Avec Renoir et Monet, au musée Fabre de Montpellier, jusqu`au 16

Transcription

Avec Renoir et Monet, au musée Fabre de Montpellier, jusqu`au 16
Edition spéciale - Août 2016
Bazille,
maître
de la
lumière
Supplément gratuit - Ne pas jeter sur la voie publique
Avec Renoir et Monet, au musée Fabre de Montpellier, jusqu’au 16 octobre 2016
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2
FABR2
Midi Libre midilibre.fr
■ Bazille au musée Fabre
BILLET
Consécration
Montpellier lui devait
bien cet hommage.
Cette reconnaissance
à la fois picturale et
populaire. Mémorielle
et sensorielle. Car,
figure de proue du
néo-impressionnisme,
Frédéric Bazille, fauché
bien trop tôt par la
camarde sur le champ
de bataille
franco-prussien, n’aura
eu le temps de léguer
qu’une cinquantaine de
toiles. Mais quel
héritage ! De la lumière
à l’état pur. Celle qui,
par un jeu maîtrisé des
contrastes, révèle avec
quiétude la campagne
mélancolique, dévoile
la douceur des lieux et
la sensualité des
personnages. Un talent
fou qui n’a pas
échappé au musée
d’Orsay et à la National
Gallery de Washington.
Et qui, en cet été 2016,
accueille Bazille dans
son authentique jardin.
Ph.P.
PRATIQUE
Au musée Fabre,
boulevard Sarrail, jusqu’au
16 octobre (fermé le lundi).
04 67 14 83 00.
Visites guidées adultes,
du mardi au dimanche
à 11h, 13h et 16h.
Tarifs : adulte, 10 €,
visite guidée, 13 €.
« Bazille au musée Fabre »
Edité par la société
du Journal Midi Libre.
Société anonyme
au capital de 6 278 802 €
Rue du Mas-de-Grille
34430 Saint-Jean-de-Védas.
Principal actionnaire :
Groupe La Dépêche du Midi SA
Président-directeur général et
directeur de publication :
Bernard MAFFRE
Directeur de la rédaction :
Philippe PALAT
Rédaction :
Diane PETITMANGIN
Jean-Marie GAVALDA
L’ÉVÉNEMENT
AOÛT 2016
Un parcours en douze séquences
La jeunesse éclatante
de l’impressionnisme
Avec Monet et Renoir, Bazille ouvre la voie à la modernité.
F
auché par la guerre de 1870
juste avant son 29e anniversaire, Frédéric Bazille n’a laissé
qu’une cinquantaine de toiles,
des dessins, des carnets. Mais cette production s’inscrit dans un moment charnière, celui de La jeunesse de l’impressionnisme. Sous ce
titre, le musée Fabre consacre une
nouvelle et foisonnante rétrospective (la précédente date de 1992)
au peintre le plus célèbre de Montpellier. Frédéric Bazille n’a évidemment pas la postérité de ses amis
Monet, Renoir et Sisley, mais il est
au cœur d’un mouvement qui va révolutionner la peinture. Ses tableaux ont des contrastes d’ombre
et de lumière de plus en plus raffinés, sans atteindre la fragmentation de la touche qui sera la marque de l’impressionnisme. Bazille
est cependant l’un des premiers à
fusionner l’art du portrait et du
paysage. C’est le grand défi de sa
génération. Il va l’expérimenter
avec La robe rose (1864) puis l’accomplir avec La vue de village
(1868).
Jeunes baigneurs sensuels
Les deux toiles ont été réalisées à
Méric. La résidence d’été de la famille Bazille à Montpellier sert de
cadre à deux autres compositions
majeures : La terrasse et surtout
La réunion de famille, majestueux
portrait de groupe d’une dynastie
prospère et sévère où chaque individu se trouve fortement personnalisé dans un environnement champêtre idyllique. L’artiste se représente dans un coin de tableau. Il
semble difficilement trouver sa place.
Le mélancolique Frédéric préfère
les berges verdoyantes du Lez, en
contrebas de Méric, où se prélassent sensuellement de jeunes baigneurs dans Scène d’été. Il y peint
aussi le Pêcheur à l’épervier, nu
masculin vigoureux et troublant
auquel l’artiste était très attaché.
