association francaise de chirurgie - Chirurgie

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association francaise de chirurgie - Chirurgie
SOMMAIRE
Président :
J.-P. PALOT (Reims)
Modérateurs :
J.-M. REGIMBEAU (Amiens)
J.-Y. MABRUT (Lyon)
1. Classification « pour l’interne en chirurgie »
K. AMROUN (Reims), R KIANMANESH (Reims)
2. Abcès Amibien - Abcès hépatiques « non lithiasiques – non biliaires » - abcès
sur lésions pré-existantes (kystes surinfectés, métastases) - abcès d’origine
portale (pyéphlébite)
E. RAGOT (Paris), O BRUNO (Clichy)
3. Abcès hépatiques en rapport avec une « lithiase biliaire »
S. DEGUELTE-LARDIERE (Reims), O BRUNO (Clichy)
4. Abcès hépatiques compliquant une transplantation hépatique, un
traumatisme, une chimio-embolisation artérielle et/ou une radiofréquence
S. DOKMAK (Clichy), D. SOMMACALE (Reims), A. SIBERT (Clichy)
5. Conduite à tenir et Traitement
R KIANMANESH (Reims), A SIBERT (Clichy)
FCC 1 – Que faire devant un abcès hépatique ?
Abcès Amibien - Abcès hépatiques « non lithiasiques – non
biliaires» - abcès sur lésions pré-existantes (kystes surinfectés,
métastases) - abcès d’origine portale (pyéphlébite)
E Ragot (Paris), O Bruno (Clichy)
Les abcès hépatiques (AH) incluent les abcès bactériens, fungiques (exceptionnels) et
parasitaires. Les abcès non parasitaires du foie sont une entité rare dont l’incidence est
difficile à définir et, est variable d’un pays à l’autre. Huang et al. décrivent une fréquence de
20/ 100 000 admission dans un hôpital américain dans les années 80-90 ; avec une
augmentation de cette incidence par rapport aux années 70 [1]. Cette situation rare est
néanmoins grave, avec une mortalité qui varie selon les séries de 6 à 15 %, même dans les
études les plus récentes [2-4].
Les facteurs prédisposant sont le diabète, l’HTA, l’alcoolisme, la pathologie cancéreuse et
l’immunosuppression [5]. Ils peuvent être uniques ou multiples, avec une taille allant de
quelques millimètres à plusieurs centimètres.
Imagerie
En imagerie tous les aspects sont possibles. Ils varient en fonction du stade de
développement de l'abcès. A la phase précoce, l'abcès peut apparaître hyperéchogène en
échographie. Cette phase est suivie d'une phase de liquéfaction où l'abcès devient hypo
voire anéchogène. Le contour est le plus souvent irrégulier avec un renforcement postérieur.
De l'air peut être mis en évidence à l'intérieur de la cavité abcédée. De même, en TDM
l'aspect est variable : hypodense et homogène ou hétérogène multicloisonné; l'existence
d'air est un bon argument en faveur de la présence de bactéries anaérobies. On note le plus
souvent en périphérie de la lésion une prise de contraste et des troubles de perfusion avec
visibilité des vaisseaux notamment branches portales.
Abcès amibien
Entamoeba histolytica (EH) est majoritairement en cause dans les AH parasitaires. L’OMS
estime qu’EH est responsable de 50 millions d’infections et 100 000 décès par an [6]. Même
si les abcès hépatique amibiens (AHA) sont la complication extra-intestinale la plus
fréquente de l’infection par EH (infection qui passe souvent inaperçue), ils ne surviennent
que dans 3 à 9% des cas [6, 7]. Les hommes de 18 à 50 sont les plus touchés (M :F 10 :1)
[8].
FCC 1 – Que faire devant un abcès hépatique ?
Physiopathologie
Après ingestion, le kyste transite dans l’intestin où il se transforme en méta-kystique et
débute une division cellulaire et peut atteindre le foie par voie portale.
Dans le foie l’abcès se forme par infarctus parenchymateux du à l’occlusion vasculaire par le
parasite, destruction du parenchyme hépatique et réaction immunologique inappropriée. La
nécrose liquidienne débute au centre de la lésion et forme une cavité remplie de sang et de
nécrose (« pus chocolat sans odeur »). L’AHA est souvent périphérique proche de la capsule
de Glisson. Il est unique dans 80% des cas et atteint le foie droit dans plus de 70 % des cas.
Diagnostic clinique et biologique
Le diagnostic doit toujours être évoqué en cas d’AH survenant chez un patient ayant
séjourné dans une zone d’endémie, même en cas de séjour ancien. L’AHA survient après
l’infection intestinale mais le patient se souvient rarement de l’épisode de diarrhée.
Le début est classiquement brutal avec une fièvre importante oscillante associée à des
frissons et des sueurs profuses, puis à une douleur de l’hypochondre droit. D’autres
symptômes tels que l’anorexie, la perte de poids, une toux non productive, des nausées et
des vomissements et des diarrhées peuvent être présents [9]. La forme typique associe une
hépatomégalie douloureuse et fébrile à une atteinte pleuro-pulmonaire de la base droite et
une diarrhée [9].
Le
diagnostic
immunologique
nécessite
l’association
de
deux
méthodes
:
immunofluorescence indirecte (seuil de positivité) 1/160), et hémagglutination passive (seuil
> 1/128) ou méthode immunoenzymatique (seuil > 1/400). En début d’infection, la sérologie
peut être négative et doit être renouvelée 2 à 3 semaines plus tard [10-12].
Aspect radiologique
Les abcès sont surtout dans le lobe droit (70 % des cas), plutôt de grande taille (> à 10 cm)
et le plus souvent unique (80% des cas) [12-14]. En échographie : A la phase initiale, il s’agit
d’une zone hypoéchogène sans limites nettes, hétérogène, puis homogène, sans
renforcement postérieur. Le passage de la sonde à son aplomb est souvent douloureux. Puis
l’abcès évolue vers sa forme caractéristique définie par une lésion bien limitée,
hypoéchogène homogène avec un renforcement postérieur souvent à la périphérie du foie.
