Neuroimagerie Mise à jour 2006
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Neuroimagerie Mise à jour 2006
Mise à jour 2006 Neuroimagerie Un rapport sur les progrès récents de la recherche sur le cerveau Un rapport sur les progrès récents de la recherche sur le cerveau Neuroimagerie Mise à jour 2006 THE EUROPEAN DANA ALLIANCE FOR THE BRAIN EXECUTIVE COMMITTEE William Safire, Chairman Edward F. Rover, President Colin Blakemore, PhD, ScD, FRS, Vice Chairman Pierre J. Magistretti, MD, PhD, Vice Chairman Carlos Belmonte, MD, PhD Anders Björklund, MD, PhD Joël Bockaert, PhD Albert Gjedde, MD, FRSC Sten Grillner, MD, PhD Malgorzata Kossut, MSc, PhD Richard Morris, Dphil, FRSE, FRS Dominique Poulain, MD, DSc Wolf Singer, MD, PhD Piergiorgio Strata, MD, PhD Eva Syková, MD, PhD, DSc Executive Committee Barbara E. Gill, Executive Director La European Dana Alliance for the Brain (EDAB) regroupe environ 166 des plus grands spécialistes des neurosciences de 27 pays, dont cinq prix Nobel, qui se sont donné pour but de sensibiliser le public à l’importance de la recherche sur le cerveau. Fondée en 1997, cette organisation situe son action au carrefour du laboratoire, de la recherche et du grand public. Pour de plus amples renseignements : The European Dana Alliance for the Brain Dr Béatrice Roth, PhD Centre de Neurosciences Psychiatriques Site de Cery 1008 Prilly / Lausanne e-mail : [email protected] Couverture : Marcus Raichle, MD Visions du cerveau : un rapport sur les progrès récents de la recherche sur le cerveau Mise à jour 2006 Neuroimagerie 5 Introduction Thomas R. Insel, MD 9 La neuroimagerie Marcus Raichle, MD 15 Le cerveau vieillissant Marilyn Albert, PhD et Guy McKhann, MD Les progrès de la recherche sur le cerveau en 2005 23 Les pathologies apparaissant durant l’enfance 31 Les troubles moteurs 39 Les atteintes du système nerveux 47 Neuroéthique 55 Les maladies neuroimmunologiques 63 La douleur 71 Troubles psychiatriques et toxicomanies 81 Les troubles des sens et des fonctions corporelles 89 Cellules souches et neurogenèse 99 Les troubles de la pensée et de la mémoire 109 Références 121 Imaginez un monde... Introduction Thomas R. Insel, MD Direktor, National Institute of Mental Health, National Institutes of Health O n prête généralement à Winston Churchill l’aphorisme selon lequel on existe de ce que l’on reçoit et vit de ce que l’on donne. Que le mot soit de lui ou non, il conviendrait tout aussi bien à la science qu’à l’homme. N’en a-t-on pas une belle illustration avec les neurosciences, qui n’ont jamais autant vécu, jamais autant donné à la société ? Nombreux sont en effet dans cette mise à jour les exemples de domaines dans lesquels ont été enregistrées des avancées remarquables. Mais ce ne sont que des exemples. Si l’on voulait rendre compte de tous les progrès réalisés dans les neurosciences, dix brochures comme celle-ci n’y suffiraient pas, même en s’en tenant à la seule année 2005. Comme on pourra le constater d’un bout à l’autre de cette Mise à jour, les neurosciences fournissent sur le cerveau des connaissances dont la santé publique a un besoin urgent. Les maladies du système nerveux, qui sont plus de 1000, nécessitent un nombre plus élevé d’hospitalisations que n’importe quel autre groupe de maladies, affections cardiovasculaires et cancer compris. L’accident vasculaire cérébral est l’une des trois premières causes de mortalité, la dépression est pour les adultes de moins de 45 ans la maladie la plus invalidante et l’on compte toujours presque deux fois plus de suicides que d’homicides. Le vieillissement de la population fait de la maladie d’Alzheimer ainsi que d’autres maladies neurodégénératives un problème de santé publique toujours plus pressant, tandis qu’à l’autre extrême de la vie, les troubles de type autistique ont été multipliés par dix en une décennie et sont maintenant estimés à une naissance sur 166. Nous possédons heureusement pour faire face à ces problèmes de santé publique de nouveaux outils, de nouvelles technologies extraordinairement efficaces, dont on verra les résultats tout au long de ce rapport et qui doivent être salués comme des contributions capitales au progrès. 5 Le projet du génome humain, dont l’achèvement a été annoncé à grand renfort de publicité en 2003 (à l’occasion du 50e anniversaire de l’article de James Watson et Francis Crick décrivant la double hélice de l’ADN), nous a fourni une carte consensuelle de l’ADN humain, mais sans décrire les variations génétiques. Or les variations génétiques sont la clé dont on a besoin pour comprendre la vulnérabilité individuelle, la résistance aux maladies ainsi que la diversité humaine. Une carte des variations de l’ADN humain nous en apprendrait peut-être davantage encore que la carte consensuelle initialement proposée. Cette année s’est achevé le projet « HapMap », première carte exhaustive des haplotypes humains, où figurent les millions de points de variation de notre génome 1. Grâce à HapMap et à de nouvelles puces permettant de dresser la carte des variations, la génétique est aujourd’hui un outil considérablement plus économique et plus rapide. Le lien entre les variations individuelles de la séquence ADN et le risque de maladie peut maintenant être établi pour des affections génétiques complexes et non plus seulement pour des maladies à gène unique, telles que la chorée de Huntington. Utilisant la puissance de cette approche du génome entier pour identifier des variations génomiques conférant un risque de dégénérescence maculaire liée à l’âge et de maladie de Parkinson, des scientifiques ont profondément modifié en 2005 notre conception de ces deux maladies 2, 3 et ils pourraient en faire autant, au cours des prochains mois déjà, pour toute une série de maladies du système nerveux allant de l’autisme à la maladie d’Alzheimer. Une nouvelle perspective du cerveau nous est également donnée par la neuroimagerie, dont Marcus Raichle passe en revue les avancées. La visualisation des cellules individuelles du cerveau vivant, en particulier, a beaucoup progressé. L’amélioration des outils dont on se sert pour étudier les structures de même que les fonctions du cerveau permettent maintenant d’identifier les voies par lesquelles circule l’information. Grâce à l’imagerie, on peut aujourd’hui cartographier la remarquable plasticité du cortex humain 4, les circuits impliqués dans le traitement des visages et du langage 5 et même la trace des informations encodées sans que le sujet en ait concience 6. 6 Nous n’aurions peut-être jamais imaginé que l’anatomie de nos cerveaux pouvait être à ce point dictée par nos gènes, sachant qu’une moindre variation génétique puisse entraîner des modifications très ciblées de la Introduction structure et de la fonction du cerveau 7. En lisant les parties de ce rapport consacrées aux connaissances fournies par la neuroimagerie, on est frappé de ce que le cerveau est organisé d’une manière que nous jugeons contreintuitive. Plus on s’approche d’une cartographie détaillée des circuits soustendant les émotions ou la conscience, plus ces processus mentaux nous semblent mystérieux (et complexes). Le domaine qui nous aura réservé le plus de surprises est sans doute celui des cellules souches. Ainsi, les neurones, que l’on s’attendait à voir figurer parmi les cellules adultes les plus complexes à dériver des cellules souches, se sont montrés parmi les plus faciles à élever en culture. On le verra dans ce rapport, on connaît mieux, grâce aux progrès réalisés en 2005, les étapes à parcourir pour faire pousser un neurone à partir de la cellule précurseur la moins développée. Ce sont là des recherches auxquelles s’intéresse évidemment de très près la médecine régénérative, domaine entièrement nouveau, né de la biologie des cellules souches. Fait moins spectaculaire mais tout aussi important, les cellules souches constituent aussi un outil puissant pour les chercheurs étudiant l’incidence qu’ont sur la destinée du neurone en devenir les variations génétiques ou les facteurs environnementaux 8. Nous voilà capables, pour la première fois, d’étudier la nature et d’élever, de cultiver au niveau cellulaire. Comment va-t-on transformer les avancées réalisées dans chacun de ces domaines – génomique, imagerie, biologie de la cellule souche – en avancées de santé publique ? Car si chacune de ces technologies peut être une arme efficace au service de la santé, chacune peut aussi être utilisée pour perpétuer des injustices. Discipline émergente, la neuroéthique s’interroge sur les moyens d’éviter que la neuroimagerie soit détournée pour sonder la pensée des gens ou que des compagnies d’assurances refusent des gens sur la base de leur profil génétique. Si certaines préoccupations relèvent du fantasme (la neuroimagerie ne serait guère utile pour lire dans la pensée, et la prédiction d’un risque de maladie par la génomique est une démarche essentiellement statistique), les spécialistes des neurosciences réfléchissent de plus en plus à l’usage à faire de cette science pour qu’elle serve le bien public, comme le font les applications décrites dans ce rapport. J’ai dit tout au début de cette introduction que les scientifiques vivaient de ce qu’ils donnaient. Début 2005, les spécialistes des neurosciences ont commencé à s’unir pour donner davantage. Le Neuroscience Blueprint, 7 projet lancé par les National Institutes of Health (NIH), en est un excellent exemple 9. Tout comme la NIH Roadmap, qui doit aider à dépasser ce qui fait obstacle au progrès médical, le Neuroscience Blueprint est une initiative multi-institutionnelle ayant pour but une meilleure connaissance du système nerveux bien portant et malade. On lui doit déjà des programmes de formation sur la neurobiologie, des collaborations renforcées dans les domaines de la neurogénomique et de la neuroimagerie pédiatrique, ainsi qu’un forum au sein duquel travaillent ensemble tous les instituts des NIH s’intéressant aux neurosciences. Pour 2006 sont prévus le développement de lignées de souris transgéniques à usage neuroscientifique, des formations en neuroimagerie ainsi que la constitution de ressources multi-institutionnelles destinées aux chercheurs travaillant en milieu universitaire. Si les années 1990 ont été la décennie du cerveau, les années 2000, au cours desquelles furent identifiés la plupart des gènes, des protéines et des voies jouant un rôle important dans la fonction cérébrale, pourraient bien apparaître, avec le recul, comme celle de la découverte. A mi-chemin de la décennie, le présent rapport reflète le bouillonnement d’une recherche qui avance dans la connaissance la plus fine de l’organe le plus complexe du corps humain. Les découvertes dans le domaine de la recherche en neurosciences débouchent de plus en plus sur des connaissances utiles à la santé publique et améliorent les manières d’aborder des atteintes aussi différentes que la maladie d’Alzheimer, l’autisme ou les toxicomanies. Pour les personnes qui souffrent d’une maladie du système nerveux, la recherche est l’espoir. Jamais les raisons d’espérer n’ont été aussi nombreuses. 8 La neuroimagerie Marcus Raichle, MD I l y a longtemps que psychologues et spécialistes des neurosciences rêvaient de pouvoir rapporter les comportements humains aux événements neuronaux qui les sous-tendent. Dans The Principles of Psychology, monumental ouvrage en deux volumes publié en 1890, William James pose clairement le problème : « Une science de l’esprit doit réduire [...] les complexités (comportementales) à leurs éléments. Une science du cerveau doit désigner les fonctions de ses éléments. Une science des rapports entre l’esprit et le cerveau doit montrer comment les ingrédients élémentaires du premier correspondent aux fonctions élémentaires du second. » 1 Grâce à l’expérimentation animale et aux études menées chez des patients souffrant de diverses maladies du cerveau, nous en savons certes davantage que du temps de William James, mais la possibilité de faire le lien entre un comportement normal et le fonctionnement normal du cerveau ne date guère que de la deuxième moitié du XXe siècle. C’est l’avènement, dans les années 1970, des techniques modernes d’imagerie cérébrale qui nous a permis d’étudier sans danger pour l’homme et de manière toujours plus détaillée et quantitative la fonction du cerveau humain. Ces progrès ont révolutionné le diagnostic médical et catalysé le développement d’autres techniques d’imagerie, notamment la tomographie à émission de positons (TEP) et l’imagerie par résonance magnétique (IRM). La PET et l’IRM ont fourni un moyen sans précédent d’étudier les corrélats neurobiologiques du comportement humain, et les chercheurs du monde entier s’en sont emparé, avec la TEP d’abord, avec l’IRM fonctionnelle (IRMf) ensuite (pour un historique, voir Raichle 2000) 2. Il en est résulté une nouvelle discipline scientifique, les neurosciences cognitives, et, plus récemment, les neurosciences sociales, dont les 9 champs combinés embrassent maintenant presque tous les aspects du comportement de l’individu bien portant et malade 3. Fin des années 1980, quand la James S. McDonnell Foundation et les Pew Charitable Trusts lancèrent leur programme de neurosciences cognitives, il n’existait pas dans les départements de psychologie des universités de postes pour les spécialistes de cette branche. Ils sont aujourd’hui monnaie courante et l’on s’arrache les jeunes scientifiques formés à l’imagerie et à l’étude du comportement. Non moins remarquable est le mouvement mondial grâce auquel ont vu le jour des centres d’imagerie entièrement dédiés à la recherche, équipés des appareils les plus chers (surtout d’IRM). Voilà qui nous change du temps où l’on utilisait pour la recherche, que ce soit chez l’homme ou sur des animaux de laboratoire, les équipements cliniques de l’hôpital, auxquels on n’avait généralement accès que le soir, une fois tout le monde parti. Je n’ai pas de chiffres récents sur les budgets de ces centres, mais ils doivent être considérables. Quelques chercheurs doutent que la neuroimagerie fonctionnelle puisse fournir de la fonction du cerveau des analyses suffisamment fines pour vraiment nous éclairer sur les rapports entre le comportement et la fonction cérébrale. Une des façons d’évaluer ce problème est de mettre en parallèle des travaux effectués en neuroimagerie et des études menées en d’autres domaines. L’une des questions les plus importantes qui se posent à cet égard est de savoir quel est le rapport entre les données quantitatives fournies par la neuroimagerie et la biologie et la neurophysiologie des cellules du cerveau ainsi que des vaisseaux sanguins qui pourvoient à leurs besoins. 10 Il est à noter que la neurobiologie des signaux générés par la TEP et l’IRMf a suscité un véritable engouement et que l’on s’est beaucoup intéressé à la neurophysiologie des signaux d’imagerie 4, 5, à la biologie cellulaire 6, 7, et même aux mécanismes génétiques suggérés par la neuroimagerie 8. Le fait que des études de neuroimagerie fonctionnelle aient été entreprises chez des primates non humains n’est pas l’aspect le moins important de cet engouement, car ces dernières permettent en effet d’établir des comparaisons directes entre la neurophysiologie et l’imagerie cérébrale 9 mais aussi d’aborder l’organisation cérébrale de l’homme du point de vue de l’évolution 10. La neuroimagerie Ce qu’affirment souvent, ou laissent entendre, les interprétations des données obtenues grâce à l’imagerie fonctionnelle fait cependant craindre que cette technique finisse, si l’on n’y prend garde, par ne plus être considérée que comme une variante extraordinairement coûteuse de la bonne vieille phrénologie du XIXe siècle, qui étudiait certaines facultés mentales ainsi que le caractère des individus d’après la forme de leur crâne 11. On notera à ce propos qu’il arrive aux chercheurs d’accréditer eux-mêmes et sans le vouloir cette idée en présentant dans des revues spécialisées, lors de congrès ou dans la presse grand public des données souvent incomplètes, se limitant à des régions bien précises du cerveau. A propos desquelles ils parlent ensuite de fonctions mentales complexes, exactement comme les phrénologues ! Je cite volontiers ici ce que disait, bien avant l’invention des techniques modernes d’imagerie (en 1909 pour être exact), Korbinian Brodmann, l’un des pionniers de l’étude microscopique et macroscopique de l’organisation du cerveau humain : « Depuis quelque temps se multiplient les théories qui, comme la phrénologie, tentent de localiser à des zones bien délimitées du cortex des activités mentales complexes telles que la mémoire, la volonté, l’imagination, l’intelligence ou des compétences spatiales comme l’appréciation des formes et des positions. » Et plus loin : « On entend par facultés mentales un ensemble de processus mentaux extraordinairement intriqués. [...] On ne peut les concevoir autrement que comme le résultat d’interactions et de coopérations infiniment complexes et enchevêtrées entre de nombreuses activités élémentaires. [...] Dans chaque cas, ces loci fonctionnels élémentaires supposés sont plus ou moins nombreux à être mis en jeu et agissent à des degrés et selon des combinaisons différents. » Ces activités sont sans aucun doute le résultat, dit encore Brodmann, « de la fonction d’un grand nombre d’organes subordonnés, plus ou moins largement répartis sur la surface du cortex » 12. Avec cette prémonitoire admonestation semble toute tracée la tâche qui attend les chercheurs travaillant avec l’imagerie cérébrale. Identifier, pour commencer, les régions du cerveau, les réseaux qu’elles forment et la façon dont elles interviennent dans l’exécution de tâches bien définies. Ce processus est déjà très largement entamé et les études neuropsychologiques sur les rapports entre lésions cérébrales et comportement, de même que les études neurophysiologiques et neuro-anatomiques effectuées chez l’animal de laboratoire sur lesquelles il peut s’appuyer sont légion et 11 conduites, de plus en plus souvent, avec l’aide de la neuroimagerie. Travail autrement plus ardu, les chercheurs devront ensuite repérer les opérations élémentaires effectuées au sein de ces réseaux et les mettre en relation avec la tâche qu’ils étudient. On enregistre déjà à cet égard des progrès très encourageants, qu’alimente le dialogue de plus en plus soutenu que les scientifiques entretiennent maintenant à tous les niveaux. Parce qu’elles seront vraisemblablement jugées particulièrement importantes pour la compréhension de la fonction du cerveau humain, plusieurs questions vont sans doute gagner en importance et vont être l’objet, de la part des spécialistes de la neuroimagerie, d’une attention croissante. Parmi celles-ci les différences entre les individus, le développement (maturation cérébrale) ainsi que l’activité du « cerveau au repos ». Les différences entre les individus Du point de vue des neurosciences cognitives et de l’imagerie fonctionnelle du cerveau on avait craint au début que les différences entre les individus soient si importantes que le fait de moyenner les données individuelles ne permette pas d’améliorer la qualité. Ces craintes furent dissipées dès les toutes premières tentatives faites. Les chercheurs furent stupéfaits des résultats 13 et l’on sait avec quel succès les neurosciences cognitives utilisent depuis cette approche. Pour ceux qui ont examiné de façon détaillée de telles données (notamment des données IMRf de haute qualité), les différences individuelles semblent devoir permettre une compréhension encore plus profonde du comportement humain. Conjuguée avec l’intérêt que la psychologie et la psychiatrie portent de longue date à la caractérisation des différences de personnalité et les outils dont elles disposent en la matière, l’imagerie devrait permettre dans ce domaine des avancées majeures. Développement 12 Les neurosciences cognitives se sont surtout intéressées au cerveau humain adulte, à son fonctionnement en condition normale et pathologique. Mais ne négligeons pas pour autant l’étude des aspects développementaux de la fonction cérébrale. La littérature de la psychologie développementale foisonne de détails sur les étapes marquant la maturation du cerveau humain. Ce qui manque, en revanche, c’est une compréhension satisfaisante des processus de maturation propres aux différents systèmes du cerveau. Considérée au niveau des systèmes cérébraux, la maturation cérébrale affecte par exemple le développement de l’attention, du langage, La neuroimagerie de la mémoire, de la personnalité ou de la gestion de l’angoisse. Si nous en savions davantage sur ce sujet, nous ne comprendrions que mieux le développement en tant que tel, mais aussi son but final : l’organisation du cerveau adulte. S’il existe si peu de données sur ce domaine, c’est qu’il est difficile de se procurer sans danger et de manière précise chez l’homme les informations dont nous aurions besoin et que nous nous intéressons trop au niveau cellulaire et moléculaire de la neurobiologie développementale et pas assez aux systèmes intégrés. Un petit groupe de chercheurs a fait un travail de pionniers et obtenu des résultats passionnants de ce que nous réserve l’investigation par neuroimagerie 14-16. Il serait bon d’encourager parallèlement les études sur les primates non humains, qui permettent de corréler les modifications observées au niveau cellulaire du cerveau avec les données fournies par l’analyse fine des comportements sociaux complexes. Le cerveau au repos Il va être extrêmement important, s’agissant de la visualisation des signaux de l’imagerie fonctionnelle, de conserver au fur et à mesure que nous avançons un certain sens des proportions. Le cerveau humain est un organe qui consomme d’importantes quantités d’énergie, alors que les variations d’activité observées dans le cadre des études d’imagerie fonctionnelle n’en reflètent qu’une toute petite partie. On sait depuis longtemps qu’il en est ainsi 17, mais ce n’est que depuis peu que ce fait suscite l’intérêt qu’il mérite, depuis que nous avons compris que ces fortes dépenses d’énergie étaient davantage liées à la fonction première du cerveau – qui est de percevoir et d’analyser les informations en vue de générer des réponses adéquates – plutôt que de vaquer aux tâches « ménagères » consistant à maintenir constant le milieu cellulaire 18. Le fait de considérer la fonction cérébrale de l’homme comme s’il s’agissait d’en analyser le coût nous amène à la vue que soutiennent depuis longtemps Llinas et quelques autres 19, à savoir que le cerveau consacre une grande partie de son activité à créer et à maintenir un état mental (à la fois conscient et inconscient) représentant le monde dans lequel nous vivons et la position que nous y occupons, et qu’il n’est pas un organe dont la tâche première est de répondre de manière réflexe au monde qui nous entoure. Comme le faisait observer William James il y a fort longtemps, « si ce que nous percevons vient en partie, par nos sens, de l’objet que nous avons sous les yeux, une autre partie (qui pourrait bien être la plus importante) vient toujours [...] de notre tête » 20. 13 La neuroimagerie est incontestablement un travail en chantier, mais un travail immensément intéressant par la possibilité qu’il offre de faire le lien entre les neurosciences et toute la palette des comportements qui nous définissent en tant qu’être humain, que nous soyons malades ou en bonne santé. Le défi sera d’intégrer le potentiel de l’imagerie cérébrale (et les fondements qu’elle a dans la neurophysiologie, la biologie cellulaire et la génétique) avec les questions en suspens, aussi fascinantes que complexes, qu’étudient les chercheurs et les cliniciens comportementaux. Que cette tâche réussisse, et tout le monde y gagnera. 14 Le cerveau vieillissant Marilyn Albert, PhD et Guy McKhann, MD C ertains jouissent, malgré l’âge, d’une mémoire ou d’un langage bien préservés, d’autres pas. Des études effectuées chez l’homme comme chez l’animal montrent que le maintien des fonctions cognitives est lié à des facteurs très spécifiques et que le déclin cognitif dû à l’âge pourrait être réduit ou empêché par une combinaison d’entraînement physique, d’activités stimulantes pour l’esprit et d’approches psychosociales. Les modifications de la mémoire liées à l’âge Les facultés cognitives se modifient-elles avec l’âge, et ce en l’absence de toute maladie ? Des chercheurs ont fait le choix d’étudier uniquement, à travers toutes les tranches d’âge, des individus jouissant d’une santé optimale. Les maladies se faisant plus fréquentes avec l’âge, on étudie en effet, si l’on n’écarte pas les personnes souffrant d’affections courantes, l’interaction entre l’âge et la maladie et non le vieillissement en tant que tel. La plupart des facultés cognitives subissent des changements, et si nous insistons ici sur la mémoire, c’est qu’elle peut aussi être étudiée chez l’animal de laboratoire. L’un des moyens les plus utilisés pour tester la mémoire est de faire apprendre des faits nouveaux, que la personne doit se rappeler. On examine souvent cette « mémoire épisodique » en racontant une histoire à une personne qui doit la restituer sur-le-champ ou après un certain temps. Lorsque l’on fait passer ce test difficile à des sujets d’âge différent, on note des différences significatives entre quinquagénaires, sexagénaires et trentenaires. Ces différences sont encore plus marquées chez les septuagénaires. Un déclin similaire s’observe pour d’autres domaines 15 de la fonction cognitive, comme le langage, mais à des âges différents. Il est très facile de mettre en évidence ces modifications de la mémoire liées à l’âge, et donc de corroborer ces résultats, chez des singes ou des rongeurs d’âge moyen. Tout le monde ne subit pas ces altérations en vieillissant. Les changements que l’on observe varient beaucoup d’un individu à l’autre. Chez les plus jeunes, la plage de variation est relativement étroite une fois corrigée des différences de nature éducationnelle. Elle est beaucoup plus grande chez les personnes âgées : certaines n’ont rien à envier sur le plan de la mémoire à des personnes de plusieurs dizaines d’années plus jeunes qu’elles, alors que d’autres accusent un déclin significatif. On peut, là aussi, observer chez l’animal de laboratoire ces différences de variabilité tenant à l’âge. Les mécanismes cérébraux associés aux modifications de la mémoire Ces observations sur les modifications de la mémoire liées à l’âge conduisent à se demander pourquoi la mémoire s’altère chez certaines personnes, chez d’autres non. Les scientifiques ont avancé plusieurs hypothèses sur le déclin. La première, qui, récemment encore, ne manquait pas de partisans, l’attribuait à une perte « diffuse » de neurones affectant l’ensemble du cerveau. Or des travaux récents, étudiant la perte de neurones dans le cerveau d’être humains, de singes et de rongeurs, indiquent que cette perte diffuse due à l’âge est très discrète, y compris dans des parties du cerveau comme l’hippocampe, pourtant d’une importance vitale pour la fonction mnésique. On a également avancé comme hypothèse une perte de neurones affectant de « manière hautement sélective » certaines parties seulement du cerveau. Elle s’observe notamment dans des populations de cellules nerveuses profondément enfouies dans le cerveau, que l’on appelle les noyaux sous-corticaux. Ces noyaux, tels les ganglions de la base, qui perdent jusqu’à 50 % de leurs cellules nerveuses, envoient des projections vers beaucoup d’autres régions cérébrales et influent sur la production de substances chimiques essentielles pour les fonctions d’apprentissage et de mémoire. 