étude de cohorte rétrospective représentative au niveau national. Au 1er janvier 2008, près de 3000 enfants avaient été mis sous TAR dans 64 structures de santé.11 Afin d’améliorer la faisabilité de l’étude, seules les structures ayant enrôlé plus de 10 enfants sous TAR au 1er janvier 2008 ont été considérées comme éligibles. Sur 30 structures éligibles, 29 ont accepté de participer. Selon les dossiers du MOH, ces 29 structures avaient enrôlé 2820 (94%) des 3 000 enfants enrôlés au niveau du pays entre 1998 et 2008. Comme les dossiers médicaux des patients sous TAR avant 2004 contenaient des données très incomplètes, le protocole a exclu 427/2 820 enfants (15%) qui avaient débuté leur traitement avant 2004. Une autre série de 195 (7%) dossiers n’ont pas pu être retrouvés et 88 (3%) avaient été transférés avec l’enfant vers une autre structure. Les 2110 dossiers restants ont été inclus dans l’étude. Les données ont été recueillies de novembre 2009 à mars 2010 à partir des dossiers médicaux TAR recommandés par le MOH par des opérateurs de saisie formés à cet effet. Les données ont été analysées avec Stata 11 (StataCorp, 2009, Stata Statistical Software, Release 11, College Station, TX, USA). Les données manquantes ont été notées pour chaque covariable intéressante et on a estimé qu’elles manquaient de façon aléatoire (MAR). Si <30% des observations avaient des données manquantes pour une covariable de départ intéressante, on a utilisé l’imputation multiple avec des équations en chaîne pour imputer les données manquantes.12 La procédure ICE (imputation par équations en chaine)13 dans Stata a été utilisée pour créer 20 ensembles de données imputées pour le résultat clé : l’incidence de la TB. Le modèle d’imputation a inclus l’indicateur d’évènement, toutes les variables de l’étude et l’estimation de risque cumulé de Nelson-Aalen.14 Dans toutes les analyses impliquant des données imputées, les estimations ont été combinées à travers les ensembles de données selon les règles de Rubin.12 En utilisant les données imputées, les associations entre les covariables de départ et la TB prévalente ont été évaluées grâce à une régression logistique bivariée avec des effets aléatoires spécifiés pour chaque structure. Comme les dossiers médicaux TAR ne précisaient pas systématiquement la date de l’arrêt du traitement antituberculeux, la période à risque de TB incidente parmi les cas de TB prévalente n’a pas pu être estimée. Comme dans d’autres études, en analyse time-to-event, les patients avec une TB prévalente ont été exclus de la cohorte à risque.15 Les patients qui ont été inclus dans la cohorte à risque, mais n’ont pas eu un diagnostic de TB incidente pendant le suivi, ont été censurés à la date de la consultation la plus récente, de la date de décès le cas échéant, ou de la date de transfert en cas de transfert. Les modèles de régression des risques proportionnels de Cox ont été utilisés pour estimer les rapports de risque (hazard ratios) non-ajustés et ajustés (HR et aHR), avec des effets aléatoires spécifiés pour la structures du TAR. L’hypothèse de risque proportionnel a été évaluée grâce à des méthodes visuelles et par le test de Grambsch et Therneu.16 Les courbes de Kaplan-Meier ont permis d’examiner la probabilité cumulative de rester non diagnostiqué avec une TB dans le temps, stratifié en fonction des variables de départ. Résultats du traitement