Pédagogie Tortue - présentation Phoenix

Transcription

Pédagogie Tortue - présentation Phoenix
Une expérience pédagogique
réalisée avec la tortue Caouanne
Véronique TOLLARD, responsable de l’association *
Alain RIVA, consultant scientifique **
* Destination Planète Mer - 61, chemin de Beaucours - 83110 Sanary sur Mer
** Institut Océanographique Paul Ricard – Ile des Embiez – 83140 Six-Fours-Les-Plages
Objectif de l’association « Destination Planète Mer »
OBSERVER, APPRENDRE, DECOUVRIR, ET AGIR
POUR L’AVENIR DE NOTRE PLANETE MER
L’objectif de l’association destination planète mer est d’amener les enfants et adolescents à découvrir
et mieux connaître notre littoral et notre mer : la Méditerranée. Cette approche est réalisée par le biais
de mini-croisières écologiques et pédagogiques à bord d’un voilier de formation. Destination Planète
Mer c’est aussi une grande aventure humaine qui autour de l’éducation à l’environnement permet tout
au long de l’année de donner naissances à de nombreux projets pédagogiques tournés vers la
sensibilisation et la protection de notre planète dans l’esprit d’un développement durable. Divers
projets éducatif, écologique, sportif, artistique sont montés avec nos jeunes pour agir ensemble,
comprendre notre environnement afin de mieux le respecter. Les mini-croisières sont destinées à la
jeunesse désireuse de partager une aventure hors du commun en se transformant en marin porteparole.
Le contexte de l’étude pédagogique sur les tortues marines
Les activités humaines, comme la pêche ou le
tourisme, interfèrent sur le cycle de vie des populations
de tortues marines, en particulier la tortue caouanne
(Caretta caretta) et la tortue verte (Chelonia mydas). Ces
deux tortues sont les plus communes et les seules à se
reproduire en Méditerranée. Leur survie va dépendre
dans une large mesure, de l'effort de préservation que les
pays méditerranéens adopteront dans l’avenir. L’une des
priorités sera d’orienter les efforts vers les stades adultes
et juvéniles, dès lors que les conditions naturelles de
nidification sur les plages de ponte sont préservées. Dans un contexte de
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préservation de la biodiversité, en marge des actions scientifiques, il est
important d’informer et de sensibiliser la jeunesse aux problèmes des espèces
menacées.
Première rencontre avec une tortue Caouanne
Trouvée en surface dans les eaux du Parc
National de Port-Cros au mois de mai 2006,
« Joséphine », une tortue Caouanne très affaiblie, est
transportée au centre de soin du CESTMed (Grau du
Roi). Après plusieurs semaines de traitement et de
repos, elle est remise à l’eau en présence des jeunes
marins porte-parole de l’association Destination Planète Mer. Un moment
particulièrement émouvant pour chacun d’entre eux. Malheureusement un filet
de pêche du côté de Castelvolturno, près de Naples, arrêta le périple de cette
tortue qui fût identifiée grâce à sa bague.
Cette triste nouvelle, nous amena à envisager une
étude approfondie avec les jeunes de l’association
pour identifier les dangers qui menacent les tortues
et quelles sont les solutions envisageables qui
peuvent contribuer à leur préservation. Les marins
porte-parole
de
l’association
ont
réalisé
une
importante
recherche
documentaire sur le mode de vie des tortues marines, de leur naissance jusqu’à
l’âge adulte.
Pour ce rendre compte des difficultés liées au cycle de vie de ces reptiles,
il nous est venu l’idée d’un voyage d’étude dans le parc national de Zakynthos
en Grèce, site reconnu comme le plus important pour la nidification de la tortue
Caouanne.
Les marins porte-parole seront amenés à faire de l’observation directe et
à suivre plusieurs exposés réalisés par des spécialistes du Parc ainsi que par
trois scientifiques qui accompagnent le groupe. Ce voyage devient un véritable
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projet pédagogique permettant une réflexion sur le devenir des tortues en
méditerranée.
Données biologiques sur la Tortue Caouanne
La tortue Caouanne se rencontre dans presque toutes les mers du
monde, mais il existe une population inféodée à la Méditerranée orientale. Elle
fait partie des plus grosses tortues et peut atteindre à l’âge adulte la taille de
115 cm pour un poids de 160 kg.
Cycle de vie de la tortue Caouanne
Les
tortues
sont
identifiables
grâce au nombre d’écailles et à
leur disposition sur la carapace.
Sauf pour
la tortue Luth qui
comporte une carapace de cuir.
La Caouanne est une espèce
carnivore tout au long de son
cycle biologique. La nature des
proies va changer au cours de sa
vie. Les jeunes individus ont une alimentation pélagique : méduses,
mollusques, crustacés et autres invertébrés du macroplancton ainsi que divers
organismes fixés sur les bois flottants.
Les plus grands individus (immatures et adultes) ont une alimentation
benthique : escargots de mer, coquillages, crabes, oursins, poissons morts
voire des proies inattendues comme l’hippocampe que l’on retrouve
occasionnellement dans le contenu stomacal de ces animaux.