16 Il se pourrait, enfin, que les « mécanismes » que les cellules nerveuses utilisent en relation avec les apprentissages et la mémoire changent avec l’âge. On en a la meilleure démonstration chez l’animal de laboratoire, dont il est Certaines personnes de même que certains animaux activent avec l’âge des mécanismes d’adaptation qui pourraient leur permettre de compenser certaines modifications fonctionnelles liées à l’âge. L’imagerie fonctionnelle, qui permet de voir les parties du cerveau utilisées à ces fins, montre que les sujets jeunes ne mobilisent, au cours d’un test de mémoire, que quelques régions cérébrales bien spécifiques. Des personnes âgées jouissant de bonnes capacités mentales présentent quant à elles, une activation cérébrale en partie similaire à celle de jeunes sujets, mais avec en plus bon nombre d’autres structures cérébrales activées. Le cerveau vieillissant possible de mettre les performances mnésiques en rapport avec les modifications affectant la fonction cérébrale. Avec l’âge, on observe par exemple chez le rongeur une diminution de la potentiation à long terme, mécanisme considéré indispensable à une mémoire normale, corrélée avec une baisse des performances mnésiques. Il est permis de penser que les individus plus âgés, dont la fonction mnésique a été préservée, présentent deux caractéristiques : premièrement, il n’y a pas chez eux de déclin des structures et des fonctions cérébrales imputable à l’âge ; deuxièmement, ils activent effectivement des mécanismes d’adaptation aux tâches mnésiques. Génétique et influences du milieu Qui ne connaît pas de ces familles où l’on est nombreux à vivre très vieux en jouissant d’une mémoire remarquablement préservée ? Et comment s’empêcher, dans ces cas, de se demander quelle est en l’occurrence la part des gènes ? L’un des moyens classiques d’analyser cette part est de comparer le comportement de jumeaux monozygotes élevés ensemble et séparément. D’après ces études, les gènes seraient pour environ 50 % dans la variation de la fonction mnésique. Si l’importance des gènes ne fait aucun doute, les facteurs environnementaux doivent donc également être des prédicteurs de la préservation de la mémoire. Nombreux sont les chercheurs qui revoient plusieurs fois les mêmes sujets et analysent leurs modes de vie sous le rapport de la préservation de la mémoire ainsi que d’autres aspects de la fonction cognitive. Près de 15 000 individus vivant en société ont ainsi été étudiés dans plusieurs pays, et ces travaux ont souvent fait ressortir l’importance de facteurs tels que l’activité physique, l’activité intellectuelle, l’engagement social ainsi que les risques vasculaires. Il semblerait en outre que ces facteurs puissent s’additionner. 17 Mécanismes cérébraux Si les études épidémiologiques permettent de décrire les comportements des sujets dont la fonction mnésique est préservée, la connaissance des mécanismes cérébraux sous-jacents passe forcément par l’expérimentation animale. Les personnes dont la mémoire ainsi que d’autres fonctions cognitives restent bonnes malgré l’âge se dépensent davantage, nous l’avons dit, sur le plan physique et font au quotidien de longues marches, préfèrent les escaliers à l’ascenseur, soulèvent des charges, etc. Lorsqu’on fait imiter ces comportements par des rongeurs qui courent dans des roues placées dans leur cage, on s’aperçoit que les animaux actifs apprennent mieux et plus vite que leurs congénères moins actifs. On rapproche au moins trois mécanismes cérébraux de ces facultés accrues d’apprentissage et de mémoire. Les rongeurs physiquement actifs fabriquent davantage de cellules nerveuses, en particulier dans l’hippocampe, région du cerveau très importante pour la mémoire. Ils produisent aussi en plus grande quantité des substances dites trophiques, telles que le brain-derived neurotrophic factor (BDNF), nécessaires au bon état des cellules nerveuses et qui semblent, elles aussi, être spécifiquement exprimées dans l’hippocampe. Et l’on note, pour terminer, un fonctionnement plus efficace des mécanismes que les cellules nerveuses de l’hippocampe utilisent pour communiquer les unes avec les autres. En conclusion, l’activité physique non seulement améliore le système cardiovasculaire, mais contribue également à des changements positifs dans des régions du cerveau impliquées dans la mémoire. Comme le montrent également les études épidémiologiques, les personnes dont les fonctions cognitives sont préservées sont aussi mentalement plus actives et ont généralement des occupations stimulantes pour l’esprit : mots croisés, jeux d’échecs, lecture, conférences, etc. Les rongeurs que l’on place dans un milieu mentalement stimulant, riche en objets à explorer, apprennent mieux, comme les animaux physiquement actifs. Ils ont dans l’hippocampe davantage de neurones nouvellement synthétisés et une expression plus élevée de facteurs trophiques du type BDNF. Des chercheurs essaient actuellement de déterminer si les effets d’une activité physique et d’une stimulation mentale plus intenses s’additionnent. 18 La stimulation sociale semble, elle aussi, jouer un rôle important dans le maintien des facultés cognitives. Appelées engagement social par les uns, Le cerveau vieillissant sentiment d’estime de soi ou perception d’efficacité personnelle par les autres, elle semble reliée au degré de rattachement que l’individu sent par rapport aux autres membres de la famille et de la communauté auxquelles il appartient ainsi qu’au contrôle qu’il pense pouvoir exercer sur ce qui lui arrive. Il a été difficile de trouver un modèle animal qui permette d’étudier ces comportements. Certains chercheurs pensent toutefois qu’il existe entre eux un dénominateur commun : la réduction des hormones de stress contenues dans le cerveau. Des études montrent en tout cas qu’un stress excessif et l’élévation des taux d’hormones de stress entraînent une perte de neurones dans l’hippocampe des animaux de laboratoire. Enfin, ce qui est bon pour le cœur l’est aussi pour le cerveau. C’est ce que font apparaître des études montrant que les maladies vasculaires, du cœur comme du cerveau, sont plus rares si l’on traite son hypertension, reconnaît et traite le diabète, fait baisser le taux de cholestérol, surveille son poids et s’abstient de fumer. Lorsque les facteurs de risque vasculaires ne sont pas contrôlés, la fonction cognitive en pâtit. Des mesures préventives appropriées peuvent toutefois atténuer les effets négatifs que cette absence de contrôle entraîne au niveau du cerveau. Ces études, effectuées chez l’homme comme chez l’animal de laboratoire, sont à l’origine de nombreuses mesures visant à réduire ou à empêcher le déclin cognitif chez la personne âgée en combinant le plus souvent des approches physiques, mentales et psychosociales. Les implications de ces études ont avivé l’intérêt du public et donné naissance à des programmes éducationnels dont on a un exemple aux Etats-Unis, tels, avec l’initiative de l’AARP « Staying Sharp », la campagne de l’Alzheimer’s Association « Maintain Your Brain » ou le « Cognitive and Emotional Health Project » des National Institutes of Health. Ce compte rendu est élaboré à partir d’une conférence publique que Marilyn Albert a donnée le 12 novembre 2005 devant la Society for Neuroscience. 19 Les progrès de la recherche sur le cerveau en 2005 Les pathologies apparaissant durant l’enfance Des hypothèses en forme de défi sur les THADA 24 Les bases cérébrales de la dyslexie 27 A la recherche des premiers signes d’autisme 28 23 L es pathologies cérébrales qui apparaissent durant l’enfance sont souvent matière à controverse et voient le public débattre avec passion des diagnostics et traitements les plus adéquats. Les chercheurs ont encore avancé en 2005 dans l’exploration des bases neurologiques de trois de ces pathologies : les troubles d’hyperactivité avec déficit d’attention (THADA), la dyslexie et l’autisme. Des hypothèses en forme de défi sur les THADA Affectant, estime-t-on, 8 à 10 % des enfants d’âge scolaire 1, les troubles d’hyperactivité avec déficit d’attention (THADA) sont le diagnostic le plus fréquemment posé en psychiatrie de l’enfant, mais aussi l’un des plus controversés. Mettant toute manifestation de distraction ou d’hyperactivité sur le compte d’un manque de discipline ou de maturité, certains doutent qu’il s’agisse vraiment d’une pathologie. D’autres, qui en sont convaincus, craignent toutefois que l’on donne trop de médicaments aux enfants. Les études publiées en 2005 ont contribué à clarifier certaines questions, mais en ont, certaines fois, soulevé de nouvelles. Deux études parues en 2005 remettent en question l’idée communément admise qu’il y aurait dans les THADA des différences entre les garçons et les filles. S’il est connu que les garçons sont plus fréquemment touchés que les filles, le taux de prévalence varie selon que les chercheurs étudient des enfants traités en milieu hospitalier ou qu’ils analysent des échantillons plus généraux d’enfants vivant en société. D’après une méta-analyse (revue critique de données provenant d’études similaires, mais effectuées chacune pour soi) parue dans le Journal of the American Academy of Child and Adolescent Psychiatry, ce taux est de six à neuf garçons pour une fille en milieu hospitalier, mais de trois garçons pour une fille seulement dans la vie courante 2. Pourquoi cette différence ? Jusqu’ici, on admettait généralement que les THADA devaient se manifester différemment chez les garçons et les filles et entraîner des symptômes différents. Les garçons étaient, pensait-on, davantage enclins que les filles à l’hyperactivité et à poser en classe des problèmes de comportement conduisant parents et enseignants à s’interroger sur l’opportunité d’un traitement. 24 Or une étude publiée en 2005 par Joseph Biederman et ses collègues du Massachusetts General Hospital remit en question l’existence de différences Comme d’autres avant eux, ces chercheurs ont constaté que les THADA étaient environ trois fois plus fréquents chez les garçons que chez les filles. Mais, poussant plus loin leurs investigations, ils n’ont pas constaté entre les garçons et les filles de différences significatives quant à l’âge d’apparition des troubles, aux symptômes, aux effets handicapants des THADA, au sous-type (sujet inattentif, hyperactif-impulsif ou les deux), ou à la présence de troubles concomitants. Pourquoi, alors, les garçons sont-ils tellement plus nombreux que les filles à être adressés à un médecin ? Selon l’expérience de Joseph Biederman, les garçons souffrant de THADA ont tendance à se montrer plus ouvertement perturbateurs que les filles, surtout quand ils sont jeunes, ce qui pourrait être l’une des raisons pour lesquelles ils sont plus souvent adressés à un médecin. Mais cela revient aussi à dire que les filles ne sont pas toujours repérées et traitées comme il conviendrait. Si cela devait se confirmer, cette étude pourrait avoir des conséquences importantes pour la détection et le traitement des THADA chez les filles. Les pathologies apparaissant durant l’enfance significatives entre filles et garçons. Comme on peut le lire dans le numéro de juin de l’American Journal of Psychiatry 3, Biederman et son équipe ont étudié un échantillon d’enfants vivant dans leur milieu habituel. Utilisant des méthodes de diagnostic standard, ils ont trouvé des THADA dans un sous-ensemble d’enfants jamais traités pour de tels troubles auparavant. L’idée que l’on exagère peut-être les différences entre les filles et les garçons souffrant de THADA est confortée par une étude effectuée sur des jumeaux et leur fratrie. Conduite à l’Université de la Nouvelle-Galles-duSud, Australie, par Florence Levy 4 et publiée dans le numéro d’avril du Journal of the American Academy of Child and Adolescent Psychiatry, elle a fait apparaître peu de différences entre garçons et filles pour ce qui est des troubles souvent diagnostiqués dans le cadre des THADA : trouble de la conduite, attitude oppositionnelle et de défi (caractérisée par un refus de coopération et une hostilité persistants) et anxiété de séparation. Une exception toutefois : une tendance un peu plus marquée aux troubles anxieux chez les filles. Pour le reste, l’existence et la gravité des troubles étaient davantage déterminées par le sous-type et la sévérité des symptômes de THADA que par les différences liées au sexe. D’autres études parues en 2005 se sont intéressées aux bases neurologiques de l’impulsivité et des déficits au sein des fonctions dites exécutives, 25 Jauger l’impulsivité Soumettant des garçons présentant des troubles d’hyperactivité avec déficit d’attention à une tâche mesurant le contrôle de l’inhibition, des chercheurs du King’s College de Londres ont constaté, lorsque ceux-ci réussissaient dans cette tâche, une activité de la partie inférieure droite du cortex préfrontal plus faible, comme l’indiquent les scanographies ci-dessus, que chez les sujets témoins. comme la planification, l’organisation et la prise de décision. Ces troubles peuvent interférer avec le travail scolaire et l’exercice d’un métier au point de compromettre le développement intellectuel d’une personne ou sa carrière professionnelle. Katya Rubia et des collègues du King’s College, Londres, ont étudié à l’aide de l’imagerie par résonance magnétique fonctionnelle les schémas d’activation cérébrale chez des garçons de 16 ans présentant des THADA mais n’ayant jamais été traités par des médicaments. Les chercheurs, dont les travaux ont été publiés dans le numéro de juin de l’American Journal of Psychiatry 5, demandaient aux garçons d’effectuer pendant l’examen une tâche mesurant le contrôle de l’inhibition (ce qui permet de jauger l’impulsivité). 26 Quand les garçons présentant des THADA réussissaient à faire ce qui leur était demandé, l’activité de la partie inférieure droite de leur cortex préfrontal était réduite par rapport à l’activité observée chez les sujets témoins exempts de symptômes, alors qu’en cas d’échec cette réduction Bien que des questions demeurent quant aux bases cérébrales des THADA, le consensus concernant le traitement n’a pas changé. En juin 2005, l’American Academy of Pediatrics a publié une revue détaillée des faits sur lesquels se basent ses directives thérapeutiques 6, dans le but d’aider les pédiatres à comparer différentes options de traitement pour affiner leur choix. Comme on a pu le voir dans Pediatrics, le journal de l’académie, les médicaments qui ont eu droit aux études les plus détaillées sont trois stimulants, le méthylphénidate (Ritalin), la dextroamphétamine (Dexédrine) et la pémoline, ainsi que, à un degré moindre, la désipramine (Norpramine), un antidépresseur tricyclique, et l’atomoxétine (Strattera), un médicament non stimulant. Les pathologies apparaissant durant l’enfance d’activité affectait le cingulum postérieur et le precuneus. Non seulement ce schéma d’activation différait de celui observé dans le groupe témoin, mais il était presque identique à celui observé chez des garçons dont les THADA étaient traités à l’aide de médicaments, ce qui suggère que le phénomène n’est pas dû aux médicaments mais inhérent aux THADA. Le rapport se prononce très clairement en faveur des stimulants, tous jugés également efficaces, pour traiter les symptômes de fond et réserve les tricycliques et l’atomoxétine, qui sont des antidépresseurs, aux enfants ne répondant pas aux stimulants. (On notera toutefois que la FDA a exigé fin 2005 un avertissement encadré de noir pour l’atomoxétine, qui peut renforcer les idées suicidaires chez certains enfants.) Les auteurs du rapport reprennent à leur compte l’actuel consensus thérapeutique, quoique l’approche la plus efficace consiste sans nul doute à combiner médication et thérapie comportementale. Les bases cérébrales de la dyslexie Les enfants dyslexiques ont généralement une intelligence normale, mais apprennent difficilement à lire. Alors que les causes cérébrales de ce phénomène continuent d’alimenter le débat, deux études parues en 2005 permettront peut-être de mieux les cerner. On sait que de nombreux enfants souffrant de dyslexie ont aussi beaucoup de peine à dénommer correctement les objets qu’ils voient par exemple sur une image. Les deux choses pourraient-elles avoir les mêmes causes neurologiques ? C’est la question que s’est posée une équipe de l’Institute of Psychiatry de Londres dirigée par Eamon J. McCrory, qui a publié dans le numéro de février de Brain les résultats d’une étude permettant de 27 cartographier l’activation cérébrale d’enfants dyslexiques à l’aide de la tomographie par émission de positons. Ces chercheurs ont observé chez les enfants dyslexiques une activation réduite du cortex occipitotemporal inférieur gauche lorsque ceux-ci essayaient de lire des mots ou de dénommer les objets d’une image, ce qui suggère une altération dans le traitement des sons 7. Si cela se confirme, cette étude aura des conséquences pratiques : le fait de dépister, pour les adresser ensuite à des orthophonistes ou des logopédistes, les enfants d’âge préscolaire présentant des troubles de la dénomination pourrait leur faciliter plus tard l’apprentissage de la lecture. Egalement parue en 2005, dans le numéro de juillet de Nature Neuroscience, une étude conduite par Anne J. Sperling, chercheuse au Georgetown University Medical Center, ajoute une note surprenante à la théorie selon laquelle les sujets dyslexiques auraient de la peine à voir les mots 8. Selon cette étude, les sujets dyslexiques seraient en réalité incapables de discriminer les indications visuelles pertinentes des signaux parasites (ou « bruits » de fond). Ces chercheurs ont demandé à des enfants de regarder sur un écran d’ordinateur des dessins ou motifs, animés ou statiques, et de dire s’ils apparaissaient sur la partie gauche ou droite de l’écran. Tant que les motifs apparaissaient seuls sur l’écran, les enfants dyslexiques faisaient aussi bien que les autres enfants. Mais quand les chercheurs brouillaient en partie les motifs en ajoutant des parasites visuels du genre de la « neige » que l’on voit à la télévision lors des pannes d’image, les enfants dyslexiques avaient peine à reconnaître les motifs. D’où l’hypothèse des auteurs qu’il y aurait parmi les causes de la dyslexie une incapacité à filtrer les signaux parasites pour ne retenir que les signaux importants. A la recherche des premiers signes d’autisme L’année 2005 a conforté la théorie selon laquelle les anomalies cérébrales responsables de l’autisme peuvent être décelées dès les premiers mois ou les premières années de la vie de l’enfant alors que ce trouble du développement n’est généralement pas diagnostiqué avant l’âge de 2 ou 3 ans. 28 Lonnie Zwaigenbaum et ses collègues de la McMaster University, Ontario, rapportent dans le numéro d’avril/mai de l’International Journal of Neuroscience que certains signes d’autisme se remarquent dès l’âge de 6 mois 9. Les pathologies apparaissant durant l’enfance A quel âge apparaissent les premiers signes d’autisme? Dans les cas d’autisme précoce, des symptômes étaient déjà visibles à l’âge de 1 an, comme chez l’enfant de droite, filmé le jour de son premier anniversaire, alors que rien ne distinguait encore les enfants qui allaient développer un autisme à début plus tardif de leurs petits camarades bien portants, comme celui de gauche. Leur étude-pilote portait sur soixante-cinq enfants, issus de fratries comprenant des enfants autistes, recrutés vers l’âge de 6 mois et suivis jusqu’à celui de 2 ans ou plus. (Cette étude pilote a pris entre-temps des proportions considérables ; conduite sur quatorze sites du Canada et des EtatsUnis, on l’appelle aujourd’hui High Risk Baby Autism Research Project.) Les auteurs de l’étude ont vu les enfants à 6 et 12 mois, dans le but de mesurer leurs réactions comportementales et émotionnelles, qui, sous l’effet de l’autisme, deviennent parfois anormales. Ils ont recherché chez eux des caractéristiques – capacité réduite à reporter leur attention visuelle sur différents objets lorsque plusieurs stimuli se disputent simultanément leur attention, absence de réaction visuelle lorsqu’on les appelle par leur nom et réaction exagérée au stress – qui, présentes dès l’âge de 1 an, annoncent parfois l’autisme. Des bébés chez lesquels fut par la suite posé le diagnostic d’autisme présentaient dès l’âge de 6 mois certains comportements qui le laissaient prévoir. Il fut posé plus fréquemment chez des enfants qui, très passifs et inactifs à 6 mois, étaient devenus extrêmement irritables à 12 mois et avaient tendance à se fixer sur des objets bien déterminés. Les auteurs rappellent toutefois que ces résultats ont été enregistrés chez un nombre relativement restreint de sujets et qu’ils ne sont que préliminaires. Aucun des 29 comportements observés en cours d’étude n’a par ailleurs été corrélé avec des mesures datant des premiers stades du développement cérébral, des méthodes telles que la scanographie soulevant chez l’enfant du premier âge des problèmes de technique ainsi que d’éthique. A ces réserves près, l’étude pourrait permettre, si ses résultats se confirment, de repérer plus tôt certains enfants souffrant d’autisme. En 2005 toujours, le numéro d’août des Archives of General Psychiatry, a publié une analyse de films amateurs d’anniversaires d’enfants elle-même basée sur une étude de 1994 considérée aujourd’hui comme un classique pour avoir apporté ce que l’on tient pour la première preuve que la régression autistique existe bel et bien. Geraldine Dawson, chercheur à l’Université de Washington (et auteur de la classique étude de 1994) et sa collègue Emily Werner ont visionné des vidéos amateurs réalisées lors des premier et deuxième anniversaires de 56 enfants, dont 21 qui souffraient d’un autisme précoce, 15 d’un autisme à début plus tardif et 20 dont le développement était normal 10. Elles ont constaté que dans les cas d’autisme précoce des symptômes étaient déjà visibles lors de la première fête d’anniversaire, alors que rien ne distinguait les enfants qui allaient développer un autisme à début plus tardif de leurs petits camarades bien portants. L’année suivante, les bébés apparemment en bonne santé la première année, et qui allaient développer la maladie plus tard, avaient déjà nettement régressé, ce qui confirme les dires des parents. On essaie maintenant de mieux comprendre les causes ainsi que le pronostic à long terme de la régression autistique. 30 Les troubles moteurs Les mutations génétiques polarisent l’intérêt 32 Quand la machine s’encrasse 33 Le GDNF intéresse toujours les chercheurs 35 De nouvelles applications pour la thérapie génique 36 La stimulation profonde du cerveau s’affine 36 Des souris donnent des indications intéressantes sur la chorée de Huntington 37 31 C’ est encore une fois dans le domaine de la génétique que la recherche sur les troubles moteurs a été la plus active en 2005. Les études cliniques et de laboratoire ont fait connaître de nouveaux traitements, des formes améliorées de traitements existants ainsi qu’une meilleure pénétration des médicaments dans le cerveau. Les chercheurs ont également étudié les modifications cellulaires et moléculaires associées aux troubles moteurs, dont ils cherchent à mieux comprendre les causes. Les mutations génétiques polarisent l’intérêt Les percées technologiques enregistrées au cours des dix dernières années dans le domaine de la génétique ont ouvert la porte à des façons inédites d’appréhender les maladies humaines, celle de Parkinson ne faisant pas exception. Cinq gènes au moins ont été identifiés récemment dans des familles touchées par cette maladie. Malgré la relative rareté du Parkinson familial, l’étude de ces gènes et des protéines qu’ils produisent a permis aux chercheurs de mieux comprendre comment se développe la maladie. Grâce à ces études ont par exemple été découverts le rôle causal de la protéine alpha-synucléine et la fonction protectrice de la protéine parkin. L’alpha-synucléine est un constituant majeur des corps de Lewy, qui sont des dépôts protéiniques classiquement présents dans les neurones des patients parkinsoniens. La protéine parkin, en revanche, semble protéger contre la maladie en atténuant l’action toxique de l’alpha-synucléine ou en faisant que la cellule dégrade et élimine les dépôts. Deux études parues fin 2004 faisaient le lien entre des mutations du gène LRRK2 (leucine-rich repeat kinase 2) et la maladie de Parkinson 1, 2. En 2005, plusieurs travaux, dont trois publiés dans Lancet et trois autres dans Neurology 3-8, mettaient les mutations du LRRK2 en relation avec de nombreux cas de parkinson familial et quelques cas isolés, non familiaux, de cette maladie. 32 La version la plus fréquente de cette mutation, la G2019S, a été observée dans env. 5 % des cas familiaux et 1 % des cas isolés de maladies de Parkinson. G2019S remplace un acide aminé unique, dans une partie d’habitude extrêmement stable du gène. Les patients parkinsoniens porteurs de mutations du LRRK2 présentent une forme clinique de la maladie semblable à un parkinson classique, avec un âge d’apparition se situant entre 28 et 88 ans. La physiopathologie peut varier, notamment en ce qui La protéine fabriquée par le gène LRRK2 est la dardarine, du basque dardara, «tremblement». Son action est inconnue, mais les mutations du gène pourraient avoir pour effet d’activer ou d’inactiver cette protéine ou de modifier sa façon d’interagir avec d’autres protéines. Les mutations de la dardarine pourraient favoriser la formation d’agrégats de protéines ou rendre les cellules nerveuses plus vulnérables aux processus dégénératifs et augmenter ainsi la susceptibilité à la maladie de Parkinson 10. Les troubles moteurs concerne la présence des corps de Lewy. Comme on a pu le lire dans le numéro de mars de Annals of Neurology, on a trouvé sur les scans de tomographie par émission de positons effectués chez des patients porteurs de la mutation G2019S du LRRK2 des signes d’appauvrissement en dopamine très voisins de ceux que l’on observe dans les cas classiques, non familiaux, de la maladie de Parkinson 9. Bien que des milliers de sujets témoins sans lien de parenté et non affectés par la maladie aient été trouvés indemnes de toute mutation, des mutations du LRRK2 ont été relevées chez quelques personnes appartenant à des familles de parkinsoniens, mais ne présentant aucun symptôme ainsi que chez bon nombre de personnes atteintes de la maladie, mais ne signalant aucun antécédent familial. D’autres facteurs, soit génétiques soit environnementaux, semblent donc être impliqués dans le développement de la maladie. L’âge, facteur de risque connu, pourrait favoriser l’apparition de la maladie chez les personnes porteuses de la mutation du LRRK2. La fréquence des cas associés à la mutation augmente en effet avec l’âge. Dans une étude publiée dans The American Journal of Human Genetics, le rapport entre l’existence de la mutation et la présence de la maladie était de 17 % à l’âge de 50 ans, contre 85 % à l’âge de 70 ans 11. Les mutations du LRRK2 pourraient bien être les mutations le plus fréquemment associées à la maladie de Parkinson. Etant donné qu’elles peuvent exister en l’absence de tout antécédent familial de la maladie, certains auteurs pensent qu’un dépistage serait cliniquement utile. D’autres en contestent l’utilité arguant du fait qu’il n’existe pas de traitement préventif de la maladie et que les tests génétiques sont sans bénéfice direct sur le plan médical. Quand la machine s’encrasse Une présence accrue d’alpha-synucléine dans les neurones est caractéristique de la maladie de Parkinson, mais l’on ne sait rien de la fonction physiologique de cette substance, ni des rapports entre les agrégats 33 qu’elle forme et la neurodégénérescence. Dans le numéro du 17 juin du Journal of Biological Chemistry, Chang-Wei Liu et ses collègues montrent que les agrégats d’alpha-synucléine peuvent se former dans le contexte d’un cycle toxique pour les cellules 12. Dans leur modèle expérimental de la maladie de Parkinson, l’alpha-synucléine n’est que partiellement dégradée. Il en reste des fragments tronqués qui par un effet de cristallisation engendrent l’agrégation de molécules entières. Cette accumulation empêche le système de dégradation des protéines de la cellule de fonctionner normalement, et les amoncellements de fragments et de protéines entières engendrent un cycle toxique qui s’achève par la mort cellulaire. On trouve également des dépôts d’alpha-synucléine dans le cerveau de personnes atteintes d’atrophie multiple systématisée (MSA), maladie pouvant provoquer des symptômes de type parkinsonien, des vertiges, des problèmes de langage et des démences. Dans ces cas, ce n’est pas dans les neurones que prédominent les agrégats d’alpha-synucléine, mais dans les oligodendrocytes. Ces cellules fabriquent la myéline, qui enveloppe de sa couche protectrice l’axone du neurone. Dans le numéro du 24 mars de Neuron, Ikuru Yazawa et ses collègues ont décrit le premier modèle murin de MSA, qu’ils ont obtenu en amenant les oligodendrocytes à surexprimer l’alpha-synucléine 13. Ce modèle, qui devrait permettre de mieux comprendre quels sont dans l’atrophie multiple systématisée les effets de l’agrégation de l’alpha-synucléine, débouchera peut-être à terme sur de nouveaux traitements. Une protéine qui s’accumule Dans la maladie de Parkinson peut s’instaurer un cycle dans le cadre duquel se constituent au-dedans des neurones des dépôts d’une protéine, l’alphasynucléine, qui finissent par détruire ces derniers. 