Ethique Les enfants prenant un traitement antituberculeux lors de la mise en route du TAR ont été considérés comme des cas prévalents de TB. Les enfants qui ont commencé Cette étude a été approuvée par le comité d’éthique ivoirien et le comité d’éthique du CDC aux Etats-Unis ainsi que par celui de l‘école de santé publique de Harvard. Schéma de l’étude et population Le fardeau de la TB chez les enfants ivoiriens débutant le TAR 3 Tableau 1 Caractéristiques des patients et des sites lors de la mise en route du TAR en fonction du statut du traitement de la tuberculose, Côte d’Ivoire, 2004–2008 Tous les patients lors de l’enrôlement (n = 2110) ‡ Original Imputé* n % % Age à l’enrôlement, années, médiane [IIQ] 2110 5,1 [2,2-8,8] 5,1 [2,2-8,8] Sexe Masculin 1146 54 54 Féminin 964 46 46 Statut de la mère Mère en vie 1128 67 67 Mère décédée 549 33 33 Non précisé 433 21 Statut du père Père en vie 1155 77 77 Père décédé 348 23 23 Non précisé 607 29 Type du VIH VIH-1 2044 99 99 VIH-2 ou VIH-1 & 2 20 1 1 Non précisé 46 2 Stade OMS I/II 329 19 19 III 939 53 53 IV 510 29 29 Non précisé 332 16 Poids pour âge score Z > –1 (normal) 372 19 20 > –2 — <–1 (léger) 357 19 18 > –3 — <–2 (moderé) 383 20 20 < –3 (grave) 798 42 42 Non précisé 200 9 1835 10,8 [5,4–15,0] 11,0 [6,0–15,0] % de CD4, médiane [IIQ] Non précisé 275 13 1894 333 [116–618] 337 [122–621] Numération des CD4, cellules/µl, médiane [IIQ] Non précisé 216 10 1759 9,3 [8,3–10,3] 9,3 [8,3–10,4] Hémoglobine, g/dl, médiane [IIQ] Non précisé 351 17 Taille du site TAR >100 enfants sous 1210 57 57 TAR <100 enfants sous 900 43 43 TAR Type de site TAR Primaire 1181 56 56 Secondaire 231 11 11 Tertiare 698 33 33 Rupture de stock d’ARV (1ère ou 2ème ligne) au site TAR au cours de la dernière année Oui 955 45 45 Non 1155 55 55 Soutien nutritionnel au site TAR? Oui 713 34 34 Non 1397 66 66 Recevant des antituberculeux* (n = 150) Ne recevant pas d’antituberculeux* (n = 1960) % % 6,7 [3,2-10,7] 5,0 [2,1-3,2] <0,001 54 46 54 46 0,952 64 36 68 32 0,510 77 23 77 23 0,964 99 1 99 1 0,553 4 24 72 20 55 25 <0,001 13 15 14 59 21 19 20 40 <0,001 9,0 [4,0–13,0] 11,0 [6,0–15,0] 0,037 261 [78–547] 342 [126–624] 0,089 9,5 [8,5–10,6] 9,3 [8,3–10,3] 0,246 69 56 0,072 31 44 43 6 51 57 11 32 0,011 45 55 45 55 0,804 17 83 35 65 0,007 Valeur de P † * L’analyse a été conduite sur les données imputées. † Effets aléatoires de la régression logistique bivariée. ‡ Données originales avant imputation. TAR = traitement antirétroviral ; IIQ = intervalle interquartile ; VIH = virus de l'immunodéficience humaine ; OMS = Organisation Mondiale de la Santé ; ARV = antirétroviral. RÉSULTATS Caractéristiques des patients lors de la mise en route du TAR Parmi les 2 110 enfants débutant le TAR entre 2004 et 2008, l’âge médian était de 5,1 ans et 150 (7%) recevaient un traitement antituberculeux (cas de TB prévalente). L’âge médian des cas de TB prévalente était plus élevé que celui des enfants considérés exempts de TB (6,7 contre 5,0 ans ; P = 0,001) (Tableau 1). La majorité des enfants (99%) étaient infectée par le VIH-1 ; seulement 15 (0,7%) étaient infectés par le VIH-2, et cinq (0,2%) étaient séropositifs pour le VIH-1 et 2. Le type de VIH n’était pas associé avec une TB prévalente (P = 0,553). Les marqueurs de maladie à VIH avancée étaient fréquents parmi les patients sous TAR ; 29% étaient au stade IV de l’OMS, 42% souffraient de malnutrition