droits d`enregistrement et de succession

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droits d`enregistrement et de succession
IPCF
SEMINAIRE STAGIAIRES FRANCOPHONES
DROITS D'ENREGISTREMENT ET DE SUCCESSION
Luc HERVE,
Avocat au Barreau de Liège, cabinet d'avocats Herve,
(Tél.: 04 343 53 33 – Fax: 04 343 53 66 – Email: [email protected])
Collaborateur scientifique à l'ULG et à HEC-ULG,
Professeur à l'Ecole Supérieure de Comptabilité de Liège (CBCEC Liège),
Assesseur juridique suppléant à la Chambre Exécutive Francophone de l'IPCF
Auditoire Pierre Lacroix (UCL)
Woluwé-Saint-Lambert, avenue Mounier, 51
Luc HERVE - Séminaire Stagiaires IPCF - Droits d'enregistrement et de succession
DROITS D'ENREGISTREMENT ET DE SUCCESSION
PLAN DU SEMINAIRE
PREMIERE PARTIE: DROITS D'ENREGISTREMENT
CHAPITRE I.
LE DROIT D'ENREGISTREMENT EN GENERAL
Section 1.
Définition et caractéristiques
Section 2.
Législations en matière de droits d'enregistrement
CHAPITRE II.
OBLIGATION D'ENREGISTREMENT
Section 1.
Actes et déclarations assujettis à la formalité
Section 2.
Délais pour la formalité de l'enregistrement
Section 3.
Personnes tenues à l'enregistrement
Section 4.
Lieu de l'enregistrement
Section 5.
Conséquences de l'enregistrement
CHAPITRE III.
REGLES GENERALES DE PERCEPTION
Section 1.
Présentation générale
Section 2.
Exigence d'un acte faisant titre
Section 3.
Non bis in idem
Section 4.
Dispositions dépendantes – dispositions indépendantes
Section 5.
Modalités de l'opération juridique
Section 6.
Le fisc est un tiers pour la perception des droits d'enregistrement
CHAPITRE IV.
Section 1.
CATEGORIES DE DROITS D'ENREGISTREMENT
Enumération
2
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Section 2.
Droits proportionnels
Section 3.
Droits fixes spécifiques
Section 4.
Droit fixe général
CHAPITRE V.
RESTITUTIONS
Section 1.
Généralités
Section 2.
Examen de quelques hypothèses de restitution
CHAPITRE VI.
AMENDES
Section 1.
Principes
Section 2.
Règles de perception
Section 3.
Types d'amendes
CHAPITRE VII.
PRESOMPTIONS LEGALES
Section 1.
Introduction
Section 2.
Examen de quelques présomptions légales particulières
CHAPITRE VIII.
PRESCRIPTION
Section 1.
Notion
Section 2.
Délais
CHAPITRE IX.
POURSUITES
Section 1.
Généralités
Section 2.
Instance administrative
Section 3.
Contrainte
Section 4.
Instance(s) judiciaire(s)
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CHAPITRE X.
DONATIONS D'ENTREPRISES
Section 1.
Introduction
Section 2.
Donations d'entreprises en Région Wallonne
Section 3.
Donations d'entreprises dans la Région de Bruxelles-Capitale
Section 4.
Donations d'entreprises en Région Flamande
DEUXIEME PARTIE: DROITS DE SUCCESSION
CHAPITRE I.
INTRODUCTION
Section 1.
Législation
Section 2.
Droit de succession - Notion
Section 3.
Notions de droit civil
CHAPITRE II.
ETABLISSEMENT DES DROITS
Section 1.
Distinction entre droit de succession et droit de mutation par décès
Section 2.
Transmissions imposables
Section 3.
Déclaration de succession
Section 4.
Actif imposable
Section 5.
Evaluation de l'actif imposable
Section 6.
Passif
Section 7.
Evaluation du passif
Section 8.
Preuve des dettes admissibles au passif
CHAPITRE III.
TARIF DES DROITS
Section 1.
Principes
Section 2.
Règles particulières
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CHAPITRE IV.
CALCUL DE L'IMPOT DU
Section 1.
Liquidation des droits
Section 2.
Exemptions et réductions
CHAPITRE V.
TRANSMISSIONS ET DISPOSITIONS ASSIMILEES AUX
MUTATIONS A CAUSE DE MORT
Section 1.
Introduction
Section 2.
Avantages matrimoniaux
Section 3.
Donations dans les trois ans précédant le décès
Section 4.
Stipulation pour autrui
Section 5.
Transmissions à titre onéreux – Actes déclaratifs par lesquels le défunt
stipule un droit viager à son profit
CHAPITRE VI.
RECOUVREMENT DES DROITS, AMENDES ET INTERETS
Section 1.
Obligation à la dette d'impôt
Section 2.
Contribution à la dette d'impôt
Section 3.
Délai de paiement
CHAPITRE VII.
OBLIGATIONS IMPOSEES AUX TIERS EN VUE D'ASSURER
LA PERCEPTION DES DROITS
CHAPITRE VIII.
MOYENS DE PREUVE
Section 1.
Moyens de preuve du droit commun
Section 2.
Moyens de preuve spéciaux
Section 3.
Présomptions légales
Section 4.
Expertise de contrôle
CHAPITRE IX.
Section 1.
LES AMENDES
Généralités
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Section 2.
Infractions donnant lieu à amendes
CHAPITRE X.
LES RESTITUTIONS
Section 1.
Cas de restitution prévus par l'article 134 du CDS
Section 2.
Application erronée de la loi
Section 3.
Preuve de l'existence de dettes qui avaient été rejetées
Section 4.
Cas de restitution prévus par l'article 135 du CDS
Section 5.
Imputation
CHAPITRE XI.
PRESCRIPTION
Section 1.
Généralités
Section 2.
Calcul des délais de prescription
Section 3.
Suspension de la prescription
Section 4.
Délais de prescription
Section 5.
Interruption de la prescription
CHAPITRE XII.
POURSUITES ET INSTANCES
Section 1.
Généralités
Section 2.
Instance administrative
Section 3.
Instance judiciaire
CHAPITRE XIII.
SUCCESSIONS D'ENTREPRISES
Sujet non développé
APPENDICE.
EXERCICES PRATIQUES
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DROITS D'ENREGISTREMENT ET DE SUCCESSION
Luc HERVE
Avocat au Barreau de Liège, cabinet d'avocats Herve,
(Tél.: 04 343 53 33 – Fax: 04 343 53 66 – Email: [email protected])
Collaborateur scientifique à l'ULG et à HEC-ULG,
Professeur à l'Ecole Supérieure de Comptabilité de Liège (CBCEC Liège),
Assesseur juridique suppléant à la Chambre Exécutive Francophone de l'IPCF
PREMIERE PARTIE :
DROITS D’ENREGISTREMENT
CHAPITRE I.
LE DROIT D'ENREGISTREMENT EN GENERAL
SECTION 1.
DEFINITION ET CARACTERISTIQUES
1.Le droit d’enregistrement est un impôt qui se perçoit à l’occasion d'une formalité
particulière : l’enregistrement des actes ou écrits par le receveur de l'enregistrement, dans un
registre à ce destiné ou sur tout autre support déterminé par le Roi (article 1 du CDE).
2.Comme tous les impôts établis au profit de l'Etat, le droit d'enregistrement est soumis
aux principes édictés par les articles 170, 171 et 172 de la Constitution :
a)
Principe de légalité de l’impôt : "Aucun impôt au profit de l'Etat ne peut être établi
que par une loi" (article 170, §1er Const.); "Aucun impôt au profit de la Communauté
ou de la Région ne peut être établi que par un décret ou une règle visée à l'article
134."
b)
Principe d’annualité de l’impôt : "Les impôts au profit de l'Etat, de la Communauté et
de la Région, sont votés annuellement". "Les règles qui les établissent n'ont de force
que pour un an si elles ne sont pas renouvelées" (article 171 Const.).
c)
Principe d’égalité devant l’impôt : "Il ne peut être établi de privilège en matière
d'impôts". "Nulle exemption ou modération d'impôt ne peut être établie que par une
loi" (article 172 Const.).
3.Au point de vue de la classification générale des impôts, le droit d'enregistrement doit
être considéré, de manière schématique, comme un impôt réel et indirect.
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Les impôts réels (par opposition aux impôts personnels) frappent des faits déterminés, sans
qu'il soit tenu compte, en principe, de la personnalité du contribuable.
Les impôts indirects sont les impôts qui ne se perçoivent que sur des faits occasionnels,
uniques, au contraire des impôts directs, lesquels frappent des situations permanentes ou se
présentant périodiquement et sont, en principe, recouvrés au moyen de rôles annuels (par
exemple, l'impôt sur les revenus).
SECTION 2.
LEGISLATIONS EN MATIERE DE DROITS D'ENREGISTREMENT
4.Le droit d'enregistrement fait l'objet du titre premier du Code des droits
d'enregistrement, d'hypothèque et de greffe (en abrégé, "CDE" - arrêté royal n° 64 du 30
novembre 1939, pris en exécution de l'article 1er, I, litt. d, de la loi du 1er mai 1939, et
confirmé par l'article 2 de la loi du 16 juin 1947).
Depuis le 1er janvier 2002 (article 3 de la loi spéciale du 16 janvier 1989 "relative au
financement des Communautés et des Régions" tel que modifié par l'art. 5 de la loi spéciale du
13 juillet 2001 "portant refinancement des Communautés et extension des compétences
fiscales des Régions"), le droit d'enregistrement sur les transmissions à titre onéreux de biens
immeubles situés en Belgique et le droit de donation sont, parmi d'autres, devenus des impôts
pleinement régionaux. Au 1er novembre 2003, la Région de Bruxelles-Capitale et la Région
flamande ont fait usage de cette compétence. La Région Wallonne a suivi.
*
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CHAPITRE II.
OBLIGATION D’ENREGISTREMENT
SECTION 1.
A.
ACTES ET DECLARATIONS ASSUJETTIS A LA FORMALITE
Actes obligatoirement enregistrables du seul fait de leur existence
5.Les uns sont obligatoirement enregistrables en raison de leur nature même (par
exemple, les actes des notaires belges), les autres ne le sont qu'en raison de leur objet (par
exemple, les actes sous seing privé qui sont translatifs de la propriété d'immeubles situés en
Belgique).
A.1.
Actes obligatoirement enregistrables en raison de leur nature
a)
Les actes des notaires belges (art. 19, 1° du CDE)
6.Tous les actes notariés passés en Belgique doivent obligatoirement être enregistrés,
quels que soient leur objet, leur forme, le montant des droits dus, la qualité des parties
intervenantes,…
L'enregistrement est obligatoire en ce qui concerne notamment les actes notariés suivants :
actes de vente (de meubles ou d'immeubles), actes de donation, testaments (à l’exception des
testaments olographes, sauf s’ils sont déposés au rang des minutes d’un notaire), actes de
notoriété, procurations, actes de partage, procès-verbaux de vente publique (mobilière ou
immobilière) et procès-verbaux d'inventaire.
Sont des actes notariés et doivent donc être enregistrés, les actes où le notaire agit seul, sans
l'intervention des parties, en exécution d'une mission qui lui est confiée par la loi en raison de
ses fonctions (par exemple, déclaration d'absence de surenchère; procès-verbal constatant que
des immeubles mis en vente publique n'ont pas été adjugés, faute d'enchères suffisantes).
Ne peuvent, par contre, être considérés comme des actes notariés et sortent donc du champ
d'application de l'article 19, 1° du CDE :
- les actes rédigés par le notaire, mais non signés par lui ;
- les actes rédigés par le notaire en dehors de l'accomplissement des missions qui lui
sont légalement confiées en raison de ses fonctions : de tels actes doivent être
considérés comme des actes sous seing privé.
Pour le surplus, ni les actes authentiques passés à l'étranger, ni les actes administratifs belges
(qu'ils aient ou non le caractère d'acte authentique) ne sont visés par l'article 19, 1° du CDE:
ces actes ne doivent être enregistrés que s'ils tombent dans le champ d'application, soit de
l'article 19, 2° à 5° du CDE, soit des articles 26 ou 29 du CDE.
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b)
Les exploits et les procès-verbaux des huissiers de justice belges, autres que les protêts
(art.19, 1° du CDE)
7.Sont obligatoirement enregistrables, tous les exploits et procès-verbaux dressés par les
huissiers de justice belges dans l'exercice de leurs fonctions.
Sont plus particulièrement concernés les exploits de signification et les procès-verbaux de
vente publique de biens meubles corporels.
Les protêts sont dispensés de la formalité.
c)
Les arrêts et jugements des cours et tribunaux belges, qui contiennent des dispositions
assujetties à un droit proportionnel (art. 19, 1° du CDE)
8.S'ils contiennent des dispositions assujetties à un droit proportionnel, les arrêts et
jugements des cours et tribunaux belges sont obligatoirement enregistrables, c'est-à-dire en
principe :
- quand ils portent condamnation ou liquidation (définitive, provisoire, principale,
subsidiaire ou conditionnelle) de sommes et valeurs mobilières ou quand ils portent
collocation de sommes et valeurs mobilières, et que le montant cumulé des
condamnations prononcées et des liquidations établies à charge d'une même personne,
ou des sommes distribuées aux créanciers d'une même personne dépasse 12.500 EUR
(art. 142 et 143 du CDE) ;
- quand ils font titre d'une convention translative ou déclarative de propriété ou
d'usufruit d'immeubles situés en Belgique, qui n'a pas subi l'impôt y afférent (art. 146
et 147 C. du CDE).
