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le point sur… Mycobactéries non tuberculeuses : quoi de neuf ? L’incidence de maladie pulmonaire à mycobactéries non tuber culeuses (MNT) est en augmentation. Le diagnostic de MNT nécessite la présence d’une constellation clinique radiologique et microbiologique. Les patients plus particulièrement à ris que sont des malades avec des maladies respiratoires chro niques. Le traitement des MNT est long et nécessite la combi naison de multiples antibiotiques. Les récidives et réinfections ne sont pas rares. Notre compréhension est incomplète sur beaucoup d’aspects de la maladie à MNT. Davantage de re cherches sont nécessaires afin d’élucider les mécanismes de défense de l’hôte et les facteurs déterminants de l’évolution vers la maladie pour pouvoir agir avec de nouvelles thérapies. Rev Med Suisse 2009 ; 5 : 2344-50 J. Mazza-Stalder K. Jaton-Ogay L. Nicod Dr Jesica Mazza-Stalder Pr Laurent Nicod Service de pneumologie Dr Katia Jaton-Ogay Laboratoire du diagnostic moléculaire et des mycobactéries Institut de microbiologie CHUV, 1011 Lausanne [email protected] [email protected] [email protected] Non tuberculous mycobacteria : what’s news ? The incidence of NTM (non tuberculous my cobacteria) pulmonary disease is increasing. The diagnosis must be established in the pre sence of clinical, radiological and microbiolo gical findings. Groups at risk to contract pul monary disease due to NTM are patients with underlying structural lung disease. Treatment of NTM is long and requires multiple drugs combinations. Relapses and re-infection are not rare. Our understanding in many matters of NTM pulmonary disease is incomplete. Further research is necessary in order to un derstand the host’s defense mechanisms against NTM, and the factors that influence the evolution to lung disease. introduction Les mycobactéries non tuberculeuses (MNT) sont des germes de l’environnement qui peuvent envahir un hôte et causer des infections pulmonaires, cutanées ou lymphatiques chez le sujet immunocompétent ou occasionner des infections disséminées chez le sujet immunodéprimé. Elles se différencient des myco bactéries tuberculeuses, qui elles sont des pathogènes obliga toires et dont le réservoir est soit l’être humain, soit les autres mammifères. Les MNT, en anglais appelées Non tuberculous myco bacteria (NTM), ou Mycobacteria others than tuberculosis (MOTT), pré sentes dans la terre, l’eau, les aérosols, les plantes, ne sont pas des pathogènes obligatoires et pendant longtemps, la communauté scientifique, qui se consacrait plutôt à l’épidémie de tuberculose, ne s’y est pas intéressée. Ces mycobactéries étaient considérées comme des bactéries saprophytes et leur pouvoir pathogène n’était pas reconnu. D’autre part, la reconnaissance de groupes particuliers à risque a fait accroître le niveau d’intérêt général pour des MNT et a motivé la publication des nouvelles guidelines de l’American Thoracic Society (ATS).1 Le but de cette revue est d’aborder de façon très synthétique quelques notions sur la classification, l’épidémiologie, la pathogenèse et les critères diag nostiques, microbiologiques et radiologiques des MNT, ainsi que des commen taires sur leur traitement. Finalement, certaines entités cliniques particulières dans lesquelles les MNT sont souvent retrouvées seront également citées. classification et taxonomie L’identification et la classification des MNT sont en pleine évolution. Ernest Runyon fut le premier à élaborer, en 1959, une classification des MNT basée sur plusieurs caractéristiques biochimiques et culturales.2 Mais actuellement, seules quelques caractéristiques phénotypiques telles que le temps de croissance, l’aspect des colonies et la coloration de Ziehl sont encore prises en compte tandis que les autres tests, de réalisation difficile et de lecture tardive, ont été aban