grave (WAZ = –3) et le pourcentage médian des CD4 était de 11%. Comparés aux enfants considérés comme exempts de TB lors de la mise en route du TAR, les enfants atteints de TB prévalente avaient plus de risques d’être au stade IV de l’OMS pour l’infection à VIH (72% contre 25% ; P = 0,001), de souffrir de malnutrition grave (59% contre 40% ; P = 0,001) et d’avoir un 4 The International Journal of Tuberculosis and Lung Disease pourcentage de CD4 médian plus faible (9,0% contre 11,0% ; P = 0,037). Comparés aux enfants évalués comme exempts de TB, les cas de TB prévalente étaient plus susceptibles de débuter le TAR dans une structure de soins de niveau tertiaire (51% contre 32% ; P = 0,011) et dans des structures ne comportant pas de programmes de soutien nutritionnel (83% contre 65% ; P = 0,007). jours du TAR, à 6,28/100 ea (IC95% 4,31–9,16). Ce taux a décliné à 2,52/100 ea (IC95% 1,36–4,69) entre le 90ème jour et le 180ème jour du TAR et 0,56/100 ea (IC95% 0,36–0,89) au-delà. Facteurs de risque de la TB incidente Un accroissement d’âge d’une année était associé de façon borderline à une incidence accrue de la TB (aHR 1,08 ; IC95% 0,99–1,15 ; P = 0,067) (Tableau 2). Chaque augmentation d’un point du WAZ était associée à une réduction de 13% de l’incidence de la TB (aHR 0,87 ; IC95% 0,77– 1,00 ; P = 0,047) (Figure 2). Il n’y avait pas d’association entre l’incidence de la TB et le fait que l’enfant soit orphelin de mère ou de père ni qu’il ait une anémie grave. Dépistage de la TB Dans l’ensemble, 1012 (48%) enfants avaient un document attestant d’un dépistage de la TB avant la mise en œuvre du TAR ; 723 (34%) ont été dépistés pour une toux chronique, 565 (27%) pour une fièvre, 391(19%) pour un contact avec un tuberculeux, 366 (17%) pour une perte de poids et 228 (11%) pour des sueurs nocturnes. Seulement 10% des enfants avaient été dépistés pour les cinq symptômes à la fois. La proportion de dossiers médicaux documentant un quelconque dépistage de la TB avant la mise en route du TAR a chuté de 63% à 46% entre 2004 et 2008. Les proportions de patients dépistés pour au moins un symptôme de TB avant le TAR variait considérablement en fonction de la structure de santé, de 0% à 93%. Dans 25/29 dispensaires, 80% des enfants sous TAR possédaient une forme de documentation d’un dépistage de la TB (Figure 1). DISCUSSION Cette étude constitue la plus importante évaluation de l’incidence de la TB chez des enfants débutant le TAR en Côte d’Ivoire et elle est la première à être représentative du pays ;8,9 elle a plusieurs résultats importants. Poids de la TB La prévalence de la TB lors de l’enrôlement sous TAR (7%) est plus élevée que celle rapportée par des études précédentes dans l’Ouest du Kenya (3,6%),17 en Côte d’Ivoire (2–4%)8,9 et en Zambie (5,7%),18 mais elle est plus faible que celle rapportée à Johannesburg, Afrique du Sud (29%).19 Il peut y avoir de nombreuses raisons à la variation de la prévalence de la TB lors de l’initiation du TAR, notamment des variations des algorithmes de dépistage ou de diagnostic de la TB,20 des variations du degré d’immunosuppression7 et des variations de l’incidence habituelle de la TB dans la population générale.19 Une mise en route plus précoce du TAR pour les enfants infectés par le VIH pourrait réduire le fardeau de la TB parmi ces enfants mis sous TAR.7,17 Afin de faciliter une initiation plus précoce du TAR, une