Restent en dehors du champ d'application de l'article 19, 1° du CDE, et ne sont donc pas
obligatoirement enregistrables :
- les décisions des juridictions administratives (Conseil d'Etat, Cour des comptes,
commissions prévues dans les lois en matière de sécurité sociale,…);
- les décisions des juridictions disciplinaires (chambre de discipline des notaires,…).
A.2.
Actes obligatoirement enregistrables en raison de leur objet
a)
Les actes translatifs ou déclaratifs de propriété ou d'usufruit d'immeubles situés en
Belgique (art. 19, 2° du CDE)
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9.Est "translatif", tout acte - peu importe sa dénomination - qui forme titre d'une
convention ayant pour effet de faire passer, juridiquement, un droit réel d'une tête sur une
autre.
Sont ainsi des actes translatifs (qui doivent donc obligatoirement être enregistrés, quelle que
soit leur forme, quand ils portent sur la propriété ou l'usufruit d'immeubles situés en
Belgique), les actes constatant les conventions ci-après : vente, échange, dation en paiement,
donation de biens présents, constitution entre vifs d'un usufruit ou d'un droit réel d'usage ou
d'habitation, constitution entre vifs d'une servitude, vente de droits successoraux, apport à une
société, apport à une association sans but lucratif, cession de mitoyenneté, renonciation à un
droit réel moyennant un prix, renonciation à une prescription déjà acquise, renonciation à
l'attribution de communauté, clause d'ameublissement, conversion de l'usufruit (art. 745quater
et 745quinquies du Code civil),…
10.- La convention "déclarative" est celle qui, tout en faisant passer un droit réel d'une tête
sur une autre, n'est pas cependant juridiquement translative : par une fiction de la loi, le cédant
est réputé n'avoir jamais tenu le droit cédé, le cessionnaire étant censé avoir obtenu ce droit
directement de l'auteur du cédant.
Tel est notamment le cas des conventions suivantes : le partage, la cession de parts indivises
entre tous les copropriétaires, le retrait successoral, la transaction qui modifie la propriété
apparente (art. 2044 du Code civil),…
11.- L'article 19, 2° du CDE vise essentiellement des opérations conventionnelles. Les
transmissions par décès, qu'il s'agisse de dévolutions légales ou testamentaires, lui sont
étrangères.
Il en est de même pour les transmissions ou acquisitions de droits réels résultant de la loi
seule (par exemple, acquisition par voie d'accession ou de prescription).
12.- Pour l'application de l'article 19, 2° du CDE et, plus généralement, de toutes les
dispositions du Code, les termes "propriété" et "usufruit" doivent être pris dans un sens large.
Par "propriété", il faut entendre non seulement la pleine propriété, mais aussi la nue-propriété,
les droits indivis du copropriétaire et la servitude. Le terme "usufruit" comprend l'usufruit
ordinaire, le droit d'usage et le droit d'habitation.
Le droit aux fruits, revenus ou produits - qui constitue non pas un droit réel, mais une créance
purement mobilière - n'est cependant pas assimilé à l'usufruit. L'acte sous seing privé (ou
passé à l'étranger) qui constate la constitution d'un tel droit n'est donc pas obligatoirement
enregistrable.
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L’article 19, 2° du CDE ne s’applique pas aux droits d'emphytéose et de superficie qui sont
soumis au régime des baux, ni au droit d'hypothèque dont la constitution, qui se fait
généralement par acte notarié, est soumise à un régime particulier (art. 87 à 93 du CDE).
L’art. 19, 2° du CDE ne s’applique pas non plus aux simples partages de jouissance (ou
partages provisionnels) d’immeubles situés en Belgique.
13.- Au sens de l'art. 19, 2° du CDE et, plus généralement, au sens du Code des droits
d'enregistrement, le terme "immeubles" désigne exclusivement :
1°
les immeubles par nature (terrains, plantations et constructions) ;
2°
les immeubles par destination en raison du fait que le propriétaire du fonds les a
attachés au fonds à perpétuelle demeure.
En droit civil, il y a deux catégories d'immeubles par destination (art. 524 du Code
civil) :
- les objets mobiliers que le propriétaire d'un fonds y a placés pour le service et
l'exploitation de ce fonds ;
- les objets mobiliers que le propriétaire d'un fonds y a attachés à perpétuelle demeure
d'une manière apparente.
Aux termes de l'article 212, 2° du CDE, les objets mobiliers corporels affectés au
service et à l'exploitation de biens immeubles ne sont pas considérés comme
immeubles, pour l'application du CDE.
Ainsi, si X vend à Y une usine et du matériel affecté à l'exploitation de cette usine, il
n'y a vente d'immeuble qu'en ce qui concerne l'usine (terrain et bâtiments). A supposer
que la convention n'ait été constatée que par acte sous seing privé, l'obligation
d'enregistrement n'existe que dans la mesure où la convention porte sur l'usine. Si la
vente a été faite pour un prix global, ce prix doit être ventilé lors de l'enregistrement
(au besoin, par une déclaration complétive conformément à l’art. 168 du CDE) et le
droit de vente ne sera perçu que sur la partie du prix se rapportant à l'usine.
3°
les créances immobilières (portant sur des biens des catégories indiquées comme
immeubles, sub 1°et 2°).
b)
Les actes portant bail, sous-bail ou cession de bail d'immeubles situés en Belgique (art.
19, 3° du CDE)
14.- Quand la convention de bail, de sous-bail ou de cession de bail est constatée par un
acte notarié ou un exploit d'huissier de justice, passé ou dressé en Belgique, l'obligation
d'enregistrer résulte de l'article 19, 1° du CDE.
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15.- Le "bail" (ou louage des choses) "est un contrat par lequel l'une des parties s'oblige à
faire jouir l'autre d'une chose pendant un certain temps, et moyennant un certain prix que
celle-ci s'oblige de lui payer" (art. 1709 du Code civil).
Il n'y a pas lieu de distinguer selon la durée plus ou moins longue de la location, ni selon
l'étendue des droits conférés au locataire. L'obligation d'enregistrer existe, les baux, cessions
de baux et sous-locations de résidence principale visés à l'article 161, 12° du CDE étant
enregistrables gratuitement.
Tombent ainsi sous l'application de l'article 19, 3° du CDE:
- les baux de maison, de terres, d'appartements;
- les locations de chambres ou de quartiers;
- les baux de chasse et de pêche;
- l'acte par lequel l'un des deux copropriétaires indivis d'un immeuble donne en
location à l'autre sa moitié indivise;
- le louage d'un mur pour y placer des affiches;
- les locations de fenêtres ou de vitrines ; ...
Le "sous-bail" est la convention par laquelle le locataire donne lui-même en location à un tiers
tout ou partie du bien qu'il a lui-même loué.
La "cession de bail" est la convention par laquelle le locataire cède à un tiers les droits qu'il
tient du bail courant à son profit.
La cession, par le bailleur, de son droit d’encaisser les loyers encore à échoir, emporte
seulement cession d’une créance et ne tombe pas dans le champ d’application de l’art. 19, 3°
du CDE. L'acte par lequel l'un des deux colocataires cède son droit à l'autre doit être, par
contre, être considéré comme une cession de bail.
16.- L'acte constatant que les parties sont d'accord pour majorer le prix du bail d'un
immeuble situé en Belgique, antérieurement conclu entre elles, est en principe
obligatoirement enregistrable au droit proportionnel prévu à l'article 83 du CDE, à l'égal d'un
bail.
Pour la perception des droits d'enregistrement, les contrats constitutifs de droits d'emphytéose
ou de superficie sont assimilés à des baux; les cessions de pareils droits sont considérées
comme des cessions de baux (art. 83, al. 2 du CDE).
L'obligation d'enregistrer les conventions de bail, sous-bail ou cession de bail suppose
essentiellement que ces conventions soient constatées dans un titre écrit parfait. Ainsi, par
exemple, ne sont pas obligatoirement enregistrables les locations verbales (ou baux sans écrit)
et les promesses de bail faites par écrit sous seing privé, mais acceptées verbalement.
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c)
Les procès-verbaux de vente publique d'objets mobiliers corporels, dressés en
Belgique (art.19, 4° du CDE)
17.- L'obligation de faire enregistrer les procès-verbaux de vente publique d'objets
mobiliers corporels, dressés par les notaires et les huissiers de justice découle de l'article 19,
1° du CDE.
L'article 19, 4° du CDE concerne les procès-verbaux dressés par d'autres personnes, comme
les receveurs des domaines et autres agents de l'Etat, des provinces, des communes et des
établissements publics.
d)
Les actes contenant apport de biens à des sociétés possédant la personnalité juridique
et qui ont soit leur siège de direction effective en Belgique, soit leur siège statutaire en
Belgique et leur siège de direction effective hors du territoire des Etats membres de la
Communauté économique européenne (art. 19, 5 du CDE)
18.- L’article 19, 5° du CDE ne s’applique pas aux augmentations de capital sans apport
nouveau, visées à l’art. 116 du CDE.
La notion d’"apport en société" sera explicitée lors de l’examen des dispositions y
applicables.
Par "siège de direction effective", il faut entendre le lieu où est établi le centre de la vie
intellectuelle, de l'activité directrice de la société, le lieu où se tiennent les assemblées
générales des associés, les réunions du conseil d'administration, bref "le lieu où se manifeste
l'activité supérieure et directrice de la société", quel que soit l'endroit où se fait effectivement
l'exploitation.
Le "siège statutaire" est le siège social désigné dans les statuts de la société (siège statutaire et
siège de direction effective sont généralement - mais pas nécessairement - établis au même
lieu). En pratique, on admet comme une présomption factuelle juris tantum que le siège
statutaire correspond au siège de direction effective.
Les conventions visées à l'article 19, 5° du CDE doivent être enregistrées, même quand elles
ne sont pas constatées par écrit. Dans ce cas, les parties sont tenues de présenter une
déclaration à la formalité (art. 31, 1°bis du CDE).
B.
Actes assujettis à la formalité en raison de l'usage qui en est fait
19.- Dans divers cas, des actes ou écrits, non obligatoirement enregistrables par euxmêmes, sont néanmoins assujettis à la formalité, en raison de l'usage qu'on en fait (art. 26 et
29 du CDE).
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Par eux-mêmes, les actes ou écrits, autres que ceux indiqués à l'article 19 du CDE ne sont pas
obligatoirement enregistrables. Tel est le cas notamment des procurations sous seing privé,
des plans établis par les architectes ou les géomètres, des testaments olographes, des actes
portant bilan d'une société commerciale et des actes administratifs en général.
Le CDE prévoit toutefois l'obligation d'enregistrer les actes de ce genre quand ils font l'objet
d'opérations bien déterminées qui sont décrites ci-après.
a)
Annexe à un acte notarié ou à un exploit ou procès-verbal d'huissier de justice
(art. 26 du CDE)
20.- Aucun acte ou écrit quelconque ne peut être annexé à un acte notarié ou à un acte
d'huissier de justice, sans être préalablement enregistré (art. 26, al. 1er du CDE).
Il y a "annexe", au sens de l'article 26 du CDE, quand un document matériellement et
juridiquement distinct de l'acte du notaire ou de l'huissier de justice est joint à cet acte par le
fonctionnaire public instrumentant, pour ne plus en être séparé, pour en devenir un accessoire
et former avec cet acte une unité juridique. En règle générale, la jonction de la pièce annexée
est mentionnée dans l'acte principal.
Le fait que l'annexe ne soit pas mentionnée dans l'acte principal n'empêche pas l'application
de l'article 26 du CDE, si l'annexe est obligatoirement prévue par la loi.
Par contre, si l'annexe est facultative, l'absence de mention dans l'acte principal écarte, en
principe, l'application de l'article 26 du CDE.
Les documents qui font partie intégrante de l'acte du notaire ou de l'huissier de justice (par
exemple la traduction jointe à l’exploit de signification en vertu de la loi sur l’emploi des
langues, qui sont l'un et l'autre des éléments essentiels de cet acte), ne sont pas visés par
l'article 26 du CDE : ces documents sont couverts par l'enregistrement de l'acte lui-même.
L'annexe à un acte judiciaire, à un acte administratif ou à un acte sous seing privé - bref, à un
acte autre qu'un acte de notaire ou d'huissier de justice - n'est jamais une cause
d'enregistrement de l'écrit ou du document annexé.
b)
Le dépôt au rang des minutes d'un notaire (art. 26 du CDE)
21.- Déposer au rang des minutes d'un notaire signifie remettre les pièces au notaire ès
qualités, en le requérant de les conserver parmi ses minutes.
c)
Actes dont il est fait usage pour une formalité à la conservation des hypothèques ou
dans les registres aux inscriptions du privilège agricole
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22.- Aucune transcription, inscription, radiation ou mention marginale, soit dans les
registres des conservateurs des hypothèques, soit dans les registres aux inscriptions du
privilège agricole, ne peut être effectuée en vertu d'actes qui n'ont pas été préalablement
enregistrés ou, s'il s'agit d'actes dispensés de la formalité en vertu de l'art. 8bis du CDE, sans
qu'il y ait eu paiement préalable des droits d'enregistrement (art. 29 du CDE).
