Les ventes aux enchères publiques judiciaires : Si les ventes aux
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Les ventes aux enchères publiques judiciaires : Si les ventes aux
Contribution de Maitre Nicolas Moretton, Commissaire-Priseur. Les ventes aux enchères publiques judiciaires : Si les ventes aux enchères publiques volontaires ont indéniablement dans l’opinion publique une bonne image à contrario les ventes judiciaires sont souvent vus comme un pis aller. Ainsi la vente aux enchères publiques serait un médium idéal lorsqu’un particulier voudrait vendre son bien à contrario dès que la vente prendrait un caractère judiciaires les actifs seraient bradés. Pourtant les choses ont pour le moins bien changé. On est loin des ventes en petit comité qui faisait la joie des marchands. Depuis plusieurs années les cpj ont su prendre le virage du numérique en créant deux sites extraordinaires que sont Drouot.com et interencheres.com dont la force aujourd’hui n’est pas assez utilisé par les juridictions. Pourtant l’on sait que la majorité des critiques qui ont pu être formulées sur les Tribunaux de Commerce sont sur la vente des actifs et la transparence associé à ces opérations. L’utilisation de la vente aux enchères publiques renforcée par les vecteurs numériques que nous avons crées est certainement la meilleure façon de faire fi définitivement de la critique populaire. 1-La publicité avant vente: Lorsque le commissaire-priseur judiciaire a à vendre des actifs une publicité significative est réalisée se déclinant de la manière suivante : .pub auprès des différents parties ( juge-commissaire, mandataire judiciaire, débiteur) .pub par les journaux d’annonces légales et le moniteur des ventes ou la gazette de Drouot en fonction de la nature de l’objet (industriel ou objet d’art) .éventuellement par des journaux spécialisés dans le domaine en question (par exemple le journal Transaction pour l’imprimerie, l’usine nouvelle pour les industries lourdes…) .pour les fonds de commerce, que la vente nous soit ou non confiée, l’on peut réaliser lors de l’inventaire un petit film que l’on mettra sur notre propre site internet ou que l’on transmettra au mandataire en charge de la vente. Cela aura plusieurs avantages : *cela permet au magistrat d’avoir une vision plus précise du bien à vendre et du prix que l’on peut raisonnablement en attendre *pour le débiteur c’est une façon certainement plus agréable de voir présenter son bien à vendre, plutôt que d’assister au spectacle désolant des vitrines qui sont assaillies d’affiches superposés des commercialisateurs. Affiches qui par ailleurs brouillent dangereusement le message pour tout éventuel pollicitant lui laissant penser que c’est le commercialisateur directement qui est en charge de la vente. *autre avantage, les vidéos permettent en sus à tout acquéreur potentiel une visite virtuelle des locaux, augmentant bien sur le nombre d’offres potentielles. On pourra d’ailleurs s’interroger pour savoir si d’autres modes alternatifs de cession des fonds de commerce ne pourraient pas être choisis par le Tribunal, comme c’est le cas de manière récurrente dans les Tribunaux du sud-est de la France. En effet, il est assez rare que l’acheteur final se présente de lui-même pour déposer une offre, étant le plus souvent accompagné d’une agence immobilière qui percevra au détriment de la procédure, une commission souvent importante sur son client. La vente aux enchères n’éviterait-elle pas en partie cet intermédiaire et surtout ne multiplierait-elle pas de manière significative le nombre d’offre à recevoir qui souvent se limitent à la part congrue? *enfin comme je vous l’indiquais la publicité de nos ventes est relayée de manière très importante notamment par deux sites internet et notamment le site Interencheres. Ce dernier regroupe toutes les ventes volontaires et judiciaires que les commissaires-priseurs judiciaires souhaitent voir publier, que ce soit des objets d’art, du matériel industriel ou encore des éléments incorporels : licence de taxi,licence IV,fonds de commerce… On y accède par tous les moteurs de recherche habituels ou par une application très simple sur son smartphone(que je vous invite à télécharger gratuitement au plus vite sur votre smartphone). Toute personne peut y rentrer des mots clés et recevra un mail d’alerte du site automatiquement dès qu’une vente d’un confrère fera apparaître dans sa publicité ou dans son listing de vente le mot choisi (ex :presse offset numérique, lampe Gallé, autographe de Rodin…). Evidemment