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Compte-rendu de la journée d’étude Organisée par l’Association Marocaine de l’Evaluation Le 24 mai 2012 à l’hôtel Golden Tulip Farah, Rabat, Maroc ROLE ET RESPONSABILITES DU PARLEMENT DANS L’EVALUATION DES POLITIQUES PUBLIQUES : ELEMENTS POUR LE DEBAT PUBLIC. Avec le soutien de : - Association Marocaine de l’Evaluation Compte-rendu de la Journée d’Etude du 24 Mai 2012 SOMMAIRE Remerciements Page 2 Acronymes Page 2 Allocutions d’ouverture de la journée d’étude Page 3 - L’expérience française en matière d’évaluation des politiques publiques : l’exemple du Parlement français - Allocution d’ouverture par Ahmed BENCHEIKH, Président de l’AME Allocution de Jean-Benoît MANHES, Représentant adjoint de l’UNICEF au Maroc Allocution de M. TETOUANI, Directeur du contrôle et de législation à la Chambre des Représentants Page 4 Introduction par Ali BOUABID, Membre du Bureau de l’AME Intervention de Jean MALLOT, Député, Vice-président de l’AN française et du CEC Allocution de Sylvain SAUTIER, Fonctionnaire parlementaire, Administrateur au CEC Conclusion de Jean MALLOT, Député, Vice-président de l’AN française et du CEC Synthèse et ouverture des débats par Ali BOUABID, Membre du Bureau de l’AME Questions et Réponses Table ronde sur la reddition des comptes et l’évaluation de politiques publiques au Maroc Page 10 - Etat des lieux de l’Institutionnalisation de l’évaluation des politiques publiques par A. BENCHEIKH Intervention d’Azzedine AKESBI, Evaluateur professionnel et Membre de Transparency Maroc Débats et interventions des participants Conclusion de la journée d’étude par Ahmed BENCHEIKH, Président de l’AME Annexe 1 : Programme de la journée d’étude Page 15 Annexe 2 : Note conceptuelle de la journée d’étude Page 16 Annexe 3 : Note de cadrage de la table ronde Page 19 Annexe 4 : Liste des participants Page 22 Page 1 - Association Marocaine de l’Evaluation Compte-rendu de la Journée d’Etude du 24 Mai 2012 REMERCIEMENTS Cette journée d’étude sur le thème « Rôle et Responsabilités du Parlement dans l’Evaluation des Politiques Publiques : Eléments pour le Débat Public », a été organisée par l’Association Marocaine de l’Evaluation, 18 rue Dayat Ifrah, Appt 1, Agdal, 10 090 Rabat Tel : 05.37.77.41.62 / Fax : 05.37.77.41.63 Site internet : www.ame.ma L’Association Marocaine de l’Evaluation est récipiendaire de l’African Development Prize de la Fondation Melinda et Bill Gates en 2012 reçue à la 6ème Conférence de l’AfrEA, Accra, Ghana Grâce au soutien du Fonds des Nations Unies pour l’Enfance (UNICEF) du Maroc. Site internet : www.unicef.org/morocco de l’Agence Catalane de Coopération pour le Développement (ACCD), de la Generalitat de Catalogne. Site internet : www.cooperaciócatalana.cat ACRONYMES ACCD : Agence Catalane de Coopération pour le Développement AME : Association Marocaine de l’Evaluation AN : Assemblée Nationale (française) CEC : Comité d’Evaluation et de Contrôle des Politiques Publiques RI : Règlement Intérieur (du Parlement) UNICEF : Fonds des Nations Unies pour l’Enfance Page 2 - Association Marocaine de l’Evaluation Compte-rendu de la Journée d’Etude du 24 Mai 2012 ALLOCUTIONS D’OUVERTURE DE LA JOURNEE D’ETUDE Allocution d’ouverture par Ahmed BENCHEIKH, Président de l’AME M. BENCHEIKH a remercié les participants de leur présence et a rappelé la contribution de l’AME en 2011 dans la constitutionnalisation du principe de l’évaluation. La Semaine Marocaine de l’Evaluation (SME12), prévue en octobre 2012, est le grand projet de l’association, sur le modèle concluant de la Semaine Marocaine de l’Evaluation 2010. Cette journée d’étude, dédiée aux rôles et responsabilités du Parlement dans l’évaluation des politiques publiques est basée sur une démarche participative et a pour but de faire ressortir des réflexions et des propositions sur la démarche évaluative au Maroc. Ahmed BENCHEIKH, Président de l’AME Allocution de Jean-Benoît MANHES, Représentant adjoint de l’UNICEF au Maroc L’UNICEF-Maroc est l’un des plus fervents soutiens de l’AME, depuis sa création. L’UNICEF, qui fonctionne grâce à des fonds publics, a déjà instauré de manière systématique l’évaluation de ses différentes politiques. Pour ce faire, l’UNICEF a eu besoin d’une meilleure planification de ses politiques et a dû allouer des ressources budgétaires et humaines, dont 15% sont désormais consacré au suivi et à l’évaluation. L’instauration d’une culture de l’évaluation a été encore plus déterminante dans ce processus. Aujourd’hui, l’UNICEF est l’organisation internationale la plus transparente au monde. Jean-Benoît MANHES, Représentant adjoint de l’UNICEF au Maroc Le rôle du Parlement est essentiel pour s’assurer que les fonds publics sont utilisés pour le bien-être général. Ainsi, l’évaluation doit permettre aux Parlementaires de corriger et d’améliorer les politiques publiques et la société civile a aussi un rôle important à jouer. Cette journée d’étude doit donc avoir pour objectif d’œuvrer à l’instauration d’une culture de l’évaluation au Maroc. Allocution de M. TETOUANI, Directeur du contrôle et de législation à la Chambre des Représentants M. TETOUANI a indiqué qu’il représentait pendant cette journée d’étude le Président de la Chambre des Députés. Il a salué les efforts de l’AME pour l’institutionnalisation de l’évaluation après la présentation de son mémorandum lors de la réforme de la constitution en 2011 et rappelé le rôle décisif qu’elle confère au Parlement, en tant que lieu de débat et d’évaluation des politiques publiques. Le rôle des Parlementaires dans l’architecture des politiques publiques a été élargi par la création d’un comité de contrôle. Le fonctionnement du Parlement a donc évolué, des relations de coopération et de concertation ont été mises en place entre les pouvoirs législatif et exécutif. Il est désormais important d’atteindre un équilibre entre les ressources humaines et financières des deux pouvoirs. Le nouveau rôle octroyé au Parlement nécessite aussi une coopération accrue avec la société civile et les centres de recherche du Royaume, afin d’engager un débat de l’ensemble de la société sur les politiques publiques marocaines. Ainsi, l’institutionnalisation de l’évaluation contribuera pleinement à reformuler le dialogue politique en favorisant ces débats. Boubker TITOUANI, Directeur du contrôle et de législation à la Chambre des Représentants Page 3 - Association Marocaine de l’Evaluation Compte-rendu de la Journée d’Etude du 24 Mai 2012 L’EXPERIENCE FRANÇAISE EN MATIERE D’EVALUATION DES POLITIQUES PUBLIQUES : L’EXEMPLE DU PARLEMENT FRANÇAIS De gauche à droite : M. TITOUANI, M. BENCHEIKH, M. BOUABID, M. MALLOT et M. SAUTIER. Introduction par Ali BOUABID, Membre du Bureau de l’AME Au Maroc, nous nous félicitons de la progression de l’exigence d’évaluation dans les esprits et surtout dans les textes, puisque la nouvelle constitution consacre désormais ce principe. Cette maturation des esprits sur les apports de la démarche évaluative est le résultat des actions menées par la société civile depuis quelques années. Ainsi des associations, telles que Transparency Maroc, la Fondation Abderrahim Bouabid ou encore le Médiateur pour la Démocratie et les Droits Humains ont relayé le travail de l’AME et son mémorandum pour la constitutionnalisation de l’évaluation. Toutes ces associations ont participé à la tentative de suivre, à défaut d’évaluer, les réalisations et les résultats de l’action du gouvernement. Il faut maintenant réfléchir à la façon de mettre en œuvre cette exigence d’évaluation des politiques publiques et ancrer cette démarche au niveau des pouvoirs législatif et exécutif. La fonction évaluative doit être le pilier du fonctionnement d’une démocratie en Ali BOUABID, devenir. Les pratiques d’évaluation existent aujourd’hui au Maroc, mais elles Membre de Bureau de restent embryonnaires et s’apparentent plus au suivi qu’à l’évaluation. l’AME et Délégué Général de la Fondation Abderrahim Bouabid L’expérience française est donc importante pour le Maroc, notamment pour les ressemblances institutionnelles entre les deux pays. Cette expérience a transité par plusieurs étapes, pendant lesquelles des ajustements ont été opérés. Le lien très fort qui existe en France entre le contrôle et l’évaluation - les deux notions étant parfois superposées - suscite des réticences au Maroc, compte-tenu du régime fondé sur un Parlementarisme rationnalisé. Ainsi la majorité politique hésite à commander des évaluations qui pourraient soulever des problèmes créant par la suite des difficultés politiques. La compréhension de l’expérience française sera utile pour deux grands chantiers au Maroc : l’inscription de l’évaluation dans le Règlement Intérieur (RI) du Parlement et l’adoption de la Loi Organique relatives aux Lois de Finances (LOLF), qui devrait être soumise à concertation cet été. Intervention de Jean