Quand le corps entre en jeu.

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Quand le corps entre en jeu.
Quand le corps entre en jeu.
Exposé du samedi 29 octobre de
Marylène GEORGES
Educatrice et rééducatrice
en psychomotricité.
Institutrice maternelle.
Définition de la psychomotricité.
La psychomotricité est l’unité étroite qui existe entre le corps et le psychisme. Elle est donc
propre à chacun. Chacun vit son corps à sa façon.
A chaque instant, nous vivons, nous nous exprimons avec notre corps dans un espace et à un
moment bien précis dans le temps. Nous sommes des êtres de relation et c’est grâce à nos
fonctions psychomotrices que nous pouvons évaluer les distances, coordonner nos mouvements,
équilibrer et exprimer notre corps dans l’espace.
La psychomotricité est-ce lien entre tous ces mouvements, sensations, réflexions, c’est « le
langage du corps ».
Si je coupe le mot entre « psycho » et « motricité », on a alors
la motricité qui représente la partie corporelle, visible, le mouvement, l’organisation du geste.
Et le psycho qui représente notre intériorisation, notre ressenti.
Le lien entre les deux est constitué de notre schéma corporel, de notre organisation dans
l’espace et dans le temps.
La rééducation psychomotrice permet à l’individu de se réapproprier son corps dans la relation
à lui-même et à son environnement. Elle prend la personne dans sa globalité, et se dégage du
symptôme apparent pour aller au symptôme plus profond.
La psychomotricité prend en compte l’individu dans son organisation psychomotrice au travers
de 4 dimensions :
- Première dimension :
l’activité neuro-motrice (concerne nos capacités à percevoir nos sensations et la manière à
mettre en œuvre notre motricité : tonus, équilibre, coordination et dissociation)
- Deuxième dimension :
l’activité tonico-émotionnelle et affective (nos émotions influent sur notre tonus qui lui-même
influence notre posture et
la qualité de notre gestuelle. Cela participe à la structuration du
schéma corporel, de l’espace et du temps ainsi que l’intégration de la latéralité).
- Troisième dimension :
dimension cognitive (la façon dont les perceptions s’organisent afin de comprendre les rapports
à l’espace et au temps, à se les représenter et à symboliser les expériences corporelles).
- Quatrième dimension :
la dimension de l’identité s’instaurant et se construisant dans l’interaction du sujet avec son
environnement (familial et social).
La rééducation psychomotrice.
Le psychomotricien réalise des actes de soins par l’intermédiaire du corps et de ses
mouvements. Pour cela, j’établis un bilan psychomoteur ( au niveau du tonus, de la motricité
globale et de la motricité fine) avec un projet de soin qui permet de débuter une prise en charge
dont le but est de permettre à la personne de mieux se sentir et ainsi, par un investissement de sa
corporalité, de se situer dans l’espace et dans le temps, dans le monde des objets et dans la
relation avec autrui.
Le bilan permet d’identifier les difficultés et de repérer les compétences sur lesquelles je
pourrais m’appuyer pour compenser les problèmes.
Mon travail se base toujours sur le jeu. Je m’appuie sur les goûts, les centres d’intérêts et les
compétences propres à chaque enfant. Cela permet de ne pas réactiver l’inquiétude et la peur de
l’échec.
Le bilan permet :
- d’apprécier la façon dont la personne investit son corps dans l’action (déroulement harmonie
du geste)
- d’apprécier la façon dont le corps est engagé dans la relation à l’autre (mimiques, postures
attitudes).
Maintenant je vais vous faire le lien entre le travail de la psychomotricité et l’attention :
Dans le bilan psychomoteur, j’observe les manifestations cliniques observées au cours de
l’examen et les résultats obtenus à différents tests :
1° l’attention :
Pendant l’examen, les enfants répondent au moindre stimulus parasite et ils interrompent
l’action en cours. L’enfant est très vite distrait et il est incapable de résister aux sollicitations de
l’environnement et donc de mener à bien une tâche donnée.
Au test d’imitation de gestes, des réponses inadéquates ou des positions aberrantes peuvent se
rencontrer.
Les consignes doivent être souvent répétées et il faut fréquemment ramener l’attention de
l’enfant sur le matériel.
2°l’impulsivité :
Pendant l’examen, l’enfant répond sans réfléchir, sans analyser les éléments mis à sa disposition
: tests orientation, imitation de gestes.
Il répond rapidement mais n’exécute qu’une partie de la consigne ou s’arrête pour demander ce
qu’il faut faire. Il a des difficultés à contrôler l’exécution d’un tâche qui doit être accomplie
lentement (exemple : si on demande à un enfant de mettre les bâtons d’allumettes dans la boîte
le plus lentement possible, la consigne de lenteur n’est pas respectée).
Ces enfants impulsifs utilisent souvent le contact pour communiquer, ils privilégient le canal
cutané.