C’est dans ces baignades au bord
de la rivière, où les trouées de lumière jouent avec les corps, que
Bazille s’approche le plus de l’impressionnisme.
Les douze séquences de l’exposi-
■ Baigneurs de “Scène d’été”.
© PRESIDENT AND FELLOWS OF HARVARD COLLEGE REMOVE
tion mettent en scène une vie d’artiste, brève et intense, placée sous
d’heureuses influences. Corot inspire les premiers paysages dans la
forêt de Fontainebleau. La Petite
Italienne chanteuse des rues est
dans la droite ligne du réalisme de
Courbet.
Manet et sa moderne Olympia l’accompagnent du début à la fin, d’un
lascif Nu couché (1864) à La toilette (1870) en passant par La négresse aux pivoines, dont la rétrospective réunit les deux versions.
L’étroit compagnonnage avec Monet fait aussi évoluer le style de Bazille. C’est lors d’un séjour en Normandie que le Montpelliérain capte la luminosité qui va éclater sur
les Remparts d’Aigues-Mortes.
Le partenariat de Michel Hilaire, directeur du musée Fabre, avec le
musée d’Orsay et diverses institutions américaines permet d’insérer
dans le parcours des chefs-d’œuvre rares de Monet, Cézanne, Sisley, Renoir, instaurant un passionnant dialogue à travers les paysages, les natures mortes et les ateliers partagés. La jeunesse éclatante de l’impressionnisme.
■
Voir également la vidéo
sur le site Midilibre.fr
PORTRAIT
Panache
Enfant de la haute société
protestante montpelliéraine,
Frédéric Bazille découvre Courbet,
Delacroix et sa vocation de peintre
dans la collection de son voisin
Alfred Bruyas. Ses parents
l’envoient faire médecine à Paris,
mais il préfère l’atelier de Gleyre où
il se lie d’amitié avec Monet et
Renoir. Moins argentés, ces
derniers bénéficient des largesses
de Frédéric - il achète leurs toiles qui ne cesse de solliciter poliment
les subsides de son père Gaston,
gros exploitant agricole.
Frédéric mène une vie de
bourgeois-bohème. Avec ses
copains rapins, il partage les
ateliers, les débats enflammés au
Café Guerbois. Élégant, Frédéric
plaît aux femmes mais il est effrayé
en découvrant un projet de mariage
arrangé. Il restera célibataire. En
août 1870, son engagement sous
l’uniforme surprend ses proches. Il
meurt le 28 novembre sur le champ
de bataille de Beaune-la-Rolande.
Son père ramènera sa dépouille.
Le bourgeois-bohème avait aussi
du panache.
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Midi Libre midilibre.fr
■ Bazille au musée Fabre
ENTRETIEN
AOÛT 2016
3
Les projets muséaux du président de la Métropole
« Montpellier rayonne »
Q
Philippe Saurel évoque la dimension internationale des expositions.
ue représente pour
vous l’exposition
Bazille ?
Elle honore le peintre
montpelliérain le plus
célèbre. L’exposition regroupe
45 toiles sur les 55 peintes par
Bazille, mort très jeune : c’est
remarquable. Le partenariat
avec le musée d’Orsay et la
National Gallery de
Washington, qui recevront
l’exposition, donne une
visibilité internationale au
musée Fabre.
La Ville de Montpellier
s’associe également à la
Métropole pour une mise en
valeur de tout le patrimoine
Bazille, notamment son
habitation, le Mas de Méric. Et
l’hôtel de Cabrières accueille
une exposition “Montpellier au
temps des Bazille”.
Le rayonnement d’une
exposition est important ?
Bien sûr, la rétrospective
Caravage partagée avec
Toulouse a connu un immense
succès. L’exposition de la
photographe Elina Brotherus,
actuellement présentée au
Pavillon Populaire, va aller à
Turku en Finlande et donc faire
rayonner Montpellier. Je
rappelle que l’accès à cette
“Lumière venue du Nord” est
gratuit.
CULTURE
Conservatoire
hors les murs
■ Le président de la métropole détaille ses projets.
Vous êtes attaché à cette
gratuité ?
Elle est gravée dans le marbre.