34 Mort des neurones Agrégats toxiques Dégradation incomplète Inhibition de la Fragments d’α-synucléine dégradation de l’α-synucléine Un cercle vicieux de cytotoxicité On cherche toujours de nouvelles armes contre la maladie de Parkinson. La lévodopa, acide aminé précurseur de la dopamine, en est actuellement le traitement le plus efficace, mais son action s’émousse avec le temps et elle provoque parfois, comme effet secondaire, des dyskinésies, c’est-à-dire des mouvements involontaires. Qui plus est, elle n’agit que sur les symptômes de la maladie et n’a aucun effet sur le processus dégénératif. Des essais effectués chez l’animal de laboratoire montrent qu’une substance qui nourrit les neurones, le GDNF (glial cell line-derived neurotrophic factor), protège et peut même rétablir la fonction des neurones qui fabriquent la dopamine et qui, dans la maladie de Parkinson, sont endommagés. Les troubles moteurs Le GDNF intéresse toujours les chercheurs Mais le GDNF, contrairement à la lévodopa, ne traverse que très difficilement le réseau serré de capillaires cérébraux formant la barrière hématoencéphalique, d’où les récentes tentatives de la conduire directement au cerveau à l’aide de cathéters. Faute de résultants probants, ces essais ont toutefois été abandonnés. Ce n’est pas pour autant que l’on se désintéresse du GDNF. Et pour cause. Un article paru dans Nature Medicine fait état d’une repousse de cellules nerveuses découverte lors de l’autopsie d’un homme qui avait participé à un essai avec le GDNF et qui était décédé ensuite pour des raisons sans aucun lien avec cet essai 14. Cette récupération des dommages causés par la maladie de Parkinson est la première jamais observée chez un être humain. Une autre technique consiste à implanter dans le cerveau des cellules productrices de GDNF. Situé à la bifurcation des carotides, le corps carotidien est un petit corpuscule qui, par ses chémorécepteurs, règle par l’intermédiaire de la respiration la teneur en oxygène du sang. Il contient des cellules qui produisent de la dopamine ainsi que du GDNF. Javier Villadiego et son équipe, qui ont greffé dans le striatum de rats rendus «parkinsoniens» des cellules du corps carotidien, ont constaté que celles-ci continuaient de secréter longtemps après leur implantation, de grandes quantités de GDNF 15. Les auteurs suggèrent d’utiliser ces cellules pour administrer du GDNF au cerveau de personnes atteintes de la maladie de Parkinson. La thérapie génique constitue une autre possibilité de traitement utilisant le GDNF. Le gène codant pour le GDNF peut être incorporé à un virus inoffensif et injecté dans le cerveau, où les cellules, infectées par le virus porteur du gène, se mettent à produire du GDNF. C’est ce qu’a fait, dans un modèle de la maladie de Parkinson réalisé chez des marmousets, une 35 équipe dirigée par Andisheh Eslamboli, qui a publié ses résultats dans le Journal of Neuroscience du 26 janvier 16. Les cellules dopaminergiques ont été protégées par ce traitement et l’on a observé chez les singes des comportements suggérant un rétablissement de la fonction motrice. De nouvelles applications pour la thérapie génique Les effets secondaires de la lévodopa pouvant être dus aux alternances de hausse et de baisse de ses concentrations, la thérapie génique, soit seule soit associée à la lévodopa, a été proposée comme un moyen d’assurer des taux constants de dopamine dans le cerveau. Thomas Carlsson et ses collègues ont utilisé cette technique pour optimiser l’expression de gènes codant pour deux enzymes contribuant à la synthèse de dopamine chez des rats atteints d’un parkinson expérimental 17. Ils ont noté chez les rats ainsi traités une diminution des comportements de type parkinsonien ainsi que des mouvements involontaires provoqués par la lévodopa. En greffant à des rats le gène codant pour l’alpha-synucléine, Masanori Yamada et son équipe ont induit chez ceux-ci des dysfonctionnements moteurs de type parkinsonien. Lorsqu’ils greffaient en même temps le gène codant pour la protéine parkin, ces dysfonctionnements étaient moins sévères, soit que cette protéine annule l’action de l’alpha-synucléine soit qu’elle détruise les dépôts que forme celle-ci. Les résultats de cette étude, dont pourraient résulter de nouvelles applications pour la thérapie génique, ont paru dans le numéro de février de Human Gene Therapy 18. La stimulation profonde du cerveau s’affine La stimulation profonde du cerveau (SPC) consiste à implanter dans des régions déterminées du cerveau des électrodes miniaturisées pour y générer des impulsions électriques susceptibles d’améliorer les symptômes parkinsoniens, les tremblements ou les troubles dystoniques (anomalie du tonus musculaire). Dans un article paru en 2005 dans Archives of Neurology, des chercheurs ont étudié des moyens d’accroître l’efficacité de cette technique. 36 L’une de ces études portait sur 41 patients chez qui les résultats de la SPC n’avaient pas été satisfaisants 19. Dans plus de la moitié des cas, il fut possible de les améliorer en remplaçant des électrodes mal placées, en reprogrammant le pace-maker ou en ajustant la médication. Alors que l’on utilise de plus en plus la SPC, les auteurs insistent sur la nécessité d’un suivi postchirurgical et de critères plus restrictifs pour discriminer les patients susceptibles d’en retirer des bénéfices. Les troubles moteurs Des électrodes à la rescousse Permettant d’améliorer certains troubles moteurs, la stimulation profonde du cerveau est une technique qu’affinent sans cesse les chercheurs. Elle consiste à implanter dans des régions déterminées du cerveau des électrodes miniaturisées et à envoyer dans ces régions de légères décharges électriques. Dans une autre étude, parue dans Archives of Neurology, une équipe s’est intéressée au placement des électrodes et a comparé les deux sites d’implantation les plus fréquemment utilisés dans la maladie de Parkinson: le globus pallidus interne (GPi) et le noyau sous-thalamique (NST) 20. Dans l’ensemble, les deux sites font jeu égal, avec un léger avantage toutefois au NST pour les mouvements très lents (bradykinésie). Les seules complications cognitives et comportementales relevées par les auteurs ont été enregistrées avec la stimulation du NST. Une note éditoriale fait observer que l’on en viendra peut-être, quand la question aura été mieux étudiée, à un placement individualisé des électrodes 21. Des souris donnent des indications intéressantes sur la chorée de Huntington Il n’existe pas de traitement efficace de la chorée de Huntington, maladie due à des mutations faisant que des acides aminés surnuméraires viennent se coller sur le segment terminal d’une protéine appelée huntingtine. La protéine huntingtine mutée forme dans la cellule des agrégats rigides responsables, semble-t-il, de la maladie. Plus la chaîne des acides aminés surnuméraires est longue, plus la maladie apparaît tôt. Travaillant sur des souris mutantes spécialement préparées pour exprimer la protéine huntingtine mutée, plusieurs laboratoires ont étudié les événements cellulaires et moléculaires conduisant à la chorée de Huntington et envisagé des traitements potentiels. La protéine huntingtine mutée active un gène régulateur important, le p53, qui en met lui-même beaucoup d’autres en jeu, le résultat final étant la 37 mort de la cellule. L’inactivation du gène p53 fait disparaître les comportements anormaux chez les souris porteuses d’une chorée de Huntington expérimentale 22. Sachant que le p53 est inactivé dans de nombreuses formes de cancer, il est permis de se demander si l’incidence plus faible de cancers observée chez les personnes atteintes de la chorée de Huntington pourrait être liée aux effets d’un niveau élevé de p53. Des modèles murins ont également permis de démontrer que la protéine huntingtine mutée pouvait perturber les interactions de cellule à cellule dans le cerveau et modifier les concentrations normales de calcium de neurones 23, 24. Une équipe a identifié plusieurs médicaments qui, en corrigeant les taux de calcium, empêchent la mort des cellules chez l’animal de laboratoire. Scott Q. Harper et ses collègues ont rapporté dans Proceedings of the National Academy of Sciences du 19 avril avoir traité avec succès des souris porteuses d’une chorée de Huntington expérimentale 25. Utilisant une technique appelée RNA interference pour réduire la production de protéine huntingtine mutée, ils ont obtenu une quasi-normalisation du comportement des animaux. Les résultats de ces essais en laboratoire relancent l’espoir de trouver finalement un traitement contre la chorée de Huntington. 38 Les atteintes du système nerveux Réparer la moelle épinière 40 Inhibition de la croissance 42 Mettre les cellules souches au service de la moelle épinière 43 Les accidents vasculaires cérébraux 44 Les tumeurs du cerveau 44 Traumatismes crâniens et corticostéroïdes 45 Des prothèses neurales pour la récupération post-traumatique 45 39 O n distingue parmi les atteintes du système nerveux les traumatismes de la moelle épinière (TME), les traumatismes crâniens (TC), les accidents vasculaires cérébraux (AVC) et les cancers du cerveau. En raison surtout des accidents de la route et de la violence, les jeunes paient aux traumatismes de la moelle épinière et aux traumatismes crâniens un tribut disproportionné ; les AVC sont plus fréquents dans la population âgée, alors que les tumeurs cérébrales peuvent se développer à tout âge, avec, toutefois, des pics de fréquence entre 3 et 12 ans pour les enfants et 55 et 65 ans chez les adultes. Les capacités d’autoréparation du système nerveux central étant très limitées, les atteintes ci-dessus, qu’elles soient consécutives à un choc à la tête ou à la colonne vertébrale, à une privation d’oxygène, comme dans l’AVC, ou à l’invasion du tissu cérébral par des cellules malignes, sont toujours invalidantes, et ce de façon souvent grave et persistante. D’où l’intérêt considérable que la recherche fondamentale sur les atteintes du système nerveux porte à la régénération, c’est-à-dire aux moyens de « doper » les mécanismes de réparation innés du cerveau ou de la moelle épinière afin d’obtenir un certain degré de récupération fonctionnelle. Depuis quelques années, les atteintes de la moelle épinière polarisent une partie grandissante de cette recherche. Réparer la moelle épinière Pour étudier les phénomènes de dégénérescence et de régénération qui se produisent après un traumatisme de la moelle épinière, Martin Kerschensteiner et ses collègues de Harvard ont observé pendant plusieurs jours, grâce à des colorants fluorescents et à l’imagerie temporelle, la mort et la repousse des axones chez une souris vivante médullotraumatisée. Trente minutes post-intervention, les axones avaient partiellement dépéri, mais les chercheurs observèrent, pour beaucoup d’entre eux, une tentative de régénération spontanée se situant entre la 6e et la 24e heure posttraumatisme. Cette repousse initialement vigoureuse resta toutefois sans suite, les axones étant apparemment devenus incapables de se diriger dans la bonne direction 1. 40 Lorsque la moelle épinière est sectionnée ou écrasée, il faut d’abord damer le pion aux molécules de la myéline (gaine protectrice enveloppant les fibres nerveuses) qui inhibent la repousse des axones et résoudre le problème du tissu cicatriciel qui se forme sur le site lésionnel, faisant Axone Gaine de myéline Dendrites physiquement obstacle à la reconnexion des axones ; il faut ensuite se servir des fibres nerveuses restantes pour reconstituer la gaine de myéline qui a été endommagée et amener ces fibres à enjamber le site lésionnel, de manière à ce qu’elles rétablissent les connexions nerveuses. Poursuivant dans une voie ouverte en 2004, les chercheurs font de plus en plus confiance, pour tenter de résoudre les nombreux problèmes de la régénération, à des approches combinées. Les atteintes du système nerveux Une gaine protectrice La myéline, qui entoure de sa gaine protectrice les axones, joue en cas de traumatisme médullaire un rôle complexe. Il faut, en effet, remyéliniser les axones restants, or la myéline contient des molécules qui inhibent la repousse des axones. Une équipe internationale de chercheurs du Miami Project to Cure Paralysis conduite par Damien Pearse a fait état dans le Journal of Neuroscience d’une combinaison prometteuse, associant une enzyme qui annule les signaux inhibiteurs à deux types de cellules nerveuses fournissant à la repousse des fibres nerveuses un support structurel et faisant prendre à ces fibres la bonne direction 2. Les auteurs ont constaté chez des rats porteurs de sections médullaires complètes ainsi traités une amélioration significative des capacités locomotrices et de la coordination motrice. Bien que préliminaires, ces résultats pourraient fournir des indications fort utiles, estiment les auteurs, aux chercheurs qui développent des traitements combinés des traumatismes médullaires destinés à l’homme. Dans une autre étude, elle aussi publiée dans le Journal of Neuroscience, une équipe conduite par Scott Whittemore a combiné chez des rats médullolésés des cellules souches appelées « glial-restricted precursor cells », induites à se différencier en cellules de soutien du système nerveux central, avec une thérapie génique visant à reproduire les effets de deux types de facteurs de croissance nerveux 3. Cette association a favorisé la remyélinisation des fibres nerveuses et amélioré la transmission du signal nerveux sur le trajet remyélinisé, ce qui s’est 41 traduit par une amélioration de la fonction motrice. La récupération fonctionnelle qu’il est possible d’obtenir en boostant la reconstitution de la myéline n’avait encore jamais été démontrée de façon aussi convaincante a écrit à ce sujet le National Institute of Neurological Disorders and Stroke, qui a financé la recherche. Les auteurs d’une étude conduite par la société de biotechnologie Biogen Idec ont associé la méthylprednisolone, substance bien connue pour son action anti-inflammatoire, avec un bloquant expérimental de la protéine Nogo capable de bloquer (via le récepteur Nogo-66) les signaux inhibant la croissance des fibres nerveuses 4. La récupération de la motricité et de la coordination et la repousse axonale obtenues chez des rats porteurs de lésions médullaires fut plus prononcée pour l’approche combinée que pour chacun des traitements administrés séparément, ce qui laisse à penser que leurs mécanismes d’action pourraient être différents. Inhibition de la croissance Le déchiffrage des molécules qui restreignent ou guident la régénération axonale reste, avec leur manipulation, l’un des thèmes centraux de la recherche sur les traumatismes médullaires. Les protéines Nogo, MAG et OMG, les trois inhibiteurs connus de la régénération axonale contenus dans la myéline, intéressent beaucoup les chercheurs qui tentent d’élucider les structures moléculaires qui sous-tendent l’inhibition de la croissance des nerfs. Plusieurs équipes ont publié des travaux grâce auxquels on commence à mieux mesurer la complexité de cette machinerie cellulaire. Des chercheurs travaillant sur des animaux de laboratoire ont observé des effets contradictoires après blocage ou délétion du récepteur Nogo. Une équipe multisite ayant à sa tête Marc Tessier-Lavigne, chercheur au Howard Hughes Medical Institute, qui travaille maintenant chez Genentech, a rapporté dans Proceedings of the National Academy of Sciences que la délétion génétique du récepteur Nogo – que ce soit chez l’animal ou dans des cultures de cellules – ne donnait pas le signal de la repousse nerveuse 5. Contredisant des travaux qui attribuent l’effet inhibiteur à la protéine Nogo, cette étude laisse à penser que ce récepteur n’est sans doute pas le simple mécanisme on/off que suggère son nom. 42 Steven Strittmatter et son groupe de Yale University ont effectivement montré combien le récepteur Nogo était complexe et rapporté dans le Le puzzle moléculaire de la protéine Nogo a également été étudié par une équipe du Children’s Hospital de Boston et un groupe de Biogen Idec. Les articles qu’ils ont publiés, chacun pour soi, dans Neuron, montrent qu’une protéine appelée tantôt TAJ tantôt TROY constitue un rouage important du complexe du récepteur Nogo 7, 8. Dans un article également paru dans Neuron, Mary Filbin et ses collègues de Hunter’s College disent avoir identifié dans le récepteur Nogo une voie qui pourrait être le lieu où interagissent les trois inhibiteurs connus de la régénération axonale contenus dans la myéline 9. Des travaux récents ont fait apparaître ce qui pourrait être un quatrième acteur de l’inhibition de la régénération axonale (en plus des protéines Nogo, MAG et OMG). Des chercheurs de l’University of Texas-Southwestern ayant à leur tête Luis Parada ont rapporté dans Proceedings of the National Academy of Sciences qu’une molécule connue pour participer au pilotage du développement axonal du foetus, l’éphrine B3, inhibait pendant toute la vie le développement des fibres nerveuses dans la myéline et que son action inhibitrice était aussi puissante que celui des trois autres familles d’inhibiteurs réunies 10. Les atteintes du système nerveux Journal of Neuroscience que différentes voies moléculaires exerçaient à travers lui des effets différents 6. Mettre les cellules souches au service de la moelle épinière Lentement mais sûrement, les scientifiques progressent dans l’art de mettre les cellules souches, sous toutes leurs formes, au service de la réparation de la moelle épinière. En 2005, plusieurs chercheurs se sont rapprochés de ce but, notamment deux équipes distinctes travaillant au sein de l’Université de Californie à Irvine. Hans Keirstead et ses collègues ont reconstitué la myéline de rats médullolésés et amélioré les facultés locomotrices de ces animaux en leur greffant des oligodendrocytes, c’est-à-dire des cellules de soutien développées à partir de cellules souches embryonnaires humaines élevées en culture 11. Les résultats, rapportés dans le Journal of Neuroscience, furent bénéfiques pour les greffes pratiquées sept jours post-intervention, mais pas pour celles effectuées dix mois après l’intervention, ce qui semblerait indiquer que le traitement doive être mis en œuvre assez rapidement. Dans l’autre étude, dont les résultats ont été publiés dans Proceedings of the National Academy of Sciences, Brian Cummings et ses collègues ont 43 utilisé pour régénérer la myéline et améliorer la mobilité de souris médullolésées des cellules souches neurales adultes d’origine humaine 12. Greffées le neuvième jour post-intervention, ces cellules se sont différenciées en oligodendrocytes, qui ont réparé la gaine de myéline enveloppant les fibres nerveuses, améliorant ainsi la fonction locomotrice des animaux. Les accidents vasculaires cérébraux Attendus avec impatience, les résultats de la Women’s Health Study, étude de grande envergure financée par les pouvoirs publics, montrent que la vitamine E ne protège pas les femmes contre les AVC (pas plus que contre les accidents cardiovasculaires ou le cancer). Publiés dans le Journal of the American Medical Association, ces résultats, qui ajoutent un élément important au débat en cours sur les bénéfices de la vitamine E, ne fournissent aucun indice pouvant justifier que l’on recommande des suppléments de cet antioxydant pour la prévention des maladies cardiovasculaires ou du cancer 13. Pour ce qui est du diagnostic, des chercheurs de l’Université Johann Wolfgang Goethe, à Francfort, Allemagne, ont rapporté dans Lancet que les AVC affectant le côté droit du cerveau, plus subtils quant à leurs symptômes, étaient moins souvent reconnus que ceux en intéressant la partie gauche, d’où la difficulté de les faire bénéficier d’une réponse médicale adéquate 14. Les tumeurs du cerveau Le rapport final sur le Glioma Outcomes Project, qui étudie les soins apportés aux adultes souffrant de gliomes de découverte récente, fait apparaître que les médecins traitant ces tumeurs malignes n’appliquaient pas, dans certains domaines, les directives publiées et n’avaient pas suffisamment recours, semble-t-il, à la chimiothérapie 15. Fait particulièrement préoccupant, 80 % de ces patients ont reçu des anticonvulsivants destinés à prévenir les crises d’épilepsie, dont le risque est plus grand chez les personnes souffrant d’une tumeur cérébrale. Or ces médicaments, qui provoquent des effets secondaires considérables, ne semblent guère utiles chez les patients n’ayant jamais fait de crises auparavant. Cette étude publiée dans le Journal of the American Medical Association fournira aux cliniciens, disent ses auteurs, des repères leur permettant une planification et une évaluation plus sûres des traitements. 44 Des chercheurs de l’Université de l’Alabama, à Birmingham, ont rapporté dans le Journal of Neuroscience que la sulfasalazine, médicament homologué Les atteintes du système nerveux par la FDA pour le traitement des maladies inflammatoires de l’intestin et la polyarthrite rhumatoïde, pouvait contrecarrer un mécanisme de défense moléculaire que les gliomes utilisent pour se protéger. Injecté dans la membrane qui tapisse la paroi abdominale, ce médicament a procuré chez l’animal une réduction spectaculaire de la taille des tumeurs 16. De leur côté, Gail Clinton et ses collègues de l’Oregon Health and Science University ont montré chez le rat que l’herstatine, une protéine qui inhibe des enzymes concourant à la prolifération des cellules tumorales, stoppait la croissance du glioblastome, forme particulièrement agressive et de très mauvais pronostic du gliome. Cette étude publiée dans Clinical Cancer Research, suggère en outre des possibilités d’approche pour le traitement d’une autre forme de cancer, affectant les cellules gliales 17. Traumatismes crâniens et corticostéroïdes Utilisés depuis 30 ans en cas de traumatisme crânien, les corticostéroïdes, anti-inflammatoires puissants, seraient en fait inopérants dans cette indication. Telles sont les conclusions d’une étude portant sur 10 000 traumatisés crâniens adultes dont les résultats ont été publiés dans Lancet 18. Le fait d’utiliser ces médicaments après un traumatisme crânien aggraverait en réalité le danger que le patient décède dans un délai d’une quinzaine de jours et augmenterait le risque d’un décès ou d’un handicap grave à six mois. Prenant position dans les colonnes du journal, Phil Edwards, chercheur à la London School of Hygiene and Tropical Medicine et auteur principal de la recherche, a demandé que l’on réévalue d’urgence la pratique consistant à administrer des corticostéroïdes aux sujets traumatisés crâniens. Des prothèses neurales pour la récupération post-traumatique Des centaines de milliers d’Américains sont paralysés ou ont une mobilité très restreinte du fait de traumatismes ou de maladies du système nerveux. Les prothèses neurales constituent pour beaucoup d’entre eux le seul espoir de retrouver un certain degré d’autonomie. Le principe de ces prothèses est de capter, grâce à des électrodes implantées dans le cerveau, des signaux nerveux que l’on utilise pour faire exécuter par une prothèse de membre ou une souris d’ordinateur des mouvements – par exemple saisir des aliments ou activer un commutateur contrôlé par ordinateur – commandés par la seule pensée de la personne. Quelques laboratoires spécialisés continuent de faire progresser le développement de ces « interfaces cerveau-machine ». 45 Prise de possession Miguel Nicolelis photographié avec l’un des singes qui, ayant appris à actionner un bras robotique à l’aide des signaux émis par leur cerveau, se sont mis à s’en servir, ainsi qu’en témoignent les modifications structurelles survenues dans leur cerveau, comme si la prothèse était leur propre bras. 46 Miguel Nicolelis et son équipe de Duke University ont constaté chez des singes ayant appris à actionner un bras robotique à l’aide des signaux électriques émis par leur cerveau des modifications des structures cérébrales faisant que ce bras était commandé comme s’il appartenait à l’animal. Publiée dans le Journal of Neuroscience, cette observation intéressera certainement les chercheurs qui étudient les moyens de rétablir certaines fonctions chez des paraplégiques ou d’autres personnes handicapées par des troubles neurologiques 19. Depuis, Andrew Schwartz et son équipe de l’Université de Pittsburgh ont annoncé, lors de la réunion annuelle de l’American Association for the Advancement of Science, qu’un singe équipé d’une prothèse de la taille d’un bras d’enfant avait appris à la maîtriser au point de s’en servir pour porter à sa bouche des morceaux de fruits et de légumes 20. Neuroéthique De nouvelles publications précisent les enjeux 48 Les avancées technologiques imposent des choix difficiles 49 Une passerelle entre le monde de la science et celui de la religion 50 Les implications neuroéthiques du cas Schiavo 51 Les problèmes d’éthique posés par la neuroimagerie 52 47 A pparue récemment, la neuroéthique comprend à la fois l’éthique des neurosciences, qui, face à des méthodes d’investigation toujours plus puissantes et d’une complexité croissante, réfléchit sur la façon dont il convient de conduire la recherche scientifique, et les neurosciences de l’éthique, qui cherchent par exemple à savoir s’il existe dans le cerveau un « centre » de l’éthique ou si le législateur doit tenir compte de ce que la science nous apprend sur le cerveau. C’est en 2002 que les spécialistes de la recherche sur le cerveau commencèrent à s’interroger dans des publications (revues par des pairs dans des journaux à comité de lecture et d’évaluation) sur l’impact éthique, sociétal et politique du progrès des neurosciences et qu’eut lieu aux Etats-Unis la première conférence formelle jamais consacrée à ce sujet : « Neuroethics : Mapping the Field » 1. Ce domaine a connu depuis un développement prodigieux. Les articles scientifiques qui lui sont consacrés sont presque quatre fois plus nombreux qu’alors. On ne compte plus les conférences de neuroéthique, et le sujet attire aussi, aujourd’hui, des penseurs d’autres disciplines scientifiques, du droit et même de la religion. Plusieurs de ces conférences et de ces publications ont été l’occasion, en 2005, de préciser les éclairages et de mieux cerner les sujets composant ce domaine aux multiples facettes. De nouvelles publications précisent les enjeux Parus en 2005, le premier ouvrage scientifique et le premier livre grand public sur le sujet permettront à leurs lecteurs de se familiariser avec les questions qui, tôt ou tard, solliciteront de façon formelle ou informelle leur attention. 