G4/450-D59180

Transcription

G4/450-D59180
XVIIIe SIÈCLE
La critique sociale
SWIFT
Voyage à Lilliput
(2179)
I. Étudier Voyage à
Lilliput en Quatrième
Les Accompagnements des programmes 1 du cycle central
recommandent la lecture de Voyage à Lilliput sous forme
d’extraits en classe de Quatrième. Ce texte, porteur de
références culturelles, constitue une approche intéressante de la critique sociale au XVIIIe siècle.
Pour l’étude de cette œuvre difficile a priori, nous proposons une séquence qui se veut réalisable avec une classe
de Quatrième de niveau moyen à bon. Les élèves seront
lecteurs d’un niveau convenable. Ils maîtriseront les constituants essentiels du récit (auteur, narrateur, personnage),
seront capables d’apprécier l’ordre et le rythme de la narration, d’identifier des points de vue. Ils sauront au moins
rapporter les paroles d’un personnage au style direct.
Compte tenu des prérequis, on placera raisonnablement l’étude du Voyage à Lilliput en fin de deuxième trimestre, voire en fin d’année.
La construction pédagogique se développe sur une
douzaine de séances – à raison d’une à deux heures de
cours par séance – mettant en œuvre trois compétences,
à acquérir de manière progressive.
1. Accompagnement des programmes de 5e et 4e, CNDP, 1997, p. 47.
40
LA CRITIQUE SOCIALE
Nous proposons la séquence sous forme de tableau
synoptique. Seule l’évaluation finale est obligatoirement
notée. On peut encourager les élèves les plus faibles en
multipliant les petits contrôles de lecture.
Les objectifs principaux, que l’on distribuera aux
élèves dès la première séance, sont les suivants :
– LECTURE : étudier une œuvre de critique sociale du
XVIIIe siècle.
– OUTILS DE LANGUE : analyser la figure de l’hyperbole.
Travailler sur l’expression de la concession, la cause et la
conséquence.
– EXPRESSION : rédiger un texte critique.
II. Développement de la séquence
Dominantes
Supports
Objectifs
Activités
Lecture.
Oral.
Incipit et cha- Établir le contrat de lecpitre I, p. 33- ture.
46.
Étudier le personnage de
Gulliver.
Étude de l’objet livre.
Lecture de l’incipit en
classe. Identification de
l’auteur, du narrateur
et du personnage. Corrigé des questions du
dossier consacrées à
Gulliver.
S2
Lecture.
Chapitres I et Étudier le réalisme dans
Oral.
II, p. 33-46 et le début du roman et la
Outils de lan- p. 46-58, et distanciation comique.
gue.
« l’éditeur au
lecteur »,
p. 29-30.
Le réalisme :
– la rencontre, correction des questions du
dossier ;
– « l’éditeur au lecteur ».
La distanciation :
– le conte ;
– le comique, correction des questions du
dossier.
S3
Lecture.
Chapitre
III,
Outils de lan- l’éloge de l’Emgue.
pereur, p. 6567.
Activités de langue (rappels).
L’hyperbole.
Le point de vue.
Les degrés de signification dans ce texte.
Observer les différents degrés de signification du
texte, du témoignage à la
critique.
Faire des rappels sur le
point de vue dans le récit.
Travailler le comparatif et
le superlatif, l’hyperbole.
1. Énonciation et distanciation.
S1
Compétences
Séances
41
VOYAGE À LILLIPUT
Dominantes
Supports
Objectifs
Activités
Évaluation formative sur la
compétence 1
S4
« Les “jeux” de la
Cour », correction des
questions 1 à 7 du dossier.
Synthèse.
S6
Chapitre IV, de Étudier la satire des
Lecture.
Outils de lan- « à cette heure » conflits. Travail sur le
gue.
à « notre situa- champ lexical.
tion », p. 71-73,
et chapitre V,
p. 74-81.
Lecture.
Une guerre sans concession, correction des
questions du dossier ;
l’ingratitude des grands,
correction des questions
5 à 9 du dossier.
S7
Lecture.
Oral.
Lecture.
Oral.
IV,
Chapitre VI, du Étudier l’utopie.
début à « commerce inconnu
dans cet empire », p. 81-89.
S8
Évaluation formative sur
les compétences 1 et 2.
Outils de lan- Chapitre
gue.
p. 94-95
p. 97-100.
S10
S11
VII,
Le discours de Reldresal :
et étudier le style indirect.
Travailler les verbes d’opinion, de déclaration.
Rappel sur l’introduction de la parole rapportée dans le récit.
Travail sur les marques
du discours indirect.
La concordance des
temps.
En vocabulaire : sens et
portée des verbes d’opinion et de déclaration.
Lecture.
Chapitres VII et
VIII, p. 93-102
Oral.
Outils de lan- et p. 103-110.
gue.
Analyser le procès de Gulliver.
Étudier l’argumentation.
Travailler les propositions
subordonnées.
Repérer des arguments
et les classer.
Les subordonnées de
cause et de conséquence.
L’humour et l’argumentation pour dénoncer une parodie de
justice.
Oral.
Lecture.
Argumenter à l’oral.
La justice ou le système
éducatif à Lilliput, correction des questions 8
du dossier relatives à
ces points.
Chapitre
p. 81-93.
VI,
Évaluation finale des compétences 1, 2 et 3.
3. Vers l’argumentation.
S9
S12
Des lois et usages fort
étranges, le système
éducatif à Lilliput, correction des questions 1
à 7 du dossier.
La morale comme fondement social, correction des questions du
dossier.
2. Les procédés de la satire et de l’utopie
Chapitres III et La satire de la Cour : idenp. 58-67 et tifier les différents nip. 67-73.
veaux de sens. D’une critique de Lilliput à celle de
l’Angleterre.