expansion Incidence de la TB Parmi les 1960 enfants considérés comme exempts de TB au démarrage du TAR, 56 (3%) ont, selon leurs dossiers, débuté le traitement de la TB pendant 4190 enfantsannées (ea) de suivi, à un rythme de 1,34 cas/100 ea (intervalle de confiance à 95% [IC] 1,03–1,74). Sur 56 cas de TB, 8 ont été des TB extra-pulmonaires (0,19 cas/100 ea ; IC95% 0,09–0,37) et 48 ont été des TB pulmonaires (1,14 cas/100 ea ; IC95% 0,86–1,52). Le taux d’incidence global de la TB a été plus élevé pendant les 90 premiers 100% 93% 93% 90% 81% 80% 80% 78% 76% 69% 70% 64% 62% 61% 58% 57% 57% 60% 55% 54% 47% 50% 43% 40% 36% 31% 30% 31% 30% 25% 21% 24% 19% 13% 12% 9%9% clinic 29 clinic 28 clinic 27 clinic 21 clinic 20 clinic 19 clinic 18 clinic 17 clinic 26 7% 6% 3% 0% 0% 0% 0% 0% 0% 0% 0% 0% 0% 0% clinic 16 clinic 15 clinic 14 clinic 13 clinic 12 clinic 11 clinic 10 clinic 9 clinic 8 clinic 7 clinic 6 clinic 5 clinic 4 clinic 3 clinic 2 clinic 1 0% 0% 1% 0% 2% 0% clinic 25 6% 10% clinic 24 13% clinic 23 20% Figure 1 28% 21% clinic 22 40% Différences par site dans la proportion de dossiers médicaux pédiatriques du TAR avec documentation d’un dépistage de la TB avant le TAR. * Une documentation partielle de dépistage de la TB avant la mise en route du TAR a été définie comme la documentation du dépistage d’au moins un des symptômes suivants : 1) prise de poids médiocre, 2) présence de toux, 3) fièvre chronique, 4) contact TB et 5) sueurs nocturnes. Les patients prenant un traitement lors de la mise en route du TAR ont été considérés comme ayant été dépistés pour la TB. TB = tuberculose ; TAR = traitement antirétroviral. Documentation partielle d’un dépistage avant la mise en route du TAR. Tous les cinq symptômes dépistés. Le fardeau de la TB chez les enfants ivoiriens débutant le TAR 5 Tableau 2 Caractéristiques des patients et des sites associées à l’incidence de la TB durant le TAR parmi les enfants débutant le TAR, Côte d’Ivoire, 2004–2008 Original n 1960 Brut Taux (/100 ea) ― HR 1,10 Age à l’enrôlement, augmentation par année d’âge Sexe Masculin 1065 1,03 1,00 Féminin 895 1,72 1,64 Statut de la mère Mère en vie 1048 1,06 1,00 Mère décédée 502 1,87 1,87 Statut du père Père en vie 1067 1,31 1,00 Père décédé 324 1,40 1,13 Année de début du TAR, 1960 0,98 augmentation par année calendrier Stade OMS I/II 324 0,70 1,00 III 904 1,28 1,95 IV 410 2,09 3,04 Malnutrition Augmentation de la gra1911 ― 0,81 vité par unité de score WAZ Numération des CD4, % >20 149 0,71 1,00 10-20 825 1,15 1,78 <10 722 1,71 2,60 Hémoglobine, g/dl ≥8 1327 1,21 1,00 <8 300 2,01 1,56 Taille du site TAR >100 enfants âgés de 1106 1,16 1,00 <15 ans sous TAR <100 enfants âgés de 854 1,75 1,22 <15 ans sous TAR Type de site TAR Primaire 1117 1,51 1,00 Secondaire 222 0,66 0,43 Tertiaire 621 1,34 0,84 Rupture de stock d’ARV 1ère ou 2ème ligne) dans la dernière année Non 1073 0,91 1,00 Oui 887 2,18 2,00 Soutien nutritionnel sur place? Oui 687 0,86 1,00 Non 1273 1,66 1,73 Traitement de la TB fourni sur place? Oui 625 1,63 1,00 1335 Non 1,27 0,89 Ajusté (IC95%) (1,03–1,18) Valeur de P 0,003 aHR 1,08 (IC95%) (0,99–1,15) Valeur de P 0,067 ― (0,96–2,78) ― 0,068 1,00 1,61 ― (0,94–2,76) ― 0,081 ― (1,05–3,34) ― 0,033 1,00 1,45 ― (0,77–2,72) ― 0,250 ― (0,58–2,23) ― 0,714 1,00 0,73 ― (0,35–1,52) ― 0,584 (0,79–1,21) 0,841 0,88 (0,69–1,13) 0,313 ― (0,65–5,83) (0,98–9,41) ― 0,232 0,054 1,00 1,82 