Sa maturité sexuelle s’effectue vers sa vingtième année pour une taille de
l’ordre de 70 à 80 cm. Lors de sa reproduction, elle affectionne plus
particulièrement les plages sableuses des pays comme la Grèce, la Turquie, la
Lybie, … Enfin là, où les conditions thermiques sont favorables à l’incubation
des œufs qui dure 60 jours.
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Les tortues Caouanne ne se reproduisent pas chaque année, mais en
moyenne tous les 2 à 3 ans. La saison de nidification s’étend sur trois mois, de
mai à août. Les femelles nidifiantes vont pondre de nuit dans le sable sec en
haut de plage. La taille moyenne des pontes varie entre 70 et 110 œufs dont
une bonne partie ne donnera pas de nouveau-nés. La prédation par les chiens
errants, chacals et autres prédateurs peut parfois atteindre plus de 50%. La
température d’incubation doit se maintenir au dessus de 22° C. Le
déterminisme du sexe sera fonction de la position des œufs dans le nid, c’est
une question de température.
Le parc national marin de Zakynthos
Le directeur du parc Laurent Sourbes nous a accordé un peu de son
temps pour parler du parc national, dont la création remonte à l’an 2000. Il est
destiné à la protection des espèces animales et végétales de l’île, mais aussi à
la préservation des sites de pontes des tortues.
Zakynthos est l’île principale qui accueille le plus de tortues en
Méditerranée. Mais, l’activité touristique est déjà bien implantée avec 500 000
visiteurs par an. Il y a donc nécessité de trouver des solutions pour contenter
tout le monde, c’est l’objectif même du développement durable.
Pour cela, il a été mis en place différentes zones de protection au niveau
du parc :
En mer : 4 zones dont une est
interdite à la navigation.
Sur terre : 7 zones dont une ou
l’accès est strictement interdit.
Réglementation sur les plages :
- Obligation de circuler dans la bande des 5 mètres au bord de l’eau.
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- Interdiction de planter des parasols dans le sable.
- Interdiction de circuler à tous véhicules sur les plages.
De nuit, interdiction de créer des zones lumineuses qui risquent de perturber la
sortie des jeunes tortues.
Ne pas créer d’obstacles sur la plage.
Quels sont les problèmes visibles et leurs remèdes ?
Envahissement des sites de ponte, pêches accidentelles, pollution par les
macro-déchets, développement des activités nautiques….jet skis, hors bord…
Les solutions envisageables sont :
Sensibilisation du public, réglementation de la pêche, réglementation des accès
aux plages et du comportement des baigneurs, créer des centres de soins et
aménager des zones de protection strictes.
Quelques questions posées aux spécialistes par les marins porte-parole
……. Et le résumé des réponses.
- Quel est l’origine des tortues et quelle a été son évolution au cours du
temps ?
L’origine des tortues marines remonte à 300 millions d’années avec
l’apparition des premiers reptiles terrestres qui ressemblaient à de gros
lézards ; l’évolution de ce groupe reptilien a donné naissance aux tortues
terrestres, aux iguanes, ainsi qu’aux serpents de mer et aux crocodiles.
Petit à petit
la tortue terrestre s’est adaptée progressivement à l’eau
douce et salée. L’ancêtre de la tortue marine actuelle est apparu au
temps des dinosaures, c’est à dire vers 200 millions d’années. Il était déjà
complètement adapté à la vie marine. Aujourd’hui, il n’existe plus que
deux familles de tortues sur les quatre d’origine :
- Chelonidae, comprenant la tortue Caouane, la tortue verte, …
- Dermochelidae représentée par la tortue luth.
- Rôle des tortues dans l’écosystème marin?
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La tortue en fin de chaîne alimentaire est un indicateur sur le bon
fonctionnement de l’écosystème.
- A-t-on une idée du taux de mortalité ou de survie à chaque étape du
cycle de croissance de la tortue ?
En théorie, dans le nid, et à la naissance, il y a beaucoup de pertes car
les œufs et les jeunes tortues sont dévorés ou écrasés (sur la plage, dans le
nid) et il existe toujours des prédateurs naturels comme les oiseaux, les chiens,
les souris et l’homme dans certaines régions ……). En pratique, aujourd’hui la
plus grande cause de mortalité se situe en mer (pêche accidentelle, prédateurs
marins, pollution et collisions).
- La cohabitation entre l’homme et la tortue, est elle possible ?
Oui, mais c’est un long travail ou il faut trouver des moyens pour
contenter tout le monde et maintenir ainsi l’équilibre homme/animal
dans
l’écosystème.
- Est il donc nécessaire de protéger la tortue, et pourquoi ?
Oui c’est nécessaire, toutes les espèces de tortues marines sont en voie
d’extinction et c’est notre devoir de participer à la conservation de l’espèce.
