05_Le Prophète: biographie
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05_Le Prophète: biographie
Les fondations de l’Islam : approche historique PROF CLAUDIO MONGE Université de Fribourg Faculté de Théologie AA. 2009-2010 Mahomet 570 LA MECQUE, naissance de Mahomet ou Mohammed (en arabe Muhammad signifie «celui qui est loué»)1, dit le Prophète de la tribu des Qoreïch, prophète de l’islam. D’après la Sîra, orphelin dès sa naissance, Mahomet est accueilli et élevé par grand-père Abdel Mottalib, puis par son oncle Abou Tâlib et assez tôt chargé de la garde des troupeaux. Plus tard, il entre au service d’une riche veuve, Khadidjah. Il accompagne ses caravanes en Syrie, et elle l’associe à ses affaires puis l’épouse. Ils ont sept enfants: trois fils, qui ne vécurent pas, et quatre filles; la plus jeune, Fatima, épousera Ali, cousin de Mahomet, et assurera la descendance du Prophète. La Mecque, cité caravanière, était le lieu d’un pèlerinage polythéiste; cependant, l’existence d’un courant monothéiste y est attestée. 595 Le Prophète Mahomet épouse Khadija. Suivent quinze années dont on dispose de très peu d’information. 610, Mahomet avait pris l’habitude de méditations solitaires dans une grotte du mont Hira près de La Mecque; c’est là, par des songes d’abord, par des visions ensuite, qu’il a, par l’intermédiaire de l’archange Gabriel, la révélation de la mission dont Dieu l’investissait. Plusieurs textes coraniques nous parlent de la vocation du Prophète : s. LIII, s. LXXXI, 23, XCVII,1 et XLIV, 2. Mais le premier message d’Allah est relaté par la s. XCVI, 1-52. Il peut se résumer ainsi : Dieu seul est créateur (s. XCVI, 1-5 ; LXXX, 17-22 ; LXXXVII début) ; Dieu est bon envers Mohammed et les hommes (XCIII, 3-8 ; LXXX, 25-31) ; tout passe mais Dieu seul est permanent (LV, 26). La réponse de l’homme à la bonté de Dieu est l’ADORATION. D’où les divers ordres d’adoration adressés dans les plus anciens passages du Coran à Mohammed ("Ton Seigneur, glorifie-le ! Purifie tes vêtements !", LXXIV, 13) ou à la communauté tout entière (LXXXVII, 15). L’entourage du Prophète reçoit son message et l’encourage; les riches commerçants de La Mecque repoussent une doctrine qui ruinait leurs intérêts, tandis que les humbles formèrent un groupe d’adeptes. 1 Les données traditionnelles recueillies par Ibn Sa’d (m. en 843) nous apprennent que Mohammed serait mort à l’âge de 63 ou 65 ans, ce qui le ferait naître en 569 ou 567. Selon d’autres sources arabes, Mohammed est né lors de l’Année de l’Eléphant, c-à-d l’année de l’expédition des Abyssins contre La Mecque, soit 571. La fourchette pour la naissance de Mohammed est donc de 567 à 572. On retient généralement 570. 2 Nos citations coraniques sont tirées de Blachère, R., Le Coran, Paris, Maisonneuve & Larose, 1966. Mais il y a bien sur d’autre traduction, ou mieux, « essai de traduction », comme celui de Jacques Berque, Le Coran. Essai de traduction, Paris, Albin Michel, 2002. On reviendra, dans la deuxième partie de ce cours, sur les questions concernant le Coran et les sources de l’Islam. C’est déjà à partir de ces premiers versets supposés de la Révélation, qui commencent les divergences de traduction : « Au nom de Dieu clément et miséricordieux. 1. Lis, au nom de ton Seigneur qui a créé tout ; 2. Qui a créé l’homme de sang coagulé. 3. Lis, car ton Seigneur est le plus généreux. 4. Il t’a appris l’usage de la plume ; 5. Il apprit à l’homme ce que l’homme ne savait pas. ». C’est la version de Kasimirski (Le Coran, Paris, Classiques Garnier, 1999) qui, comme celle de Jacques Berque, traduit le premier mot révélé par Allah le Très Haut, "Iqra", par « Lis », c’est à dire qu’il aurait invité les Hommes et les Femmes à la science, car sans science, on ne peut pas connaître le Créateur. Cette traduction est contestée par Blachère, qui traduit par « prêche » ! Les fondations de l’Islam : approche historique PROF CLAUDIO MONGE Université de Fribourg Faculté de Théologie AA. 2009-2010 612, début de la prédication de Mahomet à la Mecque, où les tribus arabes venaient adorer 360 idoles dans la Ka’ba et des divinités païennes : Alat, Houbal, Azat, Manat… L’opposition à cette prédication se centre sur le problème du monothéisme. On doit distinguer deux périodes durant ces vingt ans de ministère (612 – 632). La première à la Mecque, avec un certain nombre de conversions. Brimée, la première communauté est trop faible pour contre-attaquer : elle se tait et supporte. Mohammad reste au Hedjaz. Vers 616, soixante-dix néophytes sont envoyés en Abyssinie pour fuir les persécutions. Les pressions concernent surtout les membres de la communauté qui n’avaient aucune relation avec un clan. 619, ayant perdu son oncle Abu Tâleb et sa femme Khadîja qui tous deux le protégeaient – socialement et moralement, Mahomet dut chercher refuge hors de La Mecque, où il s’opposait désormais à son oncle paternel Abu Lahab. 