48 En octobre et novembre, coïncidant avec les conférences annuelles de l’American Society for Bioethics and Humanities et de la Society for Neuroscience, forte de 35 000 membres, Oxford University Press faisait paraître, publié par Judy Illes, de la Stanford University, Neuroethics : Defining the Issues in Theory, Practice, and Policy, texte de référence jetant les bases pour les générations futures de chercheurs en neuroéthique. Pour réaliser cet ouvrage, Judy Illes a demandé à 21 penseurs de s’exprimer sur des aspects de la neuroéthique tels que les décisions d’ordre moral, la créativité, la neuroimagerie, le traitement des maladies neurodégénératives, les rapports entre la génétique et les neurosciences, les aspects sociétaux et politiques de ces dernières et la représentation dans la culture populaire. Neuroéthique Paru en avril, The Ethical Brain, de Michael S. Gazzaniga, chercheur à Dartmouth College, grand spécialiste de l’étude de la pensée et de la façon dont elle se forme, fut pour le grand public la première véritable occasion de se confronter aux aspects éthiques des neurosciences. Dans ce livre, qui sera réédité en mai 2006 par HarperCollins, l’auteur explore les questions d’éthique se posant d’un bout à l’autre de la vie, du développement fœtal à la vieillesse, explique pourquoi ce que les neurosciences nous ont appris sur la mémoire pourrait remettre en question les fondements de la justice et montre quelles seront pour l’idée que l’homme se fait de lui-même les implications de ce qu’elles nous apprennent sur la nature du raisonnement moral. Les avancées technologiques imposent des choix difficiles Si le champ de la neuroéthique va en s’élargissant, le nombre et les types de sujets de réflexion ont, eux aussi, grandi. Devant cette profusion, une conférence de deux journées sur invitation uniquement a entrepris, en mai, de focaliser le débat. Sponsorisée par la Dana Foundation, le National Institute of Mental Health, le Columbia University College of Physicians and Surgeons et la bibliothèque du Congrès, la conférence « Hard Science, Hard Choices : Facts, Ethics and Policies Guiding Brain Science Today » a réuni à la bibliothèque du Congrès, à Washington, D.C.2, quelque 150 participants invités à débattre de la neuroimagerie, de la neurotechnolgie ainsi que de la psychopharmacologie. Les co-directeurs de la conférence, Gerald Fischbach, doyen de la Columbia Medical School, et Ruth Fischbach, directrice du Columbia Center for Bioethics, avaient choisi ces domaines parce que les progrès y sont particulièrement rapides – plus, sans doute, que dans un aucun autre secteur de la neurobiologie et que les questions d’éthique y surgissent plus tôt que dans la plupart des autres domaines. Lors de la demi-journée consacrée à la neuroimagerie, les participants se sont intéressés à la puissance des moyens d’imagerie mis en œuvre pour étudier des aspects de l’individu aussi divers que la religiosité, le sens moral, le racisme, le mensonge ou les placements d’argent. Le risque le plus grand, ont convenu les participants, est celui de se méprendre sur le sens de ces recherches. Les possibilités vont de la tentative de manipuler les réponses données par les tests à la tentation de réécrire – mais de façon 49 pas forcément juste ou bénéfique – la définition des principes sur lesquels repose la société. Le second sujet, la neurotechnologie, fut l’occasion de débattre de dilemmes d’éthique qui, déjà, se profilent derrière certaines techniques entrant maintenant dans le champ clinique. Par exemple, la stimulation profonde du cerveau. Déjà utilisée dans la maladie de Parkinson, il est envisagé de l’étendre, entre autres domaines, à la douleur chronique et aux troubles de l’humeur. Dans la mesure où elle s’exerce sur des circuits cérébraux entiers, dont les neurosciences sont loin de savoir expliquer complètement le fonctionnement, elle ajoute en effet aux questions de bioéthique plus anciennes – accès aux soins, consentement informé, problèmes d’assurance – des risques, neurologiques ou comportementaux, aux conséquences incalculables. Compte tenu des potentialités soulevées par des techniques comme la stimulation profonde du cerveau ou d’autres technologies comme les prothèses neurales, il est tout aussi légitime de s’interroger sur les risques encourus lorsque les médias, se faisant écho du désespoir de certains patients ou de l’enthousiasme exagéré de certains chercheurs, s’avancent prématurément sur les opportunités offertes par la recherche au risque de susciter une déconvenue à la mesure des espoirs suscités. Le domaine dans lequel il fut le plus difficile de parvenir à un consensus éthique fut le dernier, celui de la psychopharmacologie. Si nul ne conteste le bien-fondé de soigner des personnes réellement malades, on est plus souvent, avec les troubles mentaux, dans les nuances de gris que dans le noir et blanc. Evoquant les travaux de Martha Farah, Alan Leshner et quelques autres 3, 4, les participants ont en outre reconnu que le débat sur le fait d’utiliser des médicaments pour doper les performances intellectuelles au lieu de soigner des maladies ne pouvait que s’exacerber et que cette pratique soulevait des questions métaphysiques allant de la nature de la responsabilité de l’individu à la définition du « soi ». Une passerelle entre le monde de la science et celui de la religion 50 Les spécialistes des neurosciences savent pertinemment que les avancées de leur discipline suscitent des questionnements qui sont traditionnellement du domaine du religieux. C’est pour jeter un pont entre ces deux mondes que l’American Academy for the Advancement of Science, le Neuroéthique Massachusetts Institute of Technology et le Boston Theological Institute ont sponsorisé à Cambridge, Massachusetts, une conférence qui fera date dans les annales de la neuroéthique, au cours de laquelle des neuroéthiciens et des représentants de plusieurs communautés religieuses ont dialogué sur le thème du cerveau, de la neuroéthique, de la responsabilité et du sentiment même de soi. S’interrogeant sur les implications philosophiques d’avancées médicales et chirurgicales des neurosciences qui, par leur incidence sur le cerveau et le comportement, soulèvent des questions de fond sur la nature du libre arbitre, les choix moraux et le sentiment même de soi, les participants ont abordé des thèmes allant de l’amélioration pharmacologique et technologique des capacités neuronales aux hypothèses récentes sur un substrat neuro-anatomique du raisonnement moral. Cette conférence, dont le but était d’encourager la discussion entre des personnes de tradition intellectuelle différente, a permis aux théologiens de se faire une idée plus précise des progrès neuroscientifiques pouvant poser problème sur le plan éthique et aux chercheurs d’approfondir leur réflexion sur certains aspects des travaux qu’ils mènent en laboratoire. Les implications neuroéthiques du cas Schiavo Comme on a pu le lire en 2005 dans de nombreux articles et commentaires scientifiques, le cas fortement politisé et médiatisé de Theresa Marie (Terri) Schiavo a montré où l’on peut en arriver lorsque des personnes défendant des points de vue opposés ne parviennent plus à dialoguer. Dans le coma depuis 1990 à la suite d’un grave traumatisme cérébral, Theresa Schiavo a été au cœur d’une longue bataille politico-juridique qui s’est terminée par son décès, le 31 mars 2005, la justice ayant enfin autorisé que l’on débranche, comme le demandait depuis longtemps son mari, les tuyaux qui la maintenaient en vie. Ce cas est exemplaire des problèmes juridiques, médicaux et éthiques pouvant être créés par les progrès dans le traitement des affections cérébrales qui permettent de prolonger la survie et redéfinissent les critères de la mort. S’il y a certes sensibilisé le public, le cas Schiavo n’a résolu aucune de ces questions. Joy Hirsch, de la Columbia University, a signé dans le Journal of Clinical Investigation de mai un éditorial dans lequel il fait observer que beaucoup d’autres familles et patients américains se trouvent dans des situations analogues 5. On compte aux Etats-Unis 15 000 cas d’état végétatif 51 persistant, où le patient ne donne aucun signe de conscience, et 100 000 d’état de conscience minimale 6, entrecoupé de périodes intermittentes de conscience. Hirsch et son équipe ont comparé à l’aide de l’imagerie par résonance magnétique fonctionnelle l’activité cérébrale de patients en état de conscience minimale avec celle de sujets témoins bien portants 7. Leurs résultats, publiés dans Neurology, semblent indiquer que certains circuits cérébraux des patients en état de conscience minimale sont capables d’un traitement de l’information ne différant guère de celui des sujets bien portants, ce qui n’est pas le cas pour les patients en état végétatif persistant. D’autres recherches devront dire si l’existence d’une activité cérébrale peut être assimilée à une forme quelconque de conscience et s’il existe des états de conscience que le scan est incapable de déceler. S’ils ont trouvé un consensus sur la façon de définir et de diagnostiquer l’état de conscience minimale 8, les scientifiques ne sont pas près encore de fournir ce qui serait l’étalon-or en la matière : des directives diagnostiques, pronostiques et thérapeutiques basées sur des faits, sur lesquelles pourraient s’appuyer les praticiens. Attirant, lui aussi, l’attention sur les questions non encore résolues, Joseph J. Fins, du Weill Medical College, Cornell University, avait rappelé dans le numéro de mars-avril du Hastings Center Report 9 le cas tragique de Terry Wallis, qui, en 2003, s’était soudainement remis à parler après avoir subi, près de 20 ans auparavant, un grave traumatisme crânien. Selon Fins, Terry Wallis est passé, dans les mois qui ont suivi ce traumatisme, d’un état végétatif à un état de conscience minimale, mais sans que le diagnostic n’ait jamais été revu. D’une manière plus générale, dit Fins, un traumatisme crânien grave oblige les professionnels comme les non-professionnels à opposer la question de la conscience à une conception par trop simpliste de la notion de rétablissement, ce dernier se jouant bien souvent sur des années, sinon des dizaines d’années, durant lesquelles la vie du patient comme de sa famille peut être profondément perturbée. Les problèmes d’éthique posés par la neuroimagerie 52 C’est parce qu’elle n’est pas que théorique et nécessite, au contraire, une réponse pressante que la question de savoir comment il convient de gérer Les 6 et 7 janvier 2005, les National Institutes of Health et la Stanford University ont cosponsorisé une conférence sur les découvertes fortuites faites dans le cadre d’examens scanographiques. Cinquante professionnels, parmi lesquels des éthiciens, des radiologues et des neurologues, se sont efforcés d’élaborer à l’usage des laboratoires, des instances éditoriales, des journaux médicaux et des organisations sponsorisant des recherches des recommandations sur la conduite à tenir lorsqu’un scan révèle soit des différences par rapport à l’architecture cérébrale attendue, soit des tumeurs ou d’autres pathologies cérébrales. Ces découvertes sont étonnamment fréquentes : des différences de forme et de structure du cerveau s’observent chez 20 % environ des personnes participant à des études, et des anomalies cliniques significatives chez 2 à 8 % 10. Neuroéthique les multiples problèmes d’éthique posés par la neuroimagerie fut inscrite à l’ordre du jour de la conférence de la bibliothèque du Congrès, qui n’a d’ailleurs pas été la seule à en débattre. S’il a été possible de parvenir à un consensus sur de nombreuses questions, d’autres sont restées sans réponse et les travaux se poursuivent 11, 12, La discussion a également porté sur les sessions spécialement consacrées à ce sujet par les National Institutes of Health, sur le financement de la recherche concernant les découvertes fortuites liées à l’imagerie corporelle et à la génétique ainsi que sur l’intérêt que la question suscite à l’étranger. L’American Journal of Bioethics a consacré à la neuroimagerie la plus grande partie de son numéro de mars-avril 2005. Judy Illes et Eric Racine, de la Stanford University, y font observer que la neuroimagerie soulève quelques-unes des questions d’éthique que pose également la génétique, notamment en relation avec la prédiction des maladies et les risques d’atteinte à la sphère privée 13. Mais, bien plus qu’un profil génétique, elle éclaire sur des aspects de la personnalité tels que les valeurs, la moralité ou les attitudes sociétales, jusqu’ici tenus pour non quantifiables. Et de même que les généticiens redoutent l’usage discriminatoire pouvant être fait des tests génétiques, les neuroéthiciens craignent que des employeurs, des juges, des enseignants s’appuient sur des indications fournies par des scans du cerveau pour éliminer des demandeurs d’emploi, convaincre un suspect de culpabilité ou admettre un étudiant à leur cours. De telles pratiques seraient contestables parce que, disent les auteurs, il n’existe pas encore (mais en existera-t-il jamais ?) de « norme » à laquelle 53 puisse être comparé un cerveau. Les scans de cerveau que l’on voit dans les journaux médicaux ne sont pas des « images » au sens habituel du terme, mais des composites informatiques proposant une moyenne consolidée de données obtenues chez un nombre élevé d’individus, et la profession ne s’est pas encore donné de normes selon lesquelles produire ces images. En un mot comme en cent, le moment n’est pas venu, disent Illes et Racine, de s’emballer et de se livrer en dehors des laboratoires à des spéculations hasardeuses sur le sens à donner aux indications fournies par la neuroimagerie. Se référant à une autre application possible – et particulièrement controversée – de l’imagerie cérébrale, la détection de mensonge, Paul Root Wolpe, Kenneth Foster et Daniel Langleben, tous trois chercheurs à l’Université de Pennsylvanie, disent, dans le même numéro de l’American Journal of Bioethics, qu’il est prématuré de voir dans l’imagerie cérébrale une sorte de polygraphe de l’esprit, et ce malgré les investissements considérables consacrés au développement de cette technique dans le cadre de la lutte contre la criminalité et le terrorisme 14. Les auteurs mettent en garde, vu les doutes quant à sa fiabilité, contre une commercialisation précipitée de cette méthode. Cela risquerait en effet de porter un coup à la recherche visant à l’améliorer et pourrait même conduire à en faire un usage abusif en justice pénale. Il serait préférable, selon eux, que la recherche se poursuive et que des forums scientifiques, juridiques et civils réfléchissent aux problèmes d’éthique avant même qu’ils ne se posent. 54 Les maladies neuroimmunologiques Nouvelles approches de traitement pour la sclérose en plaques 56 L’immunothérapie contre les troubles neurologiques 58 Les virus en première ligne 60 55 L a jeune discipline de la neuroimmunologie a encore connu en 2005 une croissance rapide. Les publications ont été plus nombreuses, l’éventail des maladies étudiées plus large. Ces travaux ont enrichi nos connaissances des interactions entre le système nerveux et diverses composantes du système immunitaire. Plusieurs approches prometteuses ont été proposées pour le traitement de la sclérose en plaques, maladie auto-immune. L’immunothérapie semble aussi pouvoir être utilisée, selon plusieurs études, pour le traitement de maladies neurologiques non auto-immunes, telles que la maladie d’Alzheimer et celle de Parkinson. Grâce aux travaux de différents spécialistes la théorie selon laquelle des virus pourraient être impliqués dans le développement de certaines maladies neurologiques s’est vue confortée. Nouvelles approches de traitement pour la sclérose en plaques La sclérose en plaques est une maladie neurologique évolutive qui se développe lorsque le système immunitaire attaque une partie du système nerveux central (SNC) d’un individu, ce qui se traduit par une destruction progressive de la myéline, substance lipidique qui entoure et protège la cellule nerveuse. Le traitement de cette maladie a été freiné par les effets secondaires de thérapies qui, s’attaquant à l’ensemble des cellules immunitaires, provoquent des infections. Or une équipe ayant à sa tête Peter Calabresi, du Johns Hopkins Hospital à Baltimore, indique dans Proceedings of the National Academy of Sciences avoir identifié un canal potassium spécifique, le Kv1.3, présent en grand nombre sur les cellules T du système immunitaire qui attaquent la gaine protectrice de la myéline entourant les neurones 1. Des médicaments ciblant cette molécule auraient sans doute des effets secondaires beaucoup moins nombreux que les produits actuels. 56 Calabresi et son équipe avaient observé auparavant que certaines cellules T isolées du sang de personnes atteintes de la sclérose en plaques exprimaient plus fortement le Kv1.3. Analysant dans leur étude de 2005 le tissu cérébral de patients décédés, ils y ont retrouvé ces cellules, dont ils pensent qu’elles peuvent contribuer au développement de la maladie. Les substances qui inhibent le Kv1.3 pourraient, d’après ces résultats, se révéler plus spécifiques que celles qui s’attaquent à l’ensemble du système immunitaire et se montrer efficaces sans provoquer autant d’effets secondaires. Jusqu’ici, la plupart des spécialistes pensaient que ce signal était donné par la microglie. D’après Becher et son équipe, la cellule présentant l’antigène serait toutefois une cellule dendritique, soit une cellule d’un type entièrement différent et d’une localisation elle aussi différente de ce que l’on pensait. Forts de ces connaissances, les auteurs vont maintenant tenter de développer sur ces bases de nouveaux médicaments contre la sclérose en plaques. Les maladies neuroimmunologiques Selon une étude publiée dans le numéro de mars de Nature Medicine, Burkhard Becher et ses collègues de l’Université de Zurich, Suisse, se sont intéressés à une cellule immunitaire appelée cellule dendritique périvasculaire, localisée au voisinage des vaisseaux sanguins du cerveau 2. Signalant à certains composants du système immunitaire comment reconnaître et détruire les cellules de myéline, elles jouent en tant que « cellules présentant l’antigène » un rôle qualifié de crucial par les auteurs. Gianvito Martino et son équipe de l’Ospedale San Raffaele, à Milan, Italie, proposent contre la sclérose en plaques une approche utilisant des cellules souches neurales, dont ils avaient démontré, en 2003, que, greffées dans le cerveau de souris atteintes d’un modèle de sclérose en plaques, elles migraient vers les régions du cerveau en état d’inflammation, où elles se différenciaient en cellules cérébrales matures réparant activement la myéline 3. Plus récemment, ces chercheurs ont montré que, agissant à la manière de puissants médicaments naturels, les cellules souches étaient capables, en bloquant le processus inflammatoire, de protéger le système nerveux central contre les dommages que causent à ce niveau des maladies, tels la sclérose en plaques, les tumeurs cérébrales, ou les traumatismes de la moelle épinière 4. Effectuée chez des souris atteintes d’une forme de sclérose en plaques caractérisée par une alternance de poussées et de rémissions, l’étude montre que les cellules neurales adultes ont le pouvoir de remplacer les cellules inflammatoires du sang sans nuire aux cellules saines du voisinage. L’un de ses aspects les plus inédits est d’avoir démontré qu’un pourcentage significatif des cellules souches parvenues dans le SNC en état d’inflammation ne s’étaient pas différenciées en tissu neural. Selon les auteurs, les cellules souches neurales adultes, qui ne se différencient pas et ne sont pas intégrées au tissu hôte, échappent au processus inflammatoire et lui survivent. Qui plus est, ces cellules indifférenciées sont capables d’abaisser le risque de cancérisation, fréquemment associé aux greffes de cellules souches. 57 Dans une étude publiée dans le Journal of Experimental Medicine, d’autres chercheurs ont constaté que les greffes de cellules souches hématopoïétiques (GCSH) provenant de la moelle osseuse des patients avaient pour effet de ralentir la progression de la sclérose en plaques en faisant baisser le nombre des cellules T qui attaquent la gaine de myéline protégeant les cellules nerveuses 5. Pour avoir étudié les globules blancs des patients et analysé les propriétés moléculaires de leurs cellules T avant ainsi qu’après la greffe, les auteurs ont pu montrer que les cellules souches s’étaient différenciées et avaient presque entièrement reconstitué le système immunitaire. On voit ainsi que la GCSH exerce sur la sclérose en plaques une action durablement bénéfique, qui n’est pas due, comme avec les traitements conventionnels, à une simple suppression ou modulation temporaire du système immunitaire mais au fait qu’elle « réamorce » ce système et réduit grandement le risque de nouvelles attaques auto-immunes. L’immunothérapie contre les troubles neurologiques Les interventions sur le système immunitaire, autrement dit l’immunothérapie, semblent également pouvoir être utiles dans le traitement d’autres troubles neurologiques. Richard Hartman et ses collègues de la Loma Linda University ont par exemple étudié l’intérêt d’un tel traitement dans la maladie d’Alzheimer et leurs résultats ont été publiés dans le Journal of Neuroscience 6. L’un de leurs buts était de déterminer si les souris PDAPP, spécimens transgéniques utilisés comme modèle expérimental de la maladie d’Alzheimer, présentaient des déficits cognitifs liés à l’âge comparables à ceux observés chez l’être humain atteint de cette maladie. Leurs investigations ont fait apparaître chez ces animaux, au fur et à mesure de leur vieillissement, des déficits de l’apprentissage spatial, analogues à ceux que l’on retrouve dans la maladie d’Alzheimer. Ils cherchèrent également à déterminer si les plaques, même une fois massivement constituées, ainsi que les déficits comportementaux pouvaient être réduits. Après avoir administré pendant plusieurs semaines, à des souris PDAPP âgées, un anticorps anti-bêta-amyloïde, ils constatèrent une réduction du niveau des plaques de l’ordre de 50 %, doublée d’une amélioration significative des performances d’apprentissage spatial. 58 Ces données confirment, disent-ils, que les déficits d’apprentissage et de mémoire associés à la maladie d’Alzheimer sont bel et bien dus aux plaques amyloïde qui se constituent dans le cerveau et que des techniques immunothérapeutiques ciblant cette protéine pourraient constituer une option de traitement viable et efficace chez l’homme. Les maladies neuroimmunologiques Anticorps contre protéine Chez des souris présentant des plaques de protéine bêta-amyloïde comme celle que l’on voit ici, des chercheurs ont obtenu, grâce à un anticorps anti-bêta-amyloïde, une réduction notable du niveau des plaques, doublée d’une amélioration significative des apprentissages spatiaux. Des études antérieures ayant fait apparaître la vaccination comme un traitement possible de la maladie d’Alzheimer, une équipe de l’Université de Californie, San Diego, conduite par Eliezer Masliah, a cherché à établir si la vaccination était également envisageable dans la maladie de Parkinson, affection caractérisée par la perte de neurones dopaminergiques dans une certaine région du cerveau qui, selon des études récentes, pourrait être imputable, au moins en partie, à une accumulation anormale d’une protéine appelée alpha-synucléine. Ayant vacciné à l’aide d’alpha-synucléine humaine des souris rendues expérimentalement « parkinsoniennes », les chercheurs, dont l’étude est parue dans Neuron, ont constaté une moindre présence d’alpha-synucléine à l’intérieur et la périphérie des neurones affectés ainsi qu’un degré limité de neurodégénérescence. La vaccination, capable au vu de ces résultats de réduire l’accumulation d’alpha-synucléine dans les neurones, pourrait donc avoir un rôle à jouer dans le traitement de la maladie de Parkinson 7. Dans un autre travail, paru dans le numéro de février des Annals of Neurology, des scientifiques de la Johns Hopkins University et du Kennedy Krieger Institute de Baltimore ayant à leur tête Carlos A. Pardo se sont interrogés sur une éventuelle origine gliale (cellules de soutien des neurones) ou auto-immune dans le développement de l’autisme, maladie du développement du système nerveux caractérisée par une atteinte grave des compétences sociales, du comportement et de la communication 8. 59 Comparant le tissu cérébral de patients autistes décédés avec celui d’individus ne présentant aucun signe de la maladie, les auteurs ont pu mettre en évidence, dans le cerveau de ces patients des réponses immunitaires et gliales beaucoup plus marquées, caractérisées par une activation micro- et astrogliale. Il est vraisemblable, selon eux, que ces réponses plus intenses font partie des réactions neuroinflammatoires associées au système immunitaire inhérent au système nerveux central. On ignore comment et à quel moment sont activées la microglie et l’astroglie des personnes autistes. Les réponses gliales des cas d’autisme pourraient être des réactions intrinsèques dues à des perturbations de la fonction gliale ou des interactions entre neurones et cellules gliales survenues au cours du développement cérébral. Mais il pourrait aussi s’agir d’adaptations secondaires, en réaction à des perturbations d’origine inconnue, comme des infections, ou des toxines, affectant le SNC au cours du développement pré- ou postnatal. Quoi qu’il en soit, les données de cette étude mettent en évidence l’existence dans l’autisme de processus neuroimmunologiques et offrent à la recherche un cadre pour de nouvelles approches du diagnostic et du traitement de cette grave maladie neurologique. Les virus en première ligne Une étude conduite par Yoshihisa Yamano, du National Institute of Neurological Disorders and Stroke (NINDS), dont les résultats ont été publiés dans le numéro de mai du Journal of Clinical Investigation, suggère pour la 60 Autisme et système immunitaire Les diapositives A et C, qui proviennent de patients autistes, font apparaître une augmentation des cellules gliales, qui sont des cellules de soutien des neurones. Cette augmentation pourrait être le signe d’une réponse neuroimmunologique induite par la maladie. Bien que l’on ait constaté chez des rongeurs que le fait de leur retirer leurs cellules T régulatrices ou d’en perturber le fonctionnement conduisait au développement spontané de maladies auto-immunes, on ignore pourquoi ces cellules perdent dans certaines maladies humaines la faculté de contenir les attaques du système immunitaire. L’étude de Yamano et de son équipe a révélé chez des patients souffrant d’un type rare de maladie neurologique évolutive associée à un virus (myélopathie associée au HTLV-I ou paraparésie spastique tropicale) un dysfonctionnement des cellules T régulatrices qui pourrait contribuer au développement du processus inflammatoire au sein du SNC. On aurait ainsi un début d’explication au fait que certaines infections virales sont souvent associées à des maladies auto-immunes. Les maladies neuroimmunologiques première fois qu’une protéine encodée par un virus pourrait induire un dysfonctionnement d’une composante essentielle du système immunitaire humain 9. Appelée cellule T régulatrice, cette composante joue un rôle important dans le maintien de la capacité du système immunitaire à reconnaître le soi et à empêcher ainsi les maladies autoimmunes. Ce dysfonctionnement des cellules T régulatrices a été signalé dans plusieurs maladies auto-immunes, dont le diabète de type 1, la polyarthrite rhumatoïde et la sclérose en plaques. Un autre groupe de chercheurs, conduit par Peter G. Kennedy, Université de Glasgow, Ecosse, a fait état, dans Brain, d’observations selon lesquelles des virus pourraient être impliqués dans le développement de la sclérose en plaques 10. Combinant des méthodes nouvelles et classiques, ces chercheurs ont trouvé, comme l’avaient déjà signalé des travaux antérieurs, une présence accrue d’herpesvirus humains de type HHV-6 sur le site des lésions myéliniques provoquées par la sclérose en plaques. 