MALLOT, Député, Vice-président de l’AN française et du CEC Le contexte institutionnel français est celui de la constitution de 1958, fondant la Vème République, avec un exécutif fort et un Parlementarisme rationnalisé. Le Président de la République est élu au suffrage universel depuis 1962 et le Premier Ministre est responsable devant le Parlement, qui est bicaméral. L’Assemblée Nationale (AN) est élue au suffrage universel direct et devrait dans la nouvelle mandature qui s’annonce Page 4 - Association Marocaine de l’Evaluation Compte-rendu de la Journée d’Etude du 24 Mai 2012 retrouver plus de pouvoirs. Des commissions permanentes sectorielles existent dans les deux chambres : huit au sein de l’AN, sept au Sénat. Avant 2008, les commissions permanentes de l’AN pouvaient constituer des missions d’information et des commissions d’enquête, se rapportant précisément à leur champ d’action, comme la commission d’enquête sur le médicament « Mediator ». La Cour des Comptes est un organe juridictionnel indépendant en charge du contrôle et de l’évaluation, et qui, depuis peu, a pour fonction d’assister l’AN. Il faut différencier les notions d’évaluation et de contrôle. Jean MALLOT, Député et Vice-président de l’Assemblée Nationale française ; Vice-président du Comité d'évaluation et de Contrôle des Politiques Publiques Le contrôle de l’application des lois répond au besoin de savoir ce qu’il advient des lois qui ont été votées. Pour cela, il faut contrôler les actions de l’exécutif. Depuis 2005, chaque loi donne lieu à un rapport de l’AN sur la mise en œuvre de la loi, six mois après sa promulgation. La rédaction de ce rapport est nouvellement confiée à deux rapporteurs, un de la majorité et un de l’opposition, qui doivent réussir à travailler ensemble dans un but d’objectivité. Le Sénat fait quant à lui appel à une commission pour le contrôle d’application des lois, qui donne lieu à des coopérations entre l’exécutif et le Sénat. L’évaluation, c’est l’appréciation de l’efficacité d’une politique en comparant les résultats aux objectifs qui avaient été fixés et aux moyens de sa mise en œuvre. Il est donc essentiel de définir des objectifs précis pour pouvoir mener une évaluation. Il ne suffit pas de cataloguer ce qui a été fait pour mettre en œuvre la loi, il faut aussi pouvoir apprécier la façon dont cela a été fait et les impacts de cette loi. Depuis 2009, une loi organique prévoit l’obligation pour l’exécutif lorsqu’il présente un projet de loi au Parlement de l’accompagner d’une étude d’impact. Si cette étude ne s’avère pas complète, l’AN peut refuser d’inscrire le projet de loi à l’ordre du jour. Cette étude d’impact doit répondre à plusieurs questions : Faut-il une loi ? Quels sont les objectifs poursuivis (ce qui permettra ensuite de mener une évaluation) ? De quelle façon cette loi sera mise en œuvre ? Quels sont les résultats escomptés de cette politique traduite par le projet de loi présenté au Parlement ? La révision constitutionnelle de 2008 a introduit l’obligation d’évaluation des politiques. L’article 24 a été modifié et stipule désormais : « le Parlement vote non seulement les lois, mais il évalue aussi les politiques publiques ». La deuxième nouveauté constitutionnelle est l’assistance de la Cour des Comptes au Gouvernement et au Parlement dans l’évaluation des politiques publiques. Ces nouveautés ont été traduites dans le RI de l’AN. Le Comité d’Evaluation et de Contrôle des Politiques Publiques (CEC) a été mis en place en 2008. Le CEC est un organe de l’AN composé de 32 membres qui reflètent la composition politique de l’AN. Il y a seize membres de droit (les Présidents des groupes politiques et les Présidents des commissions permanentes) et quinze membres de l’AN, permettant un rééquilibrage de la représentation politique. Enfin, le CEC est présidé par le président de l’AN, ce qui donne poids et légitimité à cette institution. La mission du CEC est bien entendu l’évaluation et le contrôle de l’application des lois. A sa mise en place, les Président des commissions permanentes étaient réticents à son fonctionnement, parce qu’ils craignaient que le CEC ne leur enlève des prérogatives. Il est donc important de noter que les sujets étudiés par le CEC sont transversaux et touchent aux thèmes de plusieurs Commissions permanentes. Le droit de tirage est aussi important. Il ne serait pas pertinent que la majorité choisisse seule le sujet des évaluations, qui seraient alors toujours en sa faveur. Donc chaque groupe politique a le droit de choisir annuellement un sujet d’évaluation du CEC. Concernant l’organisation des travaux, le programme de travail est fixé chaque année. Chaque évaluation est menée par deux rapporteurs, l’un de la majorité, l’autre de l’opposition. L’évaluation et le diagnostique sont communs, mais les préconisations peuvent différer en fonction des convictions politiques de chacun (elles sont pourtant communes dans 90% des cas). Les rapports d’évaluation sont par la suite publiés , Page 5 - Association Marocaine de l’Evaluation Compte-rendu de la Journée d’Etude du 24 Mai 2012 rendus publics, et le CEC essaie de les médiatiser au maximum. Sur la courte période de juillet 2010 à février 2012, onze rapports ont ainsi été publiés. La question est ensuite de savoir ce qu’il advient des recommandations formulées. Il s’agit du suivi de la mise en œuvre des conclusions du rapport. Ceci est essentiellement une affaire de volonté politique. Ces recommandations, qui peuvent prendre la forme d’un amendement à la loi évaluée, buttent souvent sur l’exécutif qui ne souhaite pas apporter de modification aux lois déjà votées. C’est donc l’occasion d’un rapport de force dans l’équilibre institutionnel. Le suivi se fait par la transmission des rapports d’évaluation au Premier Ministre, puis la publication d’un rapport de suivi prévoyant l’adoption de propositions, d’amendements ou de résolutions par l’AN. Il existe aussi des semaines de contrôle, pendant lesquelles l’AN ne légifère pas mais organise des débats avec le gouvernement sur le suivi, le contrôle et l’évaluation des lois précédemment votées. Les rapports du CEC sont des documents de référence pour les débats de ces semaines. Il est important de persévérer pour voir les recommandations du CEC appliquées. Il est donc prévu d’adresser des questions aux ministres concernés sur l’application des conclusions du rapport d’évaluation, six mois après sa publication. Allocution de Sylvain SAUTIER, Fonctionnaire parlementaire, Administrateur au CEC Il s’agit de présenter les rapports produits au sein de CEC par les Parlementaires rapporteurs d’évaluation. Onze rapports ont donc été publiés à la mi-février 2012 sur des sujets très variés, comme la mise en œuvre du principe précaution, les incidences de la stratégie de Lisbonne, ou encore l’étude comparative des politiques sociales en Europe. Par ailleurs, cinq rapports de suivi ont été adoptés par le CEC, concernant les premières évaluations menées. Les moyens juridiques d’action prévus par l’article 24 de la constitution - « le Parlement évalue les politiques publiques » - ont aussi été déclinés dans une loi promulguée le 3 février 2011 sur proposition de Bernard Accoyer, Président de l’AN et du CEC. Cette loi organise les rapports entre le CEC et la cour des comptes et prévoit de larges pouvoirs d’enquête et d’accès à l’information aux rapporteurs du CEC, ce qui peut s’avérer difficile quand l’information est détenue par l’exécutif. Elle prévoit aussi que les pouvoirs des deux rapporteurs sont exercés conjointement. Sylvain SAUTIER, Fonctionnaire Parlementaire, Administrateur du Comité d’Evaluation et de Contrôle des Politiques Publiques de l’Assemblée Nationale Un secrétariat de neuf personnes assiste les Parlementaires du CEC dans leur travail. Cela représente un effort considérable de la part de l’AN en termes de ressources humaines. Mais l’équipe étant limitée, le CEC ne pourra pas traiter annuellement un grand nombre de sujets et doit cibler ses études en tenant compte du droit de tirage. Il doit donc mobiliser une force de travail extérieure, reconnue pour ses compétences et qui légitimera le travail des Parlementaires. Ils peuvent ainsi demander l’assistance de la Cour des Comptes et avoir recours à des experts extérieurs venant du privé. La façon de travailler est assez classique pour le Parlement. Il s’agit de réunions et groupes de travail, de tables rondes, d’analyses des travaux existants, de sondages et d’enquêtes par questionnaires, d’auditions des parties prenantes et d’experts, de déplacement sur le terrain, de missions à l’étranger pour mener des comparaisons internationales, etc. L’assistance de la Cour des Comptes est devenue une habitude depuis 2001, pour appuyer, étayer et préparer les travaux du Parlement. Jusqu’à présent, le CEC a formulé quatre demandes d’assistance à la Cour des Comptes : sur la