Exemple de la région Rhône-Alpes - Certu

Transcription

Exemple de la région Rhône-Alpes - Certu
A L’ARTICULATION ENTRE
LE RESEAU FERRE ET LE TERRITOIRE
:
LES SERVICES EN GARE
Exemple de la région Rhône-Alpes
Claire CHUSSEAU
Aménagement et Politiques Urbaines
Promotion 59
26 juin 2014
Président du jury :
Fabrice BARDET
Maître de TFE :
Marion CAUHOPE
Expert :
Roelof VERHAGE
NOTICE ANALYTIQUE
AUTEUR
TITRE DU TFE
NOM
PRENOM
CHUSSEAU
Claire
A l’articulation entre le réseau ferré et le territoire :
les services en gares
Exemple de la région Rhône-Alpes
ORGANISME D'AFFILIATION
ET LOCALISATION
MAITRE DE TFE
COLLATION
MOTS CLES
TERMES
GEOGRAPHIQUES
CAUHOPE
Nbre de pages du rapport :
100
CEREMA
DIRECTION TECHNIQUE
TERRITOIRES ET VILLE
2, RUE ANTOINE CHARIAL
69426 LYON CEDEX 03
Marion
Nbre d'annexes :
2 (2 pages)
Nbre de réf. Biblio.
37
Service ; commerces ; gares périurbaines ; articulation urbanisme-transport ;
quartiers de gare
Région Rhône-Alpes ; Vinay (38) ; Saint-Chamond (42)
RESUME
A l’heure du développement durable, l’articulation entre urbanisme et
transports est au cœur des nouvelles politiques d’aménagement et de
déplacements. Le train, et le TER en particulier, apparait alors comme une
offre adaptée aux déplacements des espaces périurbains vers les villescentres. Dans ce contexte, les gares périurbaines sont les nouveaux points
centraux du développement urbain et les services des vecteurs potentiels de
leur développement, à l’image de ce qui s’est fait dans les très grandes gares
On constate aujourd’hui que les acteurs du ferroviaire et de
l’aménagement s’emparent de cette questions et mettent en places des
études et des expérimentations. Il s’agit donc de comprendre quels sont les
discours et les logiques des différents acteurs qui promeuvent les services en
gares et quelles sont les conditions de mise en œuvre des projets, grâce à
l’étude de deux exemples rhônalpins.
ABSTRACT
At the time of sustainable development, the articulation between urban
planning and transportation is at the heart of the new urban planning and
transport policies. The train, and the TER, appears as an appropriate offer
for the movement from suburban areas to city centers. In this context,
suburban railway stations are the new focal points of urban development.
And services are potential vectors of this development, as in very large
railway stations.
Today, we see that the actors of the rail and planning take possession of
this question and implement studies and experiments. It is therefore
essential to understand discourses and logics of the different actors who
promote services in railway stations, and what are the conditions for
projects implementations, through the study of two examples in RhôneAlpes.
Remerciements
Je tiens tout d’abord à remercier très chaleureusement Marion Cauhopé, chargée d’études à la
Direction Technique Territoires et Villes du CEREMA, de m’avoir proposé ce sujet d’études sur les
gares périurbaines et de m’avoir encadrée avec patience et disponibilité durant ce stage. Ses conseils
avisés et ses nombreux retours, toujours constructifs, m’ont été d’une aide précieuse et m’ont
permis d’effectuer ce travail dans d’excellentes conditions.
Je tiens également à remercier M. Gérard Desportes et M. Marc Morain, respectivement directeur
du département « Urbanisme et Habitat » de la Direction Technique Territoires et Villes du CEREMA
et responsable du groupe « Planification Stratégies Urbaines et Foncières » de ce même
département, de m’avoir accueillie en stage durant 3 mois dans leur équipe.
Merci également à toute l’équipe du département « Urbanisme et Habitat » pour son accueil
chaleureux et ses réflexions partagées sur mon sujet de recherche.
Je souhaite aussi remercier M. Roelof Verhage, directeur de l’Institut d’Urbanisme de Lyon,
d’avoir accepté d’être l’expert de ma soutenance et pour son intérêt tout particulier à l’égard de mon
travail, malgré ses nombreuses charges.
Mes remerciements vont également à M. François Duchêne, responsable de la voie
d’approfondissement « Aménagements et Politiques Urbaines » de l’ENTPE qui nous a offert une
préparation exceptionnelle à ce travail pendant toute l’année scolaire et qui a été présent, jusqu’aux
derniers instants, pour nous orienter au mieux et répondre à nos interrogations.
Je remercie aussi l’ensemble des acteurs rencontrés pendant mon enquête qui ont fait preuve
d’une grande disponibilité et qui ont accepté d’échanger avec moi sur leur travail ou leur quotidien.
Merci, enfin, à mes proches d’avoir accepté de relire avec attention ce travail.
Sommaire
.
Introduction ........................................................................................................................................................- 6 
Contexte ..................................................................................................................................................- 6 -

Définition de l’objet d’étude.................................................................................................................- 7 -

Questionnement .....................................................................................................................................- 8 -

Choix du terrain : la région Rhône-Alpes...........................................................................................- 9 -

Méthodologie : une enquête de terrain à trois niveaux ................................................................. - 11 -

Annonce du plan ................................................................................................................................. - 13 -
Chapitre I - Les commerces et services en gares : vecteurs possibles du développement des
gares TER ? ........................................................................................................................... - 14 Les gares périurbaines, au croisement des enjeux de déplacements et d’urbanisme ................ - 16 -
1.

Modes de vie périurbains et mobilités ............................................................................................. - 16 -

Les transports collectifs : enjeu pour la mobilité quotidienne ..................................................... - 17 -

Les transports collectifs : enjeu pour l’urbanisme durable ........................................................... - 18 -

Les gares périurbaines : des espaces au fort potentiel ................................................................... - 20 -
2.
Les « grandes gares » : centres commerciaux et centralités urbaines ............................................... - 22 
Naissance des commerces en gare .................................................................................................. - 22 -

La transformation des « grandes gares » en centres commerciaux .............................................. - 23 -

Espaces de vente ou lieux de vie ?.................................................................................................... - 24 -

Après les commerces, les services entrent en gare......................................................................... - 26 Un déploiement des services envisagé sur des gares de plus petites taille ................................. - 28 -
3.

SNCF, une volonté de valoriser ses gares ....................................................................................... - 28 -

Des acteurs locaux qui s’emparent de la question ......................................................................... - 30 -
Chapitre II - Les déploiement des services dans les gares rhônalpines : politique régional et
réalité de terrain..................................................................................................................... - 32 1.
Une volonté régionale de développer les services pour valoriser le TER ...................................... - 34 
Deux chantiers avancés : les services à la mobilité et la rénovation des gares .......................... - 34 -

Aller plus loin avec les services aux usagers.................................................................................... - 35 -

Quels services ?.................................................................................................................................... - 37 -
2.
Une réalité du terrain éloignée des discours ........................................................................................ - 40 
Des services et commerces très peu implantés .............................................................................. - 40 -

Une difficile adéquation avec les demandes des usagers du TER ............................................... - 42 -
3.
Une gestion des gares et de leur foncier très complexe..................................................................... - 44 
Une répartition des compétences complexe ................................................................................... - 44 -

Une multitude de propriétaires fonciers et immobiliers ............................................................... - 45 -

Des acteurs toujours plus nombreux … ......................................................................................... - 47 -

… aux objectifs parfois divergents ................................................................................................... - 48 -
4.
Un désengagement de la SNCF............................................................................................................. - 50 
SNCF-Gares & Connexions, « l’abandon » des bâtiments voyageurs ........................................ - 50 -

Les commerces et services, une opportunité financière ? ............................................................ - 51 -
Chapitre III - Pour deux projets aboutis : des ambitions plus larges que le train pour les gares
.................................................................................................................................................... - 54 1.
Vinay : réintégrer le quartier de la gare au centre de la commune ................................................... - 56 
Vinay, un pôle rural............................................................................................................................. - 56 -

La naissance du projet : réappropriation d’un espace en désuétude ........................................... - 58 -

Un projet en 3 temps .......................................................................................................................... - 61 -

Une municipalité motrice mais appuyée par des partenaires ....................................................... - 64 -

Premier retour d’expérience : un modèle difficile à pérenniser ................................................... - 64 -
2. Saint-Chamond: se réapproprier l’espace abandonné de la gare ......................................................... - 69 
Saint-Chamond : 2ème commune de la métropole stéphanoise .................................................... - 69 -

La naissance du projet : mettre fin aux usages indésirables et favoriser l’accessibilité............. - 71 -

La mise en place du projet : des multiples acteurs à coordonner ................................................ - 73 -

Premier retour d’expérience : un équilibre économique précaire ................................................ - 76 -
Chapitre IV - Du discours stratégique aux projets locaux : l’épreuve des territoires ........... - 80 1.
La nécessité des collectivités locales de prendre le relais de la SNCF ............................................. - 82 
La région, moteur d’une reprise en main des gares par les collectivités locales. ....................... - 82 -

Les communes et intercommunalités : des acteurs essentiels ...................................................... - 83 -

Une substitution pertinente ? ............................................................................................................ - 84 -
2.
Lutter contre la déqualification des gares et de leur quartier ............................................................ - 86 
La réappropriation de l’espace de la gare par les usagers.............................................................. - 86 -

Les commerces et services : assurer une présence humaine ........................................................ - 87 -

Une gare attractive, vecteur de report modal ?............................................................................... - 87 -
3.
Le service aux voyageurs une utopie ? ................................................................................................. - 88 
Les voyageurs périurbains, de faibles consommateurs ................................................................. - 88 -

La nécessité de s’intégrer à un tissu commercial global ................................................................ - 88 -

Quelle pérennité économique pour ce modèle ?............................................................................ - 89 -
4.
La difficile définition d’une politique unique pour des gares périurbaines diverses ..................... - 92 
Les gares périurbaines, des objets et des environnements divers................................................ - 92 -

Une volonté de créer des outils pour faciliter le déploiement des commerces et services ..... - 93 -
Conclusion ........................................................................................................................................................ - 96 Bibliographie .................................................................................................................................................... - 98 Table des illustrations ................................................................................................................................... - 100 -
Introduction

Contexte
Si le développement urbain a, un temps, été influencé par le développement ferroviaire (dès le
19ème siècle le chemin de fer a été un mode de transport fort, favorisant les échanges et l’essor
industriel des villes), les années 1970 ont vu la voiture individuelle prendre le pas sur le train, et
devenir le moteur de la périurbanisation. Les quartiers de gare ont alors souvent été laissés à l’écart
des dynamiques d’urbanisation des villes moyennes et des communes périurbaines.
Pour autant, la loi Grenelle II de 2010, dans la droite ligne de la loi SRU, affirme clairement la
nécessité de favoriser les modes de déplacements collectifs et de créer des modes d’urbanisation
moins consommateurs d’espace. Elle conseille pour cela, de s’appuyer sur les réseaux de transport
collectif existants et sur leurs nœuds, afin de contrebalancer le développement résidentiel périurbain
et l’utilisation massive de l’automobile pour les déplacements domicile - travail.
Ces éléments réglementaires font ainsi du réseau ferré, et des gares, des points d’enjeux majeurs
pour une mobilité plus durable. C’est d’autant plus vrai pour les gares TER, implantées en périphérie
des villes-centres, qui peuvent venir offrir un mode de transport adapté aux déplacements
pendulaires du périurbain vers la ville-centre. Elles sont donc, ainsi que leur quartier, au cœur d’un
processus de réappropriation et de revalorisation par les habitants et par les élus. Elles sont aussi des
points majeurs pour les collectivités locales, qu’elles soient en charge des politiques de transport ou
d’aménagement. De nombreux Schémas de cohérence territoriale (SCoT), prônent ainsi la
restructuration de la ville autour des gares et autres points d'accès aux réseaux structurants de
transport en commun.
L’implantation des services et commerces, dans ces espaces stratégiques s’inscrit donc
pleinement dans cette perspective. On observe ce phénomène principalement dans les grands pôles
d’échange urbains mais il commence également à toucher les gares périurbaines. Ces services et
commerces viennent accompagner les changements de modes de transport et permettent
d’optimiser les temps d’attente des voyageurs, en répondant, en temps masqué, à certains de leurs
besoins. Ils participent ainsi à rendre le train plus attractif et à revaloriser ce mode de transport.
Inversement l’attractivité croissante du train attire les enseignes et les services dans les gares, en leur
offrant une clientèle de plus en plus nombreuse. Les gares représentent ainsi un potentiel non
négligeable, intéressant à valoriser sur le plan financier par les acteurs ferroviaires (RFF et SNCF) que
ce soit par la location ou la vente.
Pour ces différentes raisons, l’implantation de commerces et services en gare peut contribuer à
faire des gares des lieux de centralité, et plus largement à valoriser les quartiers dans lesquelles elles
-6-
Introduction
s’inscrivent. L’implantation de services et commerces dans les gares interroge donc à la fois les
politiques de déplacements et d’aménagement urbain et leur articulation.

Définition de l’objet d’étude
Les gares françaises sont très hétérogènes. Elles vont des grandes gares parisiennes, aux points
d’arrêts non gérés (PANG), signalés par un panneau sur le quai n’accueillant que quelques voyageurs
par jour, en passant par les gares de villes moyenne qui possèdent un bâtiment voyageurs avec une
salle d’attente. Elles sont donc des objets très variés qui contrastent parfois avec l’unicité du discours
sur LA gare.
2- Point d'Arrêt Non Géré (Alaï - 69)
1- Gare moyenne urbaine (Givors ville - 69)
Dans cette étude nous nous intéresserons aux gares périurbaines, par différence avec les gares
centrales des aires urbaines. Elles sont également de types très variés, avec des fréquentations de
niveaux différents, mais globalement en hausse depuis plusieurs années. Si ces gares ne font ne font
pas partie des gares d’intérêt national (les 220 plus grandes gares de France) identifiées par la SNCF,
elles jouent un rôle clé dans les mobilités quotidiennes en tant que points d’entrée sur le réseau
ferré.
« Les services » englobe, pour les différents acteurs du transport et de l’aménagement également
des réalités très diverses, qu’il s’agisse des services « de base » aux usagers des trains (personnel
assurant la vente de billets, salle d’attente chauffée, affichage des horaires de trains, etc.), de
services à la mobilité (vélos en libre-service, aires de co-voiturage, parking relais, etc.), ou encore de
services marchands ou non marchands implantés dans et aux abords des gares.
Nous nous intéresserons, dans cette étude, aux commerces et services non liés strictement à la
mobilité, qui sont des services complémentaires permettant à l’usager de réaliser, sur son lieu de
transport, des activités, autres qu’un déplacement, et complémentaire à celui-ci : acheter du pain, un
-7
-
Introduction
journal, faire des analyses médicales, envoyer une lettre, faire ou retirer ses courses, laisser son linge
au pressing, déposer son enfant à la crèche ou encore récupérer un colis.

Questionnement
Les nouveaux enjeux de report modal font qu’aujourd’hui, les acteurs du développement des
gares et de leurs abords sont nombreux. Du point de vue purement ferroviaire, se retrouvent : le
Conseil Régional en tant qu’autorité organisatrice des transports express régionaux (TER), SNCF
Proximité en tant qu’exploitant délégué, SNCF-Gares & Connexions en tant que propriétaire des
bâtiments voyageurs et RFF en tant que propriétaire des infrastructures de transports proprement
dites. Viennent également s’ajouter à cette liste, les communes en charge de l’aménagement des
abords extérieurs, les intercommunalités qui assurent le transport urbain ou encore les conseils
généraux qui gèrent l’offre de transport interurbain.
3 - Schéma du groupe SNCF et filiales de sa branche "Gares & Connexions"
Cependant, on remarque que cette question de l’implantation des services et commerces dans
ces espaces stratégiques, que sont les gares, fait l’objet d’un consensus théorique. En effet,
nombreux sont les acteurs du ferroviaire et de l’aménagement à les évoquer, à les promouvoir ou
même à lancer des études dans ce sens : SNCF-Proximités, SNCF-Gares & Connexions, Région Alsace,
Région Rhône-Alpes, Région Picardie, CAUE 63, Grand Lyon, etc. Après la transformation des grandes
gares parisiennes en centres commerciaux, les collectivités, et plus particulièrement les régions
autorités organisatrices du transport express régional (TER), semblent donc aujourd’hui vouloir
intégrer la question des services dans leurs politiques de déplacements et d’aménagement.
Dans un premier temps il semble donc pertinent de se pencher sur ces discours de promotion des
commerces et des services en gares et de chercher à comprendre les logiques et les objectifs des
acteurs du transport ferroviaire et de l’aménagement qui les portent. On peut se demander en quoi
-8
-
Introduction
ce discours « marketing » autour des services en gares est-il intéressant à promouvoir et à mettre en
œuvre pour les différents acteurs et comment ces différents enjeux, ces différents objectifs, propres
à chacun des acteurs des projets, peuvent-ils s’articuler ?
En effet, chacun de ces acteurs met en avant des objectifs différents pour l’implantation de
services et commerces en gares TER. Pour le conseil régional et son délégataire de service, SNCF
Proximité – TER, il s’agit d’offrir un service supplémentaire aux usagers du train : en accompagnant la
rupture de charge et en valorisant le temps d’attente, les services permettant de rendre ce mode de
transport plus attractif et d’en fidéliser sa clientèle. Pour SNCF-Gares & Connexions, l’enjeu est plutôt
de valoriser son patrimoine immobilier et de le faire vivre alors que les communes cherchent, par
l’implantation de services et de commerces, à utiliser cette centralité de passage pour créer une
véritable centralité de ville en y assurant la mixité des fonctions urbaines.
Pour autant, le discours porté par les institutionnels et relayé par les médias semble mis à
l’épreuve du terrain. Les projets réalisés sont pour l’instant peu nombreux et se sont souvent
développés dans le cadre d’expérimentations. Pourquoi les projets envisagés et valorisés ne
prennent-ils pas plus place sur le terrain. Quels sont les freins et les leviers de leur développement ?
Et notamment, la multiplicité d’acteurs et d’objectifs est-elle un frein au développement des services
et commerces dans les gares ?
En cherchant à comprendre les logiques des différents acteurs qui promeuvent les services en
gare et les conditions de réalisation de ces projets, nous nous interrogerons, au regard des enjeux et
dynamiques territoriales propre à chaque gare, pour comprendre dans quelles mesures les discours
généraux sur l’implantation des commerces et des services dans les gares périurbaines, peuvent-ils
se traduire en actes ?

Choix du terrain : la région Rhône-Alpes
Les conseils régionaux étant les autorités organisatrices du TER, le périmètre régional apparaît
donc comme particulièrement pertinent pour une première approche des stratégies institutionnelles.
Le premier terrain retenu est celui de la région Rhône-Alpes, permettant un contact avec les
institutionnels en charge des services et commerces en gares à cette échelle : SNCF Proximité, Gares
& Connexions, Direction des transports du conseil régional.
-9
-
Introduction
La région Rhône-Alpes est, particulièrement intéressante puisqu’elle est la première région
ferroviaire française1 et qu’elle porte une politique de développement du TER et des services à la
mobilité associés depuis plusieurs mandats.
Suite aux rencontres avec ces acteurs régionaux et au recensement des différents services
proposés dans les gares périurbaines, voire rurales, de Rhône-Alpes, nous avons pu définir deux
projets d’implantation de services en gares à étudier dans le détail.
Le premier est celui de la gare de Vinay, en Isère. Située dans une commune de 4000 habitants, au
cœur du sillon alpin Sud, entre Grenoble et Valence, cette gare a fait l’objet d’un important projet de
réaménagent, et de revitalisation porté par les élus locaux et régionaux. Le bâtiment voyageurs,
racheté à SNCF-Gares & Connexions par la commune en 2010, a été complètement réaménagé. S’y
est installé un commerce de proximité, faisant à la fois dépôt de pain, petite restauration et dépôt
pressing. L’ancienne halle de marchandise voisine a également été achetée par la municipalité qui en
a fait une « halle fermière », un espace de vente en direct entre producteurs de la région et
consommateurs. Le projet de Vinay combine ainsi différents types de services et commerces, dans et
autour de la gare, dans un contexte de « pôle rural ».
Le second projet prend place à Saint-Chamond dans la Loire, soit dans une ville de 35 000
habitants, 2nde commune de l’agglomération stéphanoise. La gare de Saint-Chamond a fait l’objet
d’une remise en état par SNCF - Gares & Connexions en 2012/2013. Cette réhabilitation a été
appuyée par un projet de pôle multimodal porté par l’agglomération de Saint-Etienne et par
l’implantation d’un Point Information Médiation Multiservices (PIMMS). La salle des pas perdus
accueille également un commerce de restauration et de proximité. Un projet de crèche dans le
bâtiment voyageurs a également été envisagé mais semble, aujourd’hui, avoir été laissé de côté.
Ces deux sites sont extrêmement différents, que ce soit par la taille des communes, les services et
commerces implantés, la fréquentation des gares concernées, mais ils nous permettent, si ce n’est
une comparaison exacte de deux facteurs, une prise de conscience des différents acteurs et enjeux
pouvant prendre part à un projet de commerces ou services en gares.
1 Hors Ile de France, avec 2000 km de lignes exploités et pour une fréquentation de 135 000 voyages par jour en car ou train
Source : site du conseil régional Rhône-Alpes ; http://www.rhonealpes.fr/118-reseau-ter-transport-express-regional.htm;
et site TER Rhône-Alpes ; http://www.ter-sncf.com/Regions/rhone_alpes/Fr/A_propos_de_TER/Default.aspx ;
consultés en juin 2014.
- 10
-
Introduction

Méthodologie : une enquête de terrain à trois niveaux
Ce travail de recherche s’est effectué dans le cadre d’un stage de 3 mois au sein du département
« Urbanisme et Habitat » de la Direction Technique Territoires et Villes du CEREMA, qui travaille, en
partenariat avec les Directions Centre-Est et Nord-Picardie sur l’aménagement autour des gares TER
depuis 2011.
La première phase de travail, effectuée en amont du stage au CEREMA, a été un travail
bibliographique sur les enjeux d’aménagement autour des gares périurbaines et la question des
services et commerces dans les pôles de mobilité. Elle a également permis de mieux comprendre le
fonctionnement de la SNCF pour la gestion des petites gares et de mieux appréhender sa politique
nationale concernant les services et commerces en gares par le biais d’une revue de presse et de
l’étude des publications en ligne du groupe. Cette approche générale et théorique a été complétée
par la participation à une journée d’échanges organisée par le CAUE du Puy-de-Dôme intitulée « au
croisement des chemins : les services » et par la rencontre avec Mme Lucie Verchère-Tortel, chargée
d’étude sur les questions de services innovants et de mobilité à la direction de la prospective et du
dialogue public du Grand Lyon.
Le second temps de l’étude a consisté en l’analyse de la stratégie d’implantation des commerces
et des services en gares au niveau régional. Il s’agissait également de pouvoir trouver un ou deux
exemples locaux qu’il serait ensuite pertinent d’analyser dans le détail.
Un premier recensement des offres disponibles sur Rhône- Alpes a donc été effectué à partir d’un
document réalisé en amont par le CEREMA, mais aussi grâce à des données de la presse locale et des
informations à destination de clients, transmises par SNCF Proximité, TER Rhône-Alpes ou encore
SNCF - Gares & Connexions leurs sites internet. Cette approche « papier » a été complétée par une
visite de terrain d’une vingtaine de gares de l’Ouest Lyonnais. Cela a permis d’appréhender la
diversité des gares de la région et leurs configurations territoriales. Ça a aussi été l’occasion de se
rendre compte des commerces ou des actions de type « retrait de paniers fraîcheur » ainsi que les
différents types d’aménagements et de services (à la mobilité ou autres) disponibles selon la taille
des gares. La gare de Vienne-Centre, intéressante au premier abord s’est avérée trop centrale, située
dans un environnement commercial trop dense pour être traitée comme une gare « périurbaine ».
Nous avons ensuite rencontré les différents acteurs institutionnels en charge de la politique de
services en gare sur Rhône-Alpes, dans le cadre d’entretiens semi-directifs , afin de comprendre les
axes de développement, le fonctionnement des projets, les financements, les liens avec les
territoires, etc. Nous avons rencontré différents agents de la direction des transports de la région
Rhône-Alpes, et le directeur « services et exploitation » de l’agence gare Centre- Est – Rhône alpin de
- 11
-
Introduction
SNCF-Gares & Connexions, ainsi que le représentant régional de la FNAUT2. Nous avons souhaité
rencontrer la personne en charge des politiques servicielles de TER Rhône-Alpes/SNCF-Proximités
mais elle n’a malheureusement pas répondu à nos sollicitations. Les informations récoltées auprès
des institutionnels ont été riches, à la fois pour comprendre le fonctionnement de la gestion des
gares périurbaines, le rôle de chacun, mais aussi leur position sur l’usage attendu des bâtiments
voyageurs et leurs attentes envers les services en gare. Ces rencontres ont également permis
d’affiner les terrains d’étude et d’apporter des premiers éléments sur les projets choisis, auprès du
conseil régional notamment.
La dernière partie de l’étude de terrain a consisté en l’analyse des deux projets choisis: Vinay et
Saint-Chamond. Pour chacun de ces deux projets, nous avons d’abord réalisé une étude de contexte
de la ville, de la place de la gare dans celle-ci, mais aussi du contexte ferroviaire. Cette première
approche a été complétée par une revue de presse locale afin retracer l’historique du projet. Nous
avons ensuite mené des entretiens semi-directifs avec les différents acteurs locaux des projets afin
de comprendre les motivations initiales du projet, ses modes de conduite et de fonctionnement, les
difficultés rencontrées et les conditions de sa réussite. A Vinay, nous avons pu rencontrer la
directrice générale des services de la municipalité, la commerçante installée en gare, le gestionnaire
du magasin de producteurs locaux situé à proximité et échanger par téléphone avec Mme le maire. A
Saint-Chamond, nous avons rencontré le commerçant installé en gare et la directrice de l’urbanisme
des services techniques de la mairie. Nous avons également pu contacter un ancien élu au
développement économique qui nous a transmis les informations dont il disposait. Nous avons eu
l’occasion d’échanger de manière informelle avec le directeur du PIMMS implanté dans le bâtiment
voyageurs, qui nous a expliqué son fonctionnement et la genèse du projet. Cependant, nous n’avons
pas réussi à le rencontrer à nouveau pour un entretien en bonne et due forme.
La dernière partie de ce travail a consisté en une analyse comparée des exemples étudiés, et une
mise en parallèle du contexte institutionnel général, à partir du matériau récolté et des
retranscriptions partielles des entretiens. Cette analyse a été appuyée par des échanges avec le
groupe de travail « Valorisation des gares TER» du CEREMA et l’unité « Gares » de la direction des
transports du conseil régional Rhône-Alpes. Cela a permis de tirer des premiers enseignements de
ces démarches de mise en place de services en gares et permettra de mettre en évidence certains
intérêts et conditions de développement des services et commerces dans les gares TER.
2 Fédération Nationale des Associations d’Usagers de Transports
- 12
-
Introduction

Annonce du plan
La structure de ce mémoire de recherche, est calquée sur les grandes étapes d’analyse,
présentées dans la méthodologie.
Dans une première partie, nous présenterons les éléments et enjeux ayant participé à la
naissance d’une réflexion sur les services et commerces dans les gares périurbaines. Nous
présenterons également la façon dont les institutionnels du ferroviaire s’emparent de ces enjeux
pour commencer à travailler à une politique de commerces et services en gare TER.
Dans une seconde partie, nous nous pencherons sur l’exemple de la région Rhône-Alpes. Nous
analyserons la position des différents acteurs et nous mettrons en évidence la réalité du terrain plus
complexe que les discours avancés et les nombreuses dynamiques auxquelles sont soumis les
projets.
Dans un troisième chapitre, nous étudierons deux exemples plus en détails, les gares de Vinay
(38) et de Saint-Chamond (42) dans et autour desquelles des projets de commerces et services se
sont développés. Nous mettrons en évidence le contexte local des projets, la façon dont ils ont été
portés par les différents acteurs, les enjeux auxquels ils répondent et les difficultés rencontrées pour
passer du projet à une mise en œuvre sur le terrain.
Enfin, dans une dernière partie, nous présenterons les conclusions et analyses que l’on peut tirer
de cette étude, nous chercherons à recontexctualiser la politique globale d’implantation de
commerces et services en gares et nous mettrons en évidence l’importance de ne pas se limiter à
l’échelle du train ou à celle de la gare pour mettre en place un projet pérenne.
- 13
-
Chapitre I
Les commerces et services en gares :
vecteurs possibles du développement
des gares TER ?
- 14 -
Chapitre I
A l’heure du développement durable, les questions d’aménagement urbain et de déplacements
sont devenues des enjeux majeurs. Face à l’augmentation des mobilités quotidiennes, notamment
entre espaces périurbains et villes-centres, le report modal vers le train s’impose comme l’une des
pistes privilégiées.
Nous mettrons alors en évidence que ces enjeux d’articulation urbanisme/transport font des
gares, et plus encore des gares périurbaines, des points centraux des politiques d’aménagement et
de déplacements. Puis nous présenterons la façon dont les grandes gares françaises se sont
emparées de la question des commerces pour renforcer leur attractivité et leur position de
centralités urbaines. Enfin, nous verrons que, à l’image des gares nationales, les gares périurbaines et
leurs gestionnaires envisagent d’utiliser les commerces et les services pour se développer.
- 15
-
Chapitre I
1.
Les gares périurbaines, au croisement des enjeux de
déplacements et d’urbanisme
La mobilité, si elle a toujours existée, est aujourd’hui au cœur de notre société par l’importance
des flux qu’elle crée. Comme l’explique François Ascher3, «Aujourd'hui, se déplacer est devenu
indispensable pour accéder à la plupart des biens, des services et des relations sociales. La possibilité
de se mouvoir, en particulier dans les villes, conditionne en effet l'accès au logement, au travail, à
l'éducation, à la culture etc. ». La mobilité est devenue à la fois une possibilité mais également une
nécessité.