90% des lieux culturels à
Montpellier sont en accès libre,
la Panacée, le Carré
Sainte-Anne, l’Espace
Bagouet... Le musée Fabre
dispose de certaines plages
horaires gratuites pour les
habitants de la Métropole.
la gare Saint-Roch où transitent
trois millions de voyageurs par
an. Nicolas Bourriaud, ancien
directeur artistique du Palais de
Tokyo, est chargé de sa
programmation. L’art
contemporain était jusqu’à
présent le maillon faible. La
première grande exposition
devrait avoir lieu en 2019. Ce
centre à vocation internationale
sera très ouvert à l’art actuel
qui propose souvent un regard
décalé et utile sur le monde.
Plus que jamais nous avons
besoin de cette distance qui
stimule la liberté de penser
dont je suis un adepte fervent.
Et le futur Centre d’art
contemporain, quand
ouvrira-t-il ?
Il est situé dans une zone
stratégique de la ville, près de
Avez-vous d’autres projets
muséaux ?
Oui, la Métropole va donner un
frère jumeau au musée
archéologique de Lattes : il sera
« La gratuité gravée
dans le marbre »
V. P.
créé sur le site magnifique de
l’oppidum de Murviel-lesMontpellier. Des synergies
seront instaurées entre ces
deux musées dédiés aux
Etrusques et aux populations
gallo-romaines.
Une réorganisation des
archives est également
couplée à un musée de la
Résistance.
Nous allons transférer les
archives contemporaines (elles
commencent en 1914) dans le
batiment désaffecté des
anciennes archives
départementales qui n’a besoin
que d’une légère réhabiliation.
C’est une démarche de ville
durable que de donner une
seconde vie à un bâtiment
public. Nous intégrerons sur ce
site, dans un espace de 400 m2,
« Le nouveau conservatoire à
rayonnement régional installé
dans l’ancienne maternité
réhabilitée permettra de
regouper les enseignements de
la musique, de l’art dramatique,
de la danse, jusqu’alors éclatés
sur plusieurs lieux. Il sera couplé
avec le théâtre du Hangar. Mais
le Conservatoire ira bien au-delà
des murs. Avec Bernard Travier,
vice-président de la Métropole
délégué à la culture, nous
préparons un maillage territorial,
pour développer la musique en
lien avec toutes les écoles et
l’Orchestre National de
Montpellier.
Quant à l’art dramatique, le
transfert des compétences entre
Département et Métropole,
devrait permettre une synergie
entre les nombreux théâtres qui
se trouvent sur le territoire, dont
le centre dramatique national de
Montpellier. L’art dramatique
possède une grande liberté
d’expression à laquelle je suis
attaché. Mais il est fragile et doit
être soutenu. »
le musée de la Résistance et de
la Déportation qui se trouve à
Castelnau-le-Lez. Il sera situé à
quelques mètres des geoles de
la Gestapo de Montpellier où
furent massacrés des résistants,
comme Jean Guizonnier,
capitaine des pompiers dont
une caserne porte le nom. La
présence de ce musée en ce
lieu symbolique aura beaucoup
de sens.
Des expositions y seront
organisées ?
Les archives peuvent nourrir
des expositions thématiques.
L’acquisition auprès du
Département de la chapelle
voisine des Récollets est
envisageable. La création d’un
espace participatif pourrait
servir aux habitants du quartier
et aux étudiants de l’Ecole des
Beaux Arts.
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Midi Libre midilibre.fr
■ Bazille au musée Fabre
SU45-
PANORAMA
5
45 tableaux de Frédéric Bazille ont été réunis au musée Fabre dont ses principaux chef-d’œuvre
Un parcours unissant portraits et paysages
Le découpage de l’exposition, à la fois chronologique et thématique, retrace l’évolution du peintre. Figures et visions de la nature alternent ou fusionnent.
C
omme le montrent les douze
séquences d’un parcours à
la fois chronologique et thématique, la vie de Bazille est
fortement structurée autour de
deux pôles : Paris et Montpellier.
D’un côté la trépidante vie parisienne et les amitiés artistiques, de
l’autre la propriété familiale de Méric et les paysages lagunaires
d’Aigues-Mortes, haut lieu de la
culture protestante languedocienne.
Durant l’été 1867, moment décisif
dans la courte carrière de l’artiste,
B
Bazille s’installe à Aigues-Mortes.