Il va de soi que, pour entraîner l'obligation d'enregistrement, les opérations dont il s'agit
doivent s'effectuer en Belgique (ainsi, annexe à un acte de notaire ou d'huissier de justice
belge, …). Le Roi peut dispenser de la formalité de l'enregistrement certaines catégories des
actes visés aux articles 26 et 29 du CDE, sans que cette dispense entraîne exemption des
droits applicables à ces actes (art. 8bis du CDE). A ce jour, cette faculté n’a pas été mise en
oeuvre.
C.
Déclarations obligatoires
C.1.
Principe
23.- Il y a obligation de souscrire et de présenter une déclaration à la formalité de
l'enregistrement dans les cas ci-après :
a)
Lorsqu'une convention translative ou déclarative de propriété ou d'usufruit
d'immeubles situés en Belgique n'est pas constatée par écrit (art. 31, 1° du CDE)
b)
Lorsqu'un apport de biens à une société possédant la personnalité juridique et qui a soit
son siège de direction effective en Belgique, soit son siège statutaire en Belgique et
son siège de direction effective hors du territoire des Etats membres de la C.E.E., n'est
pas constaté par écrit (art. 31, 1°bis du CDE)
c)
Lorsque la condition qui a tenu en suspens la perception d'un droit vient à se réaliser
(art. 31, 2° du CDE)
L'article 16, alinéa 1 du CDE porte que "l'acte juridique tarifé au droit proportionnel,
mais soumis à une condition suspensive, ne donne lieu qu'au droit fixe général aussi
longtemps que la condition n'est pas accomplie".
L'arrivée de cette condition doit être déclarée. L'enregistrement de la déclaration dont
il s'agit - institué uniquement en vue du recouvrement de l'impôt proportionnel tenu en
suspens - ne peut donner lieu qu'au paiement de cet impôt (et éventuellement de
l'amende d'enregistrement tardif), à l'exclusion du droit fixe général. La déclaration a
seulement un but fiscal. Elle ne peut être considérée comme faisant titre de la
convention.
16
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d)
Dans les cas visés aux articles 74 et 75 du CDE (art. 31, 3° du CDE), c'est-à-dire les
acquisitions séparées du fonds de la superficie
e)
Dans les cas visés à l'article 68 du CDE : renonciation au bénéfice de la réduction du
droit de vente, prévue en faveur des personnes faisant profession d'acheter des
immeubles en vue de la revente, ou perte de ce bénéfice pour défaut de revente dans le
délai fixé à l'article 64 du CDE
f)
En cas de perte du bénéfice du droit de donation réduit pour les donations
d'entreprises
En Région Wallonne et en Région de Bruxelles-Capitale, le droit et les intérêts sont
liquidés sur la déclaration (art. 140octies du CDE), tandis qu'en Région flamande,
cette déclaration n'est pas assujettie à la formalité : c'est l'acte de donation qui demeure
le titre de perception (art.140quater du CDE R. Flam.).
C.2.
Formes de la déclaration
24.- La déclaration, signée par les parties contractantes ou par l'une d'elles, est faite en deux
exemplaires, dont l'un reste déposé au bureau de l'enregistrement.
Elle mentionne la nature et l'objet de la convention, la date de celle-ci ou celle du fait nouveau
qui a déterminé la débition du droit, la désignation des parties, la consistance des biens, la
base imposable et tous éléments nécessaires à la liquidation de l'impôt (art. 31, alinéa 2; art.
68, alinéas 2 et 3, et art. 140octies du CDE).
D.
Faculté d'enregistrer
25.- Les autres actes ou écrits ne doivent pas être enregistrés, mais il est toujours loisible
aux parties intéressées de les soumettre à la formalité.
Il importe d'observer que les actes non obligatoirement enregistrables ne sont pas
uniformément soumis au droit fixe général : il faut appliquer à chacun d'eux, eu égard à son
objet ou à sa nature, le droit prévu par le tarif.
17
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SECTION 2.
DELAIS POUR LA FORMALITE DE L’ENREGISTREMENT
A.
Principes
A.1.
En ce qui concerne les actes obligatoirement enregistrables du seul fait de leur
existence (art. 32 du CDE)
26.-
Les délais d'enregistrement suivants sont d'application :
a)
Actes des notaires : quinze jours
Toutefois, ce délai est fixé à quatre mois à partir du décès des testateurs ou donateurs,
pour les testaments, pour les donations y assimilées par l’article 141, 3° alinéa 2 du
CDE, pour leurs révocations, pour les attestations relatives aux testaments à forme
internationale et pour les actes constatant le dépôt d'un testament par le testateur.
b)
Actes des huissiers de justice autres que les protêts: quatre jours
c)
Arrêts et jugements des cours et tribunaux : dix jours.
d)
Actes (sous seing privé, administratifs ou passés à l'étranger) qui sont translatifs ou
déclaratifs de propriété ou d'usufruit d'immeubles situés en Belgique : quatre mois.
e)
Actes (sous seing privé, administratifs ou passés à l'étranger) portant bail, sous-bail ou
cession de bail d'immeubles situés en Belgique : quatre mois.
f)
Procès-verbaux de vente publique d'objets mobiliers corporels dressés par les autorités
administratives et agents de l'Etat, des provinces, des communes et des établissements
publics : un mois.
g)
Actes (sous seing privé, administratifs ou passés à l'étranger) contenant apport de
biens à des sociétés belges possédant la personnalité juridique : quatre mois.
Sous réserve du régime particulier prévu pour les testaments et les actes y assimilés, les délais
indiqués prennent cours à compter de la date des actes.
18
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A cet égard, si la signature des parties à un acte sous seing privé a été apposée à des dates
différentes, le délai ne prend cours qu'à la date de la dernière signature, puisque c'est à cette
date seulement que l'acte est devenu le titre parfait de la convention.
De même, lorsque le titre écrit sous seing privé est constitué par deux actes - un acte d'offre et
un acte d'acceptation -, c'est la date de l'acte d'acceptation qui constitue le point de départ du
délai.
A.2.
En ce qui concerne les déclarations prévues à l'article 31 du CDE (art. 33 du CDE)
27.- Le délai pour l'enregistrement des déclarations prévues à l'article 31 du CDE est fixé à
quatre mois (art. 33 du CDE) à dater de la convention ou du fait qui donne lieu à la
déclaration.
Toutefois, "en ce qui concerne les apports en numéraire à des sociétés coopératives, il est
satisfait aux prescriptions de l'article 31 par l'enregistrement, dans un délai de quatre mois à
compter de la date fixée dans les statuts pour l'établissement du bilan annuel, d'une copie de
ce bilan ou de tout autre document faisant apparaître le montant de l'augmentation, au cours
de l'année, du fonds social souscrit" (art. 34 du CDE).
A.3.
En ce qui concerne les actes obligatoirement enregistrables en raison de l'usage
qui en est fait (art. 26 et 29 du CDE)
28.- Aucun délai d'enregistrement n'est spécialement fixé pour les actes obligatoirement
enregistrables en raison de l'usage qui en est fait.
Sauf ce qui est prévu en faveur des notaires et des huissiers de justice à l'article 26, alinéa 2 du
CDE, ces actes doivent simplement être enregistrés avant d'être utilisés dans les conditions
qui entraînent l'obligation d'enregistrement.
On notera encore que des délais spécifiques sont prévus par les législations régionales en cas
de donations d’entreprises localisées dans chaque Région (art. 140octies du CDE pour la
Région Wallonne et la Région de Bruxelles-Capitale et art. 140quater du CDE pour la Région
flamande).
B.
Calcul des délais
29.-
Les délais fixés par jour se calculent de jour à jour.
Les délais fixés par mois se calculent de quantième à quantième, quel que soit le nombre de
jours des mois pendant lesquels le délai s'est écoulé.
19
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Le jour qui sert de point de départ au délai, le dies a quo (le plus souvent : le jour de l'acte),
n'est pas compté.
Le délai expire le dernier jour (le dies ad quem), à l'heure réglementaire de fermeture du
bureau au public. Les samedis, dimanches et jours fériés compris dans le délai doivent être
comptés. Mais si le dernier jour est un samedi, un dimanche ou un jour férié légal, le délai est
prorogé jusqu'au premier jour d'ouverture qui suit l'expiration du délai (art. 9, alinéa 2 du
CDE).
Lorsque les actes visés à l'article 19, 2°, 3° et 5° du CDE (essentiellement, les actes translatifs
ou déclaratifs, les baux et les apports) sont soumis à une condition suspensive, le délai ne
prend cours qu'à compter de l'accomplissement de la condition.
Les personnes qui n'ont pas fait enregistrer, dans les délais prescrits, les actes ou déclarations
qu'elles sont tenues de soumettre à la formalité encourent indivisiblement une amende égale
au montant des droits, sans qu'elle puisse être inférieure à 25,00 EUR (art. 41, 1° du CDE).
SECTION 3.
PERSONNES TENUES A L’ENREGISTREMENT
30.- En vertu de l'article 35, al. 1er du CDE, l'obligation de faire enregistrer les actes ou
déclarations et de payer les droits y afférents et éventuellement les amendes, dont l'exigibilité
résulte desdits actes ou déclarations, incombe :
- aux notaires et aux huissiers de justice, pour les actes de leur ministère ;
- aux notaires et huissiers de justice, pour les actes qui sont annexés à leurs propres
actes ou déposés en leurs mains, selon les prévisions de l'article 26 du CDE, sans avoir
été préalablement enregistrés ;
- aux autorités administratives et agents de l'Etat, des provinces, des communes et des
établissements publics, pour les actes dressés par eux ;
- aux parties contractantes, pour les actes sous seing privé ou passés en pays étranger
visés à l'article 19, 2°, 3°et 5° du CDE, et pour les déclarations prévues à l'article 31 du
CDE ;
- aux greffiers pour les arrêts et jugements des cours et tribunaux; les jugements et
arrêts sont immédiatement enregistrés en débet; les greffiers n'ont aucune obligation
quant au paiement des droits dus sur un jugement ou arrêt.
31.- Après l'accomplissement de la formalité de l'enregistrement, le receveur réclame, par
lettre recommandée à la poste, les droits et éventuellement les amendes dont l'exigibilité
résulte des arrêts et jugements, aux débiteurs légaux de ces droits et amendes.
20
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Ces débiteurs légaux sont :
a)
quant aux droits exigibles du chef d'une condamnation, liquidation ou collocation :
- les défendeurs, chacun dans la mesure de la condamnation, liquidation ou collocation
prononcée ou établie à sa charge et aux défendeurs solidairement en cas de
condamnation solidaire;
- les demandeurs dans la mesure de la condamnation, liquidation ou collocation
obtenue par chacun d'eux sans toutefois excéder la moitié des sommes ou valeurs que
chacun d'eux reçoit en paiement.
b)
quant aux droits et amendes s'appliquant à une convention translative ou déclarative de
propriété ou d'usufruit d'immeubles situés en Belgique : indivisiblement, les personnes
qui ont été parties à la convention.
Les droits et, le cas échéant, les amendes doivent être payés dans le délai d'un mois à compter
de l'envoi par lettre recommandée à la poste de l'avis de paiement par le receveur de
l'enregistrement. Le défaut de paiement dans le délai prescrit entraîne, pour les débiteurs
légaux des droits et éventuellement des amendes, l'exigibilité d'une amende égale au droit (art.
41, 3° du CDE).
Dans les cas visés aux articles 64 et 65 du CDE (concernant les "professionnels" ou
"marchands de biens"), 140quinquies, 140sexies et 140quater du CDE (concernant les
donations d'entreprises), l'obligation au dépôt d'une déclaration complétive incombe
respectivement à l'acquéreur ou à son représentant responsable (art. 68 du CDE) et au
donataire (art. 140octies du CDE et 140quater du CDE R. Flam.).
Enfin, pour ce qui concerne les actes non obligatoirement enregistrables, l'obligation de payer
les droits incombe à la personne qui requiert la formalité. Ceci vaut non seulement pour les
droits dus lors de l'enregistrement mais aussi, le cas échéant, pour les droits supplémentaires.
SECTION 4.