donnés et remplacés par des tests génotypiques plus rapides et plus fiables. En 1997, selon les documents de l’American Thoracic Society, il y avait officiel lement 50 espèces de MNT qui avaient été identifiées.3 Actuellement, plus de 2344 Revue Médicale Suisse – www.revmed.ch – 18 novembre 2009 34446_2344_2350.indd 1 Revue Médicale Suisse – www.revmed.ch – 18 novembre 2009 0 12.11.09 08:27 125 espèces ont été cataloguées. Cette augmentation im portante touche non seulement le nombre total des es pèces mais également le nombre d’espèces cliniquement significatives. Ces changements sont le reflet de l’améliora tion des techniques de microbiologie pour l’isolement et la croissance des MNT et, surtout, des progrès des techni ques moléculaires avec le développement et la reconnais sance du séquençage du gène codant pour l’ARN 16S ribo somal (16S rRNA) comme standard pour la définition d’une nouvelle espèce. Le 16S rRNA est composé d’une séquen ce de 1500 nucléotides codés par l’ADN 16S ribosomal (16S rDNA). Ce dernier est un gène très conservé avec des régions communes à tous les organismes, mais également avec des régions variables. Les séquences nucléidiques de certaines de ces régions variables permettent l’identifica tion de la plupart des MNT ; cependant certaines espèces comme M. kansasii/M. gastri ou M. marinum/M. ulcerans, ou les mycobactéries du groupe abscessus, ont un 16S rDNA identique et ne peuvent être distinguées. Ces nouvelles découvertes incitent à séquencer plusieurs gènes pour identifier les MNT. Ainsi, de nouvelles espèces (par exem ple : M. massiliense, M. bollettii) ont été décrites.4,5 Une liste complète de toutes les mycobactéries identifiées est dispo nible sur le site : www.bacterio.cict.fr/m/mycobacterium.html épidémiologie Les MNT sont très présentes dans la nature, le sol, les poussières des vieux bâtiments et surtout dans l’eau. L’homme et les animaux sont contaminés directement soit par ingestion, soit par la voie respiratoire (aérosols, dou ches, eaux chaudes). La voie cutanée est une porte d’entrée possible soit par contact d’une plaie avec l’eau de piscines contaminées, soit par inoculation directe (contamination par instrument chirurgical). Les MNT peuvent contaminer les réseaux de distribution d’eaux traitées, surtout si ceuxci présentent des zones de ralentissement du flux ou des bras morts qui favorisent la formation de biofilms. De plus, les MNT sont capables de résister au traitement des eaux par le chlore et se nourrissent d’éléments organiques pré sents dans l’eau. Des épidémies nosocomiales par conta mination du réseau hospitalier d’eau ont été décrites dans la littérature.6 Il n’y a pas eu, par contre, de cas rapportés de transmission de l’animal à l’homme ou interhumaine. Des études génotypiques ont été effectuées chez des pa tients atteints de mucoviscidose colonisée par M. abscessus afin de préciser s’il s’agissait de la même souche. On a pu démontrer que chaque patient était porteur d’une souche unique de M. abscessus, raison pour laquelle un isolement respiratoire n’est pas nécessaire chez les patients atteints d’une mucoviscidose colonisée par une MNT.7,8 Contrairement à la tuberculose, les cas de MNT ne doi vent pas être obligatoirement déclarés, et leur incidence est sous-estimée. Dans les pays industrialisés, elle est es timée entre 1 à 1,8 cas sur 100 000 individus. Les cas le plus souvent rapportés sont des infections respiratoires à M. avium complex (MAC). Aux Etats-Unis, le Center for Disease Control and Prevention (CDC) a publié les résultats de tous les prélèvements positifs à MNT pendant une période de quatre ans. Ces résultats ont révélé la prédominance d’in 0 Revue Médicale Suisse – www.revmed.ch – 18 novembre 2009 34446_2344_2350.indd 2 fections à MAC dans la population étudiée, suivie par le M. fortuitum puis par le M. kansasii. Lorsque l’on considère