S5
Compétences
Séances
42
LA CRITIQUE SOCIALE
Séance d’approche
Objectif → Établir des hypothèses de lecture.
Supports → La couverture de l’ouvrage et le paratexte.
Lors de cette séance, on distribuera et commentera
en classe les objectifs de la séquence.
On pourra ensuite donner aux élèves le questionnaire suivant :
• L’objet livre
– Au premier regard…
1. Désignez la première et la quatrième de couverture.
2. Observez attentivement la première de couverture
et relevez tous les éléments qui y figurent. Nommez-les.
3. Quelle est la fonction du résumé ?
4. Qui est l’auteur de l’illustration ?
5. Sur quelle partie de la couverture sont rappelées
les informations essentielles ? Pourquoi ?
– Cherchons des pistes de lecture…
Déjà, à la seule observation de la première de couverture, vous êtes en possession d’un bon nombre d’informations qui vous permettent d’effectuer certaines hypothèses de lecture.
1. À quel public cet ouvrage paraît-il destiné ?
2. Quels semblent être le lieu, le temps et les personnages du récit ? Argumentez votre réponse en citant les
éléments de la couverture qui vous ont permis de
répondre.
3. À quel type de récit appartient vraisemblablement
ce texte ?
– Le sommaire…
Recherchez dans votre livre la page à laquelle se
trouve le sommaire, observez-le attentivement puis tentez
de répondre à ces quelques questions :
VOYAGE À LILLIPUT
43
1. À quelles pages exactement commence et s’achève
le texte ?
2. Combien de chapitres le Voyage à Lilliput comprend-il ?
3. À quoi sert un dossier ? une présentation ? Recherchez qui en est l’auteur.
• Écriture
Résumez la trame narrative du récit en cinq lignes.
• Éléments de réponse :
– Au premier regard…
2. Le nom de l’auteur, le titre de l’œuvre, le nom du préfacier, l’illustration, la collection, l’éditeur. On profite de la
correction de cette question pour initier les élèves aux codes
de présentation bibliographique :
Jonathan SWIFT, Voyage à Lilliput (Voyage à Lilliput dans un
manuscrit), GF-Flammarion, « Étonnants Classiques », 2004.
3. La fonction du résumé est incitative. Elle doit susciter
l’envie de lire chez le lecteur potentiel.
5. Les informations bibliographiques essentielles sont rappelées sur le dos (ou, fautivement, la tranche) du livre pour
des commodités d’identification lorsque le livre est rangé en
rayon.
– Cherchons des pistes de lecture…
1. Le livre est destiné à un jeune public comme le laissent
penser les couleurs chatoyantes de la couverture, les nombreuses notes qui éclaircissent le sens littéral des mots et le
titre de la collection.
3. Ce texte est un récit de voyage imaginaire.
– Le sommaire…
3. Le dossier sert d’accompagnement à la lecture. Il
oriente par des questions la compréhension du texte et des
thèmes principaux. Il permet d’approfondir la lecture au travers d’un certain nombre d’exercices d’orthographe, de
recherche documentaire, d’expression écrite.
44
LA CRITIQUE SOCIALE
Séance n° 1
Objectif → Étudier les constituants du récit : identifier
clairement le contrat de lecture et étudier
le personnage de Gulliver.
Support → Chapitre I, p. 33-46.
Travail préparatoire : lire « l’éditeur au lecteur », p. 29-30,
et le chapitre I. Répondre aux questions sur Gulliver, dossier,
p. 113.
Le professeur 1 lira l’incipit puis procédera au corrigé
des questions sur le personnage de Gulliver.
1. Le narrateur de ce texte est Lemuel Gulliver. Le
personnage principal est Lemuel Gulliver.
2. La narration se fait donc à la première personne.
On relèvera les pronoms personnels sujet et complément de première personne ainsi que les adjectifs possessifs.
3. Le voyage de Gulliver commence le 4 mai 1699 à
Bristol. « Nous appareillâmes à Bristol le 4 mai 1699 et
notre traversée fut d’abord très agréable », p. 35.
4. Gulliver est approximativement âgé de trente-huit
ans lorsqu’il entame son voyage. On relèvera les indications chronologiques qui figurent au début du texte
pour parvenir à ce chiffre. On soulignera que c’est l’âge
d’un homme mûr et expérimenté.
5. Gulliver est médecin de profession. On peut s’en
remettre au jugement d’un homme de science.
6. « Mes heures d’oisiveté, je les passais à lire les
meilleurs auteurs, anciens et modernes ; étant toujours
fourni en livres nombreux ; et quand j’étais à terre, à
observer les mœurs et les caractères des peuples, ainsi
qu’à apprendre leur langue ; à quoi j’avais grande faci1. Il est préférable de ne faire lire les élèves qu’après étude du texte,
en fin de séance généralement. On prendra garde à ne pas négliger
trop souvent cette activité d’appropriation du texte.
VOYAGE À LILLIPUT
45
lité grâce à une excellente mémoire », p. 34-35. Gulliver
est un homme curieux.
7. Il a voyagé au Moyen-Orient, en Inde et aux
Antilles.
8. Le récit commence par une présentation de Gulliver, par souci de réalisme, pour familiariser le lecteur
avec le personnage principal. Gulliver est présenté
comme un homme de science, un voyageur curieux et
expérimenté, ce qui fait de lui, au XVIIIe siècle, un observateur idéal des merveilles de ce monde.
⇒ Synthèse au tableau.
Le Voyage à Lilliput est un récit de voyage fictif (imaginaire). Jonathan Swift en est l’auteur. Le personnage
principal et narrateur de ce texte est Lemuel Gulliver.
Gulliver est un personnage emblématique du XVIIIe siècle :
homme de science, voyageur curieux et expérimenté,
c’est un observateur idéal des curiosités de ce monde.