Modes de vie périurbains et mobilités
Depuis les années 1990, on a pu observer d’importantes évolutions des mobilités, et notamment
des mobilités quotidiennes. En effet, si jusqu’alors, la plupart des actifs travaillaient sur leur lieu de
résidence, ce n’est aujourd’hui plus le cas pour 73% d’entre eux4. Ces évolutions sont la conséquence
de différents phénomènes urbains et sociaux.
Dans un premier temps, on peut constater l’apparition d’un phénomène urbain de dissociation
des lieux de résidence et des lieux d’emploi, notamment sous l’effet de la spécialisation sociale et
fonctionnelle des territoires5. A cela viennent s’ajouter des contraintes immobilières et foncières
fortes dans les agglomérations. La demande étant de plus en plus importante, alors que l’offre ne
suit pas, on assiste à une importante croissance des prix de l’immobilier, que ce soit à l’achat ou à la
location. Il devient ainsi, pour les ménages travaillant dans les villes, de plus en plus difficile de s’y
loger, ce qui a favorisé la résidence hors des centres urbains. Comme l’explique François Ascher6
« Dans des sociétés de plus en plus complexes et diversifiées, l'habitat, l'emploi, les écoles, les loisirs,
ne se trouvent plus jamais à proximité immédiate les unes des autres. ». Depuis 40 ans, on peut ainsi
observer une dissociation entre les zones de résidences et les zones d’emplois ainsi qu’une
augmentation du nombre d’emplois situés à l’extérieur des centres urbains.
Les années 1970 ont vu la voiture individuelle prendre le pas sur le train, et devenir le moteur de
la périurbanisation. Les progrès industriels dans le domaine de l’automobile et l’amélioration des
infrastructures routières ainsi que l’extension du réseau depuis les 30 glorieuses ont permis aux
ménages d’aller de plus en plus loin en un minimum de temps. En effet, la limite de trajet tolérable
par les voyageurs ne se calcule pas en distance à parcourir mais bien en temps de trajet, et avec les
3 ASCHER François, « Le sens du mouvement, introduction » dans ALLEMAND Sylvain, ASCHER François, LEVY Jacques, Les
sens du mouvement. Modernité et mobilité dans les sociétés urbaines contemporaines, Belin, 2004.
4 INSEE, « Les déplacements domicile-travail amplifiés par la périurbanisation » dans Insee Première N° 1129 , 2007.
5 CERTU, « Mettre les gares TER au cœur des stratégies territoriales : pourquoi ? Comment ? », Stratégies foncières aux
abords des gares TER- Fiche n°1, 2012.
6 ASCHER François, 2004, op. cit..
- 16
-
Chapitre I
modes de déplacements modernes, pour une même durée, les distances parcourues ont
augmentées.
La combinaison de cette difficulté à se loger dans les villes-centres et de la facilité qu’offrent
l’automobile et les infrastructures routières et autoroutières d’aller toujours plus loin en un
minimum de temps, ont favorisé l’installation des travailleurs urbains en périphérie des villes.
Ces changements ont provoqué une augmentation réelle des distances quotidiennes de
déplacements et principalement des distances de déplacements domicile/travail que ce soit en
moyenne, à l’échelle nationale, avec une augmentation de 22% entre 1994 et 2008, ou à l’échelle des
aires urbaines7. On a ainsi vu apparaître les déplacements pendulaires à l’intérieur des pôles urbains
et entre ville-centre et périphérie, avec des habitants qui font le trajet entre leur domicile et leur lieu
de travail matin et soir. 52% des actifs se déplacent ainsi tous les jours à l’intérieur d’un pôle urbain
pour aller travailler, si on y ajoute à ce périmètre la couronne périurbaine, ils sont alors 68% des
actifs français à se déplacer dans ce périmètre8.
Plus flexible que les transports en commun et permettant d’accéder plus facilement à des espaces
ruraux ou périurbains moins centraux, la voiture particulière s’est rapidement imposée comme le
moyen de transport privilégié pour ces déplacements quotidiens. Elle représentait, en 2008, 65% des
déplacements quotidiens pour 83% des kilomètres parcourus à l’échelle nationale9 , cette part
atteignant même jusqu'à 85% voire 90% des déplacements dans certaines communes périurbaines.

Les transports collectifs : enjeu pour la mobilité quotidienne
Aujourd’hui, face à cet allongement des distances domicile – travail pour la majorité des ménages
français, face au poids de l’automobile dans ces déplacements quotidiens, en particulier pour les
habitants et actifs des couronnes périurbaines, il devient urgent d’opérer une prise de conscience
des limites de ce modèle. Comme l’ont montré les chocs pétroliers de 1973 et 1979, les ressources
en pétrole ne sont pas illimitées et la raréfaction à venir annonce des difficultés d’accès à la
ressource impliquant une hausse du prix des carburants. C’est donc, à des limites énergétiques, mais
aussi économiques et écologiques qu’il faut aujourd’hui tenter de remédier.
En effet, on a assisté à une augmentation constante des émissions de gaz à effet de serre liées aux
transports (+19% entre 1990 et 2007). Devenu le premier secteur émetteur en France, les transports
en représentent aujourd‘hui 27% des émissions globales.10 Les déplacements pendulaires
7 CERTU, 2012, op.cit.
8 INSEE, 2007 op.cit.
9 Commissariat général au développement durable, « La mobilité des français. Panorama issu de l’enquête nationale
transports et déplacements 2008 », La revue du CGDD, 2010.
10 Données 2007, Site internet de l’ADEME sur les Plans Climat-Energie ; http://www.pcet-ademe.fr/domainesactions/transports/contexte-et-enjeux; consulté en juin 2014
- 17
-
Chapitre I
représentant 11,6%11 des déplacements entre le périurbain et les villes-centres, c’est un enjeu
national de faire diminuer l’utilisation des véhicules personnels et principalement l’auto-solisme12 sur
ces trajets. Il s’agit de favoriser l’utilisation des transports collectifs pour ces déplacements et donc
de limiter à la fois la consommation d’énergie et l’émission de polluants.
Dans les zones rurales, par définition peu denses, il reste compliqué de mettre en place des
transports en commun forts, il s’agira alors de développer des solutions alternatives, moins
contraignantes en terme d’investissement et plus adaptées aux modes d’habiter comme les
transports à la demande ou le covoiturage. Pour autant, dans les zones périurbaines, plus denses
donc avec une aire de chalandise suffisante, et polarisées le long des axes majeurs de transports
(routiers ou ferroviaires), il devient « rentable » de mettre en place des transports en commun plus
lourds, demandant des infrastructures et des équipements plus importants. Avec un bon niveau de
desserte, le TER devient alors une alternative crédible à l’usage de l’automobile pour les trajets
quotidiens. Il est, de plus, un mode de transport plus économique et bien moins émetteur de gaz à
effet de serre que l’automobile.
Les enjeux sociaux et environnementaux sont donc conséquents et incitent à agir au plus vite
pour mieux tirer parti des potentialités du transport ferroviaire régional. Mais ce défi majeur de
développement du train de proximité, ne peut se faire sans un aménagement des nœuds de
transports associés. L’aménagement des gares représente ainsi un enjeu central des politiques de
mobilité. Il est aujourd’hui absolument nécessaire de rendre ces espaces accessibles et multimodaux
afin de permettre un rabattement maximal vers les lignes TER. En effet, encore plus que dans les
centres urbains, où l’aire de chalandise proche est importante, il s’agit ici de toucher les habitants sur
une zone plus large qui vont devoir se rendre à la gare en utilisant un autre moyen de transport. Les
parkings relais font ainsi partie des incontournables réaménagements des abords de gares
périurbaines, tout comme les cheminements modes doux, et les arrêts de transports en commun en
zones urbaines. Elles sont ainsi des points majeurs de l’intermodalité en tant que centre d’attraction
vers le train.

Les transports collectifs : enjeu pour l’urbanisme durable
Le réseau ferré, et les gares, sont des points d’enjeux majeurs pour une mobilité plus durable
mais également pour l’aménagement urbain.
Depuis les années 2000, les enjeux et limites des modèles de développement urbains en cours
sont peu à peu pris en compte et occupent aujourd’hui une place non négligeable dans les directives
de l’aménagement. Les différents textes d’orientation de l’urbanisme prônent ainsi la densité
11 INSEE, 2007 op.cit.
12 Utilisation d’une automobile par une personne seule pendant un trajet
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-
Chapitre I
urbaine et la limitation de l’artificialisation des espaces agricoles ou naturels, tout en cherchant à
favoriser le développement des polarités desservies par les transports en commun.
La volonté de lutter contre le mitage de l’espace apparaît dans le droit français, sous la forme
d’une règle de constructibilité limitée, dès 1983, avec la loi dite « Defferre »13
« En l'absence de plan d'occupation des sols opposable aux tiers, ou de tout document
d'urbanisme en tenant lieu, seules sont autorisées, en dehors des parties actuellement
urbanisées de la commune :
1° L'adaptation, la réfection ou l'extension des constructions existantes ;
2° Les constructions et installations nécessaires à des équipements collectifs, à l'exploitation
agricole, à la mise en valeur des ressources naturelles et à la réalisation d'opérations d'intérêt
national ;
3° Les constructions et installations incompatibles avec le voisinage des zones habitées et
l'extension mesurée des constructions et installations existantes. »
Article L111-1-2 du code de l’urbanisme,
Loi n°83-8 du 7 janvier 1983
Elle va être renforcée en 2000 par la loi SRU14 qui introduit la notion d’articulation
urbanisme/transports. En 2009-2010, les lois « Grenelle » vont plus loin et affirment clairement la
nécessité de créer des modes d’urbanisation moins consommateurs d’espace et de réduire les
émissions de gaz à effet de serre.15 Comme l’explique Francis Beaucitre16 « La voiture particulière
stimule la poursuite d’un urbanisme de zonage (…) et rend littéralement irréversible, au moins à
l’échéance d’une ou deux générations, la forme urbaine discontinue, à très basse densité ». Favoriser
les modes de déplacements collectifs et s’appuyer sur les réseaux de transports existants et leurs
nœuds pour organiser le développement urbain, est donc également essentiel lutter contre la
consommation d’espace.
Cette place des transports collectifs structurants, comme l’un des outils majeurs de l’urbanisme
durable, prend petit à petit place dans les documents de planification. Les Schémas de Cohérence
Territoriale (SCoT), créés en 2000 par la loi SRU17 , imposent aux collectivités de prendre en compte
ces enjeux :
« Le schéma de cohérence territoriale et les plans d'occupation des sols, entre autres,
doivent permettre d'assurer: « La diversité des fonctions urbaines et la mixité sociale (...) dans
l']intérêt général, (...) en tenant compte (...) des moyens de transport.(...) Une utilisation
13 Loi n° 83-8 du 7 janvier 1983 relative à la répartition de compétences entre les communes, les départements, les régions
et l'Etat *loi Defferre*.
14 Loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains.
15 Article L110 du Code de l’urbanisme, d’après la Loi n° 2009-967 du 3 août 2009 de programmation relative à la mise en
œuvre du Grenelle de l'environnement.
16 BEAUCITRE Françis, "Mobilité et territoires ; Contributions au PREDIT", Direction de la Recherche et des Affaires
Scientifiques et Techniques du Ministère de l’Equipement, des Transports et du Logement, 2001.
17 Loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbain.
- 19
-
Chapitre I
économe et équilibrée des espaces naturels, urbains, périurbains et ruraux, la maîtrise des
besoins de déplacement et de la circulation automobile, la préservation de la qualité de l'air,
de l'eau, du sol et du sous-sol, des écosystèmes, des espaces verts, des milieux, sites et
paysages naturels ou urbains, la réduction des nuisances sonores, la sauvegarde des
ensembles urbains remarquables et du patrimoine bâti, la prévention des risques naturels
prévisibles, des risques technologiques, des pollutions et des nuisances de toute nature ».
Art.L-121-1 2 du code de l’urbanisme
Loi n°2000-1208 du 13 décembre 2000
Les SCoT ont été renforcés par le Grenelle de l’environnement, en 2010,18 qui a renouvelé cette
volonté de densification de la ville, de lutte contre la périurbanisation et de diminution des
obligations de déplacement. Elle prend clairement en compte les opportunités offertes par les
réseaux structurants de transports collectifs, et notamment le rail, pour favoriser une organisation
urbaine moins consommatrice d’espace.

Les gares périurbaines : des espaces au fort potentiel
Dans ce contexte règlementaire de développement des transports collectifs, les gares deviennent
aujourd’hui des lieux d’enjeux pour les politiques d’aménagement urbain et non uniquement pour le
transport, comme le rappelle la sénatrice du Bas-Rhin, Fabienne Keller dans son rapport sur les gares
au premier ministre.
« La raison d'être du service de transport est de servir le territoire organisé. Dans la mise en
œuvre de cet objectif, deux cultures se font face : celle du transport et celle de
l'aménagement urbain. Chacune a son langage propre, ses caractéristiques, son économie,
son ingénierie, ses modes de faire et ses rythmes (…) La cohérence du territoire et du
transport dépend pourtant de la conjugaison de ces deux univers. »
Rapport Keller19
Même si, favoriser un urbanisme orienté vers le rail ne pourra suffire à infléchir les tendances
actuelles, les espaces entourant les gares périurbaines sont donc des espaces particulièrement
intéressants pour répondre aux attentes d’un urbanisme durable. En effet, si le rail a été un vecteur
majeur du développement urbain jusqu’au milieu des années 1900, l’urbanisme moderne lui a
ensuite bien souvent tourné le dos. Les quartiers de gare ont alors souvent été laissés à l’écart des
dynamiques d’urbanisation des villes moyennes et des communes périurbaines. À l’heure actuelle, ils
sont donc souvent, des espaces abandonnés où subsistent de nombreuses friches. Mais ces friches
représentent de véritables opportunités de croissance pour la commune, par densification, sans
consommation d’espaces périphériques supplémentaires.
18 Loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l'environnement
19 KELLER Fabienne, « La gare contemporaine », Rapport ministériel, 2009.
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-
Chapitre I
L’orientation des densifications à venir autour des axes de transports structurants et de leurs
portes d’entrée tels que les gares permet également de répondre de façon pertinente à l’enjeu de
transport.. L’urbanisation autour des gares permet, en effet, un report modal simplifié et une
utilisation réduite des véhicules personnels puisqu’il devient possible de se rendre à la gare grâce aux
modes actifs et d’y prendre ensuite le train jusqu’à la ville-centre. Les gares périurbaines sont
souvent à destination de plusieurs communes, et ont donc une aire de chalandise suffisante pour
offrir une desserte intéressante par rapport aux véhicules personnels. L’urbanisation dans les
communes proches des axes ferroviaires, et plus encore, autour des gares, permet de développer la
ville autour des points d’attractions majeurs vers les transports en commun afin de favoriser leur
utilisation. Les gares TER, implantées en périphérie des villes- centres, peuvent ainsi offrir un mode
de transport adapté aux déplacements pendulaires du périurbain vers la ville-centre.
Cette volonté de densification aux abords des gares dans les communes périurbaines se retrouve
de plus en plus dans les documents de planification. De nombreux Schémas de cohérence territoriale
(SCoT) orientent clairement la restructuration de la ville autour des gares et autres points d'accès aux
réseaux structurants de transports en commun. C’est notamment le cas de celui de l'agglomération
lyonnaise :
« PRIORITÉ À L’URBANISATION DES SECTEURS BIEN DESSERVIS ET BIEN ÉQUIPÉS :
Dans la logique du Projet d’Aménagement et de Développement, le Document d’orientation
général détermine des secteurs prioritaires pour le développement urbain :
les secteurs situés au sein des polarités urbaines,
les quartiers desservis par les gares du Réseau express de l’aire métropolitaine
lyonnaise ou dont la desserte est programmée,
les corridors urbains desservis par le réseau des transports collectifs d’agglomération
ou dont la desserte est programmée,
les sites de projet à fort potentiel d’accueil.
L’objectif des politiques publiques d‘urbanisme est de mobiliser de manière prioritaire le
foncier dans les secteurs considérés. »
Extrait du Document d’orientation général
du SCOT de l’agglomération Lyonnaise
A l’heure du développement durable, les gares périurbaines sont donc des points d’enjeux
centraux pour lutter contre les émissions de gaz à effet de serre, la consommation d’énergie et la
consommation d’espaces agricoles et naturels.
- 21
-
Chapitre I
2. Les « grandes gares » : centres commerciaux et centralités
urbaines
Pour répondre à la fois aux enjeux d’aménagement et de déplacements, la gare ne doit pas rester
un simple maillon du chemin de fer mais bien se transformer en véritable lieu de vie. C’est à la fois
un point essentiel pour attirer les usagers vers le train, mais également pour permettre une
participation réelle de la gare à la revitalisation du quartier.
Pour mieux comprendre comment effectuer cette modification de fonction, on peut regarder
l’exemple des gares centrales des grandes agglomérations, « grandes gares », qui sont des nœuds
majeurs du transport mais également du maillage urbain.

Naissance des commerces en gare
La première phase de l’implantation des commerces en gare a débuté avec la création du chemin
de fer. Dès le XIXème siècle, on constate une volonté de profiter de l’espace des gares, et du flux de
personnes apporté par le chemin de fer pour y développer des commerces. Les années 1840-50
voient apparaître, avec le développement du chemin de fer, des petits commerces de journaux ou de
restauration qui prospèrent dans les gares. La restauration, avec la création des cafés de la gare, en
face des bâtiments voyageurs et les « buffets de la gare » à l’intérieur de ceux-ci s’empare de ces
nouveaux espaces dès la seconde moitié du XIXème. Dans les gares nouvellement construites ces
buffets permettent au voyageur qui attend son train ou qui arrive en ville de se restaurer. Ces lieux
vont se développer partout, qu’ils soient luxueux et emblématiques comme celui de la gare de Lyon à
Paris construit en 1900 pour l’exposition universelle ou l’équivalent de simples bistrots. Ils
permettent ainsi le premier développement de la gare comme un espace de vie.
Toutefois le véritable commerce au sens strict et à grande échelle naît dans les gares françaises
avec Louis Hachette20. En effet, après un voyage à Londres en 1851, il décide d’imiter le libraireéditeur anglais W.H. Smith qui installait alors, sur le réseau ferré anglais, des kiosques permettant la
vente de livres, journaux et tout autre objet utile aux voyageurs. En effet, le réseau ferré français
rayonne déjà depuis Paris sur tout l'hexagone, les projets sont encore nombreux et le nombre des
voyageurs croît très vite. Il crée ainsi en 1854 les « Bibliothèques de gares » qui sont alors des points
de vente de la maison d’édition. Si ces officines sont, à l’origine, destinées à vendre la nouvelle
collection de la maison d’édition, « Bibliothèques des chemins de fer », adaptée aux voyageurs. Ils
obtiennent, dès 1856, l’autorisation de vendre la presse. Cette nouvelle activité devient rapidement
la principale source de revenu de ces bibliothèques de gare et fait rapidement d’Hachette, le
20 TAVEAUX Karine, « Réseau de bibliothèques de gare et du métropolitain, et messageries Hachette dans l’aire parisienne
(1870-1914) » dans Médias et villes (XVIIIe-XXe siècle) de Christian Delporte, Presses Universitaires François Rabelais, 1999.
- 22
-
Chapitre I
premier revendeur de presse de France. Ces bibliothèques de gare sont les ancêtres des « Relais H »
et des « Relay » actuels21.

La transformation des « grandes gares » en centres commerciaux
La seconde phase importante de développement commercial en gare suit le développement
général des centres commerciaux lancé dans les années 1970. En 1986, la première galerie
commerciale s’installe en gare. Elle se trouve dans la gare de l’Est, dans le Xe arrondissement de
Paris. Le phénomène se poursuit dans les années 2000, sur le modèle des aéroports. Il s’agit d’abord
de rendre les gares attractives pour ensuite y faire venir de grandes enseignes.
« On a d'abord rendu les gares plus propres, plus sûres, plus claires. C'est comme ça qu'on a
attiré des commerces de centre-ville»,
Pascal Lupo22, directeur des gares et de
l'escale et président d'A2C23 2009
Les chantiers des gares du Nord, de l’Est et de Saint Lazare, terminés respectivement en 2002,
2008 et 2012 en sont les exemples les plus parlants. Dans la gare du Nord, la galerie marchande fait
plus de 7000m² et des enseignes telles que « Naf-Naf » qui vend des vêtements y réalisent même un
chiffre d’affaire supérieur à leur magasin des Champs Elysées24. A Saint Lazare, c’est 10 000m² de
boutiques et d’enseignes qui ont été installées dans l’ancienne salle des pas perdus25. La galerie
commerçante est ainsi devenue la plus importante dans une gare, passant devant celle de Saint
Pancras à Londres qui est un véritable symbole de la gare commerçante.
Les gares majeures, situées à Paris et dans les plus grandes villes de province, deviennent ainsi de
véritables « centres commerciaux » pour voyageurs en transit, mais pas seulement. Il ne s’agit plus
de répondre aux besoins primaires du voyageur qui attend (buvette, restauration) ou d’égayer son
voyage (presse, livres) mais bien de permettre au voyageur en transit de valoriser son temps
d’attente et de profiter de son passage pour le faire consommer, comme dans n’importe quel autre
espace de vente, en lui proposant les services et commerces qui pourraient l’intéresser sans avoir
besoin de sortir de la gare et d’attirer vers la gare un public extérieur.
21 Filiale d’Hachette Service Distribution rachetée par Lagardère Services
22 Extrait de l’article « Gares de marchandises », Libération du 3 avril 2009 de Julia Tissier ;
http://next.liberation.fr/next/2009/04/03/gares-de-marchandises_559181; consulté en juin 2014.
23 Filiale de la SNCF chargée de la valorisation commerciale des gares
24 Extrait de l’article « Gares de marchandises », Libération du 3 avril 2009 de Julia Tissier ;
http://next.liberation.fr/next/2009/04/03/gares-de-marchandises_559181; consulté en juin 2014.
25 BUSALB Aubin, « En un an, la gare Saint-Lazare est devenue un temple de la consommation », pour Mobilicités, 2013
http://www.mobilicites.com/011-1970-En-un-an-la-gare-Saint-Lazare-est-devenue-un-temple-de-la-consommation.html;
consulté en juin 2014.
- 23
-
Chapitre I
Cela explique, l’implantation, de très nombreuses boutiques, identiques à toutes celles qu’on peut
trouver ailleurs. Leur choix n’est plus guidé par le type d’usagers, voyageurs ferroviaires, mais bien
par le flux traversé par l’espace et par l’aire de chalandise offerte.
Pour la rénovation de la galerie commerciale de Saint Lazare, les 450 000 voyageurs/ jours ont
évidemment compté mais également sa situation, proche du pôle Haussmann/ Opéra qui attire 37
millions de visiteurs par an et accueille 190 000 salariés. Selon Laurent Morel26, Saint Lazare est ainsi
devenue le centre commercial « le plus rentable de France » avec un chiffre d’affaire de 120M€ entre
mars 2012 et mars 2013 et une étude montre que 55% des voyageurs y réalisent au moins un achat
par passage en gare27.
L’implantation de commerces en gare est ainsi une véritable opportunité pour le gestionnaire de
gare. Il s’agit en effet, pour le propriétaire du bâtiment, de valoriser, en les louant, des espaces
immobiliers traversés par un nombre très important de voyageurs par jour, situé au cœur des
grandes agglomérations et avec des coûts d’entretien très élevé. Pour la SNCF, il s’agit d’un véritable
enjeu commercial auquel une filiale, A2C, est entièrement dédiée. Elle est en effet en charge de la
gestion des espaces commerciaux en gares et met en œuvre une réelle stratégie de développement.
« Les gares sont des pôles d'attraction exceptionnels : avec 2 milliards de voyageurs par an
utilisant le réseau SNCF, elles sont autant, voire plus, fréquentées que certains grands centres
commerciaux, et sont ainsi de véritables espaces d'achats. Et cette réalité ne va qu'en
s'intensifiant, les gares accueillant de plus en plus de voyageurs d'une année sur l'autre (…)
Chaque année c'est le même constat : les français ne veulent plus perdre de temps ni
d'argent. Et cela s'en ressent dans leur mode de consommation: entre la hausse du prix de
l'essence et le rejet des "samedi après-midi courses", ils préfèrent les commerces de proximité
en centre-ville aux hypermarchés et autres centres commerciaux périphériques. La
conséquence indirecte de ces changements structurels, c'est que les gares deviennent de
vrais espaces stratégiques pour les commerces de demain. »
Extraits du site internet d’A2C à destinations
des commerçants voulant travailler en gares28