En TDM la masse est bien limitée, à contenu hypodense. L’existence de cloisons de refend
est possible. Lorsque la nécrose évolue lentement, on peut observer des formations
hyperéchogènes en amas ou en stries épaisses. Dans environ 20% des cas il s’agit d’abcès
multiples envahissant les 2 lobes [15].
FCC 1 – Que faire devant un abcès hépatique ?
Traitement
Le pronostic de l’AHA a radicalement changé depuis l’introduction du métrodinazole avec
une mortalité qui est passé de 2 à 90 %. Le traitement associe un amoebicide tissulaire
comme le métronidazole (Flagyl 500 mg x 3/j per os pendant 10 j), suivi d’un amoebicide de
contact tiliquinol 100 mg - tilbroquinol 200 mg, (Intétrix®, 2 gélules par jour pendant 10 jours
Le traitement médical seul est suffisant chez la plus part des patients. Mais dans 20% des
cas va s’y associer une surinfection bactérienne et un drainage de l’abcès sera alors
nécessaire [16]. Le drainage est également utile en cas de : doute diagnostic avec un abcès
bactérien, de fièvre persistante (après 3 à 5 semaines de traitement ), de risque de rupture
(taille supérieure à 6 cm).
Abcès hépatiques « non lithiasiques – non biliaires »
Abcès par contigüité
Ils peuvent être la conséquence d’un abcès sous phrénique, d’une cholécystite aiguë très
souvent lithiasiques (cf chapitre) avec des abcès du segment IV ou V, d’une fistule complexe
dans le cadre d’une maladie de Crohn, d’un cancer colique ou d’une diverticulite du colon
droit (segment VI), d’un ulcère duodénal ou gastrique voire d’un cancer gastrique perforé
(Foie gauche). Ils sont souvent uniques et polymicrobiens.
Abcès d’origine artérielle
Ils compliquent une bactériémie d’origine pulmonaires, urinaires, dentaires ou ORL [17]. Ils
peuvent être secondaires à une endocardite infectieuse ou à des thrombophlébites
périphériques suppurées (usagers de drogue). Ils sont souvent unique et associés à une
immunodépression ou des comorbidités lourdes. Ils sont fréquemment monomicrobien à
gram positif (staphylocoque et streptocoque).
Il peut s’agir d’abcès fongique (principalement du à Candida albicans) chez le patient
immunodéprimé, dans ce cas une atteinte associée de la rate et des reins doit
systématiquement être recherchée (livre) .
Cas particulier des AH à Klebsiella
Décrit depuis les
années 90 par des pays asiatiques les AH à Klebsiella pneumoniae
(serotype K1) ont été individualisés de plus en plus fréquemment dans les pays occidentaux
[18, 19]. Le plus souvent cette bactérie se rencontre dans les AH d’origine artérielle. Les AH
Klebsiella pneumoniae ont la particularité de réaliser des « métastases septiques »
(oculaires et neurologiques) à distance (12% vs 0% pour les autres AH bactériens) et sont
très rarement associées à un processus pathologique intra-abdominal (0.6% vs 95% pour les
autres AH bactériens) [20].
FCC 1 – Que faire devant un abcès hépatique ?
Abcès d’origine portale (pyléphlébite)
Ils représentent 10 à 20 % des abcès à pyogènes. Ils compliquent les bactériémies portales
importantes. Si l’appendicite était la cause la plus fréquente dans les années 70-80, elle est
supplantée par la diverticulite sigmoïdienne qui est aujourd’hui la principale étiologie des
pyléphlébite portale. Les autres pathologies pouvant entrainer un AH par voie portale sont le
cancer du colon et de l’estomac, les maladies inflammatoires chroniques de l’intestin
(essentiellement maladie de Crohn) [21-23]. Ainsi dans le bilan étiologique d’un AH, il est
recommandé de réaliser une coloscopie en l’absence de cause évidente.
Ces AH sont uniques ou multiple et siègent plus fréquemment dans le foie droit en raison de
la direction du flux portal. Les abcès hépatiques au cours de la maladie de Crohn sont rares
mais leur incidence est 15 fois plus élevée que celle de la population générale. Ils sont
souvent multiples, avec des tableaux septiques graves. Le germe le plus retrouvé est le
streptocoque milleri.
Enfin, nous recommendons de pratiquer une colonoscopie aux malades chez qui un ou des
abcès hépatiques aux BGN sans causes apparente a été diagnostiqué avant de parler de
causes « cryptogéniques ». En effet, un polype ou tumeur surinfectée digestive ou plus
rarement d’origine urologique peut être à l’origine d’AH [1,5,14].
Abcès sur lésions préexistantes (kystes surinfectés, métastases)
Kyste hépatique
La surinfection d’un kyste biliaire est une complication rare (surtout kyste volumineux),
environ 1 % des cas [24]. Le tableau clinique est celui d’un abcès hépatique. Cette
contamination se fait le plus souvent par voie hématogène. A l’échographie, le kyste a un
contenu hétérogène avec un épaississement pariétal évocateur. Le diagnostic repose sur la
mise en évidence d'un germe dans le liquide du kyste prélevé lors d'une ponction échoguidée. Il est le plus souvent monomicrobien [25].
En cas de polykystose hépato-rénale, le risque est de surinfection est augmenté chez les
patients
hémodialysés
ou
transplantés
rénaux
(immunodépression).
