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LE DOUBLE JEU • INVENTION • SUJET 12 Le théâtre Pour réussir l’écriture d’invention : voir guide méthodologique. Le théâtre : voir lexique des notions. Niveau de langue : voir lexique des notions. La poésie 12_FRA060952_08C.fm Page 107 Jeudi, 26. juillet 2007 3:47 15 C O R R I G É Voici le travail de deux élèves qui ont composé en temps limité. © Hatier 2007 107 C O R R I G É Le roman L’autobiographie Les réécritures Acte III, scène IV CAMILLE, encore cachée. Voilà donc la raison d’un tel rendez-vous. Jeter ma bague dans l’eau et prendre la main de Rosette dans la sienne ! Elle s’approche de la fontaine et récupère la bague. Il sait que je l’ai vu, c’est sûr, sinon pourquoi un tel geste ? Le pauvre enfant, j’ai dû le blesser hier, au même endroit ; c‘est donc ici qu’il a voulu se venger de moi. Amère. Mais je suis généreuse, allons trouver Rosette. Puisque Perdican ne veut point de cette bague, c’est à Rosette que je la donnerai ! La voilà qui arrive, elle vient sûrement pour revoir les lieux d’une si douce et si hypocrite déclaration ! Rosette s’avance doucement ; elle aperçoit Camille, se trouble, fait mine de repartir. CAMILLE. Rosette, Rosette, ma douce sœur de lait ! Tu me vois, je suis à la fontaine, et tu ne me rejoins point ? M’éviterais-tu ? Rosette la rejoint et s’assoit finalement auprès d’elle. Feignant l’innocence. Tu ne dis mot ? Quel ennui te chagrine ? ROSETTE. Madame, je ne sais comment devant vous me tenir. CAMILLE. Allons, fais comme à ton habitude. Révélant son jeu. Tu peux même me parler comme une grande dame : n’épouses-tu point Perdican ? ROSETTE. Vous savez donc ? N’est-ce pas merveilleux ? Je ne savais comment vous le confier, j’avais trop peur de vous voir me mépriser. CAMILLE. Te mépriser ? Ma petite Rosette, ma petite sœur de lait, non, je ne te méprise point. Je tremble pour toi ! Quelle folie que de croire en la parole de Perdican ! ROSETTE. Comment, Madame ? Que voulez-vous dire ? CAMILLE, lui prenant la main. Regarde l’eau claire de cette fontaine, Rosette… Celle où tu te reflétais tout à l’heure, un beau seigneur à tes côtés. Regarde les marguerites, et cette herbe, et ces arbres alentour… Les Convaincre… Devoir 1 12_FRA060952_08C.fm Page 108 Jeudi, 26. juillet 2007 3:47 15 LE DOUBLE JEU • INVENTION • SUJET 12 vois-tu ? Sens-tu leur parfum ? Enfin ! Entends-tu le chant des oiseaux, Rosette ? ROSETTE, libérant sa main. Vous me faites mal, Madame. CAMILLE. Mais écoute, Rosette ! Écoute donc ! Que disent-ils ? ROSETTE. Madame, dans quel émoi vous trouvez-vous ? Cette fois, c’est Rosette qui prend les mains de Camille dans les siennes. Cette dernière retrouve peu à peu son calme. CAMILLE, se libérant. Rosette ! Oh, Rosette. Pardonne-moi, je ne voulais pas t’effrayer. S’adossant à un arbre. Je voulais seulement prévenir ton malheur. ROSETTE, se levant. Madame, quel malheur enfin ? Le seigneur Perdican m’aime, il m’a donné sa chaîne en or, et il a jeté… Elle se tait, confuse. CAMILLE, doucement. Eh bien Rosette ? Il a jeté ma bague dans l’eau, n’estce pas ? C’est bien cela que tu cherches à me dire ? Rosette, interdite, hoche la tête. Elle se rassoit. CAMILLE, froidement. Écoute, ma Rosette, ce que disent les oiseaux, les arbres. Écoute ce que crie ce lieu tout entier : il crie qu’hier, à l’endroit où tu te tiens, c’était moi qui m’y tenais assise. ROSETTE, faiblement. Non !… CAMILLE, de même. C’était à moi que Perdican faisait la cour. ROSETTE. Non ! CAMILLE. Et tous affirment qu’en ce moment même, en t’utilisant, Rosette, il me la fait toujours ! ROSETTE, en pleurs. Non ! Non ! … C’était hier ! CAMILLE, avec douceur. Rosette, je ne voulais pas te blesser… Mais Perdican te trompe, m’entends-tu ? C’est moi qu’il aime ! Lorsqu’il t’a donné sa chaîne d’or, c’est autour de mon cou qu’il la passait. ROSETTE, dans un dernier espoir. Et lorsqu’il a jeté votre bague ? CAMILLE, d’une voix sourde. C’était toi qu’il noyait. ROSETTE, révoltée. Non ! C’est faux ! Perdican m’aime ! Pourquoi me troublez-vous