Le professeur lira « l’éditeur au lecteur ».
Il mettra en évidence par le questionnement des
élèves la manière dont le paratexte solidifie le contrat de
lecture. Tout est mis en œuvre, y compris la publication
anonyme de l’ouvrage en son temps, pour donner
l’impression d’un récit de voyage réel.
Séance n° 2
Objectif → Étudier le réalisme dans le début du roman
et la distanciation comique.
Supports → Chapitres I et II, p. 33-46 et p. 46-58, et
« l’éditeur au lecteur », p. 29-30.
Travail préparatoire : lire le chapitre II. Répondre aux questions 1, 2, 3, 6 et 7 sur la rencontre, p. 113-114.
Un élève rappellera les contenus et conclusions de la
séance précédente.
Un autre résumera les chapitres I et II.
46
LA CRITIQUE SOCIALE
On corrigera les questions 1, 2, 3, 6 et 7 sur la rencontre. On traitera en classe les questions qui n’ont pas
été données à la maison.
1. Lilliput se trouve au nord-ouest de la Terre de Van
Diemen (Tasmanie) par 30 degrés 2 minutes de latitude
sud, p. 35. Il manque les coordonnées de longitude.
2. Le navire à bord duquel se trouve Gulliver fait naufrage.
3. Il n’y en a aucun, ce qui fait de notre héros le seul
témoin de l’existence de Lilliput.
4. Le comportement des Lilliputiens est hostile dans
un premier temps. Ceux-ci, effrayés par la taille de notre
héros, l’ont attaché durant son sommeil. Ils le considèrent comme une menace et ce sentiment sera encore
manifeste dans la suite du texte. On citera les deux bordées de flèches que les soldats de Lilliput envoient sur
Gulliver.
5. Ils donnent à manger à Gulliver. « En outre, je me
tenais désormais lié par les lois de l’hospitalité envers un
peuple qui m’avait traité à si grands frais, avec tant de
magnificence », p. 41.
6. « Hospitalité » : vient du latin hospitalis, dans hospitalis domus, « maison hospitalière ». C’est l’adjectif du
mot hospes qui donne « hôte ». L’hospitalité est la charité
qui consiste à recueillir, nourrir et loger gratuitement les
voyageurs. De la même famille, dérivés de hospes :
hôpital, (in)hospitalier, hospice, hôtel, hôtelier, hôtellerie, hôte, hôtesse. On fera quelques observations sur
l’accent circonflexe, produit de l’amuïssement du « s ».
7. L’hospitalité des Lilliputiens est particulière en ce
que Gulliver se trouve finalement prisonnier de ses
hôtes. Les Lilliputiens n’exécutent pas Gulliver parce
que la décomposition de son cadavre entraînerait des
épidémies dans le royaume. Gulliver est également
épargné par l’Empereur parce qu’il a fait preuve de clé-
VOYAGE À LILLIPUT
47
mence envers des Lilliputiens qui l’avaient un peu malmené.
8. Les adjectifs non classifiants dominent dans ce
texte qui présente un portrait mélioratif de l’Empereur.
On corrigera les questions sur réalisme et comique,
dossier, p. 114.
1. « Je m’étendis sur l’herbe […] en sautant le long
de mes côtes. » Les sens principalement évoqués dans ce
passage sont le toucher et l’ouïe, et cela se vérifie tout le
temps que Gulliver demeure attaché au sol. Les faits
sont transcrits du point de vue de Gulliver. Le sens de la
vue est évoqué, mais à chaque fois pour en dire les
limites. On relèvera les verbes « sentir », « entendre »,
« voir », « regarder ».
2. Gulliver, qui est attaché sur le dos, ne peut voir les
Lilliputiens chuter. Cette proposition incise témoigne
d’un souci de réalisme dans la narration. On trouvera de
nombreuses autres occurrences dans le texte. « Son
Excellence […] parla environ dix minutes, sans aucun
signe de colère, mais avec une sorte de résolution
décidée, désignant souvent un objet situé en avant qui
s’avéra être, je le compris plus tard, la capitale […] », p. 41.
Et plus loin « […] il se passa trois semaines avant que
j’apprenne la raison de ce si brusque réveil », p. 45.
3. Gulliver et les Lilliputiens ne parlent pas la même
langue. Chacun essaie donc de déduire les intentions
de l’autre. Un exemple intéressant en est fourni au
chapitre I par le discours du dignitaire dans lequel Gulliver décrypte différentes périodes et auquel il répond
par un ton et des gestes suggestifs.
4. Que ce soit dans la description de la machine qui
transportera Gulliver, ou dans celle du temple antique
qui servira à loger ce dieu un peu particulier, le narrateur multiplie les détails réalistes. On en voudra pour
preuve le relevé des déterminants numéraux (qui four-
48
LA CRITIQUE SOCIALE
nira l’occasion d’un rappel sur l’accord des formes composées).
5. Il s’agit de l’inventaire des poches de Gulliver.
6. Cet inventaire est établi par deux officiers lilliputiens. On peut reconnaître successivement : un mouchoir, une tabatière, un journal, un peigne, des pistolets,
un couteau, un rasoir, une montre, une épée, une poudrière et des balles. Gulliver a dissimulé dans des poches
secrètes : des lunettes, une longue-vue « et quelques
autres petites commodités ».
7. Le propos de ce premier chapitre est de mettre le
lecteur en confiance sur la probité du narrateur, qui
n’affirme rien dont il n’ait fait l’expérience. Ce souci
de réalisme et de vérité dans le témoignage devient
comique puisqu’il évoque même les besoins de la
nature. L’alimentation de Gulliver provoque des scènes
de liesse populaire. Le texte détaille malicieusement la
satisfaction de ses besoins d’élimination naturels. « […] je
sentis que quantité de gens s’efforçaient de distendre les
cordes du côté gauche de telle sorte que je puisse me
tourner vers la droite et uriner ; ce que je fis d’abondance, à la grande stupéfaction des habitants, qui, devinant à mes gestes ce que j’allais faire, s’écartèrent aussitôt sur la droite et la gauche pour éviter le torrent qui
s’échappait de moi avec un tel bruit et une telle
violence », p. 42. On retrouve les mêmes détails dans le
deuxième paragraphe du chapitre II.
