Avec Renoir et Monet, au musée Fabre de Montpellier, jusqu`au 16
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Avec Renoir et Monet, au musée Fabre de Montpellier, jusqu`au 16
Edition spéciale - Août 2016 Bazille, maître de la lumière Supplément gratuit - Ne pas jeter sur la voie publique Avec Renoir et Monet, au musée Fabre de Montpellier, jusqu’au 16 octobre 2016 5) $( 0)23 ") '% 16*1!-4 $#'% " () 58):%)0 1<++%28 $ '56:65/" *%=/--8! -% &605<;<-8 :8 &<)0;8--/85 80 -8 +.368 '%#58 "568)0 .)8 )<.,8--8 4</3 -76,6)8+8)0 :8 -76069 ! (!$"$,,# &+%'*) !&$%#" ." 04)34++4 54 .&2,/-4++21332+,4 *.%-#'&$+ '& ,"$+/&!!#&. ,%'#+&..($%& ,%+."/"!& ,(#.& '& !( )#!!& '& ,"$+/&!!#&. 2 FABR2 Midi Libre midilibre.fr ■ Bazille au musée Fabre BILLET Consécration Montpellier lui devait bien cet hommage. Cette reconnaissance à la fois picturale et populaire. Mémorielle et sensorielle. Car, figure de proue du néo-impressionnisme, Frédéric Bazille, fauché bien trop tôt par la camarde sur le champ de bataille franco-prussien, n’aura eu le temps de léguer qu’une cinquantaine de toiles. Mais quel héritage ! De la lumière à l’état pur. Celle qui, par un jeu maîtrisé des contrastes, révèle avec quiétude la campagne mélancolique, dévoile la douceur des lieux et la sensualité des personnages. Un talent fou qui n’a pas échappé au musée d’Orsay et à la National Gallery de Washington. Et qui, en cet été 2016, accueille Bazille dans son authentique jardin. Ph.P. PRATIQUE Au musée Fabre, boulevard Sarrail, jusqu’au 16 octobre (fermé le lundi). 04 67 14 83 00. Visites guidées adultes, du mardi au dimanche à 11h, 13h et 16h. Tarifs : adulte, 10 €, visite guidée, 13 €. « Bazille au musée Fabre » Edité par la société du Journal Midi Libre. Société anonyme au capital de 6 278 802 € Rue du Mas-de-Grille 34430 Saint-Jean-de-Védas. Principal actionnaire : Groupe La Dépêche du Midi SA Président-directeur général et directeur de publication : Bernard MAFFRE Directeur de la rédaction : Philippe PALAT Rédaction : Diane PETITMANGIN Jean-Marie GAVALDA L’ÉVÉNEMENT AOÛT 2016 Un parcours en douze séquences La jeunesse éclatante de l’impressionnisme Avec Monet et Renoir, Bazille ouvre la voie à la modernité. F auché par la guerre de 1870 juste avant son 29e anniversaire, Frédéric Bazille n’a laissé qu’une cinquantaine de toiles, des dessins, des carnets. Mais cette production s’inscrit dans un moment charnière, celui de La jeunesse de l’impressionnisme. Sous ce titre, le musée Fabre consacre une nouvelle et foisonnante rétrospective (la précédente date de 1992) au peintre le plus célèbre de Montpellier. Frédéric Bazille n’a évidemment pas la postérité de ses amis Monet, Renoir et Sisley, mais il est au cœur d’un mouvement qui va révolutionner la peinture. Ses tableaux ont des contrastes d’ombre et de lumière de plus en plus raffinés, sans atteindre la fragmentation de la touche qui sera la marque de l’impressionnisme. Bazille est cependant l’un des premiers à fusionner l’art du portrait et du paysage. C’est le grand défi de sa génération. Il va l’expérimenter avec La robe rose (1864) puis l’accomplir avec La vue de village (1868). Jeunes baigneurs sensuels Les deux toiles ont été réalisées à Méric. La résidence d’été de la famille Bazille à Montpellier sert de cadre à deux autres compositions majeures : La terrasse et surtout La réunion de famille, majestueux portrait de groupe d’une dynastie prospère et sévère où chaque individu se trouve fortement personnalisé dans un environnement champêtre idyllique. L’artiste se représente dans un coin de tableau. Il semble difficilement trouver sa place. Le mélancolique Frédéric préfère les berges verdoyantes du Lez, en contrebas de Méric, où se prélassent sensuellement de jeunes baigneurs dans Scène d’été. Il y peint aussi le Pêcheur à l’épervier, nu masculin vigoureux et troublant auquel l’artiste était très attaché. C’est dans ces baignades au bord de