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Dominique Cailleaud,
président de l’association française pour l’information
géographique (Afigeo), député
« La collectivité est et doit rester au cœur des SIG réseaux »
Un enjeu de
connaissance
des réseaux
© Afigéo
La maîtrise de la
connaissance du soussol de la voirie publique
est fondamentale pour
les collectivités territoriales et les différentes
instances compétentes.
L’assainissement, le gaz,
l’électricité, l’éclairage
public, la signalisation, l’eau, parfois vapeur
d’eau, ainsi que les télécommunications se font
concurrence pour occuper un espace restreint.
Le renforcement, l’entretien ou la pose de nouveaux réseaux obligent à de nombreuses interventions qui ne sont pas toujours planifiées,
notamment en cas de rupture. La ville sans
cesse en renouvellement dessine de nouveaux
quartiers, de nouvelles voiries. Dès lors, on ne
peut plus se fier à la mémoire des vieux techniciens pour savoir si la conduite se situe à gauche
ou à droite de la chaussée.
Un enjeu de responsabilité des élus
Les agressions, par des engins de chantier, sur
les réseaux enterrés ne constituent pas, loin s’en
faut, des événements exceptionnels qui, trop
souvent, ont pour origine les travaux de tiers à
proximité des canalisations.
Pour les opérateurs et gestionnaires de réseaux
comme pour les entreprises de travaux publics
intervenant sur la voirie, un repérage précis des
canalisations et autres fourreaux doit permettre
d’éviter ces accrochages aux conséquences économiques importantes, quand il ne s’agit pas
d’accidents parfois mortels.
Dès lors, la connaissance et la localisation des
réseaux souterrains de transport et de distribution représentent un enjeu majeur en termes
de sécurité, d’urbanisme et d’équipements
publics. Cependant, les producteurs potentiels
d’information géographique concernés sont
nombreux et le degré de connaissance de leurs
propres ouvrages très variable.
Des évolutions législatives en cours
Deux dispositifs législatifs vont accélérer cette
obligation de la connaissance des réseaux.
L’un a été lancé au printemps 2008 par le
ministère de l’Intérieur, en lien avec le ministère en charge de la prévention des risques
industriels (Meeddm). C’est un plan national
d’action relatif aux canalisations enterrées,
consécutif à une série d’accidents mortels survenus au cours de travaux touchant les réseaux
à risque gaz et électricité.
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N° 144 - Avril 2010
L’autre, relatif à la lutte contre la « fracture
numérique », a été publié le 18 décembre 2009
au Journal officiel.
Une réglementation complexe
D’une part, tout projet d’intervention sur la
voirie, en particulier en souterrain, est soumis à
des obligations en termes de détection et d’information sur la présence d’ouvrages réseaux. Ces
projets font l’objet d’une réglementation spécifique sur l’échange d’informations préalable
et final (plans de récolement) entre le maître
d’ouvrage, la commune concernée, l’exploitant
de réseaux et l’entreprise de travaux (décret
du 14 octobre 1991 DR-DICT : demandes de
renseignements et déclarations d’intention de
commencement de travaux) et d’une norme
publiée en 2008 (XP P16-0032). Un projet de
décret vise à améliorer la qualité cartographique
des réseaux et la mutualisation de cette connaissance. D’autre part, opérateurs et collectivités
doivent systématiquement s’informer sur les
travaux aériens et souterrains dans le but de
favoriser la pose de fibre optique (loi Pintat).
Une nécessité : un référentiel
cadastral commun
On ne peut cependant traiter ce problème de
cartographie des réseaux sans traiter celui du
découpage parcellaire entre les espaces privés
et l’espace public complété de sa description
topographique. Engagé en 1993 dans le cadre
d’un protocole signé par l’État, les collectivités et les gestionnaires de réseaux, un plan
de numérisation des feuilles cadastrales a été
engagé pour réaliser une couverture numérique
nationale utile à tous, le plan cadastral informatisé ou PCI.
À ce jour, il n’est toujours pas achevé. Les collectivités locales et les gestionnaires de réseaux
qui ont financièrement contribué à la réalisation de ce référentiel national demandent à être
impliqués dans toutes les décisions qui seraient
prises concernant son achèvement et, surtout,
sa fiabilisation.
La collectivité est et doit rester au cœur des SIG
réseaux. Acteur principal de la construction
et de la mise à jour des SIG, elle doit rester associée aux évolutions de la loi et de la
réglementation, car ces dernières ont des conséquences financières très lourdes.
L’Association française pour l’information
géographique (AFIGéO) souhaite être à vos
côtés pour vous écouter et vous aider dans ces
phases importantes.
