La contrefaçon au Maroc : un fléau qui pèse des milliards.

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La contrefaçon au Maroc : un fléau qui pèse des milliards.
La contrefaçon au Maroc : un fléau qui pèse des milliards.
Un sac Mont blanc à 300 dhs, une valise Louis Vuitton à partir de 500 dhs, non, ce ne sont pas
les soldes chez les grandes marques. Ce sont les prix imbattables des vendeurs de produits
contrefaits. Des produits qui ressemblent à s’y méprendre aux originaux, avec étiquettes du
nom de la marque de même que les petits détails par lesquels les fabricants apposent leur
signature. Dans les magasins, ou présentés sur des simples étalages à même le sol, foulards,
sac à mains, valises ou pochettes sont offerts à la vente. Tous des produits de la contrefaçon.
Seule la matière première, quand il s’agit du cuir par exemple, peut être originelle.
Malgré l’illégalité dans laquelle ils sont, les vendeurs s’activent au grand jour pour attirer les
clients. Ainsi de celui-ci qui harangue une passante « Tu veux ressembler à cette chanteuse
libanaise, Elissa, tiens, paye-toi ces lunettes Ray Ban. Ce sont comme des vrais et en verre,
pas du plastique de Chinois. »
Faire dans
l'humour est une bonne technique de vente, mais le jeune homme n'a pas tort. A première vue,
il est presque impossible de trouver un seul défaut à ces lunettes. Seuls des experts de la
marque peuvent déceler la contrefaçon.
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Jamais sans mon Louis Vuitton.
Mais où sont fabriqués ces produits ? Interrogé, un vendeur explique que certains sont
fabriqués au Maroc quand d'autres viennent de Chine ou encore de Turquie. « Les foulards, en
général, je les achète chez des grossistes spécialisés dans le textile qui les ramènent de
Turquie. Ce sont des commerçants, ils ont la possibilité de faire rentrer toutes les marchandises
qu’ils veulent. Les vêtements, les foulards, les châles, les dessous féminins, tout est de la
contrefaçon. Pour ce qui est des articles en cuir, les Chinois en font mais ils n’utilisent pas de la
bonne matière première. Pour moi, revendeur, je dois payer plus si je veux une marchandise de
bonne qualité. Il y a des standards. Plus c’est bien fait, plus c’est cher. »
Il est presque impossible de savoir comment cette marchandise arrive au Maroc, tant le
processus est complexe en raison du nombre très important d’intermédiaires qui interviennent
dans le circuit. Au final, le client se considère gagnant car pour acheter par exemple un vrai sac
de grande marque, il faut débourser une petite fortune. Mais les moins nantis ne sont pas les
seuls à se tourner vers la contrefaçon. Notre vendeur nous explique que les personnes aisées
adhèrent également à ce commerce ; « j’ai des femmes fortunées qui viennent m’acheter des
sacs car elles préfèrent porter un faux pour ne pas risquer de se faire voler le vrai. »
En règle générale, les acheteurs méconnaissent les risques liés à l’acquisition des produits
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contrefaits. Les services de douanes sont capables de déceler les produits de contrefaçon. Il
est donc recommandé de ne pas acheter de produits de contrefaçon dans un pays étranger
sous peine de devoir payer des amendes très salées.
S’habiller comme les stars.
Une étude sur les incidences économiques de la contrefaçon au Maroc a été effectuée par
l’Office marocain de la propriété industrielle et commerciale pour identifier le circuit de la
contrefaçon et souligner son impact sur l’économie du pays. Elle présente des chiffres, des
pourcentages et des statistiques d’un phénomène dont le pays peine encore à prendre la
mesure du fléau qu’il représente (voir encadré). Il suffit de se rendre à Bab Marrakech ou à
Derb Ghalef et dans tous les marchés et souks de la métropole pour constater de visu le poids
de la contrefaçon.
Les chiffres de la contrefaçon
. En 2012, la douane a intercepté 1,16 million d’articles contrefaits pour une valeur de 33,4 millions de d
. Un chiffre d’affaires allant de 6 milliard de dirhams à 12 milliards soit un 0,7 à 1,3% du PIB national.
. Le secteur de la contrefaçon génère une perte fiscale annuelle de près d’1 milliard et près de 30.000 e
. Sur la période 2008-2011, 595 affaires de contrefaçon ont été jugées par les tribunaux de commerce d
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http://www.wipo.int/edocs/mdocs/enforcement/fr/wipo_ace_8/wipo_ace_8_5.pdf
Celle-ci représente le gagne-pain d’un grand nombre de vendeurs, « Avant, ici au bazar, je
vendais de la maroquinerie du pays, des vestes en cuir, des sacs, des ceintures. J’arrivais à
écouler ma marchandise, mais dès que les gens ont commencé à connaitre les grandes
marques, ils venaient tous me demander un sac d’une telle ou telle marque. Je devais suivre la
tendance pour arriver à boucler mes fins de mois. Aujourd’hui, c’est mon gagne-pain avec
lequel je nourris ma famille et mes enfants. Mes confrères qui ont gardé la même activité ne
vendent qu’aux touristes durant la haute saison et à certains clients fidèles et désireux d’avoir
des pièces originales. Ils ont du mal à faire des profits. »
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Malgré l’illégalité de leur commerce et les risques de poursuites judicaires, les vendeurs de
contrefaçons persistent dans le secteur. Tant qu’il y aura des marques, il y aura de la contre
façon nous confient nos interlocuteurs. « Les gens veulent s’habiller comme les stars qu’ils
voient à la télé. S’ils ont les moyens, ils vont faire leurs achats dans les grands magasins. Mais
s’ils n’ont pas beaucoup d’argent, ils viennent nous voir. Pourquoi ces gens n’auraient-ils pas
aussi le droit de porter du Louis Vuitton ? ».
Suivant ce
raisonnement, il ne reste plus aux grandes marques qu’à produire des articles à la portée de
tous !
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