la rivière, où les trouées de lumière jouent avec les corps, que Bazille s’approche le plus de l’impressionnisme. Les douze séquences de l’exposi- ■ Baigneurs de “Scène d’été”. © PRESIDENT AND FELLOWS OF HARVARD COLLEGE REMOVE tion mettent en scène une vie d’artiste, brève et intense, placée sous d’heureuses influences. Corot inspire les premiers paysages dans la forêt de Fontainebleau. La Petite Italienne chanteuse des rues est dans la droite ligne du réalisme de Courbet. Manet et sa moderne Olympia l’accompagnent du début à la fin, d’un lascif Nu couché (1864) à La toilette (1870) en passant par La négresse aux pivoines, dont la rétrospective réunit les deux versions. L’étroit compagnonnage avec Monet fait aussi évoluer le style de Bazille. C’est lors d’un séjour en Normandie que le Montpelliérain capte la luminosité qui va éclater sur les Remparts d’Aigues-Mortes. Le partenariat de Michel Hilaire, directeur du musée Fabre, avec le musée d’Orsay et diverses institutions américaines permet d’insérer dans le parcours des chefs-d’œuvre rares de Monet, Cézanne, Sisley, Renoir, instaurant un passionnant dialogue à travers les paysages, les natures mortes et les ateliers partagés. La jeunesse éclatante de l’impressionnisme. ■ Voir également la vidéo sur le site Midilibre.fr PORTRAIT Panache Enfant de la haute société protestante montpelliéraine, Frédéric Bazille découvre Courbet, Delacroix et sa vocation de peintre dans la collection de son voisin Alfred Bruyas. Ses parents l’envoient faire médecine à Paris, mais il préfère l’atelier de Gleyre où il se lie d’amitié avec Monet et Renoir. Moins argentés, ces derniers bénéficient des largesses de Frédéric - il achète leurs toiles qui ne cesse de solliciter poliment les subsides de son père Gaston, gros exploitant agricole. Frédéric mène une vie de bourgeois-bohème. Avec ses copains rapins, il partage les ateliers, les débats enflammés au Café Guerbois. Élégant, Frédéric plaît aux femmes mais il est effrayé en découvrant un projet de mariage arrangé. Il restera célibataire. En août 1870, son engagement sous l’uniforme surprend ses proches. Il meurt le 28 novembre sur le champ de bataille de Beaune-la-Rolande. Son père ramènera sa dépouille. Le bourgeois-bohème avait aussi du panache. FABR3 Midi Libre midilibre.fr ■ Bazille au musée Fabre ENTRETIEN AOÛT 2016 3 Les projets muséaux du président de la Métropole « Montpellier rayonne » Q Philippe Saurel évoque la dimension internationale des expositions. ue représente pour vous l’exposition Bazille ? Elle honore le peintre montpelliérain le plus célèbre. L’exposition regroupe 45 toiles sur les 55 peintes par Bazille, mort très jeune : c’est remarquable. Le partenariat avec le musée d’Orsay et la National Gallery de Washington, qui recevront l’exposition, donne une visibilité internationale au musée Fabre. La Ville de Montpellier s’associe également à la Métropole pour une mise en valeur de tout le patrimoine Bazille, notamment son habitation, le Mas de Méric. Et l’hôtel de Cabrières accueille une exposition “Montpellier au temps des Bazille”. Le rayonnement d’une exposition est important ? Bien sûr, la rétrospective Caravage partagée avec Toulouse a connu un immense succès. L’exposition de la photographe Elina Brotherus, actuellement présentée au Pavillon Populaire, va aller à Turku en Finlande et donc faire rayonner Montpellier. Je rappelle que l’accès à cette “Lumière venue du Nord” est gratuit. CULTURE Conservatoire hors les murs ■ Le président de la métropole détaille ses projets. Vous êtes attaché à cette gratuité ? Elle est gravée dans le marbre. 