⇒ Le corrigé de cette dernière question fera office de
synthèse. Nous voyons se créer une forme de distance
par rapport au réalisme du début. Distance comique qui
va devenir progressivement critique.
VOYAGE À LILLIPUT
49
Séance n° 3
Objectifs → Observer les différents degrés de signification du texte, du témoignage à la critique.
→ Faire des rappels sur le point de vue dans le
récit.
→ Travailler le comparatif et le superlatif,
l’hyperbole.
Support → Chapitre III. L’éloge de l’Empereur, de
« GOLBASTO MOMAREN » à la fin du chapitre,
p. 65-67.
Travail préparatoire : lire le chapitre III. Répondre aux questions 1 à 4 sur l’ingratitude des grands, dossier, p. 119.
Un élève rappellera les contenus et conclusions de la
séance précédente. Un autre résumera le chapitre III.
On corrigera les questions 1 à 4 sur l’ingratitude des
grands.
On effectuera les rappels nécessaires sur les degrés de
l’adjectif. On définira la figure de l’hyperbole.
1. Il s’agit d’un éloge.
2. Nous signalons les adjectifs en gras : « GOLBASTO
MOMAREN EVLAME GURDILO SHEFIN MULLY ULLY GUE, très
puissant Empereur de Lilliput, délice et terreur de
l’Univers, dont les terres s’étendent sur cinq mille Blugstrugs (environ douze milles de circonférence) jusqu’aux
extrémités du globe ; monarque de tous les monarques ;
plus grand que les fils des hommes ; dont les pieds vont
jusqu’au centre et dont la tête touche le soleil ; dont un
hochement de menton ébranle les genoux des princes
de la Terre ; doux comme le printemps, réconfortant
comme l’été, prolifique comme l’automne, terrifiant
comme l’hiver 1. Sa très sublime Majesté propose à
1. Les éloges des rois européens s’exprimaient en des termes tout à
fait semblables.
50
LA CRITIQUE SOCIALE
l’Homme-Montagne, récemment arrivé dans nos
célestes domaines, les articles suivants qu’il sera tenu
d’observer par serment solennel. » Tous les adjectifs du
texte sont mélioratifs.
3. Champs lexicaux de la grandeur – « Univers », « cinq
mille Blugstrugs », « globe », « grand », « soleil », « Terre » –,
de la puissance – « très puissant », « terreur », « monarque
de tous les monarques », « ébranle », « terrifiant ».
4. Les Lilliputiens ignorent le vaste monde qui les
entoure, que ce soit par manque de curiosité ou par
impossibilité technique. « Car, pour ce qui est de ce que
vous affirmez, qu’il y a d’autres royaumes et d’autres États
dans le monde, habités par des créatures humaines aussi
imposantes que vous, nos philosophes en doutent fort ; ils
préfèrent supposer que vous êtes tombé de la lune ou
d’une étoile ; car il est bien clair que cent mortels de votre
corpulence auraient tôt fait de détruire tous les fruits et le
bétail des domaines de Sa Majesté. » Les Lilliputiens ont
formé leur jugement sur ce qu’ils connaissent. C’est pourquoi l’Empereur de Lilliput est célébré par ce texte hyperbolique qui insiste sur sa grandeur.
⇒ À un premier niveau de lecture, cet éloge sert le
réalisme de l’œuvre, il est extrait d’un document officiel, traduit par Gulliver, et produit dans le récit comme
une preuve supplémentaire de l’existence de Lilliput. À
un second niveau de lecture, du point de vue humain,
l’éloge nous semble pure vanité. Enfin, il faut savoir que
les éloges royaux du XVIIIe siècle n’avaient rien à envier à
celui de l’Empereur de Lilliput. Ils étaient tout aussi
excessifs. Une nouvelle fois, au travers de la critique de
Lilliput, il y a celle de notre monde et le texte nous
invite par association d’idées à réfléchir et rire sur nos
travers en riant de ceux des autres. Il est important
d’insister sur ces différents degrés de signification du
texte, du témoignage à la critique. Cette séance permet
la transition, après une évaluation, vers la compétence 2.
VOYAGE À LILLIPUT
51
Séance n° 4
Objectif → Évaluation formative.
Travail préparatoire : revoir le travail effectué au cours des
trois premières séances.
Nous proposons deux activités : soit un sujet d’expression écrite, soit un de lecture (à choisir selon le niveau
de la classe).
Sujet 1 (expression écrite) : faites l’éloge d’un personnage de votre choix (par exemple une vedette du
sport ou de la chanson). Vous utiliserez tous les degrés
de l’adjectif. Choisissez un vocabulaire riche, pertinent
et varié pour produire un texte hyperbolique.
Pour les meilleurs, on peut demander un éloge qui
soit critique.
Sujet 2 (lecture) : étude du texte d’accompagnement
du chapitre VI, dossier, p. 123-124 – Rabelais, Gargantua,
chapitre VII. Lisez ce texte et relevez les procédés qui
donnent la démesure du géant.
Séance n° 5
Objectif → La satire de la Cour : identifier les différents
niveaux de sens. D’une critique de Lilliput à
celle de l’Angleterre.
Supports → Chapitres III et IV, p. 58-67 et p. 67-73.
Travail préparatoire : relire le chapitre III. Lire le chapitre IV.