L’imagerie
(échographie, TDM et IRM) a une place importante pour le diagnostic du kyste infecté. Ces
examens permettront de mettre en évidence un kyste ou un groupe de kyste au contenu
hétérogène, aux parois épaissies voire permettront de visualiser plus rarement un niveau
et/ou des bulles d’air. Le comportement en IRM du kyste infecté doit être analysé par rapport
à celui des kystes non compliqués. Le traitement consiste en une antibiothérapie à large
spectre associée au drainage radiologique du kyste. Certains auteurs proposent de ne pas
réaliser de drainage systématique en cas de lésion bien localisée, avec un germe isolé sur
les hémocultures, et une évolution clinique peut être rapidement favorable [26].
FCC 1 – Que faire devant un abcès hépatique ?
Métastases surinfectés
L’abcédation d’une métastase hépatique est un événement rare, il s’agit le plus souvent de
métastase de tumeur hépato-bilio-pancréatique [27]. Le principal problème est de faire le
diagnostic différentiel entre une métastase surinfectée ou nécrotique et un AH, pour ne pas
retarder la prise ne charge d’une pathologie maligne. Il est difficile à l’imagerie de faire la
différence entre une lésion tumorale hépatique et un abcès surtout à sa phase initiale, en cas
de doute diagnostique un bilan imagerie doit être effectuée à distance du traitement
(amélioration clinique beaucoup plus rapide que l’évolution des images). Law et al. [27]
décrivent néanmoins des signes pouvant orienter vers un AH compliquant une lésion
maligne comme une paroi épaisse, des septations, une aerobilie, une thrombose portale, la
présence de gaz dans l’abcès.
Dans leur série Law et al. les AH compliquant une lésion maligne ont été traités de la même
façon que les AH bénins (ponction + /- drainage et antibiothérapie). Ils n’ont pas constaté
d’essaimage tumoral attribué à la ponction [27]. Le pronostic des patients présentant une
pathologie maligne est moins bon qu’en cas d’AH bénin, du fait de l’évolution de la
pathologie sous jacente, mais aussi du fait d’un plus grand nombre de complication septique
[27].
FCC 1 – Que faire devant un abcès hépatique ?
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FCC 1 – Que faire devant un abcès hépatique ?
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FCC 1 – Que faire devant un abcès hépatique ?
ABCES HEPATIQUES EN RAPPORT AVEC UNE « LITHIASE
BILIAIRE »
S Deguelte-Lardière (Reims), O Bruno (Clichy)
La prévalence de la lithiase biliaire avant 50 ans est entre 11 et 15 % chez la femme, et
entre 3 et 11 % chez l’homme [1]. A partir de 60 ans cette prévalence passe à 50 % chez la
femme et à 15 % chez l’homme [1]. Près de 80 % des patients porteurs d’un calcul biliaire ne
présenteront jamais aucun symptôme en rapport avec celui-ci [2]. Mais lorsqu’un calcul se
bloque dans les voies biliaires, la bile stagnant peut s’infecter donnant lieu, selon la
localisation de l’obstacle, à une cholécystite aiguë ou une angiocholite. Ces complications
peuvent dans de rares cas être à l’origine d’abcès hépatique (AH).
L’AH se définit comme un amas de pus dans une cavité néoformée aux dépens du tissu
hépatique environnant qui est détruit ou refoulé [3]. L’incidence, toutes causes confondues
,des AH se situe entre 13 et 20/100 000 habitants [4]. L’incidence précise des AH d’origine
lithiasique est difficile à préciser mais l’origine biliaire (de cause bénigne ou maligne) est
actuellement la plus fréquente des causes retrouvées [3-5]. Certains terrains comme le
diabète sucré (RR multiplié par 3.5), l’alcoolisme chronique et l’immunodépression
augmentent le risque d’AH [6].
Mécanisme de survenue de l’AH en rapport avec une lithiase biliaire
AH d’origine biliaire, peut avoir 2 mécanismes de survenue :
–
Par contamination rétrograde des voies biliaires siège de germes digestifs. Ce
mécanisme est le plus fréquent
[4, 7, 8]. Il s’agit généralement d’abcès multiples
communiquant avec les voies biliaires sur une bile infectée en amont d’un obstacle.
–
Par contigüité avec le lit vésiculaire. C’est l’abcès du segment 4 ou 5 au contact d’un
foyer de cholécystite purulente ou gangréneuse le plus souvent due à une perforation
intrahépatique
[9].
Ce
type
de
complication
(comme
pour
les
cholécystites
xanthogranulomateuses) peut faire simuler un cancer de la vésicule. La perforation de la
vésicule est une complication rare de la cholécystite aiguë avec un taux estimé à 0.8 % tous
types de perforation confondus [10].
Diagnostic d’AH compliquant une lithiase biliaire
La survenue de l’abcès peut être évoquée devant la persistance d’une douleur de
l’hypochondre droit avec une hyperleucocytose, associée à fièvre oscillante. Néanmoins, ce
diagnostic est le plus souvent porté après la réalisation d’une imagerie.
FCC 1 – Que faire devant un abcès hépatique ?
Imagerie
L’échographie et le scanner permettent de faire le diagnostic positif dans plus de 90% des
cas de l’AH et d’orienter sur l’origine [11, 12]. En cas d’obstacle biliaire avec bile infectée,
les abcès sont souvent multiloculaires. Que ce soit à l’échographie ou au scanner, l’aspect
des abcès est variable et évolutif dans le temps. La visualisation d’air au sein d’une
collection est très évocatrice d’abcès bactérien.
L’imagerie est également importante pour le bilan étiologique. Dans les AH d’origine biliaire
de contiguïté, on cherchera une cholécystite de contact dans le segment 4 et/ou 5. Il peut
même s’agir d’un abcès avec niveau hydro-aérique souvent associé à une cholécystite
gangréneuse plus ou moins associé à des troubles vasculaires de contact selon le ou les
territoires d’atteinte. Pour les AH compliquant une angiocholite, le but du bilan d’imagerie est
de rechercher une dilatation des voies biliaires, l’obstacle et une éventuelle maladie sousjacente associée type lithiase intrahépatique, cholangite ou maladie de Caroli. Le bilan de la
maladie sous jacente sera alors complété par une cholangio-IRM.