Espaces de vente ou lieux de vie ?
Lorsqu’il s’agit d’importants pôles d’échanges, fortement fréquentés, les espaces de transit
semblent alors particulièrement rentables pour les commerçants. Marion Tillous29 explique pourtant
que les modes de consommation ne sont pas les mêmes dans les pôles d’échange que dans des
26 Président du directoire de Klépierre société ayant investi dans rénovation de la gare de Saint-Lazare à hauteur de 160
millions d'euros
27 BUSALB Aubin, 2013, op. cit
28 Site commercial d’A2C ;
http://www.a2c-sncf.com/la-gare-territoire-de-commerces/pourquoi-simplanter-en-gare;
consulté en juin 2014
29 TILLOUS Marion et al. « Consommer dans le métro, une question d'engagement dans le temps et l'espace », Espaces et
sociétés n° 135, 2008.
- 24
-
Chapitre I
espaces commerciaux habituels et qu’ils sont fortement influencés par l’environnement. En effet, si
on retrouve des pratiques présentes dans les espaces commerciaux urbains classiques ceux-ci
prennent une importance particulière dans les pôles d’échanges. Dans un pôle d’échanges, les
comportements impulsifs (faim par exemple) et les commerces qui y répondent (snack, presse, etc.)
sont plus nombreux. Marion Tillous explique néanmoins que la réponse à cette impulsion dépend de
l’environnement et qu’« Au-delà de la présence des commerces, c’est l’aisance permise par les lieux
qui fonde les comportements de consommation. La luminosité, la propreté perçue, le sentiment de
sécurité, la générosité des espaces sont autant de facteurs décisifs dans la manière de s’engager dans
un pôle d’échanges et d’y adopter un comportement de consommation. En conséquence, la
rentabilité des commerces situés dans des pôles d’échanges ne peut être réduite à une fonction du
volume des flux de personnes-passants, mais se compose à partir de l’interaction entre les attributs
des lieux et ceux des personnes. »
Le bon fonctionnement des commerces et l’attrait de la gare, ne peuvent donc pas se réduire à un
nombre de voyageurs par jour, ni même à une situation commerciale intéressante. Le lieu, le
bâtiment voyageur doit être aménagé pour être agréable, non perçu comme une contrainte et
surtout permettre une facilité d’appréhension des déplacements. L’aspect « commercial » de la gare
ne doit pas faire oublier qu’il s’agit avant tout d’un lieu de transport. Etienne Riot30 explique ainsi,
que les gestionnaires de gares sont soumis à une double contrainte et qu’ils doivent à la fois
« assurer la rentabilité de l’espace tout en maintenant un niveau de service nécessaire que peuvent
attendre les usagers ».
De la même façon, Fabienne Keller rappelle que cette fonction de production de l’espace ne doit
pas devenir le cœur même de la gare.
« Il n’y a rien de mieux qu’un commerce, parce que c’est propre, animé et il y a quelqu’un
dedans. Donc, dans une gare, avoir des commerces, c’est de manière assez automatique,
apporter de la sécurité, apporter de l’apaisement, parce que du coup, quand vous êtes dans
une boutique à flâner, ça baisse la pression, ça apporte du service, […] ça change l’ambiance.
[…] Toute la question c’est l’équilibre […] Les commerces c’est très utile mais une gare n’est
pas un grand centre commercial. Il faut trouver un équilibre avec des espaces où il n’y a rien,
des espaces avec des services publics, et puis des espaces commerciaux. Les commerces sont
aussi de la ville, je ne parle pas des centres commerciaux mais bien des commerces comme
ceux qu’on trouve en pied d’immeuble, la baguette, le paquet de cigarette etc., le commerce
c’est aussi la normalité, c’est aussi la ville.» 31
Rapport Keller
30 RIOT Etienne, « Vers des gares internationales standardisées ? » dans Journées d'études urbaines « DES MÉTROPOLES
HORS-SOL ? La déterritorialisation de la production de l'urbain en question », Lyon, 2011.
31 Sénatrice du Bas-Rhin, auteur en 2009 d’un rapport ministériel sur les gares, dans un entretien à Etienne Riot (op. cit)
- 25
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Chapitre I
Il s’agit alors plus, de faire des gares, des lieux de vie à part entière dans lesquels les commerces
auraient leur rôle à jouer, qu’un véritable centre commercial, de faire des grandes gares, des
centralités de passage dans les agglomérations.

Après les commerces, les services entrent en gare
Pour SNCF-Gares & connexions, en charge de la gestion des gares, les services, sont un vecteur de
cette nouvelle approche des gares en tant que lieux de vie.
Dans un premier temps, ils permettent, comme compléments aux commerces, d’offrir aux
usagers des facilités pour réaliser leurs activités quotidiennes. Selon Bruno Marzloff32 « On a distendu
la ville, il faut maintenant aider les personnes qui sont loin et doivent se déplacer (…) l'enjeu du
transport [étant aujourd’hui essentiel] c'est autour du déplacement que vont s'organiser les
ressources». Les gares offrent alors un véritable potentiel aux services en tant que collecteur de
personnes en transit à qui ils peuvent faciliter la vie. Elles sont des espaces permettant au voyageur
de valoriser son temps d’attente, de faire des choses en temps masqué pendant ses déplacements.
S’implantent ainsi des laboratoires d’analyses médicales33 ou même des antennes de pôle emploi34
dans les gares. Comme l’explique Sylvie Latour « Le modèle de la gare d’aujourd’hui, ce serait plutôt
la place du village ou le coeur de la ville.» 35
Les services, et notamment les services innovants, sont également un vecteur de valorisation des
gares, et donc du train, et d’augmentation de leur attractivité. Dans les grandes gares, SNCF - Gares
& Connexions déploie ainsi d’importants moyens pour faire vivre ses espaces. On peut citer
l’installation de pianos en libre-service, l’opération « Art en gare » en 201336 ou le partenariat avec
l’office de tourisme de Nantes dans le cadre de la manifestation d’art contemporain « Le voyage à
Nantes ». Ces opérations, fortement portées et souvent renouvelées par la SNCF, montrent la
nécessité d’aller plus loin que simplement faciliter le déplacement des voyageurs, mais aussi de faire
des bâtiments voyageurs, des espaces vivants, agréables, chaleureux et reliés à son environnement.
De plus, comme l’évoque Mme Keller précédemment, la présence de commerces et services en
gare participe également à l’amélioration de l’ambiance de ces espaces et à une sécurisation pour les
usagers.
32 MARZLOFF Bruno, dans « Mobilités.net - Villes, Transports, Technologie face aux nouvelles mobilités », sous la direction
de Daniel KAPLAN et Hubert LAFONT, Librairie générale de droit et de jurisprudence, 2004.
33 Paris Gare de Lyon
34 Gare de Dreux (28)
35 Directrice générale de SNCF-Gares & Connexions en 2011, Extrait de l’article « Les gares se muent en centres
commerciaux»,
Le
Figaro
du
5
septembre
2011
de
Valérie
Collet,
Annelot
Huijgen ;
http://www.lefigaro.fr/societes/2011/09/05/04015-20110905ARTFIG00639-les-gares-se-muent-en-centrescommerciaux.php; consulté en juin 2014.
36 Expositions d’œuvres contemporaines dans une quarantaine de gares à l’occasion des 30 ans de Fonds Régionaux d’Art
Contemporain (FRAC)
- 26
-
Chapitre I
En regardant de plus près les grands projets commerciaux présentés précédemment, tel que celui
de la réhabilitation de Saint Lazare, on constate effectivement qu’ils ne se limitent pas à un objectif
commercial. Il s’est agi de valoriser la gare dans son ensemble, par une amélioration du bâtiment, de
son ambiance, de sa clarté, de sa propreté ou encore de son accessibilité.
Ce développement des grandes gares, et l’implantation de services et commerces à l’intérieur,
permet au voyageur d’investir positivement son temps d’attente, lui permettant de répondre en
temps masqué à certains de ses besoins mais également en lui offrant un lieu agréable à vivre et
sécurisé. C’est donc, en créant un lieu de vie, que la rénovation des grandes gares, leur permet de
devenir réellement des centralités. La gare devient alors une centralité urbaine par les services et les
commerces qu’elle offre, par le dynamisme qu’elle peut apporter à son quartier en plus d’être une
centralité de transport.
Si les implantations commerciales et de services ont été des vecteurs de développement des
« grandes gares » et participent à leur transformation en lieux de vie au cœur des villes. Elles sont
toutefois les seules à représenter une telle opportunité commerciale et leur modèle économique
n’est pas reproductible pour des gares petites ou moyennes.
- 27
-
Chapitre I
3.
Un déploiement des services envisagé sur des gares de plus
petites taille
Comme nous l’avons présenté, la transformation des gares principales du réseau français
s’opèrent peu à peu. Portées par l’implantation de commerces et de services, elles deviennent des
espaces vivants, animés et attractifs. A l’image de ce qui peut se faire dans les grandes gares, on voit
aujourd’hui naître une volonté de décliner ce phénomène et d’utiliser ces leviers sur des gares moins
importantes.

SNCF, une volonté de valoriser ses gares
Si pour les acteurs du ferroviaire, gestionnaires de gares, c’est-à-dire SNCF-Gares & Connexions et
A2C, l’enjeu de valorisation de bâtiments voyageurs est important, il reste ciblé sur les gares les plus
fréquentées. En effet, les contraintes de rentabilité font qu’aujourd’hui l’implantation d’un
commerce ne peut être durable qu’à partir d’un certain nombre de montés/descentes par jour. Ce
sont donc, les gares principales du réseau qui concentrent leur intérêt et leurs actions, qu’il s’agisse
d’implantation de commerces, de services ou d’animation de l’espace.
Toutefois, les gares majeures du réseau ne se limitent pas aux gares parisiennes ou à celles des
plus grandes agglomérations. Elles sont 220 à être classées en catégorie A, c’est-à-dire reconnues
d’intérêt national par le décret de 2012 dit décret « gares » sur les 36 000 gares françaises.
« La catégorie A regroupe les gares de voyageurs d’intérêt national. Ces gares sont celles dont
la fréquentation par des voyageurs des services nationaux et internationaux de voyageurs est
au moins égale à 250 000 voyageurs par an ou dont ces mêmes voyageurs représentent 100%
des voyageurs. »
Extrait du décret « gares » 37
La volonté de déclinaison de ce levier « commerces /services » à une échelle plus locale se
retrouve chez SNCF, et se traduit par la volonté d’étendre la gamme de services et commerces dans à
gares de plus petites tailles mais toujours d’intérêt national. On peut, par exemple, citer l’appel à
projet « La boutique du quotidien » dans certaines de ces gares de province comme celles d’Annecy
(74), Vierzon (18) ou Douai (59). Ces boutiques ont pour but d’associer dans un même espace :
restauration sur place ou à emporter, vente de produits de dépannage, presse, livres, tabac (en
fonction de la réglementation en vigueur) et d’autres services facilitateurs.38
37 Décret n° 2012-70 du 20 janvier 2012 relatif aux gares de voyageurs et aux autres infrastructures de services du réseau
ferroviaire
38 Appel à projet « La boutique du quotidien », A2C, 2012.
- 28
-
Chapitre I
« Gares & Connexions a lancé une consultation pour sélectionner un ou plusieurs opérateurs
afin de mettre en place une nouvelle offre conceptuelle, commerciale et de services dans
plusieurs gares sur le plan national. Cette offre devra satisfaire les principaux besoins des
voyageurs du quotidien, contribuer à l’animation de ces gares et permettre leur ouverture
sur le quartier en y attirant la clientèle de proximité. »
Appel à projet « La boutique du quotidien »39
Comme pour les gares principales présentées auparavant, le changement majeur se situe au
niveau de la clientèle visée par le commerce. Comme pour les galeries commerçantes de Saint
Lazare, il ne s’agit plus seulement de répondre aux attentes du voyageur, mais bien d’animer la gare
et d’y attirer une clientèle extérieure au train. Le nouveau commerce s’inscrit alors dans une fonction
de proximité. Il est en lien avec l’environnement immédiat de la gare et peut ainsi participer à la
création d’une centralité à part entière.
La SNCF cherche également à étendre au maximum l’offre de presse sur le réseau principal. Mais
pour autant, toutes les gares ne sont pas forcément rentables pour un commerce de ce type. Afin de
remédier à cette difficulté, l’appel d’offre pour la distribution de presse en gare, remporté à nouveau
par « Relay » en 2013, incluait la liste complète des gares où le commerce doit être présent (307
points de vente). Cela permet de maintenir certains points presse peu rentables en lissant les
difficultés financières possibles sur l’ensemble des points de vente.
Du point de vue de l’animation, les politiques nationales de SNCF - Gares & Connexions sont
également exclusivement tournées vers les gares d’intérêt national. Ils cherchent toutefois à étendre
leurs partenariats artistiques à des gares de moins grande taille. C’est le cas pour les pianos en libre
accès, qui se sont exportés de Montparnasse vers Rennes (35) Limoges (87) ou encore Epernay (51).
Le festival « Art en gares » de 2013 a lui touché 40 des 220 gares majeures. Mais des partenariats
avec les évènements locaux sont également mis en œuvre afin de faire pénétrer les évènements, et
ainsi l’extérieur, dans des gares plus petites et de catégories B ou C. C’est par exemple le cas du
festival de photographie « Alerte rouge » qui est venu s’installer dans le souterrain de la gare de
Montbard (21), pourtant classée « d’intérêt régional »40, en mai 2014.
Si l’intérêt de la SNCF, en tant que gestionnaire de gare, pour développer l’attractivité et la
centralité de ses bâtiments voyageurs via les commerces et services est bien réelle, elles se limitent
toutefois principalement aux gares majeures, dites de catégorie A. Et si elles sont 220, cela ne
représente malgré tout que 6% environ des 3600 gares qui maillent le territoire national. Dans les
gares de catégorie B ou C, la SNCF ne porte pas de projets mais elle peut les accompagner ou les
soutenir.
39 Appel à projet « La boutique du quotidien », A2C, 2012
40 Catégorie B
- 29
-
Chapitre I

Des acteurs locaux qui s’emparent de la question
Face à cette focalisation de la SCNF sur les gares urbaines, on observe une prise en main du
développement des plus petites gares, et notamment des gares périurbaines et TER par des acteurs
locaux et notamment les régions, autorités organisatrices du transport express régional.
Cette volonté d’agir sur le développement du rail et notamment du TER, afin de répondre aux
enjeux du développement durable s’est d’abord traduite par une volonté de renforcer l’urbanisation
aux abords des gares.
On a ainsi vu apparaître de nombreuses études sur les possibilités de développement de la ville
autour des gares, d’un point de vue foncier, portées par les communes ou les services de l’Etat41. En
parallèle de ces expérimentations se sont développés des projets de recherche et des réflexions sur
les « quartiers de gare » dans leur ensemble tels que « POPSU 2 »42 ou « Bahn-ville »43. Ces réflexions
plus globales ont permis de replacer le train dans son environnement. L’implantation des services et
commerces, dans ces espaces stratégiques, vient pleinement s’inscrire dans cette perspective
d’urbanisme tourné vers le rail et on peut envisager que l’implantation d’une offre peut contribuer à
faire des gares, même petites, des lieux de centralité.
Au vu des projets observés dans les grandes gares internationales, et des compétences que la
régionalisation leur a offert, les régions commencent à s’emparer de la question du développement
des commerces et services dans les gares périurbaines où elles exploitent le TER. En effet, depuis le
1er janvier 2002 et la loi SRU44, les régions sont Autorités Organisatrices des Transports (AOT)
régionaux, et donc en charge du service TER (Transports Express Régionaux). On a pu observer un
très important travail d’appropriation de leur part depuis cette délégation de service de la part de
l’Etat. Cela se traduit notamment par l’achat du matériel roulant, et l’investissement pour l’entretien
de l’infrastructure ferroviaire, normalement dévolue à RFF, afin de permettre une amélioration de la
qualité du service (diminution des temps de trajet, augmentation des fréquences, diminution des
retards, etc.)
La volonté de travailler sur les gares vient aujourd’hui poursuivre le travail de valorisation et
d’amélioration du service TER et du confort des voyageurs. Il s’agit, pour elle, de chercher à valoriser
ce mode de transport mais également de répondre aux attentes de leur clientèle et de lui offrir plus
41 Etude de la DDT 38 sur les possibilités foncières de développement urbain autour du Sillon Alpin Sud
42 Plate-forme d'observation des projets et stratégies urbaines ;
Programme de recherche-action mettant en partenariat des villes et des chercheurs dont « Gares et pôles d'échanges »
est l’un des 5 thèmes de la seconde phase du projet, lancée en 2010
43 Projet franco-allemand de recherche-action qui vise à promouvoir « un urbanisme orienté vers le rail »
44 Loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains
- 30
-
Chapitre I
de confort. Cela répondrait à une demande des voyageurs puisqu’un sondage45, réalisé auprès des
voyageurs franciliens, estime ainsi que 89% des usagers des transports en commun déclarent que
plus de commerces et services en gare « changerait leur façon de vivre au quotidien ».
Une expérimentation a été lancée sur ce sujet en 2010 par la 27ème région46 afin de réfléchir à
l’avenir des gares rurales et aux rôles que les services peuvent y jouer. Il s’agissait d’une résidence
dans la gare de Corbigny ponctuée d’expérimentations par des designers de services47.
Plusieurs régions48 ont également développé, en parallèle de ce projet, des études et des
réflexions prospectives sur le sujet. On peut notamment citer la région Alsace qui a effectué un
important travail de recensement de l’offre disponible et des attentes des usagers afin de pouvoir y
adapter au mieux sa politique future.49
Le développement des services et commerces dans les gares TER est donc un sujet de
questionnements et de réflexions, actuel, pour les acteurs du ferroviaires, qu’ils soient institutionnels
ou locaux et apparait comme un vecteur de développement du TER et des quartiers de gares. Se pose
alors la question de savoir comment ce développement des gares périurbaines et TER, à l’image de
ce qui se fait dans les gares centrales, peut être mis en œuvre dans des contextes, notamment
économique, très différents.
45 Sondage CSA effectué pour SNCF-Gares & Connexions sur un panel de voyageurs franciliens, mai 2014 ;
http://www.sncf.com/fr/presse/article/158412-gares-quotidien-enquete-csa; consulté en juin 2014.)
46 La 27ème région est une association, liée à l’Association des Régions de France. Elle en est le laboratoire de
transformations publiques
47 La 27ème Région, « Corbigny, la gare rurale de demain - résidence n°11 - immersion créative en pays corbigeois », janvier
201.
48 Notamment les régions Rhône-Alpes, Picardie, Bretagne et Alsace
49 Etude en cours menée par le conseil Régional d’Alsace
- 31
-
Chapitre II
Le déploiement des services
dans les gares rhônalpines :
politique régionale et réalité de terrain
- 32 -
Chapitre II
On commence à observer une volonté des acteurs du ferroviaire d'utiliser le levier des commerces
et services pour développer et valoriser leurs gares TER. Afin de mieux comprendre comment peut se
décliner cette utilisation des commerces et services pour valoriser les gares périurbaines et
développer l'utilisation du train, nous avons choisi de mener une enquête plus approfondie sur
certaines de ces gares périurbaines.
Les conseils régionaux étant les autorités organisatrices du TER, les régions sont aujourd'hui, les
fers de lance de cette politique dans les gares TER, rôle qu’a conforté la loi MAPAM50 les désignant
comme chef de file des collectivités sur l’intermodalité. Le périmètre régional nous est donc apparu
comme particulièrement pertinent comme échelle d’analyse des stratégies et des discours. Le choix
d’une échelle régionale nous permet ainsi un contact avec les institutionnels en charge des services
et commerces en gares, à cette échelle: SNCF-Proximités, SNCF - Gares et Connexions, direction des
transports du conseil régional.
Nous avons retenu la région Rhône-Alpes car elle est la première région ferroviaire française (hors
Ile de France) et qu’elle porte une politique de développement du TER et des services à la mobilité
associés depuis plusieurs mandats.
50 LOI n°2014-58 du 27 janvier 2014 sur la modernisation de l'action publique territoriale et l'affirmation des métropoles
- 33
-
Chapitre II
1. Une volonté régionale de développer les services pour
valoriser le TER
Pour les régions, le développement du TER, au vu de leurs titre d’AOT du TER, est leur entrée
première pour répondre aux objectifs nationaux présentés dans le chapitre I. Mais il répond aussi à
une volonté des régions d’aller plus loin dans l’offre de services et de commerces en gare pour
améliorer le confort de ses usagers du train, en attirer de nouveaux et valoriser l’image des gares.

Deux chantiers avancés : les services à la mobilité et la rénovation des gares
Le conseil régional de Rhône- Alpes explique clairement que les services à destination des usagers
du train sont une de leurs priorités.
« On réfléchit aujourd’hui aux services qu’on peut offrir à nos voyageurs, dans les petites
gares on regarde quels services on peut proposer et quel va être le devenir du patrimoine
aussi »
Membres de l’unité « Gares » - Direction des
transports du conseil régional Rhône-Alpes
En effet, cela fait maintenant plus de 10 ans que les régions sont autorités organisatrices du
transport ferroviaire régional de proximité. Dans un premier temps, elles se sont concentrées sur le
transport ferroviaire en lui-même et ont travaillé à une amélioration de la desserte et des services à
la mobilité associés. Elles ont retravaillé les dessertes et participé parfois aux investissements de
rénovation du réseau, normalement dévolu à RFF via la mise en place des contrats de projet EtatRégion. Elles ont également cherché à favoriser le report modal vers le train pour augmenter
l’utilisation du TER. Cela s’est traduit par la mise en place d’une offre complémentaire de services à la
mobilité qui permet de faciliter le rabattement des habitants de l’aire de chalandise de la gare vers
celle-ci, en mettant notamment en place des itinéraires vélos en partenariat avec les communes, en
participant à la création de parking relais, mais aussi en équipant tous les points d’arrêts de
stationnement vélos sécurisés.
Les gares étant les points d’entrée sur le réseau, elles ont également fait l’objet d’une attention
toute particulière de la part du conseil régional. Après avoir renforcé le service à la mobilité via
l’amélioration de l’offre TER, le conseil régional s’est donc attaqué aux « services de bases » offert
aux usagers en gares. En effet, si c’est bien SNCF-Gares & Connexions qui est en charge de la gestion
des bâtiments voyageurs, le décret « gares »51 ne le contraint qu’à assurer une prestation de base
composée notamment d’une information voyageur « papier » et d’un espace d’attente (par
forcément abrité ni même couvert). La Région Rhône-Alpes a ainsi développé un service de base
51 Décret n°2012-70 du 20 janvier 2012, relatif aux gares de voyageurs et aux autres infrastructures de services du réseau
ferroviaire
- 34
-
Chapitre II
bien supérieur à celui de SNCF - Gares & Connexions dans ses gares. Elle a été pionnière dans le
domaine, en finançant, pour le TER, l’implantation de l’affichage dynamique au sein de toutes les
points d’arrêt (gares et
points d’arrêts non gérés52) et l’installation de nombreux abris afin
d’améliorer l’information et le confort des voyageurs dans les gares53.
Durant les années 2000, le conseil régional Rhône-Alpes a également mis en place une forte
politique d’incitation à la remise en état des gares tombant à l’abandon. On peut même aller jusqu’à
parler de véritable plan de rénovation des petites gares TER.
«Avant la réduction des budgets, on n’hésitait pas à aller taper à la porte des communes
quand on voyait qu’il y avait une gare à l’abandon»
Membres de l’unité « Gares » - Direction des
transports du conseil régional Rhône-Alpes
Celle-ci s’est traduite par la mise en place de financements spécifiques afin d’aider les communes
ou les intercommunalités à acquérir et/ou rénover les bâtiments voyageurs, notamment dans le
cadre des Contrats de Plan Etat-Région. Ces gares étant principalement situées dans des petites
communes, la région leur offrait également un appui technique, via sa direction des transports, pour
la mise en place du projet. Enfin, afin que celui-ci ne se limite pas à l’enceinte de la gare mais puisse
réellement s’intégrer dans une rénovation de quartier, les subventions de la direction des transports
étaient couplées à d’autres types d’aides (pour la réalisation d’espaces publics par exemple). La
restriction des budgets des collectivités territoriales fait que le conseil régional dispose aujourd’hui
de moins d’argent à investir dans ce domaine mais continue à apporter son soutien technique en cas
de besoin.