toutes les espèces de MNT confondues, 75% des infec tions concernaient des infections respiratoires, 5% des in fections disséminées (sang), 2% des infections de la peau et des tissus mous et 0,4% des infections des ganglions lymphatiques.1 La prévalence des infections pulmonaires à MNT varie selon la région géographique et semble être en augmentation. Il n’est pas clair encore s’il s’agit d’une vraie augmentation des infections par les MNT ou d’un biais lié à une hausse de niveau de suspicion clinique et à une amélioration des tests et techniques diagnostiques. pathogenèse Les MNT résident dans les macrophages des individus qu’elles infectent. Leur présence est révélée au système immun de l’hôte par les cellules présentatrices d’anti gènes ou cellules dendritiques (CD) et les macrophages (Mx). Après avoir été infectés, les Mx produisent de l’IL-12. Celui-ci active les cellules NK et les lymphocytes T qui se répliquent et produisent de l’IFN-g. Ainsi l’IFN-g et l’IL-12 jouent un rôle crucial dans la défense contre l’infection à mycobactéries.9 Les patients qui souffrent d’une immunodéficience sé vère comme les patients sidéens ou les patients qui ont un défaut génétique du signaling de l’IFN-g (IFN-gR1 ou IFNgR2), sont à risque de développer la forme disséminée de la maladie à MNT, tandis que les patients immunocompé tents souffrent généralement de la forme pulmonaire.9 Des mutations du gène CFTR (cystic fibrosis transmem brane regulator) ont été recherchées dans un groupe de 50 patients porteurs de bronchectasies mais sans diagnostic préalable de mucoviscidose et une infection pulmonaire à MNT. L’étude a démontré que 20% des patients présen taient un diagnostic de novo de mucoviscidose soit par la présence d’un test à la sueur positif et/ou par la présence des deux mutations de CFTR. Le rôle de la dysfonction partielle du CFTR, dans la population adulte atteinte de bronchectasies infectée par MNT, mérite plus de recher che.10 critères diagnostiques de maladie pulmonaire aux mycobactéries non tuberculeuses Le tableau clinique de maladie pulmonaire aux MNT est souvent marqué, d’une part, par une pathologie pulmo naire sous-jacente comme la bronchopneumopathie chro nique obstructive (BPCO), les bronchectasies, la tubercu lose ancienne ou une pneumoconiose et, d’autre part, par des signes et symptômes liés à une infection chronique. Certaines conditions, comme le pectus excavatum ou la sco liose, paraissent favoriser l’infection à MNT, surtout chez la femme postménopausée.11 Les symptômes liés à la mala die pulmonaire aux MNT sont souvent non spécifiques et dépendent de la maladie pulmonaire sous-jacente. La toux chronique est présente chez presque 90% des patients ; la fatigue, la fièvre et la perte de poids sont moins fréquem ment décrites qu’avec la tuberculose.12 Les douleurs tho Revue Médicale Suisse – www.revmed.ch – 18 novembre 2009 2345 12.11.09 08:27 raciques ou l’hémoptysie peuvent survenir au cours de l’infection, mais plus rarement. L’image radiologique est un élément important dans l’évaluation de la maladie pulmo naire aux MNT, et le CT-scan thoracique est préféré à la ra diographie du thorax, surtout en cas d’absence de maladie cavitaire. Le poumon est affecté souvent de façon diffuse. Il est fréquent de trouver des micronodules ou des nodu les uni ou bilatéraux, des bronchectasies cylindriques et des infiltrats type arbre bourgeonnant. Ces observations corres pondent en histopathologie à des bronchiolectasies avec inflammation bronchiolaire ou péribronchiolaire, avec ou sans formation de granulomes.13 Des condensations al véolaires avec bronchogramme aérique ou des nodules uniques avec ou sans excavation sont aussi décrits.14 Les lésions cavitaires sont moins fréquentes que dans la tuber culose pulmonaire et plus souvent associées au M. kansasii ou au M. xenopi. Pour le diagnostic