médecine scolaire, sur l’hébergement d’urgence et sur deux sujets en préparation qui sont la politique de lutte contre tabagisme et la politique d’aide à la création d’entreprise. Cette assistance prend la forme d’un rapport de la Cour des Comptes, après un travail mené en coordination avec les rapporteurs. Le CEC décide de la publication ou non du rapport de la Cour des Comptes en annexe du rapport d’évaluation du CEC. Page 6 - Association Marocaine de l’Evaluation Compte-rendu de la Journée d’Etude du 24 Mai 2012 Sur le thème de l’hébergement d’urgence, les rapporteurs du CEC ont été nommés avant que la Cour des Comptes ne débute son rapport d’assistance. Il y a ainsi eu une très bonne communication entre les deux organes et des missions communes ont été organisées, dans le respect de leur indépendance respective. Le rapport de la Cour des Comptes s’est limité à une partie du sujet, que les travaux du CEC sont venus compléter. Il a aussi été fait appel à des prestataires spécialisés. C’est une nouveauté pour l’AN et cela reste une expérience ad hoc. Les prestataires étaient un cabinet d’audit et un universitaire. Etre un lien avec des personnes extérieures à l’AN a apporté à ces études un enrichissement humain et culturel assez important. Conclusion de Jean MALLOT, Député, Vice-président de l’AN française et du CEC L’expérience du CEC est encore récente puisqu’il n’a exercé que pendant les années 2009-2012. Quelques caractéristiques fortes ressortent de cette expérience, sur lesquelles il convient d’insister : - le caractère transversal des rapports, qui débordent du champ d’une seule commission ; - le droit de tirage, qui donne aux groupes politiques minoritaires le choix d’une évaluation ; - le travail commun des deux rapporteurs de groupes opposés. La bonne foi est de rigueur pour faire une évaluation commune avant les recommandations différenciées qui relèvent de l’idéologie politique. L’évaluation est une question de volonté politique. Il est difficile de mettre en place une culture de l’évaluation, puisque les résultats ne sont pas visibles à court terme. Pourtant, sur le long terme, la démarche évaluative permet d’objectiver les résultats des politiques publiques, et par là, de leur apporter continuité et crédibilité. Synthèse et ouverture des débats par Ali BOUABID, Membre du Bureau de l’AME Cette expérience française de l’évaluation fait échos à des situations marocaines pour lesquelles la mise en place d’une culture de l’évaluation est nécessaire : - L’équilibre entre la majorité et l’opposition au Parlement. Certains sujets primordiaux devraient pouvoir être soustraits du débat politique, dans un souci d’objectivation. - L’étude des projets de loi et leur application. Tout projet de loi devrait être accompagné d’une étude d’impact et toute loi adoptée devrait être accompagnée d’un rapport d’étape sur son application à six mois ou un an pour aboutir à une plus grande pertinence et efficacité des lois votées. Jusqu’à aujourd’hui, le bilan de l’Assemblée repose seulement sur le nombre de textes votés durant l’exercice. Il est donc quantitatif quand il devrait être qualitatif et porter sur les décrets d’application, leur mise en œuvre et l’efficacité des textes. - Les commissions permanentes et l’évaluation en général. En France, l’évaluation vient, en premier lieu, des commissions permanentes, puis le CEC assure l’évaluation et le contrôle sur des sujets transversaux. Il faut donc bien noter qu’il n’est pas seul à conduire l’évaluation des politiques publiques à l’AN française. - La semaine de contrôle. En France, l’AN consacre des semaines à débattre des lois votées et des évaluations menées. La publication de rapports d’évaluation sans débats publics n’a aucun intérêt. L’évaluation sert d’aiguillon pour ajuster et améliorer les politiques publiques. - La nature des sujets évalués, pas seulement techniques. Ils touchent le citoyen dans sa vie quotidienne, notamment sur les prestations du service public aux usagers. Il est donc très important de rendre accessibles les travaux d’évaluation au plus grand nombre. - Le rôle des rapporteurs est essentiel, mais il ne faut pas oublier l’ensemble des administrateurs qui travaillent dans l’ombre des Parlementaires. En conclusion, il est important de rappeler que le modèle français est intéressant à étudier, puisque, contrairement au modèle anglo-saxon, il est très proche de ce que le Maroc pourrait être en mesure de faire pour l’institutionnalisation de l’évaluation. Page 7 - Association Marocaine de l’Evaluation Compte-rendu de la Journée d’Etude du 24 Mai 2012 Questions et Réponses Questions : - Quid de l’approche genre dans l’évaluation des politiques publiques? - En supposant que le Président de République française n’ait pas de mandat électoral et pourrait définir l’essentiel des politiques publiques, quel serait votre travail au sein du CEC ? Autrement dit, quels sont les préalables pour mener un travail d’évaluation des politiques publiques ? - Quelles sont les ressources du CEC ? - Au Maroc, la Cour des Comptes a plus un rôle de contrôle que d’évaluation. Est ce qu’en France la Cour des Comptes a des départements séparés, l’un dédié au contrôle et l’autre à l’évaluation ? - Le CEC est relativement récent dans l’expérience française, mais pouvez-vous déjà faire une évaluation de son travail ? Que peut-on retenir pour s’en inspirer au Maroc ? - Pouvez-vous donner une définition du contrôle et est-ce que l’institution qui est en charge de l’évaluation doit aussi faire le contrôle comme la Cour des Comptes ? - Quelles sont les relations entretenues en France par les commissions parlementaires et l’exécutif avec les corps d’inspection ? - Selon nouvelle constitution marocaine, une séance par mois est réservée aux questions de politiques générales adressées au Chef du Gouvernement. Est-ce que l’AN française organise de telles séances ? Le cas échant, comment se déroule cette séance, en particulier sur l’équilibre du temps de parole ? Réponses : - Jean MALLOT : Sur les questions au Gouvernement, de nombreux règlements existent. Les séances de question d’actualité ont lieu chaque semaine et sont retransmis à la télévision publique. Le temps est limité à deux minutes par question et deux minutes par réponse. Le temps de parole, et donc le nombre de questions, est proportionnel aux groupes parlementaires. Mais ces questions orales cohabitent avec beaucoup d’autres modalités : les questions écrites, les questions orales sans débat, les séances de questions de contrôle, etc. La semaine de contrôle est organisée par la Conférence des Présidents des groupes parlementaires qui choisissent les sujets qui seront discutés. Forcément, le groupe majoritaire choisira des sujets qui valoriseront l’action du Gouvernement quand l’opposition fera le choix inverse. Ali BOUABID : Pendant cette semaine les rapports d’évaluation du CEC sont étudiés et discutés. Ils servent donc de point de départ au débat politique. - Jean MALLOT : Mener une évaluation sur le travail du CEC est une tâche très difficile après trois ans d’existence et des publications qui datent de deux ans seulement. Finalement, on pourrait dire que l’exposé fait aujourd’hui est une forme d’évaluation. Les points positifs sont le choix des thèmes des évaluations, le binôme des rapporteurs et les recommandations des rapports. La grande faiblesse est le suivi des rapports d’évaluation et donc la mise en œuvre de leurs conclusions, qui dépend de la volonté politique. L’évolution du fonctionnement démocratique de nos sociétés rend ces rapports d’évaluation absolument incontournables. Les citoyens disposent désormais de moyen d’information et d’expression, comme internet. Ils ne vivent plus dans l’obscurantisme et ils formulent leur propre opinion. C’est de ces opinions citoyennes que les débats politiques découlent. - Jean MALLOT : Sur la différence entre le contrôle et l’évaluation : l’évaluation, c’est la mesure d’une politique par rapport aux objectifs qui ont été fixés ; le contrôle, c’est la vérification que ce qui est fait ou a été fait est conforme aux règles et procédures en vigueur. La Cour des Comptes est avant tout une instance de contrôle. Ils « assistent » seulement le Parlement dans sa mission d’évaluation. Page 8 - Association Marocaine de l’Evaluation Compte-rendu de la Journée d’Etude du 24 Mai 2012 Ali BOUABID : A ce propos, il serait peut être intéressant de fixer des règles simples liant contrôle et évaluation. Par exemple, il s’agirait de fixer une règle qui prévoit qu’une politique qui n’a pas fait l’objet d’un contrôle ne peut pas être évaluée. Jean MALLOT : Il est en effet essentiel de prévoir à la fois le contrôle et l’évaluation qui sont complémentaires. - Jean MALLOT : Sur la question de genre, la parité est une loi qui existe déjà en France et qui doit être respectée. A cela doit s’ajouter une volonté