Répondre aux questions 1 à 4 sur les « jeux » de la Cour, dossier, p. 118.
Un élève rappellera les contenus et conclusions de la
séance n° 3.
Un autre résumera les chapitres III et IV.
On corrigera les questions 1 à 4 sur les « jeux » de la
Cour.
52
LA CRITIQUE SOCIALE
1. Le premier jeu est une épreuve de funambulisme,
le second une épreuve de saut ou de reptation.
2. Au cours de la première épreuve, le candidat doit
sauter le plus haut possible sur une corde tendue sans
tomber. Dans la seconde, l’Empereur tient un bâton à
l’horizontale ; le candidat doit sauter par-dessus ou
ramper dessous. Le plus agile remporte l’épreuve. On
voit que les deux épreuves exigent des candidats des
aptitudes physiques, comme la souplesse, l’agilité, la
dextérité.
3. La première épreuve sélectionne les candidats aux
plus hautes charges du royaume. La seconde épreuve est
récompensée par des distinctions honorifiques.
4. On s’aperçoit qu’il n’y a pas de rapport entre les
qualités requises pour réussir les épreuves et les fonctions ou titres qui les récompensent. C’est ici que se
situe la critique.
On répondra aux questions 5, 6, 7 en classe :
5. La « faction » qui divise les Lilliputiens entre eux
est celle qui oppose le parti des Tramecksan à celui des
Slamecksan. Cette faction est dite « violente » et dure
« depuis plus de soixante-dix lunaisons », p. 70. « L’antagonisme opposant ces deux partis est si fort qu’ils se
refusent à manger ou boire ensemble, encore moins à se
parler », p. 71. Le motif de cette violente discorde est
politique, il repose sur l’attachement des uns, les Tramecksan, à l’ancienne constitution.
6. L’Empereur hésite entre les talons hauts et les
talons bas et, de fait, il boite. Ici, le ridicule de la querelle invite une nouvelle fois à rire des Lilliputiens.
7. Les notes 5, p. 59, et 2, p. 71, nous montrent que le
texte est émaillé de références à la société anglaise du
XVIIIe siècle. Swift n’est pas innocent de ses choix. Il s’agit
d’inviter le lecteur à réfléchir sur lui-même en riant des
autres. La société lilliputienne sert de miroir ou de
modèle analogique. Elle possède un certain nombre de
VOYAGE À LILLIPUT
53
points communs avec celle des hommes et cela permet
de voir dans la critique de Lilliput une critique de
l’Angleterre.
On proposera une synthèse aux élèves à partir du corrigé de la question 7.
Séance n° 6
Objectif → Étudier la satire des conflits. Travailler sur le
champ lexical.
Supports → Chapitre IV, de « À cette heure, en sus de
ces troubles intestins » à « le tableau de
notre situation », p. 71-73, et chapitre V,
p. 74-81.
Travail préparatoire : répondre aux questions 1, 2 et 4 sur
une guerre sans concession, dossier, p. 118.
Un élève rappellera les contenus et conclusions de la
séance précédente.
On lira le texte support de la séance.
On corrigera les questions 1 à 8 sur une guerre sans
concession.
1. Le danger extérieur qui menace Lilliput est celui
d’une attaque de la flotte de Blefuscu.
2. Reldresal est envoyé par l’Empereur pour requérir
l’aide de Gulliver.
3. La guerre est « sans concession », « sanguinaire ».
« […] six rebellions […] coûtèrent la vie à un empereur
et à un autre, sa couronne ». Les pertes humaines se
chiffrent par milliers : « onze mille personnes », « nous y
avons perdu quarante vaisseaux de ligne et une quantité
beaucoup plus importante de petits bateaux, ainsi que
trente mille de nos meilleurs marins et soldats ; et les
dommages soufferts par l’ennemi sont tenus pour
encore plus importants ».
54
LA CRITIQUE SOCIALE
4. Le motif de cette guerre est la manière de briser
une coquille d’œuf avant de le manger. Les élèves ne
manqueront pas de souligner la futilité de ce prétexte.
5. Les notes de bas de page nous rappellent l’analogie
entre notre monde et celui de Lilliput. Swift dénonce ici
les guerres qui opposent à l’intérieur catholiques et protestants, à l’extérieur les royaumes de France et de
Grande-Bretagne.
6. Gulliver est disposé à défendre Lilliput contre une
agression, mais il ne souhaite pas intervenir plus que
cela dans le conflit. Il tiendra cette position qui
conduira à sa disgrâce.
7. Gulliver met fin à la guerre en s’emparant de la
flotte de Blefuscu.
8. À la suite de cet exploit, l’Empereur le fait Nardac,
ce qui est la plus haute dignité chez les Lilliputiens.
On répondra en classe aux questions 5 à 9 sur l’ingratitude des grands :
5. L’Empereur veut profiter de l’écrasante victoire
militaire que lui apporte Gulliver pour asservir définitivement Blefuscu. Gulliver refuse de collaborer à cette
entreprise : « je protestai ouvertement que je ne me
ferais pas l’instrument de l’asservissement d’un peuple
libre et brave », p. 77.
6. Le narrateur parle de l’Empereur de Lilliput, mais
le lecteur ne manque pas de relever l’emploi du pluriel
de généralisation. Le comportement de l’Empereur est
caractéristique de celui de tous les monarques qui font
montre d’ingratitude puisque le moindre refus leur fait
oublier tous les services rendus. La critique est directe.
7. Gulliver sauve la famille royale des flammes en urinant sur le palais. C’est un épisode comique. On remarquera néanmoins qu’à compter du chapitre V, la tonalité
du texte se fait plus sombre.