LIEU DE L'ENREGISTREMENT
32.-
Les actes et déclarations sont enregistrés :
a)
pour les actes des notaires et des huissiers de justice, autres que les protêts, au bureau
de l'enregistrement de leur résidence (art. 39, 1° du CDE);
b)
depuis le 1er janvier 1999, les protêts sont dispensés de la formalité, en application de
l’article 8bis du CDE Les droits sont payés par le dépositaire central au 8e bureau de
l’enregistrement de Bruxelles (bureau du siège du dépositaire central) ;
21
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c)
pour les arrêts et jugements des cours et tribunaux, au bureau dans le ressort duquel se
trouve le siège de la cour ou du tribunal (art. 39, 2° du CDE) ;
d)
pour les actes qui sont annexés ou déposés selon les prévisions de l'article 26 du CDE,
sans avoir été préalablement enregistrés, au bureau où doit être enregistré l'acte du
notaire ou de l'huissier de justice (art. 39, 3° du CDE) ;
e)
pour les actes des autorités administratives et agents de l'Etat, des provinces, des
communes et des établissements publics, au bureau dans le ressort duquel se trouve
leur siège ou le siège de leurs fonctions (art. 39, 4° du CDE) ;
f)
pour les actes sous seing privé ou passés en pays étranger et les déclarations portant
sur des immeubles situés en Belgique et qui sont visés à l'article 19, 2° et 3°, et à
l'article 31, 1°et 3°du CDE, au bureau dans le ressort duquel les biens sont situés; si les
biens sont situés dans le ressort de plusieurs bureaux, les actes et déclarations peuvent
être enregistrés indifféremment dans l'un ou l'autre de ces bureaux (art. 39, 5° du
CDE).
SECTION 5.
A.
CONSEQUENCES DE L’ENREGISTREMENT
Effets civils
33.- L'enregistrement est l'un des moyens prévus à l'article 1328 du Code civil pour donner
date certaine aux actes sous seing privé.
Un deuxième effet civil concerne le gage. Suivant l'art. 2074 du Code civil, dans les affaires
dont la valeur excède 375,00 EUR, le gage n'est en principe pas opposable aux tiers s'il ne
résulte pas d'un acte authentique ou d'un acte sous seing privé enregistré.
Il reste que l'enregistrement n'exerce aucune influence sur la validité des actes, ni sur leur
force probante :
- un acte non enregistré n’est pas nul au seul motif qu’il n’a pas été enregistré ;
- un acte nul reste nul, nonobstant son enregistrement (par exemple, la donation d'un
immeuble par acte sous seing privé) ;
- la formalité n’est pas requise pour que la demande soit recevable.
22
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B.
Documentation
34.- Grâce à l'enregistrement des actes et aux déclarations qui sont déposées pour la
perception des droits de succession, l'Administration s'est constituée une documentation qui a
principalement pour objet de permettre le contrôle de la perception des impôts.
Cette documentation n'est pas à la disposition du public.
C.
Cadastre
35.- En principe, les changements de propriétaires ne sont opérés dans les documents du
cadastre que sur base des relevés fournis par les receveurs de l'enregistrement au vu des actes
enregistrés et des déclarations de succession.
Les indications cadastrales ne constituent pas une preuve de propriété. Toutefois, s'il n'existe
pas de titre apparent, ces indications peuvent être invoquées par les parties comme une
présomption, surtout lorsqu'elles en corroborent d'autres (telles, le paiement du précompte
immobilier, des actes d'entretien et de réparation,…).
*
*
*
23
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CHAPITRE III.
REGLES GENERALES DE PERCEPTION
SECTION 1.
PRESENTATION GENERALE
36.- Il y a plusieurs catégories de droits d'enregistrement : les droits proportionnels, les
droits fixes spécifiques et le droit fixe général (25,00 EUR).
La perception de chacun de ces droits obéit à des règles particulières qui concernent
principalement la question de la tarification (opérations imposées, taux du droit, base
imposable, …).
Ces règles particulières sont toutefois dominées par des principes fondamentaux (des règles
générales de perception) que l'on peut résumer comme suit :
a)
L'exigibilité du droit proportionnel ou du droit fixe spécifique suppose normalement
l'existence d'un acte (d'un écrit) formant titre de l'opération tarifée.
b)
Une même opération juridique ne peut donner lieu qu'une seule fois à la perception du
droit proportionnel ou fixe spécifique (règle non bis in idem - art. 12 et 13 du CDE).
c)
Lorsqu'un même acte contient plusieurs dispositions indépendantes, il est dû pour
chacune d'elles et selon sa nature un droit particulier; s'il s'agit, au contraire, de
dispositions dépendantes, il n'est dû qu'un droit pour l'ensemble, qui est perçu d'après
la disposition qui donne lieu au droit le plus élevé (art. 14 et 15 du CDE).
d)
Les modalités de l'opération juridique n'influencent pas la perception du droit
d'enregistrement, sauf quand il s'agit d'une condition suspensive affectant une
convention soumise au droit proportionnel (art. 16 et 17 du CDE).
e)
Le fisc est un tiers pour la perception des droits d'enregistrement (art. 18, § 1 du CDE).
SECTION 2.
A.
EXIGENCE D’UN ACTE FAISANT TITRE
Principes
37.- L'exigibilité du droit proportionnel est subordonnée, en principe, à l'existence d'un acte
- d'un écrit - formant preuve, entre parties, de l'acte juridique tarifé.
Ainsi, le droit d'enregistrement n'est pas dû sur un bail d'immeuble conclu verbalement (c'està-dire sans qu'aucun écrit ne soit dressé entre le bailleur et le locataire). Il n'est pas dû non
plus sur les dons manuels, dont l'existence n'est pas constatée par écrit.
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Il ne faut pas faire de distinction entre les actes sous seing privé et les actes authentiques.
38.- Deux conditions sont indispensables pour qu'un écrit puisse être considéré comme
formant titre. Il faut que :
a)
l'acte affirme l'existence d'une convention ou d'une opération juridique parfaite;
b)
il contienne tous les consentements requis, c’est-à-dire qu’il porte la signature de
toutes les parties à l’acte. Quand l'une des parties à l'acte est régulièrement représentée
par un mandataire conventionnel ou légal, il va de soi que la signature de ce
mandataire suffit : l'acte a la même valeur que s'il avait été signé par le mandant luimême.
39.- L'administration n'est pas juge de la validité des actes et conventions. Les
imperfections du titre ne font pas obstacle à la perception des droits.
Il s'ensuit que, dès l'instant où un acte forme titre d'une opération juridique tarifée, cet acte
donne lieu à la perception du droit proportionnel, sans qu'il faille se préoccuper des causes de
nullité absolue ou relative dont il pourrait être entaché.
Ce qui précède doit toutefois s'entendre sous la double réserve suivante :
a)
l'administration admet que si, avant la perception, les parties apportent la preuve que
leur convention a été annulée amiablement et que la nullité résultait d'un fait dont
l'existence ne peut être contestée, la réclamation du droit (dû pour la convention
annulée) doit être abandonnée, comme par exemple, en cas de vente du bien d'autrui ;
b)
l'article 209, 2° du CDE prévoit la restitution "des droits proportionnels perçus soit du
chef d'un acte qui a été déclaré faux, soit du chef d'une convention mise à néant pour
cause de nullité, par un jugement ou arrêt passé en force de chose jugée".
B.
Exceptions
40.- La règle énoncée ci-avant (nécessité d'un acte faisant titre) souffre trois exceptions, qui
concernent respectivement :
a)
les conventions translatives ou déclaratives de propriété ou d'usufruit d'immeubles
situés en Belgique (art. 31, 1° et 3° du CDE) : les conventions de ce genre donnent
obligatoirement lieu à la perception du droit d'enregistrement, même quand elles ne
sont pas constatées par écrit ; elles doivent, dans ce cas, faire l'objet d'une déclaration
signée par l'une des parties au moins (art. 31 du CDE) ;
25
Luc HERVE - Séminaire Stagiaires IPCF - Droits d'enregistrement et de succession
b)
les apports de biens à des sociétés belges, possédant la personnalité juridique (art. 31,
1°bis du CDE) ;
c)
les ventes publiques de biens meubles corporels (art. 226 à 235 du CDE) sont
soumises au droit proportionnel par le seul fait de l'adjudication publique d'un objet.
SECTION 3.
A.
NON BIS IN IDEM
Principe
41.- En vertu de la règle non bis in idem, un même fait générateur de l'impôt ne peut
donner plusieurs fois ouverture au même impôt. En droit fiscal, le principe non bis in idem
n'est formulé dans aucun texte constitutionnel ou légal, en termes généraux. La doctrine le
considère, en réalité, comme une ligne directrice pour le législateur, inspirée par l'équité.
Les articles 12 et 13 du CDE établissent cette règle en matière de droit d'enregistrement :
a)
article 12 du CDE : "Le droit proportionnel ou fixe spécifique n'est perçu qu'une seule
fois sur un acte juridique, quel que soit le nombre des écrits qui le constatent."
b)
article 13 du CDE: "Ne donnent lieu qu'au droit fixe général, à moins qu'ils ne
renferment une addition ou une modification de nature à entraîner la perception d'un
droit nouveau ou complémentaire :
- tout écrit nouveau dressé pour constater un acte juridique qui a déjà subi le droit
proportionnel ou fixe spécifique;
- tout écrit contenant la ratification, la confirmation, l'exécution, le complément ou la
consommation d'actes antérieurs enregistrés, s'il ne constate pas des actes juridiques
nouveaux assujettis comme tels à un droit proportionnel ou fixe spécifique.
Ne donnent également lieu qu'au droit fixe général, les actes juridiques refaits pour
cause de nullité, résolution ou autre motif, sans aucun changement qui ajoute aux
objets des conventions ou à leur valeur, à moins que le droit proportionnel perçu sur
le premier acte n'ait été restitué ou ne soit sujet à restitution".
B.
Champ d’application
42.- Le champ d'application de la règle non bis in idem est strictement délimité et dépend
de deux conditions essentielles :
- d'une part, existence de l'un des trois cas énumérés ci-après ;
- d'autre part, perception du droit proportionnel ou du droit fixe spécifique.
26
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B.1.
Existence de l'un des trois cas énumérés ci-après
a)
Une même opération juridique constatée, purement et simplement, à titre principal ou
de manière incidente, dans plusieurs écrits distincts
43.- Ainsi, quand une même opération juridique est constatée dans plusieurs actes
instrumentaires, présentés successivement à la formalité, le droit proportionnel ou le droit fixe
spécifique n'est perçu que sur le premier de ces écrits : chacun des autres est enregistré contre
paiement du droit fixe général.
Si, dans l'ignorance de la perception déjà faite sur l'acte primitif, le receveur perçoit à nouveau
l'impôt sur le second acte, il y a lieu à restitution (art. 209, 1° du CDE). Inversement, si lors de
la présentation du premier acte, le receveur a omis de réclamer le droit proportionnel dû, il
peut encore le percevoir lors de la présentation du second acte, pour autant qu'alors la
prescription ne soit pas encore acquise.
b)
Une opération juridique complémentaire à une opération déjà imposée
44.- L'hypothèse envisagée est celle de la ratification, de la confirmation, de l'exécution, du
complément, de la consommation ou de la rectification matérielle d'un acte juridique
antérieurement enregistré.
En principe, l'écrit constatant une opération de ce genre donne seulement lieu à la perception
du droit fixe général.
Par exception, le droit proportionnel est toutefois dû :
- quand l'acte complémentaire ajoute à l'objet de la convention initiale ou à sa valeur
(droit proportionnel dû sur le supplément d'objet ou de valeur);
- quand l'acte complémentaire constitue une opération assujettie comme telle à un droit
proportionnel (ceci concerne plus particulièrement la constitution d'hypothèque).
c)
Une opération juridique refaite pour cause de nullité, résolution ou autre motif
45.- La nouvelle opération ne sera soumise qu’au droit fixe général, à condition toutefois
que :
- la nouvelle opération soit de même nature que l'opération originaire, porte sur les
mêmes biens et concerne les mêmes parties;
- l'opération originaire ait subi le droit proportionnel ou fixe spécifique à elle propre;
- l'opération originaire ait subi à juste titre l'impôt qui lui est propre ;
- le droit perçu sur l'opération originaire n’ait pas été restitué et ne soit pas restituable;
- la nouvelle opération n’apporte à l'opération originaire aucune modification
conventionnelle qui justifierait la perception d'un droit nouveau ou complémentaire,
comme par exemple, quand la base imposable primitive augmente, ou que la propriété
apparente des biens telle qu'elle résulte de l'acte primitif est modifiée.
27
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B.2.
Perception du droit proportionnel ou du droit fixe spécifique
46.-
La règle non bis in idem est étrangère au droit fixe général.
Ainsi, en cas de présentation à la formalité des dix exemplaires d'une même procuration sous
seing privé, le droit fixe général est en principe perçu dix fois.
SECTION 4.
DISPOSITIONS DEPENDANTES ET INDEPENDANTES
47.- Il arrive assez fréquemment qu'un même acte contienne plusieurs dispositions : une
vente et une procuration, une vente et une quittance, un prêt et une constitution d'hypothèque,
une donation et une stipulation pour autrui, …
Dans ce cas, la perception doit se régler d'après les distinctions suivantes.
A.
Dispositions dépendantes
48.- Il n'est alors dû qu'un seul droit pour l'ensemble, droit qui est perçu d'après la
disposition donnant lieu à l'impôt le plus élevé (article 14 du CDE).
B.
Dispositions indépendantes
49.- S'il s'agit de dispositions indépendantes, chacune d'elles donne lieu, en principe, à la
perception du droit qui lui est propre (article 15, alinéa 1er du CDE).