politique forte, à laquelle l’on assiste aujourd’hui avec le premier Gouvernement du Président Hollande qui respecte parfaitement la parité. A l’AN, il existe une Commission en charge du droit des femmes et dont la présidente siège au CEC. - Jean MALLOT : Si la France n’était pas un régime présidentiel, il n’y aurait pas d’incompatibilité avec l’évaluation. Au contraire, le Chef de l’Etat d’une monarchie pourrait être le premier à demander des évaluations. Tout le monde a intérêt à ce que les politiques publiques soient évaluées, le Chef de l’Etat en premier. Aujourd’hui, on ne peut plus maintenir les citoyens dans l’ignorance, il est nécessaire de leur rendre des comptes. - Sylvain SAUTIER : La question du coût de fonctionnement du CEC est difficile à mesurer. Même s’il possède des ressources propres, ce coût est intégré au coût global de fonctionnement du Parlement. Cependant, le coût du recours aux prestataires extérieurs par le CEC peut être évalué entre 350 000 et 450 000 euros depuis sa création. La Cour des Comptes, quant à elle prend en charge ses propres frais de fonctionnement, y compris quand il s’agit d’assister le Parlement sur l’évaluation. Mais il est intéressant de noter que le CEC a émis une préconisation sur les heures supplémentaires qui a permis à l’Etat d’économiser 600 millions d’euros. Ainsi le coût de création et de fonctionnement du CEC a déjà été largement remboursé. Le rapport d’activité du CEC est disponible sur le site internet de l’AN. Il porte l’avis de Bernard Accoyer, Président de l’AN, qui est jusqu’ici satisfait du CEC. - Sylvain SAUTIER : Concernant les corps d’inspection et de contrôle, ils sont à la disposition de l’exécutif. Il est donc difficile pour le Parlement d’utiliser leurs services, puisque cela pose un problème institutionnel. Mais évidemment, à chaque évaluation qu’il mène, le CEC regarde d’aborde si les différents corps d’inspection ont déjà travaillé sur le sujet. - Boubker TITOUANI : Au Maroc, nous préparons l’adoption du nouveau RI de la Chambre des Représentants. Cela devrait permettre de régler quelques problèmes d’organisation du travail Parlementaire, comme l’agenda. Nous voyons, au Parlement marocain, le dépôt soudain de nombreux projets de lois, généralement à la fin de la législature, que le Parlement a des difficultés à étudier, faute de temps. Lors d’une journée d’étude rassemblant l’ensemble des acteurs, 80 recommandations ont été formulées à l’endroit du Parlement et de l’exécutif. Parmi ces recommandations, la demande de création d‘une base donnée qui reprendrait l’ensemble des engagements pris par le Gouvernement. Cette base de données serait un outil très pertinent de suivi de l’action du Gouvernement pour les Parlementaires. Pour conclure, il faut insister sur le fait qu’aujourd’hui, le Parlement et les Parlementaires ont pris de conscience la nécessité et de l’importance de l’évaluation des politiques publiques. Page 9 - Association Marocaine de l’Evaluation Compte-rendu de la Journée d’Etude du 24 Mai 2012 TABLE RONDE SUR LA REDDITION DES COMPTES ET L’EVALUATION DES POLITIQUES PUBLIQUES AU MAROC Les participants à la journée d’étude organisée par l’AME. Etat des lieux de l’Institutionnalisation de l’évaluation des politiques publiques par Ahmed BENCHEIKH Pour alimenter les débats de cette table ronde, il est important de dresser un état des lieux de l’institutionnalisation de l’évaluation des politiques publiques au Maroc, en distinguant d’une part l’état de l’institutionnalisation et d’autre part, la maturité des pratiques de l’évaluation. Règles Forum Pratiques Instances d’évaluation Institutionnalisation Maturité de la pratique Instance d’évaluation auprès de l’Exécutif NON Degré d’institutionnalisation - Gouvernement + OU - Instance d’évaluation auprès du Parlement NON Degré d’institutionnalisation - Parlement NON Missions d’évaluation au sein de l’administration publique OUI L’évaluation est répandue dans de nombreux secteurs de l’administration publique NON Système de suivi & d’évaluation OUI Pratique de l’évaluation au sein de la Cour des comptes Société nationale d’évaluation OUI Organisation professionnelle NON Revue scientifique NON Renforcement des capacités nationales + OU - Accès à l’information garanti par la loi NON Discours national concernant l’évaluation, notamment dans les médias + OU - Standards et considérations éthiques NON ? Pluralisme des évaluations ou des évaluateurs ? Prise en compte des résultats des évaluations ? Cet état des lieux prouve que le système d’évaluation des politiques publiques au Maroc est à un état très embryonnaire. Aziz IRAKI, Vice-président de l’AME et Modérateur de la table ronde Aujourd’hui, nous sommes à la veille de l’adoption du RI du Parlement, qui devrait contenir des dispositions concernant l’évaluation des politiques publiques. Cette journée doit donc servir à donner des pistes pour l’élaboration du RI en matière d’évaluation. L’avis des opérateurs de l’évaluation et des Parlementaires présents est donc très intéressant, puisque le but affiché est l’institutionnalisation de ce principe de l’évaluation qui figure dans la nouvelle constitution. Page 10 - Association Marocaine de l’Evaluation Compte-rendu de la Journée d’Etude du 24 Mai 2012 Azzedine AKESBI, Evaluateur professionnel et Membre de Transparency Maroc M. AKESBI a précisé qu’il s’exprime à titre personnel, en sa qualité d’évaluateur. Quatre points doivent être soulevés pour réfléchir à l’institutionnalisation de l’évaluation des politiques publiques au Maroc : la possibilité de pratiquer l’évaluation des politiques publiques dans le contexte marocain ; la possibilité de contributions pour la société civile ; les exemples de politiques publiques qui ont posé problème quant à leur évaluation ; et le système national d’intégrité, condition préalable à l’évaluation de politiques publiques. Sur les conditions requises pour institutionnaliser l’évaluation, il y a quatre questions préalables : Existe-t-il une culture de l’évaluation chez les responsables politiques ? Existe-t-il au Maroc une distinction entre les affaires qui relèvent du secteur public et celle qui relèvent du secteur privé ? La reddition des comptes est-elle compatible avec le statut consacré du sacré en matière de décision politique ? La reddition des comptes est-elle Azzedine AKESBI, suffisamment liée au mandat électoral et à la légitimité du contribuable ? Spécialiste de l’évaluation et Membre de Transparency Maroc La révision de la constitution du 11 juillet 2011 prévoit que le chef d’état est aussi le chef de l’exécutif et le chef du système judiciaire. Cela pose des problèmes de cohérence dans l’équilibre et la séparation des pouvoirs. De plus, le chef de l’état est un acteur politique et un acteur majeur dans différents secteurs privés. Il est donc à ce titre directement bénéficiaire de politiques publiques, comme la loi finances ou la politique fiscale… Est-il possible dans ce cadre d’envisager une réelle reddition des comptes ? La nouvelle constitution accorde un rôle très important à la société civile en matière d’élaboration et d’évaluation des politiques publiques. Mais ces articles constitutionnels précisent que ce rôle doit être en conformité avec la loi organique qui sera par la suite adoptée. Les Parlementaires devraient donc faire appel à la société civile et aux ONG pour discuter de l’élaboration de ces lois, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui. Nous pouvons ici donner l’exemple de la construction du TGV. Une coalition de la société civile, nommée« stop TGV », demande son arrêt, car les priorités à donner aux différentes politiques publiques n’ont pas été discutées et l’appel d’offre n’a pas été mené dans les règles. Il s’agit donc d’un projet de politique publique qui a été mené en dehors des institutions et en dehors de la loi. Le Parlement a de fait un grand rôle à jouer au niveau de l’évaluation. Mais il doit être en mesure de discuter des priorités politiques et de l’opportunité des lois. Par exemple, l’adoption d’une charte sur la décennie du développement de l’éducation n’avait fait l’objet d’aucun débat au Parlement. En 2008, le conseil supérieur de l’enseignement, actuellement gelé, a publié un rapport concluant que les objectifs de cette charte n’ont pas été atteints, à cause de problèmes de gouvernance. Immédiatement après la publication de ce rapport, un plan d’urgence pour l’éducation de 32 milliards a été lancé. 