61 La douleur Des traitements combinés contre la douleur neuropathique 64 Supprimer la douleur sans passer par le cerveau 65 Le traitement de la douleur sévère 66 Les bases génétiques de la perception de la douleur 66 Une base de données pour détecter les domaines insuffisamment financés de la recherche sur la douleur 68 63 L a tension artérielle, le pouls, la respiration et la température sont les signes vitaux sur lesquels se basent les médecins pour apprécier l’état physique d’un individu. Mais nombreux sont aujourd’hui ceux qui estiment la douleur tout aussi importante. Bien que n’étant pas objectivement mesurable, la perception qu’un individu a de la douleur peut fournir des indications précieuses sur son état de santé et de bien-être. Espérant trouver des moyens plus efficaces de la combattre, les chercheurs ont poursuivi en 2005 leur étude des mécanismes de la douleur. Deux études ont mis en évidence l’efficacité de certaines associations médicamenteuses en cas de douleurs dues à des lésions des nerfs périphériques et de douleurs sévères. Un autre travail a montré que l’activation de certaines cellules se traduisait par la libération de substances qui, en modifiant la façon dont certains neurones réagissent aux stimuli nociceptifs, suppriment la douleur. On doit également aux scientifiques la découverte que certaines variations de la perception de la douleur de même qu’un syndrome algique fréquent, affectant l’appareil musculosquelettique, sont d’origine génétique. Et alors que 45 % des Américains consultent un jour ou l’autre pour des douleurs, une équipe de chercheurs a calculé que la douleur en tant que symptôme cible représentait 1 % seulement des fonds que les National Institutes of Health accordent pour la recherche. Des traitements combinés contre la douleur neuropathique Se développant dans le cadre de maladies ou d’atteintes traumatiques du système nerveux, la douleur neuropathique est une complication fréquente du diabète, du cancer, des infections par le VIH, du zona et des maladies neurodégénératives. L’intense sensation de brûlure qu’elle entraîne peut compromettre très gravement la qualité de vie. Les médicaments utilisés pour la combattre ne sont pas entièrement efficaces et provoquent des effets secondaires interdisant de dépasser certaines doses. 64 Cherchant des parades plus efficaces contre la douleur neuropathique, Ian Gilron et ses collègues de la Queens University, Canada, ont publié dans le numéro du 31 mars du New England Journal of Medicine 1, les résultats obtenus avec un traitement associant la gabapentine, médicament qui soulage les crises aiguës de névralgie et que l’on utilise comme traitement de première ligne contre les formes douloureuses de neuropathie, à la morphine, analgésique narcotique puissant, administré contre d’autres formes Quarante et un des 57 patients – 35 cas de neuropathie diabétique et 22 de névralgie postherpétique – ont terminé l’essai. Le score de douleur moyen, indiqué par les patients sur une échelle de 0 à 10, était de 5,72 avant le traitement ; il fut ensuite, à la dose la plus forte tolérée par les patients, de 4,49 pour le placebo, de 4,15 pour la gabapentine, de 3,70 pour la morphine et de 3,06 pour l’association gabapentine-morphine. La douleur de douleur modérée à forte. Ces résultats montrent que ces deux médicaments ont sur la douleur neuropathique un effet plus prononcé lorsqu’ils sont associés que s’ils sont donnés séparément. On notera encore que les doses tolérées les plus fortes furent nettement plus faibles pour l’association que lorsque les deux médicaments étaient donnés séparément, signe que pourrait exister entre eux une interaction synergique. Les chercheurs ont également constaté que les effets secondaires (constipation, somnolence, sécheresse buccale) étaient moins nombreux avec l’association que pour chacun des deux agents administrés séparément. Les bénéfices que semblent offrir les traitements combinés de la douleur neuropathique justifieraient, disent les auteurs, d’autres études en comparant les effets à ceux des monothérapies. Supprimer la douleur sans passer par le cerveau Les médicaments mimant les processus que l’organisme oppose naturellement à la douleur pourraient être des candidats prometteurs au traitement de la douleur aiguë, inflammatoire et neuropathique. Des chercheurs de l’Université de l’Arizona ont rapporté dans le numéro du 22 février des Proceedings of the National Academy of Sciences 2, avoir développé une substance qui active le récepteur CB2, membre de la famille souvent étudiée des récepteurs dits cannabinoïdes parce qu’ils répondent au principe actif du cannabis. L’activation de ce récepteur stimule, disent les chercheurs, la sécrétion d’une substance qui agit sur les neurones qui envoient au système nerveux central, en lui enjoignant de supprimer la douleur, les signaux leur parvenant des récepteurs sensoriels – peau, yeux, oreilles, nez et langue. Les substances qui ciblent les récepteurs cannabinoïdes CB2 n’ont pas d’effet important sur le système nerveux central, puisqu’il n’y a pas de récepteurs CB2 dans le cerveau. Cette propriété est d’autant plus importante 65 que l’emploi de nombreux analgésiques est limité par les effets multiples qu’ils exercent sur ce système. Le traitement de la douleur sévère Les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS), du type ibuprofène ou naxoproxène, ne sont pas d’une grande utilité en présence d’une douleur modérée à forte. D’où l’intérêt d’une étude publiée dans le numéro de Brain Research 3 du 2 mars par une équipe du Memorial Sloan-Kettering Cancer Center, qui a évalué dans un modèle murin de douleur modérée à forte l’efficacité de plusieurs traitements combinant des AINS avec des opioïdes. Appliquant un stimulant thermique à la queue des souris, les chercheurs ont constaté que certains AINS potentialisaient considérablement l’effet analgésique de deux opioïdes de prescription courante, l’hydrocodone et l’oxycodone, alors que d’autres associations s’avéraient peu utiles. L’ibuprofène renforce par exemple l’action anti-douleur de l’hydrocodone et de l’oxycodone, alors qu’un autre AINS est sans effet sur l’hydrocodone et que l’ibuprofène n’accroît pas l’action analgésique du fentanyl et de la morphine. Les AINS annulent l’action d’une enzyme bien précise, la cyclo-oxygénase, dont deux formes – la Cox-1 et la Cox-2 – sont connues pour stimuler les processus inflammatoires. Il serait souhaitable, disent les chercheurs, de déterminer si d’autres combinaisons d’AINS et d’opioïdes parviennent, en interagissant avec la Cox-1 et la Cox-2, à enrayer l’inflammation et à inhiber la réponse à la douleur. Selon eux, on réussirait sans doute en testant en clinique diverses combinaisons de médicaments à trouver des traitements plus efficaces contre la douleur. Les bases génétiques de la perception de la douleur Nombreuses sont les personnes chez qui s’installe un état chronique caractérisé par une sensibilité accrue à la douleur. Cherchant à savoir pourquoi certaines personnes développaient cette hypersensibilité et d’autres pas, des scientifiques de l’Université de la Caroline du Nord ont constaté que d’infimes variations génétiques pouvaient rendre une personne moins sensible aux stimuli douloureux et la protéger contre le développement d’une maladie fréquente et invalidante, la douleur chronique de l’articulation temporomandibulaire (ATM). 66 Une étude pilotée par Luda Diatchenko, au Comprehensive Center for Inflammatory Disorders de l’UNC (University of North Carolina), a suivi sur Nombre de personnes (Total N = 202) 50 40 Sensibilité à la douleur peu élevée Sensibilité à la douleur élevée La douleur Distribution de la sensibilité à la douleur dans la population 30 20 10 –20 –10 0 10 20 30 Petites causes, grands effets Les personnes ayant un taux réduit d’une enzyme connue sous le nom de catécholamine-O-méthyltransférase sont plus sensibles à la douleur et ont un risque plus élevé de développer un syndrome douloureux appelé trouble de l’articulation temporomandibulaire. plus de cinq ans 202 femmes bien portantes de 18 à 34 ans dans le but de déterminer le lien existant chez elles entre la sensibilité à la douleur et le développement du trouble de l’ATM, maladie caractérisée par des maux de tête, des otalgies ainsi que des douleurs des maxillaires et de la face. Concentrant leur attention sur la génétique de l’enzyme COMT (catécholamine-O-méthyltransférase), qui contrôle certaines substances liées à la réponse au stress, les chercheurs ont effectué des expériences de biologie moléculaire, de culture de cellules et de comportement animal dont le but était de mettre en évidence les rapports existant entre la COMT et la sensibilité à la douleur. (D’autres équipes ont étudié les liens entre la COMT et la schizophrénie ; voir page 72.) Les résultats publiés dans le numéro de janvier de Human Molecular Genetics 4 montrent que les personnes ayant des taux réduits de COMT sont plus sensibles à la douleur et ont un risque plus élevé de développer une douleur de l’articulation temporomandibulaire. Les auteurs ont constaté que des variations très légères du gène produisant la COMT permettaient de prédire le risque de voir se développer cette maladie, dont souffrent presque 10 % des Américains. Selon eux, leurs observations 67 pourraient également s’appliquer à des syndromes algiques chroniques tels que la fibromyalgie, le syndrome de l’intestin irritable ou certains troubles sensoriels chroniques. Luda Diatchenko et ses collègues pensent que leurs travaux pourraient conduire au développement de marqueurs génétiques des états douloureux et avoir également des implications thérapeutiques. L’équipe travaille maintenant sur de nouveaux traitements médicamenteux des troubles de l’ATM et de désordres similaires. Une base de données pour détecter les domaines insuffisamment financés de la recherche sur la douleur Environ 50 millions d’Américains souffrent de douleurs persistantes et près de 45 % des habitants des Etats-Unis consultent un jour ou l’autre pour des douleurs. Ces chiffres ont conduit des chercheurs de l’Université de l’Utah à analyser les budgets que les National Institutes of Health (NIH) consacrent à la recherche sur la douleur. Publiés dans le numéro de mai du Journal of Pain 5, leurs résultats montrent que les NIH ont accordé en 2003 des subsides à 518 projets consacrés à la douleur. Ces subsides, dont le total s’élève à 170 millions de dollars, ne représentent toutefois que 1 % de tous ceux que les NIH ont accordés cette année-là. Les chercheurs ont créé deux catégories de subsides : les subsides primaires, qui vont à des projets visant à faire avancer l’état des connaissances sur la douleur, à combattre les symptômes de la douleur ou à traiter celle-ci, et les subsides secondaires, destinés à des travaux étudiant la douleur en tant que symptôme d’une maladie mais ne contribuant que faiblement à l’avancement des connaissances théoriques. Partant de leurs observations, ils ont créé une base de données interactive fournissant des informations objectives et vérifiables sur les budgets que les NIH consacrent à la recherche sur la douleur et permettant de repérer les domaines de celle-ci dont le financement est insuffisant. Les décideurs politiques, les organisations professionnelles, les chercheurs et les cliniciens ainsi que les personnes qui devront orienter demain la recherche sur la douleur trouveront là, disent-ils, un outil utile. 68 Une note éditoriale insiste en outre sur le fait que cette base de données, en plus de mettre en lumière le fait que certains états cliniques associés à la La douleur douleur ne bénéficieraient pas d’une attention suffisante de la part des scientifiques et des instances de financement, donne la possibilité de classer les projets de recherche selon des détails et avec une spécificité que ne permet pas celle des NIH (CRISP, pour Computer Retrieval of Information of Scientific Projects). 69 Troubles psychiatriques et toxicomanies La schizophrénie 72 La dépression 74 Troubles addictifs 76 Des pistes pour demain 78 71 L’ un des thèmes récurrents de la recherche sur la santé mentale fut, en 2005, le rôle des gènes et leur interaction avec des facteurs environnementaux tels que les toxicomanies. La recherche sur la schizophrénie s’est intéressée aux gènes qui contrôlent le métabolisme de la dopamine, la recherche sur la dépression à ceux qui contrôlent le métabolisme de la sérotonine et la recherche sur les dépendances à ceux qui contrôlent les récepteurs des neurotransmetteurs qui interagissent avec les substances addictogènes. La schizophrénie Pour ce qui est de la schizophrénie, les chercheurs s’intéressent depuis quelques années aux différents allèles, ou formes alternatives, du gène codant pour la catéchol-O-méthyltransférase (COMT), enzyme qui dégrade la dopamine. (La COMT fait également l’objet d’études ayant trait à la douleur ; voir page 67.) Chez certains individus, une séquence bien déterminée du gène COMT encode un acide aminé appelé valine (Val) et chez d’autres un acide aminé appelé méthionine (Met). Bien que limitée à un seul acide aminé, cette différence a une influence sur l’activité de l’enzyme COMT. L’activité enzymatique la moins prononcée s’observe chez les individus qui possèdent deux copies de la forme Met du gène COMT, la plus grande chez ceux qui possèdent deux copies de la forme Val du gène COMT, et elle occupe, chez ceux qui ont une copie de chaque, une position intermédiaire. Certaines études, mais pas toutes, associent le fait de posséder deux allèles Val à un risque plus élevé de schizophrénie. Selon ces études, l’activité accrue de l’enzyme COMT observée chez les sujets Val/Val aggraverait la dégradation de la dopamine sécrétée par les neurones projetant vers le cortex préfrontal. Il en résulterait, dans cette région située à l’avant du cerveau, des déficits de la mémoire et de l’attention caractéristiques de la schizophrénie. 72 Dans le cadre d’une étude dont les résultats ont été publiés dans Biological Psychiatry, Terrie Moffitt et ses collègues ont constaté chez les sujets Val/Val devenus consommateurs réguliers de cannabis avant l’âge de 15 ans un risque accru de développer, une fois adultes, un trouble temporaire ressemblant à la schizophrénie. Ce risque existe aussi, mais à un degré moindre, chez les individus Val/Met. Il n’est pas accru, en revanche, Lors d’une étude analogue, publiée dans Nature Neuroscience, Andreas Meyer-Lindenberg et ses collaborateurs ont eu recours au scan cérébral (tomographie par émission de positons) pour démontrer que lorsqu’une personne effectue une tâche mentale l’activité neuronale de son cortex préfrontal (CPF) est « réglée » par la dopamine. En d’autres termes, la quantité de dopamine libérée reflète le degré d’activité électrophysiologique observée au cours de l’exécution du test par comparaison avec l’activité électrophysiologique du cerveau au repos. Demandant à des volontaires d’effectuer des exercices de mémorisation, les chercheurs constatèrent chez les porteurs du COMT Met une corrélation positive entre la synthèse de dopamine dans le mésencéphale et le flux sanguin observé dans le cortex préfrontal, qui donne une mesure indirecte de l’activité neuronale. Cette constatation s’accorde tout à fait avec l’hypothèse selon laquelle l’activité du CPF serait réglée par la dopamine. Troubles psychiatriques et toxicomanies chez les sujets Met/Met. Il ne l’est pas non plus chez les personnes qui se sont mises au cannabis à l’âge adulte, et ce quels que soient leurs allèles COMT. Selon les auteurs, l’interaction gène-cannabis serait limitée à une période sensible du développement cérébral située à l’adolescence. Ces résultats confortent les indices, toujours plus nombreux, d’un lien entre l’allèle Val et la psychose, mais d’un lien n’existant peut-être que chez les personnes exposées à des influences environnementales, dont la consommation de cannabis serait un exemple 1. Chez les porteurs du COMT Val, en revanche, ils observèrent, pour la même tâche, une corrélation inverse entre la synthèse de dopamine et le flux sanguin mesuré dans le CPF. Bien que l’exercice de mémorisation fut correctement effectué dans les deux groupes (Met et Val), les résultats indiquent que les taux de dopamine n’atteignent peut-être pas dans le CPF Réglage neuronal La tomographie par émission de positons montre que lorsqu’une personne est occupée à une tâche mentale, l’activité neuronale de son cortex préfrontal est «réglée» par la dopamine. Les taux de dopamine observés chez les personnes porteuses de certaines séquences de gènes pourraient avoir un rapport avec le risque de schizophrénie plus élevé auquel elles sont exposées. 73 des porteurs Val les taux qui permettraient à ces derniers un optimum d’efficacité. Ainsi pourrait s’expliquer, disent les auteurs, le mécanisme par lequel le COMT Val accroît le risque de schizophrénie chez les personnes possédant cette forme-là du gène 2. La dépression Beaucoup d’études familiales montrent que les parents de premier degré de personnes souffrant de dépression ont un risque accru de développer à leur tour des troubles dépressifs majeurs. Le problème d’une transmission héréditaire que suggèrent ces études est mis en évidence par la première étude de longue durée – trois générations – consacrée à la dépression majeure, dont Myrna Weissman et collaborateurs ont publié les résultats dans Archives of General Psychiatry. Ces résultats montrent que près de 60 % des enfants comptant des grandsparents et des parents dépressifs présentaient au moins un trouble psychiatrique (comme l’anxiété ou l’agitation). Pour les enfants dont un parent, mais aucun des grands-parents, souffre de dépression, le risque de troubles psychiatriques n’est pas plus grand, en revanche, que pour ceux dont ni le père ni la mère n’est dépressif 3. L’un des gènes qui pourrait être impliqué dans la transmission de la dépression est le gène codant pour la protéine qui assure la recapture de la sérotonine dans les neurones, d’où elle est à nouveau libérée lors de la décharge neuronale suivante. Les chercheurs ont découvert, il y a longtemps, qu’une neurotransmission déficiente de la sérotonine jouait un rôle clé dans la dépression. Le gène du transporteur de la sérotonine présente deux allèles, communément appelés « long » ou « court », selon la longueur de la région du gène qu’ils occupent. L’allèle court (« s») est associé à une disponibilité réduite du transporteur de la sérotonine. 74 On ne sait pas exactement pourquoi l’allèle « s» prédispose à la dépression. René Hen et ses collègues ont effectué, fin 2004, des études montrant que les souris chez lesquelles le transporteur de la sérotonine avait été inhibé durant les premiers stades de leur développement présentaient, une fois adultes, des symptômes de type anxieux. Faut-il en déduire qu’une disponibilité réduite du transporteur de la sérotonine, et donc de la sérotonine elle-même, affecte le développement des circuits émotionnels du cerveau 4, 5 et que l’allèle « s» contribue à ce phénomène en réduisant la disponibilité du transporteur ? Cortex cingulé antérieur Cortex préfrontal Cortex souscalleux postérieur Amygdale En 2005, Daniel Weinberger et son équipe ont apporté de l’eau au moulin de cette thèse en publiant dans Nature Neuroscience des résultats selon lesquels les personnes possédant l’allèle « s» seraient prédisposées à un contrôle inadéquat de leurs émotions négatives 6. Les chercheurs constatèrent chez ces personnes le fonctionnement déficient d’un circuit participant au contrôle de ce type d’émotion. Ils observèrent tout d’abord que des sujets sains – sans aucune histoire de troubles psychiatriques – qui possèdent l’allèle « s», présentent une réponse excessive de l’amygdale à des stimuli visuels agressifs. Or l’hyperactivité de l’amygdale, structure formée de cellules nerveuses situées de chaque côté du cerveau, en avant des oreilles, est associée à une exagération des traits de caractère de type anxieux, elle-même associée à un risque accru de dépression. Troubles psychiatriques et toxicomanies Thérapie comportementale et cognitive Des études effectuées en 2005 ont apporté de nouvelles précisions sur le rôle que l’amygdale, le cortex cingulé antérieur et le cortex souscalleux postérieur jouent dans la dépression et celui que le cortex préfrontal joue dans la schizophrénie et l’addiction. Les auteurs ont alors découvert que cette réponse excessive de l’amygdale était apparemment due au fait qu’une partie d’une région appelée cortex cingulaire antérieur (ACC), située sur l’axe médian du cerveau, n’exerçait pas pleinement sa fonction inhibitrice. Cette partie, dite rostrale, de l’ACC (rACC) regorge de neurones que ciblent des neurones sérotoninergiques d’une région inférieure du cerveau. Une activité réduite du rACC en cas de dépression et de tristesse avait déjà été mise en évidence par des études antérieures. Marc Caron et son équipe ont rapporté dans Neuron l’identification d’un autre allèle qui prédisposerait à la dépression. Celui-ci coordonne la production d’une forme légèrement modifiée de la tryptophane 75 hydroxylase 2, impliquée dans la synthèse de la sérotonine. Bien que ne s’en distinguant que par un seul acide aminé, la forme mutante de l’enzyme a en laboratoire une production de sérotonine inférieure de 80 % à celle de la forme normale. Les auteurs ont décelé cette mutation chez 9 de leurs 87 patients atteints de dépression majeure, alors qu’elle était présente chez 3 seulement des 219 sujets témoins. Certes ces 3 personnes ne souffraient pas d’une dépression sévère, mais elles présentaient des symptômes cliniques d’anxiété et de dépression légère. Il semblerait donc, au vu de ces résultats, qu’une production de sérotonine insuffisante puisse accroître sensiblement le risque de développer une dépression majeure 7. Bien que l’élévation du taux de sérotonine soit le but principal auquel tendent les traitements antidépresseurs, les patients ne répondant ni aux antidépresseurs ni à la psychothérapie ni aux électrochocs peuvent représenter jusqu’à 20 % des personnes souffrant de dépression. Parue dans Neuron, une étude préliminaire de Helen Mayberg et collaborateurs montre que ce type de patients répond parfois à la stimulation électrique du cortex sous-calleux postérieur (PSC), région située dans les profondeurs de l’axe médian du cerveau. Contrairement à l’activité du rACC, qui est réduite chez les sujets dépressifs, celle du PSC est exagérée et le reste justement chez les personnes qui ne répondent pas aux traitements traditionnels. Les chercheurs ont implanté 6 patients, tous atteints de dépressions résistantes aux traitements habituels, des électrodes insérées dans les voies neurales venant du PSC des deux côtés du cerveau. La délivrance de stimulations électriques de haute fréquence permit une réduction de l’activité du PSC. Les patients ont tous déclaré spontanément avoir ressenti sur l’humeur des effets bénéfiques tels qu’un « calme soudain », la « disparition de la sensation de vide» et un regain d’intérêt. Poursuivie pendant six mois, cette stimulation s’est soldée, chez 4 des 6 patients, par une amélioration de l’humeur qui s’est maintenue au-delà de la fin du traitement 8. Troubles addictifs 76 Comme dans la schizophrénie et la dépression, les gènes sont sans doute aussi impliqués dans l’addiction. Celui qui code pour le récepteur aux opioïdes de type μ (mu-opioid receptor – MOR) intéresse particulièrement les chercheurs. Il réagit aux substances chimiques naturelles de l’organisme similaires aux opiacés (morphine, héroïne), qui exercent leur effet sédatif en se liant à ce récepteur. La naltrexone, un bloquant du récepteur MOR, fournit des indices supplémentaires sur le rôle que celui-ci pourrait jouer dans l’alcoolisme. La naltrexone est d’une efficacité avérée contre l’alcoolisme, mais l’obligation de prendre chaque jour des comprimés fait souvent échouer le traitement. Pour pallier cet inconvénient, il existe maintenant une forme de naltrexone que l’on prend une fois par mois, en injection intramusculaire. Troubles psychiatriques et toxicomanies Un allèle du MOR – le 118G – est intéressant en ce que les récepteurs qu’il produit ont sur la bêta-endorphine un pouvoir de fixation trois fois plus grand que ceux que produit l’allèle normal. Gavin Bart et ses collaborateurs ont trouvé dans une population suédoise un lien entre cet allèle et la dépendance à l’alcool. Dans leur étude publiée dans Neuropsychopharmacology, ils disent ne pas savoir pourquoi le 118G contribue au risque alcoolique, mais pensent que cela pourrait s’expliquer par une modification de la réponse au stress 9. James Garbutt et collègues l’ont testée dans le cadre d’un grand essai clinique sur des patients alcoolo-dépendants, lors duquel deux doses différentes du produit furent combinées avec des mesures psychosociales de faible intensité sur une période de six mois. Les résultats publiés dans le Journal of the American Medical Association montrent que l’injection retard de la naltrexone permit de réduire les fortes consommations d’alcool. L’effet du traitement fut plus efficace avec la plus forte des deux doses et, pour des raisons inexpliquées, beaucoup plus marqué chez les hommes que chez les femmes 10. Le récepteur cannabinoïde CB1, qui fixe une substance endogène ressemblant au THC, l’ingrédient actif du cannabis, semble, lui aussi, jouer un rôle majeur dans l’abus de drogues et d’alcool ainsi que d’autres troubles addictifs. Dans un article paru dans le numéro d’août de Trends in Pharmacological Sciences, Taco De Vries et Anton Schoffelmeer passent en revue les indices selon lesquels le récepteur cannabinoïde CB1 ne contribuerait pas tant aux effets gratifiants des drogues, mais au contraire contribuerait à renforcer le conditionnement, dit pavlovien, qui apparaît au cours du processus addictif 11. L’addiction s’accompagne de la formation de souvenirs dont l’évocation suffira ensuite à susciter des envies de drogue : le fait de se retrouver dans un quartier où l’on avait pris l’habitude de consommer de la cocaïne va par exemple raviver ces souvenirs et précipiter une envie irrépressible 77 de consommer de la drogue. Des médicaments tels que le rimonabant sont capables, en bloquant le récepteur cannabinoïde CB1, de réprimer cette envie. Ils sont impuissants, en revanche, à bloquer une envie de drogue induite par un stress, qui peut être, par exemple, la perte de son emploi. Il apparaît donc que les troubles addictifs doivent, selon toute vraisemblance, être attaqués sur plusieurs fronts à la fois. Des avancées ont également été réalisées dans la connaissance des circuits neuronaux de l’addiction. Le circuit reliant le cortex préfrontal (CPF) au noyau accumbens (NA), localisé dans le télencéphale, a particulièrement retenu l’attention. Les fibres nerveuses allant du CPF au NA libèrent du glutamate, neurotransmetteur jouant un rôle important dans l’apprentissage et la mémoire. Celles qui vont du NA au CPF libèrent, elles, de la dopamine qui, on l’a vu précédemment, favorise l’attention. Peter Kalivas, Nora Volkow, et James Seamans ont publié dans Neuron une théorie complète de l’addiction supposant des dysfonctionnements aux deux extrêmes de ce circuit 12. Selon cette théorie, des modifications, dans le CPF, de certaines substances neuronales participant à la signalisation intracellulaire font que les signaux envoyés par les récepteurs dopaminergiques D1 prévalent sur ceux des autres récepteurs de la dopamine. Du coup, la personne ne s’intéresse plus qu’à ce qui a trait à la drogue et néglige tout autre source de satisfaction, comme les stimulis sexuellement éloquents modulés par un autre récepteur de la dopamine. Les changements intervenant dans le fonctionnement des neurones ainsi que dans celui des cellules de soutien (cellules gliales) situés à la fin de la voie menant du CPF au NA se traduisent par une libération plus abondante de glutamate ayant pour effet de renforcer le besoin compulsif de drogue. Les auteurs proposent sur le trajet de ce circuit plusieurs cibles par l’intermédiaire desquelles des médicaments pourraient casser le cercle vicieux et rétablir des conditions normales. Des pistes pour demain 78 En janvier 2005, la Josiah Macy Jr. Foundation a invité 30 psychiatres, neurologues et spécialistes des neurosciences à réfléchir aux moyens de renforcer l’interdisciplinarité dans la formation des futurs neurologues et psychiatres. Placée sous le signe de la convergence des neurosciences, des sciences du comportement, de la neurologie et de la psychiatrie, la conférence était présidée par Joseph B. Martin, MD, PhD, doyen de la Faculté de médecine de Harvard. Mais la discussion la plus importante aura sans doute porté sur la formation médicale et la nécessaire interdisciplinarité de la formation de base et de l’internat hospitalier. Troubles psychiatriques et toxicomanies Les recommandations suivantes ont été élaborées par les participants : suivre les diplômés de ces domaines afin de les aider à orienter leur carrière ; créer pour la recherche et les neurosciences cliniques une bibliothèque nationale du matériel didactique ; entretenir par des moyens appropriés l’intérêt que les étudiants manifestent pour ces domaines ; donner aux étudiants en thèse de neurobiologie une expérience clinique de leurs futurs domaines de recherche. Les troubles des sens et des fonctions corporelles Sommeil, appétit et obésité 82 Un rôle plus important pour l’orexine/hypocrétine 83 Des progrès dans la recherche sur la dégénérescence maculaire liée à l’âge 85 A la découverte de la nature sensorielle de l’odorat 87 81 D es énigmes biologiques qui résistaient depuis des décennies à la sagacité des chercheurs semblent soudain livrer leurs secrets les unes après les autres. Le mérite en revient pour bonne partie à de nouvelles technologies, qui donnent aux scientifiques des moyens d’investigation sans précédent et permettent la mise en évidence de relations cellulaires complexes, régissant tout aussi bien l’appétit que le sommeil ou l’odorat. Plusieurs études importantes publiées en 2005 ont éclairé les scientifiques sur des mystères tels que la perception cérébrale des odeurs ou comment les rythmes du sommeil sont liés à l’appétit ainsi qu’au comportement. L’inventivité grâce à laquelle ont été résolues des questions que l’on se posait depuis longtemps au sujet d’autres maladies contribue également à la mise au point de procédures et de technologies permettant de venir en aide aux personnes souffrant de dégénérescence maculaire. Sommeil, appétit et obésité Il y a longtemps que les scientifiques subodoraient l’existence de connexions entre les voies biologiques qui contrôlent le sommeil et celles qui régissent l’appétit. Signé de chercheurs de Northwestern University, un article paru dans le numéro de Science de mai 2005 conforte cette hypothèse. Joseph Bass et Fred Turek ont étudié des souris porteuses d’une mutation du gène de l’horloge circadienne qui participe au contrôle du rythme circadien du sommeil, de la veille et de l’appétit 1. Soumises à des régimes normaux ou riches en graisses, ces souris développaient beaucoup plus de graisses corporelles que leurs congénères ayant des gènes de l’horloge circadienne intacts. Le dérèglement de leur horloge interne avait également un effet sur la quantité de leur sommeil, l’heure à laquelle elles s’alimentaient et le stockage des calories surnuméraires. Elles présentaient en outre des taux élevés de cholestérol, de triglycérides et de glucose sanguin ainsi qu’un taux réduit d’insuline, autant de facteurs qui, pour la souris comme pour l’homme, constituent des risques d’obésité, de maladies cardiaques et de diabète. 