Cas d`école en mer d`Iroise

Transcription

Cas d`école en mer d`Iroise
Cas d'école en mer d'Iroise
Extrait du ZigZag magazine
http://www.zigzag-francophonie.eu/Cas-d-ecole-en-mer-d-Iroise
Cas d'école en mer d'Iroise
- Articles sans restriction -
Date de mise en ligne : vendredi 19 février 2010
ZigZag magazine
Copyright © ZigZag magazine
Page 1/5
Cas d'école en mer d'Iroise
Les pêcheurs doivent-ils craindre cet outil de protection de la nature ? Des réponses en
Bretagne, deux ans après la naissance du premier parc marin
Mer d'Iroise - la sorcière de Brigognan
« Non au parc naturel marin ! » Au port du Conquet, un mur porte toujours la cicatrice d'un délicat accouchement.
Sur cette pointe de Bretagne où le violent courant du Fromveur bouscule la beauté fragile de l'archipel de Molène, la
préservation de l'environnement a levé des tempêtes.
Mer d'Iroise - l'île de Sein
Confinée ce jour-là au port par un tout autre coup de tabac, la flottille de pêche, dense, évoque une réalité : les
enjeux de protection de la nature n'ont pas refoulé toute activité humaine hors des limites du parc naturel marin de la
Mer d'Iroise. Le premier créé en France (le 28 septembre 2007), à l'ouest de l'Ouest, après vingt années de débats.
C'est un carré d'une cinquantaine de kilomètres de côté, dont l'île d'Ouessant au nord et la chaussée de Sein au sud
sont les sentinelles du large. Les 340 armements de pêche bretons qui travaillent dans le secteur - dont une centaine
auxquels il est vraiment indispensable à leur viabilité économique - tentent d'y saisir les clés du développement
durable. Tandis que, pour les pertuis charentais et les rives de l'estuaire de la Gironde, les consultations préalables à
la création d'un parc naturel marin sont lancées, craint-on ici de voir la nature mise sous cloche ?
Mer d'Iroise - le voilier la Recouvrance
Deux ans après la naissance du parc de la mer d'Iroise, le retour d'expérience des Bretons propose un éclairage
pertinent. Pour le moins ponctué d'exemples concrets, dans lesquels ils apparaissent comme les acteurs de leur
destinée. Jean-Pierre Carval, le président du Comité local des pêches en mer du Nord-Finistère, se souvient ainsi de
la prudence initiale. Des marins pêcheurs qui ont suivi le mouvement de création du parc « sur la pointe des pieds.
Cependant, ils avaient une certaine confiance dans le dispositif. Car ils ont vu l'intérêt qu'ils retireraient du parc pour
organiser la cohabitation entre les différents usages de la mer, et pour la prise en compte des enjeux sur la qualité
Copyright © ZigZag magazine
Page 2/5
Cas d'école en mer d'Iroise
du milieu ».
Mer d'Iroise - Pointe Beg ar Groaz
« On a changé d'esprit »
Une illustration a été fournie en baie de Douarnenez, où le parc a financé une étude sur les pollutions marines
d'origine terrestre. À Brest, où est installé le moteur de la création des parcs marins, le siège de l'Agence des aires
marines protégées, Philippe Le Niliot, son chargé de mission scientifique, confirme cette adhésion des
professionnels à la démarche. « D'accord, le discours des marins pêcheurs n'est pas uniformément lisse, et chaque
port a toujours sa « tête de pioche ». Mais la position invariable de présidents de comités locaux des pêches
favorables au parc ne les a pas privés d'une réélection. »
Il faut convenir que, depuis 2007, l'institution leur envoie des signaux forts. On retrouve ainsi le parc à la manoeuvre
dans un dossier sensible des relations entre l'Union européenne et les pêcheurs locaux : la protection des dauphins
par l'utilisation de répulsifs sur les filets. Coûteux et inefficace, clamaient les fileyeurs, au coeur de l'un des
sanctuaires français de mammifères marins. Le parc a mis la main à la poche pour tester les équipements, en