Confronté à la lumière éblouissante du midi, il adopte une palette
plus claire et une manière plus fluide. En Camargue, il se souvient
aussi des excursions avec Monet
sur les plages normandes.
Prêté par la National Gallery de
Washington,
Les
Remparts
d’Aigues Mortes, du côté du couchant témoigne de l’éclaircissement de la peinture de Bazille et
des effets de transparence.
D’autres vues d’Aigues-Mortes figurent dans l’exposition.
"
Négresse
Les deux versions de La
Négresse aux pivoines
sont exceptionnellement
réunies. Celle de la
National Gallery of Art de
Washington (ci-contre) a
rejoint la version du
musée Fabre. Ici Bazille
associe de façon
magistrale le portrait et la
nature morte.
La Robe rose
Paul Perrin, conservateur au musée d'Orsay et
co-commissaire de l’exposition, met en avant l'une
des réussites fondamentales de Bazille, qui dit sa
modernité, en 1864 : mêler un personnage au décor.
« Avec ce jeu de contrastes dans les couleurs et ce
jeu de valeurs entre le premier et le second plan qui
nous donne l'impression d'être dans le paysage. »
B Paysage
près du Lez
Une impression de chaleur émane de ce
Paysage au bord du Lez, un des derniers
tableaux. Cette composition classique
évoquant Corot et Poussin traduit une
solitude mélancolique. Comme si,
quelques mois avant sa mort en 1870,
Bazille pressentait son tragique destin.
@
@ L’Atelier
rue Condamine
Bazille partage les ateliers avec ses amis. Ici celui de
la rue de la Condamine où figurent Renoir (sur
l’escalier) et Manet (pinceau en main). Ce dernier a
ajouté de sa main la haute silhouette de Bazille.
Vue de village
Si l'on ne connaît pas le prénom de la jeune fille, on sait qu'il
s'agit de la fille des métayers de la famille Bazille, à
Saint-Sauveur. L'artiste réussit la prouesse d'attacher le regard,
qui alterne sans arrêt entre le visage, la robe et le village de
Castelnau en toile de fond. « Ce tableau est un modèle d'équilibre
dans la composition et dit le désir de Bazille de faire de
l'impressionnisme un art solide et durable comme l’art des
musées » dit Michel Hilaire, paraphrasant Cézanne.
6
FABR6
Midi Libre midilibre.fr
■ Bazille au musée Fabre
GROS PLAN
AOÛT 2016
“La réunion de famille” est la toile phare de l’artiste
Une livraison d’Orsay
Comment un chef-d’œuvre de 500 kg voyage d’un musée à l’autre.
L
’enfant du pays enfin roi
sur ses terres ! C’est au fil
d’un cérémonial, certes largement familier aux spécialistes et techniciens des lieux
mais pourvu d’un vrai suspense,
que le musée Fabre a dévoilé,
lors de son arrivée, début juin,
La réunion de famille, pièce majeure de l’exposition.
Dans la salle principale, aux
murs couleur crème, soyeux et
onctueux, et à l’éclairage zénithal, le tableau voisine avec La
Vue de village, La Robe rose, La
Terrasse, et quelques autres toiles réalisées dans le plein air de
la maison familliale de Méric.
On y voit aussi un tableau de
Monet dans la même veine :
Femmes au jardin, à Ville
d’Avray (1866) dont Bazille
s’inspire tout en prenant ses distances.
Frédéric
achètera
d’ailleurs le tableau à son copain Claude plus désargenté
que lui.
Un caisson en bois blond
isotherme d’une demi-tonne
La réunion de famille est arrivée là dans un énorme caisson
en bois blond d’une demi-tonne
en provenance du musée d’Orsay, dûment scellé.
« Vous ouvrez la caisse, s’il
vous plaît ! », commande Pauline Marlaud, régisseur d’œuvres
d’art. Les dévisseuses y mettent
du leur pour libérer le premier
panneau, des matelas en mous-
QUESTIONS A
Michel
HILAIRE
directeur du
musée Fabre
Quel est l’enjeu de cette
exposition ?