microbiologique, les patients suspects de souffrir d’une maladie pulmonaire aux MNT doivent donner au minimum trois spécimens d’expectorations spon tanées, récoltés de préférence le matin à des intervalles séparés (par exemple : 15 jours). L’induction par inhalation de Na-Cl hypertonique est souvent utilisée en pratique pour l’obtention d’expectorations. La réalisation d’une bron choscopie avec lavage bronchoalvéolaire (LBA), avec ou sans biopsie transbronchique (BTB), dans la région du poumon suspecte au scanner, reste la méthode de choix en l’absen ce d’expectorations de bonne qualité. Chez les patients pour lesquels un diagnostic radiologique, clinique et bac tériologique n’est pas possible et un autre diagnostic doit être exclu, l’obtention d’une biopsie chirurgicale à ciel ouvert peut être justifiée. Selon les guidelines ATS 2007, le diag nostic de maladie pulmonaire aux MNT peut être retenu en présence des symptômes associés à une imagerie com patible, ayant en plus exclu un autre diagnostic (néoplasie, tuberculose ou atteinte fongique), et en présence des cri tères microbiologiques et histopathologiques qui sont ré sumés dans le tableau 1. considérations particulières de certaines espèces de mycobactéries non tuberculeuses et leur traitement Deux mycobactéries à croissance lente M. avium complex (MAC) Il s’agit d’un groupe de mycobactéries qu’il est difficile de différencier par ses caractéristiques phénotypiques. Il inclut principalement M. intracellulaire et M. avium. Ce der nier est le pathogène le plus important, responsable prin cipalement de la maladie disséminée, tandis que M. intra cellulaire est le pathogène respiratoire le plus souvent ren contré chez l’homme. Avec l’épidémie de sida des années 80 et 90, les infections disséminées à MAC ont considéra blement augmenté et ont provoqué la mort de nombreux patients. Grâce à l’introduction des traitements antirétro viraux et à la prophylaxie antimycobactérienne, l’incidence d’infection disséminée à MAC s’est vue réduite d’environ 8,5% en 1993 à moins de 0,5% en 2003.15 Le MAC conta mine de nombreux milieux hydro-telluriques : il se trouve dans l’eau du robinet, dans celle des douches chaudes, 2346 Revue Médicale Suisse – www.revmed.ch – 18 novembre 2009 34446_2344_2350.indd 3 Tableau 1. Critères diagnostiques de maladie pulmonaire à mycobactéries non tuberculeuses (MNT) (Adapté de réf.1). BAAR : bacilles acido-alcoolo-résitants. L’association des deux critères cliniques et d’un critère microbiologique établit le diagnostic Critères cliniques (les deux critères sont nécessaires) : 1)Symptômes pulmonaires, rx. de thorax avec des lésions cavitaires ou des opacités ou un CT-scan thoracique avec de multiples bronchectasies et/ou de petits nodules pulmonaires ET 2)Exclusion d’autres diagnostics (néoplasies, lésions fongiques, tuberculose) Critères microbiologiques (un critère sur quatre) : 1)Au minimum deux cultures positives d’au moins trois spécimens d’expectorations spontanées obtenus séparément OU 2)Culture positive d’au moins un lavage bronchoalvéolaire (LBA) ou d’une aspiration bronchique OU 3)Biopsies transbronchiques ou chirurgicales avec, à l’histopathologie, des trouvailles typiques d’infection à mycobactéries (inflammation granulomatose ou présence de BAAR) et une ou plusieurs cultures d’expectorations ou aspiration bronchique ou LBA positives pour MNT OU 4)Culture positive d’un épanchement pleural ou d’un autre prélèvement, en dehors du poumon, et normalement stérile des jacuzzis, des piscines et des eaux naturelles. L’homme se contamine par voie aérienne, en prenant contact avec les aérosols des eaux contaminées. Il n’existe pas de trans mission interhumaine décrite dans la littérature (figure 1). Caractéristiquement, la maladie pulmonaire à MAC se présente sous deux formes bien distinctes : une forme fibrocavitaire qui se caractérise par la