L’impulsivité au niveau moteur est facilement remarquable durant l’examen. L’enfant fait ses
mouvements quelles qu’en soient les conséquences même si elles peuvent être dangereuses pour
lui. Par exemple : un enfant peut sauter dans le cerceau (dedans - dehors ) et immédiatement
recommencer alors que je suis en train d’enlever le cerceau rendant la chute presque inévitable.
Dans mon travail sur l’attention, il y a des exercices plus spécifiques que je réalise en fin de
suivi et qui aident à travailler l’attention mais ce ne sont pas des exercices uniquement sur celleci.
La séance de psychomotricité.
Il est important que les séances se passent dans un lieu uniquement réservé à la psychomotricité
pour permettre à l’enfant de s’investir corporellement.
Ensuite, c’est la relation entre le psychomotricien et l’enfant. Il est important de créer un
contexte affectif et relationnel de bonne qualité. Pour ce faire, il faut une mise en confiance de
l’enfant qui va se mettre en place par l’intermédiaire d’une certaine stabilité du lieu, toujours le
même
du temps (même jour, même heure, même durée)
du psychomotricien et de son champs d’action:
Je ne cours pas quand le matériel est installé.
Je ne crie pas.
Je ne me fais pas mal et je ne fais pas mal à l’autre .
Je n’abîme pas le matériel.
Ceci rentre dans le cadre de la séance de psychomotricité qui est le plus important que se soit en
séance individuelle ou en groupe à l’école. Attention, à l‘école les enfants ont un cours de
psychomotricité et non un cours de gym (toujours le même local, la même heure,…. ). Très
souvent, j’ ai à l’école, des enfants qui semblent perdus en début de séance car quelque chose à
changé: le local, le moment, le groupe…
Nous reparlerons d’ailleurs de l’importance de ce cadre dans l’exposé sur la relaxation et la
créativité.
Cela est concrétisé par un feu rouge dans la salle qui change éventuellement si les consignes ne
sont pas respectées.
Une fois le cadre établi et compris par l’enfant, je propose à ce dernier d’évoluer dans la salle
comme il en a envie.
J’observe les jeux investis au cours des premières séances et l’implication de l’enfant pour
débuter la relation avec lui.
Parfois, je suis directement impliquée dans le jeu, d’autres fois, après plusieurs séances ou je
reste même très souvent ou toujours non impliquée corporellement dans le jeu (à l’écart juste
comme observatrice).
De cette façon, j’essaie de canaliser l’activité en laissant l’enfant jouer librement selon ses
goûts, ses attitudes et petit à petit, je l’amène à observer certaines consignes corporelles ou à
respecter des limites spatio-temporelles.
Je travaille par le jeu car c’est pour nous (psychomotricien) un moyen permettant à l’enfant :
- de faire ou de refaire des expériences qui peuvent le rassurer
-d’expérimenter son corps dans tous ses segments, dans l’espace et dans le temps)
Voici :
quelques exemples d’activités mise en place une fois que l’enfant est bien en confiance et
sécurisé (souvent après plusieurs séances) :
- si on se dirige vers des jeux de balles, j’instaure une limite : lancer avec une main
dans le cerceau
au-dessus du filet
-jeu du loup : on décide des règles au début du jeu et elles ne changent pas durant du jeu
-badmitton : on respecte les limites du terrain
-jouer avec le ballon de baudruche et le suivre avec les yeux le plus longtemps possible, le
frapper avec le nez, coude, genou ou faire un match de volley-ball
L’importance du temps.
Au niveau du temps, les enfants qui ont des difficultés au niveau de l’attention, ont tendance à
mettre en place des comportements non temporels qui vont leur permettre de fuir l’attention
voulue.
Leur estimation du temps, reproduction du temps, le temps de réaction sont souvent déficitaires
(production trop rapide, moment de la journée, connaissance des jours,….).
En plus des activités de fin de séance qui peuvent aider à gérer le temps, j’ai installé une mise
en relief de la visualisation temporelle :
3 gommettes sont disposées sur une horloge qui est à la vue des enfants
Verte = début de la séance
Orange = activité de fin de séance (retour au calme)
Rouge = sortie (retour près de papa, maman ou la personne qui vient me rechercher
aujourd’hui).
De cette façon, l’enfant prend conscience du temps qui passe et peut anticiper ce que je vais lui
proposer.
Dans les séances en groupe, je préviens de vive voix la fin de la séance puis j’utilise une cloche
pour prévenir du moment de retour au calme.
En fin de séance, je propose toujours 5 minutes plus calmes où l’enfant peut choisir de dessiner
sur le tableau, sur une feuille ou de faire un massage, voir de la plasticine, de cette manière,
l’enfant exprime ce qu’il vient de vivre en séance.
A l’école, à chaque fin de séance, un moment est consacré à la parole. Chacun peut prendre la
parole pour exprimer son ressenti sur ce qu’il vient de vivre. Mais attention, ce moment se fait
dans le respect de cetaines règles :
Je parle si j’ai le micro
Si je n’ai pas le micro, ma bouche est fermé et ce sont mes oreilles qui sont ouvertes.