90% des lieux culturels à Montpellier sont en accès libre, la Panacée, le Carré Sainte-Anne, l’Espace Bagouet... Le musée Fabre dispose de certaines plages horaires gratuites pour les habitants de la Métropole. la gare Saint-Roch où transitent trois millions de voyageurs par an. Nicolas Bourriaud, ancien directeur artistique du Palais de Tokyo, est chargé de sa programmation. L’art contemporain était jusqu’à présent le maillon faible. La première grande exposition devrait avoir lieu en 2019. Ce centre à vocation internationale sera très ouvert à l’art actuel qui propose souvent un regard décalé et utile sur le monde. Plus que jamais nous avons besoin de cette distance qui stimule la liberté de penser dont je suis un adepte fervent. Et le futur Centre d’art contemporain, quand ouvrira-t-il ? Il est situé dans une zone stratégique de la ville, près de Avez-vous d’autres projets muséaux ? Oui, la Métropole va donner un frère jumeau au musée archéologique de Lattes : il sera « La gratuité gravée dans le marbre » V. P. créé sur le site magnifique de l’oppidum de Murviel-lesMontpellier. Des synergies seront instaurées entre ces deux musées dédiés aux Etrusques et aux populations gallo-romaines. Une réorganisation des archives est également couplée à un musée de la Résistance. Nous allons transférer les archives contemporaines (elles commencent en 1914) dans le batiment désaffecté des anciennes archives départementales qui n’a besoin que d’une légère réhabiliation. C’est une démarche de ville durable que de donner une seconde vie à un bâtiment public. Nous intégrerons sur ce site, dans un espace de 400 m2, « Le nouveau conservatoire à rayonnement régional installé dans l’ancienne maternité réhabilitée permettra de regouper les enseignements de la musique, de l’art dramatique, de la danse, jusqu’alors éclatés sur plusieurs lieux. Il sera couplé avec le théâtre du Hangar. Mais le Conservatoire ira bien au-delà des murs. Avec Bernard Travier, vice-président de la Métropole délégué à la culture, nous préparons un maillage territorial, pour développer la musique en lien avec toutes les écoles et l’Orchestre National de Montpellier. Quant à l’art dramatique, le transfert des compétences entre Département et Métropole, devrait permettre une synergie entre les nombreux théâtres qui se trouvent sur le territoire, dont le centre dramatique national de Montpellier. L’art dramatique possède une grande liberté d’expression à laquelle je suis attaché. Mais il est fragile et doit être soutenu. » le musée de la Résistance et de la Déportation qui se trouve à Castelnau-le-Lez. Il sera situé à quelques mètres des geoles de la Gestapo de Montpellier où furent massacrés des résistants, comme Jean Guizonnier, capitaine des pompiers dont une caserne porte le nom. La présence de ce musée en ce lieu symbolique aura beaucoup de sens. Des expositions y seront organisées ? Les archives peuvent nourrir des expositions thématiques. L’acquisition auprès du Département de la chapelle voisine des Récollets est envisageable. La création d’un espace participatif pourrait servir aux habitants du quartier et aux étudiants de l’Ecole des Beaux Arts. 4 Midi Libre midilibre.fr ■ Bazille au musée Fabre SU45- PANORAMA 5 45 tableaux de Frédéric Bazille ont été réunis au musée Fabre dont ses principaux chef-d’œuvre Un parcours unissant portraits et paysages Le découpage de l’exposition, à la fois chronologique et thématique, retrace l’évolution du peintre. Figures et visions de la nature alternent ou fusionnent. C omme le montrent les douze séquences d’un parcours à la fois chronologique et thématique, la vie de Bazille est fortement structurée autour de deux pôles : Paris et Montpellier. D’un côté la trépidante vie parisienne et les amitiés artistiques, de l’autre la propriété familiale de Méric et les paysages lagunaires d’Aigues-Mortes, haut lieu de la culture protestante languedocienne. Durant l’été 1867, moment décisif dans la courte carrière de l’artiste, B Bazille s’installe à Aigues-Mortes. Confronté à la lumière éblouissante du midi, il adopte une palette plus claire et une manière plus fluide. En Camargue, il se souvient aussi des excursions avec Monet sur les plages normandes. Prêté