présence de grandes ca vités à parois fines, localisées souvent dans les lobes su périeurs, chez des adultes avec facteurs de risque comme l’abus d’alcool ou le tabagisme. Dans l’autre forme, plus indolente et décrite dans l’ancienne littérature comme le syndrome de Lady Windomere – typiquement présente chez la femme postménopausée –, l’atteinte pulmonaire se ca ractérise par la présence de bronchectasies, d’infiltrats type arbre bourgeonnant dans la périphérie du poumon, et de nodules et micronodules pulmonaires. La coïnfection avec des P. aeruginosa ou d’autres mycobactéries, comme le M. abscessus, n’est pas rare dans cette forme de présen tation de la maladie. Il est difficile de déterminer si c’est l’infection à MAC qui est responsable de l’apparition de bronchectasies ou si c’est la présence de bronchectasies qui favorise la colonisation à MAC. La plupart des médicaments antituberculeux possèdent 10 à 100 fois moins d’activité in vitro contre le MAC que contre le M. tuberculosis. Mais le débat sur le rôle des tests de susceptibilité in vitro pour la prise en charge des pa tients avec une MNT est encore d’actualité. En effet, une corrélation in vivo et in vitro n’a été démontrée que pour les macrolides. De ce fait, il est recommandé par l’ATS 2007 de tester, en première intention, que les nouveaux macro lides comme la clarithromycine et l’azithromycine pour Revue Médicale Suisse – www.revmed.ch – 18 novembre 2009 0 12.11.09 08:27 A B C Figure 1. Cas clinique de M. avium complex (MAC) A. 18.08.06. Image cavitaire aux CT-scan d’une patiente de 80 ans atteinte de M. avium complex. B. 11.04.07. Aggravation radiologique malgré un traitement de rifabutine, moxifloxacine et clarithromycine. C. 24.06.08. Amélioration radiologique après introduction d’un traitement adjuvant d’IFN-g 50 mg 2 x semaine. établir une ligne de base pour le traitement. D’autres anti biotiques peuvent être testés en cas de mauvaise répon se au traitement mais sans assurance d’une réelle valeur ajoutée. Le traitement recommandé est : l’association d’un macrolide (azithromycine ou clarithromycine), plus une ri famycine (rifampicine ou rifabutine) et de l’éthambutol, administrée quotidiennement ou de façon trihebdoma daire. Pour certains cas plus sévères, l’ajout durant deux à trois mois d’un aminoglycoside injectable peut s’avérer nécessaire. Une petite étude récente montre l’expérience d’un centre aux Etats-Unis avec un traitement combiné d’aérosols d’amikacine 15 mg/kg 1 x/j et une thérapie stan dard de macrolides et rifampicine per os avec des bons résultats. Des études à plus long terme sont nécessaires pour pouvoir répondre à des questions concernant la dose optimale, la durée de traitement et le choix optimal d’an tibiotiques à associer au traitement par aérosols.16 L’im munothérapie adjuvante par l’IFN-g par voie sous-cutanée, intramusculaire ou inhalée peut être utile dans certains cas réfractaires au traitement antimycobactérien. Le rôle d’une détection de polymorphisme génétique du récep teur d’IFN, chez des patients ayant une MNT pour aider à guider la thérapie, n’est pas encore bien établi.17 M. kansasii Le principal réservoir de ce MNT est l’eau du robinet. Il s’agit d’un pathogène pulmonaire très fréquent affectant souvent des individus présentant une pathologie pulmo naire sous-jacente comme une BPCO, une silicose, une as bestose ou un cancer du poumon. La présentation clini que et radiologique de la maladie pulmonaire à M. kansasii ressemble beaucoup à la tuberculose pulmonaire avec des infiltrats lobaires supérieurs et, souvent, avec des for mes cavitaires. La rifampicine est une composante essen tielle de la prise en charge et il est recommandé que seule la sensibilité in vitro à cet antibiotique soit testée en pre mière intention. Le régime recommandé par les guidelines ATS 2007 pour les germes sensibles à la rifampicine