Aller plus loin avec les services aux usagers
Après une très forte appropriation de la régionalisation, maintenant que la prestation minimale
(services à la mobilité et services de bases) est assurée, on constate une volonté du conseil régional
d’aller encore plus loin dans la valorisation du TER, et par là même, des gares. La région Rhône-Alpes
a donc commencé à se pencher sur la question de l’implantation des services « autres » et des
commerces dans les gares TER, sur l’exemple des grandes gares déjà évoquées.
Dès 2006, le conseil régional a en effet fait apparaître une volonté de développer des services en
gare dans son Schéma Régional des Services de Transports sous la forme d’une action à mener dans
les gares TER.
52 Point d’arrêt du train, sans présence humaine de la SNCF
53 Entretien avec le directeur de l’exploitation chez SNCF-Gares et Connexions, Agence Centre-Est et un membre de l’unité
« Gares » de la direction des transports du conseil régional Rhône-Alpes
- 35
-
Chapitre II
DEVELOPPER LES SERVICES EN GARE
S’inscrit dans l’orientation:
« II. Faire fonctionner pleinement l’intermodalité et la complémentarité des services »
Participe à la finalité:
« 5. Un meilleur service grâce à un réseau fonctionnel de gares et de pôles d’échanges »
Contribue à l’objectif:
« 16. Adapter et hiérarchiser les services en gare »
La Région et la SNCF ont défini 10 composantes principales des services en gare intégrant des
notions de fonctionnement et d’équipement. Ces composantes font l’objet d’un suivi dans la
convention d’exploitation (animation et lieu de vie, image et inscription dans le territoire,
prévention et sûreté, accessibilité, intermodalité, confort, accueil, information, propreté,
distribution-validation). La Région décide du niveau des services en gare affectés au TER, sur
la base d’un inventaire des services en gare. Elle définit les objectifs de développement et les
modalités d’évolution des services en gare.
SRST Région Rhône-Alpes54
La mise en place de commerces et services « innovants » dans les gares TER permet de répondre à
deux enjeux principaux dans le développement de la politique TER de la région. Le premier est de
faire des gares périurbaines, qui ne sont desservies que par le TER, de véritables portes d’entrée sur
le réseau ferré régional. Il s’agit donc de valoriser le TER en améliorant son image, de rendre le train
visible sur le territoire. Pour cela, les gares doivent devenir plus attractives mais aussi pratiques et
dynamiques, et ne plus être entaché de l’image de bâtiments fermés et « glauques » à côté desquels
on attend debout sous la pluie pour prendre le train.
Le second est de réussir à rendre les trajets confortables pour les usagers. En effet, une fois qu’on
a réussi à faire venir les usagers potentiels jusqu’à la gare et à les inciter à prendre le train, il faut leur
offrir de bonnes conditions de voyage afin que le trajet ne soit pas perçu comme une trop forte
contrainte, et compenser ainsi le peu de souplesse que peut offrir le train face à la voiture
individuelle par exemple. La région cherche donc à offrir de bonnes conditions de voyage aux usagers
et à faciliter leurs trajets en améliorant l’information « voyageurs » et en leur permettant d’optimiser
et d’utiliser leurs temps d’attente. La mise en place de services et commerces vient donc pleinement
répondre à cette demande en offrant aux usagers la possibilité de réaliser, dans la gare, des actions
qu’ils étaient jusque-là obligés de réaliser à un autre moment et en un autre lieu, en s’arrêtant sur
leur trajet entre leur domicile et la gare par exemple pour leurs enfants, acheter du pain ou un
journal, ou encore faire une analyse médicale.
54 Extrait de la fiche action n°7 - Bilan du Suivi 2009 du SRTS de la région
http://www.srt.rhonealpes.fr/documents/Fiche%20action%20BILAN09_7.pdf; consulté en juin 2014.
- 36
-
Rhône-Alpes ;
Chapitre II

Quels services ?
Afin de s’emparer de ce nouveau champ qui s’ouvre à lui sur les commerces et services en gares,
le conseil régional construit aujourd’hui sa politique et accompagne au fur et à mesure les projets qui
peuvent s’adresser à lui.
Le développement de sa politique passe par la mise en place d’une réflexion partenariale avec
SNCF-Gares & Connexions, à deux niveaux.
Le premier est une réflexion sur le service minimal demandé à SNCF - Gares & Connexions par la
région. En effet, si la réglementation, via le décret « gares », impose un minimum à SNCF-Gares &
Connexions, tout transporteur ferroviaire utilisant une gare peut demander à ce que le service offert
dans celle-ci soit plus important, moyennant une participation financière. Afin d’améliorer le confort
des usagers en gares, une réflexion commune est donc en cours pour définir un niveau d’exigence à
atteindre en Rhône-Alpes dans le cadre de la nouvelle convention de gestion des gares avec SNCFGares & Connexions.
Après une première étape de réflexions et d’échanges, une rénovation des gares de
Charbonnières-les-bains et de la Verpillère a été réalisée. Elle a pour but de servir d’expérimentation
et de base de réflexion aux autres projets de rénovation de gares TER par SNCF - Gares &
Connexions. Fort de ces premières réalisations, le conseil régional travaille aujourd’hui à la création
d’un guide d’aménagement des gares qui prendrait en compte le service de base à assurer et le
confort des usagers.
4 - Aménagement de la gare de la Verpillère (69)
- 37
-
Chapitre II
Dans le cadre de la mise à jour de son Schéma Régional des Services de Transport (SRST), le
conseil régional travaille également à la création d’une typologie de gares intégrant le niveau de
services proposé, en fonction de son positionnement sur le territoire. En effet, aujourd’hui la seule
typologie qui existe est celle de la SNCF qui classe les gares en 3 niveaux (d’intérêt national, régional
ou local) en fonction du type de trains qui s’y arrêtent et en fonction du nombre de voyageurs qu’elle
accueille. Cette typologie, par niveau de voyageur, définie les devoirs de SNCF-Gares & Connexions
vis-à-vis des transporteurs ferroviaires le niveau de confort et de services (à la mobilité et autres) elle
doit offrir en gare mais ne prend absolument pas en compte le contexte local et l’environnement de
celle-ci. La fréquentation de la gare lui permet de décider si un guichet avec un agent d’information
doit être installé, quels seront ses horaires et même tout simplement s’il est intéressant et rentable
de maintenir un bâtiment voyageur ouvert. Pour la direction des transports du conseil régional
Rhône-Alpes, la réflexion ne peut pas se limiter à un nombre de voyageurs en gare et cette typologie
n’est pas pertinente dans le cadre de leur politique. Il leur est nécessaire de penser les gares d’une
façon plus globale, intégrées dans un réseau et dans un territoire. En effet, si la gare reçoit peu de
voyageurs, mais qu’elle est l’une des plus importantes de la ligne , qu’elle se situe dans une petite
commune, et que celle-ci est un « pôle rural », une centralité pour le territoire, elle peut proposer
des services supérieurs à une autre gare avec la même fréquentation mais n’ayant pas cette position
de centralité. Pour le conseil régional, il est nécessaire qu’elle propose alors un guichet et un espace
d’attente abrité. Le conseil régional est donc en cours de création d’une autre typologie est destinée
à être intégrée au futur SRST et qui prendrait en compte l’environnement des gares dans la politique
de transport à venir.
Le deuxième niveau de ce travail sur les services en gare, consiste en la participation au
développement de services innovants en gare, destinés à faciliter la vie des usagers du train et à
dynamiser les gares en en faisant des lieux vivants, multifonctionnels dans les villes. Cette mise en
place de services aux usagers du train est clairement affichée dans la politique commerciale du TER
Rhône-Alpes.
« Des gares et des trains innovants pour faciliter votre mobilité : TER fait tout pour améliorer
les services dont vous avez besoin… et invente ceux de demain. Découvrez les dernières
innovations mises en place dans votre région »
Extrait du site internet TER Rhône-Alpes55
Pourtant cette politique reste relativement restreinte. Seules 4 politiques, d’un niveau national
sont, en effet portée et relayée en Rhône-Alpes, par le conseil régional et son délégataire SNCF-
55 Site internet TER Rhône-Alpes, rubrique « Pendant mon déplacement : Services à bord ou en gare » ; http://www.tersncf.com/Regions/rhone_alpes/Fr/Se_deplacer_en_TER/Pendant_mon_voyage/Services_physiques_a_bord_ou_en_gare/De
fault.aspx ; consulté en juin 2014
- 38
-
Chapitre II
Proximités56 : Le service « TER + vélo » qui consiste principalement en l’installation de consignes à
vélo en gares, le « panier fraîcheur » qui permet le retrait de panier de légumes frais, l’information
voyageur sur le trafic ferroviaire et les points TER.
Parmi ces 4 politiques, deux sont toutefois ciblées sur le cœur de métier d’SNCF-Proximités et du
TER, c’est-à-dire qu’il s’agit de services à la mobilité. S’il est vrai qu’il s’agit effectivement du
développement d’une politique de services supérieure à celle fournie par SNCF-Gares & Connexions,
il ne s’agit néanmoins pas d’une politique de développement commerciale et de services en tant que
telle. Les deux autres politiques sont, quant à elles, effectivement orientées vers la mise en place de
57
services innovants. L’appel à projet « points TER »
a été lancé conjointement en 2009 pour
proposer des initiatives commerciales ou associatives destinées à dynamiser 14 gares de la région.
Les « points TER » sont des commerces de petite restauration labellisés par la SNCF, qui offrent en
plus des petits services, tels que le prêt de parapluies, le Wi-Fi, les appels d’urgence et l’affichage des
informations TER et des petites annonces locales, en échange d’un petit soutien financier de la SNCF.
Le système de paniers fraicheur a également été soutenu et installé dans certaines gares de la
région (Lozanne, Lyon Jean Macé, Annemasse, Grenoble ou encore Chambéry). Il s’agit de paniers de
légumes distribués par des producteurs locaux en gare via des accords avec les chambres
d’agriculture. L’usager commande son panier sur internet ou s’abonne directement auprès
producteur. Un jour par semaine, ce dernier vient livrer les paniers en gare et l’usager n’a plus qu’à
récupérer le sien à sa descente du train.
Si, pour l’instant, ces politiques de développement des services et des commerces sont récentes
et encore en cours, on constate une volonté forte de la région Rhône-Alpes de s’engager sur cette
voie.
56 Pour la répartition des compétences voir la partie 3 de ce chapitre II
57 Appel à projet de 2009, porté par SNCF-Proximités et la région Rhône-Alpes sur 14 gares du territoire :
Die, Luc-en-Diois, Saint-Chamond, Villefranche-sur-Saône, Saint-Etienne-Carnot, Belleville-sur-Saône, la Tour du Pin, Chassesur-Rhône, Estressin, Thonon-les-Bains, Saint-Gervais-les-Bains-le-Fayet, Voiron, Roanne et Lyon Saint-Paul.
- 39
-
Chapitre II
2. Une réalité du terrain éloignée des discours
Cette volonté affichée de la région de développer les services et commerces dans les gares TER,
est une ambition très récente et aujourd’hui éloignée de la réalité observée sur le terrain.

Des services et commerces très peu implantés
Dans un premier temps on constate que de nombreux bâtiments voyageurs sont aujourd’hui
fermés et que le conseil régional cherche à offrir un service de base amélioré aux usagers du TER en
s’intéressant notamment à ces bâtiments mis de côté.
Plus encore, lorsqu’on fait le panorama des services et commerces qui existent dans les gares de
Rhône-Alpes58 , on remarque tout d’abord que ceux-ci sont peu nombreux. En effet, si on laisse de
côté les points presse « Relay » qui font partie d’un appel d’offre national, on arrive à une trentaine
de gares qui offrent un service marchand spécifique complémentaire aux usagers sur environ 260
gares dans la région. Le deuxième constat est que la plupart des autres services proposés sont des
services communs, des services à la mobilité par exemple (espaces dédiés au covoiturage, pôles
d’échanges multimodaux par exemple) qui sont, bien évidemment, également en développement
mais que nous laisserons de côté pour cette étude. Les autres services ou commerces, plus innovants
comme les paniers fraicheurs, les points TER, les PIMMS, ou les crèches, sont quant à eux très peu
nombreux.
On peut citer, par exemple, la crèche implantée dans le bâtiment voyageur de la gare de Roanne
(42) dans le cadre de l’appel à projet de revitalisation de gares en 2009. Cette crèche ouverte en
2011 est composée de 9 berceaux et a été financée par les collectivités locales, la CAF mais aussi la
SNCF. Elle a vocation à faciliter la garde de leurs enfants aux usagers pendulaires du TER et à limiter
leurs déplacements en leur permettant de laisser et de récupérer leurs enfants à l’endroit même où
ils prennent le train. Ce fut la première gare française équipée d’une crèche. D’autres projets de ce
type faisait également partie des propositions de dynamisation faites en 2009 (gare de SaintChamond dans la Loire par exemple) Suite à la mise en service de cette première crèche en gare, une
étude partenariale a été lancée par le Grand Lyon afin d’en implanter dans des gares de
l’agglomération lyonnaise59 , seule la gare de Villefranche sur Saône devrait rapidement voir son
projet aboutir.
58 Cf tableau en annexe n°2
59 Projet « Crèche en gares » porté par la mission temps et services innovant, Direction de la Prospective et du dialogue
Public du Grand Lyon - POPOVA Svetlana, « L’aménagement serviciel des gares est-il un avancement vers la Gare du Futur? »
Mémoire de Master 2, Université Pierre Mendès-France de Grenoble, Institut d’Urbanisme de Grenoble, 2009.
- 40
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Chapitre II
Les « points TER » sont également restent aujourd’hui très peu nombreux puisqu’ils ne sont
aujourd’hui implantés que dans 6 gares sur les 260 que compte la région60. Ce qui peut sembler
décevant puisque l’appel à projet portait sur 14 gares et ne devait être qu’une première étape du
déploiement, mais qu’il a été mis en côté en 2011. Les paniers fraîcheurs, quant à eux, sont présents
dans 14 gares61, même s’ils ne demandent aucun aménagement spécifique et qu’ils sont portés par la
chambre d’agriculture de Lyon. D’autres initiatives basées sur le même principe, comme le
partenariat TER/Toupargel, permettant de retirer ses courses de surgelés à la descente du train une
fois par semaine dans 4 gares de la région, n’ont, quant à elles, pas rencontré les attentes des
usagers. Lancé en 2009, ce partenariat semble continuer à exister puisqu’on trouve des flyers
présentant l’opération dans certaines gares concernées et que la livraison en gare est proposée à la
commande sur le site de Toupargel. Pour autant, les informations ne concordent pas toujours et
l’opération n’est pas relayée sur le site du TER Rhône-Alpes
Les PIMMS, Points Information Médiation Multi Services, sont eux des espaces de relais de
l’information et de médiation des services publics. Leurs équipes de médiateurs accompagnent les
personnes qui le désirent dans les démarches de la vie quotidienne (rédaction de lettres officielles,
informations sur l’ouverture d’un équipement public ou les modalités de facturation, conseils sur la
gestion du budget, etc.) et effectuent un service d’aide à la médiation entre usagers et services
publics ou grandes entreprises (impôts, EDF, la poste, etc.). Malgré une présence importante des
PIMMS dans la région Rhône-Alpes, par rapport au niveau national, et le fait que la SNCF soit une
entreprise partenaire, ils ne sont que deux à avoir été implantés dans des gares, à Donzère dans la
Drôme, Saint-Chamond dans la Loire et un troisième est en projet à Amplepuis dans le Rhône.
Les politiques récentes portées par le conseil régional et SNCF-Proximités sont pour l’instant peu
étendues sur le territoire et les projets restent aujourd’hui marginaux malgré une ambition politique
forte de la région.
On constate donc une importante différence entre le discours de promotion des commerces et
services innovants dans les gares TER et la réalité du terrain. Dans un premier temps, on peut penser
que si ces initiatives sont au cœur d’un fort discours marketing de la part de la région et sont même
parfois fortement médiatisées, comme la crèche de Roanne, leur implantation n’est tout de même
pas le cœur de métier de la direction régionale des transports. En effet, sa préoccupation principale
60 Tableau de recensement des points TER - disponible sur le site TER Rhône-Alpes ; http://telechargement.tersncf.com/Images/Rhone_Alpes/Tridion/nouveau_tableau_liste_gare_+_services_tcm-31-55439.pdf; consulté en juin 2014
61 Liste fournie sur le site de TER-Rhône Alpes ; http://www.ter-sncf.com/Regions/rhone_alpes/Fr/Se_deplacer_en_TER/
Avant_mon_voyage/Flash_actus/DetailsFlash_actus.aspx?URI=tcm%3a31-45836; consulté en juin 2014
- 41
-
Chapitre II
reste le service de mobilité offert par le train et ceux qui lui sont associés.62 Il ne leur consacre donc
qu’un investissement limité et ce sont souvent des offres qui concernent les services dits « de base »
et les services à la mobilité qui sont mises en place. Enfin, cette politique du conseil régional RhôneAlpes recette très récente63 et vient également expliquer le petit nombre de projets réalisés. Sur le
terrain, la politique du conseil régional pour les commerces et services innovants se traduit donc
pour le moment, plus par des expérimentations que par un véritable déploiement de commerces et
de services.

Une difficile adéquation avec les demandes des usagers du TER
On peut également se demander dans quelles mesures ces propositions viennent répondre aux
besoins de l’usager.
En effet, la difficulté d’implantation pérenne de commerces et services s’explique parfois par la
difficulté à faire fonctionner un commerce tout simplement. Que ce soit la direction régionale de
SNCF-Gares & Connexions ou la direction de transports de la région Rhône-Alpes, elles évoquent les
difficultés à assurer la viabilité économique d’un commerce en gare.
Après deux ans de fonctionnement, on constate par exemple que la crèche implantée dans la gare
TER de Roanne n’est pas un service utilisé par les usagers du TER. En effet, si elle leur était d’abord
destinée, et si, à dossier équivalent la commission d’attribution était chargée de privilégier les
parents abonnés du TER, elle est aujourd’hui principalement utilisée par des familles qui n’utilisent
pas le train64. Les places en crèches étant très peu nombreuses sur le territoire, elle a ainsi le même
fonctionnement que n’importe quel espace de garde d’enfant et sa localisation dans la gare
n’influence en rien sa clientèle.
La réalité d’un besoin auquel viendraient répondre ces commerces et services doit alors être
interrogée. Parmi les enquêtes de satisfaction auprès des usagers incluant la question des
commerces et services aux usagers en gare, il n’en existe pas sur le périmètre de Rhône-Alpes mais
nous avons pu avoir accès à celle de la région Alsace65 qui a interrogée plus de 3000 personnes en
2013. Il est intéressant de remarquer que, lors de cette enquête traitant des types de commerces et
services qui pourraient faciliter le quotidien des usagers et qu’il serait intéressant d’implanter dans
les gares TER de la région Alsace, si les usagers se positionnent massivement sur les services à
implantés dans les gares certains ont profité de la rubrique « commentaires libres » pour exprimer
62 Orientations général du Schéma Régional de Services de Transport, approuvé par le conseil régional Rhône-Alpes en
2006 ; http://www.srt.rhonealpes.fr/-Les-orientations-du-SRT-.html; consulté en juin 2014.
63 L’appel à projets points TER date de 2009, est n’est donc en place que depuis 5 ans
64 Information de la direction des transports du conseil régional Rhône-Alpes
65 Région Alsace, « La politique d’aménagement des gares de la région Alsace Mode d’emploi », 2014 (en cours)
- 42
-
Chapitre II
leur mécontentement de voir la SCNF se saisir de cette question. Ils ont exprimé que le service
ferroviaire est leur priorité et qu’il n’est pas, à ce jour, assez satisfaisant pour permettre de
s’intéresser au développement des commerces et services dans les gares.
« Je n’ai pas besoin de services complémentaires, le seul service que la SNCF doit nous rendre c’est
d’être à l’heure »
Extrait de l’enquête de la région Alsace – retour d’usager
Ces initiatives, si elles sont innovantes si les usagers y sont majoritairement favorables, elles ne
sont toutefois pas leur priorité. Le représentant régional de la fédération nationale des usagers des
transports (FNAUT) partage cette position.
« Je comprends bien que la SNCF veuille valoriser ses gares, y’a pas de souci là-dessus, mais
l’essentiel c’est que le service de gare soit assuré, si on peut faire plus tant mieux, mais une
gare doit d’abord rester une gare ! »
Représentant régional de la FNAUT
Enfin, l’usager du TER ne se comporte pas de la même façon qu’un usager de grandes lignes. Dans
le cas d’un long voyage, exceptionnel, en TGV, le voyageur arrive en avance à la gare pour ne pas
rater son train. Il attend et, est plus disposé à prendre un café, acheter de quoi agrémenter son
voyage ou même faire du shopping en attendant sa correspondance. Dans les gares TER
périurbaines, les comportements sont différents. Les usages sont des voyageurs pendulaires, ils
prennent chaque jour le même train sur le même quai. Ils arrivent donc quelques minutes66 avant le
départ de celui-ci et se contentent de traverser la gare sans s’y arrêter.
« On considère que le TGV, ce sont des clients grandes distances et que quand ils viennent en
gare ils viennent pas au dernier moment, parce qu’ils ont peur de rater un train longue
distance, ou parce qu’ils arrivent, ils vont y rester peut être un peu plus longtemps pour y
attendre une correspondance, ou… comparativement au périurbain, où lui c’est un habitué, il
arrive 2 minutes avant son train, le train part, et quand il arrive en gare il part tout de suite, il
rentre chez lui. C’est pour ça qu’on a peut-être des approches différentes. »
Directeur de l’exploitation - Agence Centre-Est
SNCF Gares & Connexions
Si les services et commerces semblent un vecteur de développement pertinent et fortement mis
en avant par le conseil régional de Rhône-Alpes, on constate que sur le terrain la réalité est bien
différente. Les projets réalisés sont très peu nombreux et menés à titre expérimental. Plus encore, ils
peinent parfois à trouver leur clientèle ou se développent sans lien avec la gare. Cela s’explique
notamment par une priorité des usagers du TER pour le service à la mobilité leur permettant de se
déplacer en un temps le plus restreint possible.
66 75% des usagers arrivent à la gare moins de 10 minutes avant le départ du train. Enquête du conseil régional d’Alsace
« Revitaliser les gares et favoriser leur accessibilité en mobilité alternative », 2014 (en cours)
- 43
-
Chapitre II
3. Une gestion des gares et de leur foncier très complexe
Plus que la difficulté à répondre aux attentes des usagers, la complexité de mise en œuvre des
projets est aujourd’hui un frein très fort à l’implantation de nouveaux projets de commerces et
services dans les gares et plus encore dans les gares TER.

Une répartition des compétences complexe
Dans un premier temps, la gestion du transport ferroviaire régional et la répartition de ses
compétences associées est elle-même très complexe.
Nous l’avons déjà évoqué, les régions sont les autorités organisatrices du transport ferroviaire
régional. Depuis la fin du processus de régionalisation en 2002, elles ont pris la suite de l’Etat. A ce
titre, ce sont elles qui gèrent le TER et qui définissent les politiques de desserte et les politiques
tarifaires du transport régional. Ce sont également elles qui achètent le matériel roulant (i.e. les
rames de train). Toutefois, ne disposant pas des moyens techniques, notamment en termes de
personnels pour faire circuler ce matériel roulant, elles en délèguent l’exploitation à la SNCF, via sa
branche « SNCF-Proximités » sous la marque TER. SNCF-Proximité devient alors délégataire de
service public pour la région qui le mandate et qui le finance. C’est donc la direction territoriale
correspondante de SNCF-Proximités qui est directement en charge de l’exploitation du TER.
Ce modèle est exactement le même pour les AOT urbaines. A Lyon, par exemple, c’est le Sytral qui
est AOT et qui définit la politique de transports en commun de l’agglomération. Toutefois,
l’exploitation du réseau est confiée à Keolis, délégataire de service public sous la marque TCL.
Pour ce qui est des gares, elles sont la propriété67 de la branche SNCF-Gares & Connexions du
groupe. Créée en 2009 pour gérer et développer les gares de voyageurs, elle en assure l’entretien, le
développement et offre un service minimal aux usagers. Elle a été pensée dans l’optique de
l’ouverture future à la concurrence du transport de passagers.
Elle est, en partie, financée par une redevance que verse chaque opérateur exploitant de
transport qui souhaite s’arrêter dans une gare. Elle est ainsi indirectement financée par la région : la
région rémunère la branche régionale de SNCF-Proximités pour qu’elle assure l’exploitation du
réseau, et la branche régionale de SNCF-Proximités rémunère SNCF-Gares & Connexions par une
redevance pour pouvoir utiliser ses gares. Et si, c’est bien SNCF qui détient la grande majorité de
l’exploitation ferroviaire française, on ne peut pas pour autant, considérer que ce n’est qu’un seul et
même transporteur : les lignes internationales (Eurostar, Lyria, Thello) sont ainsi des transporteurs à
67
D’un point de vue strictement juridique, c’est bien l’Etat français qui reste le propriétaire de gares mais, par un transfert
étendu de prérogatives, c’est SNCF-Gares & Connexions qui en assure la gestion et qui est en charge de toutes les
obligations du propriétaire (entretien du patrimoine, encaissement de loyers, mais également possibilité de vendre les
bâtiments voyageurs ou de les louer)
- 44
-
Chapitre II
part entière tout comme les différentes délégations régionales de SNCF-Proximités, via les TER des
différentes régions. Sur le Périmètre Rhône-Alpes Auvergne, on compte ainsi 18 transporteurs68.
SNCF-Gares & Connexions doit offrir un service minimum, appelé « prestation de base » dans ses
gares, identique pour chaque opérateur qui l’utilise. Toutefois, lorsqu’un transporteur est majoritaire
dans l’utilisation d’une gare, il peut commander des services supplémentaires à SNCF-Gares &
Connexions que cette dernière lui facture.
Le modèle est ici proche de celui d’un aéroport comme Roissy-Charles de Gaulle. Détenu par une
compagnie spécifique « Aéroports de Paris », il accueille toutes les compagnies aériennes moyennant
une redevance.
Pour compliquer encore les choses, certains bâtiments voyageurs ont parfois été vendus par la
SNCF. Si le train continue de s’arrêter à cet endroit, le bâtiment voyageurs ne fait plus partie du
dispositif ferroviaire et la « gare » correspond alors au point d’arrêt, appartenant à SNCF-Gares &
Connexions, qui est souvent réaménagé à proximité du bâtiment vendu.
Les compétences de gestions du TER et des gares sont donc très complexes et impliquent une
multitude d’acteurs.