2,00 ― (0,58–5,66) (0,58–6,93) ― 0,299 0,271 (0,73–0,91) <0,001 0,87 (0,77–1,00) 0,047 ― (0,42–7,49) (0,61–11,0) ― 0,434 0,194 1,00 1,75 1,86 ― (0,41–7,40) (0,42–8,23) ― 0,446 0,413 ― (0,78–3,13) ― 0,210 1,00 1,24 ― (0,58–2,66) ― 0,572 ― ― 1,00 ― ― (0,71–2,067) 0,471 1,26 (0,49–3,24) 0,996 ― (0,13–1,40) (0,47–1,50) ― 0,161 0,551 1,00 0,32 0,82 ― (0,08–1,29) (0,26–2,62) ― 0,109 0,742 ― (1,17–3,43) ― 0,012 1,00 1,47 ― (0,60–3,59) ― 0,398 ― (0,95–3,18) ― 0,075 1,00 1,42 ― (0,55–3,68) ― 0,467 ― (0,51–1,57) ― 0,700 1,00 1,09 ― (0,45–2,67) ― 0,844 Probabilité de rester exempt de TB TB = tuberculose ; TAR = traitement antirétroviral ; ea = enfants années ; HR = hazard ratio ; IC = intervalle de confiance ; aHR = HR ajusté ; OMS = Organisation Mondiale de la Santé ; WAZ = score Z du poids pour l’âge ; ARV = antirétroviral. Temps (années) Figure 2 Probabilité cumulative de rester exempt de tuberculose par score WAZ. TB = tuberculose ; WAZ = score Z du poids pour l’âge. du diagnostic précoce de la TB chez le nourrisson et des services de référence seraient nécessaires.11 L’incidence de TB que nous rapportons (1,34/100 ea), équivalente à environ 1340 par 100.000 habitants, est considérablement plus élevée que la moyenne nationale de 399/100 000.21 Notre incidence de TB est semblable à ce qui a été rapporté précédemment en Côte d’Ivoire (1,3–2,1/100 ea),8,9 mais plus faible que celle rapportée en Afrique du Sud, parmi des enfants débutant le TAR (6,4/100 ea).22 Cette différence pourrait être expliquée par une incidence habituelle plus élevée en Afrique du Sud (971 contre 399/100 000),21 ou par un dépistage plus efficace de la TB et de meilleures capacités diagnostiques en Afrique du Sud.7 Comme dans d’autres études,17,23,24 l’incidence de la TB dans notre cohorte a été la plus élevée au cours des 90 premiers jours du TAR et elle a décliné ensuite. Plusieurs mécanismes peuvent expliquer cette incidence précoce élevée de la TB.24 Si certaines TB incidentes précoces pourraient être de nouvelles maladies tubercu- 6 The International Journal of Tuberculosis and Lung Disease leuses actives.24 Cependant, la majorité des cas de TB détectés et traités au début du TAR sont probablement dus à 1) « démasquage » d’une forme infra-clinique de la maladie, présente lors de la mise en route du TAR ou 2) une aggravation d’une maladie symptomatique qui n’a pas été dépistée ni diagnostiquée avant le début du TAR.24 Une maladie active peut être infra-clinique lors de l’initiation du TAR parce que les symptômes de TB dépendent à la fois de la charge bacillaire et de la réponse immunitaire. La reconstitution immunitaire associée à une TAR précoce peut démasquer de nouveaux signes et symptômes de TB, ce qui provoquera à son tour, le diagnostic de la TB ou un protocole de traitement d’essai.24 Parmi les enfants symptomatiques qui sont restés non diagnostiqués à cause d’une faille dans le dépistage ou le diagnostic de la TB pédiatrique,7 le TAR peut aggraver les symptômes de la TB, suscitant un diagnostic plus intensif de la TB ou un traitement d’essai antituberculeux.24 Comme dans d’autres études de cohorte rétrospective,22 la prévalence et l’incidence de TB que nous rapportons peuvent être sous-estimées en raison des failles du dépistage et/ou du diagnostic de la maladie tuberculeuse ou encore surestimées en raison d’essais incorrects de traitement antituberculeux chez des