complément d'une étude nationale commandée par la Direction des pêches.
Bien peu, comparé à l'expérience menée sur la chaussée de Sein pour la langouste rouge, une espèce
emblématique de ces eaux. Mieux que l'idée d'une coexistence pacifique, c'est le chapitre d'une étroite collaboration
qui semble s'écrire ici. « Les gens qui s'engueulaient hier se parlent aujourd'hui, souligne le secrétaire général du
Comité régional des pêches, Gérald Hussenot. On a vraiment changé d'esprit. »
Mer d'iroise - depuis le phare de l'île Vierge
Copyright © ZigZag magazine
Page 3/5
Cas d'école en mer d'Iroise
Le contexte ?
Un effondrement vertigineux du stock de langoustes rouges. En 1990, 50 tonnes débarquées à la criée d'Audierne ;
seulement 4,5 t, fin 2004. « L'occasion s'est présentée de créer un cantonnement où la pêche à la langouste est
interdite, renchérit le Brestois Jean-Pierre Carval. Le parc apporte l'environnement scientifique pour aider la
profession à évaluer l'impact de cette mesure. Des pêches expérimentales sont ainsi organisées. Dans ce dossier, le
parc a aidé les pêcheurs à se motiver sur un programme concret, pour mieux gérer le stock. »
Mer d'Iroise - la criée de Plouhinec - Audierne
Mer d'Iroise - la criée de Plouhinec - Audierne
S'ils peuvent aujourd'hui considérer qu'ils sont, au sein du conseil de gestion du parc, représentés à hauteur des
enjeux pour l'avenir de leur profession (7 sièges sur 49), les marins pêcheurs ne sombrent pas dans la béatitude. «
Nous manquons parfois de lisibilité. C'est particulièrement vrai en ce qui concerne les zones labellisées Natura 2000,
sur lesquelles s'imposent les directives oiseaux et habitat », argumente Jean-Pierre Carval. « Certes, le
professionnel a un impact sur le milieu. Mais, en fonction des circonstances, nous avons l'impression que les aspects
environnementaux peuvent être plus déterminants dans les choix. C'est le risque avec le Grenelle de la mer. Il y a là
un véritable enjeu pour la recherche scientifique, tandis que le parc suscite ce besoin de mieux connaître le milieu
naturel », analyse-t-il encore.
« Ce parc est mort-né ! »
Et de prendre pour illustration la pêche aux laminaires : 45 000 tonnes d'algues arrachées du fond par une flottille
d'une quarantaine de bateaux, au large du Finistère. « Sur ce dossier, il ne peut pas y avoir de définition d'un bon
plan de gestion du parc sans étude précise. Dans l'esprit des gens, parce que nous arrachons, nous détruisons. Ça
n'est pas si simple. Les conditions naturelles, les tempêtes interviennent aussi dans la déstabilisation du milieu. »
Cap sur Plouarzel. À une vingtaine de kilomètres de la rade de Brest, la voix de Bernard Le Bihan se fait toujours
entendre, même si cet opposant au parc a démissionné de l'Advili (Association de défense et de valorisation des îles
et du littoral de la mer d'Iroise) depuis qu'un siège a été offert, au sein de l'association, au conseil de gestion du parc.
Même s'il considère qu'un « siège, ça ne pèse pas lourd », il n'en fait pas qu'une affaire comptable. Bernard Le Bihan
s'exprime désormais au nom de l'Observatoire du littoral, des îles, et de la mer d'Iroise.
Mer d'Iroise - phare de l'île Vierge
« Le problème ? Ce conseil de gestion est indéboulonnable. Ce sont des gens qui ne peuvent que s'entendre, qui
étaient déjà de bons soldats à l'époque du comité de pilotage, liés par des intérêts politiques. Ils écartent les
populations des décisions. Ce parc, c'est un enjeu de pouvoir et un enjeu pécuniaire. Un réseau de relations qui agit
avec la complicité de l'État. On est entrés dans la troisième année de fonctionnement, et rien n'a bougé. Pour moi, ce
Copyright © ZigZag magazine
Page 4/5
Cas d'école en mer d'Iroise
parc est mort-né ! »
Philippe Baroux
www.sudouest.com
Copyright © ZigZag magazine
Page 5/5

Documents pareils