Toutefois, la règle qui précède ne s'applique pas au droit fixe général (article 15, alinéa 2 du
CDE). Il s'ensuit que :
- le droit fixe général ne peut être perçu qu'une seule fois sur un même acte;
- le droit fixe général ne peut jamais être perçu, sur un même acte, à côté du droit
proportionnel ou du droit fixe spécifique.
C.
Critères de distinction
50.- La question de savoir si les diverses dispositions contenues dans un même acte sont
dépendantes ou indépendantes, doit être résolue sur le terrain du droit, sur base de critères
juridiques objectifs et abstraits, sans qu'il faille s'arrêter au lien de fait que les parties ont
établi entre leurs opérations juridiques.
Les règles suivantes permettent de résoudre la plupart des difficultés :
28
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a)
Des dispositions ne peuvent être dépendantes que si elles concernent rigoureusement
les mêmes parties. Celles qui mettent en cause des parties différentes sont
nécessairement indépendantes.
b)
Sont dépendantes les dispositions qui sont intervenues entre les mêmes parties et qui
forment la cause l'une de l'autre. Les dispositions qui n'ont pas de rapport juridique
l'une avec l'autre sont nécessairement indépendantes.
51.-
Exemples :
a)
Un bailleur donne en location un bureau à un preneur qui, pour garantir le paiement
des loyers, constitue une hypothèque au profit du bailleur.
Il s’agit de dispositions dépendantes : un seul droit proportionnel sera donc dû (le droit de bail
ou le droit de constitution d'hypothèque, selon le cas).
Si, par contre, l'hypothèque était constituée par une autre personne que le locataire, bail et
constitution d'hypothèque apparaîtraient comme des dispositions indépendantes : il faudrait
percevoir le droit de bail et le droit de constitution d'hypothèque.
b)
Un seul acte fait titre d’une vente d'immeuble consentie par X à Y et d'un don manuel
fait par Z à Y.
Cet acte contient des dispositions indépendantes : il est dû le droit de vente et le droit de
donation.
SECTION 5.
A.
MODALITES DE L'OPERATION JURIDIQUE
Notions de droit civil
52.- Le "terme" est un événement futur et certain qui soit retarde l’exigibilité ("terme
suspensif") soit suspend l’extinction ("terme extinctif") de l’obligation sur laquelle il porte.
La "condition" est un événement futur et incertain dont dépend la naissance ou l’extinction
d’un droit ou d’une obligation. On distingue ainsi :
- la "condition suspensive", de la réalisation de laquelle dépend la naissance du droit
ou de l’obligation, et,
- la "condition résolutoire", dont la réalisation entraîne l’extinction du droit ou de
l’obligation.
29
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B.
Principe : les modalités assortissant l’opération juridique n’ont en principe pas
d’influence sur la perception des droits d’enregistrement
53.- Ainsi, le terme stipulé pour l'exécution des obligations résultant d'une convention
n'empêche pas l'exigibilité immédiate du droit auquel cette convention est tarifée. Peu importe
qu'il s'agisse d'un terme extinctif ou d'un terme suspensif.
Il en est de même en ce qui concerne la condition résolutoire.
Par ailleurs, l'accomplissement de la condition résolutoire n'autorise normalement pas la
restitution du droit perçu lors de l'enregistrement de la convention résolue.
La règle qui précède reçoit toutefois une exception prévue à l'article 209, 3° du CDE. Cette
disposition autorise la restitution, sous déduction du droit fixe général, "des droits
proportionnels perçus du chef d'une convention dont la résolution ou la révocation a été
prononcée par un jugement ou un arrêt passé en force de chose jugée, à condition qu'il
résulte de la décision que la convention n'est pas antérieure de plus d'un an à une demande
en résolution ou en révocation, même si elle a été introduite devant un juge incompétent".
54.- Une autre question, importante, est celle de savoir si la résolution du contrat autorise la
perception d'un droit de rétrocession.
Ainsi, si X a vendu ou donné un immeuble à Y et que le contrat vient à être résolu,
l'immeuble réintégrant le patrimoine de X, un nouveau droit proportionnel doit-il être perçu à
cette occasion ?
La réponse est négative, si la résolution opère de plein droit (arrivée d'une condition
résolutoire légale ou d'une condition résolutoire casuelle ou potestative, expressément
convenue) ou si elle est prononcée par le juge.
Par contre, le droit proportionnel est dû quand il s'agit d'une résolution ou d'une révocation
constatée à l'amiable pour cause d'inexécution des obligations résultant du contrat.
C.
Exception au principe : condition suspensive et droit proportionnel
C.1.
Champ d'application
55.-
L'article 16 du CDE stipule que :
"L'acte juridique tarifé au droit proportionnel, mais soumis à une condition suspensive, ne
donne lieu qu'au droit fixe général aussi longtemps que la condition n'est pas accomplie.
30
Luc HERVE - Séminaire Stagiaires IPCF - Droits d'enregistrement et de succession
Lorsque la condition se réalise, le droit auquel l'acte est tarifé est dû, sauf imputation du droit
déjà perçu. Il est calculé d'après le tarif en vigueur à la date où il eût été acquis à l'Etat si
ledit acte avait été pur et simple et sur la base imposable déterminée par le présent code,
considérée à la date de l'accomplissement de la condition".
L'application de l'article 16 du CDE requiert la réunion de deux conditions. Il faut :
a)
qu'il s'agisse d'une opération juridique tarifée au droit proportionnel (vente d'un
immeuble situé en Belgique, bail d'un bureau situé en Belgique, donation, etc.) ;
b)
que cette opération juridique soit entièrement soumise à une condition suspensive, ou
du moins que ses éléments principaux (ceux qui justifient la perception du droit
proportionnel normalement dû) soient affectés d'une telle condition; par exemple, en
cas de vente d'immeuble, l'article 16 du CDE est applicable, si la condition suspensive
affecte, soit toutes les obligations nées du contrat (l'obligation de transférer la
propriété de l'immeuble vendu comme celle de payer le prix), soit tout au moins
l'obligation de transférer la propriété de l'immeuble vendu; mais cette disposition doit
être écartée, si la condition suspensive affecte uniquement l'obligation de payer le prix.
C.2.
Mécanisme
56.- L'application de l'article 16 du CDE s'opère en deux phases bien distinctes. Dans la
première phase, la condition est pendante, c.-à-d. non encore réalisée et la perception est
provisoire; dans la seconde, la condition est réalisée et la perception se règle définitivement.
Lorsque la perception des droits se règle définitivement, les règles suivantes sont
d’application.
a)
Le droit dû est calculé selon le tarif en vigueur à la date où il eût été acquis à l'Etat, si
l'acte avait été pur et simple à l'origine.
Il faut donc se placer à la date de l'acte, lorsqu'il s'agit d'un acte authentique ou d'un acte sous
seing privé constatant, soit une convention translative ou déclarative de propriété ou d'usufruit
d'immeubles situés en Belgique, soit un bail de pareils immeubles, soit un apport à une société
belge, dotée de la personnalité juridique).
b)
La base imposable est considérée à la date de l'accomplissement de la condition. En
cas de vente d'un immeuble situé en Belgique, la base est donc constituée par le prix et les
charges, avec au minimum la valeur vénale du bien au jour de la réalisation de la condition.
En cas de donation, l'impôt est calculé sur la valeur des biens au jour de l'accomplissement de
la condition.
Pour déterminer la base imposable, il faut se placer à la date de réalisation de la condition, eu
égard non seulement aux éléments factuels, mais aussi à la législation applicable.
31
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c)
Le cas échéant, le droit perçu provisoirement est imputé sur le droit dû en définitive.
C.3.
Exceptions
57.- Les principes qui viennent d'être exposés reçoivent des exceptions dans les cas
suivants :
a)
Le droit de condamnation (3 %) est dû pour toute condamnation ou liquidation de
sommes et valeurs mobilières, sans distinguer selon que la condamnation ou
liquidation est définitive, principale, subsidiaire ou conditionnelle (art. 142 du CDE).
b)
En cas de vente publique de biens meubles corporels, le droit proportionnel est dû
immédiatement (en principe, 5 %), même si l'adjudication est faite sous condition
suspensive.
c)
Suivant l'article 89 du CDE, les droits établis (1 % ou 0,5 %) pour les constitutions
d'hypothèque, de gage sur fonds de commerce ou de privilège agricole, sont
applicables même lorsque l'hypothèque, le gage ou le privilège sont constitués pour
sûreté d'une dette future, d'une dette conditionnelle ou d'une dette éventuelle.
d)
Le droit proportionnel dû pour les donations de biens présents, faites aux futurs époux
(normalement par contrat de mariage) et subordonnées à la célébration du mariage, ne
pourrait être exigé, à s'en tenir strictement aux principes, qu'après l'accomplissement
de cette condition. En pratique toutefois, le droit de donation se perçoit
immédiatement dans ce cas (sauf à restituer, pour cause de perception indue, si le
mariage n'avait pas lieu, et sauf à rectifier la perception si la base imposable venait à
se modifier au moment du mariage).
SECTION 6.
A.
LE FISC EST UN TIERS POUR LA PERCEPTION DES DROITS
D'ENREGISTREMENT
Principes
58.- Pour la perception des droits d'enregistrement, l'Etat doit être considéré comme un
tiers au regard des actes ou déclarations que les contribuables lui présentent.
B.
Conséquences
59.-
Le principe du fisc tiers a notamment pour conséquences :
32
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a)
La date des actes sous seing privé en général ou des conventions assujetties
obligatoirement à l'enregistrement par le seul fait de leur existence n'est opposable à
l'administration que dans la mesure où elle est opposable aux tiers (article 18, § 1er,
du CDE)
Les dispositions de l'article 18, § 1er du CDE permettent à l'administration de contester la date
des actes sous seing privé, de même que celle des conventions conclues sans écrit, dans tous
les cas où le montant des sommes dues à titre de droit ou d'amende serait diminué s'il fallait
s'en tenir à la date (non certaine) que les parties attribuent à leur acte ou à leur convention.
La date de l'acte sous seing privé ou de la convention verbale peut être rendue certaine à
l'égard de l'administration par tous moyens de droit, témoignages et présomptions compris,
mais à l'exception du serment. De simples allégations ou des documents émanant des parties
elles-mêmes ne suffisent évidemment pas pour prouver la date.
b)
L'administration n'est pas liée par la qualification donnée par les parties à la
convention constatée dans l'écrit présenté à la formalité (l'administration peut rectifier
la fausse qualification de l'acte)
Le droit d'enregistrement s'attache moins à ce que les parties ont déclaré faire qu'à ce qu'elles
ont fait en réalité, eu égard à l'ensemble des stipulations de leur acte et aux principes de droit
applicables.
La fausse qualification donnée par les parties à leur acte ne saurait donc empêcher la
perception de l'impôt dû d'après le véritable caractère de la convention actée. L'administration
a même le devoir de rectifier, sur base des données de l'acte, la qualification donnée par les
parties à leur opération.
Enfin, lors de la requalification, il faut tenir compte de toutes les conséquences juridiques et
économiques de l'opération, à l'exception des conséquences fiscales.
La requalification n'est possible que si, pour une opération déterminée, les parties avaient le
choix entre plusieurs qualifications (voir également disposition anti-abus contenue à l'article
18, § 2 du CDE). Exemple : est soumis au droit de vente, l'acte qualifié bail, alors qu'il est
convenu que le locataire deviendra propriétaire du bien à la fin du prétendu bail sans avoir
rien d'autre à payer que les soi-disant loyers.
c)
La simulation ou la dissimulation dont l'acte présenté à la formalité serait entaché, ne
peuvent empêcher la réclamation de l'impôt légalement dû d'après la convention
réellement conclue entre les parties (articles 203 et 204 du CDE)
Il faut soigneusement éviter de confondre fausse qualification et simulation. Celle-ci suppose
le mensonge : la convention constatée dans l'acte n'est pas vraiment celle qui a été conclue
33
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entre les parties, tandis que la fausse qualification suppose une convention sincèrement
constatée dans l'acte présenté à la formalité, mais mal qualifiée par les parties.
La simulation est frappée d'amende. Par contre, la fausse qualification n'est sanctionnée par
aucune peine.
d)
Les contre-lettres ne sont pas opposables à l'administration, quand elles auraient pour
effet de diminuer le montant de l'impôt exigible d'après les actes ostensibles
(application principale : théorie de la mutation apparente)
L'administration est fondée à considérer que la propriété immobilière est fixée par les actes
ostensibles des parties, c'est-à-dire par les actes enregistrés ou obligatoirement enregistrables.
Il s'ensuit que tout acte qui apporte un changement à la propriété des immeubles, telle que
cette propriété résulte des actes ostensibles, doit fiscalement être considéré comme un acte
translatif ou déclaratif et, partant, comme un acte passible du droit proportionnel - même s'il
n'a nullement ce caractère dans les rapports des parties entre elles, eu égard à une convention
secrète antérieurement conclue.
Exemple : Un acte notarié constate la vente d'un immeuble par X à Y. Dans un acte ultérieur,
X et Y reconnaissent que la vente était fictive et que, partant, le bien apparemment vendu n'a
jamais cessé d'être la propriété de X. Le droit de mutation à titre onéreux (article 44 du CDE)
est dû sur ce deuxième acte.