Une multitude de propriétaires fonciers et immobiliers
De plus, si SNCF-Gares & Connexions est bien le propriétaire des gares et, en charge de leur
gestion sur tout le territoire national, la répartition du foncier autour de celles-ci n’est pas si évident.
C’est Réseau Ferré de France (RFF) qui est propriétaires des voies de chemin de fer et du foncier
associé depuis sa création par scission avec la SNCF en 1997. Il a, en effet, été désigné propriétaire
des infrastructures et de tous biens non affectés à l’usage du service de transport au moment de sa
création en 1997, SNCF restant propriétaire des biens affectés à l’usage du service de transport et
donc des gares.
Aux alentours des gares, la question de savoir qui est propriétaire devient alors majeure pour
savoir à qui s’adresser dans le cadre de la mise en œuvre d’un projet. Le CERTU, dans sa fiche sur le
foncier ferroviaire69 à destination des collectivités explique qu’ « En première approximation, on peut
considérer que:
• RFF est propriétaire du « cœur de la gare » (par référence au sens premier de « gare » –
permettre aux trains de se « garer » et donc de s’éviter pendant le débarquement et
l’embarquement des passagers), c’est-à-dire des voies, des quais et des accès aux quais;
68 Entretien avec le directeur de l’exploitation - SNCF - Gares et Connexions, agence Centre -Est
69 CERTU « Le foncier ferroviaire», Stratégies foncières aux abords des gares TER- Fiche n°3, 2013.
- 45
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Chapitre II
• Gares & Connexions possède et gère ce que l’on entend par « gare » dans le langage
courant, c’est-à-dire le bâtiment-voyageurs et les quais transversaux.
Mais RFF est également propriétaire de toutes installations techniques permettant le bon
fonctionnement des infrastructures (aiguillage, poste de contrôle, …) même si celles-ci se trouvent
dans les bâtiments voyageurs, et des ouvrages de mise en sécurité des infrastructures de transport
(souterrains, passerelles, etc.). Les biens non destinés à l’usage du service de transport comportent
également les anciennes halles de marchandises, souvent proches des gares. On trouve également, à
proximité immédiate des gares, des emprises foncières ou immobilières appartenant à d’autres
branches du groupe SNCF (garages à rames, entrepôts de frets, etc.). On peut donc considérer les
gares « comme de véritables ‘’copropriétés’’, avec un foncier morcelé entre RFF et les différentes
entités du groupe SNCF »70
À cela vient s’ajouter du foncier qui n’appartenait pas à SNCF en 1997 et qui est aujourd’hui
propriété des communes, intercommunalités (parvis de la gare, espaces de stationnement) ou qui
appartient à des personnes privées.
5 - Partage du foncier sur un site ferroviaire (source - publication CERTU)
70
CERTU, 2013, op. cit.
- 46
-
Chapitre II

Des acteurs toujours plus nombreux …
Les acteurs du ferroviaires sont donc aujourd’hui très nombreux, même à l’échelle régionale ce
qui rend la mise en œuvre des projets difficile.
En effet, la gouvernance des projets d’aménagement et de valorisation des gares nécessite des
accords entre acteurs institutionnels en charge, SNCF-Gares & Connexions, SCNF-Proximité et le
conseil régional Rhône-Alpes, dans le cas qui nous intéresse. Et s’il semble, dans un premier temps,
que les rôles sont ceux d’un commanditaire et d’un prestataire, les liens entre SNCF-Gares &
Connexions et le conseil régional ne sont pas si évidents. La limite entre prestation intégrée et
prestation supplémentaire, par exemple, n’est pas toujours très claire. Par exemple, si, dans
certaines des gares suffisamment fréquentées, SNCF-Gares & Connexions maintient des toilettes
publiques ouvertes, ce n’est pas le cas dans toutes.
Mais viennent également s’ajouter à cette liste et à ce premier niveau de gouvernance
institutionnelle, les communes en charge de l’aménagement des abords extérieurs, les
intercommunalités qui assurent le transport urbain ou encore les conseils généraux qui gèrent l’offre
de transport interurbain.
Les communes, et parfois les intercommunalités sont, en effet, également intégrées au processus
de décision, quand le projet d’aménagement est plus large que la seule enceinte de la gare. Et à cela
viennent également s’ajouter les acteurs directement concernés par le projet par exemple : le
commerçant qui va s’installer, ou la CAF dans le cas d’une crèche.
La gouvernance est alors difficile à instaurer puisque que ces différents acteurs n’ont pas d’espace
officiel et règlementé leur permettant de travailler ensemble. C’est parfois lors du lancement d’un
projet de réhabilitation de gare, porté par SNCF - Gares & Connexions ou le conseil régional que les
acteurs concernés sont invités à se rassembler pour discuter ensemble de l’aménagement du pôle
d’échange. Ce sont également, à l’occasion, communes et intercommunalités, souhaitant revitaliser
un quartier de gare en désuétude, qui lancent les échanges. Mais ces procédures ne sont absolument
pas obligatoires ni même formalisées. Juliette Maulat et Arnaud Passalacqua71 illustrent cette
difficulté de gouvernance et les tensions qui peuvent en découler : « Les régions critiquent ainsi la
dégradation de la qualité du service, le manque de transparence de la SNCF sur les coûts réels
d’exploitation ou encore l’état de l’infrastructure qui, en dépit des efforts réalisés, pénalise la bonne
réalisation des services régionaux. Elles dénoncent aussi les tentatives récurrentes de l’État de faire
payer aux régions le déficit du système (…). Face à ce désinvestissement de l’État, elles revendiquent
71
MAULAT Juliette et PASSALAQUA Arnaud « Les collectivités locales prises dans la nouvelle «bataille du rail», 2014 ;
http://www.metropolitiques.eu; consulté en juin 2014.
- 47
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Chapitre II
des ressources financières propres, la propriété du matériel roulant, la maîtrise de leur politique
tarifaire et l’ouverture à la concurrence (GART 2013). Les villes et intercommunalités critiquent de
leur côté l’absence de clarté et de visibilité concernant la politique de RFF et de la SNCF, voire des
Régions. (…). Elles critiquent l’absence d’interlocuteur ferroviaire unique, le prix de cession du foncier
ou encore le financement insuffisant des gares. »
Sur le plan des services à la mobilité, cette difficulté de gouvernance des gares et des pôles
d’échanges qui lui sont associés est flagrante. Nombreux sont ainsi les pôles d’échanges autour des
gares où la gestion des services à la mobilité n’est pas coordonnée, où chaque AOT a son arrêt de car
(car TER, cars départementaux, bus urbains) et son affichage.
Il en est de même pour les services commerciaux, notamment les paniers fraîcheurs. Il existe, en
effet, une politique nationale partenariale entre les chambres d’agriculture et SNCF Proximités – TER
pour mettre en place des points de retrait de paniers de légumes dans les gares. Ceux-ci sont alors
implantés dans les halls de gare. Toutefois, dans certaines communes, comme à Ambérieu-en-Bugey,
dans l’Ain, le point de retrait a été implanté, hors du partenariat avec la SNCF, et prend place dans la
cour de la gare, propriété communale, via une autorisation d’occupation temporaire de l’espace
public, et non dans le hall, propriété de SNCF – Gares & Connexions. Il n’apparaît donc pas dans les
informations communiquées par TER – Rhône Alpes.
La répartition du foncier et cet effet de « copropriété » dans et autour des gares créent également
des grosses difficultés pour les porteur de projet. Qu’il s’agisse de la commune, de
l’intercommunalité,
d’un gestionnaire de service ou d’un commerçant, il doit traiter avec de
nombreux propriétaires, ayant chacun des politiques immobilières ou foncières différentes, ce qui
implique des contraintes juridiques, opérationnelles et temporelles importantes et vient compliquer
le montage financier des projets.

… aux objectifs parfois divergents
Plus encore, les objectifs de ces différents acteurs pour le développement des services et
commerces en gare ne sont pas toujours convergents.
Pour le conseil régional et son délégataire de service, SNCF Proximité – TER, il s’agit tout d’abord
d’offrir un service supplémentaire aux usagers du train : en accompagnant la rupture de charge et en
valorisant le temps d’attente. Les services permettent de rendre ce mode de transport plus attractif
et d’en fidéliser sa clientèle. Ils sont donc un élément à part entière de la politique du
développement du TER mené par les régions.
Pour SNCF-Gares & Connexions. Il s’agit d’abord, de pouvoir valoriser le patrimoine immobilier,
souvent dégradé(en premier lieu les bâtiments voyageurs), dont il dispose afin de s’assurer des
- 48
-
Chapitre II
recettes financières stables et de participer à sa remise en état. Ils permettent également d’apporter
une présence dans les gares et ainsi de faire diminuer les coûts de personnel pour le gestionnaire.
Pour les communes, l’enjeu est avant tout urbain : il s’agit de revitaliser les quartiers de gares
souvent désertés ou déqualifiés, et de valoriser ces espaces, nœuds du report modal, en recréant
une centralité de services complémentaires à ceux proposés ailleurs dans la ville. Ces communes
cherchent ainsi, par l’implantation de services et de commerces, à utiliser cette centralité de passage
pour créer une véritable centralité de ville en assurant la mixité des fonctions urbaines.
Pour s’implanter en gare, les projets de commerces ou de services doivent donc répondre au plus
grand nombre de ces enjeux pour obtenir le soutien des acteurs concernés. Mais ceux-ci sont divers
et parfois contradictoires, les objectifs d’économie de SNCF-Gares & Connexions par la vente des
bâtiments voyageurs allant parfois à l’encontre de la politique d’amélioration du service disponible
dans tous les points d’arrêts du conseil régional.
On observe ainsi des tensions naître entre les différentes collectivités par exemple et les
institutions ferroviaires. Si des tentatives de discussion sont mises en place petit à petit (signature
d’une charte entre l’association des maires de France, SNCF et RFF) afin d’essayer de clarifier la
situation et la définition du rôle de chacun, la gouvernance reste aujourd’hui très complexe, avec de
nombreux acteurs aux objectifs divergents. Ce qui crée des tensions venant freiner la réalisation des
projets.
Enfin, la création de la branche « Gares & Connexions » de la SNCF en 2011, si elle était destinée à
clarifier les attributions de chacun (et à mettre la SNCF aux normes européennes), a également
remis en cause certaines des politiques régionales, portées jusque-là par le conseil régional et SNCFProximités. C’est notamment sur le cas de la politique de services en gare, dont la compétence leur a
été retirée pour être transférée au nouveau gestionnaire de gares. En Rhône-Alpes, on peut ainsi
citer l’appel à projet « Point TER » lancé en 2009 et abandonné en 2011 suite à la création de SNCFGares& Connexions qui a repris en mains la gestion de toutes les gares du réseau.
Nombreux sont donc les projets envisagés n’ayant pas abouti pour cause de désaccord sur les
objectifs, mais également sur le montage (projet de crèche de Saint-Chamond ou de Givors par
exemple).
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-
Chapitre II
4. Un désengagement de la SNCF
Comme nous l’avons montré dans la partie précédente, en plus d’être très nombreux, les
différents acteurs en charge des projets d’aménagement des gares et du développement des services
et commerces dans celles-ci n’ont pas forcément de vision commune à ce sujet. A cela vient s’ajouter
la position spécifique de SNCF-Gares & Connexions sur la gestion des bâtiments voyageurs.

SNCF-Gares & Connexions, « l’abandon » des bâtiments voyageurs
Dans un premier temps, le propriétaire des gares, SNCF-Gares & Connexions, fait face à une
difficulté de gestion et d’entretien de tous les bâtiments voyageurs de la région. Ceux-ci datant
souvent du XIXème, n’ont pas toujours été correctement entretenus jusque-là et sont actuellement
souvent en mauvais état. Ils représentent donc un patrimoine très important et dégradé demandant
des coûts d’entretien, voire de rénovation élevés.
SNCF- Gares & Connexions, n’ayant pas le budget pour financer ces travaux de restauration de
tout son patrimoine, fait le choix de se concentrer sur les gares les plus rentables, celles où les
investissements profiteront au maximum de personnes et surtout où les recettes futures pourront
venir rééquilibrer la balance. Si les investissements de SNCF-Gares & Connexions ont représentés
2,3Mds d’euros l’an passé, cet
argent a principalement été investi dans les opérations de
financement des grandes gares du réseau.
A l’échelle régionale, ce choix de la rentabilité est également appliqué, certaines gares sont très
peu fréquentées, principalement par des abonnés qui arrivent juste avant le départ. La nécessité
d’un espace d’attente, en comparaison des montants à investir, implique que SNCF-Gares &
Connexions préfère souvent fermer les bâtiments voyageurs anciens dans les gares peu fréquentées.
De la même façon, les bâtiments voyageurs, où le guichet a été supprimé par SNCF-Proximités faute
de rentabilité, ont souvent été fermés à cette occasion, de façon à réduire les coûts d’entretien, mais
également de personnel, car, pour qu’il ne soit pas détérioré, un espace d’attente doit être
accompagné d’une présence humaine.
Pour autant, même fermés, les bâtiments voyageurs restent une véritable charge pour SNCFGares & Connexions. On n’observe donc pas d’engagement sur ces petites gares mais plutôt une
volonté de se débarrasser de ce poids pour SNCF - Gares & Connexions, qui n’hésite pas à les vendre
si l’occasion se présente.
« Moi si je peux vendre le bâtiment voyageur fermé et le remplacer par un petit abri neuf sur
le quai et construire un local technique propre sur le quai, ça me va très bien ! »
Directeur de l’exploitation - Agence Centre-Est
SNCF Gares & Connexions
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Chapitre II
La vente peut se faire à destination de particuliers qui vont utiliser le bâtiment comme habitation
ou par une entreprise qui recherche un local. Les bâtiments voyageurs mis en vente, peuvent
également être rachetés par les communes qui souhaitent y implanter un équipement public ou tout
simplement éviter que ce symbole de la commune, qu’est la gare, ne disparaisse en attendant d’avoir
pour elle un projet particulier. Toutefois cette solution de vente n’est pas si simple, elle ne peut avoir
lieu lorsque le bâtiment contient des installations techniques nécessaires au fonctionnement du
service de transport, même s’il est fermé. Et l’aménagement d’un ancien bâtiment voyageur est
soumis à certaines contraintes de sécurité, de par sa situation en bordure de voie ferrée. Enfin, sur
ces questions d’utilisation des bâtiments voyageurs, et surtout de leurs financements, les attentes
sont aussi parfois divergentes entres acteurs. SNCF-Gares & Connexions souhaite, par exemple,
parfois vendre un bâtiment voyageur en mauvais état qu’elle a déjà fermé et qu’elle ne voit que
comme un gouffre financier, alors que la commune souhaite le garder ouvert pour en faire une
centralité, sans toujours avoir les moyens de l’acheter.

Les commerces et services, une opportunité financière ?
De la même façon, si SNCF-Gares & Connexions a bien perçu que le développement des
commerces et des services en gare peut être intéressant financièrement dans les plus grandes gares
(espaces attractifs, présence de voyageurs de grandes lignes qui passent du temps et sont prêts à
dépenser plus d’argent), dans les plus petites gares, et notamment les gares TER périurbaines,
l’équation reste difficile à mettre en œuvre.
« Moi aujourd’hui je suis pas contre le développement des services nouveaux, mais je ne peux
pas contribuer financièrement à un nouveau service, c'est-à-dire que ce service qui doit arriver
en gare, moi dessus je gagne pas forcément d’argent ! Si j’en gagne, tant mieux, ça me
permettra de rénover mon patrimoine mais je ne veux pas en perdre. Qui dit nouveau service,
c’est plutôt un service pour moi, au coût zéro »
Directeur de l’exploitation - Agence Centre-Est
SNCF Gares & Connexions
« Pour Gares &Connexions, en dessous de 5000 montées descentes par jour c’est pas
rentable. »
Membre de l’unité « Gares » - Direction des
transports du conseil régional Rhône-Alpes
Lorsqu’il s’agit de gares périurbaines fréquentées, potentiellement plus « rentable », il devient
pertinent pour le gestionnaire de gares de pouvoir y installer des commerces. Pour autant, s’il
semble intéressant, au premier abord, pour les commerçants de venir s’implanter dans un espace
fréquenté et de profiter de la clientèle mise à disposition par le train, les échanges avec l’agence
- 51
-
Chapitre II
Rhône-Alpes-Auvergne de SNCF-Gares & Connexions font écho d’une véritable difficulté à faire venir
des occupants dans leurs espaces vacants.
«Installer des commerces c’est bien, mais encore faut-il trouver des commerçants qui veulent
venir… parce que ce n’est pas forcément le jackpot pour eux ! A Vienne par exemple ça n’a
pas l’air de marcher très très bien son truc… »
Directeur de l’exploitation - Agence Centre-Est
SNCF Gares & Connexions
Cette difficulté s’explique en partie, par leur politique de recensement des espaces vacants et de
communication autour des espaces à louer aujourd’hui balbutiante et par le manque de procédure
figée et claire à suivre pour les commerçants désireux de s’implanter en gare.
Pour être viables, les commerces et services doivent trouver une clientèle adaptée, autrement dit,
des usagers, en quantité suffisante pour faire face au loyer, aux contraintes financières d’installation
et pouvoir vivre. Or, le public de voyageurs pendulaires, comme nous l’avons déjà évoqué, est une
clientèle peu disposé à faire des achats.
Malgré la rentrée d’argent que les commerces et services, pouvant s’implanter dans les gares,
peuvent représenter, celle-ci n’est pas suffisante face au poids de l’entretien du patrimoine pour que
SNCF - Gares & Connexions se lance dans une véritable politique de leur développement. Il s’agit
plutôt aujourd’hui de profiter des opportunités qui peuvent se présenter, au cas par cas, dans les
gares qui sont déjà rentables. Ce sont également souvent, les gares où le commerce sera le plus
viable pour le propriétaire. Les bâtiments voyageurs des petites gares TER, ne sont donc absolument
pas perçus par SNCF-Gares & Connexions comme une opportunité de développement de leur activité
mais bien comme une charge, un gouffre financier que la mise en place de commerces et de services
ne peut suffire à absorber. Ce qui explique leur désengagement sur les bâtiments voyageurs des plus
petites gares et la volonté de vendre, plutôt que de louer, là où ils estiment la rentabilité faible.
On constate un désengagement global de la SNCF sur les bâtiments voyageurs des gares TER de
faible fréquentation. Pour ces gares, l’opportunité financière n’existe plus et la question du
développement des commerces des services n’est plus envisagée par SNCF-Gares & Connexions. Ces
bâtiments voyageurs sont aujourd’hui de plus en plus souvent fermés, voire même vendus, au vu des
coûts exigés par leur entretien.
- 52
-
Chapitre II
- 53
-
Chapitre III
Pour deux projets aboutis :
Des ambitions plus larges que le train
pour les gares
- 54 -
Chapitre III
Les commerces et les services apparaissent comme un vecteur possible, et aujourd’hui en cours
de réflexion et d’expérimentation, de déploiement du TER. Toutefois, la multiplicité des acteurs
concernés et leurs différentes attentes rendent cette mise en œuvre difficile.
Afin de mieux comprendre comment peuvent effectivement se développer les commerces et
services dans les gares périurbaines, nous avons choisi d’étudier des exemples concrets de gares
périurbaines de la région Rhône-Alpes où se sont implantés des commerces et des services dans le
bâtiment voyageur de la gare ou à proximité immédiate.
Suite aux rencontres avec les acteurs régionaux et au recensement des différents services
proposés dans les gares périurbaines, voire rurales, de Rhône-Alpes, nous avons retenu deux projets
à étudier : celui de la gare de Vinay dans l’Isère et celui de la gare Saint-Chamond dans la Loire.
Pour chacun de ces exemples, nous présenterons le conteste dans lequel le projet a été porté, ses
modalités de mise en œuvre et de fonctionnement, ainsi que les acteurs impliqués dans les
différentes étapes du projet (de son lancement à son fonctionnement quotidien).
- 55
-
Chapitre III
1. Vinay : réintégrer le quartier de la gare au centre de la
commune
La première gare sur laquelle nous nous sommes penchés est celle de Vinay, en Isère. Elle a fait
l’objet d’un important projet de réaménagement et de revitalisation, depuis 2009. Le bâtiment
voyageur a été rénové et abrite aujourd’hui un commerce de petite restauration. L’ancienne halle
marchandises a également été réhabilitée pour permettre l’implantation d’une « halle fermière », un
espace de vente en direct entre producteurs de la région et consommateurs.

Vinay, un pôle rural
La commune de Vinay est située dans le Sud Grésivaudan, le long du Sillon Alpin Sud, à mi-chemin
entre Grenoble et Valence.
6 - Situation géographique de Vinay (source - OpenStreetMap)
Le Sud Grésivaudan, coincé entre le plateau de Chambaran et les contreforts du massif du
Vercors, est un ancien espace rural qui est aujourd’hui en voie de périurbanisation. L’INSEE
caractérise cette périurbanisation du territoire par deux phénomènes : « l'accroissement de sa
population est surtout le fait d'un solde migratoire positif [et] les nouveaux arrivants occupent
souvent un emploi à l'extérieur de la zone »72. Comme présenté dans le chapitre I, ces nouveaux
modes de vie provoquent des déplacements croissants, notamment vers Grenoble via l’A49.
La commune de Saint Marcellin (environ 8000 habitants) est la centralité la plus importante du
territoire et concentre la majorité des équipements dits « de gamme supérieure » (hypermarché,
cinéma, lycée, etc.). Le Sud-Grésivaudan est intégré au SCoT de la région urbaine de Grenoble, dont il
72 INSEE - La Lettre Analyses n°199, juin 2013
- 56
-
Chapitre III
est l’un des 7 territoires. Dans le cadre de la réflexion de territoire autour de la mise en place du
SCoT, les élus ont exprimé la volonté de faire de cet espace, un territoire de connexion entre le cœur
des Alpes et la vallée du Rhône et d’affirmer la centralité de Saint-Marcellin, dans la région urbaine
de Grenoble.
« Faire reconnaître et partager le positionnement et la fonction stratégiques du SudGrésivaudan au sein du SCOT, de par sa connexion avec l’agglomération romano-valentinoise
et le département de la Drôme. Valoriser le positionnement du bassin de Saint-Marcellin dans
la hiérarchie des pôles de la région urbaine afin de jouer pleinement une fonction de relais
entre deux dynamiques urbaines et métropolitaines »
Extrait de la contribution du Sud-Grésivaudan
au SCoT de la région urbaine grenobloise73
Vinay est la seconde polarité du territoire et compte 4070 habitants74. S’il s’agit d’une petite
commune, sa place, dans un espace où toutes les communes du territoire comptent moins de 2500
habitants (excepté Saint Marcellin) est celle d’un véritable pôle rural qui se revendique même
comme un « pôle urbain » du Sud Grésivaudan75. L’analyse du territoire, effectuée par la commune,
fait également ressortir l’aspect agricole de Vinay de par sa position de « capitale de la noix ». Elle
abrite en effet d’importantes noyeraies classées AOP « Noix de Grenoble » ainsi que le patrimoine
bâti, le paysage et l’activité agricole qui y est liée.
Vinay en chiffres :





4 049 habitants
16km²
Nombre d’emplois : 1 837
Taux de chômage des 15/64 ans : 9,8%
(Moyenne nationale = 11,7%)
Revenu net déclaré moyen par foyer fiscal
en 2009 = 19 850 €
(Moyenne nationale = 23 230 €)
Source: Recensement INSEE 2009
Secteurs activités :
Vinay
Référence France
73 Contribution au Scot de la région urbaine de Grenoble, Document réalisé et approuvé par les élus du Pays du SudGrésivaudan, 5 juillet 2010
74 Recensement INSEE 2010
75 Mairie de Vinay, synthèse de présentation du PLU, 2011
- 57
-
Chapitre III
Sur le plan ferroviaire, la gare de Vinay est située sur la ligne Grenoble/Valence et, est desservie
par plus d’une trentaine de trains par jour-. Elle est classée, par SNCF et RFF, comme une gare
d’intérêt régional, c’est-à-dire de catégorie « B ». C’est une halte, puisqu’elle ne possède pas de
guichet ni d’agent de la SNCF présents sur le site. Elle est aujourd’hui fréquentée par environ 150
voyageurs par jour76. Pour la SNCF, cette gare est trop petite et pas assez fréquentée y maintenir un
guichet de façon rentable, toutefois à l’échelle du territoire, compte tenu de sa position de pôle
rural, elle reste une commune importante, et donc une gare forte sur la ligne.
Cette ligne a fait l’objet d’importants travaux de la part d’RFF au cours de la dernière décennie,
l’axe Valence-Grenoble-Chambéry étant, en effet, un axe ferroviaire stratégique pour la région,
desservant un bassin de vie de 900 000 habitants, pour un potentiel de 2,5 millions de déplacements
par jour77.La portion Saint-Marcellin-Moirans a, tout d’abord, été doublée entre 2007 et 2011, puis la
ligne a été totalement électrifiée, entre 2011 et 2013, subissant même un arrêt complet
d’exploitation durant l’année 2013.

La naissance du projet : réappropriation d’un espace en désuétude
Le bâtiment voyageurs de la gare de Vinay a été fermé par la SNCF et mis en vente en 2005 afin
de mettre fin aux coûts d’entretien et de personnel devenus trop lourds. A ce moment, la
municipalité en place a décidé de le racheter, sans avoir de véritable projet, mais pour maîtriser la
future utilisation de ce patrimoine historique de la commune.
En 2008, une nouvelle équipe arrive à la tête de la commune et Mme le maire exprime
rapidement la nécessité de faire quelque chose pour le quartier de la gare, alors complètement en
friches.
« Avant d’être élue j’étais médecin, je sillonnais parfois Vinay la nuit pendant mes gardes,
c’était un quartier désert, abandonné, glauque »
Mme le maire de Vinay
La voie ferrée vient couper la commune de Vinay en deux et l’urbanisation de la commune s’est
ensuite développée en tournant le dos au chemin de fer, des 2 côtés. Le quartier de la gare est donc
un quartier peu urbanisé et peu fréquenté, même si on peut noter la présence d’un supermarché, le
seul de la commune, à proximité immédiate de la gare.
76 300 montées/descentes, Comptages SNCF pour la direction des transports de la région Rhône-Alpes, 2012
77 CABIRON Christine, « Valence-Grenoble-Chambéry : le sillon ferroviaire alpin enfin électrifié » pour Mobilicites, février
2014 ; http://www.mobilicites.com/011-2633-Valence-Grenoble-Chambery-le-sillon-ferroviaire-alpin-enfin-electrifie.html
- 58
-
Chapitre III
7 - Plan de la ville de Vinay (source - OpenStreetMap)
Cette réflexion sur la réhabilitation du quartier de la gare s’est effectuée dans le cadre de la mise
en place du PLU de la commune qui a également été lancé par l’équipe arrivée en 2008. Il était alors
important pour la municipalité de chercher à relier les deux parties de Vinay séparées par la voie
ferrée. Le quartier de la gare, en désuétude, était à la fois une limite à estomper pour essayer de
« recoudre» les deux parties de la commune, mais c’était également une opportunité de
développement urbain au vu des friches et des espaces non construits qui s’y trouvaient. Cet espace
permet donc d’envisager de nouvelles constructions et une augmentation du nombre d’habitants
sans étendre l’espace urbanisé au-delà de ses limites actuelles.
« La gare et son environnement apparaît aujourd’hui comme centre d’un territoire urbain
avec un fort potentiel. Il s’agit de développer un vrai quartier de village »
Notice de présentation du projet réalisée par
les services techniques de la ville78
De plus, la gare de Vinay a vu son activité prendre de l’ampleur au cours des années 2000. En
effet, avec le phénomène de périurbanisation, le TER avait multiplié sa fréquentation par 4 entre
2003 et 2008, pour atteindre 400 montées/ descentes par jour environ. Ce lieu, jusque-là très peu
fréquenté et non aménagé, commençait donc à prendre de l’ampleur. Pour les acteurs locaux, la
gare de Vinay a effectivement un rôle à jouer dans l’organisation des déplacements sur le territoire79.
La municipalité a donc voté la création d’un pôle multimodal aux abords de la gare
78 Services techniques de la mairie de Vinay, Notice explicative du projet pour présentation au conseil municipal, 2009
79 Id.
- 59
-
et le
Chapitre III
réaménagement des voiries du quartier pour permettre un accès facilité et sécurisé à la gare par
tous les modes.
Dans le cadre de ce projet de revitalisation du quartier de gare et de développement de la
commune, Mme le maire a exprimé sa volonté de réhabiliter le bâtiment voyageurs de la gare, parce
qu’il ne lui semblait pas pertinent de laisser cette « verrue », destinée à être un équipement public,
dans un quartier en rénovation et parce qu’elle souhaitait redonner à cet espace une image
attractive qui inciterait les voyageurs à venir prendre le train.
« L’idée était de faire ressembler la gare à une ‘’vraie’’ gare »
Directrice Générale des Services de Vinay
La réhabilitation de la gare de Vinay s’inscrit donc à l’articulation des enjeux d’urbanisme et de
transport.
« Il était nécessaire d’améliorer l’accueil des usagers, de proposer certains services et d’avoir
une offre de transport plus attractive dans une perspective de développement durable. […]
Cette future gare contemporaine ne constitue pas seulement une solution en matière de
transport mais aussi une opportunité pour transformer, développer et embellir le quartier »
Notice de présentation du projet réalisée par
les services techniques de la ville80
L’objectif clairement affiché par Mme le maire était donc le suivant : « Faire de la gare un pôle
multimodal et un pôle de services, nœud entre les transports et le tissu urbain »81
8- Gare de Vinay en 2007 ( source - direction des transports du conseil
régional Rhône-Alpes)
80 Services techniques de la mairie de Vinay, 2009, op. cit.
81 Id.
- 60
-
Chapitre III
Comme nous l’avons évoqué, cette vision d’articulation urbanisme/transport s’est effectuée dans
le cadre de la mise en place du PLU sur la commune, mais aussi dans le cadre de la réflexion global du
Scot de la région Urbaine de Grenoble, qui réaffirme la nécessité de penser l’articulation urbanismetransport et de développer les pôles urbains autour des gares existantes et notamment en intégrant
la participation du pays du Sud Grésivaudan à cette réflexion82. C’est donc une réflexion globale, sur
le développement urbain à l’heure du développement durable, qui a conduit la municipalité à mettre
le quartier de la gare, en en premier lieu la gare elle-même et son bâtiment voyageurs, au cœur du
projet communal.