82 Selon cette étude, les rythmes alimentaires irréguliers pourraient être dus à des modifications des taux de leptine et de ghreline, deux messagers chimiques jouant des rôles importants et opposés dans la régulation de l’appétit. Ces observations sont confortées par les résultats d’études effectuées chez l’homme et publiées juste avant la fin de 2004, montrant, Emmanuel Mignot et ses collègues de l’Université de Stanford et de l’Université du Wisconsin à Madison, ont demandé à plus de 1000 volontaires de passer une nuit dans un laboratoire du sommeil pour y subir une analyse de sang le lendemain. Comme ils l’expliquent dans le numéro de décembre 2004 de Public Library of Science Medicine, les participants qui avaient dormi moins de huit heures avaient un indice de masse corporelle plus élevé que ceux qui avaient dormi huit heures ou plus. Les «moins de huit heures» présentaient aussi des taux élevés de ghreline (qui signale la sensation de faim) et des taux réduits de leptine (qui contribue à la sensation de satiété) 2. Dans un travail publié dans le numéro d’Annals of Internal Medicine de décembre 2004, Eve van Cauter et ses collègues de l’Université de Chicago disent avoir trouvé chez de jeunes hommes bien portants privés de sommeil pour les besoins de l’expérience une élévation des taux de ghreline, une baisse de ceux de leptine ainsi qu’une sensation accrue de faim 3. Si l’on ajoute à ces résultats ceux de l’étude effectuée en 2005 chez des souris et les conclusions d’un travail publié en 2004, selon lesquelles une expérience de privation de sommeil a entraîné chez de jeunes hommes bien portants une élévation du taux d’une protéine dont la présence constitue un facteur de risque d’accident cardiaque 4, on a de sérieuses raisons de penser qu’un dérèglement des schémas d’alimentation et de sommeil puisse favoriser l’obésité et les risques qu’elle représente pour la santé. Une meilleure compréhension de ces schémas serait souhaitable, surtout aux EtatsUnis, où les gens ne dorment pas assez, les aliments hautement calorifiques abondent et les taux d’obésité et de diabète augmentent rapidement. Les troubles des sens et des fonctions corporelles elles aussi, l’importance que ces deux hormones revêtent pour le cycle sommeil-appétit. Un rôle plus important pour l’orexine/hypocrétine Au cours des dernières années ont été identifiées plusieurs substances clés qui interviennent dans le sommeil. L’une d’elle, l’orexine (hypocrétine), un neurotransmetteur produit dans l’hypothalamus, stimule l’éveil. Un manque d’orexine peut entraîner la narcolepsie chez l’homme. En 2005, plusieurs équipes de chercheurs ont observé que cette substance pouvait également intervenir à d’autres niveaux. Glenda Harris et Gary Aston-Jones, chercheurs à la Faculté de médecine de l’Université de Pennsylvanie, ont constaté une influence de l’orexine sur la façon dont le cerveau perçoit le plaisir et contrôle les conduites de recherche de 83 gratification 5. Le fait que certaines régions de l’hypothalamus interviennent dans les mécanismes de récompense et de motivation était connu, mais on ignorait quels étaient exactement les neurotransmetteurs impliqués. En stimulant les neurones orexinergiques du rat, Harris et AstonJones ont pu établir l’existence d’un lien entre forte activité orexinergique et recherche de drogues et de nourriture. Cette équipe a également constaté que l’orexine réveillait apparemment des conduites de recherche de drogues chez des rats ne manifestant plus un tel comportement. Lorsque les chercheurs injectèrent ces rats avec un bloquant de l’orexine, ces conduites disparurent. Ce travail, publié dans le numéro de Nature de septembre 2005, et confirmé par une étude dans Proceedings of the National Academy of Sciences en décembre 6 pourrait fournir une contribution importante à l’étude des conduites compulsives comme l’abus de drogues ou la boulimie. Deux équipes, l’une dirigée par Barbara Jones, de l’Université McGill à Montréal, l’autre dirigée par Jerry Siegel, de l’Université de Californie, à Los Projections vers les zones de récompense du prosencéphale et du mésencéphale • VTA • NAc • Amy Stimuli associés à la récompense : • morphine • cocaïne • nourriture 84 Projections vers les zones d’éveil du tronc cérébral • LC • TMN • PPT / LDT Stimuli associés à l’éveil : • marche • stress La perception du plaisir Une forte activité d’un neurotransmetteur appelé orexine, indiqué par le pointillé ovale, coïncide avec des conduites de recherche de drogues et de nourriture plus intenses. Dans l’hypothalamus latéral (LH), l’orexine est activée par des stimuli en rapport avec la récompense, par ex. sous forme d’aliments. Une fois activée, l’orexine étend son action à d’autres régions du cerveau : l’aire tegmentale ventrale (VTA), le nucleus accumbens (NAc) et l’amygdale (Amy). Les stimuli sans rapport avec la récompense, par ex. le stress, activent également l’orexine, mais dans d’autres régions du cerveau et ses effets sont alors différents. Des progrès dans la recherche sur la dégénérescence maculaire liée à l’âge Des études publiées en 2005 pourraient donner des raisons d’espérer aux personnes souffrant de dégénérescence maculaire (DMLA). Affectant la macula, région de la rétine ayant en charge la vision fine, cette maladie entraîne la perte de facultés visuelles telles que la lecture. La rétine convertit la lumière en signaux nerveux qu’elle transmet au cerveau. Avec l’âge, les cellules de la macula peuvent être victimes d’atteintes dégénératives aboutissant à une cécité définitive. Plus de 15 millions d’Américains souffrent de DMLA, forme de cécité la plus fréquente aux Etats-Unis. Au secours des yeux Cynthia Toth et son équipe de chercheurs de Duke University ont perfectionné une technique chirurgicale qui permet de rétablir chez les personnes atteintes de dégénérescence maculaire liée à l’âge une acuité visuelle appréciable, et un gain non moins appréciable de qualité de vie. Les troubles des sens et des fonctions corporelles Angeles, ont rapporté en 2005 que les neurones orexinergiques se mettaient à décharger juste avant que les animaux émergent du sommeil paradoxal 7, 8. Publiées respectivement dans le Journal of Neuroscience et Neuron, ces études similaires semblent indiquer que les neurones orexinergiques déchargent principalement au cours de l’éveil et que les décharges les plus rapides s’observent lorsque se déroulent des réponses motrices, associées, en particulier, à des tâches d’exploration. L’activité des neurones orexinergiques serait donc plus étroitement liée au mouvement en tant que tel qu’à l’état sous-jacent de veille ou de sommeil, ce qui s’accorde assez bien avec l’activité locomotrice très réduite observée chez les souris déficientes en orexine. Parue dans l’édition en ligne du Journal of Physiology, une étude de Yoshimasa Koyama et de ses collègues d’Asahikawa Medical College, au Japon, montre que les neurones orexinergiques envoient dans le mésencéphale des messages qui, à l’état de veille comme pendant le sommeil, jouent un rôle important dans la régulation de la fonction motrice et locomotrice 9. 85 Au début des années 1990, Robert Machemer, chercheur à la Duke University, a mis au point pour réparer les dégâts dus à la DMLA une technique chirurgicale appelée translocation maculaire, que ses collègues de Duke Cynthia Toth et Sharon Freedman ont perfectionnée pendant une dizaine d’années. Elle s’adresse aux personnes ayant presque complètement perdu la vue et chez lesquelles les autres traitements sont restés sans résultat. En 2005, cette technique a permis à ces deux chercheuses et à leur équipe de rétablir chez certains patients une acuité visuelle appréciable 10, 11. La translocation maculaire, qui consiste en un découpage de la rétine sur 360 degrés, est une intervention en deux temps, lors de laquelle les chirurgiens font tourner la rétine et déplacent la macula vers une zone de l’œil exempte de tissu cicatriciel et d’anomalies vasculaires. La vision semble alors comme penchée ou inclinée, ce qui oblige à intervenir une deuxième fois pour corriger ce défaut en faisant tourner l’œil. Toth et Freedman expliquent dans Ophthalmology que les patients à vision sévèrement réduite se plaignaient d’une très mauvaise qualité de vie. Lorsqu’elles revirent ces mêmes patients douze mois après l’opération, leur vision et leur qualité de vie s’étaient grandement améliorées. Des équipes du Vanderbilt University Medical Center, du Duke University Medical Center, de l’University of Texas Southwestern Medical Center et de la Boston University School of Medicine, dont les résultats ont été publiés séparément dans Science, ont découvert un gène qui intervient dans la dégénérescence maculaire. Il code pour une protéine du système immunitaire appelée « complement factor H » 12, 13. Les scientifiques pensaient depuis longtemps que le système immunitaire était pour quelque chose dans le déclenchement de la DMLA. Ils ont maintenant une cible moléculaire pour le développement de nouveaux médicaments contre cette maladie. 86 Entre-temps, une équipe de la Faculté de médecine de la Yale University dirigée par Josephine Hoh a découvert qu’un variant du gène codant pour le « complement factor H » provoquait au niveau de ce gène des modifications qui l’empêchent de produire le « complement factor H », dont on pense qu’il régule la réponse de l’organisme aux cellules dégénératives 14. Travaillant sur des échantillons de sang provenant de l’Age-Related Eye Disease Study du National Eye Institute, l’équipe de Josephine Hoh a analysé l’ADN de 96 patients sans lien de parenté, porteurs d’une DMLA avancée, et de 50 personnes ayant une vision normale. La découverte de A la découverte de la nature sensorielle de l’odorat L’odorat peut informer un animal de la présence d’un prédateur ou donner à une personne une idée de ce qu’elle trouvera à midi sur son assiette. Mais comment le cerveau s’y prend-il pour distinguer les odeurs ? Deux études parues en 2005 proposent un commencement de réponse à cette question. Lawrence Katz et une équipe de Duke University Medical Center ont identifié dans le cerveau de souris des neurones qui faisaient réagir celles-ci à certaines odeurs 15. Ils ont découvert que les souris distinguaient les mâles des femelles grâce à une substance contenue dans l’urine. Les neurones isolés par les chercheurs se situent dans le système olfactif principal du cerveau, et non, comme on le pensait pour les mammifères non humains, dans le système olfactif accessoire, qui n’existe pas chez l’homme. Selon cette recherche, publiée dans Nature, l’analyse des odeurs pourrait faire intervenir, chez l’homme comme chez l’animal, des régions supérieures du cerveau. Les troubles des sens et des fonctions corporelles ce variant pourrait aider les chercheurs à trouver des traitements contre cette maladie. Les travaux d’une équipe de Johns Hopkins School of Medicine pourraient permettre de mieux comprendre comment le cerveau distingue le délicat parfum d’une tarte aux pommes sortant du four des effluves salins d’une mer à marée basse 16. Jonathan Bradley et son équipe expliquent dans Neuron qu’une molécule transporteur d’ions, dont on sait qu’elle intervient dans la digestion, l’audition, l’équilibre et la fertilité, participe également à la perception cérébrale des odeurs. Pour envoyer au cerveau des informations sur les odeurs, les cellules olfactives ont besoin d’ions, autrement dit d’atomes de chlorure de charge négative. L’équipe de Bradley a constaté qu’un transporteur appelé NKCC1, qui régule la teneur en chlorure d’autres cellules de l’organisme, participait également aux entrées et sorties de chlorure des cellules olfactives, ce qui permet aux signaux porteurs d’informations olfactives d’aller de ces cellules au cerveau. L’étape suivante consistera à se faire une idée plus précise de la façon dont le chlorure intervient dans le traitement des odeurs. 87 Cellules souches et neurogenèse Les repères du développement des cellules souches 90 Le carbone 14 pour dater les cellules souches 90 Des déchets d’ADN responsables du caractère unique de chaque cerveau 91 La dopamine bride la neurogenèse 92 La neurogenèse aide à combattre les tumeurs du cerveau 93 Un gène qui aide les cellules souches à se différencier 93 Sources alternatives de cellules souches embryonnaires 94 Neurogenèse et accidents vasculaires cérébraux 95 Les nouveaux neurones indispensables à certaines formes de mémoire 96 89 O n entend par neurogenèse la naissance de nouvelles cellules nerveuses. Ce n’est que vers la fin des années 1990 qu’a été fournie la preuve scientifique que de nouveaux neurones, autrement dit de nouvelles cellules souches neurales, naissaient dans le cerveau humain adulte. Comment s’y développentelles, comment se différencient-elles en cellules effectuant dans le cerveau des tâches précises? L’année 2005 a été particulièrement riche en enseignements à cet égard. Elle a montré que le cerveau était le théâtre d’une neurogenèse continue, dont il est aussi possible de tirer parti à des fins thérapeutiques. Les repères du développement des cellules souches Le cerveau adulte contient beaucoup de cellules qui ressemblent à de jeunes neurones en voie de maturation: elles produisent des protéines correspondant à différents stades de développement précis, que l’on peut mettre en évidence à l’aide de colorants. Mais pour être utiles sur le plan thérapeutique et permettre de traiter des troubles du cerveau, les cellules souches doivent se différencier en neurones et remplacer ceux qui sont morts ou qui ont été endommagés. Dans le numéro de Brain du 15 juin, Morton Moe et son équipe du Karolinska Institute, en Suède, montrent que les cellules souches neurales passent, pour devenir des neurones matures et fonctionnels, par des stades caractéristiques. Travaillant sur des échantillons de tissu cérébral provenant de patients opérés pour traiter leur épilepsie, les chercheurs ont cultivé des cellules souches neurales qu’ils ont étudiées à l’aide de techniques de coloration et de procédés électrophysiologiques. En l’espace de quatre semaines, ces cellules commencèrent à présenter les propriétés membranaires et électrophysiologiques propres aux neurones; elles développèrent plusieurs types de canaux ioniques (par le moyen desquels les neurones échangent des stimuli électriques) ainsi que des synapses correspondant à deux des principaux neurotransmetteurs du cerveau. Cette étude est parmi les premières à mettre en évidence les changements de «comportement», et pas seulement d’apparence, qui accompagnent le processus de différenciation et de maturation des cellules souches neurales adultes 1. Le carbone 14 pour dater les cellules souches 90 La neurogenèse se produit dans plusieurs régions du cerveau, dont l’hippocampe, mais s’observe-t-elle aussi dans le cortex? Aucune preuve Cellules souches et neurogenèse concluante n’en avait été fournie, ni dans un sens ni dans l’autre, avant que Jonas Frisen et ses collègues du Medical Nobel Institute, à Stockholm, ne songent à déterminer l’âge de cellules humaines à l’aide du carbone 14. Leur raisonnement était le suivant: si les concentrations de carbone 14 mesurés dans des échantillons post mortem de tissu cortical provenant de personnes nées avant 1950, c’est-à-dire avant que les essais nucléaires des années 1950 n’introduisent dans l’atmosphère terrestre des quantités de carbone 14 qui ont pénétré dans les cellules végétales et animales ainsi qu’humaines, où elles décroissent depuis par paliers mesurables, étaient identiques à ceux qui existaient dans l’atmosphère avant que ne commencent les essais nucléaires, on aurait la preuve que les cellules en question avaient le même âge que la personne dont elles provenaient et qu’il n’y avait donc pas de neurogenèse dans le cortex, où aucune cellule ne s’était formée du vivant de la personne. Avant de tirer une quelconque conclusion de leur expérience, les chercheurs avaient pris la précaution de vérifier que les concentrations de carbone 14 mesurées dans de jeunes cellules sanguines étaient identiques à celles que l’on trouve aujourd’hui dans l’atmosphère. Cette étude, dont les résultats ont été publiés dans Cell, est une manière élégante de vérifier l’âge d’une cellule et fournit une preuve crédible de l’absence de neurogenèse corticale 2. Des déchets d’ADN responsables du caractère unique de chaque cerveau L’une des questions les plus importantes à se poser lorsqu’on veut utiliser des cellules souches à des fins thérapeutiques est de savoir si elles peuvent vraiment se différencier en n’importe quel type de cellule. Fred Gage et ses collègues du Salk Institute, Californie, ont montré dans le numéro de juin de Nature que les rétrotransposons, qui représentent environ 15 % du génome humain et que l’on a longtemps considéré comme des déchets d’ADN, peuvent non seulement changer la destinée d’une cellule souche neurale, mais qu’ils contribuent aussi au caractère unique de chaque cerveau. Freg Gage et son équipe ont injecté une lignée de rétrotransposons humains dans des cellules souches neurales élevées en culture, qu’ils ont ensuite greffées à des rats. Ces fragments d’ADN sont allés se nicher dans plusieurs gènes exprimés par des neurones, dont ils ont modifié l’expression génétique, ce qui eut souvent pour effet de reprogrammer le schéma de 91 Changement de destinée Des éléments du génome appelés rétrotransposons ont fait de la cellule que l’on voit en clair au centre de l’image un neurone. Les rétrotransposons ont le pouvoir de reprogrammer le schéma de développement des cellules souches et de leur ajouter des traits distinctifs faisant qu’il n’existe pas de cerveaux rigoureusement identiques. développement de la cellule souche et d’en faire un neurone au lieu d’une cellule de soutien du type astrocyte ou oligodendrocyte. Il semblerait donc, au vu de cette expérience, que, non contents de contribuer à la différenciation des cellules souches, les rétrotransposons ajoutent à cellesci des traits distinctifs, faisant qu’il n’existe pas, même chez les jumeaux homozygotes, deux cerveaux rigoureusement identiques 3. La dopamine bride la neurogenèse Beaucoup d’études montrent que les antidépresseurs ont le pouvoir d’intensifier les processus de neurogenèse du cerveau, ce qui laisse à penser qu’une absence de neurogenèse pourrait, à l’inverse, jouer un rôle dans certaines maladies psychiatriques. Des travaux similaires, effectués avec des médicaments antipsychotiques, ont toutefois fourni des résultats contradictoires. Parue dans le numéro du Journal of Neuroscience du 15 juin, une étude utilisant l’halopéridol propose quelques explications quant aux effets que la dopamine exerce sur le cerveau normal ainsi qu’en cas de schizophrénie (dont les symptômes sont dus en partie à une action trop forte de la dopamine). Tod Kippin et collègues de l’Université de Toronto ont montré que l’une des fonctions de la dopamine pourrait être de brider la neurogenèse quand cela est nécessaire. Selon cette recherche, l’halopéridol, un bloquant des récepteurs dopaminergiques, permet une augmentation du nombre de cellules souches neurales et, par conséquent, augmente le nombre de nouveaux neurones dans le cerveau adulte du rat. 92 Travaillant in vitro, les mêmes chercheurs ont montré que la dopamine inhibait la prolifération des cellules souches, que les cellules souches La neurogenèse aide à combattre les tumeurs du cerveau Une étude parue dans le Journal of Neuroscience du mois de mars montre que le cerveau pourrait faire de la neurogenèse une arme contre le cancer. Helmut Kettenmann et ses collaborateurs du Max Delbrück-Centrum für Moleculare Medizin, Berlin, ont infecté de cellules de glioblastome des souris dont les cellules souches neurales avaient été identifiées à l’aide d’une protéine fluorescente verte. Alors que les tumeurs se développaient, les cellules souches migrèrent des couches profondes du cerveau où elles se trouvaient vers le site des tumeurs, autour desquelles elles s’agglutinèrent en rangs serrés, suivant également les cellules cancéreuses qui se propageaient aux tissus voisins. Cellules souches et neurogenèse neurales possédaient des récepteurs dopaminergiques et qu’en prenant sur ceux-ci la place de la dopamine l’halopéridol pouvait entraver l’effet inhibiteur de cette dernière. Ils ont noté chez l’animal une augmentation spectaculaire des cellules souches dans le striatum, structure clé de l’activité dopaminergique. En montrant que l’halopéridol rétablit le volume du striatum, que l’on sait diminué chez les personnes souffrant de schizophrénie, cette étude fournit une nouvelle explication de l’effet de cet antipsychotique. Elle suggère également qu’une inhibition de la neurogenèse survenant en temps et lieu opportuns pourrait être nécessaire à la santé du cerveau 4. Des études in vitro montrèrent que les cellules souches contenaient la croissance des cellules cancéreuses et induisaient chez elles le phénomène de mort programmée ou apoptose, signe qu’elles combattaient le cancer et ne se contentaient pas uniquement de remplacer les cellules endommagées. Cette défense spontanée contre le cancer était moins prononcée chez les souris plus âgées, mais si l’on greffait à celles-ci des cellules souches neurales, elles survivaient tout aussi longtemps que leurs congénères plus jeunes. Rare chez les personnes jeunes, le glioblastome s’observe surtout après 55 ans. Il se pourrait donc que la neurogenèse constitue pour le cerveau jeune une défense puissante contre ce type de cancer et que celle-ci puisse être utilisée à des fins thérapeutiques 5. Un gène qui aide les cellules souches à se différencier Pour pouvoir utiliser les cellules souches dans un but thérapeutique les scientifiques doivent comprendre en quoi ces précurseurs donnent non seulement des neurones mais aussi telle ou telle autre cellule correspondant à une fonction bien précise. Dans le Journal of Neuroscience du 93 27 juillet, Arturo Alvarez-Buylla et ses collègues disent avoir identifié un gène, le pax6, qui pourrait jouer un rôle clé dans le développement de cellules produisant de la dopamine. Travaillant sur des souris adultes normales, ces chercheurs ont greffé dans le bulbe olfactif des animaux, où l’activité de la dopamine est intense, des cellules souches auxquelles manquait une copie fonctionnelle du gène pax6. Les cellules souches mutantes colonisèrent le bulbe olfactif, mais sans se différencier en cellules dopaminergiques ou en cellules granulaires superficielles (qui supposent l’intervention d’une enzyme pour que soit produite de la dopamine). Il semblerait, au vu de cette expérience, que le pax6 soit un gène permettant aux cellules souches de se spécialiser en cellules dopaminergiques, ce qui ne manquera pas d’intéresser les scientifiques cherchant des traitements contre des pathologies comme la maladie de Parkinson, dans lesquelles sont impliquées ces cellules 6. L’importance du rôle que joue le gène pax6 dans la genèse des cellules dopaminergiques est confirmée par une autre étude, publiée dans le numéro de juin de Nature Neuroscience, dont les auteurs ont en outre identifié la «niche» neurale, la voie de migration rostrale, où naissent les cellules dopaminergiques 7. Mises bout à bout, ces études permettent de mieux comprendre les mécanismes extrinsèques et intrinsèques de la neurogenèse adulte qui conditionnent l’identité neuronale. Sources alternatives de cellules souches embryonnaires Plus polyvalentes, semble-t-il, que les cellules du cerveau adulte, les cellules souches embryonnaires posent un problème d’éthique. On sait en orienter le développement in vitro de façon à leur faire remplacer, par exemple, des cellules qui meurent, mais on ne comprend toujours pas exactement le processus par lequel, une fois greffées, elles s’incorporent au tissu cérébral. 