par la National Gallery de Washington, Les Remparts d’Aigues Mortes, du côté du couchant témoigne de l’éclaircissement de la peinture de Bazille et des effets de transparence. D’autres vues d’Aigues-Mortes figurent dans l’exposition. " Négresse Les deux versions de La Négresse aux pivoines sont exceptionnellement réunies. Celle de la National Gallery of Art de Washington (ci-contre) a rejoint la version du musée Fabre. Ici Bazille associe de façon magistrale le portrait et la nature morte. La Robe rose Paul Perrin, conservateur au musée d'Orsay et co-commissaire de l’exposition, met en avant l'une des réussites fondamentales de Bazille, qui dit sa modernité, en 1864 : mêler un personnage au décor. « Avec ce jeu de contrastes dans les couleurs et ce jeu de valeurs entre le premier et le second plan qui nous donne l'impression d'être dans le paysage. » B Paysage près du Lez Une impression de chaleur émane de ce Paysage au bord du Lez, un des derniers tableaux. Cette composition classique évoquant Corot et Poussin traduit une solitude mélancolique. Comme si, quelques mois avant sa mort en 1870, Bazille pressentait son tragique destin. @ @ L’Atelier rue Condamine Bazille partage les ateliers avec ses amis. Ici celui de la rue de la Condamine où figurent Renoir (sur l’escalier) et Manet (pinceau en main). Ce dernier a ajouté de sa main la haute silhouette de Bazille. Vue de village Si l'on ne connaît pas le prénom de la jeune fille, on sait qu'il s'agit de la fille des métayers de la famille Bazille, à Saint-Sauveur. L'artiste réussit la prouesse d'attacher le regard, qui alterne sans arrêt entre le visage, la robe et le village de Castelnau en toile de fond. « Ce tableau est un modèle d'équilibre dans la composition et dit le désir de Bazille de faire de l'impressionnisme un art solide et durable comme l’art des musées » dit Michel Hilaire, paraphrasant Cézanne. 6 FABR6 Midi Libre midilibre.fr ■ Bazille au musée Fabre GROS PLAN AOÛT 2016 “La réunion de famille” est la toile phare de l’artiste Une livraison d’Orsay Comment un chef-d’œuvre de 500 kg voyage d’un musée à l’autre. L ’enfant du pays enfin roi sur ses terres ! C’est au fil d’un cérémonial, certes largement familier aux spécialistes et techniciens des lieux mais pourvu d’un vrai suspense, que le musée Fabre a dévoilé, lors de son arrivée, début juin, La réunion de famille, pièce majeure de l’exposition. Dans la salle principale, aux murs couleur crème, soyeux et onctueux, et à l’éclairage zénithal, le tableau voisine avec La Vue de village, La Robe rose, La Terrasse, et quelques autres toiles réalisées dans le plein air de la maison familliale de Méric. On y voit aussi un tableau de Monet dans la même veine : Femmes au jardin, à Ville d’Avray (1866) dont Bazille s’inspire tout en prenant ses distances. Frédéric achètera d’ailleurs le tableau à son copain Claude plus désargenté que lui. Un caisson en bois blond isotherme d’une demi-tonne La réunion de famille est arrivée là dans un énorme caisson en bois blond d’une demi-tonne en provenance du musée d’Orsay, dûment scellé. « Vous ouvrez la caisse, s’il vous plaît ! », commande Pauline Marlaud, régisseur d’œuvres d’art. Les dévisseuses y mettent du leur pour libérer le premier panneau, des matelas en mous- QUESTIONS A Michel HILAIRE directeur du musée Fabre Quel est l’enjeu de cette exposition ? ■ Il fallait être au moins cinq pour extraire le tableau de son cocon. se rigide lui succèdent, qui laissent la place au plateau isotherme qui ferme la structure intérieure. Et le chef-d’œuvre de Frédéric Bazille apparaît ! Pauline Marlaud l’inspecte alors avec minutie, armée « d’une lampe à constat » et sa lumière froide et incisive. « Le bleu de la robe avec des craquelures prématurées... Avec trois pieds, ici. Et le cigare !», sourit l’experte du musée Fabre. « Le tableau a été mis en caisse au musée d’Orsay, avec un constat d’état, une sorte