VOYAGE À LILLIPUT
55
8 et 9. Gulliver est en position délicate à la Cour à la
fin du chapitre V. L’Empereur lui tient rigueur de son
refus de collaborer à l’écrasement de Blefuscu et la
reine, qui a très mal pris l’épisode de l’incendie du
palais, a juré qu’elle se vengerait de lui. Cette disgrâce
n’est pas sans rappeler celle qui frappe Swift après son
Conte du tonneau. Les élèves doivent désormais systématiquement soupçonner des liens entre les critiques du
récit et la satire de l’Angleterre du XVIIIe siècle.
On lira le chapitre V en classe.
Séance n° 7
Objectif → Étudier l’utopie.
Support → Chapitre VI. Du début à « car la mendicité
est un commerce inconnu dans cet empire »,
p. 81-89.
Travail préparatoire : lire les chapitres V et VI. Répondre aux
questions 1, 2 et 3 sur des lois et usages fort étranges, dossier,
p. 122.
Un élève rappellera les contenus et conclusions de la
séance 6.
Le professeur lira le texte support de la séance.
On corrigera les questions 1, 2 et 3 sur des lois et
usages fort étranges. On traitera en classe les questions 4
à 7.
1. Le mot « utopie » est la francisation par Rabelais
(1532) du latin moderne utopia. Ce mot, du grec ou
(non, ne… pas) et topos (lieu), signifie « en aucun lieu ».
Il a été inventé par Thomas More comme nom propre
d’un pays imaginaire. « Utopie » se substantivise pour
désigner un pays imaginaire où un gouvernement idéal
règne sur un peuple heureux. Au milieu du XIXe, le mot
désigne une vue politique ou sociale qui ne tient pas
56
LA CRITIQUE SOCIALE
compte de la réalité, puis une conception qui paraît
irréalisable, une chimère 1.
2. Gulliver réserve la description de cet empire à un
traité particulier qu’il entend publier séparément du
récit de ses voyages. Cette pratique était courante au
XVIIIe siècle. Ce traité n’a jamais vu le jour.
3. Cette phrase est particulièrement importante : elle
marque la transition de la satire à l’utopie. La satire
dénonce ce qui est, Lilliput aujourd’hui. L’utopie dit ce
qui devrait être, c’est Lilliput à l’origine. L’homme, par
sa nature dégénérée, a corrompu la bonté originelle des
institutions. Cette idée n’est pas originale.
4. L’escroquerie est considérée comme un grave délit
parce que, si l’on peut se prémunir facilement contre les
voleurs, il est plus difficile de se garantir des escrocs qui
trahissent la confiance des honnêtes gens. Le « crime
moral » est sévèrement réprimé à Lilliput. Voyez ce qui
est dit des calomniateurs.
5. La justice lilliputienne punit fréquemment de la
peine capitale : « Tous les crimes contre l’État sont punis
ici avec la plus grande sévérité ; mais si la personne accusée
justifie clairement de son innocence lors d’un procès,
l’accusateur se voit aussitôt mis ignominieusement à
mort… » ; « Ils tiennent l’escroquerie pour un délit plus
grave que le vol et manquent donc rarement à la punir
de mort », p. 83.
6. La justice lilliputienne sanctionne aussi durement
les criminels qu’elle récompense généreusement les
bons citoyens. « Quiconque, ici, parvient à prouver qu’il
a strictement observé les lois de son pays pendant
soixante-treize lunes peut prétendre à certains privilèges », p. 84.
1. Dictionnaire historique de la langue française, sous la direction de
A. Rey, Robert, 1992.
VOYAGE À LILLIPUT
57
7. Rien n’échappe à la vigilance de la justice (six
yeux qui voient dans toutes les directions). La justice
récompense (sac d’or) plus volontiers qu’elle ne punit
(l’épée est rangée dans son fourreau). En France l’allégorie de la justice est une femme ayant les yeux bandés
(parce que tout le monde est égal devant elle) qui tient
un glaive (sanction) et une balance (équité).
On répondra ensuite aux questions 1 à 7 sur le
système éducatif à Lilliput, p. 123.
1. Ils ne jouent aucun rôle. « Les parents sont les derniers auxquels on puisse s’en remettre pour l’éducation
de leurs enfants », p. 86. Ils n’ont que la fonction de
géniteurs.
2. L’éducation des enfants est assurée dans des crèches publiques.
3. Les enfants de paysans et de cultivateurs ne vont
pas à l’école, « leur unique tâche étant de labourer et
cultiver la terre ; aussi leur instruction importe-t-elle peu
au public », p. 89.
4. Les enfants scolarisés ne vont pas à la même école
selon qu’ils sont garçons ou filles puis de haute,
moyenne ou basse extraction.
5. Les principes moraux qui président à l’éducation
des jeunes nobles sont : l’honneur, la justice, le courage,
la modestie, la clémence.
6. Le texte répond : « Les enfants destinés au commerce sont mis en apprentissage à l’âge de sept ans ;
tandis que les enfants de qualité poursuivent leur enseignement jusqu’à quinze ans », p. 87.
7. L’image de la femme véhiculée dans ce paragraphe
date beaucoup, ainsi que quelques réflexions misogynes
qui parsèment le texte. L’éducation des jeunes filles à
Lilliput les préserve de leurs penchants naturels pour les
« sornettes », les « histoires stupides » et les « colifichets ». Grâce à cette éducation, les jeunes filles ne sont
58
LA CRITIQUE SOCIALE
ni lâches ni sottes, « se contentant de la pudeur et de la
propreté », p. 88. Mais le texte ne nous dit pas que ces
qualités soient l’apanage des garçons ! L’égalité entre
l’éducation des filles et des garçons demeure très imparfaite à cause de la place qui est réservée à la femme dans
la société lilliputienne : compagne agréable de l’homme
qui veille à l’entretien de la maison…
On répondra ensuite aux questions sur la morale
comme fondement social, p. 122. La question 2 fera
l’objet d’une réponse écrite.