et m’accablez-vous de mensonges ? Pourquoi me voudrait-il du mal ? Il me l’a dit : je serai sa femme, et nous prendrons racine ensemble dans la sève du monde tout-puissant. CAMILLE, troublée. Comme tu l’aimes ! Comme tu bois ses paroles et comme tu les apprends bien ! Au nom de cet amour, tu acceptes la souffrance ? ROSETTE. Je ne souffrirai pas. CAMILLE, recouvrant son calme. Assurément. À part. Tu en mourras. ROSETTE. Je l’aime. CAMILLE. Oui. ROSETTE. Et vous, vous ne l’aimez pas ! Laissez-nous, Madame. Laisseznous être heureux. © Hatier 2007 108 C O R R I G É CAMILLE reste cachée un instant, puis, d’un ton moqueur mêlé de dépit. Félicitations, Rosette. Elle sort de sa cachette. Je suis bien aise de voir que tu vas bientôt te marier. Quelle touchante image d’amour vous offriez tantôt, mon cousin et toi, vraiment ! ROSETTE, interloquée. Comment, vous étiez là ? CAMILLE, d’un ton dur, brusquement. Crois-tu ? Silence. Oui, j’y étais, et après ? Vas-tu m’en faire le reproche, chère Rosette ? Elle rit, s’arrête soudain. Cela serait plaisant. Ne serais-je pas en droit de me plaindre, Rosette ? Après tout, Perdican m’était promis… Et voici que je te trouve avec lui, échangeant de doux propos. Oui, ne serais-je pas en droit de me plaindre ? Mais… elle sourit… je ne t’en veux pas. Grâce à Dieu, je n’aime pas Perdican. ROSETTE : Alors pourquoi êtes-vous restée à nous écouter ainsi ? En quoi cela pouvait-il vous intéresser ? CAMILLE : Tu n’es pas la seule à qui Perdican donne des rendez-vous, Rosette. Tu ne t’es pas demandé pourquoi Perdican parlait si fort, n’est-ce pas ? Pourtant, les serments d’amour se font dans l’ombre discrète et complaisante, au détour d’un couloir, ou à travers un rideau. Un murmure évanescent et fugitif, couvert par le bruissement des feuilles et le souffle du vent… Oui, pourquoi Perdican parlait-il si fort ? Veux-tu aussi savoir pourquoi il a jeté ma bague, pourquoi il t’a félicitée de ne pas être religieuse, pourquoi il le clamait à tous les vents ? © Hatier 2007 109 C O R R I G É Le théâtre Convaincre… Devoir 2 Le roman CAMILLE, moqueuse. Très bien. Je t’aurai prévenue. J’abandonne. ROSETTE, se jetant à genoux. Oh, Madame ! En épousant Perdican, je ne voulais pas que vous me haïssiez ! CAMILLE, lui prenant les mains. Ne dis plus rien ! Je ne te hais point, je voulais juste… te protéger de son orgueil, car je pressens déjà la triste issue de cette joute amoureuse. ROSETTE, qui ne comprend pas. Madame, je ne me bats pas contre Perdican ! CAMILLE, le regard perdu dans le vide. Non, non… aussi s’agissait-il d’autres combattants. Sortant la bague de sa poche. Tiens, Rosette. Voici un cadeau. ROSETTE, reconnaissant la bague. Mais, Madame ! CAMILLE, la lui passant au doigt. N’aie crainte, c’est juste pour te rendre encore plus belle que tu ne l’es déjà. Regarde-toi, une vraie reine ! Va, rejoins ton roi, et ensemble tâchez de trouver le bonheur. ROSETTE, s’inclinant. Merci, Madame. Elle sort. CAMILLE, seule. Perdican, qu’as-tu fait ? Elle sort. L’autobiographie 12 Les réécritures LE DOUBLE JEU • INVENTION • SUJET La poésie 12_FRA060952_08C.fm Page 109 Jeudi, 26. juillet 2007 3:47 15 12_FRA060952_08C.fm Page 110 Jeudi, 26. juillet 2007 3:47 15 LE DOUBLE JEU • INVENTION • SUJET 12 ROSETTE, tête baissée, terrassée, à voix basse. Je vous en prie, non. CAMILLE : Parce que j’étais derrière vous, et qu’il le savait ! Parce que je l’ai éconduit, et que son superbe orgueil l’a poussé à se venger de moi. Il a voulu m’humilier : il a jeté ma bague dans l’eau. Sourire amer et désabusé. N’est-il pas heureux que ce n’ait pas été notre alliance ? Elle se reprend. Hé bien, s’il a cru me blesser ainsi, il se trompe ! Ce n’est pas sa trahison infâme qui m’exaspère, non ! Plus bas. Non… ROSETTE : Alors pourquoi ? Pourquoi vous acharnez-vous sur moi ? CAMILLE : Je ne m’acharne pas ! Ton plus doux. Je pense à toi, Rosette. Je ne peux supporter l’idée qu’il se soit joué de toi d’une manière si désinvolte. Tu étais l’instrument de ses mesquines instigations… Ce qu’il t’a fait est méprisable ! Car tu as été prise, n’est-ce pas, Rosette ? Tu l’as cru aussitôt, et tu t’es réjouie, et tu ne croyais pas à ton bonheur. Oh, comme tu étais prête à l’aimer ! Comme il te laissait croire qu’il t’aimait ! Plus bas. Comme il semblait sincère ! ROSETTE, désespérément. Mais pourquoi ne le serait-il pas ? Il m’a dit qu’il m’aimait, pourquoi ne le croirais-je pas ? Je n’attendais rien de lui, rien ! Et pourtant il m’a donné rendez-vous, ici, près de la petite fontaine… Il m’a même donné sa chaîne d’or… CAMILLE : Et moi, je lui avais donné cette bague, qu’il a jetée. Elle se penche et la récupère dans la source. Elle s’y mire quelques secondes. Vois ce que vaut un gage d’amour à ses yeux. Silence. Sais-tu ce que c’est que l’amour, Rosette ? C’est la rage au cœur quand on t’a humiliée, de beaux yeux égarés devant la trahison, des larmes qui brouillent l’eau de la source quand l’autre n’est plus là, appuyé sur toi. Et tu meurs de ta patience, que tu as usée à scruter les eaux noires. Écoute ! Le vent hurle. Tout au long de cette tirade, Rosette, le visage décomposé, change peu à peu d’expression, et se redresse. Son regard est empli d’une tristesse infinie, mais elle a le visage de ceux qui n’ont plus que la vie à perdre. ROSETTE, la regarde avec attention, tristesse et douceur. Oui, il hurle. CAMILLE, détournant brutalement la tête, la dévisage, le regard inquisiteur. Que veux-tu dire ? ROSETTE : Je ne suis pas rompue à ce jeu, comme vous. CAMILLE : Rompue à quel jeu ? ROSETTE : Vous parliez de « superbe orgueil » tantôt. Je ne connais pas cela, moi. Je ne peux pas me le permettre comme vous. Cet orgueil, pour l’instant, c’est dans vos yeux que je le vois. CAMILLE : C’est faux ! ROSETTE : Pourquoi ne pas l’avouer ? Je le vois bien, moi, et vous savez pourtant bien que je ne peux prétendre à plus de clairvoyance que vous. Pourquoi vous appliqueriez-vous à me harceler ainsi ? Pourquoi, sinon pour © Hatier 2007 110 C O R R I G É Le théâtre ne pas ménager votre orgueil ? Camille veut protester. Oh, il est inutile de le nier, ne voyez-vous pas que je sais ? Je vous connais. C’est moins parce qu’il m’a trompée que parce qu’il vous a humiliée que vous voulez me dessiller les yeux. Mais, mon Dieu ! pourquoi vous en prendre à moi, et non pas à lui ? Pourquoi ne pas vous en prendre à vous-même ? CAMILLE : Tu vas trop loin, Rosette ! ROSETTE : Aller trop loin, moi ? N’est-il pas juste que j’aie mon tour ? N’ai-je pas sujet de me plaindre, moi aussi ? CAMILLE : Rosette ! ROSETTE, plus fort. N’ai-je pas sujet de me plaindre ? CAMILLE : Va donc demander cela à Perdican ! Court silence. Et que te répondra-t-il ? Pourra-t-il t’annoncer en face, en plongeant son regard dans le tien comme il l’a fait il y a quelques minutes, que ce n’est pas toi qu’il aime ? Que son beau discours ne t’était pas adressé ? Et Dieu, qu’il était beau… Elle reste pensive quelques instants, puis, d’un ton définitif. Trop pour être sincère. ROSETTE : Et pourquoi devrait-il l’être ? Vous n’avez pas à en décider ! CAMILLE, cruellement. C’est juste. Il finira bien par te le dire de lui-même. Et lorsqu’il aura bien piétiné ton cœur, souviens-toi de moi. En attendant, je serais ravie de m’être fourvoyée, crois-moi. ROSETTE, se lève et se dirige vers la coulisse. Je vous plains. CAMILLE, hausse le sourcil et, d’un air dédaigneux. Tu me plains !!! Pourquoi ? Il n’y a pas lieu, Rosette… Rosette s’arrête, se retourne à demi, ouvre la bouche pour parler, mais ne dit rien. Elle sort. Camille reste, prostrée, assise sur le rebord de la fontaine, le regard dans le vague. Elle ferme les yeux, une larme coule le long de sa joue. Convaincre… 12 Le roman LE DOUBLE JEU • INVENTION • SUJET La poésie 12_FRA060952_08C.fm Page 111 Jeudi, 26. juillet 2007 3:47 15 © Hatier 2007 111 C O R R I G É Les réécritures Cette scène, Musset l’a écrite pour vous… Il s’agit de la scène 6 de l’acte III de la pièce : Rosette et Camille se rencontrent dans la chambre de Camille… Lisez-la et comparez avec les deux devoirs. L’autobiographie Document annexe