2012 marque la fin de ce plan et là encore nous sommes loin des objectifs qui avaient été fixés. Enfin, la question des politiques publiques de leur évaluation doit être posée dans le contexte du système d’intégrité national. Est-ce que le contexte et la pratique actuelle de la reddition des comptes ne sont pas un obstacle à l’institutionnalisation de l’évaluation des politiques publiques ? Pour répondre à ces questions, il faut faire l’état des lieux de neuf dimensions distinctes : la séparation des pouvoirs, l’indépendance des pouvoirs, l’équilibre des pouvoirs, la place du pouvoir discrétionnaire dans la prise de décision, le monopole du pouvoir, la redevabilité et légitimité du peuple à la base, l’accès à l’information, les contrepouvoirs et la transparence dans la prise de décision. Sur ces neuf dimensions, les facteurs défavorables dominent dans notre constitution et dans les pratiques politiques et institutionnelles. Ainsi, dans les conditions actuelles, il sera très difficile d’institutionnaliser l’évaluation des politiques publiques au Maroc. Page 11 - Association Marocaine de l’Evaluation Compte-rendu de la Journée d’Etude du 24 Mai 2012 Ahmed OUJAMHOUR, Directeur du bureau du groupe PPS au Parlement Ahmed OUJAMHOUR, Directeur du bureau du PPS au Parlement Il existe un manque de volonté politique pour impliquer le Parlement dans l’évaluation de politiques publiques. Dernièrement, le Conseil Constitutionnel a édité un arrêt qui considère que l’évaluation des politiques publiques ne rentre pas dans les attributions des comités du Parlement et qu’elle doit être discutée seulement dans le cadre des questions hebdomadaires au gouvernement. Par ailleurs, les élections du 25 novembre ont permis d’élire une élite de jeunes hommes et femmes qui dynamiseront les débats au Parlement. Une proposition serait de revoir les conditions d’accès à l’institution Parlementaire étant donné qu’il y a une faiblesse des compétences des députés, qui ne seraient donc pas en mesure de débattre autour de l’évaluation des politiques. Naïma BEN YAHYA, Députée Istiqlal Au contraire, la volonté politique est encore plus présente aujourd’hui. Les Parlementaires sont extrêmement motivés pour participer aux réformes actuelles, sauf quand il existe une différence idéologique majeure entre les députés et les ministres. Il faut mener un travail important sur les mentalités politiques, dans le but de faire un lien entre la responsabilité et la reddition des comptes. Ali BOUABID, Membre du bureau de l’AME et Chercheur Concernant le problème du régime politique qui rend impossible l’évaluation, il convient de souligner qu’il y a au Maroc un Chef d’Etat qui est partie prenante des politiques publiques et des activités privées ; il n’est de fait pas redevable. C’est la différence entre « Autorité et Responsabilité » avec « Responsabilité et Reddition des comptes » qui est inscrit dans la constitution. « Autorité et Responsabilité », c’est un régime qui soumet toute autorité à un devoir de redevabilité, tandis que pour « Responsabilité et Reddition des comptes », c’est la personne responsable qui doit rendre des comptes. Le Chef de l’Etat, juridiquement irresponsable, n’est pas redevable au Maroc. Pour le plan d’urgence de l’éducation, les Parlementaires devraient demander immédiatement une évaluation indépendante et impartiale. Si l’évaluation existe déjà au Maroc, le problème est qu’elle est réalisée par les ministères eux-mêmes, elle n’est donc ni indépendante ni impartiale. Depuis une à deux années, émerge massivement au Maroc une société civile très bien informée. Aucun acteur politique ne peut être indifférent à ce qu’elle pense. D’où l’intérêt de la question de la publicisation et du droit à l’information. Aujourd’hui il n’y a pas de diffusion des textes de lois en préparation et des rapports. Les textes sont présentés sans aucun exposé des motifs, c'est-à-dire d’explication et de justification de l’utilité de cette loi, à travers une étude d’impact par exemple. Ainsi, pour le TGV, il n’y a pas eu de débat sur la question mais surtout aucun responsable n’est capable de fournir des arguments pour défendre ce projet. Les Parlementaires ont une responsabilité importante avec l’élaboration du RI. Ils doivent introduire l’évaluation et l’exposé des motifs dans le règlement qui sera déterminant pour la vie politique pendant de nombreuses années. Rachida BENMESSAOUD, Députée USFP La liste nationale a permis une grande avancée : l’entrée des femmes au Parlement et leur participation politique. Le problème du Maroc est le manque de continuité des politiques. La réforme de l’enseignement a été menée par trois ministres différents qui avaient chacun leur vision propre. Une perspective intéressante serait de créer au Parlement une structure chargée d’une part du suivi et de l’évaluation et d’autre part du développement des instruments dont le Parlement dispose actuellement, comme le comité de contrôle parlementaire et les questions orales. Rachida BENMESSAOUD, Députée USFP Page 12 - Association Marocaine de l’Evaluation Compte-rendu de la Journée d’Etude du 24 Mai 2012 Najia ZIRARI, Membre du bureau de l’AME Il est fondamental d’avoir des données statistiques sur les politiques publiques, agrégées selon le genre, ce que les Parlementaires présents devraient exiger. Une action de politique publique doit améliorer le bien-être de la population et en principe réduire les inégalités, tant entre les femmes et les hommes qu’au sein de la population masculine et au sein de la population féminine. Pour concevoir de telles politiques publiques, mais il est essentiel de systématiser les données désagrégées par sexe. Hakima FASLY, Députée PJD Il ne faut pas être négatif sur la constitution en partant du principe qu’il y a des manques important. Elle apporte un cadrage, et ce seront par la suite les lois organiques de la nouvelle Constitution qui seront déterminantes en complétant la révision de la constitution, y compris sur l’évaluation des politiques publiques. La LOLF sera essentielle pour intégrer des dispositifs permettant au Parlement et à la société civile de jouer pleinement leur rôle dans l’évaluation des politiques publiques. La LOLF sera plus détaillée en étant votée sous forme de petits budgets et sur une programmation pluriannuelle axée sur les résultats. Il y aura donc une Hakima FASLY, Députée PJD meilleure visibilité des finances publiques. Il faut emprunter les techniques du privé pour les intégrer dans la gestion des politiques public. Il ne faut pas seulement changer les lois mais aussi les modes de travail. La chose publique n’est pas seulement de la responsabilité des Parlementaires, mais aussi de toute la société civile, des élus locaux, des fonctionnaires. La nouvelle constitution, responsabilise l’ensemble de la société marocaine. Moha BOUSTA, Inspection Générale des Finances L’IGS a déjà mené des évaluations, sur le programme de lutte contre la sécheresse par exemple. Cette responsabilité d’évaluation est lourde et relève d’abord du Parlement et des collectivités locales. Les Parlementaires doivent adopter une LOLF dans laquelle figure l’évaluation des politiques publiques. Il est aussi nécessaire d’avoir des dispositifs d’information développés pour recueillir les données qui fourniront des indicateurs pertinents. Cette tâche est difficile quand il n’y a pas ou très peu d’évaluateurs et de référentiels. Il faut donc former des évaluateurs. Moha BOUSTA, Inspection Générale des Finances Aziza ELKANDOUSSI, Députée PJD La présence de nombreuses femmes à cette journée d’étude prouve leur intérêt pour la question de l’évaluation des politiques publiques. Par ailleurs, il est essentiel de prévoir la création d’une structure indépendante, neutre et spécialisée dans l’évaluation pour éviter non seulement les contradictions idéologiques entre les partis politiques, mais aussi pour garantir une crédibilité aux évaluations de cette instance. Khalil BOUSSEDRA, Membre de l’AME et Ingénieur fonctionnaire Concernant le tableau présenté par M. Bencheikh sur l’institutionnalisation de l’évaluation, il serait souhaitable d’ajouter une colonne sur la conceptualisation de l’évaluation, qui est trop souvent confondue avec l’audit, le contrôle ou le suivi. Cette notion est en quelque sorte dissoute au milieu des autres. Il est donc difficile de mesurer le degré d’institutionnalisation de l’évaluation en tant que telle. Il faut en définir les objets que sont les projets, les programmes, les politiques. Par ailleurs, quand on discute du rôle du Parlement au Maroc, il faut distinguer la Chambre des Représentants et de la Chambre des Conseillers. Quelle est l’articulation des rôles et Page 13 - Association Marocaine de l’Evaluation Compte-rendu de la Journée d’Etude du 24 Mai 2012 des missions entre les deux chambres, notamment en termes d’évaluation ? Par exemple la Chambre des Conseillers a pour mission l’évaluation des politiques publiques territoriales. Enfin, sur le rôle de l’évaluation dans la conception des politiques publiques, le Maroc s’inscrit actuellement dans une démarche de stratégie sectorielle, malheureusement incohérente. Il y a un problème inhérent à la conception des politiques publiques puisqu’il faut savoir si l’on a des indicateurs et des stratégies qui se prêtent à l’exercice