Ponction-drainage
La ponction de l’abcès confirmera le diagnostic en cas de doute. Elle a un rôle diagnostique
pour isoler le germe et thérapeutique pour évacuer la collection. La présence de bile lors du
prélèvement doit faire évoquer une origine biliaire. La communication de l’abcès avec les
voies biliaires est possible soit parce que l’AH nait d’une contamination biliaire, soit par
fistulisation spontanée [13, 14].
Traitement
Le traitement fait tout d’abord appel à une antibiothérapie IV bactéricide couvrant les bacilles
Gram négatifs (surtout Escherichia Coli), les bacilles Gram positif (streptocoques,
entérocoques) et les anaérobies. Elle doit être instaurée en urgence, après la réalisation
d’hémocultures, et avant tout geste de drainage, afin de limiter les effets d’une éventuelle
décharge bactérienne [15, 16]. Le traitement des AH de moins de 3 cm peut, surtout s’il sont
multiples, se faire par une antibiothérapie seule [17]. En général on associe une pénicilline à
large spectre (pipéracilline, plus tazobactam) ou d’une céphalosporine de 3ème génération
au métrodinazole. Ce traitement sera ensuite adapté à l’antibiogramme. En cas d’allergie ou
d’intolérance aux béta-lactamines, les fluoro-quinolones sont une alternative. La durée de
l’antibiothérapie n’est pas clairement établie, elle sera généralement plus de 3 semaines (4 à
6). En sachant que les critères d’efficacité sont d’abord clinique (apyrexie, disparition des
douleurs), biologique (normalisation de la NFS et de la CRP) avant la normalisation de
l’imagerie [15].
FCC 1 – Que faire devant un abcès hépatique ?
Lorsqu’un drainage est indiqué, il peut se faire par voie percutanée ou par voie chirurgicale.
Le drainage percutané des abcès décrit initialement à Hong Kong en 1953 par Mc Fadzean
et al. [18] peut être écho-guidé ou sous scanner. Il s’agit actuellement du traitement de
première intention pour le traitement des AH. La chirurgie de drainage garde cependant
probablement une place notamment si :
–
le patient doit être opéré pour traiter la cause [5]
–
en cas d’échec de traitement percutané [5]
–
pour les abcès larges AH (de plus de 5 cm) et/ou multiloculés [5, 17]
AH compliquant une cholécystite
Selon les critères de Tokyo qui classent les cholécystites en 3 grades : léger (I), modéré (II),
et sévère (III), les cholécystites compliquées d’un AH sont classées dans le grade II associé
à des complications locales sévères [19]. Cette conférence de consensus recommande de
traiter les patients présentant une cholécystite aiguë de grade II associée à des
complications locales sévères telles que l’AH, par une chirurgie en urgence (laparoscopie ou
voie ouverte) parallèlement à l’antibiothérapie [20]. Le traitement de l’AH pourra donc se faire
dans le même temps que la cholécystectomie, par laparotomie ou par cœlioscopie selon la
voie d’abord choisie. Le drainage percutané de la vésicule et/ou de l’abcès est réservé aux
malades qui ne peuvent pas être opérés en urgence (défaillance multiviscérale,
comorbidités).
AH compliquant une angiocholite
L’angiocholite, est une septicémie d’origine biliaire. Elle doit être traitée par une
antibiothérapie associée à la levée de l’obstacle (sphinctérotomie endoscopique). L’AH qui y
est associé pourra être traité par drainage percutané, ou plus rarement chirurgical [21]. La
levé de l’obstruction des voies biliaires est indispensable à la réussite du traitement par
drainage de l’AH. En effet, en cas de communication entre l’abcès et l’arbre biliaire, si
l’obstacle sur les voies biliaires n’est pas levé, le drainage percutané de l’abcès est
quasiment systématiquement mis en échec [22, 23]. En urgence, le drainage permet pour les
AH d’origine biliaire sur obstacle d’évacuer la cavité et de mettre en place un drain externe
qui mettra en décharge le reste des voies biliaires. Le traitement de la maladie lithiasique
sous jacente (vésicule biliaire et ou voie biliaire principale) devra être réalisé une fois que
l’état général du patient le permet après un bilan d’imagerie (scanner, échoendoscopie,
cholangio-IRM).
FCC 1 – Que faire devant un abcès hépatique ?
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FCC 1 – Que faire devant un abcès hépatique ?
Abcès intra-hépatique compliquant une duodéno-pancréatectomie
céphalique
S. Dokmak (Clichy)
La duodéno-pancréatectomie céphalique (DPC) le seul traitement curatif des tumeurs périampullaires malignes. Malgré les progrès techniques et l’amélioration de la prise en charge
péri-opératoires, cette intervention est toujours associée à une mortalité allant de 3 à 5% et
une morbidité allant de 40 à 50%. La morbidité précoce est essentiellement liée à la fistule
pancréatique avec ses conséquences infectieuses et hémorragiques, et à la gastroparésie.
La morbidité tardive est liée aux troubles fonctionnels, à l’amaigrissement et au diabète. Bien
que les complications infectieuses soient fréquentes, l’abcès hépatique (AH) n’est pas bien
décrit dans la littérature, en raison de sa rareté.
Généralités
Le diagnostic d’AH peut être évoqué devant un syndrome infectieux et sera confirmé par
l’imagerie (essentiellement le scanner). Le principal diagnostic différentiel a évoqué devant
ce type de lésion est la métastase hépatique, surtout s’il s’agit d’une résection pour tumeur
maligne à un stade avancé. Dans ce cas, une ponction-biopsie peut aider à établir le
diagnostic.