tout ceci a un caractère exponentiel. Ainsi au fil des années on a pu se rendre compte notamment dans le cadre des ventes de matériels lourds d’exploitation, que les consultations que l’on a de nos publicités ne sont plus uniquement hexagonales mais bien internationales. Ce site a un autre intérêt primordial pour nous, c’est que nous publions dans une base intranet pour nos confrères nos résultats de vente. On arrive donc à calibrer au plus juste nos expertises, en se référant au dernier prix de vente obtenu par un confrère pour un matériel similaire ce qui nous évite de plus en plus tout sous ou surestimation. Quelques chiffres à retenir quant au flux d’Interencheres : *Il y à 2000 annonces de ventes aux enchères et 200.000 lots qui sont publiés par mois *1.000.000 de visiteurs uniques et 20 millions de pages vues par mois Ces chiffres sont tous les trimestres en croissance et c’est la même chose pour les consultations du site Drouot. On notera par ailleurs que le coût pour la procédure d’Interencheres.com est extrêmement faible souvent aux alentours de 100 à 200euros ( le coût d’Interencheres live étant en sus si l’on souhaite utiliser les services web cast que je vous expliquerai après). 2-Le déroulement de la vente : Nos publicités ayant été réalisées vient le jour de la vente, qui peut se dérouler dans différents endroits. *en premier lieu sur le site même de l’entreprise : c’est le cas le plus répandu lorsqu’il y a du matériel d’exploitation important (machines lourdes) ou du mobilier de peu de valeur (exemple mobilier de bureau) la finalité étant d’éviter au maximum les coûts notamment de transport. On réalise une visite habituellement une heure avant la vente ou pour des grosses structures, la veille de la vacation. Pour les très grosses ventes l’on prévoit même des pré-visites pour permettre aux industriels le déblocage des fonds par leurs banques, le payement étant je vous le rappelle comptant. L’équation à résoudre pour le cpj , étant de combiner la sécurisation du lieu parfois complexe et la visite pour permettre l’appréhension la plus juste aux différents adjudicataires de l’état du matériel. Je vous rappelle d’ailleurs que s’agissant de vente judiciaire, les ventes sont dîtes en l’état et que l’adjudicataire ne peut venir se plaindre à l’issue de la vente qu’un matériel ne fonctionne pas sauf à ce qu’il soit spécifiquement indiqué qu’il est en état de marche. Partant de ce principe on pourrait penser que le fait que la garantie des vices cachés ne puisse jouer dans nos ventes soit un frein pour obtenir le meilleur prix. Mais dans la pratique c’est plutôt l’inverse qui se produit. En effet, les adjudicataires savent que les biens sont issus d’entreprise, qui, un mois avant étaient en activité et que donc le risque de défectuosité est faible. **Avant de débuter la vente le cpj rappelle les conditions de la vente, les conditions d’enlèvement et les honoraires légaux perçus. Je rappelle d’ailleurs que ces honoraires sont de 12%HT perçus sur l’acheteur et de 5%HT sur le vendeur. Ils sont environ 50% inférieurs à ceux pratiqués sur le marché de la vente volontaire. La loi dîte MACRON va donner lieu à une révision tarifaire pour toutes les professions règlementées judiciaires, dont les montants ne nous sont pas connus pour nous à ce jour. Cependant tant les services de Bercy que ceux de l’Autorité de la Concurrence ont compris qu’il fallait absolument conserver des honoraires proportionnels pour notre profession. En effet, il est apparu clairement que c’est tant dans l’intérêt du vendeur que de celui des créanciers que le meilleur prix soit obtenu, ce qui ne serait pas le cas si l’on passait à une forfaitisation. De plus en plus souvent afin de fluidifier la vente et de répondre aux mieux aux obligations TRACFIN qui je vous le rappelle nous sont imposées de manière très rigoureuse, l’on demande aux adjudicataires de s’inscrire avant la vente. Ils doivent nous fournir ainsi leur KBIS, leur identité personnelle. Cela nous permet en sus de compléter peu à peu nos fichier acheteurs. *Autre lieu pour réaliser des ventes, nos hôtels des ventes ou une salle proche de l’usine expertisée. L’intérêt de ne pas être dans l’usine peut-être triple. Premièrement cela peut nous permettre de regrouper un ensemble de dossiers dans une même vente pour la rendre plus attractive (dans le cas d’une série de petits dossiers). Le second point est que l’on n’a pas toujours la meilleure visibilité de la salle et des acheteurs dans une usine ou au sein d’un fonds de