> Le sujet sera débattu lors d’un atelier des
rencontres SIG-La-Lettre le 6 juin 2010.
Rens. : www.rencontres-sig-la-lettre.fr
• AdCF • Intercommunalités
Marc Tempelhof, urbaniste
Décentralisation des
aéroports régionaux
Quelle soutenabilité
financière pour les collectivités locales ?
Sur les 150 aéroports ou aérodromes
transférés par l’État en août 2004,
61 sont revenus aux communautés.
De tailles très variables, rarement
rentables, leur transfert pose la question
du soutien financier et de leur maintien
en activité, les collectivités étant
amenées à subventionner non seulement
le gestionnaire mais bien souvent,
aussi, la compagnie…
N ombre de collectivités qui ont en charge un
aéroport régional se posent aujourd’hui la
question du maintien ou non de leurs subventions. Propriétés de l’État avant 2004, ces
équipements affichent un déficit permanent relevé dès 2008
par la Cour des comptes1.
Avec peu de trafic et des coûts fixes élevés, ils coûtent cher aux
collectivités. Pour les plus petits, le trafic commercial est parfois même généré artificiellement en plaçant une ou plusieurs
lignes sous le régime des obligations de service public (OSP)2.
Ce régime permet de subventionner les lignes que la collectivité juge indispensables pour désenclaver la région. Avant
même d’équilibrer les comptes de l’aéroport en fin d’année,
il faut donc mettre une première fois la main à la poche pour
combler le déficit d’exploitation des compagnies assurant ces
liaisons spécifiques. Certaines compagnies, comme Airlinair et
Chalair, ont bâti leur développement sur ces liaisons régionales
subventionnées.
Engagement de l’État selon le type
d’aéroport
L’article 28 de la loi du 13 août 2004 relative aux libertés
et responsabilités locales décompose l’engagement de l’État
des aéroports français en trois niveaux, selon le trafic annuel
des aéroports :
• Les aéroports de Paris restent aux mains d’Aéroports de
Paris. Devenu, en 2005, une société anonyme à capitaux
majoritairement publics, le groupe ADP signe un contrat de
régulation avec l’État sur l’orientation de son développement.
• Les grands aéroports régionaux (Nice, Marseille, Lyon,
Toulouse, Bordeaux, Strasbourg, Montpellier, Pointe-à-Pitre,
Fort-de-France, Saint-Denis de la Réunion et Cayenne) passent
en sociétés anonymes entièrement publiques, entre l’État
(60 %), les chambres de commerce et d’industrie
(au moins 25 %) et les collectivités locales (au plus 15 %).
• Les 150 autres aéroports sont transférés aux collectivités
locales ou à leurs groupements, sur candidatures
de celles-ci. Selon la DGAC, 19 régions, 29 départements,
61 communautés et 41 communes ont ainsi hérité d’un
ou plusieurs aéroports ou aérodromes transférés.
Interview
Malgré ce coup de pouce au trafic, l’équation financière n’est toujours pas résolue sans le versement, par
la collectivité propriétaire de l’équipement, d’une
subvention au gestionnaire. Les collectivités ont donc
cherché d’autres remèdes pour équilibrer les comptes
des aéroports.
À l’image des autoroutes, des tunnels ou des ponts, la
concession est vue comme un moyen de transférer une
partie des risques financiers au secteur privé. Solution
attrayante sur le papier, mais qui n’empêche pas la
subvention d’exploitation dans la plupart des cas.
Depuis 2004, les grands groupes du BTP et des transports comme Keolis, SNC Lavalin, Veolia ou encore
Vinci, candidatent à la reprise de la gestion d’aéroports régionaux (voir tableau ci-dessous). À Chambéry,
Grenoble et Lille, le trafic a fait un bond considérable,
mais ces cas sont rares et les nouveaux gestionnaires
n’ont pas de remède miracle pour générer du trafic.
La privatisation de la gestion aéroportuaire ne signifie donc pas forcément la fin des subventions. Elle
peut avoir toutefois le mérite, dans le cadre de l’appel d’offres, de limiter les montants demandés pour
les aides publiques.
© easyjet.com
Le secteur privé ne fait pas de miracles
Pour faire redescendre sur terre les compagnies low cost, qui abusent notamment du dumping social, la députée Odile Saugues
préconise d’encadrer les aides des collectivités en leur faveur, dans un rapport fait au nom de la commission des affaires européennes
de l’Assemblée nationale, déposé le 23 mars, intitulé Les aides aux aéroports régionaux et les taxes de sûreté des aéroports.
