Intensification par prépositions et par préfixes: étude comparée

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Intensification par prépositions et par préfixes: étude comparée
Silvia Adler
Maria Asnes
Institutions:
Silvia Adler
Haifa University
French Department
Mount Carmel
Haifa 31905 Israel
Maria Asnes
Bar Ilan University
French Department
Ramat Gan 59200 Israel
Adresses personnelles :
Silvia Adler
30, Rotshild st. Apt.26
77516 Ashdod
Israel
Maria Asnes
5, Mish’ol Gil st. Apt 21
44281 Kfar Saba
Israel
[email protected], [email protected] Adler :
[email protected] Asnes :
Intensification par prépositions et par préfixes: étude comparée
En français il existe des prépositions et des préfixes qui peuvent véhiculer une signification scalaire1:
- Prépositions: jusqu’à, au-delà de, au-dessus de, au-dessous de
- Préfixes: sur-, sous-, mini-, maxi-, super-, hyper-, hypo-, ultra-, extraCette étude se propose pour but de contraster une préposition et un préfixe considérés comme quasisynonymes: au-delà de et sur-.
(1) Doué au-delà de toute mesure
(2) Surdoué
Notre but est, premièrement, de rendre compte des différences sémantiques entre les deux types de
modification scalaire – par préfixe et par préposition -, observés dans les exemples (1) et (2) ci-dessus.
Une différence majeure entre la modification scalaire opérée par les morphèmes libres (prépositions) et les
morphèmes liés (préfixes) réside dans le type de l’échelle selon laquelle est intensifié le prédicat. Plus
1
Cette étude s’inscrit dans le cadre théorique de la sémantique de la scalarité qui a profité d’une recherche approfondie ces
dernières années (Rivara 1990 et 1993, Kennedy et McNally 1999, Piñón 2000, Kennedy 2001, Whittaker 2002).
précisément, dans le cas des prépositions, le prédicat modifié est évalué selon une échelle explicitement
posée, qui, comme dans l'exemple (3), est susceptible d'être externe aux propriétés lexicales du prédicat (cf.
Adler & Asnes 2007):
(3)
Echelle épistémique (externe):
aimer au-delà de toute expression
(4)
Echelle quantitative (50kg):
maigrir au-delà de 50 kg
(5)
Echelle lexicale (adoration: relation hyperonyme /hyponyme):
aimer au-delà de l’adoration
Contrairement aux prépositions, la modification scalaire par préfixes se base exclusivement sur les
propriétés lexicales du prédicat modifié, et il n’y a aucune autre échelle qui soit explicitement posée (cf.
exemple (2), où la modification exploite l’échelle inhérente du prédicat doué).
En plus, nous opposerons au-delà de à sur- afin de montrer que ces morphèmes, qui paraissent quasisynonymes, déclenchent des inférences pragmatiques différentes:
(6)
a. Surqualifié
b. Qualifié au-delà de ce qu'on pouvait attendre
Dans le marché du travail, si une personne est surqualifiée, elle risque de ne pas être recrutée. Par contre, si
elle est "qualifiée au-delà de ce qu’on pouvait attendre", elle a probablement laissé une bonne impression sur
les embaucheurs, ce qui augmente ses chances d'être acceptée.
Il paraît que sur- déclenche une inférence négative qui est liée à la notion d’excès tandis que au-delà de
dénote tout simplement un haut degré. L’excès et le haut degré sont tous deux des dénotations évaluatives et
en tant que telles, établissent une comparaison par rapport à une certaine norme sur une échelle de référence
qui est dépassée. Pourtant ces deux dénotations diffèrent par leur orientation pragmatique : contrairement au
haut degré, l’excès implique un dépassement négatif ou problématique d’une limite (cf. Amiot 2004).
Deuxièmement, nous examinerons les types de prédicats qui acceptent la modification scalaire par
prépositions et par préfixes. Les GPréps scalaires introduits par la préposition au-delà de dénotent un haut
degré et n’imposent aucune restriction sur la catégorie syntaxique du prédicat modifié tant que ce dernier est
scalaire: aimer/ heureux/ une réussite au-delà de toute expression. Par contre, le préfixe sur- peut dénoter à
la fois un haut degré et un excès selon la catégorie syntaxique du prédicat.
Bibliographie
Adler, S, M. Asnes, 2007. “Le monde d’au-delà : une dimension scalaire”, Travaux de linguistique, 54.1, 2942.
Amiot, D. 2004. “Haut degré et préfixation”, in Lefeuvre F., M. Noailly (éds) Intensité, Comparaison, Degré
1, Travaux Linguistique du Cerlico, 17, 91- 104.
Kennedy, C. 2001. “Polar opposition and the ontology of ‘degrees’”, Linguistics and Philosophy, 24, 33-70.
Kennedy, C. and L. McNally, 1999. ‘From Event Scales to Adjective Scales: Degree Modification in
Deverbal Adjectives’, in Proceedings of SALT 9, Ithaca, Cornell Linguistic Club Publication.
Piñón, Ch. 2000. “Happening gradually”, in Proceedings of the Berkeley Linguistics Society, 26.
Rivara, R. 1990 Le système de la comparaison, Paris, Minuit.
Rivara, R. 1993 "Adjectifs et structures sémantiques scalaires", L'information grammaticale, 58, 40-46.
Whittaker, S. 2002. La Notion de gradation. Application aux adjectifs, Publications Universitaires
Européennes, Peter Lang.

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