■ Il fallait être au moins cinq pour extraire le tableau de son cocon.
se rigide lui succèdent, qui laissent la place au plateau isotherme qui ferme la structure intérieure. Et le chef-d’œuvre de
Frédéric Bazille apparaît ! Pauline Marlaud l’inspecte alors avec
minutie, armée « d’une lampe à
constat » et sa lumière froide et
incisive. « Le bleu de la robe
avec des craquelures prématurées... Avec trois pieds, ici. Et le
cigare !», sourit l’experte du musée Fabre.
« Le tableau a été mis en caisse
au musée d’Orsay, avec un
constat d’état, une sorte de fiche
médicale ou carnet de santé,
qui a été établi lors de la ferme-
« Il invente la lumière »
Bazille arrive en mai 1867 à
Aigues- Mortes, fuyant Paris et
la difficulté d’exister dans le
milieu artistique car il vient
d’être refusé au Salon. « En
juin, il rejoint sa famille, installée
comme chaque été au domaine
de Méric », relate Michel Hilaire.
Il vient se ressourcer dans ce
lieu, qui « était alors la pleine
campagne, entourée de vignes
exploitées par son père,
viticulteur agronome
progressiste ». La réunion de
famille met en scène ses
parents, son frère, ses cousines
germaines, lui même... « Il a
déjà peint, en 1864, une autre
toile depuis cette terrasse, La
robe rose. C’est la première fois
qu’un Français réalise un
portrait de groupe en plein air. À
26 ans ! » Imprégné de culture
classique, influencé aussi par la
photographie, Bazille s’affirme là
comme précurseur des
impressionnistes, « en ce sens
qu’il invente la lumière. On a
l’impression d’être avec eux sur
cette terrasse. »
J.-M. M.
ture, explicite Michel Hilaire, le
directeur. Et là, le jeu consiste à
vérifier, à l’arrivée, si tout est
impeccable au niveau de la couche picturale. » Car le tableau
peut, en théorie, souffrir d’un
différentiel hygrométrique pendant le voyage, qui peut l’altérer. « Il peut aussi y avoir des
zones de soulèvement, des fragilités... » Une inquiétude quasi
formelle car la toile est pourvue
d’une vitre antireflet feuilletée
(isolante et anti-effraction) et
bénéficie de ce conditionnement étanche qui l’accompagne
durant ses escapades - nombreuses, cette année - et garantit la
“chaîne du froid”. « C’est vrai
que le caisson, réglé pour
conserver une température de
18-20˚ C et une hygrométrie de
50-52 %, peut endurer 72 heures
sur un tarmac en plein cagnard
avant de perdre un degré, indique encore le régisseur. Mais on
préfère éviter tout sinistre. »
Une fois le tableau sorti de son
cocon, il faut encore quatre à
cinq paires de bras pour l’installer sur un large diable et autant
de mains gantées pour maintenir et fixer au mur de sa villégiature estivale ses quelque 500 kg.
◗ À Paris. L’exposition de
Montpellier prendra ses quartiers au
musée d’Orsay, du 15 novembre 2016
au 5 mars 2017.
C’est une consécration définitive
du talent de Bazille. Sa courte
vie et le nombre limité de ses
œuvres auraient pu le
condamner aux oubliettes. Les
donations de sa famille au
Louvre et au musée Fabre, puis,
plus tard, au musée d’Harvard,
ont stimulé la curiosité des
chercheurs et des historiens
d’art, reconstituant le rôle de
Bazille dans la genèse de
l’impressionnisme.
L’exposition montre aussi
ses amis et ses maîtres.
Il était important de
contextualiser le milieu que
fréquente Bazille en arrivant à
Paris. Montrer les maîtres qu’il
admire : Delacroix, Courbet,
Corot, et Manet qui n’a que dix
ans de moins que lui et ouvre la
voie à la modernité. L’exposition
présente aussi les copains de
Bazille, Monet et Renoir
notamment, rencontrés dans un
monde artistique effervescent et
bohême brutalement stoppé par
la guerre de 1870 où Bazille
perdra la vie.
Ces jeunes peintres
s’influencent ?
L’exposition dévoile des
correspondances évidentes
entre Femmes au jardin, chef
d’œuvre pré-impressionniste de
Monet, et les toiles de Bazille
peintes à Méric, notamment la
La Réunion de famille.