d’évaluation. Aziz IRAKI, Vice-président de l’AME et Modérateur de la table ronde La question de la culture de l’évaluation est essentielle. Cette culture doit pénétrer la société, grâce à la mission d’information de la société civile. Parmi les grands chantiers, il y a la création d’une instance de l’évaluation auprès du Parlement. Il faut définir sa composition politique, son mandat, sa programmation et ses missions qui doivent être transversales. Cette instance doit délivrer un appui technique au Parlement. Enfin, une question centrale est de savoir quelle suite donner aux rapports d’évaluation. Sans suivi, l’évaluation est inutile. Il faut donc prévoir des modalités de mises en débat, sachant que la nouvelle constitution prévoit une grande place pour la société civile aussi bien dans l’élaboration des politiques publiques que dans leur évaluation. Ainsi l’AME produira un mémorandum reprenant les points qui viennent d’être soulevés sur l’institutionnalisation de l’évaluation et le soumettra aux députés. A la rentrée, l’AME organisera un nouvel atelier s’intéressant plus spécifiquement aux politiques territoriales, destinée aux élus et fonctionnaires locaux, puisqu’il s’agit d’un autre chantier à mener dans la cadre de la régionalisation avancée. Azzedine AKESBI, Evaluateur professionnel et Membre de Transparency Maroc Une députée parlait de la nécessité de la continuité de l’Etat. Elle ne fait pas la différence entre le rôle du Parlement en termes de pouvoir et l’engagement de l’Etat, qui doit se faire dans le cadre des institutions. Sur la question des nominations, le Parlement a eu le texte à sa disposition, mais aucun député n’a demandé une commission parlementaire pour examiner les candidatures qui ont un rôle stratégique. Les Parlementaires ne se sont pas sentis concernés par ces nominations, alors qu’ils avaient un vrai rôle à jouer. Le Chef du Gouvernement a donc traité cette question décisive dans la conduite des politiques publiques en fonction de ses connaissances, comme s’il s’agissait d’une affaire personnelle. Cela pose d’immenses problèmes au niveau institutionnel de procédures, de critères, de transparence et d’équité. De même, l’essentiel des politiques publiques sectorielles n’est pas défini dans le cadre gouvernemental. Dans ces conditions, que peut-on attendre de l’institutionnalisation de l’évaluation des politiques publiques ? Il y a encore beaucoup de chantiers à mener. Ali BOUABID, membre bureau de l’AME Le système marocain est fondé sur une déconnection entre l’autorité et la responsabilité, qui est le lien nécessaire à toute démocratie entre le dépositaire de l’autorité et ses actes par le principe de responsabilité. En démocratie, quiconque dispose d’une autorité doit rendre des comptes. Dans le régime marocain, celui qui a l’autorité n’est pas responsable et celui qui est responsable n’a pas toujours l’autorité. Or la constitution ne parle pas d’autorité et de responsabilité ; elle relie la responsabilité à la reddition des comptes seulement. Conclusion de la table ronde par Ahmed BENCHEIKH, Président de l’AME La Semaine de l’Evaluation 2012 sera organisée en octobre par l’AME et comprendra un atelier spécifiquement dédié aux Parlementaires. Par ailleurs, l’AME va mener une grande étude sur l’état des lieux de l’institutionnalisation de l’évaluation des politiques publiques au Maroc. Pour conclure, M. BENCHEIKH a adressé ses plus vifs remerciements à l’ensemble des personnes présentes pour l’intérêt qu’ils ont donné à cette journée et leur participation active aux différents débats. Page 14 - Association Marocaine de l’Evaluation Compte-rendu de la Journée d’Etude du 24 Mai 2012 PROGRAMME DE LA JOURNEE D’ETUDE JOURNÉE D’ÉTUDE sur le thème : Rôle et responsabilités du Parlement dans l’évaluation des politiques publiques : Eléments pour le débat public. Jeudi 24 mai 2012 Hôtel Golden Farah Tulip, Rabat, Maroc PROGRAMME 09:00-09:30 09:30-09:40 Accueil des participants Mot de bienvenue et d’ouverture par Ahmed Bencheikh Président de l’Association Marocaine de l’Evaluation 09:40-10:40 Présentation du programme de la journée d’étude, par Mohamed Hanafi Secrétaire général de l’Association Marocaine de l’Evaluation L’expérience française en matière d’évaluation des politiques publiques Rôle et responsabilités de l’Assemblée nationale dans l’évaluation des politiques publiques en France : approche institutionnelle et politique Jean Mallot - Comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques, Assemblée nationale, France Mandat, rôle et responsabilités du Comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques en France Sylvain Sautier - Comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques, Assemblée nationale, France Modérateur : Ali Bouabid Délégué général de la Fondation Abderrahim Bouabid et membre du bureau de l’Association Marocaine de l’Evaluation 10:40-11:00 11:00-11:30 11:30-12:30 Pause café Q&R et discussion Table ronde sur la reddition des comptes et l’évaluation des politiques publiques au Maroc Avec la participation de parlementaires, de représentants de la Cour des comptes, de l’Inspection générale des finances, du Conseil économique et social, du Conseil de concurrence, de l’Instance centrale de prévention de la corruption, de l’Association des membres de l’Inspection générale des finances, de membres de la société civile, de médias, et d’invités de la coopération internationale au Maroc Modérateur : Aziz Iraki Professeur et vice–président de l’Association Marocaine de l’Evaluation 12:30-12:50 12:50-13:00 13:00-14:00 15:00-17:00 Q&R et discussion Clôture Déjeuner Assemblée générale élective de l’Association Marocaine de l’Evaluation (2012-2014) Nos partenaires : Page 15 - Association Marocaine de l’Evaluation Compte-rendu de la Journée d’Etude du 24 Mai 2012 ANNEXE 2 : NOTE CONCEPTUELLE DE LA JOURNEE D’ETUDE 1. CONTEXTE Suite à la présentation du mémorandum de l’Association Marocaine de l’Evaluation (AME) à la Commission de révision de la Constitution (1er juillet 2011) qui a largement contribué à la récente constitutionnalisation du principe d’évaluation, l’AME a décidé de mieux coordonner son action pour amorcer la phase d’institutionnalisation de l’évaluation des politiques publiques au Maroc. La nouvelle Constitution adoptée par référendum en juillet 2011, tendant à élargir les pouvoirs du Parlement, attribue à ce titre à ce dernier une double mission : d’une part, une mission de légiférer : « Le Parlement exerce le pouvoir législatif » ; d’autre part, une mission de contrôle et d’évaluation : « Il vote les lois, contrôle l’action du gouvernement et évalue les politiques publiques ». D’autres dispositions de la nouvelle Constitution font référence à l’évaluation des politiques publiques, notamment : « Le Chef de Gouvernement présente devant le Parlement un bilan d’étape de l’action gouvernementale (…) Une séance annuelle est réservée par le Parlement à la discussion et à l’évaluation des politiques publiques » (Titre VI: Des rapports entre les Pouvoirs : article 101). S’il est fait mention explicitement à la mission d’évaluation des politiques publiques dévolue au Parlement (Articles 70 et 101), il n’en demeure pas moins que la Constitution n’a pas donné de précision ni sur les instances auxquelles seront confiées les missions d’évaluation ni sur les modalités pratiques d’exercice de l’évaluation des politiques publiques au Maroc. Il est par ailleurs vrai que le Parlement peut utiliser la « capacité d’expertise » de la Cour des comptes. Mais en pratique le dispositif spécifique des liens entre le Parlement et la Cour des comptes reste à imaginer et à mettre en place. La problématique de l’évaluation des politiques publiques résonne fortement dans la mesure où elle offre un gage d’une transparence et d’une reddition des comptes accrues et de responsabilités mieux délimitées. En effet, la crédibilité des institutions ne repose plus sur leur seule existence formelle, voire sur leurs conditions d’émergence, mais sur un effet de démonstration du bien-fondé de leur action au service de l’intérêt général. Début 2011, lorsque les manifestants du « printemps arabe », au premier rang le Mouvement du 20 février, orientent le fond de leurs revendications sur la refonte des institutions en faveur d’une véritable démocratie représentative fondée sur une légitimité élective, ils n’oublient pas l’établissement de règles, de pratiques et d’une culture démocratique permettant d’accélérer le développement et de mettre un terme à l’injustice sociale. La constitutionnalisation du principe de l’évaluation des politiques publiques a crée de fortes attentes en termes de besoins de sensibilisation à la thématique, de formation et de renforcement de capacités dans les domaines du suivi et l’évaluation. En effet, le Maroc se caractérise aujourd’hui par un faible ancrage de la culture