est : rifampicine 600 mg, isoniazide 300 mg, éthambutol à des doses de 15 mg/kg. La durée totale de traitement recom mandée est de douze mois avec contrôle des cultures des expectorations négatives. Des régimes plus courts sont as 2348 Revue Médicale Suisse – www.revmed.ch – 18 novembre 2009 34446_2344_2350.indd 4 sociés à des taux de rechutes élevés. L’incidence de M. kansasii en tant qu’infection opportuniste chez le sujet VIH est relativement basse, de l’ordre de 0,5 cas pour 100 000 personnes infectées, et est due en partie à l’introduction de la thérapie HAART en 1996. Chez les sujets VIH, la cohorte suisse montre seulement 32 cas sur 9110 patients étudiés sur une période de neuf ans (1988-1997).18 Pour la maladie à M. kansasii disséminée associée au VIH, la durée de trai tement et le régime sont les mêmes que pour la maladie non disséminée. Il faut bien réfléchir, par contre, aux interac tions et aux incompatibilités médicamenteuses et adapter le traitement anti-MNT aux traitements antirétroviraux. Une mycobactérie à croissance rapide M. abscessus Il est important de différencier les différentes espèces qui sont traditionnellement groupées dans le groupe abscessus ou le groupe M. chelonae/abscessus. En effet, ces mycobacté ries à croissance rapide peuvent causer les mêmes mani festations cliniques mais le traitement peut être différent selon l’espèce en cause. Les espèces traditionnellement associées à ce groupe sont M. abscessus, M. chelonae et M. immunogenum, et récemment M. massiliense et M. bollettii.19 M. abscessus se trouve de façon endémique dans la région sud des Etats-Unis, comme le Texas ou la Floride, mais elle est retrouvée géographiquement dans le monde entier. C’est la troisième MNT la plus fréquemment isolée aux Etats-Unis. Elle produit souvent des infections de la peau et des tissus mous avec formation d’abcès ou de nodules cutanés, apparaissant souvent après un traumatisme ou une procédure chirurgicale avec du matériel infecté.1 La forme de présentation clinique et radiologique est en général si milaire au MAC. Néanmoins, pour la plupart des patients sans pathologie pulmonaire sous-jacente, l’évolution est lente et indolente. Le traitement de M. abscessus est diffi cile car cette mycobactérie est résistante à la plupart des antibiotiques standards. Les macrolides sont les seuls an tibiotiques oraux décrits comme étant efficaces et il est souvent nécessaire d’associer un agent parentéral comme l’amikine, l’imipénem ou la céfoxitine. Le linézolide et la tygécycline montrent également une certaine efficacité in vitro contre le M. abscessus. Revue Médicale Suisse – www.revmed.ch – 18 novembre 2009 0 12.11.09 08:27 quelques situations cliniques particulières Mucoviscidose Durant les vingt dernières années, la prévalence de MNT dans la population atteinte de mucoviscidose s’est accrue de façon significative, avec une prévalence entre 4 et 20% selon les centres. Lors d’une étude multicentrique effec tuée chez plus de 1000 patients, âgés de dix ans ou plus, la MNT la plus souvent retrouvée était le MAC (78%), suivi par M. abscessus (18%), et quelques patients présentaient les deux souches (4%). Le traitement des MNT dans le con texte de la mucoviscidose est encore un sujet de contro verse, et il est parfois difficile de différencier ce qui est dû à la présence de la MNT de ce qui est dû à l’atteinte pul monaire liée à la fièvre Q elle-même. Il est important de se rappeler que les patients atteints de mucoviscidose sont très souvent au bénéfice d’un traitement d’azithromy cine à but immunomodulateur et que cet antibiotique est un pilier essentiel du traitement contre le MAC et le M. abscessus. Il est recommandé de rechercher les MNT dans les expectorations de ces patients afin d’éviter l’apparition de résistance aux macrolides.1 Transplantation pulmonaire L’infection préalable avec MNT, et