Un projet en 3 temps
Avant même le lancement du projet par la mairie, RFF a profité des travaux de doublement de la
ligne pour sécuriser les traversées en construisant une passerelle et ainsi, initier les travaux de
rénovation de la gare.
Le projet municipal en lui-même, a été lancé en 2009 et s’est déroulé en plusieurs phases.
Le premier acte du projet municipal a été la création du pôle multimodal afin de permettre l’accès
de tous les modes à la gare. Les travaux ont consisté en la création et la jonction de cheminements
piétons et cyclables ; la rénovation des voiries d’accès et en l’aménagement d’un parking relais (140
places gratuites). Ils ont eu lieu d’avril à septembre 2010.
La seconde phase a été la transformation du bâtiment voyageurs abandonné en « une gare
contemporaine ». C’est à dire en un espace offrant de nombreux services aux usagers.
« Le pari de l’acte 2 est de s’appuyer sur le concept de ‘’gare contemporaine’’ qui offre à la
fois une information multimodale et un panel de ‘’petits services’’ pour faciliter le quotidien
des usagers »
Notice de présentation du projet réalisée par
les services techniques de la ville83
En effet, l’augmentation de la fréquentation de la gare étant aujourd’hui un constat et non une
espérance de la part de la municipalité, elle a souhaité utiliser le bâtiment pour proposer une activité
commerciale conjuguée à une offre de services gratuits pour les usagers. Il s’agissait, pour elle,
d’offrir à la fois, un service aux usagers leur permettant plus de confort lors de leurs déplacements
mais également d’implanter une présence humaine, inexistante depuis la fermeture du guichet.
82 Contribution au Scot de la région urbaine de Grenoble, op. cit.
83 Services techniques de la mairie de Vinay, 2009, op. cit.
- 61
-
Chapitre III
« Le voyageur doit pouvoir se repérer dans cet espace vaste et y trouver un ‘’cœur’’ »
Notice de présentation du projet réalisée par
les services techniques de la ville84
9 - Gare de Vinay en mai 2014
La municipalité, en tant propriétaire du bâtiment voyageurs, s’est alors positionnée comme le
porteur de projet d’un « point TER85 » dans l’espace vacant de la gare et a développé ce projet en
partenariat avec une commerçante locale, souhaitant s’implanter dans la gare et prête à offrir des
services complémentaires aux usagers, et SNCF-Proximité, porteuse de la politique « point TER »
nationale et de sa déclinaison régionale. C’est la mairie qui a rénové le bâtiment, suite à une
réflexion commune aux trois partenaires, pour proposer un espace commerçant de petite
restauration et un espace d’attente pour les usagers du train. Les travaux ont eu lieu de décembre
2009 à novembre 2010 et ont coûté environ 2M€. La mairie est donc toujours propriétaire du
bâtiment qu’elle a réaménagé. Elle le loue à la commerçante pour son activité, suite à la signature
d’une convention tripartite SNCF-Commune-Commerçante. Le bâtiment voyageurs rénové a été
ouvert au public en décembre 2010, en même temps que le commerce baptisé « Gourmand’Nine ». Il
s’agit d’un commerce de petite restauration, proposant des plats sur place et à emporter ainsi que la
presse locale.
Afin de créer une véritable centralité autour de la gare, la municipalité a lancé un projet
d’implantation d’un magasin de producteurs locaux. Ce projet venait aussi répondre à une volonté de
la municipalité de proposer une offre complémentaire à la grande surface et de soutenir l’économie
locale. L’implantation, à proximité, de la gare s’est faite en fonction de 3 critères : un quartier en
84 Id.
85 Pour l’explication du « point TER », se référer au chapitre II
- 62
-
Chapitre III
rénovation, un espace disponible, puisqu’il existait une halle marchandises abandonnée appartenant
à RFF en face de la gare, et la volonté de constituer un pôle de commerces autour de la gare et au
cœur du futur quartier. La commune a donc racheté la halle marchandises à RFF en 2012 et l’a
réaménagée en partenariat avec un groupement d’agriculteurs locaux. Leur bâtiment rénové a
ouvert au printemps 2013. Il appartient toujours à la commune et est loué par le groupement
d’agriculteurs. Il s’agit d’un espace de vente de produits locaux (fruits, légumes, viande de bœuf, de
porc, volailles, fromages), la « halle fermière », gérée par les producteurs eux-mêmes est ouverte du
jeudi matin au samedi midi.
« L’ouverture de ce magasin de producteurs donne un nouvel élan au quartier de la gare »
Extrait du bulletin municipal86
10 - Halle fermière, mai 2014
En parallèle de ces deux actes, les espaces disponibles autour de la gare ont été inscrits comme
zone à urbaniser dans le futur, sur le PLU de la commune.
Le troisième temps du projet est aujourd’hui en cours. Il s’agit d’une réflexion complémentaire
visant à créer un mail piéton, bordé de noyers, qui permettrait de relier le bourg de Vinay à la gare,
grâce à la passerelle piétonne installée par RFF. Les études préalables ont été menées mais le tracé
envisagé traverse du parcellaire privé et les premières négociations font état de propriétaires non
vendeurs pour le moment. Ceci impliquerait des expropriations pour que le projet soit mené à son
terme. Mme le maire, réélue en mars 2014, présente ce projet comme un des chantiers de son
second mandat.
86 Mairie de Vinay, Journal d’information municipal n*19, mai 2013
- 63
-
Chapitre III

Une municipalité motrice mais appuyée par des partenaires
Sur ce projet de revitalisation du quartier de la gare et de rénovation du bâtiment voyageurs, la
municipalité a donc été le principal moteur. Cela a notamment été possible grâce aux convictions
profondes de l’équipe en place depuis 2008.
« Quand on a commencé à travailler sur le quartier, à vouloir rénover la gare, on m’a prise
pour une folle ! »
Directrice Générale des Services de Vinay
Mais, en s’inscrivant dans un projet plus global de valorisation du train et des transports en
commun, cela lui a permis d’obtenir des aides et de toucher des financements de la part de l’Etat et
des autres collectivités locales : région, département.
Dans le cadre de son programme de rénovation des abords des gares, la région a, en effet,
participé à hauteur de 30% du financement de l’aménagement du pôle intermodal. Elle a également
soutenu, à hauteur de 30%, l’acquisition de la halle marchandises RFF et sa rénovation en « halle
fermière » au titre de sa politique de développement local et de soutien à l’agriculture. En tout, c’est
environ 50% du projet qui a, ainsi, été financé par des subventions institutionnelles.
La région a également apporté une expertise technique forte, notamment sur le projet de pôle
multimodal et de réhabilitation des abords de la gare, du fait de son importante expérience dans le
domaine. Mais elle a également choisi de soutenir le projet de création de la halle fermière,
convaincue par le projet novateur et la volonté de participer à ces expérimentations sur les services
et commerces, dans et aux abords des gares TER.
La SNCF, quant à elle, en tant que simple transporteur exploitant du TER n’a pas été concernée ni
même consultée dans le cadre de la mise en place du projet global de réhabilitation de la gare. Il
s’agissait, en effet, pour la commune, de venir combler un défaut de services créé par la fermeture
du guichet et du bâtiment voyageurs. SNCF-Proximité a toutefois participé à la mise en place du
« point TER », afin notamment, de faire part de ses exigences de services à assurer par la
commerçante, pour être labellisée, et apparaître dans les listes nationales et régionales des « points
TER ».

Premier retour d’expérience : un modèle difficile à pérenniser
Aujourd’hui, 4 ans après le lancement du projet, on peut proposer un premier retour
d’expérience.
La rencontre avec la commerçante, nous a permis de prendre conscience de la difficulté
économique à laquelle elle est confrontée. A son installation, sa clientèle potentielle était composée
principalement d’usagers du train, pour laquelle elle avait développé une gamme de services
- 64
-
Chapitre III
spécifiques, en partenariat avec la commune et SNCF-Proximités : vente de pain, presse, dépôt
pressing, en plus de la restauration composée de cafés, sandwichs, glaces, etc. La boutique était
ouverte de 7h à 19h afin d’être présente le matin aux départs des trains et le soir à leur arrivée.
Mais, elle explique que ces services n’ont pas réussi à trouver leur public et que les usagers du
train de Vinay ne sont pas disposer à faire des achats lorsqu’ils viennent prendre le train et qu’ils ne
lui permettaient pas de faire fonctionner son commerce. Petit à petit, sa situation financière
devenant très difficile87, elle a choisi d’abandonner les services destinés aux usagers comme le dépôt
de pain ou le pressing qui lui coûtaient plus qu’ils ne lui rapportaient.
« Le pressing c’était pas possible, il n’y avait pas assez de linge, et au début la société88 venait
le chercher mais après c’est moi qui devait aller le porter à Saint-Marcellin. Ça prend du
temps et ça coute cher en essence… »
Commerçante en gare de Vinay
Pour faire face et maintenir son activité, elle a donc décidé de développer une restauration
chaude du midi, composée de pizzas et d’un plat du jour, aidée bénévolement par son père. Sa
situation géographique lui est favorable, non pas par la proximité de la gare, mais parce qu’elle se
situe dans un quartier de Vinay qui abrite quelques chantiers et qui n’offre pas d’autre restauration
de ce type. De plus, elle est très accessible, proche de la départementale reliant Vinay à SaintMarcellin et avec, à proximité, le parking de la gare. Elle touche ainsi une clientèle d’ouvriers qui en
ont fait leur cantine et qui lui permettent de se maintenir financièrement, contrairement aux usagers
du train.
« C’est surtout des ouvriers, ils viennent des chantiers aux alentours. Ils font parfois 15km
pour venir, parce que c’est sympa ici, et puis c’est toujours des bons produits, frais»
Commerçante en gare de Vinay
Les gestionnaires de la halle fermière expriment cette même déconvenue face à la faible
fréquentation de leur magasin par les usagers du TER, qu’ils espéraient pourtant pouvoir toucher en
étant ouverts le soir, aux heures d’arrivée des trains.
« On pensait que les gens qui prennent le train s’arrêteraient en rentrant, qu’ils en
profiteraient pour faire quelques courses mais non »
Gestionnaire de la Halle fermière
Pour autant, la municipalité et Mme le maire ne semblent pas conscientes de cette difficulté pour
les commerçants à toucher les usagers du train et semblent plutôt satisfaites de l’implantation de ces
commerces et des retours faits par les administrés.
87 La commerçante explique qu’elle ne se verse pas de salaire depuis l’ouverture
88 La commerçante travaillait en partenariat avec un pressing de Saint-Marcellin, les clients déposaient leur linge sale le
matin et pouvaient le récupérer un autre jour de la semaine, elle prélevait une petite commission sur le service.
- 65
-
Chapitre III
« On a des bons retours des gens, il sont contents, ils les utilisent »
Mme le maire de Vinay
Ces retours positifs sont également entendus par la commerçante, mais elle explique que si le
service offert et sa présence sont appréciés par les usagers du train, ceux-ci ne lui permettent pas de
vivre.
« Tout le monde dit ‘’c’est bien d’avoir quelqu’un’’, ‘’elle est sympa Virginie89’’,’’ tu vas pas
partir Virginie’’, à ça pour demander un verre d’eau ou aller aux toilettes ils sont contents,
mais moi je fais comment ? »
Commerçante en gare de Vinay
La SNCF a évoqué la possibilité de supprimer la machine extérieure de vente des titres de
transport pour confier cette tâche à la commerçante. Pour eux, cela permet une économie financière
d’entretien de l’automate et le maintien d’un projet qu’ils ont soutenu. Cette perspective apparait à
la commerçante comme une bonne piste qui permettrait de « faire entrer » les usagers du train dans
son commerce, ce qui ne se fait pas actuellement et de lui fournir un petit apport financier
supplémentaire.
Un dispositif similaire a déjà été mis en place dans une dizaine de commerces en Rhône-Alpes,
avec un bilan mitigé puisque les opérations à effectuer et les grilles tarifaires sont parfois complexes.
Cela demande aussi du temps au commerçant alors que le revenu apporté est très faible90. La
pérennité économique du commerce est donc difficile à trouver, et surtout, semble ne pas pouvoir
reposer sur les usagers du train qui, s’ils apprécient la présence humaine ne lui permettent pas de
vivre.
La rencontre avec la commerçante et la mairie, nous a permis de mettre le doigt sur une autre
difficulté. Le bâtiment voyageurs rénové appartient à la commune. Il se compose de deux parties :
l’une est louée à la commerçante en tant que cuisine et local technique, et l’autre est dédiée à
l’attente et n’est pas mise en location. Les deux espaces sont séparés par le comptoir et l’espace de
vente de la commerçante.
11- Schéma de principe du
bâtiment voyageurs de la gare de
Vinay
89 Prénom de la commerçante
90 Informations données par l’unité « Gares » de la direction de transports du conseil régional Région Rhône-Alpes
- 66
-
Chapitre III
La commerçante s’occupe de l’entretien de l’espace d’attente situé dans le même bâtiment et des
toilettes associées installées par la commune. Pour autant, la gestion de cet espace reste floue. En
effet, la mairie explique que la commerçante est chargée de l’entretien de la salle d’attente et des
toilettes, qui sont publiques, en échange d’une modération de son loyer. Mais pour la commerçante,
il s’agit d’un espace qu’elle entretient de façon bénévole, sur ses propres revenus, pour le bien-être
de ses clients mais également de tous les usagers du train, sans contrepartie de la municipalité.
Compte tenu de cette ambiguïté, la commerçante a décidé, afin de développer une activité de
restauration assise lui permettant de « survivre » financièrement, d’installer des tables et des chaises
dans l’espace d’attente, qu’elle ne loue pas officiellement à la mairie mais qu’elle entretient. Pour
elle, cet espace reste une salle d’attente publique mais dans laquelle ses clients peuvent aujourd’hui
s’installer correctement pour manger.
« Moi j’ai décidé de pas me laisser abattre, de me battre pour continuer à exister et donc de
développer de nouvelles choses »
Commerçante en gare de Vinay
Cependant, pour la mairie, cette situation pose un problème. En effet, la directrice générale des
services techniques explique que cette installation de tables et de chaises dans la salle d’attente, en
lieu et place des simples bancs de type « gare », originellement installés par la mairie, fait que cet
espace ressemble aujourd’hui à un véritable café ou snack. Les usagers ne savent plus que cet espace
est public. Ils n’osent plus l’utiliser sans consommer.
«On trouve qu’elle s’étale un peu trop dans l’espace d’attente, elle a mis des tables partout,
les gens n’osent plus renter, ils pensent qu’il s’agit d’un café normal où ils devraient
consommer.»
Directrice Générale des Services de Vinay
Le statut de cet espace, et ses conditions de gestion et d’occupation, posent donc un problème
qui ne semble pas avoir été traité dans la convention d’origine. Cela montre, l’importance du
traitement de ces questions, dès le conventionnement original, pour clarifier le rôle de chacun, et
donner plus de lisibilité à leur engagement réciproque (la gestion d’un espace public en échange
d’une modération de loyer).
Enfin, la dernière difficulté se situe au niveau de la labellisation du « point TER ». En effet, si le
commerce de la gare de Vinay est référencé comme tel dans le tableau du site TER-Rhône Alpes91 , et
si SNCF-Proximités confirme avoir participé à sa création, sur place, rien ne l’indique. Le label « point
TER » n’est pas affiché, et la commerçante explique n’assurer, comme service aux usagers, que
91 Site internet de TER Rhône-Alpes ;
http://telechargement.ter-sncf.com/Images/Rhone_Alpes/Tridion/nouveau_tableau_liste_gare_+_services_tcm-3155439.pdf; consulté en juin 2014
- 67
-
Chapitre III
l’information sur les lignes, grâce aux prospectus que lui remettent le personnel SNCF quand il
passe92, mais rien de plus. Elle explique également, ne pas recevoir d’informations particulières en
cas de perturbations sur la ligne et ne fait pas allusion aux services typiques des points TER (prêt de
parapluie, petites annonces, etc.). Elle signale également ne pas recevoir de rémunération spécifique
pour cette information voyageurs de la part d’SNCF-Proximités et l’effectuer bénévolement.
Ce flou, sur le statut du commerce en tant qu’espace de services aux usagers, rémunéré pour cela,
pose également question et nécessiterait une animation et un suivi plus fort de la part d’SNCFProximités pour les commerces qu’elle souhaite soutenir.
Le projet de Vinay est donc particulièrement intéressant puisqu’il combine différentes sortes de
services et commerces, dans et autour de la gare, dans un contexte de « pôle rural », mais il montre
aussi la difficulté économique à implanter ce type de commerces en gare, en se basant sur la
clientèle du train. Il met également en évidence la nécessité d’un suivi du projet par ses initiateurs,
après sa mise en œuvre, et d’une répartition très claire des services fournis, des obligations et des
gratifications pour le commerçant. La tâche de ce dernier étant aujourd’hui rendue difficile par la
complexité de la répartition des compétences, la place des nombreux acteurs, comme si le
commerçant était l’oublié du dispositif, alors même que c’est lui qui en assure le risque financier.
92 Pour l’entretien des automates à billets par exemple
- 68
-
Chapitre III
2. Saint-Chamond: se réapproprier l’espace abandonné de la
gare93
La seconde gare étudiée est celle de Saint-Chamond dans la Loire. La gare a fait l’objet d’une
remise en état par SNCF-Gares & Connexions en 2012/2013. Cette réhabilitation a été appuyée par
un projet de pôle multimodal, l’implantation d’un Point Information Médiation Multiservices
(PIMMS) et d’un commerce de petite restauration dans le hall.

Saint-Chamond : 2ème commune de la métropole stéphanoise
Saint-Chamond est une ville de 35 000 habitants de la banlieue de Saint-Etienne, composée
autour de plusieurs pôles puisqu’issu de la fusion de 4 communes indépendantes dans les années
1960.
12 - Situation géographique de Saint-Chamond (source - OpenStreetMap)
C’est la deuxième plus importante commune de l’agglomération stéphanoise. Sa position sur l’axe
Saint-Etienne/Lyon, au cœur d’une des plus importantes centralités de la région, fait de SaintChamond une polarité secondaire de l’agglomération stéphanoise et du futur pôle métropolitain.
93 Compte tenu de la durée du stage les deux exemples n’ont pas pu être creusés de la même façon. Pour différentes raisons
(recommandation du conseil régional, changement d’équipe municipale à Saint-Chamond en avril 2014, antériorité du
projet) il a été décidé de mettre l’accent sur le projet de Vinay
- 69
-
Chapitre III
Saint-Chamond en chiffres :





35 891 habitants
55km²
Nombre d’emplois : 12 725
Taux de chômage des 15/64 ans : 14,2%
(Moyenne nationale = 11,7%)
Revenu net déclaré moyen par foyer fiscal
en 2009 = 19 079 €
(Moyenne nationale = 23 230 €)
Source: Recensement INSEE 2009
Secteurs activités :
Saint-Chamond
Chamond
Référence France
C’est un ancien bassin industriel dont l’emploi était massivement fourni par les aciéries. Ce secteur
tente aujourd’hui de se relever des difficultés économiques de la fin du XXème siècle et de la
fermeture de ses industries lourdes.
Sur le plan ferroviaire, la gare de Saint-Chamond est située sur la ligne Firminy/Lyon et, est
desservie par plus d’une centaine de trains par jour. Elle est classée par SNCF et RFF comme une gare
d’intérêt régional, c’est-à-dire de catégorie « B », comme la gare de Vinay. C’est toutefois une gare
relativement importante au niveau régional, puisqu’elle ferait partie du TOP 20 des plus grandes
gares de Rhône-Alpes, selon le conseil régional, et qu’elle est aujourd’hui fréquentée par environ
1600 voyageurs par jour94. Pour la SNCF, il s’agit effectivement d’une gare forte, comme le montre la
présence d’un guichet avec une très importante amplitude horaire (ouverture de 5h20 à 20h20 en
semaine95).
Cette gare est un vecteur de nombreux déplacements pendulaires puisqu’elle permet de
rejoindre les pôles d’emploi de Saint-Etienne et de l’agglomération lyonnaise, en étant située sur une
ligne majeure, la plus fréquentée du réseau ferroviaire régional. Il s’agit donc d’une porte d’entrée
importante sur le réseau.
94 Comptages SNCF pour la direction des transports de la région Rhône-Alpes, données 2012
95 Site internet de SNCF-Gares & Connexions ; http://www.gares-en-mouvement.com/fr/frhho/votre-gare/;
consulté en juin 2014
- 70
-
Chapitre III

La naissance du projet : mettre fin aux usages indésirables et favoriser
l’accessibilité
La gare de Saint-Chamond a été identifiée comme étant en mauvais état et nécessitant une
réhabilitation par le conseil régional, dans le cadre de la préparation du Contrat Plan Etat Région de
rénovation des gares TER en mauvais état, dès 2009.
Le projet de rénovation de la gare et du bâtiment voyageurs a également été appuyé, auprès de la
municipalité nouvellement élue mais également de la SNCF et de la région, par les plaintes des
usagers, via les comités de lignes, mécontents du service alors proposé. Le bâtiment voyageurs était,
en effet, en mauvais état, occupé par des usages non désirés (squats, dégradations, jeux de ballon
dans le bâtiment gare, etc.) et situé dans un quartier composé de quelques friches industrielles et de
bâtiments à l’abandon, peu avenants et peu accessibles.
« Là avant c’était n’importe quoi ! Les gamins jouaient au ballon dans la gare, y’avait même
des scooters ! »
Commerçant en gare de Saint-Chamond
La nécessité d’une réhabilitation a donc été un projet commun porté par la région, la
municipalité, l’Etat et la communauté d’agglomération. Ce projet s’est traduit par l’inscription de la
gare de Saint-Chamond, en tant que gare prioritaire, dans le nouveau Contrat de Plan Etat Région
pour la période 2009-2013.
« L’Etat et le Conseil régional, en accord avec Saint-Etienne Métropole, ont décidé d’inscrire
dans le cadre du CPER 2009-2013 Saint-Chamond comme gare prioritaire à améliorer, après
avoir traité les gares de la Vallée de l’Ondaine dans le précédent CPER. »
Extrait du dossier de presse pour
l’inauguration de la gare96
Cette volonté de réhabilitation de la gare a été appuyée par une réflexion globale menée par la
municipalité sur son territoire, dans le cadre de la mise en place de son PLU. Le quartier de la gare est
en effet situé à l’écart du centre-ville, proche de l’ancien quartier industriel des aciéries aujourd’hui
fermées et laissé peu à peu à l’abandon dans cet entre-deux. Il offre un potentiel foncier important
composé de fiches industrielles, ferroviaires, de terrains privés non bâtis et de bâtiment vacants. Il
s’agissait donc, pour la municipalité, d’inscrire la réhabilitation de ce secteur et son potentiel foncier
dans les axes du développement urbain futur. Dans ce but elle soutient aujourd’hui un programme
immobilier sur le secteur de la gare qui comptera une cinquantaine de logements ainsi que des
services et commerces en rez-de-chaussée.
96
Dossier de presse pour l’inauguration de la gare de Saint-Chamond, publié par Saint-Etienne métropole, 9 septembre
2013 ; http://www.agglo-st-etienne.fr/uploads/tx_egestiondoc/DP_InaugPEMStCham090913.pdf; consulté en juin 2014
- 71
-
Chapitre III
« Il y avait une opportunité, une partie du bâtiment voyageurs pas affectée et des friches
libres autour. »
Directrice de l’urbanisme des services
techniques de Saint-Chamond
13 - Plan du quartier de la gare de Saint-Chamond (source - OpenStreetMap)
Dans le cadre de cette réflexion, la municipalité et la communauté d’agglomération ont exprimé
la nécessité de revoir l’accessibilité de ce quartier et de mettre fin au stationnement ventouse qui
venait pénaliser le parking de la gare. Elle souhaite ainsi faciliter les pratiques de rabattement et
offrir un véritable pôle de mobilité, incitant les voyageurs à prendre le train.
- 72
-
Chapitre III