évaluative dans le paysage politico-institutionnel; à l’exception de quelques dispositifs sectoriels de recueils d’information, les travaux d’évaluation dignes de ce nom sont en effet bien rares et ne sont quasiment jamais rendus publics. Cependant, il est raisonnable de penser que la situation aujourd’hui pourrait rapidement s’améliorer en la matière. En effet, introduite et citée à neuf reprises dans la nouvelle Constitution de juillet 2011, l’évaluation apparaît comme l’une des thématiques clés sur laquelle l’Etat focalise ses ambitions pour rénover la gestion des affaires publiques. De plus, dans le texte constitutionnel, l’ensemble des acteurs politiques se trouvent interpellés par l’évaluation : parlementaires, collectivités territoriales, Cour des comptes, société civile, etc. Page 16 - Association Marocaine de l’Evaluation Compte-rendu de la Journée d’Etude du 24 Mai 2012 2. OBJECTIFS La présente journée devrait permettre aux participants de contribuer à de nouvelles actions en matière de réformes institutionnelles et de consolidation du processus démocratique au Maroc à travers les objectifs suivants : Combler le déficit juridique et pratique La journée d’étude offrira l’opportunité d’échanger sur le déficit tant juridique que pratique en matière d’évaluation des politiques publiques au Maroc. En effet, l’article 70 de la Constitution énonçant que le Parlement « vote les lois, contrôle l’action du gouvernement et évalue les politiques publiques » doit prendre toute son ampleur à travers une traduction législative qui détaille les moyens et pouvoirs du Parlement en matière d’évaluation. Engager la réflexion sur les dispositifs institutionnels et organisationnels de l’évaluation Si un important travail peut être mené au sein des commissions parlementaires traditionnelles, l’expérience internationale nous enseigne que le travail d’évaluation des politiques publiques peut difficilement être mené sans structures ou dispositifs institutionnels appropriés, dédiés ou placés au sein ou auprès du Parlement, et qui puisse mobiliser facilement une expertise externe (Office d’évaluation, Instituts universitaires, Cour des comptes, etc.) et assurer une collaboration continue avec les autres acteurs politiques, partenaires ou bénéficiaires des politiques publiques, à savoir les collectivités territoriales et la société civile. Promouvoir des espaces d’échanges et de collaboration sur la question de l’évaluation La journée d’étude vise à promouvoir de nouvelles méthodologies de collaboration entre parlementaires, élus locaux et société civile autour d’une même thématique, l’évaluation des politiques publiques, dans le but de concrétiser l’esprit de la nouvelle Constitution et ses dispositions en matière de démocratie participative et d’espaces de concertation politico-institutionnels. Définir les besoins en formation et renforcement de capacités en évaluation Enfin et surtout, la journée d’étude contribuera à la définition des besoins en formation et renforcement de capacités en matière d’évaluation et de reddition des comptes au Maroc (de l’approche générale jusqu’à la concrétisation juridique en passant par les aspects techniques). Concrètement, l’action proposée par l’AME est au cœur même de sa mission, à savoir de contribuer à l’amélioration de l’action publique et à animer le débat sur les décisions publiques à travers la promotion de la culture de l’évaluation et son institutionnalisation au Maroc. Elle s’imbrique avec tous ses axes de travail : développement institutionnel de l’association, plaidoyer pour l’institutionnalisation de l’évaluation, recherche-action et communication. L’AME mettra à profit les contacts et les réseaux créés lors de la « Semaine marocaine de l’évaluation » qu’elle a organisée en octobre 2010. Cette manifestation, consistant en une journée de débat public et de quatre ateliers de formation répartis sur deux journées, avait permis de réunir une centaine d’experts et de décideurs nationaux et internationaux autour de la thématique de l’évaluation des politiques de développement. Le travail de l’AME vient d’être récompensé par deux prix attribués par la Fondation Melinda et Bill Gates et l’Association africaine de l’évaluation (AfrEA) à l’AME et à son Président en tant que keynote speaker lors de la sixième Conférence de l’AfrEA (Accra, Ghana, 2012). Page 17 - Association Marocaine de l’Evaluation Compte-rendu de la Journée d’Etude du 24 Mai 2012 3. PARTICIPANTS ET DEBAT La participation à cette journée d’étude est faite exclusivement par invitation. Elle réunira 40 à 50 participants dont des parlementaires, de hauts responsables officiels, des représentants de la société civile et des experts en évaluation des politiques publiques. Le déroulement de la journée d’étude comprendra : L’ouverture et les allocutions des responsables invités et des partenaires de l’AME ; Deux présentations d’expériences institutionnelles d’évaluation des politiques publiques : Espagne (Catalogne) et France (Assemblée nationale, Comité d’évaluation et du contrôle des politiques publiques). Une présentation de l’Association Marocaine de l’Evaluation sur les conditions de l’évaluation des politiques publiques au Maroc. Un panel de parlementaires représentant les différents groupes parlementaires sur leur conception de la reddition politique des comptes au Maroc. La journée d’étude se basera sur des interactions et échanges entre les participants afin de générer une connaissance collective sur la question de l’évaluation des politiques publiques et la reddition politiques des comptes. Chaque session sera animée par modérateur qui organisera le déroulement du débat. 4. INFORMATION ET CONTACT Les participants qui souhaiteraient obtenir de l’information sur cette activité ou sur l’Association Marocaine de l’Evaluation sont priés de le faire via : Courrier électronique [email protected] ou le site web de l’AME : www.ame.ma. Téléphone : 05.37.77.41.62 / GSM Lhoussaine : 06.60.49.25.33. Page 18 - Association Marocaine de l’Evaluation Compte-rendu de la Journée d’Etude du 24 Mai 2012 ANNEXE 3 : NOTE DE CADRAGE DE LA TABLE RONDE QUELLES SONT LES CONDITIONS REQUISES POUR LA REDDITION POLITIQUE DES COMPTES ET L’EVALUATION DES POLITIQUES PUBLIQUES AU MAROC ? La présente note de cadrage expose les arguments justifiant l’institutionnalisation de l’évaluation des politiques publiques et la reddition des comptes au Maroc. A cette fin, il est opportun de définir les grandes lignes et le contenu essentiel de ce que pourrait être l’institutionnalisation de la fonction d’évaluation. Toute politique publique au Maroc doit, régulièrement, faire l’objet de reddition politique des comptes (Political Accountabilty) ouvert au débat public. La note de cadrage est structurée en deux parties : La première partie concerne le référentiel de l’Association Marocaine de l’Evaluation pour dresser l’état des lieux de l’institutionnalisation et la reddition des comptes au Maroc. Dans la deuxième partie, il s’agit de présenter les propositions de l’Association Marocaine de l’Evaluation et la justification de l’institutionnalisation de l’évaluation des politiques publiques au Maroc. 1. ETAT DES LIEUX DE L’INSTITUTIONNALISATION DE LA REDDITION DES COMPTES ET DE L’EVALUATION DES POLITIQUES PUBLIQUES DEPUIS L’ADOPTION DE LA NOUVELLE CONSTITUTION Le schéma qui suit est un tableau à double entrée qui nous permet de synthétiser l’état des lieux de l’évaluation au Maroc en termes d’institutionnalisation ainsi que la maturité de la pratique de l’évaluation au Maroc. Tableau 1 : Principales caractéristiques de l’évaluation au Maroc, 2012 Règles Forum Pratiques Instances d’évaluation Institutionnalisation Maturité de la pratique L’évaluation est répandue dans de nombreux secteurs de l’administration publique Instance d’évaluation auprès de l’Exécutif Non Instance d’évaluation auprès du Parlement Non Degré d’institutionnalisation Gouvernement Non Missions d’évaluation au sein de l’administration publique Etat embryonnaire Degré d’institutionnalisation Parlement Non Système de suivi & d’évaluation Etat embryonnaire Pratique de l’évaluation au sein de la Cour des comptes Non Etat embryonnaire Société nationale d’évaluation Oui Organisation professionnelle Non Revue scientifique Non Renforcement des capacités nationales Non Standards et considérations éthiques Etat embryonnaire Discours national concernant l’évaluation, notamment dans les médias Pluralisme des évaluations ou des évaluateurs Prise en compte des résultats des évaluations Accès à l’information garanti par la loi Etat embryonnaire Non Non Non Page 19 - Association Marocaine de l’Evaluation Compte-rendu de la Journée d’Etude du 24 Mai 2012 Pratiquement, tout reste à faire pour concrétiser le principe constitutionnel d’évaluation au Maroc : les modalités pratiques de la traduction de la constitutionnalisation de l’exigence