Une fois le diagnostic d’AH posé, il faut avoir une preuve bactériologique qui peut être
obtenue par ponction de l’abcès ou par les prélèvements bactériologiques peropératoires
(bile vésiculaire, bile cholédocienne) ou post opératoire (liquide d’une lame de drainage). Le
traitement peut aller de la simple antibiothérapie (petit abcès) au drainage percutané voire à
la chirurgie dans certains cas. Il est recommandé de réaliser en première intention une
antibiothérapie intraveineuse pendant 2 semaines qui seront suivie d’un relais par voie orale
pendant 4 semaines. Dans le cas particulier de la DPC, compliquée d’un AH il faut toujours
éliminer une sténose artérielle, une sténose de l’anastomose bilio-digestive (ABD) ou un
reflux en rapport avec un montage chirurgical anormal (anse montée courte).
Devant un AH, la question essentielle à poser est la perméabilité de l’artère hépatique.
Autrement dit, s’agit-il d’une complication purement infectieuse ou d’une complication
secondaire à une ischémie. Les AH secondaires à un accident ischémique peropératoire
(artère hépatique non perméable), sont difficiles à traiter et ont un pronostic extrêmement
défavorable, ce d’autant qu’il existe une colonisation des voies biliaires en rapport avec
l’ABD. En préopératoire une lecture systématique d’un scanner multi barrette à coupes fines
est indispensable pour éliminer une sténose à l’origine du tronc cœliaque (TC) (par un
ligament arqué, de l’athérome ou exceptionnellement une agénésie) ou plus rarement à
FCC 1 – Que faire devant un abcès hépatique ?
l’origine de l’artère mésentérique supérieur (AMS). Leur incidence est de l’ordre de 10% et
elles sont significatives dans 5% [1, 2].
Prévention des AH en rapport avec une artère hépatique non perméable
En cas de ligament arqué serré, celui-ci doit être sectionné, après confirmation en per
opératoire de son retentissement sur le flux artérielle hépatique. Cette confirmation se fera
faite par un test de clampage de l’artère gastroduodénale (AGD) et par palpation des
pulsations de l’artère, mais surtout par un enregistrement doppler de l’artère en intrahépatique (aspect d’une artère morte). Une section par voie latérale ou médiale (risquée) est
nécessaire avant tout geste irréversible afin d’assurer d’un bon flux artériel. Dans certains
cas, l’aspect est trompeur (présence de pulsation par intermittence) du fait de l’effet des
mouvements respiratoires sur le ligament arqué. Il faut donc être sûr après sa section de
l’obtention d’un très bon flux bien perçu et enregistré au doppler à plusieurs reprises. La
section d’un ligament arqué n’est pas toujours évidente à réaliser et elle nécessite de bien
exposer la face antérieure de l’aorte., après ce ligament fibreux est en général facile à palper
entre la face antérieure de l’aorte et le TC.
S’il s’agit d’une plaque d’athérome (TC ou AMS) diagnostiquée au scanner en préopératoire,
il faut vérifier que la sténose est significative (artériographie ou écho-doppler) en déterminant
le sens du flux au niveau de l’AGD. Si la sténose significative est confirmée il faut mettre en
place un stent par voie endo-vasculaire et y associée un traitement antiagrégant plaquettaire
pendant 1 mois. Puis la résection peut être envisagée si le flux artériel est bien rétabli.
En cas de traumatisme peropératoire de l’artère hépatique ou de dissection difficile
conduisant à une thrombose peropératoire (pancréatite chronique), un rétablissement du flux
artériel par désobstruction ou pontage artériel (artère hépatique, artère splénique ou aorte)
est à réaliser. En cas d’échec on peut discuter d’une artérialisation de la veine porte [3] ou
d’une lobectomie gauche permettant de créer des adhérences artérielles entre le foie et les
organes adjacents (épiploon et estomac) en sachant que leur efficacité n’a jamais été
démontrée.
Bien qu’une section de la branche droite ou gauche de l’artère hépatique moyenne ou d’une
artère hépatique droite (AHD) naissant de l’AMS est théoriquement sans conséquence à
cause du développement rapide d’une circulation collatérale à partir de la convergence
biliaire, dans notre expérience on peut observer des AH dans les territoires vascularisés par
ces artères. Notre attitude est d’emboliser avant la DPC par exemple une AHD envahie afin
FCC 1 – Que faire devant un abcès hépatique ?
de favoriser la circulation collatérale ou d’effectuer une reconstruction peropératoire en cas
de plaie, si celle-ci est possible.
Si le diagnostic est posé en postopératoire, il faut en rechercher la cause et discuter un
geste qui dépendra du tableau clinique, du délai, et des possibilités thérapeutiques selon la
cause. Le plus souvent il est trop tard pour aller sectionner un ligament arqué serré oublié ou
sectionné incomplètement mais on peut toujours traiter par voie endo-vasculaire une sténose
partielle (flux artériel faible) ou discuter un pontage artériel. Ces complications peuvent
également se voir en postopératoire dans les suites d’une embolisation du moignon de
l’AGD (hémorragie avec pseudo-anévrysme) conduisant à une thrombose ou sténose,
accidentelle ou par nécessité, de l’artère hépatique. Dans ce cas, un geste de
revascularisation est difficile à discuter du fait du contexte (aspect très inflammatoire en
rapport avec une fistule pancréatique souvent associée).
De manière générale si un flux artériel n’a pu être établi, il est préférable de renoncer à la
DPC et de régler le problème vasculaire en premier afin d’éviter ces complications.
Gestion d’un AH dans les suites d’un DPC
AH avec une artère hépatique non perméable
Le diagnostic est fait au scanner ou à l’écho-doppler avec en intra-hépatique plusieurs
lésions évoquant des abcès généralement localisés au niveau du lobe gauche et du segment
VIII. Il s’agit d’une complication gravissime avec une mortalité > 80% [1]. Les abcès sont en
général multiples. Une preuve bactériologique est recommandée. Le traitement antibiotique
souvent long peut durer plusieurs mois associés à des drainages percutanés multiples et
répétitifs. Un geste chirurgical est à discuter : soit de revascularisation ou de résection
hépatique avec lobectomie gauche surtout si l’atteinte est essentiellement à ce niveau. Une
revascularisation du foie peut se développer spontanément à partir de l’ABD ou à partir des
attaches anatomiques d’insertion du foie droit et gauche. Le pronostic est très sombre avec
un risque de mortalité très élevé [1].