La mise en place du projet : des multiples acteurs à coordonner
La volonté d’améliorer l’accessibilité de la gare s’est traduite par la mise en place de nombreuses
actions, intégrées au CPER et portées par des acteurs différents, qu’on peut toutefois regrouper en
deux projets majeurs.
Le premier enjeu de la rénovation de la gare consistait à améliorer son accessibilité. La première
action a donc été la création d’un pôle d’échange multimodal porté et financé par la communauté
d’agglomération de « Saint Etienne métropole ». Il s’est traduit par l’aménagement d’un parking
relais payant, la mise en place d’un service de vélos en libre-service et l’installation d’une gare
routière. Il a également permis le réaménagement des accès à la gare, des voiries et de son parvis. La
seconde action a été, la mise en accessibilité de la gare pour les personnes à mobilité réduite par
RFF. Elle a consisté en la rénovation des quais et de leur hauteur, le réaménagement du passage
souterrain et l’installation d’ascenseurs. Les deux projets ont été lancés fin 2012, bien que portés et
financés par des maîtres d’ouvrage différents, et se sont terminés mi-2013.
14 - Gare de Saint-Chamond rénovée, avril 2014
L’enjeu de réappropriation de l’espace a, lui, été porté par SNCF - Gares & Connexions qui a été
maître d’ouvrage de la rénovation du bâtiment voyageurs, avec la participation du conseil régional
Rhône-Alpes. Cette rénovation a été un vecteur de réappropriation de ce bâtiment voyageurs en le
rendant plus propre, plus lumineux, plus pratique, et donc plus confortable, attractif et agréable à
vivre pour les usagers.
- 73
-
Chapitre III
La réappropriation du bâtiment passant aussi par l’animation de la salle des pas perdus, alors
immense et occupé uniquement par le guichet SNCF, les acteurs locaux ont exprimé la volonté de
créer de nouveaux services dans le pôle d’échanges de la gare de Saint-Chamond. Ils souhaitaient
ainsi créer une centralité dans ce quartier en devenir, et offrir de nouveaux services aux usagers du
train, pour plus de confort et de sécurité.
« Il fallait occuper cette gare, c’est une cathédrale ! »
Membres de l’unité « Gares » - Direction des
transports du conseil régional Rhône-Alpes
Deux projets se sont alors développés, l’implantation dans le bâtiment voyageurs d’un espace de
petite restauration labellisé « point TER » et celle d’un PIMMS. Le projet de « point TER » permet
d’offrir des services supplémentaires gratuits aux usagers. Il faisait partie de l’appel à projet « Points
TER »97 lancé par SCNF-Proximités appuyé par le conseil régional, en 2009, sur 14 gares de la région
Rhône-Alpes., contrairement à Vinay. En effet, la gare de Saint-Chamond avait été identifiée, dès ce
moment, comme un espace à retravailler où l’implantation d’un commerce et de services aux
usagers pouvait être pertinente. SNCF-Gares et Connexion loue donc une partie du hall d’attente à
un commerçant, qui y a ouvert, en 2011, une sandwicherie baptisée « Gare à l’appétit ».
15 - Commerce "Gare à l'appétit" en gare de Saint-Chamond
Le PIMMS, quant à lui, est une association financée par des grandes entreprises, souvent des exentreprises publiques, et par les pouvoirs publics pour faciliter l’accès des habitants aux services
publics. Une association des PIMMS de Saint-Etienne existe depuis les années 2000 et comptait
jusqu’alors 3 PIMMS sur l’agglomération. En partenariat avec la municipalité de Saint-Chamond qui
97 Se référer au chapitre II
- 74
-
Chapitre III
souhaitait l’implantation d’un relais de service public sur son territoire, il avait été envisagé dès 2010
d’en ouvrir un 4ème à cet endroit. L’implantation, dans le bâtiment voyageurs de la gare, s’est alors
imposée pour plusieurs raisons : le bâtiment voyageurs était grand, inoccupé et offrait donc de
l’espace disponible, il existait une réelle volonté des acteurs ferroviaires et locaux de les occuper par
des activités « vivantes », et enfin, la SNCF est l’un des partenaires-financeurs de l’union nationale
des PIMMS. Le projet d’une implantation d’un PIMMS dans le bâtiment voyageurs de la gare de
Saint-Chamond a donc été proposé par un partenariat entre la commune, la SNCF, l’union nationale
des PIMMS et l’association de PIMMS de l’agglomération stéphanoise en 2010. Il a reçu le soutien du
conseil régional Rhône-Alpes qui a participé à hauteur de 30% au financement de l’aménagement, en
complément de la SNCF et de la ville de Saint-Chamond. Celui-ci participe également au financement
du fonctionnement. Le PIMMS est donc implanté depuis juin 2013 dans le bâtiment voyageurs de la
gare et est ainsi locataires de SNCF-Gares & Connexions. Le PIMMS a également mis en place une
mission de médiation dans le hall d’attente en lui-même. Ce sont des éducateurs formés, chargés
d’apaiser les conflits d’usages, d’apporter une présence et un sentiment de sécurité aux usagers de la
gare et de mettre fin aux usages non désirés qui avaient pu y prendre place auparavant.
« Les gares ont vocation à devenir de véritables lieux de vie pour les voyageurs. L’installation
récente du PIMMS dans les locaux de la gare amène une forte dimension humaine au projet,
en proposant différents services de proximité à la population et avec la présence d’agents de
médiation. »
Extrait du dossier de presse pour l’inauguration
de la gare98
Ces différents services ont été pensés en synergie, dans un projet d’aménagement global, pour
venir répondre aux multiples enjeux de ce lieu et lui redonner une place de centralité, dans son
quartier futur, dans la ville et sur la ligne. Cet aménagement global et l’apport de services permettent
ainsi d’augmenter l’attractivité du quartier de la gare et son inscription dans la commune, tout en
répondant aux besoins des usagers du train mais également des habitants.
Dans le cadre de cette synergie d’équipements publics et de services aux usagers, tournés à la fois
vers la gare et vers la ville, un projet de micro-crèche a été étudié pour l’aile ouest du bâtiment,
aujourd’hui inoccupée. Celle-ci devait offrir quelques berceaux, sur le principe de la crèche en gare
de Roanne99, et permettre aux usagers du train de déposer leurs enfants sans détour, tout en créant
un service public manquant sur la commune.
Pour autant, le projet a été abandonné à cause des difficultés pour les différents partenaires
(SNCF-Gares & Connexions, SNCF-Proximité, la commune, la région, la CAF, la communauté
98 Dossier de presse pour l’inauguration de la gare de Saint-Chamond, op. cit.
99 Projet présenté dans le chapitre II
- 75
-
Chapitre III
d’agglomération) à trouver un accord sur le portage et la répartition des financements. Faute
d’accord et de financements suffisants de la part de SNCF-Gares & Connexions, l’aile ouest de la gare
a été laissée de côté et n’est toujours pas rénovée, ni utilisée à l’heure actuelle. Toutefois, lors de
notre rencontre avec les services techniques de la mairie, ceux-ci ont fait état d’un nouveau
lancement du projet de crèche dans cette aile, pour lequel les réflexions avec la SNCF redémarrent.
Pour ce projet de réhabilitation, la municipalité est donc sans prise directe les actions menées
(excepté un soutien financier aux services publics de type PIMMS ou gare) mais reste porteuse d’un
projet global et d’une volonté de développement futur pour le quartier. Elle a donc été en charge
d’un travail de coordination des différentes actions pour qu’elles s’intègrent dans sa réflexion globale
autour ce quartier. Elle s’est attachée à faire le lien entre les différents acteurs, à mettre en place des
espaces d’échanges d’informations et de réflexions communes entre les différents acteurs et à faire
intervenir des experts extérieurs comme l’agence d’urbanisme de Saint-Etienne, afin d’apporter de la
cohérence à la réalisation finale et de faciliter son intégration au projet de territoire.

Premier retour d’expérience : un équilibre économique précaire
Comme pour Vinay, le commerçant exprime une véritable difficulté à trouver un équilibre
économique à son activité. S’il est, installé au cœur d’une gare plus importante et plus passante que
celle de Vinay, il exprime toutefois la même difficulté à toucher les usagers du train.
« Les gens qui prennent le train ne consomment pas, parfois un petit café par-ci, par-là, mais
dans l’ensemble ils passent juste pour traverser la gare »
Commerçant en gare de Saint-Chamond
Il exprime sa difficulté à se dégager un salaire et même à maintenir son activité à flot, compte
tenu du peu de consommation de la part des voyageurs. Il a ainsi été obligé de demander des reports
de loyer à SNCF-Gares & Connexions. De la même façon que pour la commerçante de Vinay, il
cherche aujourd’hui à s’ouvrir vers l’extérieur de la gare pour toucher une clientèle plus importante,
mais se trouve confronté à un quartier, pour l’instant, encore en attente de rénovation, qui accueille
encore peu d’actifs et est peu attractif.
« Moi ma clientèle c’est surtout les gens de passage occasionnel, quelques habitués, et puis
les taxis aussi, ils en profitent pour faire un pause ici »
Commerçant en gare de Saint-Chamond
Il compte donc sur le développement futur du quartier, et notamment sur la construction de
bureaux pour attirer un nouveau public et se créer une véritable place de « café/brasserie du
quartier » et non de « buffet de la gare »
- 76
-
Chapitre III
« Y’a aussi des gens de l’extérieur, qui bosse dans le coin qui viennent parfois manger là ou
prendre un café… Et puis ils vont construire un nouveau bâtiment là, avec des bureaux…»
Commerçant en gare de Saint-Chamond
On constate également que les services demandés pour la labellisation et le référencement en
tant que « point TER » sont effectivement assurés et clairement affichés. Le commerçant touche ici
une rémunération en échange de ces services gratuits aux usagers. Ces services (Wi-Fi, prêt de
parapluies, appels d’urgence ou appels à un taxi gratuits, petites annonces) sont beaucoup utilisés
par les usagers.
« Ah oui les services ils sont demandés, y’a souvent des gens qui me demandent d’appeler un
taxi ou de charger leur téléphone. Vous avez vu tout à l’heure la dame ? Elle est venue me
porter un affiche pour le panneau d’annonces »
Commerçant en gare de Saint-Chamond
Toutefois, si cette rémunération est effectivement un complément intéressant pour le
commerçant, elle ne lui permet pas de se maintenir économiquement et vient remettre en question
l’existence même de ces services qui pourraient disparaître si le commerçant cessait son activité.
Concernant le PIMMS, il nous a été difficile de savoir s’il était utilisé par les voyageurs, mais le
directeur a plutôt fait allusion à un service tourné en priorité vers les habitants en difficulté et non
vers les usagers du train. Le lien avec la gare se fait alors plus par l’action des médiateurs en place sur
les quais et dans le hall d’attente. Le gestionnaire de « Gare à l’appétit » ne fait toutefois pas état
d’une clientèle qui viendrait du PIMMS. Ce manque de lien avec la gare et ses usagers, peut
notamment s’expliquer par l’organisation spatiale du bâtiment voyageurs. En effet, le PIMMS se situe
à l’extrémité du bâtiment voyageurs et dispose d’une entrée séparée sans lien avec la gare en ellemême, le hall, son « point TER » et son guichet.
16 - Positionnement des activités dans le bâtiment voyageurs
(source de la photo - Google maps)
- 77
-
Chapitre III
Les deux sites étudiés, Vinay et Saint-Chamond, sont donc extrêmement différents, que ce soit
par la taille des communes, les offres proposées, la fréquentation des gares concernées, mais
également par le mode d’action. Dans le premier cas, il s’agit d’un portage et d’un financement par la
municipalité, accompagnée de la région, dans l’autre, c’est SNCF-Gares & Connexions qui reste
propriétaire du bâtiment et le portage se fait à une échelle plus large (Communauté d’agglomération,
union nationale des PIMMS, etc.), coordonné par la municipalité et le conseil régional. Pour autant,
les deux retours d’expérience montre l’intégration d’un projet de gare dans un contexte global de
développement ou de renouvellement urbain du quartier de la gare et une difficulté à trouver un
équilibre économique pour les commerçants implantés en gare.
- 78
-
Chapitre III
- 79
-
Chapitre IV
Du discours stratégique aux projets locaux :
l’épreuve des territoires
- 80 -
Chapitre IV
En mettant en parallèle le discours national en faveur du développement du TER et des quartiers
de gare avec la politique portée en Rhône-Alpes par le conseil régional et par les directions
territoriales de SNCF-Gares & Connexions et SNCF-Proximités et avec la réalité des commerces et
services dans les gares rhônalpines, on observe un véritable décalage. Si la question de l’articulation
urbanisme-transport et d’un urbanisme tourné vers le rail semble aujourd’hui faire consensus, elle a
de réelles difficultés à se mettre en place et plus encore à se pérenniser dans le temps.
Le chapitre 2 a permis de commencer à expliquer les difficultés opérationnelles auxquelles se
heurtent les politiques pourtant volontaristes des régions. On a pu constater le nombre très
important d’acteurs participant aux projets et la difficulté à les coordonner, notamment sur la
répartition des financements. Ces difficultés, auxquelles s’ajoute le morcellement du foncier sur les
espaces des gares, peuvent conduire à l’abandon des projets.
Après avoir étudié deux projets aboutis et analysé leur fonctionnement, cette dernière partie vise
à tirer des enseignements plus globaux et à recontextualiser les politiques régionales et nationales.
- 81
-
Chapitre IV
1. La nécessité des collectivités locales de prendre le relais de
la SNCF
Face au désengagement de la SNCF sur les gares périurbaines100, le premier bilan qu’on peut tirer,
de notre étude, est la reprise en main de leur gestion et de leur devenir par les collectivités locales.
En effet, sur certaines gares, le coût de l’entretien d’un bâtiment voyageurs ou du maintien d’un
guichet étant jugé trop élevé par la SNCF, elle assure son obligation de service public auprès des
clients par un service réduit au strict minimum101. Les collectivités prennent ainsi le relais de la SNCF,
pour assurer un service public, qu’elles considèrent comme nécessaire en gare et dont la SNCF s’est
désengagée102.
Dans les discours locaux, comme dans les projets réalisés étudiés, on constate l’importante place
des collectivités, comme porteurs et financeurs principaux des projets de réhabilitation de bâtiments
voyageurs et d’implantation de commerces et services en leur sein.

La région, moteur d’une reprise en main des gares par les collectivités locales.
Le conseil régional, en tant qu’autorité organisatrice des transports ferroviaires régionaux, est un
des moteurs de la reprise de la gestion des gares par les collectivités locales, là où la SNCF ferme les
bâtiments voyageurs.
Comme nous l’avons évoqué, la région a porté des aides financières pour l’aménagement des
abords des gares, en faveur des collectivités. Le conseil régional accompagne les collectivités afin
qu’elles relaient la SNCF sur la gestion des gares TER, par ses incitations financières à la rénovation. Il
a également été un moteur de l’amélioration du confort des usagers en gares TER et du service qui
leur est offert, par sa politique de mise en place d’un service de base amélioré, qu’il a commandé
auprès de SNCF-Gares & Connexions, avec la mise en place de l’affichage dynamique ou l’installation
de consignes à vélo par exemple.
Pour la mise en place de commerces et de services, même s’inscrivant dans des politiques
nationales de TER comme les « points TER », pourtant normalement labellisés et rémunérés, le
désengagement de la SNCF apparaît également. Les « points TER » ne sont pas toujours suivis,
comme c’est le cas à Vinay par exemple, et l’appel à projets lancé en 2009 sur 14 gares n’a pas abouti
partout et n’a pas été renouvelé depuis. Alors que le conseil régional n’était que partenaire dans ce
premier appel à projets de 2009, il semble aujourd’hui réfléchir seul à la pérennité de ces dispositifs
100 Se référer au chapitre II
101 Accès au quai, communication des horaires par affichage papier, etc.
102 Espace d’attente fermé, présence humaine, etc.
- 82
-
Chapitre IV
et aux opportunités de les dupliquer en tirant les enseignements nécessaires des projets déjà
existants103.
Le conseil régional réagit également face à la politique de SNCF-Gares & Connexions de vendre les
bâtiments voyageurs fermés, car coûteux, sans regarder qui est l’acheteur et quel est le projet. En
effet, le conseil régional n’est pas favorable à ce que ce patrimoine passe dans les mains de
propriétaires privés et sorte ainsi du giron de la puissance publique.
« On a vu des bâtiments voyageurs vendus à des privés qui sont très bien entretenus, mais
d’autres qui sont complètements laissés à l’abandon, de vraies verrues »
Membres de l’unité « Gares » - Direction des
transports du conseil régional Rhône-Alpes
Dans cette optique, il favorise les rachats de ces bâtiments voyageurs par les collectivités, afin
qu’ils soient rénovés et entretenus par des acteurs publics. Pour l’unité « gares » de la direction des
transports du conseil régional Rhône-Alpes, dans le contexte actuel de restriction budgétaire, les
communes et intercommunalités doivent être un véritable partenaire de la remise en état des
bâtiments « voyageurs », mais aussi du développement du TER.
« Il n’est plus question aujourd’hui de financier des rénovations d’abords de gares sans
demander une contrepartie aux communes ! »
Membres de l’unité « Gares » - Direction des
transports du conseil régional Rhône-Alpes
Pour le conseil régional, cette contrepartie doit prendre la forme d’une appropriation des
bâtiments voyageurs abandonnés et de l’installation, à l’intérieur de ceux-ci, de services publics ou
de services aux usagers permettant d’éviter de réhabiliter les abords d’un bâtiment vide. Il souhaite
s’engager sur des projets, portés localement par les communes et les intercommunalités, qui
participeraient à la création de centralité autour des gares mais aussi au remplissage de ses trains,
sur des lignes parfois difficiles à maintenir économiquement.

Les communes et intercommunalités : des acteurs essentiels
Les communes et intercommunalités sont les partenaires privilégiés de la région pour prendre la
suite de la SNCF. Lorsque les bâtiments voyageurs sont à vendre, elles ont la possibilité de réinvestir
ces lieux, avec le concours financier du conseil régional. Elles sont également compétentes pour
mener les travaux de voirie pour l’accès à la gare, créer des parkings relais ou installer des points de
location vélos, par exemple.
103 Etude menée par un stagiaire de la direction des transports du conseil régional Rhône-Alpes, dans le cadre de la
préparation de la nouvelle convention SNCF/Conseil Régional
- 83
-
Chapitre IV
Plus encore, ce sont elles qui mènent les réflexions sur le développement urbain de leur territoire,
dans le cadre des PLU/PLU intercommunaux ou de leur participation aux SCoTs. A ce titre, elles sont
donc les acteurs opérationnels privilégiés de la réhabilitation des gares et de leur quartier. Par leur
volonté de rénover ces quartiers et d’en faire de véritables lieux de vie, elles sont des appuis précieux
au conseil régional pour l’implantation de commerces et de services.
Aujourd’hui, les projets de réhabilitation de gares, mais également d’implantation de services, ne
peuvent se faire sans la participation des communes et intercommunalités, appuyées, bien souvent
par les régions. A Vinay par exemple, où le bâtiment gare appartient à la commune, le conseil
régional a été un partenaire privilégié par son apport technique et financier. Le projet de SaintChamond, quant à lui, a été initié par le conseil régional dans le cadre du CPER sur un bâtiment
propriété de SNCF-Gares & Connexions, et n’aurait pu aboutir sans la participation active et
l’investissement de la municipalité, notamment sur la coordination avec les projets alentours et la
création du PIMMS. Comme l’expliquent Juliette Maulat et Arnaud Passalacquales, les collectivités
locales sont donc aujourd’hui les acteurs majeurs du ferroviaire : « Communes et intercommunalités
tendent aussi à prendre plus de poids dans les politiques ferroviaires. Leur contribution financière à
l’intermodalité et aux projets de gare, et leurs compétences en matière de transports urbains et
d’urbanisme en font des partenaires devenus incontournables.»104 .

Une substitution pertinente ?
Malgré tout, le transfert ou la réappropriation de ces enjeux de « service public ferroviaire », par
les collectivités locales et notamment les communes et les intercommunalités interroge.
Ce transfert, questionne d’abord les usagers du train et leurs associations. Pour la FNAUT, il n’est
absolument pas normal que ce soit aux collectivités, de payer pour un service correct destiné aux
usagers du train et normalement du ressort de la SNCF.
« Ce n’est pas aux collectivités de s’occuper des gares mais à la SNCF, ce sont ses gares, Il faut
arrêter de faire cracher les collectivités au bassinet pour un service de la SNCF ! A ça ils sont
très forts pour aller chercher l’argent ailleurs, c’est une entreprise de transport public ou
pas ?! »
Représentant régional de la FNAUT
Nous pouvons également pointer deux difficultés opérationnelles. La première est la
multiplication du nombre d’acteurs. L’implication et les financements des collectivités locales,
permettent aujourd’hui à des projets de rénovation de bâtiments « voyageurs » fermés et
d’implantation de services en gare de voir le jour. Cependant, l’implication de ces acteurs et l’apport
104 MAULAT Juliette et PASSALAQUA Arnaud « Les collectivités locales prises dans la nouvelle «bataille du rail» », 2014 ;
http://www.metropolitiques.eu; consulté en juin 2014.
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-
Chapitre IV
de leurs financements, s’ils permettent aujourd’hui de voir les gares et leurs abords se rénover,
participent également à l’augmentation du nombre d’acteurs à l’œuvre dans ce type de projet et
vient augmenter encore la complexité de leur mise en œuvre.
Ensuite, dans un contexte de réduction des dépenses publiques, qu’il s’agisse de l’Etat ou des
collectivités locales, ce « transfert de compétences », pose des questions de pérennité. En effet, le
conseil régional Rhône-Alpes agit aujourd’hui en parallèle de sa politique de transport ferroviaire,
pour en améliorer l’image et offrir un confort supplémentaire à ses usagers, mais sans que cela ne
soit strictement de sa compétence105, et on peut penser que les communes n’ont et n’auront pas
toujours les moyens d’investir lourdement en rachetant les bâtiments voyageurs.
Cette substitution des collectivités locales à la SNCF, et en premier lieu de la région, permettent
donc l’aboutissement de projets dans les gares TER périurbaines et le maintien de ces espaces dans
le giron de la puissance publique. Cependant, il s’agit pour l’instant de projets portés au cas par cas,
sans stratégie globale et qui posent la question de la pérennité de ces espaces et de la
systématisation de ce transfert dans un contexte de réduction des dépenses publiques.
105 Par exemple pour l’aide financière à l’achat de la halle marchandises RFF en faveur de la municipalité de Vinay
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Chapitre IV
2. Lutter contre la déqualification des gares et de leur quartier
Le second constat de cette étude montre que, contrairement aux arguments pouvant être
avancés dans les discours généraux, les projets de réhabilitation de gares et d’implantation de
commerces et services dans le bâtiment voyageurs semblent plus souvent inscrits dans un projet de
développement local et urbain, plus large qu’un seul projet de développement du transport. Cela
signifie que, pour les porteurs de projets, il s’agit souvent de requalifier un espace de la commune ou
de la ligne en désuétude, que ce soit le quartier ou la gare en elle-même. Il s’agit d’abord de favoriser
une réappropriation des lieux du transport par les habitants de la commune et les voyageurs.

La réappropriation de l’espace de la gare par les usagers
Comme nous l’avons déjà évoqué, les gares périurbaines se trouvent souvent dans des secteurs
auxquels l’urbanisation a tourné le dos, et donc, dans des quartiers peu aménagés et peu fréquentés.
Si les enjeux de l’urbanisme mettent clairement aujourd’hui le doigt sur la nécessité de rénover les
quartiers de gares et d’en faire les lieux du développement urbain à venir, se sont souvent
aujourd’hui des espaces peu urbanisés, voire déqualifiés, en attente d’une reconversion urbaine.
L’articulation urbanisme-transport passe donc, non seulement par une offre de transports adaptée
mais aussi par des opérations d’aménagement urbain : il s’agit de permettre aux usagers de se
réapproprier l’espace de la gare et ses abords.
A Vinay, le projet s’est inscrit dans une volonté claire de la municipalité de travailler à la
rénovation d’un quartier ayant vocation à accueillir le développement urbain futur de la commune.
La rénovation du bâtiment « voyageurs » et le choix d’implanter des commerces, à l’intérieur et à
proximité, viennent de la volonté de créer un cœur à ce nouveau quartier, de lui redonner vie et de
faciliter ainsi son développement futur. Il s’agit de participer au développement d’une centralité dans
un espace destiné à devenir une extension du bourg.
A Saint-Chamond, les enjeux territoriaux sont différents. Si le quartier de la gare a également
vocation à être un espace de croissance urbaine, l’enjeu de la rénovation de la gare se situait plutôt
dans la réappropriation du bâtiment voyageurs en lui-même qui était soumis à des usages non
souhaités. Il s’agissait de rendre la gare aux usagers du train, mais aussi aux habitants de la
commune, de la réintégrer dans la ville.
Si les contextes sont toujours différents, on constate toutefois que les deux projets de
réhabilitation de gare TER avec implantation de commerces et services étudiés, cherchent à
répondre à des enjeux plus larges que ceux du train. Il s’agit d’un élément dans un projet urbain,
souvent tourné vers la requalification et la revitalisation du quartier de gare dans son ensemble.
- 86
-
Chapitre IV

Les commerces et services : assurer une présence humaine
Dans ce but de réappropriation de l’espace et de revitalisation des quartiers de gares, les
commerces et services pouvant être implantés dans les gares ont alors des rôles importants à jouer,
par la présence et l’animation qu’ils apportent.
Dans un premier temps, ils relancent une activité dans un quartier souvent désaffecté et le font
vivre grâce à sa clientèle. C’est par exemple le cas des clients de la « halle fermière » de Vinay ou des
ouvriers qui viennent se restaurer chez Gourmand’Nine. L’idée est la même pour l’implantation du
PIMMS de Saint-Chamond qui fait venir les habitants dans le quartier de la gare, mais également
pour celui de la crèche de Roanne, de la « maison des services » de Notre-Dame de Briançon ou
encore de l’office de tourisme du Bois d’Oingt-Légny. Tous ces commerces et services, s’ils ne sont
pas forcément destinés à être utilisés par les voyageurs, ont pris place dans les gares ou à leur
proximité et participent ainsi à l’animation des quartiers de gare.
Ils permettent également d’apporter de la vie sur les sites des gares qui peuvent se déqualifier
très vite, lorsqu’il n’y a plus de présence humaine, que le bâtiment « voyageurs » soit ouvert ou non.
A Saint-Chamond, la mise en place des médiateurs du PIMMS a été un élément fort, avec la
réhabilitation, du retour du bâtiment « voyageurs » à des usages « normaux ».
La présence des commerçants contribue à sécuriser l’espace pour les usagers, et aide à mettre fin
aux usages non désirés. Elle répond au besoin de sécurité et d’apaisement des voyageurs et apporte
de la « chaleur humaine » dans un lieu de passage, froid et impersonnel. Plus que le service aux
usagers, les commerces implantés dans les gares TER périurbaines sont des vecteurs de vie et
d’animation et permettent de revaloriser l’image de ces lieux par leur simple présence.

Une gare attractive, vecteur de report modal ?
Les quelques retours d’expériences montrent que la création d’une gare plus attractive n’est pas
forcément un facteur d’augmentation de la fréquentation. A Saint-Chamond comme à Vinay, les
chiffres se maintiennent sur une tendance déjà existante de croissance du nombre de voyageurs
mais sans bond de celui-ci106. S’il est difficile de tirer des enseignements généraux des deux exemples
étudiés, la rénovation d’un bâtiment voyageurs ne semble donc pas être un facteur suffisant pour
permettre de développement du TER. Toutefois, les services en gare contribuent à requalifier l’image
de la gare et du train et à apporter plus de confort et de sécurité aux usagers. Il est donc essentiel
que la gare soit un espace accessible mais également attractif, ou au minimum qui ne repousse pas
les usagers à se diriger vers le train.
106 Comptages SNCF pour la direction des transports de la région Rhône-Alpes, 2012
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-
Chapitre IV
3. Le service aux voyageurs une utopie ?
Cette étude permet également de se pencher sur la viabilité de ces commerces et services
implantés dans les gares.

Les voyageurs périurbains, de faibles consommateurs
Les commerçants rencontrés nous en ont fait part, la direction régionale de SNCF-Gares &
Connexions et la direction des transports du conseil régional l’ont également évoqué, les usagers
quotidiens pendulaires du train ne sont pas de « grands consommateurs ». Leurs déplacements sont
routiniers et orchestrés de façon précise, ils arrivent à la gare peu de temps avant le départ du train.
Contrairement aux zones urbaines, leurs déplacements pour se rendre à la gare ou rentrer à leur
domicile se faisant souvent en voiture, on peut faire l’hypothèse qu’ils ont sur leur trajet ou à
proximité, un choix déjà étendu de commerces ou de services. Faire un arrêt supplémentaire ou un
petit détour ne serait alors pas une véritable contrainte et ne les amènerait pas à se tourner vers les
services ou commerces en gare afin de les éviter.
Malgré tout, les enquêtes107 auprès des usagers des transports font écho d’un attrait des
voyageurs pour l’implantation de commerces ou services dans leur gare.
On remarque, de plus, que les services gratuits, qu’il s’agisse des toilettes de l’espace d’attente à
Vinay ou des services points TER proposés par « Gare à l’appétit », sont bien utilisés et que la
présence d’un personne dans la gare est appréciée.
« Les gens ne prennent plus leur parapluie, ils savent que j’en prête, ils les utilisent »
Commerçant en gare de Saint-Chamond
Les services viennent donc répondre à une demande des usagers même si la consommation des
services marchands reste limitée au regard du potentiel de clientèle.