Premières observations
Le
fait
d’être
sur
l’île
de
Zakynthos, nous a amené à parler
également de la sauvegarde des
phoques
moines.
Effectivement,
depuis le phare de Keri, nous pouvions
apercevoir
les
grandes
falaises
calcaires de la côte ouest de l’ile au
pied
desquelles
se
trouvent
une
multitude de grottes qui servent d’habitat aux phoques moines, espèce
également en danger.
La visite sur la plage de Laganas, plage réputée pour la nidification des
tortues, a été révélateur des difficultés rencontrées par le parc pour protéger les
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aires de pontes. Malgré l’interdiction de circuler aux abords et sur la plage, cela
n’empêche pas tous types de véhicules de s’aventurer sur le sable, une zone
de transit entre le nid et la mer. De plus une
bonne partie de la plage est envahie par les
parasols, les chaises longues et autres. Ce
qui n’est pas un endroit convenable pour les
femelles qui viennent pondre sur le haut de la
plage. De nuit, le village se transforme en petit
« Las Vegas» fortement nuisible à cause du
bruit et des lumières.
Les touristes qui utilisent la plage doivent rester dans la zone des 5
mètres, en partant du bord de mer pour éviter de marcher sur le haut de plage,
zone de nidification. Malheureusement, malgré une certaine surveillance
bienfaitrice, les règles ne sont pas toujours respectées.
Du bord de plage, il était possible d’observer l’apparition des têtes de
tortue qui viennent respirer en surface, essentiellement les femelles fécondées
qui attendent le bon moment pour venir nidifier sur la plage au cours de la nuit.
Malgré l’assistance des gardes du parc, l’attente
nocturne pour observer les pontes s’est soldée par
un échec. La montée des femelles sur la plage se
réalise
lorsque
la
température
de
l’air
est
suffisamment chaude, ce qui n’était pas le cas au
moment de notre présence.
Aussi, pour marquer l’esprit de rencontre avec les tortues, les jeunes
marins ont pu se mettre à l’eau avec palmes, masque et tuba pour observer
avec précaution les femelles Caouanne qui nagent dans les premiers mètres
sous la surface à proximité des plages sableuses.
A partir d’embarcation, le repérage depuis la surface était délicat et il fallait être
très prudent pour ne pas perturber les tortues dans leur environnement naturel.
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Seulement quatre femelles, toutes baguées, ont été observées. Certaines
présentaient des marques dues aux ébats lors de la fécondation. En effet, les
mâles agissent très violemment,
provoquant des morsures et des
griffures.
L’une des femelles de belle
taille, n’a pas été gênée lors de
notre approche et même s’est
laissée photographier et filmer
sans manifester la moindre peur
ou agressivité.
Conclusion
Cette expédition sur l’île de Zakynthos a été la découverte d’un nouveau
monde pour l’ensemble des marins porte-parole. L’enseignement sur les tortues
associé à la réalité du terrain, a montré la fragilité de cette espèce et les
perturbations que cela pourraient entraîner au niveau de la chaîne alimentaire.
D’un point de vue plus général, l’avenir des espèces animales et végétales fait
parti de notre propre avenir.
Réalisation pédagogique à destination des scolaires
- Confection de 8 panneaux (100 x 180) qui relate l’aventure et
l’observation in situ. (Historique – Qui es-tu Joséphine ? – Danger et loi - le
voyage – Réponses à nos questions – Comprendre et observer – Sensibiliser et
agir – Rencontre avec les tortues)
- Réalisation d’un film reportage sur le voyage d’étude en Grèce
« L’Odyssée des tortues »
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Remerciements
Les marins porte-parole tiennent à remercier les intervenants scientifiques et
techniques pour leurs exposés et leurs connaissances des tortues et du milieu
marin en général.
- Mme Flegra BENTIVEGNA, directrice de la station zoologique de
Naples, qui est à l’origine du seul
centre de soin des tortues marines
en Italie, et qui devient, aujourd’hui,
le principal centre de soin de la
méditerranée occidentale dans ses
nouveaux locaux « Il turtle point ».
- Mr Jean-Baptiste SENEGAS, principal animateur du centre de soin du
CESTmed, association en liaison avec le Seaquarium du Grau du Roi.
- Mr
Laurent SOURBES, directeur du parc de Zakynthos, pour sa
présentation des activités du parc et son aide précieuse pour accéder
aux sites de pontes.
- L’une des scientifiques du parc a accepté de nous présenter sa thèse
sur le comportement des tortues marines, la traduction étant assurée
par la marraine de l’association Patricia RICARD.
- Mr Jean-Marie DASTE, président d’une association de sauvegarde des
phoques moines, «Les Mariolos Moines Monachus», qui nous a
accompagnés pendant quelques jours pour nous parler du statut du
phone moine en Grèce.
Sans oublier, les cinéastes Philippe, Manu et les photographes Jean-François,
Jean-Baptiste, Eric, Alain et Véro. Car sans eux, cette expérience serait sans
mémoire visuelle nécessaire pour faire passer le message auprès des jeunes.
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