commerce. Dans un hôtel de vente l’on est le plus souvent surélevé et l’on peut plus aisément rester le chef d’orchestre de la vente. Il est important de maîtriser sa salle sauf à perdre le contrôle de sa vente et la direction des enchères. C’est à nous de porter le prix à l’acheteur et les marchands nous testent souvent en début de vente sur ce point. Le troisième intérêt est que cela permet dans le cas où les conflits sociaux sont importants ou que le débiteur est dans une situation psychologique très compliquée, d’éviter que la vente aux enchères publiques constitue un traumatisme supplémentaire. Mais bien évidemment nous sommes à Paris et quel meilleur écrin que l’hôtel Drouot pour réaliser des ventes d’œuvres d’art significatif. (ex : vente KAPANDGI ARISOPHIL, vente FRAYSSE 24millions d’euros) *A tous ces types de ventes, l’on associe régulièrement des ventes dite webcast, qui permettent donc d’enchérir en live parallèlement à la vente en cours qui se réalisent en salle ou dans l’usine. Le sites interencheres et drouot ont donc décliné leur site originel en drouot live et interenchere live. On se retrouve donc dans nos ventes avec des web cam qui nous filment donc en direct et permettent à toute personne dans le monde d’enchérir contre la salle. Le coût pour la procédure d’un session en live est de l’ordre de 400euros. On arrive ainsi à parfois tripler le nombre de participants en ayant trois fois plus d’adjudicataires potentiels en live par rapport à ceux présents en salle. Les internautes peuvent même désormais déposer gratuitement des ordres dits secrets dont le montant est inconnu du commissaire-priseur judiciaire et pour lequel l’ordinateur enchérira jusqu’à la limite laissée par la personne ayant déposé son offre. Ainsi sous réserve d’un inventaire descriptif de qualité et des photographies en rapport l’on se rend compte que nombreux sont les acheteurs étrangers qui optent pour cette nouvelle solution en ne se déplaçant plus sur site le jour de la vente. Celà a la encore augmenté de manière très substantielle le panel d’acheteur potentiel, nous permettant de toucher souvent directement l’utilisateur final. La transparence de la vente en a été d’autant accrue et le prix a été maximisé de manière significative. Néanmoins tous ces outils ne peuvent être efficients que si est au marteau une personne ayant la parfaite connaissance de la valeur des objets. En effet, si l’estimation est trop haute cela risque de décourager tout acheteur et si l’estimation est trop basse on risque d’atteindre difficilement le vrai prix. Les cpj ont d’ailleurs a lutter contre ce que l’on appelle la révise dans une vente où plusieurs marchands qui sont intéressés par un même objet se mettent d’accord en début de vente pour enchérir ensemble d’une seule main sur un objet. Si la personne qui vend l’objet n’a pas la bonne connaissance de sa valeur elle risque de se faire piéger en lançant l’enchère trop bas et seule une personne aguerrie saura que le prix est juste et renoncera à descendre le prix de départ. .Un autre point important semble plaider une fois encore pour la vente aux enchères publiques. Il peut arriver que dans une vente ce ne soit pas l’objet en luimême qui attire l’attention des acheteurs mais le marché sur lesquels il peut déboucher. J’ai eu à réaliser il y a quelques années une vente aux enchères publiques d’une aléseuse très ancienne qui permettait de réaliser un certain type d’engrenage pour des chassis de train de la sncf. La machine en soit était très ancienne qui plus est ne pouvait réaliser d’autres pièces sauf à la réaménager de manière très importante la machine, ce qui aurait donné lieu à un coût exorbitant. Au vu de sa taille je l’avais estimé à 10.000euros en valeur de réalisation. Quatre enchérisseurs se manifestèrent :deux marchands et deux industriels. Les marchands s’arrêtèrent à 12.000euros mais les industriels enchérirent jusqu’à 80.000euros ne voulant pas que le marché conséquent qu’elle représentait puisse leur échapper. Une cession amiable des éléments corporels n’aurait jamais permis d’obtenir ce prix. .Pour accompagner de manière encore plus vive cette mutation vers le numérique nous avons également récemment fait des propositions au service de la chancellerie pour pouvoir dématérialiser notre pv électronique. Nous pourrions ainsi faire des ventes on line notamment lorsque nous serons en présence de stocks qui pour être vendus au mieux nécessiterait de fractionnés en de tout petits lots autorisant la vente pendant plusieurs semaines (exemple).