94 Dans le numéro de mai de Nature Biotechnology, Viviane Tabar et ses collègues du Memorial Sloan Kettering Cancer Center ont montré que les cellules souches embryonnaires humaines, lorsque greffées dans le cerveau de jeunes rats adultes, migrent et se différencient de la même façon que les cellules présentes sur le lieu de la greffe, prennent place au mêmes endroits et contribuent tout autant à la neurogenèse. Des études antérieures ayant suggéré que les cellules greffées « fusionnaient » avec les Deux études proposent des approches très intéressantes quant au problème d’éthique concernant les cellules souches embryonnaires. La production et la mise à disposition de ce genre de cellule implique la mort de l’embryon dont elles sont issues. Robert Lanza, de la société Advanced Cell Technology Inc., à Worcester, Massachusetts, et ses collègues ont rapporté dans le numéro en ligne du 16 octobre de Nature la modification d’une technique déjà utilisée dans la procréation médicalement assistée. Cette modification consiste à retirer au stade de développement « huit cellules » (stade précédant celui où se forme le blastocyste qui s’implante dans l’utérus) une cellule unique dont on vérifie qu’elle est indemne de toute anomalie génétique. Dans la variante, expérimentée chez la souris, que propose Robert Lanza, cette cellule unique est utilisée pour produire une lignée de cellules souches embryonnaires sans compromettre la survie du blastocyste et sa transformation en embryon 9. Cellules souches et neurogenèse cellules en place plus qu’elles ne changeaient de destinée, les auteurs ont cherché, mais sans résultat, des signes de fusion tels qu’un noyau double ou un chromosome surnuméraire. Leur conclusion: les cellules souches embryonnaires greffées savent réagir de façon appropriée aux indications du milieu dans lequel on les introduit et reforment, grâce à leur progéniture, les rangs des cellules mortes ou endommagées 8. S’appuyant sur des études antérieures, montrant que le gène Cdx2 joue un rôle crucial dans la formation de l’interface par l’intermédiaire de laquelle l’embryon s’implante dans l’utérus, Alexander Meissner et Rudolf Jaenisch ont développé des blastocystes de souris contenant Cdx2 muté empêchant de ce fait leur implantation. Décrite dans le même numéro de Nature, cette méthode produit une entité incapable de se transformer ellemême en un embryon viable, mais pouvant donner naissance à des lignées de cellules souches embryonnaires sans que se pose le problème de la destruction éventuelle d’une vie 10. Neurogenèse et accidents vasculaires cérébraux La stimulation de la neurogenèse pourrait être une approche thérapeutique dont ne bénéficieraient pas que les maladies neurodégénératives et les dépressions mais également des formes plus directes d’atteintes cérébrales. On sait, grâce à un certain nombre d’études, que les accidents vasculaires cérébraux (AVC) expérimentaux accroissent le taux de neurogenèse chez le rat jeune adulte. Selon une étude de chercheurs de l’Hôpital universitaire de Lund, en Suède, publiée dans le numéro d’août de 95 Stroke, ce phénomène d’autoréparation n’est pas propre aux jeunes animaux et s’observe aussi, avec une égale ampleur, dans des cerveaux plus âgés 11. Selon une étude publiée dans le numéro de juin du même journal, il existe un moyen étonnamment simple de stimuler la neurogenèse après un AVC, du moins chez le rat: il suffirait apparemment d’exposer l’animal à un environnement enrichi. Les auteurs de cette étude ont injecté une substance qui se fixe sur les cellules en division à des rats adultes ayant subi des lésions expérimentales analogues à celles que provoque un AVC. Après cette intervention, les rats furent répartis soit dans un environnement enrichi, truffé de jouets, de tunnels et de roues, soit dans des cages normales, ne contenant que de l’eau, de la nourriture et de la litière. Cinq semaines après l’«AVC», les chercheurs constatèrent chez les rats exposés à l’environnement enrichi une augmentation du nombre de cellules souches neurales, de même qu’une neurogenèse plus active. Cette observation pourrait avoir des implications théoriques et thérapeutiques fort importantes en ce qui concerne les accidents cérébraux 12. Les nouveaux neurones indispensables à certaines formes de mémoire Jouant un rôle très important dans la mémoire, l’hippocampe est le siège d’une neurogenèse qui entretient avec les fonctions mnésiques et d’apprentissage des liens que les chercheurs ne s’expliquent pas encore entièrement. Il semblerait que les neurones de formation récente aient une aptitude unique à fixer les nouveaux souvenirs et que ceux qui «naissent» pendant l’accomplissement d’une tâche de mémoire soient ensuite spécifiquement dédiés à cette activité. 96 Travaillant sur des rats adultes, Martin Wojtowicz et ses collègues de l’Université de Lethbridge, Alberta, Canada, ont réprimé la neurogenèse en irradiant modérément l’hippocampe de rats adultes. Quatre semaines après, alors qu’aucun nouveau neurone n’avait été produit, ils entraînèrent ces rats avec un labyrinthe aquatique (piscine de Morris), dans lequel les animaux furent replongés une, deux et quatre semaines plus tard dans le but de déterminer ce qu’ils en avaient retenu. Les rats irradiés n’eurent pas plus de peine à se repérer que leurs congénères non irradiés. Après une semaine, ils faisaient jeu égal avec ces derniers, mais après deux et quatre semaines leur reconnaissance des lieux s’était sérieusement détériorée. Cellules souches et neurogenèse Publiés dans le numéro de janvier de Neuroscience, ces résultats montrent que les neurones vieux de 4 à 28 jours au moment de l’épreuve sont nécessaires à la mémoire spatiale à long terme. Les rats traités se souvinrent facilement d’un test de labyrinthe basé sur des repères visuels, et les irradiations pratiquées juste avant ou juste après l’épreuve furent sans effet sur le résultat. Ces constatations indiquent assez clairement que la neurogenèse intervient dans la formation et la consolidation des souvenirs spatiaux à long terme dépendant de l’hippocampe 13. 97 Les troubles de la pensée et de la mémoire Nouvelle localisation pour une vieille connaissance 100 Démence et alimentation 101 De nouvelles façons d’envisager le traitement de la maladie d’Alzheimer 102 Emotions et mémoire 104 Les régions du cerveau associées au rappel des souvenirs 105 99 A lors que nos connaissances de la formation et de la récupération des souvenirs continuaient de progresser et que les chercheurs cliniciens commençaient à opposer de nouvelles armes au déclin cognitif, c’est un modèle murin de la maladie d’Alzheimer qui a finalement donné matière à l’étude la plus féconde de l’année. Nouvelle localisation pour une vieille connaissance Les plaques et les enchevêtrements neurofibrillaires qui se forment dans le cerveau des personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer sont-ils une des causes de la maladie ou une conséquence de celle-ci ? Frank LaFerla et ses collègues de l’Université de Californie, à Irvine, ont fait à ce sujet une découverte qui pourrait se révéler importante. Grâce à un modèle murin de la maladie d’Alzheimer qu’ils ont développé, et chez lequel s’observe une prolifération de plaques et des amas de neurofilaments ainsi que des troubles de la mémoire et des difficultés d’apprentissage semblables à ceux que l’on observe chez l’homme, cette équipe a rapporté en 2005, dans Neuron, que les souris commençaient à présenter des problèmes de comportement à l’âge de 4 mois, avant que n’apparaissent les plaques et les enchevêtrements neurofibrillaires 1. Examinant le cerveau de ces souris de 4 mois, les chercheurs constatèrent que la protéine amyloïde bêta, qui est le matériau dont sont constituées les 100 Plaques séniles et enchevêtrements neurofibrillaires : cause ou effet ? L’étude des plaques séniles et des enchevêtrements neurofibrillaires qui se forment dans la maladie d’Alzheimer indique que la protéine amyloïde bêta s’accumule d’abord à l’intérieur des neurones et n’apparaît que plus tard en dehors de ceux-ci. La grande tache sombre visible dans l’angle supérieur gauche de cet échantillon de tissus de l’hippocampe est une plaque sénile ; les petites taches noires sont des enchevêtrements neurofibrillaires. La maladie d’Alzheimer serait donc bien due à la substance amyloïde bêta, mais pas, comme on le pensait jusqu’ici, aux plaques que celle-ci forme à l’extérieur des neurones. Le mal viendrait des premiers dépôts qu’elle constitue à l’intérieur des neurones et qui, selon les chercheurs, empêcheraient les signaux nécessaires aux apprentissages et à la mémoire de transiter normalement par ceux-ci. Les plaques et les amas de neurofilaments apparaîtraient plus tard et aggraveraient les troubles de la mémoire et les difficultés d’apprentissage déjà présents. Démence et alimentation Qu’en est-il au juste des aliments et des vitamines dont on nous annonce périodiquement qu’ils nous protègent contre les démences ? Vrai pour l’acide folique, faux pour les statines ont dit les scientifiques. Les troubles de la pensée et de la mémoire plaques, s’accumulait «à l’intérieur» des neurones. De plus, lorsqu’ils traitèrent les souris avec des anticorps contre l’amyloïde bêta, les dépôts qui s’étaient formés dans les neurones disparurent et la capacité de mémorisation et d’apprentissage des animaux s’améliora. Dans une étude publiée dans Alzheimer’s & Dementia : The Journal of the Alzheimer’s Association, Maria Corrada et ses collègues de l’Université de Californie, à Irvine, ont constaté que l’acide folique à hautes doses faisait baisser le risque de développer la maladie d’Alzheimer 2. Les 579 volontaires de plus de 60 ans ne présentant aucune démence qui ont participé à cette étude (Baltimore Longitudinal Study of Aging) ont tenu au début de celle-ci un journal alimentaire sur lequel les chercheurs se sont basés pour calculer leur apport alimentaire en vitamines B (acide folique et vitamines B6 et B12) et en antioxydants (vitamines E et C et caroténoïdes). Après un suivi de neuf ans en moyenne, 57 des participants avaient développé la maladie d’Alzheimer. En comparant le journal alimentaire de ceux-ci avec ceux des autres personnes, les chercheurs ont constaté que le risque de développer la maladie était significativement plus bas pour les personnes ayant ingéré au moins la ration quotidienne recommandée d’acide folique que chez les autres. Aucun lien n’a pu être établi pour les autres éléments nutritifs. On ne connaît pas encore les mécanismes par lesquels l’acide folique protège la fonction neuronale. Les chercheurs ont relevé que les suppléments d’acide folique semblaient constituer un moyen efficace d’assurer un apport adéquat de cette vitamine. 101 De leur côté, Thomas Rea et ses collègues de l’Université de Washington, à Seattle, se sont appuyés sur des données d’une grande étude sur la santé cardiovasculaire pour évaluer l’incidence des statines sur le risque de développer la maladie d’Alzheimer 3. Les statines sont des médicaments que l’on utilise pour abaisser le taux du mauvais cholestérol. Des études épidémiologiques avaient suggéré qu’elles pouvaient être capables de réduire le risque de démence, mais ces résultats ne furent pas concluants. Publiant ses résultats dans Archives of Neurology, l’équipe de Rea n’a constaté aucune diminution de ce risque en comparant le mode de consommation de la statine et l’apparition de démence chez les 2798 personnes, toutes âgées de plus de 65 ans et ne présentant aucune démence au début de la recherche, qui ont participé au volet de l’étude sur la santé cardiovasculaire consacré à la cognition. L’âge moyen des participants, plus élevé dans cette étude que dans les précédentes, peut avoir eu une influence sur les résultats. Les auteurs n’excluent pas que les statines puissent être utiles si on commence à les prendre plus jeune. De nouvelles façons d’envisager le traitement de la maladie d’Alzheimer Les scientifiques ont testé au cours des dernières années – et 2005 n’a pas failli à la règle – plusieurs formes de thérapie vaccinale contre la maladie d’Alzheimer. Deux groupes de chercheurs ont découvert des indices préliminaires selon lesquels les facultés cognitives des personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer pourraient être améliorées par l’injection dans leur circulation d’anticorps provenant de dons de sang. Marc Weksler et Norm Relkin, Weill Cornell Medical Center, New York, avaient en effet observé que les taux d’anticorps se liant à la substance amyloïde bêta étaient inférieurs à la normale chez les patients alzheimériens. D’où l’idée que l’administration d’anticorps provenant de personnes bien portantes puisse permettre d’éliminer une partie de cette substance et de freiner ainsi la progression de la maladie. On appelle immunoglobulines intraveineuses (IgIV) ces anticorps purifiés, déjà utilisés dans le traitement d’autres maladies. 102 Pour mettre cette idée à l’épreuve et tester l’innocuité du produit, les auteurs ont enrôlé huit patients dans un essai de phase I 4. Selon la communication Cette étude corrobore les résultats d’un autre essai, publié en 2004 dans le Journal of Neurology, Neurosurgery & Psychiatry par Richard Dodel et ses collègues 5. Ce groupe a constaté chez cinq patients souffrant de la maladie d’Alzheimer une amélioration des facultés cognitives après IgIV, ainsi que des quantités moins importantes de substance amyloïde bêta dans le liquide céphalorachidien. On notera en outre que les patients de ces deux études n’ont pas eu à se plaindre d’effets secondaires, alors que des essais antérieurs, effectués avec un vaccin incitant le système immunitaire des patients à produire ses anticorps contre la substance amyloïde bêta, avaient entraîné des complications. Les troubles de la pensée et de la mémoire qu’ils ont faite en avril 2005, lors du congrès annuel de l’American Academy of Neurology, le traitement s’est révélé sûr et bien toléré. Bien que des essais portant sur un nombre aussi restreint de patients ne visent pas à établir si un médicament est efficace, celui-ci pourrait effectivement l’être. Les tests standard ont fait apparaître une amélioration des compétences cognitives chez six des sept patients qui ont pu être suivis pendant un temps suffisamment long. Aucune amélioration n’a été constatée chez le septième, dont l’état a cependant cessé de se détériorer. La diminution de substance amyloïde bêta observée dans le liquide céphalorachidien permet en outre de penser que celle-ci a aussi diminué dans le cerveau. Les deux équipes prévoient maintenant d’étendre leurs essais à des groupes plus nombreux de patients. Relkin et ses collègues projettent un test d’efficacité lors duquel une partie des patients recevra des IgIV, l’autre un placebo. La maladie d’Alzheimer est une pathologie complexe. Si beaucoup de chercheurs consacrent leurs efforts à la substance amyloïde bêta, d’autres s’intéressent aux pertes de synapses et de neurones qui se produisent dans certaines régions du cerveau. Voyant là une cause possible du déclin cognitif, Mark Tuszynski et ses collègues de l’Université de Californie, à San Diego, ont voulu savoir si le fait de stimuler la repousse neuronale pouvait ralentir la progression de la maladie 6. Ils ont prélevé dans ce but, chez huit patients souffrant d’une maladie d’Alzheimer modérée, des cellules cutanées qu’ils ont mises en culture et auxquelles ils ont inoculé un gène codant pour le nerve growth factor (NGF). Les cellules dopées par le NGF ont ensuite été perfusées dans le télencéphale basal des patients. Restait à savoir si elles allaient y induire, 103 comme chez la souris, une repousse neuronale compensant les pertes de neurones dues à la maladie d’Alzheimer. Deux patients furent victimes de lésions au cerveau pour avoir bougé par inadvertance la tête durant la perfusion. Pour éviter la répétition de ce genre d’incident, les six autres furent opérés sous anesthésie générale. L’évaluation qu’ils subirent 22 mois en moyenne après l’intervention ne révéla aucun effet secondaire à long terme et les tests neuropsychologiques semblaient indiquer que le déclin cognitif progressait moins vite. Les scans du cerveau grâce à la technique de tomographie par émission de positons faisaient apparaître une amélioration de la circulation sanguine dans la région traitée, dénotant une activité neuronale plus soutenue. L’un des patients dont le cerveau avait été touché durant l’opération mourut cinq semaines plus tard d’un arrêt cardiaque. L’examen post mortem de son cerveau montra que le NGF avait agi et que les neurones restants avaient développé de nouvelles connexions au voisinage du site opératoire. La preuve d’une réelle efficacité n’a été apportée ni pour cette approche ni pour les IgIV, mais les données préliminaires sont suffisamment encourageantes pour justifier de nouveaux essais. Emotions et mémoire Les moments chargés d’émotion laissent en nous des souvenirs plus profonds que les moments émotionnellement neutres, et les chercheurs savent que l’amygdale, qui est au centre du traitement cérébral des émotions, renforce les souvenirs particulièrement intenses. Philip Shaw et ses collaborateurs ont trouvé en 2005 des indications laissant à penser que les voies de renforcement reliant l’amygdale à d’autres régions du cerveau s’établissent à un stade précoce du développement 7. 104 Ces chercheurs ont constaté que les personnes victimes d’atteintes bilatérales de l’amygdale avant l’âge adulte gardaient un souvenir plus net des événements neutres que des moments émotionnellement intenses. La préférence pour les événements intenses était en revanche conservée chez les personnes dont l’amygdale avait été touchée à l’âge adulte, lors d’interventions chirurgicales destinées à traiter leur épilepsie. Selon ces données, rapportées dans Neurology, il existerait donc une période du développement cérébral qui serait déterminante pour l’établissement des voies dont dépend la capacité de distinguer toute la vie durant les émotions fortes des événements neutres. Au cours de ce dernier exercice, les volontaires étaient allongés dans un appareil d’imagerie par résonance magnétique, et les chercheurs pouvaient donc voir les régions du cerveau qui participaient au rappel exact. L’hippocampe antérieur gauche participa au rappel exact des deux types d’objets. L’amygdale droite et le cortex orbitofrontal gauche participèrent seulement à la récupération des objets à connotation émotionnelle, alors que le rappel des objets émotionnellement neutres activa le cortex préfrontal inférieur et latéral ainsi que l’hippocampe postérieur droit. Les troubles de la pensée et de la mémoire De leur côté, Elizabeth Kensinger et Daniel Schacter, de l’Université Harvard, ont rapporté dans Neuropsychologia que l’amygdale et le cortex orbitofrontal gauche étaient également impliqués dans la récupération des souvenirs émotionnellement forts et pas seulement dans leur codage 8. Pour déterminer les régions impliquées dans le rappel des souvenirs soit neutres soit chargés d’émotion, les auteurs ont montré à des volontaires une liste mêlant aléatoirement mots neutres (par ex. « grenouille ») et mots à forte connotation émotionnelle (par ex. cercueil) et leur ont demandé d’imaginer pour chacun une image. Par la suite, la moitié des mots furent suivis de l’image de l’objet, et l’autre moitié d’un écran blanc. Ensuite, les sujets devaient dire, lorsqu’on leur présentait différentes images, s’ils reconnaissaient avoir déjà vu l’objet dans le groupe de « mots seuls » ou « mots et images » ou dans aucun des deux. Le fait que les régions du cerveau activées par le rappel des divers types de souvenirs sont différentes signifie que les souvenirs sont codés différemment lors de leur entrée dans le cerveau mais aussi qu’ils en ressortent par des voies distinctes. Les régions du cerveau associées au rappel des souvenirs Des études du comportement semblent indiquer que la simple familiarité que l’on peut avoir d’un objet et le fait de savoir avec précision si on a vu l’objet en question et quand ne dépendent pas des mêmes voies neuronales. Désirant savoir quelles sont les régions du cerveau qui participent à ces tâches et jusqu’à quel point elles se chevauchent, Andrew Yonelinas et une équipe de l’Université de Californie, à Davis, ont imaginé une expérience consistant à stimuler ces activités et à observer le résultat de cette stimulation à l’aide de l’imagerie par résonance magnétique fonctionnelle 9. L’étude s’est déroulée en deux phases et les volontaires étaient, à chaque fois, allongés dans un scanner. Lors de la première phase, leur furent montrés 105 des mots dont ils eurent à dire s’ils évoquaient pour eux quelque chose de concret ou d’abstrait. Lors de la seconde phase, leur fut présentée une autre série de mots, dont certains étaient nouveaux et d’autres déjà présents dans la liste précédente. Cette fois-ci, les volontaires devaient dire si ces mots évoquaient quelque chose de particulier pour eux, s’ils se souvenaient de leur apparence sur l’écran ou se rappelaient ce qu’ils avaient pensé en les voyant. S’ils ne se souvenaient de rien de précis, ils devaient indiquer, sur une échelle de 1 à 4, jusqu’à quel point ils étaient sûrs de les avoir vus au cours de la première phase de l’expérience. Les chercheurs ont rapporté dans le Journal of Neuroscience que les différents types de souvenirs mettaient en jeu des régions différentes du cerveau. Pour le rappel spécifique, ces régions sont la partie antérieure et médiale du cortex préfrontal, le cortex pariétal latéral et le cortex cingulaire postérieur. Pour la simple familiarité, ce sont les régions latérales du cortex préfrontal, le cortex pariétal supérieur et le précunéus. L’hippocampe participe au rappel spécifique, mais cette participation est moins active pour les objets familiers que pour les objets peu familiers. Dans une recherche du même type, publiée dans Human Brain Mapping, Martina Piefke et ses collègues du Medizininstitut de Jülich, en Allemagne, 106 Les régions associées au rappel des souvenirs Martina Piefke et son équipe ont constaté que les hommes et les femmes utilisent pour évoquer des souvenirs à forte connotation émotionnelle des régions différentes du cerveau. Derrière Martina Piefke, deux clichés comparant les régions mises en jeu par les hommes et par les femmes. L’équipe de Martina Piefke a demandé à dix hommes et dix femmes de se souvenir d’événements émotionnellement négatifs ou positifs se situant d’une part à une époque récente de leur vie et d’autre part dans leur enfance. Si aucune différence n’est apparue entre les hommes et les femmes dans la capacité à évoquer des souvenirs, des différences d’activité liées au sexe ont toutefois été observées en cours d’expérience pour certaines régions du cerveau. Beaucoup de régions ont aussi bien été utilisées par les hommes que par les femmes, mais avec une activité plus prononcée chez les hommes dans le gyrus parahippocampique gauche, et ce pour les deux types de tâches (négatif vs positif et récent vs ancien). Chez les femmes, en revanche, a été observée une mise à contribution plus nette du cortex préfrontal dorsolatéral droit pour tous les types de stimuli et du cortex insulaire droit pour le rappel des souvenirs négatifs ou anciens. Les troubles de la pensée et de la mémoire disent avoir constaté que les régions du cerveau mises en jeu par le rappel des souvenirs autobiographiques chargés émotionnellement, ce qui constitue par partie la mémoire épisodique, ne sont pas les mêmes chez l’homme que chez la femme 10. De nombreuses différences de traitement avaient déjà été observées entre les deux sexes. On savait par exemple les hommes plus doués pour les tâches spatiales, les femmes pour les tâches verbales. Les femmes semblent par ailleurs garder des événements de leur vie des souvenirs plus détaillés et plus intenses. Mais personne n’avait encore exploré les différences de traitement neuronal qui sous-tendent ces observations. Les deux théories avancées jusqu’ici pour expliquer les souvenirs plus détaillés rapportés par les femmes sont soit que le vécu des événements est plus intense chez elles et leur encodage par conséquent plus performant, soit que leurs stratégies cognitives diffèrent de celles des hommes et que ces stratégies ont une incidence sur la façon de stocker et de restituer les souvenirs. N’ayant pas fait apparaître de différences statistiquement significatives entre les hommes et les femmes pour ce qui est de la capacité de se souvenir, cette étude semblerait indiquer que les femmes utilisent des stratégies cognitives particulières pour encoder, narrer et se remémorer leurs souvenirs les plus chers – stratégies qui semblent au final plus efficaces pour se remémorer le passé. La conclusion des auteurs est qu’il n’y a pas de différences dans l’efficacité du stockage des souvenirs, même si différentes régions du cerveau sont utilisées au cours de l’exécution de tâches identiques. 107 Références Introduction 1 The International HapMap Consortium. A haplotype map of the human genome. Nature. 2005 436(7047):1299-1320. 2 Maraganore DM, de Andrade M, Lesnick TG, Strain KJ, Farrer MJ, Rocca WA, Pant PVK, Frazer K, Cox D, and Ballenger D. High-resolution whole genome association study of Parkinson disease. American Journal of Human Genetics. 2005 77:685-693. 3 Edwards AO, Ritter R, Abel K, Manning A, Panhuysen C, Farrer L. Complement factor H polymorphism and age-related macular degeneration. Science. 2005 308(5720):421-424. 4 Pascual-Leone A, Amedi A, Fregni F, Merabet LB. The plastic human brain cortex. Annual Review of Neuroscience. 2005 28:377-401. 5 Yovel G, Kanwisher N. Face perception: domain specific, not process specific. 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Références 2 119 Illustrations / Photos P. 5: P. 9: P. 15: P. 23: P. 26: Photograph courtesy of Thomas Insel Photograph courtesy of Marcus Raichle Photographs courtesy of Marilyn Albert and Guy McKhann Will & Deni McIntyre / Science Photo Library Reprinted with permission from the American Journal of Psychiatry, (© 2005). American Psychiatric Association. P. 29: Screen captures courtesy of Dr. Geraldine Dawson P. 31: © Royalty-Free / Corbis P. 34: Diagram courtesy of Dr. Harry Baker P. 37: Photograph courtesy of the Cleveland Clinic P. 39: John Bavosi / Science Photo Library P. 41: Illustration by Benjamin Reece P. 46: Photograph by Les Todd P. 47: Photograph by Don Carstens / PictureQuest P. 55: Brand X Pictures P. 59: Martin M. Rotker / Science Photo Library P. 60: © 2005 Pardo et al. Reprinted with permission of John Wiley & Sons, Inc. P. 63: Romilly Lockyer / Brand X Pictures P. 67: Graph courtesy of Luda Diatchenko P. 71: BananaStock P. 73: Photograph courtesy of Dr. Andreas Meyer-Lindenberg, NIH/NIMH P. 75: © 2005, Kathryn Born P. 81: Bill Longcore / Science Photo Library P. 84: Illustration courtesy of Gary Aston-Jones and Glenda-Harris P. 85: Photograph by Les Todd P. 89: Bill Longcore / Science Photo Library P. 92: Photograph courtesy of Fred Gage, The Salk Institute P. 99: Anthony Harvie / Getty Images P. 100: Science Photo Library P. 106: Photograph courtesy of Martina Piefke 120 Imaginez un monde . . . … où la maladie d’Alzheimer, la maladie de Parkinson, la sclérose latérale amyotrophique et la rétinite pigmentaire, ainsi que d’autres causes de cécité, seront couramment détectées à un stade précoce et immédiatement traitées par des médicaments stoppant la détérioration avant que les dégâts ne deviennent trop importants. … où les facteurs génétiques et environnementaux prédisposant les individus aux maladies mentales seront connus et où des tests diagnostiques précis et des traitements ciblés – médicaments, soutien psychologique, interventions préventives, etc. – seront largement disponibles et pleinement utilisés. … où les nouvelles connaissances sur le développement du cerveau permettront de tirer un bénéfice accru des premières années d’apprentissage et de combattre, à l’autre extrême, les maladies liées à l’âge. … où les traumatismes de la moelle épinière ne seront plus synonymes de paralysie à vie, car on saura programmer le système nerveux de telle façon qu’il reconstitue les circuits neuronaux et rétablisse l’activité musculaire. … où les individus ne seront plus esclaves de leurs toxicomanies et de l’alcoolisme, car il existera des traitements facilement accessibles, permettant d’interrompre au niveau des voies nerveuses les phénomènes responsables des réactions de sevrage et entretenant le besoin obsessionnel de consommer des substances génératrices de dépendance. … où la vie des gens ne sera plus à la merci d’épisodes de dépression et d’anxiété, car on disposera pour les soigner de médicaments plus efficaces. 