C.
Mesure anti-abus de droit
60.- L’article 18 du CDE a été complété, pour toutes les opérations effectuées à partir du
1er juillet 1995, d’une mesure anti-abus de droit qui rend la qualification donnée par les parties
inopposable à l’administration (article 18, § 2 du CDE). Elle vise à combattre les
constructions juridiques imaginées par les parties dans le seul but d'éviter ou de diminuer
l'impôt, dans les cas où il existe diverses possibilités d'effectuer l'opération.
Cette disposition donne à l'administration un moyen supplémentaire de requalification, à côté
de celui dont elle disposait déjà auparavant, qui lui permet de rectifier une fausse
qualification, et des possibilités de prouver une simulation ou d'invoquer des dispositions de
la législation fiscale établissant des fictions ou des présomptions légales.
La mesure anti-abus de droit n'est pas applicable dans la sphère privée et elle implique la
réunion des conditions suivantes :
a)
b)
c)
il doit exister un ou plusieurs actes au sens du droit civil;
l'opération doit être susceptible d'une autre qualification;
en qualifiant l'opération, les parties doivent avoir exclusivement visé l'évitement de
l'impôt.
34
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CHAPITRE IV.
CATEGORIES DE DROITS D’ENREGISTREMENT
SECTION 1.
ENUMERATION
61.-
Il y a plusieurs catégories de droits d'enregistrement (article 10 du CDE) :
a)
b)
c)
les droits proportionnels ;
les droits fixes spécifiques ;
le droit fixe général.
Les droits proportionnels et les droits fixes spécifiques sont perçus suivant le tarif établi par le
Code (article 11, alinéa 1er du CDE).
Le droit fixe général est applicable à tous les actes et écrits non prévus dans ce tarif (article
11, alinéa 2 du CDE).
SECTION 2.
62.-
DROITS PROPORTIONNELS
Sont proportionnels, tous les droits qui s’établissent sur la base d’un pourcentage.
Ces droits se perçoivent exclusivement sur les opérations suivantes :
a)
les transmissions à titre onéreux de biens immeubles situés en Belgique (en principe :
12,50 % sur base de la valeur conventionnelle des biens en Région wallonne et en Région de
Bruxelles-Capitale; 10 % en Région flamande - articles 44 à 75 du CDE) ;
b)
les ventes publiques de biens meubles corporels (en principe : 5 % sur base du prix et
des charges - articles 77 à 80 du CDE);
c)
les baux, sous-baux et cessions de baux de biens immeubles situés en Belgique, à
l'exception des actes visés à l'article 19, 3°, a du CDE (résidence principale – enregistrement
gratuit en vertu de l'article 161, 12 ° du CDE) et les contrats constitutifs d'un droit
d'emphytéose ou de superficie ainsi que les contrats de cession de tels droits (en principe :
0,20 % sur base du montant cumulé des loyers et des charges imposées au preneur pour toute
la durée du bail - articles 83 et 84 du CDE);
d)
les constitutions d'hypothèque, de gage sur fonds de commerce ou de privilège
agricole (1 % ou 0,50 %, selon le cas, sur base des sommes garanties - articles 87 à 93 du
CDE);
35
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e)
les partages de biens immeubles situés en Belgique, les cessions à titre onéreux, entre
copropriétaires, de parts indivises dans de tels biens ainsi que "la conversion d'usufruit prévue
aux articles 745quater et 745quinquies du Code civil, même s'il n'y a pas indivision" (en
principe : 1 % sur base de la valeur conventionnelle des biens - articles 109 à 114 du CDE);
f)
les apports de biens à des sociétés belges et les augmentations du capital statutaire,
sans apport nouveau, de pareilles sociétés (droit réduit à 0 %, sauf pour les apports de biens
immeubles affectés ou destinés totalement ou partiellement à l'habitation et apportés par une
personne physique) ;
g)
les donations de biens présents (tarif progressif - articles 131 à 140 du CDE), les
donations de valeurs mobilières (taux spécifiques selon la Région) et les donations
d'entreprises (taux spécifiques selon la Région) ;
h)
les décisions judiciaires portant condamnation, liquidation ou collocation de sommes
et valeurs mobilières (3 %, sur le montant de la condamnation, de la liquidation ou de la
collocation - articles 142 à 145 du CDE), et les jugements et arrêts faisant titre d'une
convention translative ou déclarative de propriété ou d'usufruit d'immeubles situés en
Belgique, qui n'a pas subi l'impôt y afférent (le droit est perçu suivant le tarif applicable en
matière d'immeubles - articles 146 et 147 du CDE).
A.
Transmission à titre onéreux de bien immeubles
A.1.
Opération imposable
63.- Le droit de vente s'applique aux conventions translatives à titre onéreux de propriété
ou d'usufruit de biens immeubles situés en Belgique (articles 44 et 159, 7°, du CDE).
Il faut donc :
a)
une convention (ce qui exclut les opérations procédant de la loi seule) : peu importe
qu'il s'agisse d'une convention écrite ou verbale ;
b)
une convention translative à titre onéreux (une vente, un échange, une dation en
paiement,…bref une convention ayant pour effet de faire passer juridiquement un droit
réel d'une tête sur une autre, et ce moyennant une contrepartie) ; il importe d'observer
que les partages et autres conventions "déclaratives" de droits réels échappent au droit
de vente ;
c)
un transfert de propriété ou d'usufruit de biens immeubles ;
d)
des immeubles situés en Belgique : les conventions, autres que les apports en société
soumis au droit visé à l'article 115bis du CDE - ayant pour objet des immeubles situés
en pays étranger, ne peuvent donner lieu qu'à la perception du droit fixe général article 159, 7° du CDE.
36
Luc HERVE - Séminaire Stagiaires IPCF - Droits d'enregistrement et de succession
A.2.
Base imposable : principes
64.- Le droit de vente se perçoit sur la valeur conventionnelle des immeubles transmis
(article 45 du CDE).
Toutefois, la base imposable ne peut, en aucun cas, être inférieure à la valeur vénale de ces
immeubles (article 46 du CDE).
En d'autres termes :
- la valeur conventionnelle des immeubles transmis est la seule base d'imposition à
retenir, chaque fois qu'elle est égale ou supérieure à la valeur vénale des biens
(exemple : vente pour 50.000 EUR, d'un immeuble dont la valeur vénale est de 30.000
EUR : le droit de vente est calculé sur 50.000 EUR);
- la valeur vénale des immeubles transmis constitue la base d'imposition, mais
seulement lorsqu'elle est supérieure à la valeur conventionnelle des biens (exemple :
vente pour 10.000 EUR d'un immeuble dont la valeur vénale est de 30.000 EUR : le
droit de vente est calculé sur 30.000 EUR).
Quand il s'agit d'une convention portant sur un usufruit ou une nue-propriété, la valeur vénale
est déterminée de manière forfaitaire (articles 47 à 50 du CDE). Même dans ce cas, la valeur
vénale reste une base d'imposition secondaire, qu'il ne faut retenir que si elle est supérieure à
la valeur conventionnelle.
A.3.
Base d'imposition principale : la valeur conventionnelle des immeubles
65.- La valeur conventionnelle de l'immeuble faisant l'objet d'une cession ou d'une
transmission à titre onéreux est la valeur que les parties ont retenue pour déterminer la
prestation à exécuter par le cessionnaire (ou acquéreur), au profit du cédant (ou aliénateur), en
contrepartie du transfert de l'immeuble.
A.3.1. Vente
66.- En cas de vente, la valeur conventionnelle de l'immeuble vendu est égale au montant
du prix stipulé, augmenté le cas échéant des charges imposées par le vendeur à l'acheteur
(article 45, alinéa 2, du CDE).
a)
Le prix est la somme d'argent que l'acheteur paie ou s'oblige à payer au vendeur en
contrepartie de l'immeuble vendu. Peu importe la manière dont cette somme d'argent a été
fixée, ou la qualification qu'il a plu aux parties de lui donner.
Ainsi, faut-il comprendre dans la base imposable au droit de vente, en tant qu'élément
composant le prix, ce que l'acheteur d'un immeuble verse au vendeur, soi-disant :
37
Luc HERVE - Séminaire Stagiaires IPCF - Droits d'enregistrement et de succession
-
-
à titre de valeur de convenance;
comme remboursement de frais exposés antérieurement par le vendeur (exemples :
travaux effectués à l'immeuble vendu, frais d'un acte de base relatif à cet immeuble,
impôts payés par le vendeur pour la période antérieure à l'entrée en jouissance de
l'acheteur, frais de voirie,…);
pour frais de remploi;
comme indemnité de dépréciation du surplus de la propriété du vendeur;
à titre d'indemnité pour le fait que le bien est libre d'occupation;…
b)
Outre le prix, la base imposable comprend les charges, c’est-à-dire les obligations
accessoires que le contrat de vente impose à l’acquéreur et qui bénéficient directement au
vendeur.
Pour qu'il y ait charge à ajouter au prix, il faut - mais il suffit - que les conditions suivantes
soient réunies :
une obligation pour l'acheteur (autrement dit, une créance du vendeur contre
l'acheteur), ce qui exclut toute idée de charge notamment quand le vendeur se réserve
un droit réel sur le bien vendu ;
une obligation imposée à l'acheteur par le contrat de vente (c'est-à-dire une obligation
que l'acheteur n'aurait pas, si elle n'avait pas été stipulée dans le contrat de vente); n'est
donc pas constitutive d'une charge, la clause du contrat de vente qui se borne à
rappeler les obligations légales de l'acheteur ;
une obligation qui s'ajoute à celle de payer le prix (il n'y a donc pas de charge à ajouter
au prix, quand il est entendu que la valeur de l'obligation accessoire imposée à
l'acheteur viendra en déduction du prix) ;
un préjudice pour l'acheteur et, corrélativement, un profit direct ou indirect pour le
vendeur (la stipulation faite tant dans l'intérêt de l'acheteur que dans celui du vendeur
ne saurait donc être regardée comme une charge; il en va de même pour la stipulation
qui profite au vendeur sans causer aucune espèce de préjudice à l'acheteur).
c)
Par contre, il arrive qu'à côté de ses obligations légales (transférer l'immeuble vendu à
l'acheteur, garantir celui-ci contre l'éviction et les vices cachés du bien vendu), le vendeur
s'engage, dans le contrat de vente, à procurer à l'acheteur un avantage quelconque, soit en
renonçant à exercer tous ses droits contre lui (avantage "négatif"), soit en promettant de faire
quelque chose pour lui (avantage "positif").
Dans ce cas, pour calculer la base imposable, il faudra déduire du prix les avantages procurés
par le vendeur à l’acheteur.
Exemple : le vendeur prend à sa charge tout ou partie des frais de l'acte de vente (frais qui
incombent légalement à l'acheteur). La valeur de l'avantage ainsi procuré à l'acheteur doit être
déduite du prix.
d)
On sera également attentif aux particularités suivantes, dont certaines ont déjà été
évoquées ci-avant :
38
Luc HERVE - Séminaire Stagiaires IPCF - Droits d'enregistrement et de succession
-
Si, dans le cas de la vente d'un immeuble pour un prix déterminé, l’acheteur s’engage,
lorsque telle condition se réalise, à payer un supplément de prix ou à effectuer une
prestation complémentaire au profit du vendeur, la valeur au jour du contrat de
l'obligation conditionnelle ou éventuelle doit être ajoutée au prix pour la perception du
droit d’enregistrement. Par contre, la réduction du prix prévue pour le cas où tel
événement se produirait, n'exerce aucune influence sur la perception du droit de vente
: celui-ci est dû sur la totalité du prix stipulé.
-
Lorsqu'après la vente, le vendeur et l'acheteur se mettent d'accord pour augmenter le
prix ou les charges de la vente, le droit de vente est dû sur le supplément.
-
Lorsque le vendeur d'une maison s'est engagé dans l'acte de vente à apporter certaines
améliorations à l'immeuble vendu (par exemple, l'installation d'un lavabo), le droit de
vente est dû sur la totalité du prix de vente stipulé, sans déduction de la dépense
résultant des travaux.
-
Quand le cessionnaire d'une option d'achat lève l'option au prix prévu dans celle-ci, il
n'y a pas lieu d'ajouter à ce prix, pour la perception du droit de vente, la somme que le
cessionnaire avait versée pour prix de cession de l'option.
A.3.2. Echange
67.- En cas d'échange, la valeur conventionnelle de chacun des immeubles échangés est
égale au montant de la somme que le coéchangiste attributaire du bien devrait décaisser, dans
l'hypothèse où un prix en argent équivalent aux prestations à lui imposées, serait substitué à
ces prestations.
Des deux transmissions corrélatives qui constituent l'échange, une seule doit être imposée :
celle qui donne ouverture au droit le plus élevé (articles 14 et 45, alinéa 3 du CDE). Il s'agira
normalement de la transmission qui porte sur l'immeuble dont la valeur conventionnelle est la
plus élevée. Mais il peut en aller autrement, lorsque le coéchangiste qui acquiert l'immeuble
valant le plus, bénéficie d'un régime de faveur (tarif réduit ou exemption).