d’évaluation de l’action publique ; la création d’un cadre institutionnel de prise en charge de la fonction évaluative au sein du Parlement ; les différents niveaux de conception et de mise en œuvre de la fonction évaluative avec une mise en évidence de la spécificité des instruments et des moyens utilisés à chaque niveau ; le rôle des parlementaires et des élus locaux, dans le cadre de la régionalisation avancée, pour la promotion de la pratique évaluative ; les réponses appropriées à trouver pour les questions importantes telles que la formation, les normes de qualité, les compétences, etc. 2. PROPOSITIONS POUR INSTITUTIONNALISER LA REDDITION DES COMPTES ET L’EVALUATION DES POLITIQUES PUBLIQUES AU MAROC L’Association Marocaine de l’Evaluation tient à rappeler qu’elle a présenté son « Mémorandum sur la question de la Constitutionnalisation de l’évaluation des politiques publiques à la Commission Royale chargée de la révision de la Constitution » (12 avril 2012). Cette initiative a largement contribué à la récente constitutionnalisation du principe d’évaluation (articles 70 et 101 de la nouvelle Constitution du Maroc). L’Association Marocaine de l’Evaluation souhaite, à l’occasion de cette table ronde, débattre de deux questions : D’une part, de la place de la reddition des comptes et de l’évaluation dans la déclaration du Chef du gouvernement au Parlement (23 janvier 2012) ; D’autre part, des propositions faites par l’AME en matière de reddition des comptes et d’évaluation des politiques publiques au Maroc. 1.1. Observations générales sur le programme du gouvernement Concernant le programme gouvernement, l’Association Marocaine de l’Evaluation enregistre avec intérêt la volonté du gouvernement d’instituer la reddition des comptes (lier la responsabilité à la redevabilité) comme fondement de l’action publique au Maroc. Cependant, il convient de relever qui suit : Le programme gouvernemental ne donne pas de contenu concret au principe de la reddition des comptes. L’AME rappelle que la reddition des comptes signifie l’obligation pour les responsables qui participent à la mise en place ou à la mise en œuvre de l’action publique, de donner des informations et des explications au Parlement et aux citoyens à propos des résultats attendus/obtenus et à propos de la bonne utilisation des ressources publiques. De même, la déclaration du Chef du gouvernement ne mentionne aucun dispositif relatif aux moyens alloués par le budget de l’Etat au Parlement pour mettre en pratique les dispositions constitutionnelles sur l’évaluation des politiques publiques, particulièrement les articles 70 et 101. Le programme du gouvernement mentionne la mise en place d’une instance d’évaluation auprès du Chef du gouvernement. Ce dispositif ne pourra pas garantir des misions d’évaluation indépendantes. Comme le spécifie la Constitution, l’action du gouvernement doit être évaluée, de manière indépendante. Cependant, le Conseil du gouvernement peut se doter d’une instance de coordination et de mise en cohérence des politiques publiques. Le programme gouvernemental ne donne pas d’indications sur les modalités de la reddition des comptes de l’action publique locale dans le cadre de la régionalisation avancée. Les stratégies et Page 20 - Association Marocaine de l’Evaluation Compte-rendu de la Journée d’Etude du 24 Mai 2012 programmes conçus à l’échelle nationale ne sont plus censés s’appliquer de la même façon à tous les niveaux du territoire. Ils seront appelés à composer avec d’autres considérations des lieux (physiques, sociales, économiques) où l’action publique doit être spécifique et son évaluation territorialisée et participative. Le changement du gouvernement est une réelle opportunité pour relever le défi de la culture de l’évaluation dans notre pays qui n’est pas encore suffisamment ancrée. Pour notre association il s’agit de faire de l'évaluation un véritable outil de conduite des politiques publiques qui permettra de réfléchir aux choix stratégiques du pays, voire de réorienter les priorités de développement. L’objectif ultime est de juger de la valeur des résultats obtenus et de leurs effets (ou absence d’effets) en vue de décider du maintien intégral d‘une politique publique, de sa modification, de son abandon ou de sa reconduite. 1.2. Les propositions de l’Association Marocaine de l’Evaluation Concernant l’institutionnalisation de la reddition des comptes et l’évaluation des politiques publiques, l’Association Marocaine de l’Evaluation propose ce qui suit : Initier une réflexion approfondie sur la fonction de l’évaluation des politiques publiques au Maroc, les modalités de sa pratique régulière et les relations entre les acteurs institutionnels directement concernés. Distinguer la fonction évaluative et la reddition des comptes. Ce sont là deux activités qu’il convient de différencier autant dans leurs finalités que dans les conditions de leur exercice. Mettre en place un dispositif de planification de l’introduction progressive de la fonction évaluative (politique, managériale et sociale) dans l’architecture du fonctionnement institutionnel. Organiser les différents niveaux de conception et de mise en œuvre de la fonction évaluative avec une mise en évidence de la spécificité des instruments et des moyens utilisés à chaque niveau. Créer un cadre institutionnel national de prise en charge de la fonction d’évaluation des politiques publiques au Maroc (Instance, office, etc.). Instituer une instance d’évaluation auprès du Parlement pour coordonner les évaluations indépendantes des politiques publiques et leur mise en cohérence, en la dotant de moyens et des compétences nécessaires à l’exécution de ses missions d’évaluation. Mettre en place auprès du Chef du Gouvernement une unité de coordination et de mise en cohérence des politiques publiques. Généraliser et harmoniser la fonction du suivi et de l’évaluation au sein de l’administration publique et les organismes publics. Mettre en place les modalités de mise en œuvre de la reddition des comptes et de l’évaluation de l’action publique au niveau des Conseils régionaux. Clarifier les différents mandats en matière du contrôle et d’évaluation confiés à la Cour des comptes, le Conseil économique et social, l’Inspection générale des finances, les Inspections générales des ministères, etc. Veiller à assurer, les garanties juridiques, de manière transparente requise afin de rendre possible l’accès à l’information administrative pour réaliser les mandats d’évaluation. Page 21 - Association Marocaine de l’Evaluation Compte-rendu de la Journée d’Etude du 24 Mai 2012 ANNEXE 4 : LISTE DES PARTICIPANTS Nom et prénom Structure 1 ABOURICHA Habib CDRT 2 AIT YOUSSEF Mohamed INAU 3 AKESBI Azzedine TRANSPARENCY Maroc 4 ALAMI BENANI Saadia Parlement - Députée (PJD) 5 BARGACH Abdellah Parlement - Député (Groupe ISTIQLAL) 6 BEN YAHYA Naima Parlement - Députée (Groupe ISTIQLAL) 7 BENASSI Lehcen Parlement - Député (Groupe ISTIQLAL) 8 BENCHEIKH Ahmed AME 9 BENMESSAOUD Rachida Parlement - Députée (Groupe socialiste) 10 BENYAKOUB Abdellatif Parlement - Député (PJD) 11 BERRADA GOUZI Ali Agence Nationale pour la Promotion de la Petite et Moyenne Entreprise 12 BOUABID Ali AME 13 BOUKHAFFA Mohamed AME / Consultant 14 BOUSSEDRA Khalil Haut Commissariat au Plan 15 BOUSTA Moha Inspection générale des finances 16 CHEMAOU EL FIHRI Adil Haut Commissariat au Plan 17 CHERRAJA Abdellatif ANRT 18 EDDAH Sidi Mohamed Chambre des conseillers 19 ELKANDOUSSI Aziza Parlement - Députée (PJD) 20 ELKHADIRI Saad Inspection générale des finances 21 ELMARAHI Mohamed Journaliste 22 ELMARGHADI Mohamed Secrétaire général du Conseil de la concurrence 23 ELYACOUBI Khalid ICPC 24 ESSARHIR Lhoussain Ministère de l’équipement et du transport 25 FASLY Hakima Parlement - Députée (PJD) 26 GASSAR Abdelhak Parlement - Député (PJD) 27 GHARSI Youssef Parlement - Député (PJD) 28 HAJARABI Jalil Inspection générale des finances 29 HANAFI Mohamed AME 30 IRAKI Aziz AME 31 IRAQI Hakima Architecte 32 LEHZAM Abdellah INAU 33 MALLOT Jean Assemblée Nationale française - Vice Président 34 MANHES Jean-Benoît UNICEF Maroc 35 MOUNTASSER Nour El Houda Agence Nationale pour la Promotion de la Petite et Moyenne Entreprise 36 OUFRID Fatima Agence urbaine Mohammedia 37 OUJAMHOUR Ahmed Parlement - Directeur bureau groupe PPS 38 RAMDANE Jamal Ministère de l’équipement et du transport 39 SADDOUQ Abdessamad Secrétaire général de TRANSPARENCY Maroc 40 SADKI Rim Fondation ABDERRAHIM BOUABID 41 SAUTIER Sylvain Assemblée Nationale française (administrateur au Comité d'Evaluation et de Contrôle) 42 TAMIM Mohamed INAU 43 TITOUANI Boubker Lafquih Parlement - Directeur du Contrôle et de Législation 44 TOUTAIN Olivier Consultant 45 ZERHOUNI Saloua Université Mohamed V 46 ZIRARI Najia AME Page 22 - Association Marocaine de l’Evaluation Compte-rendu de la Journée d’Etude du 24 Mai 2012 Page 23