1. Le principal critère de sélection des candidats aux
hautes fonctions de l’État lilliputien est la morale.
2. On relèvera : la vérité, la justice, la tempérance.
3. Aujourd’hui, on sélectionne les hauts fonctionnaires sur des épreuves physiques. Voyez le chapitre III.
4. Le narrateur qualifie ce changement de « corruption » des « institutions originelles ».
5. Les institutions lilliputiennes, bonnes a priori, ont
été dénaturées par l’homme plus soucieux de ses avantages particuliers que du bien-être collectif.
Séance n° 8
Objectif → Évaluation formative.
Support → Voltaire, Candide, chapitre III, de « Rien n’était
si beau » à « n’oubliant jamais Mlle Cunégonde ».
Travail préparatoire : revoir le travail effectué depuis le
début de la séquence.
Sujet : Candide ou l’Optimisme (1759) est le plus célèbre
des contes philosophiques de Voltaire. Il attaque l’optimisme du philosophe allemand Leibniz. Candide, le
héros éponyme, est un jeune garçon un peu naïf qui
croit, selon ce que lui enseigne son maître à penser, que
VOYAGE À LILLIPUT
59
« tout est pour le mieux dans le meilleur des mondes
possibles ». Au début du conte, Candide est chassé du
château de Thunder-ten-tronckh pour avoir aimé Cunégonde, la fille du baron. C’est le début d’un long voyage.
Au chapitre III, Candide a été enrôlé de force dans
l’armée des Bulgares. Étudiez les formes que prend la
dénonciation de la guerre.
Séance n° 9
Objectifs → Le discours de Reldresal : étudier le style
indirect.
→ Travailler les verbes d’opinion, de déclaration.
Support → Chapitre VII, p. 94-95 et p. 97-100.
Travail préparatoire : lire le chapitre VII. Répondre aux
questions 1 et 2 sur le complot, dossier, p. 125.
On lira les extraits suivants :
Extrait 1 : de « Je me préparais à aller rencontrer
l’Empereur de Blefuscu » à « je risque ma tête à votre
service », p. 94-95. Cet extrait permet un rappel sur
l’introduction de la parole rapportée dans le récit.
Extrait 2 : de « Au cours des débats relatifs à cette
accusation » à « dans mille doutes et mille incertitude »,
p. 97-100. On exploitera ce texte pour parler du discours indirect en prenant soin de clarifier au préalable
la situation d’énonciation. Reldresal s’adresse à Gulliver
au discours direct en lui rapportant au discours indirect
les propos des courtisans intéressés à sa perte. On insistera sur la variété des verbes d’opinion et de déclaration.
On corrigera les questions 1 et 2 sur le complot.
1. Un « personnage considérable de la Cour » rend
une visite nocturne à Gulliver et lui apprend qu’un
complot se trame contre lui.
60
LA CRITIQUE SOCIALE
2. Les ennemis de Gulliver sont le Grand-Amiral
Skyris Bolgolam et Flimnap le grand Trésorier, Lalcon le
Chambellan, Balmuff le grand Ministre de la Justice. Ses
alliés sont le personnage considérable de la Cour qui lui
rend visite pour l’informer du complot et dont on ne
nous dévoilera pas l’identité, Reldresal, le secrétaire aux
Affaires privées et, dans une mesure toute relative,
l’Empereur.
Séance n° 10
Objectifs → Analyser le procès de Gulliver.
→ Étudier l’argumentation.
→ Travailler les propositions subordonnées.
Supports → Chapitres VII et VIII, p. 93-102 et p. 103110.
Travail préparatoire : relire le chapitre VII. Lire le chapitre VIII. Répondre aux questions 3 à 8 sur le complot, dossier,
p. 125.
Un élève résumera les chapitres VII et VIII.
On corrigera les questions 3 à 8 sur le complot.
3. Notre héros est accusé d’avoir souillé le palais,
d’avoir refusé de réduire Blefuscu à l’état de province de
Lilliput et de mettre à mort les Gros-Boutistes, d’avoir
reçu les ambassadeurs de Blefuscu et d’aider cette
nation sous couvert d’un voyage d’agrément. Il est
accusé d’avoir sauvé la reine, de s’être montré clément
et magnanime. Ce paradoxe prête à sourire.
4. Les propositions du Chancelier et de l’Amiral sont
particulièrement cruelles : ils projettent la mort de Gulliver dans l’incendie de sa maison ; ils souhaitent le cribler de flèches et verser un poison sur ses vêtements
pour le voir « mourir dans les pires tortures ».
5. Reldresal en appelle à la pitié de l’Empereur, « la
plus respectable des vertus chez un prince ». On relè-
VOYAGE À LILLIPUT
61
vera les marques du discours courtisan et machiavélique
de Reldresal (la perte de la vue ne nuit pas à la force
physique et renforce le courage de celui qui ne voit plus
le danger). On notera l’ironie du propos ainsi que celle,
piquante, de la dernière phrase « il vous suffirait de voir
par les yeux des ministres puisque aussi bien les plus
grands princes ne font pas davantage », p. 98.
6. Le secrétaire suggère que l’on affame progressivement Gulliver. Cette mesure présenterait un double
avantage : l’empire ferait des économies sur l’entretien
du géant et, à sa mort, le poids de sa carcasse serait
considérablement réduit. Les chairs mortes seraient plus
faciles à disperser et le squelette ferait un monument.
7. Gulliver est condamné à la cécité.
8. Gulliver décide de partir pour Blefuscu.
On pourra classer les arguments en tableaux pour
plus de lisibilité. Il faut insister sur le fait que l’argumentation veut convaincre pour inciter à l’action (ici la
condamnation de Gulliver). On travaillera sur la cause
et la conséquence dans les subordonnées, la cause et
l’inconséquence dans ce procès.