Si je n’ai pas envie de parler, je ne suis pas obligé de le faire.
Les exercices de relaxation (qui sont difficile à utiliser dans un premier temps) permettent de
diminuer la tension musculaire, d’agir sur l’anxiété et de fournir un moyen de contrôle de
l’impulsivité, de mise au calme permettant de se calmer en se centrant successivement sur son
corps (différentes parties) ou en (re)découvrant son environnement visuel, sonore et olfactif.
Ces activités permettent à l’enfant d’utiliser ses sens de façon consciente et cela l’aidera dans
toutes les activités d’observation et d’écoute.
En passant un instrument sur le corps de l’enfant, je lui dis où je me situe, de cette façon, il peut
mieux vivre son schéma corporel.
Le travail sur soi et le contrôle des émotions sont des activités qui vont permettre à l’enfant de
mieux focaliser son attention.
Et même à l’école, la relaxation peut avoir sa place comme il est important de permettre à
l’enfant de travailler avec un maintien correct (découvrir comment la position du corps influe
sur les comportements).
Quelques petits exercices de yoga ou de relâchement peuvent aussi être proposés à différents
moments de la journée pour apprendre à assouplir son corps et à relâcher ses muscles.
A tout moment, que ce soit à l’école ou à la maison, ou ailleurs,… il est important d’apprendre
à l’enfant à exprimer et identifier ses différentes émotions afin qu’il puisse être capable de
mieux les maîtriser.
Il faut aussi lui permettre d’être à l’écoute de soi-même.
Enfin, en classe, je pense qu’il est intéressant d’organiser au mieux les différents moments de la
journée. Il est important que les moments de pause ne servent pas à faire exploser la «
cocotte-minute » qu’est parfois l’enfant très ou trop fatigué après un effort important. La
récréation doit être me semble-t-il , un moment de décompression.
Il faut donc la proposer à des enfants dont on a ramené le niveau d’éveil à un niveau
raisonnable.
Pour cela j’utilise souvent une boîte à musique ou un morceau de musique classique, un jeu
calme qui me semble efficace pour provoquer chez les enfants un état raisonnable d’éveil avant
de partir en récréation.
A présent, je vais vous donner une liste non exhaustive, d’exercices spécifiques que je réalise en
fin de séance et en fin de suivi en psychomotricité, voir même en classe et qui aident à travailler
l’attention :
- le jeu du sculpteur qui demande un balayage visuel de gauche à droite et de haut en bas
-refaire un dessin ou une construction à l’aide des cubes ou un parcours d’obstacles dans une
salle
-labyrinthe (sur feuille ou en kaplas, cordes ou avec du matériel plus spécifiques de
psychomotricité)
Dans ce genre d’exercices, les enfants organisent la direction de leurs déplacements au sein du
labyrinthe et de cette manière ils associent la réussite de l’exercice à un effort d’organisation et
d’attention
Cela peut donc les motiver à généraliser ce type de stratégie à d’autres situations.
-recherche des différences entre 2 arrangements d’objets dans la salle avec déplacements de
l’enfant ou entre 2 séries d’objets sur un tapis ou une table. Ensuite, on en arrive à la recherche
de détails différents sur deux images apparemment semblables.
Enfin on peut en arriver à compléter des dessins en fonction d’un modèle ou d’une consigne
orale.
-jeu de kim qui fait appel à la mémoire
L’enfant observe des objets puis se détourne et doit retrouver les modifications apportées
(changement de position,…..)
Pour le Memory, les faces visibles puis faces cachées, il faut essayer de reproduire les paires.
-puzzles de plus en plus complexes quand on avance dans les âges.
Pour les plus jeunes, on fait le puzzle inversé (je fais le puzzle et l’enfant replace quelques
pièces manquantes).
-entraînement haptique (sensations tactiles)
Reconnaître les objets par le toucher comme par exemple :
Le sac aveugle.
Loto tactile.
Classer des objets les yeux bandés.
Ou
Les exercices d’équilibre qui utilisent par exemple les planches d’équilibre (rouleau, plateau)
permettent une centration sur les informations haptiques (le toucher).
Références de livres :
- La psychomotricité au service de l’enfant.
De Boeck
Bruno De Lièvre et Lucie Staes
-Psychomotricité, éducation et rééducation.
De Boeck
A.De Meur et L.Staes
-La relaxation active à l’école et à la maison.
Retz
Samy Boski
-Le yoga des petits pour bien dormir.
Gallimard Jeunesse
Rebecca Whitford et Martina Selway
-Stretching et yoga pour les enfants.
Amphora
Jacques Choque
-Jeux de relaxation.
De Boeck
Nicole Malenfant
-Psychomotricité à l’école maternelle.
De Boeck
Frédérique Wauters-Krings