Abcès avec une artère hépatique perméable
L’abcès est classiquement unique, diagnostiqué en postopératoire, le plus souvent à
quelques semaines de la DPC. Il peut théoriquement être la conséquence d’une ou de
plusieurs poussées d’angiocholite. Ces angiocholites post-DPC dont la fréquence est
probablement sous-estimée, sont relativement fréquentes et le plus souvent banales. Pour
ces abcès, il faudra éliminer une sténose de l’ABD, un reflux ou une section d’une des 2
FCC 1 – Que faire devant un abcès hépatique ?
branches de l’artère hépatique ou d’une artère accessoire. En général le pronostic est
favorable sous antibiothérapie adaptée.
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FCC 1 – Que faire devant un abcès hépatique ?
Abcès hépatique post-transplatation
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Généralités sur les complications infectieuses après greffe hépatique
La transplantation hépatique (TH) est un traitement bien établi pour les maladies terminales
du foie [1]. Les améliorations de l’immunosuppression, de la prise en charge péri opératoire,
et des techniques chirurgicales et d’anesthésie on permis des survie des malades de 90%
à 1 an et de 70-80% à 10 ans [1], cependant les complications infectieuses restent une des
causes majeures de morbi-mortalité [2].
Les infections bactériennes surviennent dans le premier mois post-greffe avec une incidence
comprise entre 35% et 68% [3, 4]. Les germes les plus fréquemment mis en évidence sont
soit des bacilles gram négatif retrouvés dans la bile (Escherichia coli, Enterobacters), et soit
des bacilles gram positif (Staphylocoque aureus, streptocoque). Le Lactobacillus acidophilus,
bactérie gram-positif, habituellement non-pathogène, peut être à l’origine d’abcès hépatique
(AH) après TH. De la même façon chez ces malades en état de dépression immunitaire, des
agents fongiques (candidose, aspergillose) ou virale (cytomégalovirus) peuvent être
responsables d’abcès multiples. Colonna et al. suggèrent que les facteurs de risque
d’infection après transplantation hépatique sont [5] :
–
L’âge < 20 ans,
–
l’atrésie voie biliaire,
–
un faible taux d’albumine préopératoire,
–
des complications gastro-intestinales ou vasculaires,
–
la nécessité d’hémodialyse postopératoire
–
la durée de séjour en réanimation
Les AH propres après TH sont donc assez rares. L’incidence rapportée est de 0.5 % à 1%,
cependant cette complication rare reste extrêmement grave avec des taux de mortalité allant
jusqu'à 45 % [6]. Ils peuvent survenir précocement après la TH avec une médiane de 60
jours ou de façon plus tardive [6]. Tachopoulou et al. ont décrit que dans 50% des cas le
diagnostic d’AH a été posé à plus d'un an [7].
Les principales causes d’AH après TH
Causes biliaires
L’incidence des complications biliaires (fistule, sténose ou cholangite ischémique) en postgreffe, oscille entre 6 % et 34% et reste la première cause de morbidité. La mortalité en
FCC 1 – Que faire devant un abcès hépatique ?
rapport avec ces complications varie selon les séries de 3% à 8% [8] et dans plus de 20%
des cas elles sont associées à une thrombose artérielle [9].
Cause artérielle
La thrombose de l’artère hépatique est une complication bien connue après TH avec une
incidence estimée entre 3.1% et 7.1% [10] et la survenue de cette complication est
association à une augmentation significative du risque d’AH.
Kapaln et al. décrivent un délai moyen de survenu de la thrombose de l’artère hépatique en
moyenne à 128 jours post-greffe chez l’adultes [11]. Cette thrombose induit une ischémie
des voies biliaires du greffon, condition idéales pour favoriser une infection hépatobiliaire
(cholangite ischémiques, angiocholites, abcès) [10].
Greffons marginaux (greffon post traumatique, donneur à cœur arrêté)
La pénurie de greffons a conduit à utiliser de plus en plus des greffons dits « marginaux »,
c'est-à-dire des greffons issus de donneurs : âgés, en instabilité hémodynamique, présentant
des sérologies virales positives (présence d’anticorps anti -HBc, sérologie de l’hépatite, C), à
cœur arrêté, ou des greffons traumatiques.
Les greffons traumatiques ou issus de donneurs à cœur arrêté semblent avoir un risque plus
élevé de voir se développer des AH [12, 13]. Ce risque est expliqué, dans le foie
traumatiques par la surinfection d’un biliome secondaires à un plaie biliaire intrahépatique et
dans le donneur à cœur arrêtée (ou les complications biliaires sont plus élevée), par de
cholangite ischémiques avec sténose et dilatation des voies biliaires intrahépatique [14] .
Manœuvre d’endoscopie ou de radiologie interventionnelle
Des manœuvres endoscopiques comme la cholangiographie rétrograde endoscopique avec
sphinctérectomie lors de la mise en place d’une endoprothèse pour une sténose ou une
fistule biliaire dans les suites d’une TH. Le risque d’infection varie alors entre 0-26% [15].
Des manœuvres radiologiques percutanées (opacification ou drainage biliaire, biopsie
hépatique). La bactériémie après ces manœuvres est presque 12 fois supérieure chez les
patients ayant une anastomose cholédoco-jéjunale par rapport aux patients ayant une
anastomose cholédoco-cholédocienne. Dans la série de Tachopoulou, 14% des patients
(2/14) ont développé un AH après biopsie percutanée du foie [7].