de fiche médicale ou carnet de santé, qui a été établi lors de la ferme- « Il invente la lumière » Bazille arrive en mai 1867 à Aigues- Mortes, fuyant Paris et la difficulté d’exister dans le milieu artistique car il vient d’être refusé au Salon. « En juin, il rejoint sa famille, installée comme chaque été au domaine de Méric », relate Michel Hilaire. Il vient se ressourcer dans ce lieu, qui « était alors la pleine campagne, entourée de vignes exploitées par son père, viticulteur agronome progressiste ». La réunion de famille met en scène ses parents, son frère, ses cousines germaines, lui même... « Il a déjà peint, en 1864, une autre toile depuis cette terrasse, La robe rose. C’est la première fois qu’un Français réalise un portrait de groupe en plein air. À 26 ans ! » Imprégné de culture classique, influencé aussi par la photographie, Bazille s’affirme là comme précurseur des impressionnistes, « en ce sens qu’il invente la lumière. On a l’impression d’être avec eux sur cette terrasse. » J.-M. M. ture, explicite Michel Hilaire, le directeur. Et là, le jeu consiste à vérifier, à l’arrivée, si tout est impeccable au niveau de la couche picturale. » Car le tableau peut, en théorie, souffrir d’un différentiel hygrométrique pendant le voyage, qui peut l’altérer. « Il peut aussi y avoir des zones de soulèvement, des fragilités... » Une inquiétude quasi formelle car la toile est pourvue d’une vitre antireflet feuilletée (isolante et anti-effraction) et bénéficie de ce conditionnement étanche qui l’accompagne durant ses escapades - nombreuses, cette année - et garantit la “chaîne du froid”. « C’est vrai que le caisson, réglé pour conserver une température de 18-20˚ C et une hygrométrie de 50-52 %, peut endurer 72 heures sur un tarmac en plein cagnard avant de perdre un degré, indique encore le régisseur. Mais on préfère éviter tout sinistre. » Une fois le tableau sorti de son cocon, il faut encore quatre à cinq paires de bras pour l’installer sur un large diable et autant de mains gantées pour maintenir et fixer au mur de sa villégiature estivale ses quelque 500 kg. ◗ À Paris. L’exposition de Montpellier prendra ses quartiers au musée d’Orsay, du 15 novembre 2016 au 5 mars 2017. C’est une consécration définitive du talent de Bazille. Sa courte vie et le nombre limité de ses œuvres auraient pu le condamner aux oubliettes. Les donations de sa famille au Louvre et au musée Fabre, puis, plus tard, au musée d’Harvard, ont stimulé la curiosité des chercheurs et des historiens d’art, reconstituant le rôle de Bazille dans la genèse de l’impressionnisme. L’exposition montre aussi ses amis et ses maîtres. Il était important de contextualiser le milieu que fréquente Bazille en arrivant à Paris. Montrer les maîtres qu’il admire : Delacroix, Courbet, Corot, et Manet qui n’a que dix ans de moins que lui et ouvre la voie à la modernité. L’exposition présente aussi les copains de Bazille, Monet et Renoir notamment, rencontrés dans un monde artistique effervescent et bohême brutalement stoppé par la guerre de 1870 où Bazille perdra la vie. Ces jeunes peintres s’influencent ? L’exposition dévoile des correspondances évidentes entre Femmes au jardin, chef d’œuvre pré-impressionniste de Monet, et les toiles de Bazille peintes à Méric, notamment la La Réunion de famille. On voit aussi comment avec le Nu à l’épervier Bazille révolutionne le thème du nu masculin, comme Manet l’avait fait avec le nu féminin. Le rapprochement de Scènes d’été avec Les Baigneurs de Cézanne est également très instructif. FABR7 Midi Libre midilibre.fr ■ Bazille au musée Fabre PATRIMOINE AOÛT 2016 7 Lieu de villégiature, il est la toile de fond de nombreux tableaux Jours heureux au domaine de Méric Un endroit à la grâce toute impressionniste qu’il faudrait encore valoriser. N ul ne guérit de son enfance... Comme Jean Ferrat qui chantait « les napperons et les ombrelles, qu’on ouvrait à l’heure