On voit aussi comment avec le
Nu à l’épervier Bazille
révolutionne le thème du nu
masculin, comme Manet l’avait
fait avec le nu féminin. Le
rapprochement de Scènes d’été
avec Les Baigneurs de Cézanne
est également très instructif.
FABR7
Midi Libre midilibre.fr
■ Bazille au musée Fabre
PATRIMOINE
AOÛT 2016
7
Lieu de villégiature, il est la toile de fond de nombreux tableaux
Jours heureux au domaine de Méric
Un endroit à la grâce toute impressionniste qu’il faudrait encore valoriser.
N
ul ne guérit de son enfance... Comme Jean Ferrat
qui chantait « les napperons et les ombrelles,
qu’on ouvrait à l’heure du thé
pour rafraîchir les demoiselles,
roses dans leurs robes d’été »,
dans cette ode aux jours heureux enfuis, Frédéric Bazille a
gardé un attachement tout particulier à la maison familiale de
Méric, théâtre de sa jeunesse.
Un domaine aux portes de la ville et au pied du Lez, où le grand
peintre montpelliérain goûtait
aux joies et à l’innocence de
l’été avec son frère Marc et ses
cousines germaines adorées,
Thérène, Pauline et Camille.
Un cadre tendre et bucolique
Une villégiature où l’on fuyait la
chaleur ardente du centre-ville,
où l’on plongeait dans les eaux
fraîches et sages du fleuve et où
l’on fêtait, en août, la famille réunie, l’anniversaire du père, Gaston. Adulte, Bazille y vient se ressourcer, lire et méditer et surtout se consoler des avanies subies à Paris, quand le milieu artistique de la capitale peine encore à reconnaître son talent.
C’est là qu’il puise l’inspiration
■ Le domaine dans lequel a vécu Bazille reste un cadre bucolique. Mais nécessite une rénovation.
pour composer, au fil des murets de pierres sèches, des berges du cours d’eau ou du point
de vue sur Castelnau, les pièces
majeures de son œuvre : La réunion de famille, bien sûr, mais
aussi la Vue de village, La robe
rose, La terrasse ou le Pêcheur
à l’épervier. Aujourd’hui, le parc
municipal de Méric déroule son
cadre bucolique et champêtre
- au printemps, la grande plaine,
et ses brassées de coquelicots,
est un tableau impressionniste à
elle seule ! Avec une aire de jeux
pour enfants, des sentiers buissonniers sous les frondaisons et
de jolis aménagements pour cheminer au fil de l’eau.
Même si le domaine du peintre
(la demeure familiale, l’orangerie, sa terrasse et ses jardins)
reste le plus souvent fermés au
grand public. Propriété de la ville, « il ne pourra être ouvert que
Photo D. P.
lorsque les conditions de sécurité seront garanties, avance le
maire de Montpellier, Philippe
Saurel. Si l’orangerie a été réhabilitée, 3 M€ sont nécessaires
pour rénover la bâtisse... »
L’édile glissant encore qu’il faudrait que la collectivité cède enfin l’un de ses autres domaines
(deux sont actuellement à la vente) pour réunir les fonds nécessaires à l’opération. Mais ce serait rendre justice à l’enfant du
pays, grâce à qui les berges du
Lez ont été classées, en 2008, au
titre de site remarquable.
Itinéraire à Aigues-Mortes
■ “La Terrasse de Méric“ en 1866.
Association des Amis du Petit Palais de Genève
La Ville d’Aigues Mortes et le
Centre des monuments
nationaux ont signé une
convention avec Montpellier
Méditerranée Métropole pour
constituer un itinéraire Bazille
dans les décors où il réalisa
notamment trois tableaux
mettant en valeur les célèbres
remparts.
Les principales artères sont
pavoisées de bâches aux
couleurs de l’exposition.
Plusieurs lutrins présentant
des reproductions de tableaux
et de croquis sont disposés
dans la ville, et notamment sur
les remparts. Deux autres sont
positionnés sur le sentier
touristique de la Marette, là où,
lors de son séjour en 1867,
l’artiste avait immortalisé la
cité de Saint-Louis et ses
étangs.
Les lutrins sont également
destinés à valoriser le cadre
naturel. Le Syndicat Mixte de
la Camargue Gardoise est
d’ailleurs associé à cette
opération.
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