enfants qui n’ont eu qu’un diagnostic clinique de TB. Dépistage de la TB Les pratiques en matière de dépistage de la TB n’ont pas été optimales, ont semblé se détériorer avec le temps et ont considérablement varié d’une structure à l’autre. La recherche opérationnelle évaluant les pratiques de dépistage de la TB parmi les enfants sous TAR est limitée ; une étude réalisée en Thaïlande a trouvé que 6 à 90% des enfants bénéficiaient d’un dépistage de la TB avant le TAR.25 La rareté de la documentation du dépistage de la TB et la compliance en déclin des cliniciens à la réaliser sont préoccupantes ; en effet, une TB non diagnostiquée lors de la mise en route du TAR est une cause importante de morbidité et de mortalité.26 Cibler les 25 structures où 80% des enfants sous TAR ont été dépistés pour au moins un symptôme de TB et leur offrir une formation et une supervision plus intensives pourrait réduire la morbidité et la mortalité associées à la TB chez les enfants débutant le TAR.20 Facteurs de risque de TB Les marqueurs de maladie à VIH avancée (stade OMS avancé, dénutrition et chute du pourcentage des CD4) ont été des facteurs prédictifs de TB prévalente,8,17 et au contraire, un score Z du poids/âge au départ a eu un effet protecteur vis-à-vis de la TB incidente. Une mise en route plus précoce du TAR, avant que l’infection à VIH ne soit à un stade avancé, pourrait réduire le poids de la TB parmi les enfants infectés par le VIH.17 L’association entre un score WAZ bas et la TB incidente a été rapportée précédemment17,23 Les explications peuvent être les suivantes : 1) une TB active lors de la mise en route du TAR, c'est-à-dire une cause possible de faible score WAZ, est restée non diagnostiquée soit parce que le test de diagnostic n’était pas assez sensible soit parce que le dépistage de la TB n’a pas été fait ;27 2) les cliniciens ont fait un diagnostic présomptif de TB après la mise en route du TAR parce que la reprise de poids a été insuffisante ;17 ou 3) les enfants dénutris sans TB lors de la mise en route du TAR ont un risque de développer une TB active pendant le suivi en raison de l’altération de l’immunité à médiation cellulaire due à la malnutrition.28 Si l’on veut corriger l’absence de diagnostic de TB active à la mise en route du TAR, il est essentiel d’assurer le dépistage de la TB avant l’initiation du TAR et d’en suivre les résultats. De plus, le déploiement du test MTB/RIF GeneXpert® (Xpert, Cepheid, Sunnyvale, CA, USA), dont la sensibilité dans le diagnostic de la TB à culture positive chez des enfant infectés par le VIH est deux fois plus élevée que celle de la microscopie de frottis (76% contre 38%), devrait être accéléré.27 Pour examiner la possibilité que la malnutrition soit une cause sous-jacente du développement de la TB active pendant le TAR, l’expansion des programmes de nutrition existants a un rôle à jouer.28 Dans notre étude, l’absence de programme de nutrition dans la structure était associée à une TB prévalente lors de la mise en route du TAR (P = 0,007) et était associée de façon marginale à l’incidence de la TB dans l’analyse brute (P = 0,075), mais pas ajustée (P = 0,323). Il est nécessaire d’évaluer davantage les programmes de supplémentation alimentaire des enfants infectés par le VIH pour apprécier leur bénéfice et leur rapport coût-efficacité.28 Comme dans d’autres études,1 l’avance en âge était associée à