Erreur technique
Le fait de ne pas reconstruire une artère hépatique accessoire (habituellement une artère
hépatique droite) dans le greffon ou d’occlure partiellement, accidentellement, un canal
FCC 1 – Que faire devant un abcès hépatique ?
biliaire lors de la préparation du greffon « back table », augmente le risque de développer un
AH en postopératoire [16].
Présentation clinique et biologique des AH après TH
La présentation clinique et biologique des AH après TH, en dehors des patients ayant une
thrombose de l’artère hépatique chez qui on retrouve un élévation significative des
transaminases et des LDH, est identique à celle d’un AH chez les patients non transplantés
[7].
Traitement des AH après TH
Le traitement initiale
des abcès après TH est le même que
chez les patients non
transplanté. Il repose initialement sur une antibiothérapie à large spectre suivi d’une ponction
(+/-drainage), puis mise en place d’une antibiothérapie adaptée à l’antibiogramme.
Le traitement chirurgical est réservé aux échecs du traitement médical. Il peut aller de la
résection de l’AH, jusqu’à la
re-transplantation hépatiques. Le choix dépend de la
localisation et de l’extension des abcès mais aussi de la gravité de la maladie hépatique
sous-jacente responsable (cholangite ischémique diffuse). Le traitement chirurgical a une
morbidité élevé, comprise 20-62% pour la résection hépatique et 63-79% pour la retransplantation. La mortalité est variable entre 0-29% et 30-67% respectivement pour la
résection ou la re-transplantation [17-19].
FCC 1 – Que faire devant un abcès hépatique ?
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FCC 1 – Que faire devant un abcès hépatique ?
Abcès hépatiques en rapport avec un traumatisme hépatique
Tullio Piardi (Reims), R Kianmanesh (Reims)
La prise en charge des traumatismes hépatiques a changé au cours des 10 dernières
années. Actuellement plus de 80% des traumatismes fermés du foie sont traités de manière
conservatrice (TC) [1-3]. Sur une série de 699 patients présentant un traumatisme complexe
(grades III à V) publiée par Kozar et al. [2], 453 (65%) ont eu un TC, avec un taux de
complication de 13%. Le taux de complications est surtout lié à la sévérité du traumatisme,
notamment grade et quantité de culots transfusée [2]. Les complications précoces sont
l’hémorragie et le syndrome du compartiment abdominal [4]. Les complications tardives sont
biliaires et septiques avec possibilité de survenue d’abcès hépatique (AH) [4]. L’incidence
des AH dans le TC des traumatismes fermés est de 4% et la mortalité de 10 % [5].
Néanmoins les complications dont l’AH sont moins fréquent après un TC qu’après traitement
chirurgical. Lorsque le TC ne peut être réalisé et que le patient est opéré l’incidence de
survenue d’AH secondaires est quasiment doublé (7%) [6].
Mécanisme de survenue des AH au cours d’un traumatisme hépatique
Les différentes situations favorisant la formation d’AH au cours des traumatismes hépatiques
sont présentés dans le tableau 1. Nous allons détailler 2 mécanismes de formations des AH
au cours de ces situations :
Nécrose secondaire à une embolisation artérielle
L’utilité de l’embolisation artérielle dans le traitement des traumatismes hépatiques de grade
III-IV est clairement établie. En 2003, Mohr et al. [7] ont montré que la radiologie
interventionnelle permettait une diminution de la mortalité dans les traumatismes graves,
avec une morbidité qui restait néanmoins élevée. La nécrose du parenchyme hépatique qui
est dans ce cadre surtout biliaires (par dévascularisation et l’embolisation artérielle) est
estimée par Mohr et al. comme étant responsable de plus de 40 % des complications. Cette
nécrose secondaire qui traite les complications artérielles hémorragiques se complique
secondairement d’AH dans 3.8 % des cas dans leur série [7]. La nécrose est probablement
très souvent infectée, en effet, Dabbs et al [8] ont retrouvé une bactériémie chez 30.8% des
patients ayant eu une hémoculture au moment du diagnostic de nécrose, et des germes
(anaérobies) dans la nécrose chez plus de 90% des patients ayant eu un prélèvement de la
nécrose à visée bactériologique. Il est aussi important que ces malades ont souvent d’autres
FCC 1 – Que faire devant un abcès hépatique ?
foyers traumatiques (rate, poumons, os, pelvis…) et qu’ils vont séjourner plusieurs jours en
réanimation ce qui augmente l’incidence de colonisation secondaire par des germes
hospitaliers.
Biliome secondaire au traumatisme des voies biliaires
Leur incidence est autours de 10-20%. C’est une autre situation qui peut secondaire à la
rupture et/ou la nécrose des voies biliaires. Le traumatisme et l’ischémie des voies biliaires
directement causés au moment de l’accident, peuvent être à l’origine de la formation de
biliome voire d’une péritonite biliaire. La désinsertion de la vésicule biliaire doit être
systématiquement recherchée notamment en cas de lésion de décélération. Bala et al. [9]
rapporte la survenue d’un biliome secondaire chez 8% des 64 patients ayant eu une lésion
de grade III-V .
Bactéries retrouvées
Les bactéries le plus souvent rencontrés dans l’AH après post-traumatique sont des
aérobies, des bactéries gram négatif (Escherichia coli, Klebsiella pneumoniae, Proteus
mirabilis, Enterobacter), et des bactéries gram positif (Staphylococcus aureus, Enterococcus,
Streptococcus pneumoniae). Le temps moyen entre la formation de l’abcès et les
manifestations cliniques est de plusieurs jours voire de quelques semaines. Il est en
moyenne de 15 jours (extrêmes 1-90 jours) dans la série de Hsieh et al. [6]. Pour les AH aux
germes anaérobies notamment à Clostridium, le temps d'incubation peut être extrêmement
court (une seule journée) [10]. Cette évolution rapide est probablement liée à l’ischémie
parenchymateuse associée, favorisant le développement rapide de ce type de bactérie [10].