122 Pour irréaliste, voire utopique, que puisse paraître une telle vision, le fait est que les neurosciences sont actuellement à un moment extraordinairement prometteur et fécond de leur histoire. Les progrès que la recherche a réalisés au cours des dix dernières années vont au-delà de ce qu’on aurait pu imaginer. Nos connaissances des mécanismes fondamentaux du fonctionnement cérébral ont été élargies et atteignent aujourd’hui un point où il est possible de tirer un bénéfice pratique du potentiel qu’elles offrent. Déjà, ont été mis en place des stratégies, des technologies et des traitements visant à combattre un certain nombre de maladies et de troubles neurologiques. En se fixant des objectifs thérapeutiques et en mettant en pratique les connaissances que l’on possède, on parviendra, demain, à développer des traitements efficaces, conduisant, dans certains cas, à la guérison complète. Tout en progressant, les neurosciences nous donnent aussi la mesure de ce que nous ignorons encore, et c’est précisément ce qui pousse la recherche fondamentale à explorer les ressorts de la matière vivante pour formuler ensuite les questions d’ordre complexe qui conduisent aux découvertes scientifiques. Portées par l’activité coordonnée de milliers de chercheurs fondamentaux et cliniques, l’étude des structures moléculaires, la conception de médicaments, l’imagerie cérébrale, les sciences cognitives et la recherche clinique ont produit un ensemble de connaissances que l’on peut aujourd’hui mettre au service de la lutte contre les maladies et les troubles neurologiques. Les scientifiques que nous sommes continueront d’avancer individuellement, dans nos sphères respectives, mais aussi de concert, avec nos collègues de tous les domaines de la science, multipliant les occasions de collaboration interdisciplinaire. La Dana Alliance for Brain Initiatives et la European Dana Alliance for the Brain regroupent des spécialistes des neurosciences prêts à s’engager sur des objectifs ambitieux, comme on a pu le voir en 1992 à Cold Spring Harbor, New York, où fut établi un véritable calendrier de recherche, et une deuxième fois en 1997, quand s’est constitué le groupe européen de la Dana Alliance. Il s’agit maintenant, de part et d’autre de l’Atlantique, de tirer parti des avancées qui ont été accomplies et de fixer des objectifs susceptibles d’orienter les progrès auxquels on peut s’attendre à court et à moyen terme. En essayant d’imaginer les bénéfices que cette nouvelle ère des neurosciences est capable de nous apporter, les scientifiques pourront accélérer le mouvement et parvenir plus rapidement aux buts qu’ils se sont fixés. Les objectifs Combattre les effets de la maladie d’Alzheimer. On observe dans la maladie d’Alzheimer une accumulation extrêmement toxique pour les cellules nerveuses d’une petite fraction d’une protéine dite protéine amyloïde. Grâce à l’expérimentation animale, on connaît aujourd’hui le mécanisme biochimique et génétique de cette accumulation, que l’on essaie actuellement de prévenir ou de combattre chez l’animal par de nouveaux médicaments ainsi que par un vaccin potentiellement puissant. On peut raisonnablement espérer que ces traitements, qui doivent être essayés prochainement chez l’homme, permettront de lutter efficacement contre ce processus pathologique. Découvrir le meilleur moyen de traiter la maladie de Parkinson. Les médicaments agissant sur les voies dopaminergiques du cerveau ont donné de bons résultats dans le traitement des troubles moteurs de la maladie de Parkinson. Chez beaucoup de patients, l’effet thérapeutique tend malheureusement à s’épuiser au bout de cinq à dix ans. Actuellement sont en cours de développement de nouveaux médicaments visant à prolonger l’action des traitements dopaminergiques et à freiner la perte neuronale à l’origine de la maladie. Les patients qui ne répondent pas aux traitements médicamenteux retirent souvent un bénéfice d’une technique chirurgicale qui est la stimulation cérébrale profonde. De nouvelles formes d’imagerie cérébrale permettent par ailleurs de déterminer si ces traitements parviennent à sauver les neurones de la destruction et à rétablir un fonctionnement normal des circuits qu’ils forment. Imaginez un monde ... Nous avons besoin, pour réussir dans notre mission, de la confiance de l’opinion. Aussi les conséquences éthiques et sociétales du progrès des neurosciences devront-elles faire l’objet d’un large dialogue entre les chercheurs et le public. Faire baisser la fréquence des accidents vasculaires et améliorer le traitement de l’épisode aigu. Cesser de fumer, maintenir son taux de cholestérol et son poids à des niveaux raisonnables en ayant une alimentation et une activité physique appropriées sont, en conjonction avec le dépistage et le traitement du diabète, autant de façons d’obtenir des baisses spectaculaires du nombre de maladies et d’accidents cardiaques. Le fait d’évaluer et d’intervenir tout de suite après l’épisode aigu peut se traduire par des récupérations spectaculaires et un nombre beaucoup moins grand de séquelles. Demain seront développés des traitements réduisant davantage encore l’impact aigu des accidents vasculaires sur les cellules du cerveau. De nouvelles techniques de rééducation, tirant profit de ce que l’on sait de la capacité du cerveau à récupérer après un traumatisme, permettront d’aller encore plus loin dans 123 cette voie. Développer des traitements plus efficaces contre des troubles de l’humeur tels que la dépression, la schizophrénie, les troubles obsessionnels et les psychoses maniacodépressives. Grâce au séquençage du génome humain vont être découverts les gènes prédisposant à certaines de ces maladies. Dans la mesure où s’affinera encore l’imagerie médicale et où sera mieux connue l’action que ces gènes exercent au niveau du cerveau, on comprendra comment, lors de ces maladies de l’humeur, certains circuits neuronaux viennent à se dérégler. Le diagnostic deviendra alors plus sûr, l’utilisation des médicaments existants plus efficace et la recherche s’appuiera sur ces nouvelles bases théoriques pour développer des agents thérapeutiques d’un genre entièrement nouveau. Découvrir les causes génétiques et neurobiologiques de l’épilepsie et améliorer le traitement de cette maladie. Le fait de comprendre les causes génétiques de l’épilepsie ainsi que les mécanismes nerveux qui déclenchent les crises permettra de s’orienter vers un diagnostic préventif et des traitements ciblés. Les progrès réalisés dans le domaine des thérapies chirurgicales promettent d’offrir demain de précieuses alternatives thérapeutiques. Trouver des moyens nouveaux de prévenir et de traiter la sclérose en plaques. Les médecins disposent pour la première fois de médicaments capables d’agir sur le cours de cette maladie, et de nouvelles molécules, ayant pour effet de modifier les réponses immunitaires de l’organisme, continueront de faire baisser le nombre et la gravité des poussées de sclérose en plaques. De nouvelles approches permettront en outre de stopper la progression à plus long terme, due à la destruction des fibres 124 nerveuses. Développer des traitements plus efficaces pour les tumeurs du cerveau. Beaucoup de formes de tumeurs cérébrales, surtout malignes ou secondaires à des cancers n’ayant pas une origine cérébrale, sont difficiles à traiter. L’imagerie, la radiothérapie ciblée, de nouvelles façons d’amener le médicament à la tumeur, ainsi que l’identification de marqueurs génétiques facilitant le diagnostic devraient cependant permettre de trouver de nouvelles pistes thérapeutiques. Améliorer la récupération après des atteintes traumatiques du cerveau ou de la moelle épinière. Actuellement sont en cours d’évaluation des traitements permettant de contenir les dégâts tissulaires consécutifs à l’épisode aigu, ainsi que des molécules favorisant le rétablissement des connexions nerveuses. A l’étude chez l’animal, des techniques de régénération cellulaire visant à remplacer les neurones morts ou endommagés feront bientôt l’objet d’essais cliniques. A signaler aussi, l’implantation de puces miniaturisées ayant pour fonction de contrôler les circuits nerveux et de permettre à des membres paralysés de retrouver une certaine mobilité. Trouver de nouvelles solutions au problème de la douleur. La douleur ne doit plus être sous-traitée comme elle l’est souvent de nos jours. L’exploration des causes de la douleur et des mécanismes nerveux qui l’entretiennent fournira aux spécialistes des neurosciences les outils dont ils ont besoin pour développer des traitements antalgiques plus efficaces et mieux ciblés. Combattre la toxicomanie à sa source : dans le cerveau. On connaît aujourd’hui les circuits nerveux impliqués dans chacun des divers types de toxicomanie, et quelquesuns des récepteurs les plus importants des substances addictives ont déjà été clonés. En Comprendre les mécanismes cérébraux qui sous-tendent la réponse au stress, à l’anxiété et à la dépression. Il n’est pas de bonne qualité de vie sans bonne santé mentale. Le stress, l’anxiété, la dépression, outre qu’ils perturbent sévèrement la vie des gens, peuvent aussi avoir des effets dévastateurs sur la société. Dans la mesure où l’on comprendra mieux les mécanismes de la réponse au stress et les circuits cérébraux impliqués dans l’anxiété et la dépression, on saura mettre en place des moyens de prévention et de traitement plus efficaces. La stratégie clinique promettent de révolutionner la neurologie et la psychiatrie. Constituant un nouvel et puissant outil, pouvant aussi bien servir à des fins diagnostiques que pour concevoir de nouveaux traitements, les puces à ADN devraient permettre d’accélérer considérablement ce processus. Appliquer ce que nous savons sur le développement du cerveau. De la conception à la mort, le cerveau passe par différents stades de développement ainsi que par des périodes de fragilité et de croissance pouvant être soit favorisés soit contrariés. Pour améliorer le traitement de troubles du développement tels que l’autisme, les troubles hyperactifs avec déficit d’attention (THADA) et les troubles de l’apprentissage, les neurosciences devront élaborer un tableau plus détaillé du développement cérébral. Le cerveau connaît par ailleurs des problèmes spécifiquement liés à des stades de développement tels que l’adolescence ou la vieillesse et le fait de comprendre les transformations dont il est l’objet à ces moments-là permettra de concevoir des traitements d’un type nouveau. Imaginez un monde ... permettant de repérer les mécanismes neurobiologiques qui font d’un cerveau normal un cerveau sous dépendance, les nouveaux progrès de l’imagerie orienteront la recherche vers des traitements capables d’annuler ou de compenser ces modifications. Profiter des connaissances fournies par la génomique. On disposera bientôt de la séquence complète des gènes constituant le génome humain. On sera donc capable, au cours des dix à quinze prochaines années, d’établir pour tous les stades de l’existence, de la vie embryonnaire à la vie adulte en passant par l’enfance et l’adolescence, quels sont les gènes actifs dans chacune des zones du cerveau. Il sera possible de repérer les gènes déficients qui, dans certains tableaux neurologiques ou psychiatriques, ne fabriquent plus de protéines ou dont les protéines altérées fonctionnent anormalement. Cette approche a déjà permis d’établir l’origine génétique de maladies telles que la chorée de Huntington, l’ataxie spinocérébelleuse, la dystrophie musculaire et le syndrome du chromosome X fragile (forme d’arriération mentale). Utiliser l’énorme potentiel qu’offre la plasticité cérébrale. En tirant parti de la neuroplasticité, c’est-à-dire de la capacité du cerveau à se remodeler et à s’adapter, les spécialistes des neurosciences feront progresser la prise en charge des maladies neurodégénératives et proposeront bientôt des moyens d’améliorer la fonction cérébrale chez les bien-portants comme chez les personnes malades. Les thérapies de substitution cellulaire et de renouvellement neuronal déboucheront sur de nouveaux traitements des accidents vasculaires cérébraux, des traumatismes de la moelle épinière ainsi que de la maladie de Parkinson. Les connaissances fournies par la génétique et l’usage qui en sera fait au niveau du diagnostic Mieux comprendre ce qui fait de nous des êtres humains. Comment le cerveau 125 fonctionne-t-il ? Les spécialistes des neurosciences en arrivent au point où ils peuvent poser les grandes questions, et fournir des premiers éléments de réponse. Quels sont les mécanismes et les circuits nerveux qui permettent à l’homme de former des souvenirs, d’être attentif, de ressentir et d’exprimer des émotions, de prendre des décisions, de parler, de se montrer créatif ? En se donnant pour tâche de développer une théorie générale du fonctionnement cérébral, la science s’offre d’importants moyens de maximiser le potentiel de l’être humain. Les outils La substitution cellulaire. Les neurones adultes n’ont pas la faculté de se reproduire et de remplacer par renouvellement ceux d’entre eux qu’une maladie ou un traumatisme détruit. Les technologies utilisant la capacité des cellules souches neurales (qui sont les précurseurs des cellules nerveuses) à former des neurones en se différenciant pourraient bien révolutionner le traitement des maladies neurologiques. La technique consistant à greffer des cellules souches neurales à des animaux va bientôt être transposée à l’homme. Contrôler le développement de ces cellules, les diriger vers les régions voulues du cerveau et les amener à établir les connexions que l’on souhaite sont autant de questions sur lesquelles travaille actuellement la recherche. Les mécanismes de réparation neuronaux. Utilisant les mécanismes de réparation propres au système nerveux, qui tantôt régénèrent des neurones tantôt rétablissent des circuits, le cerveau a la faculté de « se refaire une santé ». Si l’on parvenait à renforcer cette faculté, cela reviendrait à donner un espoir de guérison aux personnes victimes de traumatismes de la moelle épinière ou de trauma126 tismes crâniens. Des technologies capables d’arrêter ou de prévenir la neurodégénérescence. Beaucoup de pathologies neurodégénératives, dont la maladie de Parkinson, celle d’Alzheimer, la chorée de Huntington ou la SLA résultent de la dégénérescence d’une population spécifique de cellules dans une région bien déterminée du cerveau. Agissant uniquement sur les symptômes, les traitements actuels sont impuissants devant cette perte progressive de neurones. Mais ce que l’on sait aujourd’hui des mécanismes sous-tendant la mort des cellules débouchera sans doute sur des techniques permettant d’empêcher les cellules de dégénérer et, par conséquent, de stopper la progression de ces maladies. Des techniques modifiant l’expression des gènes au niveau du cerveau. On utilise chez l’animal de laboratoire des techniques permettant soit de renforcer soit de bloquer l’action qu’un gène exerce au niveau du cerveau. Des gènes humains ayant subi des mutations du type de celles qui provoquent des maladies neurologiques comme la chorée de Huntington ou la SLA sont actuellement utilisés chez l’animal dans le but de trouver des traitements capables de prévenir les phénomènes de neurodégénérescence. Ces techniques ont par ailleurs fourni des informations très intéressantes sur des processus physiologiques tels que le développement cérébral, l’apprentissage et la formation des souvenirs. Ces outils, les plus puissants que l’on ait jamais eus en main pour étudier les processus normaux et anormaux qui se déroulent dans le cerveau, seront un jour utilisés dans le traitement de nombreux troubles cérébraux. Des techniques d’imagerie avancées. Des progrès remarquables ont été enregistrés dans l’imagerie structurelle et fonctionnelle du cerveau. Quand ils seront devenus aussi rapides et précis que les fonctions elles-mêmes, ces moyens d’investigation fourniront du Des dispositifs électroniques capables de remplacer des voies cérébrales non fonctionnelles. Avec le temps, il sera sans doute possible de ponter les voies cérébrales devenues non fonctionnelles. L’utilisation conjointe d’implants constitués de micro-électrodes et de dispositifs informatiques miniaturisés, qui enregistrent l’activité cérébrale et la convertissent en signaux envoyés à la moelle épinière, aux nerfs moteurs ou directement aux muscles, permettra sans doute d’apporter aux personnes ayant subi des traumatismes l’espoir de retrouver leur intégrité fonctionnelle. Imaginez un monde ... fonctionnement cérébral des images en « temps réel », grâce auxquelles les chercheurs pourront voir quelles sont exactement les régions du cerveau qui sont impliquées lorsque nous réfléchissons, apprenons quelque chose ou ressentons des émotions. Les nouvelles méthodes de la recherche pharmaceutique. Les progrès réalisés dans le domaine de la biologie structurelle, de la génomique et de la chimie assistée par ordinateur permettent aux chercheurs de générer des quantités sans précédent de nouvelles molécules, dont beaucoup promettent d’être d’un grand intérêt clinique. Les nouvelles techniques de screening à très haut débit, qui utilisent notamment des puces à ADN, vont, dans certains cas, ramener de plusieurs années à quelques mois seulement le temps qui s’écoule entre la découverte d’un nouveau principe actif et son évaluation clinique. 127 Members of EDAB AGID Yves* Hôpital de la Salpêtrière, Paris, France AGUZZI Adriano University of Zurich, Switzerland ANDERSEN Per* University of Oslo, Norway ANTUNES João Lobo University of Lisbon, Portugal AUNIS Dominque INSERM Strasbourg, France AVENDAÑO Carlos University of Madrid, Spain CHERNISHEVA Marina University of St Petersburg, Russia CHVATAL Alexandr Institute of Experimental Medicine ASCR, Prague, Czech Reuplic CLARAC François CNRS, Marseille, France CLEMENTI Francesco* University of Milan, Italy COLLINGRIDGE Graham* University of Bristol, UK BADDELEY Alan University of York, UK BARDE Yves-Alain* University of Basel, Switzerland BELMONTE Carlos Instituto de Neurosciencias, Alicante, Spain. BENABID Alim-Louis INSERM and Joseph Fourier University of Grenoble, France BEN-ARI Yehezkel INSERM-INMED, Marseille, France BENFENATI Fabio University of Genova, Italy BERGER Michael University of Vienna, Austria BERLUCCHI Giovanni* Università degli Studi di Verona, Italy BERNARDI Giorgio University Tor Vergata-Roma, Italy BERTHOZ Alain* Collège de France, Paris, France BEYREUTHER Konrad* University of Heidelberg, Germany CUÉNOD Michel* University of Lausanne, Switzerland CULIC Milka University of Belgrade, Yugoslavia DAVIES Kay* University of Oxford, UK DELGADO-GARCIA Jose Maria Universidad Pablo de Olavide, Seville, Spain; President of the Spanish Neuroscience Society DICHGANS Johannes University of Tübingen, Germany DOLAN Ray University College, London, UK DUDAI Yadin* Weizmann Institute of Science, Rehovot, Israel ELEKES Károly Hungarian Academy of Sciences, Tihany, Hungary; President of the Hungarian Neuroscience Society BJÖRKLUND Anders* Lund University, Sweden ESEN Ferhan Osmangazi University, Eskisehir, Turkey BLAKEMORE Colin* Medical Research Council, UK EYSEL Ulf Ruhr-Universität Bochum, Germany BOCKAERT Joel CNRS, Montpellier, France BORBÉLY Alexander University of Zurich, Switzerland FERRUS Alberto* Instituto Cajal, Madrid, Spain BRANDT Thomas University of Munich, Germany FIESCHI Cesare University of Rome, Italy BRUNDIN Patrik Lund University, Sweden FOSTER Russell University of Oxford, UK BUDKA Herbert University of Vienna, Austria FRACKOWIAK Richard* University College London, UK; President of the British Neuroscience Association BUREŠ Jan* Academy of Sciences, Prague, Czech Republic BYSTRON Irina University of St Petersburg, Russia FREUND Hans-Joachim* University of Düsseldorf, Germany FREUND Tamás University of Budapest, Hungary; CARLSSON Arvid University of Gothenburg, Sweden President of FENS CHANGEUX Jean-Pierre Institut Pasteur, Paris, France FRITSCHY Jean-Marc University of Zurich, Switzerland GARCIA-SEGURA Luis Instituto Cajal, Madrid, Spain KERSCHBAUM Hubert University of Salzburg, Austria GISPEN Willem* University of Utrecht, The Netherlands KETTENMANN Helmut Max-Delbrück-Centre for Molecular Medicine, Berlin, Germany GJEDDE Albert* Aarhus University Hospital, Denmark KORTE Martin Technical University Braunschweig, Germany GLOWINSKI Jacques Collège de France, Paris, France KOSSUT Malgorzata* Nencki Institute of Experimental Biology, Warsaw, Poland. GREENFIELD Lady Susan The Royal Institution of Great Britain, London, UK KOUVELAS Elias University of Patras, Greece GRIGOREV Igor Institute of Experimental Medicine, St Petersburg, Russia GRILLNER Sten* Karolinska Institute, Stockholm, Sweden HARI Riitta* Helsinki University of Technology, Espoo, Finland HARIRI Nuran University of Ege, Izmir, Turkey; President of the Turkish Neuroscience Society HERMANN Anton University of Salzburg, Austria HERSCHKOWITZ Norbert* University of Bern, Switzerland HIRSCH Etienne Hôpital de la Salpêtrière, Paris, France KRISHTAL Oleg* Bogomoletz Institute of Physiology, Kiev, Ukraine LANDIS Theodor* University Hospital Geneva, Switzerland LANNFELT Lars University of Uppsala,Sweden LAURITZEN Martin University of Copenhagen, Denmark LERMA Juan Instituto de Neurociencias, CSICUMH, Alicante, Spain LEVELT Willem* Max-Planck-Institute for Psycholinguistics, Nijmegen, The Netherlands LEVI-MONTALCINI Rita* EBRI, Rome, Italy LIMA Deolinda University of Porto, Portugal HOLSBOER Florian* Max-Planck-Institute of Psychiatry, Munich, Germany LOPEZ-BARNEO José* University of Seville, Spain HOLZER Peter University of Graz, Austria MAGISTRETTI Pierre J.* University of Lausanne, Switzerland HUXLEY Sir Andrew* University of Cambridge, UK INNOCENTI Giorgio Karolinska Institute, Stockholm, Sweden IVERSEN Leslie University of Oxford, UK IVERSEN Susan* University of Oxford, UK MALACH Rafael Weizmann Institute of Science, Rehovot, Israel MATTHEWS Paul University of Oxford, UK McDONALD William* Royal College of Physicians, London, UK MEHLER Jacques* SISSA, Trieste, Italy. JACK Julian* University of Oxford, UK MELAMED Eldad Tel Aviv University, Israel JEANNEROD Marc* Institut des Sciences Cognitives, Bron, France MONYER Hannah* University Hospital of Neurology, Heidelberg, Germany JOHANSSON Barbro Lund University, Sweden MORRIS Richard* University of Edinburgh, Scotland; President-elect FENS KACZMAREK Leszek Nencki Institute of Experimental Biology, Warsaw, Poland. KASTE Markku University of Helsinki, Finland NEHER Erwin Max-Planck-Institute for Biophysical Chemistry, Göttingen, Germany KATO Ann Centre Médical Universitaire, Geneva, Switzerland NIETO-SAMPEDRO Manuel* Instituto Cajal, Madrid, Spain KENNARD Christopher Imperial College School of Medicine, London, UK NOZDRACHEV Alexander State University of St Petersburg, Russia OERTEL Wolfgang* Philipps-University, Marburg, Germany SINGER Wolf* Max-Planck-Institute for Brain Research, Frankfurt, Germany OLESEN Jes Glostrup Hospital, Copenhagen, Denmark; Chairman European Brain Council SMITH David University of Oxford, UK ORBAN Guy* Catholic University of Leuven, Belgium SPEKREIJSE Henk* University of Amsterdam, The Netherlands SPERK Günther University of Innsbruck, Austria PARDUCZ Arpad Institute of Biophysics, Biological Research Center of the Hungarian Academy of Sciences, Szeged, Hungary PEKER Gonul University of Ege Medical School, Izmir, Turkey. PETIT Christine Institut Pasteur & Collège de France, Paris, France POCHET Roland Université Libre de Bruxelles, Belgium POEWE Werner Universitätsklinik für Neurologie, Innsbruck, Austria POULAIN Dominique Université Victor Segalen, Bordeaux, France; President of the French Neuroscience Society PROCHIANTZ Alain CNRS and Ecole Normale Supérieure, Paris, France PYZA Elzbieta Jagiellonian University, Krakow, Poland STEWART Michael The Open University, Milton Keynes, UK STOERIG Petra* Heinrich-Heine University, Düsseldorf, Germany STRATA Pierogiorgio* University of Turin, Italy SYKOVA Eva Institute of Experimental Medicine ASCR, Prague, Czech Republic THOENEN Hans* Max-Planck-Institute for Psychiatry, Martinsried, Germany TOLDI József University of Szeged, Hungary TOLOSA Eduardo University of Barcelona, Spain TSAGARELI Merab Beritashvili Institute of Physiology, Tblisi, Republic of Georgia VETULANI Jerzy Institute of Pharmacology, Krakow, Poland VIZI Sylvester* Hungarian Academy of Sciences, Budapest, Hungary RAFF Martin* University College London, UK RAISMAN Geoffrey Institute of Neurology, University College London, UK WALTON Lord of Detchant* University of Oxford, UK RIBEIRO Joaquim Alexandre University of Lisbon, Portugal WINKLER Hans* Austrian Academy of Sciences, Innsbruck, Austria RIZZOLATTI Giacomo* University of Parma, Italy WOLLBERG Zvi Hebrew University, School of Medicine, Israel ROSE Steven The Open University, Milton Keynes, UK ROTH Sir Martin* University of Cambridge, UK ZEKI Semir* University College London, UK ROTHWELL Dame Nancy University of Manchester, UK ZILLES Karl* Heinrich-Heine-University, Düsseldorf, Germany RUTTER Sir Michael King’s College London, UK SAKMANN Bert Max-Planck-Institute for Medical Research, Heidelberg, Germany SCHWAB Martin* University of Zurich, Switzerland SEGAL Menahem Weizmann Institute of Science, Rehovot, Israel SEGEV Idan Hebrew University, Jerusalem, Israel SHALLICE Tim* University College London, UK *original signatory to the EDAB Declaration Federation of European Neuroscience Societies Presidents / Term Members WOLLBERG Zvi Israel Society for Neuroscience, Tel Aviv University, Israel ARTIGAS Francesc Spanish Society of Neuroscience, University of Barcelona, Spain ZAGREAN Leon National Neuroscience Society of Romania, Carol Davila University of Medicine, Bucharest, Romania BARTH Friedrich G. Austrian Academy of Sciences, Austria BOER Gerard Dutch Neurofederation, Netherlands Institute for Brain Research The Netherlands BRESJANAC Marja Slovenian Neuroscience Association (SINAPSA), Ljubljana, Slovenia CASTRÉN Eero Brain Research Society of Finland, University of Helsinki, Finland DE SCHUTTER Erik Belgian Society for Neuroscience, University of Antwerp, Belgium DI CHIARA Gaetano University of Cagliari, FRANDSEN Aase Danish Society for Neuroscience, Copenhagen University Hospital, Denmark HEISS Dieter European Federation of Neurological Societies, University of Köln, Germany HOFFMANN Klaus-Peter German Neuroscience Society, Ruhr-Universität Bochum, Germany HUCHO Ferdinand European Society for Neurochemistry, Freie Universität Berlin, Germany KHECHINASHVILI Simon Georgian Neuroscience Association, Beritsashvili Institute of Physiology, Tblisi, Republic of Georgia KOSTOVIC Ivica Institute for Brain Research, Zagreb, Croatia MENDLEWICZ Julien European College of Neuropsycopharmacology, ULB Erasme Hospital, Brussels, Belgium PRZEWLOCKI Ryszard Polish Neuroscience Society, Polish Academy of Sciences, Krakow,Poland ROUGON Geneviève Institut de Biologie du développement de Marseille CNRS, France ROUILLER Eric M. Swiss Society of Neuroscience, University of Fribourg, Switzerland SAGVOLDEN Terje Norwegian Neuroscience Society, University of Oslo, Norway SEBASTIÃO Ana Portuguese Society for Neuroscience, University of Lisbon, Portugal STYLIANOPOULOU Fotini Hellenic Society for Neuroscience, University of Athens, Greece SYKA Josef Czech Neuroscience Society, Academy of Sciences, Prague, Czech Republic May 2006 A Dana Alliance for the Brain Inc Publication prepared by EDAB, the European subsidiary of DABI Imprimé en Suisse 6.2006