la TB prévalente et incidente pendant le suivi. Ceci pourrait être dû à une immunosuppression plus avancée chez des enfants plus âgés lors de la mise en route du TAR ou à des difficultés de diagnostic de la TB chez des enfants plus jeunes.1 Limitations Ce rapport a plusieurs limitations. D'abord, en raison du manque de données sur la date de l’arrêt du traitement antituberculeux parmi les cas de TB prévalente, ces derniers ont été exclus de la cohorte au risque de sousestimer l’incidence de la TB. Cependant, dans une analyse de sensibilité (données non présentées), les estimations de l’incidence de la TB incluant tous les patients dans la cohorte à risque (n = 2110) n’ont pas été différentes de l’incidence que nous avons rapportée (n = 1960). Ensuite, comme cela a été décrit précédemment, la prévalence et l’incidence de la TB rapportées peuvent être une sous-estimation ou une surestimation du fardeau réel de la TB en raison des difficultés de diagnostic de la TB de l’enfant. Troisièmement, les données manquantes concernant certaines covariables ont probablement introduit des erreurs de mesure non différentielles. Quatrièmement, certains cas de TB incidente auraient pu être des cas de TB prévalente, pour lesquels les résultats des tests diagnostiques ne sont revenus qu’après la mise en route du TAR. Enfin, le manque d’informations sur les enfants qui ont eu un dépistage positif de TB et parmi les suspects, lesquels ont eu un test et une confirmation du diagnostic de TB, limite notre capacité à évaluer la compliance des cliniciens vis-à-vis des directives de diagnostic de la TB. CONCLUSIONS Dans notre cohorte d’enfants sous TAR, beaucoup étaient à un stade avancé de l’infection à VIH, associée Le fardeau de la TB chez les enfants ivoiriens débutant le TAR à la fois à une TB prévalent et incidente. Une mise en route plus précoce du TAR pourrait réduire le poids de la TB. En particulier, la mise en route du TAR à un score WAZ plus élevé pourrait réduire le fardeau de la TB pendant le TAR. En plus, une meilleure compliance des cliniciens au dépistage de la TB avant le TAR et un meilleur diagnostic de la TB (par exemple par Xpert) pourrait réduire l’incidence de la TB pendant le TAR. Remerciements Cette recherche a été soutenue par le Plan d’urgence du président des Etats-Unis pour la lutte contre le Sida (PEPFAR) à travers les US Centers for Disease Control and Prevention (CDC). Non responsabilité : Le recours à des noms de marques est uniquement destiné à l’identification et n’implique pas d’approbation par le United States CDC ou le US Department of Health and Human Services. Les résultats et conclusions de cet article sont ceux des auteurs et ne représentent pas nécessairement les vues du CDC. Conflit d’intérêt : pas de conflit déclaré. Références Harries A D, Zachariah R, Corbett E L, et al. The HIVassociated tuberculosis epidemic―when will we act? Lancet 2010; 375: 1906-1919. 2 Lawn S D, Bekker L G, Middelkoop K, Myer L, Wood R. Impact of HIV infection on the epidemiology of tuberculosis in a peri-urban community in South Africa: the need for age-specific interventions. Clin Infect Dis 2006; 42: 1040-1047. 3 Middelkoop K, Bekker L G, Myer L, Dawson R, Wood R. Rates of tuberculosis transmission to children and adolescents in a community with a high prevalence of HIV infection among adults. 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