A.3.3. Apport de biens immeubles en société
68.- En cas d’apports de biens immeubles en société autres que les apports visés à l'article
115bis du CDE, la valeur conventionnelle des immeubles apportés est "la valeur des droits
sociaux attribués en contrepartie des apports augmentée des charges supportées par la
société" (article 45, alinéa 4 du CDE).
Par "charges", il convient d'entendre tous les avantages que la société prend à sa charge, au
profit de l'apportant, et qui sont soustraits aux risques sociaux (exemple : la reprise par la
société de dettes de l'apportant, le paiement d'une soulte, etc)
A.3.4. Conventions translatives autres que la vente, l'échange et les apports en société
39
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69.- Pour les conventions translatives, autres que la vente, l'échange et les apports en
société, la valeur conventionnelle de l'immeuble transmis est égale à la valeur que les parties
attribuent à la contre-prestation stipulée à charge de l'acquéreur de l'immeuble (article 45,
alinéa 5 du CDE).
Par exemple, si X, débiteur de 100.000 EUR envers Y, donne à celui-ci un immeuble en
paiement de sa dette, la base imposable pour l’application du droit de vente est de 100.000
EUR.
A.4.
Base d'imposition accessoire : la valeur vénale des immeubles transmis
A.4.1. Notion
70.- La valeur vénale est la valeur marchande ou de vente, celle qu'on obtiendrait, dans des
conditions normales de publicité, en suite d'un concours suffisant d'amateurs, donc dans une
mise en vente idéale.
A.4.2. Principe
71.- Généralement, la valeur vénale de l'immeuble transmis est déterminée par
comparaison avec des fonds voisins de même nature qui, dans des conditions normales, ont
fait l'objet d'une vente publique ou même d'une vente de gré à gré. La valeur vénale est avant
tout fonction de la loi de l'offre et de la demande.
Cependant, lorsque la convention porte sur l'usufruit ou la nue-propriété d'un immeuble, la
valeur vénale se détermine obligatoirement de manière forfaitaire conformément aux
dispositions des articles 47 à 50 du CDE. Ces dispositions sont impératives : il n'est pas
possible de les écarter, même dans le cas où leur application serait défavorable au Trésor.
La valeur vénale forfaitaire de l'usufruit se détermine sur la base de deux éléments : le revenu
du bien et la durée de l'usufruit (articles 47 et 50 du CDE). Le revenu annuel du bien ou à
défaut, la valeur locative, doit être multiplié par le coefficient indiqué au tableau de l’article
47 du CDE et déterminé par l’âge, au jour de l’acte, de la personne sur la tête de laquelle
l’usufruit a été constitué.
En aucun cas, il ne peut être assigné à l'usufruit une valeur vénale supérieure aux quatre
cinquièmes de la valeur vénale (ordinaire) de la pleine propriété (article 47, alinéa 3 du CDE).
Celle de la nue-propriété est, en principe, égale à la différence entre la valeur vénale
(ordinaire) de la pleine propriété et la valeur vénale forfaitaire de l'usufruit; toutefois, la base
imposable ne peut être inférieure à la valeur vénale de la pleine propriété si l'usufruit est
réservé par l'aliénateur (article 48 du CDE).
Lorsqu'un même acte porte à la fois cession de l'usufruit (immédiat) et de la nue-propriété
d'un même bien, soit qu'il y ait des aliénateurs ou des acquéreurs différents, la base de
perception est nécessairement représentée, pour l'ensemble, par la valeur conventionnelle
totale ou par la valeur vénale de la pleine propriété (si cette valeur vénale est supérieure à la
valeur conventionnelle totale).
40
Luc HERVE - Séminaire Stagiaires IPCF - Droits d'enregistrement et de succession
A.5.
Taux applicables
72.- Depuis le 1er janvier 2002, le taux applicable varie en fonction du lieu de la situation
de l’immeuble faisant l’objet de la convention.
En Région wallonne et en Région de Bruxelles-Capitale, "le droit est fixé à 12,50 % pour les
ventes, échanges et toutes conventions translatives à titre onéreux, de propriété ou d'usufruit
de biens immeubles" (article 44 du CDE). En Région wallonne, il peut toutefois être réduit à
10 % pour certains logements.
En Région flamande, ce droit est fixé à 10 % (article 44 du CDE Rég. Flamande).
En cas d'échange, il s'applique si la part des biens qui présente le revenu cadastral fédéral le
plus élevé est situé en Région wallonne ou en Région de Bruxelles-Capitale.
En Région wallonne et en Région de Bruxelles-Capitale, diverses réductions sont prévues : à
1,50 %, à 5 % ou à 6 %, selon le cas.
En Région flamande, diverses réductions sont prévues : à 1,50 % et à 5 %, selon le cas.
A.6.
Taux réduits
73.- Le Code prévoit diverses réductions du taux du droit de vente. A titre d'illustrations, et
de manière non exhaustive, ce taux est ainsi réduit à :
-
-
6 % pour les ventes aux sociétés immobilières de service public (article 51 du CDE);
0,50 % pour les ventes aux acheteurs bénéficiaires de la prime gouvernementale
(article 52 du CDE);
6 %, en Région wallonne, pour les ventes de petites propriétés rurales et d'habitations
modestes (articles 53 à 61 du CDE); ce droit est réduit à 5 % en Région flamande;
5 % en Région wallonne et en Région flamande et 8% en Région de BruxellesCapitale, pour les ventes aux personnes faisant profession d'acheter des immeubles en
vue de la revente (articles 62 à 71 du CDE);
régime particulier (en principe : exemption du droit proportionnel) prévu pour les
échanges d'immeubles ruraux non bâtis (articles 72 et 731 du CDE).
L'application de ces tarifs réduits est soumise à diverses conditions qui doivent être remplies,
selon le cas, avant l'enregistrement, au moment de la formalité, ou après celle-ci.
Par ailleurs, les législations régionales prévoient également des abattements ou des réductions,
et notamment, une réduction du coût fiscal lié à l’acquisition d’une résidence principale, cette
réduction s’appliquant suivant des modalités différentes dans les différentes Régions.
A.7.
Exemptions
A.7.1. Principe
41
Luc HERVE - Séminaire Stagiaires IPCF - Droits d'enregistrement et de succession
74.- Diverses opérations qui, par leur nature, devraient normalement donner lieu au droit de
vente, bénéficient d'une exemption.
a)
Dans certains cas, l'exemption se limite au droit proportionnel, le droit fixe général de
25,00 EUR étant dû. Il en est notamment ainsi :
1°
2°
3°
4°
5°
pour les déclarations de command (article 159, 1° du CDE);
pour les adjudications ensuite de folle enchère et pour certaines adjudications ensuite
de surenchère (article 159, 2° du CDE);
pour certaines conventions ayant pour objet la transmission de l'usufruit au nupropriétaire (article 159, 3° du CDE);
pour les conventions ayant pour objet des immeubles situés en pays étranger (art. 159,
7° du CDE);
pour les aliénations de bâtiments à ériger, en cours de construction ou nouvellement
construits, consenties par une personne possédant pour l'aliénation la qualité d'assujetti
à la T.V.A. (art. 159, 8° du CDE), etc…
Il convient encore de signaler certaines conventions visées par les articles 44 à 71 du CDE qui
sont exemptées du droit proportionnel et soumises à un droit fixe spécifique de 10,00 EUR, en
vertu de l'article 159bis du CDE en Région wallonne.
b)
Dans d'autres cas, l'exemption est totale : l'acte est enregistré gratuitement. Il en est
ainsi :
1°
pour les conventions qui rentrent dans le champ d'application de l'article 161, 1° du
CDE (actes amiables passés au nom ou en faveur de l'Etat, des Communautés et des
Régions, des établissements publics d'Etat, des Communautés et des Régions, de la
S.A. Financière T.G.V., de la S.A. A.S.T.R.I.D., de la Société nationale des habitations
et logements à bon marché, de la Société nationale de la petite propriété terrienne ou
de la Société nationale des chemins de fer belges);
2°
pour les conventions visées à l'article 161, 2° du CDE (cessions amiables d'immeubles
pour cause d'utilité publique, rétrocessions après expropriation pour cause d'utilité
publique, remembrements ou relotissements effectués en exécution du chapitre VI du
titre Ier de la loi organique de l'aménagement du territoire et de l'urbanisme, cession
d'un site d'activité économique désaffecté);
3°
pour certaines acquisitions d'immeubles par les Etats étrangers (art. 161, 6° du CDE);
etc…
A.7.2. Déclaration de command (article 159, 1°, du CDE)
75.- On appelle réserve de la faculté d'élire command, la clause stipulée dans le contrat de
vente, par laquelle l'acheteur se réserve le droit de désigner ultérieurement, dans un délai fixé,
une tierce personne, inconnue du vendeur au moment de la vente, qui prendra l'acquisition
pour elle, en manière telle que l'acheteur initial - s'il use de cette faculté d'élire command sera censé n'avoir pas acquis en son propre nom, mais au nom et pour compte du tiers.
42
Luc HERVE - Séminaire Stagiaires IPCF - Droits d'enregistrement et de succession
Les déclarations de command ne donnent lieu qu'à la perception du droit fixe général, pour
autant que :
1°
2°
3°
4°
la faculté de déclarer command ait été réservée dans l'acte d'adjudication ou de vente ;
la déclaration soit faite par acte authentique;
elle soit notifiée par exploit d'huissier de justice au receveur de l'enregistrement ou que
l'acte qui la constate soit présenté à la formalité, au plus tard le premier jour ouvrable
qui suit celui de l'adjudication ou du contrat de vente;
la déclaration soit pure et simple; la déclaration de command n'est pas pure et simple,
quand elle impose au command des conditions différentes de celles qui ont été faites
par le vendeur au commandé.
A défaut d'exécution de l'une de ces conditions, la déclaration de command est considérée conformément à la théorie de la mutation apparente - comme une revente pour l'application du
Code, pour autant du moins que l'élection de command prétendue soit acceptée par le
command.
A.7.3. Transmission de l'usufruit au nu-propriétaire (article 159, 3° du CDE)
76.-
"Sont exemptés du droit proportionnel et soumis au droit fixe général : (…)
3° les conventions ayant pour objet la transmission de l'usufruit au nu-propriétaire, lorsque le
droit proportionnel d'enregistrement ou le droit de succession a été payé par le nupropriétaire, ou par un précédent nu-propriétaire dont il tient ses droits, sur la valeur de la
pleine propriété".
A.7.4. Aliénation de bâtiments neufs (constitution, cession ou rétrocession de droits réels
autres que la propriété sur des bâtiments neufs) (article 159, 8° du CDE)
77.- L'application des exemptions établies par l'article 159, 8° du CDE requiert
l'accomplissement de diverses conditions concernant :
a)
-
la nature du bien transmis; l'exemption suppose ainsi que la convention porte :
soit sur des bâtiments ou constructions à ériger;
soit sur des bâtiments en cours de construction;
soit sur des bâtiments nouvellement construits (y compris les bâtiments anciens,
lorsque ceux-ci ont subi des transformations telles qu'ils acquièrent de ce fait les
caractéristiques d'un bâtiment neuf).
La notion de bâtiment sous-entend essentiellement une immobilisation par nature de matières
(béton, asphalte,…) ou de matériaux (tuyaux, poteaux, dalles,…). Sont donc visés tous les
immeubles par nature bâtis auxquels un revenu cadastral peut être attribué au titre
d’immeubles bâtis (maisons d’habitation et villas, appartements, bâtiments industriels,
commerciaux ou agricoles, murs mitoyens,…), et les équipements industriels qui ont le
caractère d’immeubles par nature.
Peu importe que le bâtiment soit transmis isolément ou qu'il soit cédé en même temps que le
terrain sur lequel il est érigé.
43
Luc HERVE - Séminaire Stagiaires IPCF - Droits d'enregistrement et de succession
L'exemption prévue par l'article 159, 8° du CDE ne s'applique toutefois pas au terrain : même
s'il est cédé avec le bâtiment, en vertu d'un contrat unique, le terrain reste entièrement sous
l'empire des droits d'enregistrement (article 159, 8°, alinéa 2 du CDE).
Lorsque la cession du terrain et du bâtiment est constatée dans une convention unique, pour
un prix total, le droit d'enregistrement est dû sur la valeur vénale du terrain, à la date de la
convention, compte tenu de l'état de ce terrain avant le commencement de la construction du
bâtiment.
b)
la nature du contrat : l'exemption suppose que la cession du bâtiment ait lieu en
exécution d'un contrat à titre onéreux, translatif ou déclaratif de propriété ou d'usufruit.
L'apport en société soumis au droit établi par l'article 115bis du CDE est expressément exclu
du régime de l'article 159, 8° du CDE.
c)
la qualité du cédant : celui-ci doit avoir, pour l’opération de cession, la qualité
d’assujetti à la TVA.