La nécessité de s’intégrer à un tissu commercial global
Afin de faire face à l’absence de clientèle suffisante de voyageurs pendulaires, les commerces
doivent alors êtres tournés vers la ville et chercher à s’intégrer à un tissu commercial plus global. Ils
doivent proposer une offre qui n’existe pas encore sur la commune et le secteur, et non se
positionner comme un commerce ou service à destination unique des voyageurs. Même pour les
gares « importantes » de la région, celle de Saint-Chamond en faisant partie, on constate rapidement
que la seule clientèle du train ne peut suffire à maintenir le commerce à flot.
107 Sondage CSA effectué pour SNCF-Gares & Connexions 2014, (op. cit.), et enquête de la région Alsace « Revitaliser les
gares et favoriser leur accessibilité en mobilité alternative » (2014, op. cit.) présentés dans le chapitre II, partie 2
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-
Chapitre IV
La commerçante de Vinay explique notamment que c’est bien la restauration du midi qui lui
permet de maintenir son activité et non les quelques cafés vendus le matin aux voyageurs. Et cette
restauration rapide du midi, si elle fonctionne, c’est parce que la commerçante est la seule à offrir ce
type de repas chaud, à un prix raisonnable et dans un endroit abrité sur le secteur. De la même
façon, le café de Saint-Chamond se positionne comme le seul café du secteur, dans un espace
aujourd’hui en difficulté, mais destiné à être réhabilité.
Dans cette optique d’intégration à l’offre commerciale communale, la gare dispose d’un atout
indéniable pour faire vivre ses commerces en dehors, des usagers du train, elle dispose d’un parking
permettant aux consommateurs d’accéder aux commerces par la route et non par le rail !
« Les gens viennent en voiture, ils se garent sur le parking, c’est pratique. »
Gestionnaire de la halle fermière
La localisation de la gare est également un facteur déterminant à son intégration à l’offre
existante. Dans les communes où les gares sont implantées dans des espaces périphériques, la
question de la concurrence à la centralité existante du bourg, doit être également étudiée et
envisagée pour permettre au commerce d’exister. Si la gare doit devenir une centralité commerciale,
elle ne doit pas l’être au détriment de l’offre existante pour permettre un développement local
harmonieux et complémentaire. A Vienne, par exemple, le café/snack de la gare, labellisé « point
TER » a du mal à trouver une véritable clientèle mais la gare se trouve en plein centre-ville et est
entourée de nombreux commerces (tabacs, cafés) lui créant ainsi une concurrence directe.
Il en est de même pour les implantations de services, ceux -ci ne doivent pas cibler uniquement
les voyageurs mais aussi les habitants dans leur ensemble et être tournés vers le projet de
développement urbain à venir autour de la gare et non vers la gare elle-même. Ils doivent également
apporter un complément et un relais à l’offre existante sur le territoire.

Quelle pérennité économique pour ce modèle ?
Compte tenu de ces difficultés, pour les commerces et services implantés en gare, à se faire une
véritable clientèle et sachant qu’ils ne peuvent compter sur l’apport des voyageurs, la question de la
pérennité de ces commerces doit donc être envisagée et étudiée dans le détail, même si, pour les
services publics (crèche, PIMMS), ces contraintes n’appliquent pas dans les mêmes mesures.
Dans un premier temps, la gare peut donc être un support d’activités, si elle est tournée vers le
quartier mais également si le commerce est aidé financièrement. Que ce soit pour Saint-Chamond ou
Vinay, on constate une véritable difficulté des commerçants à faire face aux charges et notamment
aux loyers. Pourtant ces loyers restent relativement faibles, la municipalité et SNCF-Gares &
Connexions ne souhaitant aider le commerçant à maintenir sa présence en ces lieux.
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Chapitre IV
« On ne cherche pas à les assommer les commerçants, les loyers ne sont pas là pour les
couler »
Directeur de l’exploitation - Agence Centre-Est
SNCF Gares & Connexions
Il parait donc nécessaire que le commerçant soit aidé, au moins au moment du lancement du
projet par un loyer modique, au regard du service et de l’animation du lieu qu’il offre aux usagers
permettant de faire de la gare une nouvelle centralité.
Il pourrait également être utile que la politique de SNCF-Proximités sur la gestion des « points
TER » soit clarifiée : que le service soit réellement assuré et affiché, mais en échange d’une
rémunération pour les commerçants. Cela leur attribuant ainsi un complément de salaire qui
viendrait également prendre en considération la plus-value qu’ils apportent à la gare, en dehors de
leur commerce. L’animation du réseau des « points TER » semble aussi une opportunité à envisager
pour permettre aux commerçants, dès leur installation, de partager leurs expériences, cibler leur
clientèle, et construire en regard une offre pertinente. Si aujourd’hui, il n’existe pas d’animation et
de partage de retours d’expérience de ce type, de façon institutionnelle, elle prend toutefois forme
de façon informelle. La commerçante de Vinay explique ainsi qu’elle est allée voir le « point TER » de
la gare de Vienne, avec la municipalité, avant son installation pour savoir comment cela fonctionnait
et qu’elle a également échangé avec la commerçante qui vient de reprendre le café situé en face de
la gare de Saint-Marcellin.
« Elle est venue me voir pour voir comment ça s’était passé ici, pour qu’on discute un peu »
Commerçante en gare de Vinay
Enfin lorsque le commerce est dans le bâtiment voyageurs, son aménagement doit être pensé de
façon globale : les différents espaces et leurs usages doivent être définis et facilement identifiables
pour permettre l’installation du commerce, tout en offrant aux usagers les services désirés. Dans
cette étude, l’exemple de l’espace d’attente de la gare de Vinay montre bien la difficulté à répondre
à la fois aux attentes du gestionnaire, du commerçant et des usagers, lorsque la répartition de
l’espace n’est pas bien définie. Les accès doivent également être pensés afin de favoriser une
synergie du projet dans sa globalité et faire fonctionner ensemble les différents services et
commerces, présents sur un site. A Saint-Chamond, si le commerçant parle de très bonnes relations
avec les agents du PIMMS, ils occupent toutefois deux espaces bien distincts, le PIMMS disposant
d’un accès extérieur direct et n’étant donc pas réellement intégré au « pôle gare ».
Enfin, le fonctionnement d’un commerce tourné vers le quartier dans son ensemble, implique que
son implantation soit également en adéquation avec le projet urbain entourant la gare. En effet, à
Vinay comme à Saint-Chamond, les commerces ont été installés en parallèle de la rénovation du
bâtiment gare, puisqu’ils étaient principalement destinés aux voyageurs et devaient amener vie et
- 90
-
Chapitre IV
apaisement dans cet espace de passage. Si ce choix s’explique, il se traduit aujourd’hui par des
commerces situés dans des zones en attente de réhabilitation, et peu fréquentées en dehors des
heures de pointe, où il leur est donc particulièrement difficile de se maintenir économiquement.
Les usagers du train considèrent que la présence de commerces et services en gare leur apporte
un véritable plus, mais les commerçants expriment cependant une difficulté à trouver un équilibre
financier avec cette clientèle. Pour cela, ils doivent donc se tourner vers le quartier qui les entoure et
s’intégrer au tissu commercial de la commune afin de devenir une offre particulière, à part entière et
portée par les aménagements réalisés aux abords de la gare.
- 91
-
Chapitre IV
4. La difficile définition d’une politique unique pour des gares
périurbaines diverses
Enfin, cette étude nous permet de montrer la difficulté, voire l’impossibilité à mettre en place
une politique, unique, déclinable sur l’ensemble des gares périurbaines.

Les gares périurbaines, des objets et des environnements divers
Si une homogénéisation de politique est déjà difficile à mettre en œuvre pour la SNCF sur les 220
gares d’intérêt national, dites « gares de catégories A » du réseau, il semble évident qu’une unique
politique systématique de déploiement de commerces et de services n’est pas envisageable sur les
3 380 gares françaises restantes.
En effet, les gares périurbaines sont des objets très divers, de par leur nature et leur
environnement. Comme l’expliquent les parties précédentes, le contexte local est un facteur majeur
de l’implantation de commerces et de services dans celles-ci, que ce soit par la place grandissante
que prennent les collectivités territoriales dans le processus de réhabilitation des bâtiments
« voyageurs », par le projet territorial global dont découle celui de la gare ou par la nécessité, pour
les services implantés, à se tourner vers la ville et pas seulement vers le train pour fonctionner. Parce
que les territoires sont différents, à l’échelle de la commune, du bassin de vie ou de la ligne TER qui
dessert la gare, et parce que les projets ne peuvent pas fonctionner sans lien avec le territoire, la
prise en compte du contexte local est essentielle.
L’enquête de la région Alsace108 montre par exemple de très importantes disparités sur les
attentes de voyageurs. Si, dans l’ensemble, ils sont favorables à l’implantation de commerces et
services dans les gares TER périurbaines d’où ils viennent, les divergences sont fortement marquées
quand on évoque le type de services qui répondrait à leurs besoins. Par exemple, 68% des enquêtés
se déclarent favorables à la distribution de paniers fraîcheurs dans la gare d’Herrlisheim, alors qu’ils
ne sont que 45% en gare de Molsheim où ils plébiscitent plutôt l’implantation d’un commerce de
petite restauration ou d’un boulangerie (69% contre 58% à Herrlisheim)
L’implantation territoriale du service ou du commerce et son inscription dans un contexte
commercial et serviciel local influent donc énormément sur les attentes des voyageurs et sur l’usage
qu’ils en feront ensuite.
La place de la gare dans la ville et son accessibilité sont également d’importants facteurs à
prendre en compte. Les gares, en elles-mêmes, sont également extrêmement différentes, en termes
de taille du bâtiment voyageurs, d’aménagement, d’espace disponible ou encore de fréquentation.
108 Région Alsace, « La politique d’aménagement des gares de la région Alsace Mode d’emploi », 2014 (en cours)
- 92
-
Chapitre IV
Tous les bâtiments voyageurs n’offrent pas les mêmes opportunités d’installation d’un commerce ou
d’un service.

Une volonté de créer des outils pour faciliter le déploiement des commerces et
services
La nécessaire contextualisation des projets rend donc impossible l’application d’une unique
politique globale sur l’ensemble des gares TER ou même des gares périurbaines.
Pourtant, le conseil régional explique sa difficulté à gérer aujourd’hui les projets de ses 260 gares
au cas par cas, de la même façon qu’SNCF-Gares & Connexions. Cette gestion ne leur permet pas,
aujourd’hui, d’avoir une vision globale des gares périurbaines TER de la région et une politique
cohérente. Le conseil régional exprime donc sa volonté de passer à un processus « semi-industriel »,
afin de développer des réponses plus générales aux projets d’implantation de commerces et services
en gare, et d’en faciliter les procédures.
Dans cette optique, la région est en cours de réalisation d’une typologie de gares, prenant en
compte le niveau de service qu’il est pertinent d’y assurer, compte tenu de leur fréquentation, mais
également de leur contexte territorial. Elle cherche aussi à identifier les différents leviers
opérationnels dont elle dispose pour inciter et soutenir la création de commerces et services dans les
gares de son réseau TER, dans le but d’inscrire les plus pertinents dans la prochaine convention
qu’elle signera avec SNCF-Gares & Connexions sur l’utilisation des gares. Par cet accord, le conseil
régional souhaite également réinvestir SNCF de ces questions.
De la même façon, la direction de l’exploitation de SNCF-Gares &Connexions a entrepris un
recensement de ces espaces disponibles en gare afin d’identifier le patrimoine qu’elle peut vendre
ou louer et proposer une réponse cohérente et adaptée aux projets pouvant lui être proposés. La
simplification de ces procédures se traduit également par un accord passé entre SNCF/RFF et
l’association des maires de France109, afin de garantir plus de clarté sur les démarches à mettre en
œuvre pour implanter un projet en gare et sur les attentes et les contraintes de la SNCF à respecter
dans ces lieux.
Si l’implantation locale dans les projets est un facteur essentiel au bon fonctionnement des
projets et qu’elle s’oppose à une politique systématique, une stratégie est aujourd’hui en cours
d’élaboration par les acteurs institutionnels du ferroviaire, aux niveaux régional et national. Elle
109 Charte « Construire ensemble la gare durable de demain et son quartier dans la ville », avril 2012 ;
http://www.rff.fr/IMG/pdf/charte-durable-GC_AMF_RFF-avril2012.pdf ; consulté en juin 2012
- 93
-
Chapitre IV
passe par la définition d’outils et d’objectifs clairs, éléments d’une politique cohérente mais adaptée
aux différentes réalités du terrain.
Ces politiques sont aujourd’hui en cours de développement, elles se basent sur des retours
d’expérience récents comme ceux présentés dans cette étude.
L’enjeu est notamment de simplifier les procédures d’accès aux gares pour les commerçants, des
difficultés de procédure et des durées d’instruction importantes de la part de la SNCF étant
constatées. Mais il s’agit aussi de soutenir des projets pérennes économiquement, afin d’éviter la
déconvenue du « Buffet de la gare » de Saint-Gervais en Haute-Savoie qui a été approuvé par SNCFGares & Connexions, soutenu financièrement par le conseil régional, mais qui a fermé ses portes
après 6 mois d’exploitation du fait de difficultés financières.
Une des difficultés majeures évoquées par les acteurs, est donc la complexité à faire atterrir sur le
terrain, des réflexions globales et théoriques à une échelle plus large. Cette politique générale ne
peut donc se développer sans contextualisation, pour correspondre aux enjeux locaux, aux attentes
des usagers, mais aussi à la réalité et la complexité opérationnelle du terrain.
Si le débat est aujourd’hui plutôt consensuel et que l’on se trouve face à un véritable engouement
pour le développement des commerces et services dans les gares périurbaines, l’étude montre une
certaine déconnexion entre les discours généraux et les conditions de mise en œuvre réelles des
projets. Si les premiers évoquent les enjeux majeurs de transport et de services aux usagers du train,
dans la réalité, les projets se montent pour répondre à un besoin de développement local et urbain
et doivent coïncider avec les attentes des usagers et des habitants.
- 94
-
Chapitre IV
- 95
-
Conclusion
Cette étude a mis en évidence les dynamiques multiples dont les gares périurbaines font l’objet.
La question de l’implantation de commerces ou de services dans ces gares interroge des politiques
qui dépassent celles des transports et des déplacements. Elle touche également les politiques de
l’aménagement, mais aussi du développement économique local et pose des questions
administratives, juridiques ou encore financières complexes.
Nous avons, dans un premier temps, présenté les enjeux nationaux, de déplacements mais
également d’aménagement qui font, des politiques de développement des transports en commun, et
notamment du TER dans les espaces périurbains des villes-centre, des questions majeures. Ces
enjeux font des gares des points centraux dans le processus de valorisation des transports en
commun, mais également de lutte contre l’étalement urbain. L’exemple des gares majeures du
réseau ferré français, où se sont peu à peu implantés des commerces, jusqu’à devenir de véritables
centres commerciaux, fait naître des nouvelles perspectives de développement pour les gares
périurbaines. Cette idée de décliner l’implantation des commerces et services dans des gares moins
importantes semble aujourd’hui faire son chemin et est reprise par les acteurs du ferroviaire comme
par ceux des collectivités. Les régions notamment, ainsi que la SNCF, lancent des réflexions et des
expérimentations sur ce thème.
Dans un second temps, l’étude s’est penchée sur l’exemple de la région Rhône-Alpes et sur la
façon dont cette réflexion se met en œuvre sur son territoire. On constate que le conseil régional, en
tant qu’autorité organisatrice du transport express régional, est aujourd’hui moteur du
développement des commerces et des services en gare, après avoir effectué d’importantes
améliorations sur la desserte ferroviaire, la rénovation des gares et de leurs abords, et l’information
aux voyageurs. Toutefois, quand on regarde la réalité du terrain, ces services et commerces sont
aujourd’hui très peu implantés dans la région et les usagers, s’ils expriment leur intérêt, ne font pas
des commerces et services en gare une priorité. Le faible nombre de projets réalisés, peut s’expliquer
par la gestion complexe des gares, partagée entre un nombre important d’acteurs, avec une
répartition des compétences et du foncier peu claire. A cela vient s’ajouter les objectifs et les enjeux
propres à chaque acteur, pour le développement des commerces et services dont un désengagement
de la SNCF sur les bâtiments voyageurs des petites gares périurbaines.
Dans une troisième partie, l’étude des exemples de la gare de Vinay (38) et de Saint-Chamond
(42) a mis en parallèle deux projets bien différents pour comprendre comment peuvent être mises
en œuvre ces politiques sur le terrain. Dans le cas Vinay, c’est la municipalité, accompagnée de la
région, qui a mis en place le projet et l’a financé. Il vient s’inscrire dans un projet plus global de
développement urbain tourné vers le quartier de la gare, dans le cadre de la mise en œuvre du PLU
- 96 -
Conclusion
de la commune. A Saint-Chamond, c’est SNCF-Gares & Connexions qui est propriétaire du bâtiment.
Le projet correspond à un ensemble d’actions menées par des partenaires différents (municipalité,
communauté d’agglomération, SNCF-Gares & Connexions, union nationale des PIMMS, etc.), et est
coordonné par la municipalité et le conseil régional. Ici, c’est à un projet de rénovation urbaine que
vient participer la requalification de la gare. Bien que très différents, les deux retours d’expérience
montrent l’intégration de la rénovation de la gare dans une réflexion territoriale plus large et
mettent en évidence la difficulté à trouver un équilibre économique pour les commerces.
L’analyse de cette enquête met en avant la nécessité d’une contextualisation des politiques
générales pour permettre un déploiement des services et commerces dans les gares périurbaines.
Dans un premier temps, on constate la nécessité pour les collectivités locales de s’emparer de cette
question face au désengagement de la SNCF, que ce soit la région, qui travaille à la mise en place
d’une politique servicielle, ou les communes et intercommunalités appelées à investir aux abords des
gares et parfois même dans les bâtiments voyageurs. Dans un second temps, on s’aperçoit que les
projets d’implantation de services et commerces dans ces gares périurbaines viennent s’intégrer à
des projets territoriaux globaux, et ne sont pas seulement centrés sur la gare et le train. Ils
participent à la requalification de ces quartiers de gares plus qu’au développement de l’utilisation du
TER. Dans un troisième temps, la question de la rentabilité économique des services marchands
vient se poser, la clientèle pendulaire du train n’étant pas suffisante pour leur permettre de se
maintenir économiquement. Il devient alors important, pour les commerces, de se tourner vers le
quartier qui les entoure et de s’intégrer au tissu commercial de la commune pour pouvoir continuer
à exister. Enfin, on observe qu’il est extrêmement difficile, voire impossible de proposer une unique
politique d’installation de commerces et de services dans les gares périurbaines puisqu’elles sont des
objets très divers. Malgré tout, les collectivités et la SNCF cherchent aujourd’hui à mettre en place
des outils d’évaluations et des procédures simplifiées pour définir une politique claire, mais
territorialisée, et aider les porteurs de projets à s’y retrouver entre les nombreux acteurs concernés.
Si les gares périurbaines sont des points d’enjeux majeurs pour le transport comme pour
l’urbanisme, leur développement, par l’implantation de commerces et de services dans les bâtiments
voyageurs, ne peut être mis en œuvre que par une inscription du projet dans une réflexion urbaine
global, et ne peut pas, non plus, être envisagé comme un simple service supplémentaire offert aux
usagers du train. Ces politiques sont encore aujourd’hui balbutiantes et devraient monter en
puissance dans les années qui viennent. Changeront-elles durablement l’image et la fonction des
gares ? Permettront-elles de réintégrer les gares dans leur environnement urbain, et de les consacrer
comme point de centralité ?
- 97
-
Bibliographie
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OLLIVIER-TRIGALO Marianne « Politiques de transport : où en sont les Régions ? Actions,
doctrines et institutionnalisation », Revue d’Economie Régionale et Urbaine, juillet 2009.
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Dossier « La gare demain », Ville, rail & transports, 22 avril 2009.
-
Dossier « Les commerces dans les gares : un service dans la chaîne du voyage », Revue générale
des Chemins de fer, mai 2007.
- 98
-
Etudes :
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AMF et SNCF - Gares & Connexions, « Construire ensemble la gare durable de demain et son
quartier dans la ville », avril 2012.
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Beaucire Francis, « Sur la relation transports/urbanisme : « Mobilité et territoires ; Contributions
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CERTU, « Stratégies foncières aux abords des gares TER (fiches n°1 à 5) », 2012-2014.
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DDT 38, « Observation des effets des aménagements ferroviaires dans le sillon alpin Sud de
Valence TGV à Moirans », 2014 (en cours).
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Commissariat général au développement durable, « La mobilité des français. Panorama issu de
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INSEE, « Les déplacements domicile-travail amplifiés par la périurbanisation », Insee Première N°
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INSEE, La Lettre Analyses n°199, juin 2013.
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KELLER Fabienne, « La gare contemporaine », Rapport ministériel, 2009.
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La 27ème Région, « Corbigny, la gare rurale de demain - résidence n°11 - immersion créative en
pays corbigeois », janvier 2011.
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Pays du Sud-Grésivaudan, « Contribution au Scot de la région urbaine de Grenoble », juillet 2010
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POPOVA Svetlana, « L’aménagement serviciel des gares est-il un avancement vers la Gare du
Futur? » Mémoire de Master 2, Université Pierre Mendès-France de Grenoble, Institut
d’Urbanisme de Grenoble, 2009.
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Région Alsace, « La politique d’aménagement des gares de la région Alsace Mode d’emploi »,
2014 (en cours).
-
Région Alsace, « Revitaliser les gares et favoriser leur accessibilité en mobilité alternative »,
2014 (en cours).
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Région Rhône Alpes, « Schéma régional des Services de transports », 2006.
-
Région Rhône Alpes, « Bilan du Suivi 2009 du SRTS de la région Rhône-Alpes fiche action n°7 »,
2009.
-
SNCF – Gares et Connexions, « Document de référence des gares de voyageurs révisés pour
l’horaire de services 2014 », mars 2014.
Matériau complémentaire
-
Bahn.Ville 2, « Favoriser le développement d’un urbanisme orienté vers le rail : Concevoir la ville
à partir des gares », rapport final, 2009.
-
CAUE 63 Compte rendu de la journée d’échanges « à la croisée des chemins les services », 17
avril 2014.
-
CERTU Compte rendu de la journée d’échanges sur le foncier autour des gares périurbaines, 8
novembre 2013.
-
Conseil de développement du Grand Lyon, « Espaces de mobilité et pôles d’échanges : nouvelles
opportunités, nouveaux usages urbain, nouveaux services », 2013.
-
Région Picardie - Direction Régionale de l’Aménagement « Développer les fonctions de
centralités autour des quartiers de gares - cahier d’intentions », 2010.
-
SNCF- Gares et Connexions « Synthèse des Ateliers de la gare », saison 1 à 4, 2010 à 2013.
- 99
-
Table des illustrations
1- Gare moyenne urbaine (Givors ville - 69) .................................................................................................- 7 2- Point d'Arrêt Non Géré (Alaï - 69) .............................................................................................................- 7 3 - Schéma du groupe SNCF et filiales de sa branche "Gares & Connexions" .......................................- 8 4 - Aménagement de la gare de la Verpillère (69) ...................................................................................... - 37 5 - Partage du foncier sur un site ferroviaire (source - publication CERTU) ........................................ - 46 6 - Situation géographique de Vinay (source - OpenStreetMap) ............................................................. - 56 7 - Plan de la ville de Vinay (source - OpenStreetMap) ............................................................................ - 59 8- Gare de Vinay en 2007 ( source - direction des transports du conseil régional Rhône-Alpes) ..... - 60 9 - Gare de Vinay en mai 2014 ...................................................................................................................... - 62 10 - Halle fermière, mai 2014 ........................................................................................................................ - 63 11- Schéma de principe du bâtiment voyageurs de la gare de Vinay....................................................... - 66 12 - Situation géographique de Saint-Chamond (source - OpenStreetMap) ......................................... - 69 13 - Plan du quartier de la gare de Saint-Chamond (source - OpenStreetMap) .................................... - 72 14 - Gare de Saint-Chamond rénovée, avril 2014 ...................................................................................... - 73 15 - Commerce "Gare à l'appétit" en gare de Saint-Chamond ................................................................ - 74 16 - Positionnement des activités dans le bâtiment voyageurs (source de la photo - Google maps) - 77 -
NB : Toutes les illustrations dont la source n’est pas indiquée dans la légende sont la propriété de
l’auteur.
- 100
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ANNEXES
Liste des entretiens menés (13)

Directrice de la mission « Temps et services innovants » - Grand Lyon, Direction de la
Prospective et du Dialogue Public - 2 avril 2014

Directeur de l’exploitation - Agence Centre-Est d’SNCF Gares & Connexions - 7 avril 2014

Gestionnaire du PIMMS de la ville de Saint-Chamond - entretien informel - 8 avril 2014

Membres de l’unité « Gares » - Direction des transports du conseil régional Rhône-Alpes 3 entretiens les 15 avril, 25 avril et 13 juin 2014

Directrice générale des services - Commune de Vinay - 12 mai 2014

Représentant régional de la FNAUT et président de l’association « Améliorer les
Déplacements et les Transports en Loire Sud » - 19 mai 2014

Gestionnaire du commerce « Gare à l’appétit » en gare de Saint-Chamond - 19 mai 2014

Directrice de l’urbanisme - Services techniques de la ville de Saint-Chamond - 19 mai 2014

Gestionnaire du commerce « Gourmand’Nine » en gare de Vinay - 22 mai 2014

Gestionnaire de la « halle fermière » de Vinay - 22 mai 2014

Maire de Vinay - Entretien téléphonique - 26 mai 2014

Ancien élu au développement économique de Saint-Chamond - correspondance
électronique - à partir du 28 mai 2014
Annexes - 2
Liste, non exhaustive, des services et commerces repérés dans les « petites » gares de
Rhône-Alpes :
Aix-les-Bains :
retrait de paniers fraicheur
Ambérieu :
retrait de paniers fraicheur
Amplepuis :
PIMMS en projet
Annecy :
Boutique du quotidien, retrait de paniers fraicheur
Annemasse :
retrait de paniers fraicheur
Belleville :
retrait de paniers fraicheur
Bois d’Oingt - Légny :
Office du tourisme et pôle de commerces (boulangerie, cave,
épicerie) à proximité, bâtiment voyageur transformé en pizzeria,
Chambéry :
retrait de paniers fraicheur
Charbonnières-les-bains :
retrait de paniers fraicheur
Donzère :
PIMMS
Firminy :
retrait de paniers fraicheur
Givors ville :
café de la gare en face
Grenoble :
retrait de paniers fraicheur
La Léchère -:
maison des services (Notre Dame de Briançon )
Lozanne :
retrait de paniers fraicheur
Lyon Jean Lacé et Perrache : retrait de paniers fraicheur
Montélimar :
buffet de la gare
Montmélian:
retrait de paniers fraicheur
Roanne :
crèche et point TER
Saint Chamond :
point TER (petite restauration) et PIMMS
Saint-Etienne Chateaucreux : retrait de paniers fraicheur
Sainrt marcellin :
café de la gare, en face
Vienne :
point TER (petite restauration)
Vinay :
point TER (petite restauration) et halle fermière
Voiron :
café de la gare
Annexes - 3