621 Ascension et Voyage Nocturne du Prophète de La Mecque à la Mosquée éloignée de Jérusalem (s. XVII, 1). Il faut distinguer le Voyage Nocturne (isrâ'), qui est un voyage terrestre de la Mosquée Sacrée (La Mecque) vers la Mosquée Al-Aqsâ (Jérusalem), de l’Ascension (mi'râdj) qui est un voyage de la Terre vers le Ciel, de Jérusalem vers les cieux les plus élevés, vers un point auquel nul homme n’avait auparavant jamais accédé. Selon la Sîra, le Prophète a miraculeusement voyagé de nuit de La Mecque à Jérusalem. Là, sur l’esplanade du Temple il retrouve ses prédécesseurs Abraham, Moïse et Jésus, et prie avec eux. On lui apporte trois récipients: le lait, le vin et l’eau: Je pris le récipient de lait et en bus. Gabriel dit: tu es bien dirigé et ton peuple avec toi, ô Mohammed. Puis c’est justement la visite de l’enfer et des cieux. 622 - L’Hégire - hidjra, (année 0 de l’ère islamique) la communauté – qui pouvait se monter à deux cents fidèles –émigre à la ville de Yathrib, qui prit justement le nom de Al-Madinat an-Nabi (la «ville du Prophète» ou Médine), oasis de cultures, située à plus de 400 km au nord de la Mecque. C’est la rupture, la déclaration de guerre. Beaucoup de mon de pense que l’Hégire marque le début de l’ère musulmane, quand l’islam cesse d’être une simple religion pour devenir État et société. L’Hégire est le moment où Mohammed cesse d’être simple chef religieux pour devenir chef d’État et leader politique. 622-632 La cité Etat de Médine et une partie de la Péninsule Arabique Le Prophète organise à Médine la communauté musulmane (umma), formée de deux catégories égales d’adeptes: les Muhadjirun, émigrés mecquois, et les Ansar, disciples de Médine, qui formaient la moitié de la population de l’oasis et se rallient à l’Islam malgré les réticences d’une minorité que l’on appelle « les hypocrites ». Mohammad se présente comme un nouveau Moïse (cf. Coran LXXIII, 15). Tel un prophète tout puissant lorsqu’il parle au nom de Dieu, il dirige tout et très rarement il consulte les siens. Ranimant la foi monothéiste d’Abraham (Ibrahim), Mahomet donne des racines purement arabes à l’organisation culturelle et liturgique (qu’il précise au fil des années). Des guerres opposent les musulmans aux païens de la Mecque. 624 Mohamed se lance dans une attaque contre une caravane mecquoise à Badr. Préalablement informés des ses plans, les mecquois tentent de l’écraser avec des troupes supérieures en nombre, Les fondations de l’Islam : approche historique PROF CLAUDIO MONGE Université de Fribourg Faculté de Théologie AA. 2009-2010 mais les musulmans finissent tout de même par les mettre en déroute. Ce succès, connu sous le nom de victoire de la bataille de Badr. 625 les mecquois tiennent leur vengeance en battant les musulmans à la bataille d’Ohod. Cette première défaite de l’Islam ébranle l’esprit de nombreux croyants, mais Mahomet détourne le sens de cette défaite en imaginant qu’Allah voulait mettre à l’épreuve les croyants. 627 Enfin les mecquois tentent une attaque massive contre Médine, ou « bataille du fossé ». Ils assiégent la ville, mais doivent abandonner leur entreprise à cause d’un fossé qu’ils ne peuvent franchir. C’est à l’issue de cette bataille que Mahomet, reprochant aux juifs leur trahison supposée, ordonne l’extermination des membres mâles de la tribu des Qurayza. 628 Après quelques ultimes escarmouches sans succès, les Koraïchites de la Mecque comprennent qu’il ne leur reste plus qu’à se soumettre. C’est chose faite par le traité d’Hodaïbiya (Hudaybiya)3 en qui autorise les musulmans à effectuer un pèlerinage l’année suivante à la Mecque. 630, les Mecquois ayant rompu la trêve, le Prophète entre à la Mecque à la tête d’une armée de 10.000 hommes mais sans effusion de sang. Il se rend à la Kaaba, le sanctuaire de tous les Arabes, frappe les idoles aux yeux et ordonne de les détruire avant de retourner à Médine. Les païens de la Mecque et de l’Arabie se rallient en masse. 632, toute l’Arabie était pratiquement islamisée. Mahomet fait le pèlerinage (dit «de l’Adieu») à La Mecque et en codifie les rites ; au retour, il tombe malade et meurt le 8 juin 632 à Médine. Abou Bakr, est élu Calife (Khalifa « succession », 632 – 634). 3 Village d’Arabie situé près de La Mecque, al-Hudaybiya a donné son nom à un traité conclu entre Mahomet et ses ennemis mecquois en mars 628. Ce traité de paix auquel le Coran fait allusion [sourate XLVIII, v.18 et 27] stipulait notamment que les deux camps devaient déposer les armes et se respecter mutuellement pendant dix ans, en évitant tout pillage et toute agression [voir M. Gaudefroy-Demombynes, Mahomet, Paris, Albin Michel, 1957, p.167]. Profitant de cette paix conclue avec les habitants de La Mecque, Mahomet a renforcé son pouvoir en lançant une série d’expéditions militaires contre d’autres tribus polythéistes ou juives d’Arabie. Dès 630, après seulement deux ans de trêve, Mahomet devenu militairement fort a pris la tête d’une troupe de 10 000 musulmans pour attaquer ses ennemis.