On répondra aux questions 1 à 4 sur l’injustice,
p. 125.
1. « Cet émissaire avait ordre de représenter au
monarque de Blefuscu la grande magnanimité de son
maître qui voulait bien ne me punir que de la perte de
mes yeux », p. 105. On commentera l’ironie de cette
phrase en relevant l’opposition « grande magnanimité »/« perte des yeux » ainsi que l’emploi de la négation restrictive « ne… que ».
2. « […] car on constatait que plus on insistait et brodait sur elles, plus inhumain était le châtiment, plus
innocente la victime », p. 100. On peut ici parler de la
cause et de la conséquence et se servir de cette phrase
62
LA CRITIQUE SOCIALE
pour travailler la juxtaposition, la coordination et la
subordination.
3. « Quant à moi, je dois l’avouer, n’ayant jamais été
promis au rôle de courtisan par la naissance ou l’éducation […] je restais incapable de percevoir la magnanimité et la grâce de cette sentence ; je la jugeai (peut-être
à tort) plus rigoureuse que douce », p. 100. L’humour
est ici dans la modalisation « je dois l’avouer », « (peutêtre à tort) » qui nous indique que la phrase est à lire au
second degré. Swift oppose l’innocente naïveté de la victime Gulliver aux sombres machinations des courtisans.
Mais cette phrase est à prendre comme une critique de
l’injustice impériale.
4. Gulliver décide de ne plus se fier aux princes et aux
ministres.
Pour s’assurer que le récit à été lu entièrement. On
peut donner les questions sur le retour, p. 126, en classe
ou en devoir à la maison. Voici le corrigé :
1. Gulliver est bien reçu à Blefuscu parce que, au
temps de la guerre, il s’est montré généreux et magnanime avec ses adversaires.
2. Gulliver découvre une chaloupe qui lui permet de
rentrer en Angleterre.
3. Gulliver emporte : cinquante bourses de deux
cents Sprugs chacune, un portrait en pied de l’Empereur
de Blefuscu, « les carcasses de cent bœufs, de trois cents
moutons, du pain et du vin en proportion, et autant de
viande apprêtée que pouvaient en préparer quatre cents
cuisiniers », « six vaches et deux taureaux vivants, autant
de béliers et de brebis », p. 106-107. Gulliver espère les
introduire en Angleterre et propager l’espèce.
4. Le substantif « naturel » désigne ici un habitant originaire d’un lieu. On dirait aujourd’hui un « natif ».
5. Gulliver séjourne deux mois chez lui avant de
reprendre la mer.
VOYAGE À LILLIPUT
63
6. Il profite de ce laps de temps pour mettre sa famille
à l’abri du besoin.
7. Gulliver est animé d’un « désir insatiable de courir
l’aventure dans des pays étrangers », p. 109.
8. Après Lilliput, Gulliver effectuera de nombreux
autres voyages à Brobdingnag (deuxième partie des
Voyages de Gulliver), à Laputa, Balnibarbi, Glubbdubdrib,
Luggnagg et au Japon (troisième partie), au pays des
Houyhnhnms (quatrième et dernière partie).
Séance n° 11
Objectif → Argumenter à l’oral.
Support → Chapitre VI, p. 81-93.
Travail préparatoire : revoir les contenus des séances 7 et 10.
Relire le chapitre VI. Répondre aux questions 8 sur des lois et
usages fort étranges et le système éducatif à Lilliput, dossier,
p. 122 et p. 123.
Il s’agit d’organiser un débat structuré en classe
autour d’un thème choisi par les élèves (ou commandé
par le niveau de la classe) : la justice ou l’éducation.
– La justice : les Lilliputiens ont une piètre opinion de
la justice européenne. Ils la considèrent comme imparfaite (« déficit prodigieux »), puisqu’elle se contente de
punir sans récompenser. La justice lilliputienne repose
sur un respect très rigoureux des valeurs morales, ces
valeurs dont on trouvait déjà au XVIIIe siècle qu’elles se
perdaient. Gulliver, en se faisant avocat d’un condamné
pour escroquerie, donne à l’Empereur une triste image
de la morale européenne. On voit ici une forme de critique sociale non plus par analogie, mais par opposition.
Dans le débat oral en classe sur la justice lilliputienne,
on pourra parler de la peine de mort ou de l’idée d’une
justice qui récompense.
64
LA CRITIQUE SOCIALE
– L’éducation : on insistera sur les inégalités sociales
que le système éducatif lilliputien se contente de reproduire. On parlera également de l’éducation des filles. À
cette occasion, il n’est pas interdit de faire un rappel sur
l’évolution du système éducatif français en replaçant le
texte de Swift dans son siècle 1.
Séance n° 12
Objectif → Évaluation finale.
Support → Chapitre VII.
Travail préparatoire : revoir l’ensemble du travail effectué,
notamment les séances 9 et 10.
Nous proposons deux activités : soit un sujet d’expression écrite, soit un de lecture (à choisir selon le niveau
de la classe).
Sujet 1 (expression écrite) : « J’envisageai un moment
de me présenter à mon procès… » Imaginez cette scène
et faites le récit du procès de Gulliver en développant,
en réponse à l’accusation (chapitre VII), les articles de sa
défense. Gulliver dénoncera les injustices dont il est victime.
Sujet 2 (lecture) : étude du texte d’accompagnement
des chapitres VII et VIII, dossier, p. 126-128 : Swift, Les
Voyages de Gulliver, « Voyage à Brobdingnag », fin du
chapitre VI. Relevez le champ lexical du mépris dans ce
texte. Repérez les points communs entre cette critique
de la société humaine et celle de la société lilliputienne
faite dans le premier voyage.
Sébastien FOISSIER.
1. Voyez L’École des lettres des collèges, n° 13 et 14, 1998-1999.

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