du thé pour rafraîchir les demoiselles, roses dans leurs robes d’été », dans cette ode aux jours heureux enfuis, Frédéric Bazille a gardé un attachement tout particulier à la maison familiale de Méric, théâtre de sa jeunesse. Un domaine aux portes de la ville et au pied du Lez, où le grand peintre montpelliérain goûtait aux joies et à l’innocence de l’été avec son frère Marc et ses cousines germaines adorées, Thérène, Pauline et Camille. Un cadre tendre et bucolique Une villégiature où l’on fuyait la chaleur ardente du centre-ville, où l’on plongeait dans les eaux fraîches et sages du fleuve et où l’on fêtait, en août, la famille réunie, l’anniversaire du père, Gaston. Adulte, Bazille y vient se ressourcer, lire et méditer et surtout se consoler des avanies subies à Paris, quand le milieu artistique de la capitale peine encore à reconnaître son talent. C’est là qu’il puise l’inspiration ■ Le domaine dans lequel a vécu Bazille reste un cadre bucolique. Mais nécessite une rénovation. pour composer, au fil des murets de pierres sèches, des berges du cours d’eau ou du point de vue sur Castelnau, les pièces majeures de son œuvre : La réunion de famille, bien sûr, mais aussi la Vue de village, La robe rose, La terrasse ou le Pêcheur à l’épervier. Aujourd’hui, le parc municipal de Méric déroule son cadre bucolique et champêtre - au printemps, la grande plaine, et ses brassées de coquelicots, est un tableau impressionniste à elle seule ! Avec une aire de jeux pour enfants, des sentiers buissonniers sous les frondaisons et de jolis aménagements pour cheminer au fil de l’eau. Même si le domaine du peintre (la demeure familiale, l’orangerie, sa terrasse et ses jardins) reste le plus souvent fermés au grand public. Propriété de la ville, « il ne pourra être ouvert que Photo D. P. lorsque les conditions de sécurité seront garanties, avance le maire de Montpellier, Philippe Saurel. Si l’orangerie a été réhabilitée, 3 M€ sont nécessaires pour rénover la bâtisse... » L’édile glissant encore qu’il faudrait que la collectivité cède enfin l’un de ses autres domaines (deux sont actuellement à la vente) pour réunir les fonds nécessaires à l’opération. Mais ce serait rendre justice à l’enfant du pays, grâce à qui les berges du Lez ont été classées, en 2008, au titre de site remarquable. Itinéraire à Aigues-Mortes ■ “La Terrasse de Méric“ en 1866. Association des Amis du Petit Palais de Genève La Ville d’Aigues Mortes et le Centre des monuments nationaux ont signé une convention avec Montpellier Méditerranée Métropole pour constituer un itinéraire Bazille dans les décors où il réalisa notamment trois tableaux mettant en valeur les célèbres remparts. Les principales artères sont pavoisées de bâches aux couleurs de l’exposition. Plusieurs lutrins présentant des reproductions de tableaux et de croquis sont disposés dans la ville, et notamment sur les remparts. Deux autres sont positionnés sur le sentier touristique de la Marette, là où, lors de son séjour en 1867, l’artiste avait immortalisé la cité de Saint-Louis et ses étangs. Les lutrins sont également destinés à valoriser le cadre naturel. Le Syndicat Mixte de la Camargue Gardoise est d’ailleurs associé à cette opération. 5$ .6)16++6 76 5&03-,6++0/110+36 7) #( .)01 $) '% /8*/",6 #!'% 3)+46 2$",6 : .0KH.9L : *2=?=2&B ,C/&$$>A +) *&,"#-" (' %)$#!!' 7?=JC&$6 9;L0A )G&$> 1G2 JN&$>A 9+H E HI. B"A QC2&1A "G1=> ?3!21CDA CB4G&1 CF>B $C 8C2J&B&8CJ&NR ?> %C2B ,C/&$$>A -2<2> ?> $3C2J&1J> 79P.+65 Q)NJN @ O%#('2CR? QC$C&1 7"G1=> ?3!21CD6 K QCJ2&B> MB)"&?J5 %!#,$)&&')" %(*',)""+#() %(,"!$!&) (!$"$,,# &+%'*) !%#$"& &+99+ +0,.?:9:.1 +?9 @+/.116+ -(:19)@'9 189:.187 ,8@ 7+ 4:1:?9%@+ -+ 78 &6796@+ +9 -+ 78 &.4461:/89:.1=$:@+/9:.1 <)1)@87+ -+? ,89@:4.:1+?=;+@3:/+ -+? 46?)+? -+ !@81/+* #77+ 2)1)>/:+ 5 /+ 9:9@+ -(61 ?.69:+1 >181/:+@ +0/+,9:.11+7 -+ 7("989* *.%-#'&$+ '& ,"$+/&!!#&. ,%'#+&..($%& ,%+."/"!& ,(#.& '& !( )#!!& '& ,"$+/&!!#&.