Diagnostic
Les signes cliniques et biologiques sont caractérisés par une fièvre associée à des frissons,
des douleurs abdominales et une hyperleucocytose à polynucléaires neutrophiles. Le
scanner est l’examen de première intention. Il montre une collection avec du gaz en son sein
témoin de la présence d’anaérobie [5]. La perforation d’un organe creux doit toujours être
recherchée dans ce contexte de sepsis post-traumatique. Par contre, il ne permet pas de
prédire la formation d'abcès à partir des lésions parenchymateuses initial. La Bili-IRM doit
être effectuée en cas de biliome pour avoir « une cartographie des canaux biliaires » afin de
mieux définir l'approche thérapeutique. L’échographie est indispensable pour la ponction et
mise en culture de la lésion abcédée afin de déterminer le(s) micro-organisme(s)
responsable(s).
FCC 1 – Que faire devant un abcès hépatique ?
Traitement
Place de l’antibiothérapie prophylactique en cas de traumatisme hépatique ?
Dans la littérature les résultats sont discordants dépendant de la gravité des situations
décrites [6, 11]. Mais chez les patients tout venant, il nous paraît pas utile de mettre en place
une antibiothérapie prophylactique exclusivement pour prévenir le risque d’AH secondaire
[11]. En revanche, devant la suspicion d’AH secondaire une antibiothérapie bactéricide sera
débutée dès que le diagnostic d’AH est posé même avant la ponction et secondairement
adaptée à l’antibiogramme [4].
Traitement de l’AH
Comme dans les autres circonstances l’AH sera traité le plus souvent par drainage
percutané et antibiothérapie. De rares indications chirurgicales sont à connaitre :
-
échecs du traitement percutané, rupture conduisant à une péritonite généralisée
-
AH difficilement accessible par voie percutanée, nécessité d'effectuer un lavage /
drainage de la cavité abdominale (laparoscopie possible).
Quelque soit la voie d’abord choisi le geste est encadré par une antibiothérapie à visée
curative et il sera débuté par une échographie peropératoire.
Traitement de la nécrose post-embolisation
Dabbs et al [12] en cas de nécrose hépatique majeur post-embolisation propose de réaliser
une exérèse précoce (4 jours) plutôt que des gestes de drainages et de débridement
chirurgicaux itératifs. Dans leur série de
30 patients présentant une nécrose majeur et
l’exérèse (nécrosectomie ou segmentectomie réglée) entrainait un plus faible taux de
complications.
Traitement du biliome
Le traitement du biliome nécessite, plus que les autres complications, une démarche
multidisciplinaire impliquant le chirurgien, l'endoscopiste et le radiologue. Le drainage
percutané d'un biliome abcédé peut être suffisant pour traiter une fistule à faible débit. Par
contre en présence d’une fistule biliaire à haut débit, il est nécessaire d'y associer un
traitement endoscopique (sphinctérotomie +/- stent). Dans l’étude de Lubezky et al. [13], tous
les patients avec un TFF ayant développé une fuite biliaire secondaire ont bénéficié d’une
cholangiopancréaticographie rétrograde avec sphinctérotomie
et pose d’une prothèse
plastique dans les 24 h après la démonstration de la fuite . Ce traitement a permis dans tous
FCC 1 – Que faire devant un abcès hépatique ?
les cas la résolution de la fistule avec un intervalle moyen entre la CPRE et la résolution
complète (définie par le retrait du drain externe) en 5 à 10 jours.
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FCC 1 – Que faire devant un abcès hépatique ?
Abcés hépatique après chimioembolisation ou radiofréquence
R Kianmanesh (Reims), A Sibert (Clichy)
La présence d’une anastomose bilio-digestive notamment après duodéno-pancréatectomie
céphalique (DPC) est un facteur limitant pour la pratique future d’une chimio ou embolisation
intra-artérielle (C-EIA) et/ou une radiofréquence hépatiques. En effet, la colonisation
microbienne (bactéries, levures) chronique de la bile par l’anastomose bilio-digestive
(comme après une sphinctérotomie endoscopique), contre-indiquera la pratique de ces deux
gestes thérapeutiques importants. De Jong MC et al. ont rapporté dans une série
multicentrique, une morbidité globale de 34,1% parmi 129 gestes hépatiques spécifiques liés
au traitement interventionnel des MH [1]. La morbidité (grade 3 ou plus), a été observé chez
plus de 50% des malades ayant une bilio-digestive. La série rapporte globalement 11,1%
d’abcès hépatiques, 8,7% d’infection du site opératoire, 6,3% de sepsis, 3,2% d’hémorragie,
2,4% d’angiocholite et 0,8% de thrombose portale après des gestes interventionnels
hépatiques (radiofréquence et C-EIA). Dans l’analyse de sous-groupes de malades ayant
une bilio-digestive, le taux d’abcès hépatique atteignait 22,2%, sepsis 42,9% et angiocholite
28,6%. En pratique, les exérèses limitées (pancréatectomies atypiques et/ou exérèse
duodénale) sont à privilégier quand techniquement possible par rapport à une DPC. De plus,
lorsque l’indication de DPC est retenue, le premier temps opératoire consiste à effectuer une
échographie peropératoire et de réséquer tout nodule suspect hépatique. Au cours du suivi,
si des MH apparaissent, l’option d’une exérèse limitée reste toujours à discuter par rapport à
la C-EIA et/ou la radiofréquence qui sont fortement liées à des complications septiques
potentiellement graves.
Référence :
De Jong MC, Farnell MB, Sclabas G, Cunningham SC, Cameron JL, Geschwind JF,
Wolfgang CL, Herman JM, Edil BH, Choti MA et al: Liver-directed therapy for hepatic
metastases in patients undergoing pancreaticoduodenectomy: a dual-center analysis. Ann
Surg, 252(1):142-148.
FCC 1 – Que faire devant un abcès hépatique ?

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