Low cost : du trafic à quel prix ?
l’aéroport de Poitiers-Biard, réunissant la communauté
d’agglomération de Poitiers, le conseil général de la
Vienne et la CCI départementale. En début d’année,
le syndicat a fait savoir qu’il ne pouvait mettre sur
la table « que » 1,1 million d’euros. Occasion, pour
Ryanair, de justifier une baisse de la qualité de service.
Effets indirects non démontrés
Si encore il était prouvé que les aéroports régionaux
induisent des effets d’entraînement sur l’activité économique locale… Or le trafic génère, certes, des emplois
directs liés à l’activité de l’aéroport, mais les effets
indirects, sur le tourisme notamment, sont loin d’être
automatiques comme l’a démontré, dès 1993, le politologue et urbaniste Jean-Marc Offner. Ils dépendent de
facteurs exogènes comme la coordination des actions
locales ou encore le comportement de consommation
des passagers.
La raréfaction des ressources financières, combinée aux
chantages exercés par les compagnies, pourraient inciter les collectivités à jeter l’éponge, d’autant plus que
les aéroports constituent de grandes réserves foncières
aux portes des agglomérations, offrant d’autres valorisations possibles (logistique, logement...). Autrefois
hors-sol, ces équipements peuvent désormais s’intégrer
dans le projet politique des collectivités locales et justifier leur subventionnement, au-delà de la seule activité
de transport de passagers.
L’approche territoriale des aéroports régionaux
demeure à construire.
(1) Cour des comptes, Les aéroports français face aux mutations
du transport aérien, La Documentation française, 2008
(2) Liste des OSP sur le site de la DGAC : www.aviation-civile.gouv
(3) Lignes directrices de la Commission européenne du 9 décembre
2005
(4) Offner Jean-Marc, Les effets structurants du transport : mythe
politique, mystification scientifique, L’espace géographique,
n° 3-1993, pp.233-242
Montant des subventions accordées par aéroport
Subventions par passager
Montant total des
subventions
Période
Beauvais
9 €
28,6 M €
2001 - 2006
Bergerac
9 €
2,3 M €
2003 - 2006
Biarritz
9 €
3,7 M €
2000 - 2006
Brest
23 €
1,09 M €
2003 - 2006
Carcassonne
9 €
6,5 M €
2001 - 2006
Dinard
12 €
4,4 M €
2001 - 2006
La Rochelle
12 €
2,2 M €
2006
Limoges
11 €
2,9 M €
2003 - 2006
Marseille
10 €
2,7 M €
2006 - 2007
Montpellier
9 €
4,5M €
2002 - 2006
Nantes
10 €
0,5 M €
2006
Aéroport
Nîmes
9 €
4 M €
2000 - 2006
Pau
14 €
2 M €
2003 - 2006
Poitiers
18 €
2,1 M €
2003 - 2006
Rodez
32 €
3,2 M €
2004 - 2006
Toulon
13 €
0,5 M €
2006
Tours
22 €
2,1 M €
2003 - 2006
Intercommunalités • AdCF • N° 144 - Avril 2010
Sources : Air France et Cours régionales des comptes, citées par Le Figaro du 11 mars 2010
Le second levier généralement actionné pour générer
du trafic est de favoriser l’implantation d’une compagnie à bas coûts, dite low cost. Apparues aux ÉtatsUnis à la suite de la libéralisation des années 1970, les
compagnies low cost s’implantent en France depuis
une quinzaine d’années. En Europe, Ryanair (leader
sur le marché avec Easyjet) a une nette préférence pour
l’utilisation des aéroports régionaux suivant un modèle
économique qui a fait ses preuves. Dès l’ouverture
d’une ligne sur un aéroport, la compagnie demande
des aides au démarrage de l’exploitation, sous forme
de réductions de redevances aéroportuaires, de subventions d’exploitation ou encore de participation aux
frais de publicité des lignes.
Suite à un litige de la compagnie avec l’aéroport belge
de Charleroi, en 2004, ces aides sont aujourd’hui
davantage encadrées, par des lignes directrices rédigées
par la Commission européenne3. Malgré cela, Ryanair
est plusieurs fois entrée en conflit avec des collectivités
qui qualifient de « chantage financier » les menaces de
fermeture de lignes de la compagnie irlandaise si les
subventions n’étaient pas payées intégralement. Ainsi
en janvier dernier, la communauté d’agglomération
de Pau a révélé que Ryanair lui avait demandé un
financement de 1,4 million d’euros sur deux ans pour
maintenir deux lignes existantes et assurer l’ouverture
d’une troisième. Même expérience à Poitiers où la compagnie a exigé 1,7 million d’euros au syndicat mixte de
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