particulièrement avec M. abscessus, chez le patient avec mucoviscidose peut se ma nifester pendant la période postopératoire par des com plications graves avec la formation d’abcès au niveau de la peau, empyème et complications potentiellement fatales, ceci malgré un traitement péri et postopératoire relative ment agressif.20 L’infection à M. abscessus reste une contreindication relative à la transplantation pulmonaire.21 Pneumonie d’hypersensibilité Hot tub lung Il s’agit d’une forme de maladie pulmonaire de présen tation aiguë similaire à l’alvéolite allergique extrinsèque. Le MAC a une prédisposition à croître dans des milieux aquatiques comme les piscines à eau chaude. Il est parti culièrement résistant aux agents utilisés dans la désinfec tion. De nos jours, l’augmentation des activités aquatiques récréatives et de relaxation, comme les spas et jacuzzis, a fait accroître les cas de présentation aiguë. Typiquement, le patient ressent des symptômes respiratoires tels que dyspnée ou toux et fièvre pendant ou juste après l’expo sition aux aérosols d’eau chaude. Certains cas se manifes tent par une insuffisance respiratoire sévère nécessitant une hospitalisation aux soins intensifs. La radiographie de thorax est anormale, avec souvent des infiltrats bilatéraux. Le CT-scan thoracique montre des infiltrats diffus en verre dépoli avec parfois un pattern en mosaïque. L’anamnèse détaillée est fondamentale pour aider à orienter le diag nostic. Des prélèvements microbiologiques dans l’eau du jacuzzi ou dans le lavage bronchoalvéolaire (LBA), démon trant la croissance de MAC, peuvent confirmer le diagnos tic. Le traitement consiste surtout en l’éviction d’une nou velle exposition. Les stéroïdes systémiques sont utiles pour améliorer les échanges gazeux. Le traitement ciblé contre le MAC est moins nécessaire, par contre, certains préco nisent un traitement antimycobactérien de courte durée (trois à six mois).1 conclusions L’incidence de maladie pulmonaire à MNT est en aug mentation. Le diagnostic nécessite la présence d’une cons tellation clinique, radiologique et microbiologique. Les pa tients les plus à risque sont des malades avec des maladies respiratoires chroniques, bronchectasies ou mucoviscidose. Lors de transplantation pulmonaire, les mycobactéries de croissance rapide peuvent être particulièrement agressi ves, causer des graves complications et doivent être trai tées avant et après la transplantation. Le traitement des MNT est long et nécessite la combinaison de multiples an tibiotiques. Les récidives et réinfections ne sont pas rares. Notre compréhension sur beaucoup d’aspects de la mala die à MNT est incomplète. Davantage de recherches sont nécessaires afin d’élucider les mécanismes de défense de l’hôte et les facteurs déterminants de l’évolution vers la maladie pour pouvoir agir avec de nouvelles thérapies. Implications pratiques > Le résultat d’un prélèvement BAAR (bacilles acido-alcoolo- résistants) positif dans le contexte d’une maladie pulmonaire n’est pas synonyme de tuberculose > Penser dans l’anamnèse aux loisirs «jacuzzis, hammams», hu- midificateurs domestiques, où la croissance de mycobactéries est possible malgré un entretien correct des appareils (Hot tub lung) > Chercher une pathologie sous-jacente telle que mucoviscidose, bronchiectasies, séquelles étendues d’une pathologie fibrosante ou une immunosuppression > Référer le patient au pneumologue et/ou au spécialiste de maladies infectieuses en cas de lésions pulmonaires avec présence de mycobactéries non tuberculeuses (MNT), car la prise en charge est difficile et les traitements antibiotiques combinés sont longs Bibliographie 1 ** Griffith DE, Aksamit T, Brown-Elliott BA, et al. An official ATS/IDSA statement : Diagnosis, treatment, and prevention of nontuberculous mycobacterial diseases. 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