En ce qui concerne les cessions de bâtiments, le Code de la T.V.A. prévoit trois catégories
d'assujettis :
1°
le constructeur professionnel ou marchand de bâtiments neufs, assujetti comme tel de
plein droit à la T.V.A. C'est la personne qui, de manière habituelle, cède à titre
onéreux des bâtiments neufs qu'elle a construits, fait construire ou acquis avec
application de la taxe (article 44, § 3, 1°, a, 1er tiret, C.T.V.A.) : assujetti de plein
droit;
2°
l'assujetti à la T.V.A. en raison d'une autre activité économique, qui n'est pas
constructeur ou marchand de bâtiments neufs. Cet assujetti doit opter pour
l'application de la T.V.A. à la cession à titre onéreux d'un bâtiment neuf qu'il a
construit, fait construire ou acquis avec application de la T.V.A. (article 44, § 3, 1°, a,
2e tiret, C.T.V.A.) : assujetti sur option ;
3°
la personne qui n'exerce pas d'activité économique. Cette personne doit opter pour
l'application de la T.V.A. à la cession à titre onéreux d'un bâtiment neuf qu'elle a
construit, fait construire ou acquis avec application de la T.V.A. (article 44, § 3, 1°, a,
3e tiret, C.T.V.A.) : assujetti sur option.
La qualité d'assujetti à la T.V.A. pour la cession du bâtiment neuf doit exister à la date de la
convention. Les assujettis sur option doivent, dès avant la conclusion de la cession, déposer
une déclaration d'option à l'office de contrôle de la T.V.A. dont ils relèvent.
d)
l'exigibilité de la T.V.A. : l’exemption ne pourra s’appliquer que si la livraison des
bâtiments aliénés est soumise à la TVA.
44
Luc HERVE - Séminaire Stagiaires IPCF - Droits d'enregistrement et de succession
e)
le moment de la cession du bâtiment : la cession doit porter sur un bâtiment "neuf".
Pour l'application du C.T.V.A., un bâtiment est neuf jusqu'au 31 décembre de la deuxième
année qui suit celle au cours de laquelle a eu lieu la première occupation ou la première
utilisation de ce bâtiment (article 44, § 3, 1°, C.T.V.A.). En cas de cession d'un bâtiment à
construire, aucun délai n'est fixé pour le commencement des travaux après la cession.
La cession faite après l'expiration du délai ci-dessus indiqué sort du champ d'application de la
T.V.A. et donne lieu à la perception du droit proportionnel d'enregistrement.
En principe, en vertu de l'article 44, § 3, 1°, C.T.V.A., la date de la cession doit résulter de la
date d'un acte authentique ou d'un acte sous seing privé ayant date certaine conformément à
l'article 1328 du Code civil.
Toutefois, l'administration admet que la preuve de la date de la cession peut aussi résulter
d'éléments extrinsèques aux actes et documents, tels que, par exemple, le paiement du prix par
virement bancaire ou postal, la communication de l'acte à une administration publique, la
demande de prêt adressée par l'acquéreur à un organisme de crédit, etc.
f)
les conditions de forme :
Tout assujetti à la T.V.A. doit indiquer dans l'acte de cession ou dans un écrit annexé à cet
acte, avant l'enregistrement :
-
le bureau où il est tenu de déposer les déclarations T.V.A.;
la date de la première occupation ou utilisation du bâtiment.
Si le bâtiment n'a pas encore été occupé ou utilisé, l'acte ou un écrit joint à l'acte doit, par
application de l'article 168 du CDE, soit mentionner cette circonstance, soit, le cas échéant,
mentionner que l'aliénation a eu lieu avant ou pendant l'érection du bâtiment cédé ou de la
partie de bâtiment cédée.
L'assujetti sur option doit en outre mentionner la date à laquelle il a manifesté l'intention
d'effectuer l'opération avec application de la T.V.A.
En cas d'inexactitude de ces différentes mentions, le cédant encourt une amende égale au droit
éludé.
B.
Ventes publiques de biens meubles corporels
78.- "Le droit est fixé à 5 %. pour les ventes publiques de biens meubles corporels" (article
77 du CDE).
Par "biens meubles corporels", il faut entendre ici les meubles par nature et les meubles par
anticipation, à l'exclusion des titres au porteur et des meubles par la détermination de la loi.
45
Luc HERVE - Séminaire Stagiaires IPCF - Droits d'enregistrement et de succession
Le droit établi par l'article 77 du CDE se perçoit sur le prix et les charges (exemple :
obligation faite à l'acheteur de payer des frais de transport antérieurs à la vente) des
adjudications (article 79 du CDE). La liquidation s'opère, conformément à l'article 166 du
CDE, sur le montant cumulé des lots soumis au même tarif et adjugés au cours de la même
vente.
L'article 80 du CDE prévoit des hypothèses d'exemption du droit de 5 %, avec application du
droit fixe général.
L'article 159, 2° du CDE retient également l'application du droit fixe général dans certains cas
d'adjudications ensuite de folle enchère, de biens meubles ou immeubles, lorsqu'elles ne
donnent pas lieu à un droit proportionnel supérieur à celui qui a été perçu sur la précédente
adjudication. Le même régime est applicable aux adjudications ensuite de surenchère dans le
cas où la réserve de surenchère ne constitue pas une condition suspensive.
C.
Baux, sous-locations et cessions de baux d’immeubles situés en Belgique,
emphytéoses et superficies portant sur de tels biens
C.1.
Notions
79.- Le "bail" est la convention par laquelle l’une des parties s’oblige à faire jouir l’autre
d’une chose pendant un certain temps et moyennant un certain prix que cette autre partie
s’oblige à lui payer.
La "superficie" est un droit réel qui consiste, pour le titulaire du droit, à disposer de bâtiments,
de plantations, ou d’ouvrages, sur un fonds appartenant à autrui. C’est en quelque sorte un
droit de propriété temporaire.
L’"emphytéose" est un droit réel qui consiste, pour le titulaire du droit, à avoir la pleine
jouissance d’un immeuble appartenant à autrui, sous la condition de payer au propriétaire une
redevance annuelle, soit en argent, soit en nature, en reconnaissance de son droit de propriété.
C.2.
Opérations imposables
80.- Sont assujettis au droit de bail, les actes ou écrits (autres que les jugements) faisant
titre de l'une ou l'autre des opérations suivantes :
a)
baux ou sous-baux d'immeubles situés en Belgique;
b)
cessions de pareils baux ou sous-baux;
c)
contrats constitutifs de droits d'emphytéose ou de superficie portant sur des immeubles
situés en Belgique;
d)
cessions de pareils droits d'emphytéose ou de superficie (art. 19, 3°, 83 et 159, 7° du
CDE).
46
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Sont enregistrés gratuitement les actes portant bail, sous-bail ou cession de bail d'immeubles
ou de parties d'immeubles situés en Belgique, affectés exclusivement au logement d'une
famille ou d'une personne seule (article 161, 12° du CDE).
Les contrats constitutifs d'un droit de superficie sont assimilés aux baux pour l'application du
CDE (article 83, al. 2 du CDE), du moins lorsque la constitution dudit droit de superficie a
lieu à titre onéreux.
Quand la cession (à titre onéreux) du droit d'emphytéose ou de superficie porte non seulement
sur le droit lui-même, mais aussi sur des constructions érigées par l'emphytéote ou le
superficiaire, il faut - outre le droit de bail dû pour la cession du droit même - percevoir le
droit de vente pour la transmission des constructions. Lorsque la constitution (à titre onéreux)
d'un droit d'emphytéose ou de superficie est couplée à la vente d'un bâtiment érigé par le
propriétaire du fonds, sans le fonds servant d'assiette à ce bâtiment, il faut percevoir non
seulement le droit de bail pour la constitution même du droit de superficie, mais aussi le droit
de vente pour le transfert du bâtiment.
C.3.
Taux applicable
81.- Le droit de bail est fixé à 0,20 %, sauf toutefois en ce qui concerne les baux de chasse
et de pêche (et leur cession) pour lesquels le taux du droit est porté à 1,50 % (article 83 du
CDE).
C.4.
Base imposable
82.- Aux termes de l'article 84 du CDE, la base d'imposition du droit de bail est
déterminée:
a)
par le montant cumulé des loyers et des charges imposées au preneur pour toute la
durée du bail, si le bail est à durée déterminée ;
b)
par une somme formée de dix fois le loyer et les charges annuels, sans que cette
somme puisse être inférieure au montant cumulé des loyers et des charges imposées au
preneur pour la durée minimum prévue dans l'acte de bail, si le bail est à vie ou à
durée indéterminée;
c)
en cas de cession de bail, par le total des sommes ou valeurs suivantes :
- le montant cumulé des loyers et des charges imposées au preneur pour la période du
bail restant à courir après la cession (si cette période est "à vie" ou "indéterminée", on
applique purement et simplement la règle indiquée ci-avant) et,
- le cas échéant, le montant ou la valeur des prestations stipulées au profit du cédant (à
charge du cessionnaire).
Le loyer est le prix que le locataire paie pour obtenir du bailleur la jouissance du bien loué.
47
Luc HERVE - Séminaire Stagiaires IPCF - Droits d'enregistrement et de succession
Si le contrat de bail impose au bailleur de fournir au locataire, outre la jouissance du bien
loué, un avantage quelconque non rémunéré par un prix distinct du loyer, la valeur de cet
avantage doit être déduite du loyer pour la perception du droit de bail. Par exemple, si le
bailleur prend à sa charge les frais de l'acte de bail (droits d'enregistrement, notamment) qui
incombent de droit au locataire, la valeur de cet avantage devra être déduite du loyer.
Les charges dont la valeur doit être comprise dans la base imposable au droit de bail, sont
toutes les obligations accessoires que le contrat de location impose au preneur, en plus du
loyer, et dont le bailleur profite directement ou indirectement. Par exemple, si l’obligation est
faite au locataire de supporter les réparations autres que locatives ou de menu entretien.
C.5.
Exemptions
83.-
Sont notamment exemptés du droit proportionnel :
a)
les baux consentis à l'Etat ou aux autres organismes visés à l'article 161, 1° du
CDE(enregistrement gratuit);
b)
les baux consentis pour cause d'utilité publique (enregistrement gratuit - article 161, 2°
du CDE);
c)
les baux de biens immeubles situés à l'étranger (droit fixe général - article 159, 7° du
CDE);
d)
les contrats de location-financement immobilière ou "leasing" consentis dans les
conditions prévues à l'article 44, § 3, 2°, b du C.T.V.A. (droit fixe général - article 159,
10° du CDE);
e)
les contrats portant bail, sous-bail ou cession de bail d'immeubles ou de parties
d'immeubles situés en Belgique, affectés exclusivement au logement d'une famille ou
d'une personne seule (enregistrement gratuit - article 161, 12° du CDE).
D.
Droit de constitution d’hypothèque, de gage sur fonds de commerce et de
privilège agricole
D.1.
Notions
84.- L'"hypothèque" est un droit réel sur les immeubles affectés à l'acquittement d'une
obligation : il s'agit d'un droit accessoire qui présuppose l'existence d'une obligation (loi
hypothécaire, articles 41 et 108).
Elle peut être légale, conventionnelle ou testamentaire. Seules les hypothèques
conventionnelles et testamentaires sont soumises au droit proportionnel, à l'exclusion des
hypothèques légales et des privilèges sur immeubles (article 27 de la loi hypothécaire).
48
Luc HERVE - Séminaire Stagiaires IPCF - Droits d'enregistrement et de succession
Le "gage sur fonds de commerce" est réglé par la loi du 25 octobre 1919. Il porte sur tous les
éléments du fonds de commerce, tant corporels qu'incorporels. L'acte de constitution, qui peut
être authentique ou sous seing privé, doit être rendu public par l'inscription dans un registre
spécial, au bureau de la conservation des hypothèques de l'arrondissement judiciaire dans le
ressort duquel le fonds de commerce gagé est établi.
Les conventions, autres que les apports en sociétés et les donations, portant sur des
obligations de sommes non garanties par une hypothèque, un gage sur fonds de commerce ou
un privilège agricole, ne sont pas soumises au droit proportionnel.
D.2.
Opérations imposables et taux
85.- Sont assujetties à un droit de 1 %, les constitutions d'hypothèque sur un immeuble
situé en Belgique (article 87 du CDE).
Sont assujetties à un droit de 0,50 % :
a)
les constitutions d'hypothèque sur un navire qui n’est pas destiné par nature au
transport maritime;
b)
les constitutions d'un gage sur fonds de commerce;
c)
les constitutions d'un privilège agricole (article 88 du CDE et Circulaire n°18/2003, §
4.2).
Quant aux règles de perception, il est renvoyé aux articles 89 à 92 du CDE.
D.3.
Base imposable
86.- "Le droit de 1 % ou de 0,50 % est liquidé sur le montant des sommes garanties par
l'hypothèque, le gage ou le privilège agricole, à l'exclusion des intérêts ou arrérages de trois
années garantis par l'article 87 de la loi du 16 décembre 1851" (article 93 du CDE).
La base d'imposition comprend donc non seulement le capital garanti, mais encore les
accessoires (frais de poursuites éventuels, primes annuelles d'un contrat d'assurance sur la vie,
commissions, montant supplémentaire garanti en raison d'une clause d'indexation, etc.)
stipulés lors de la constitution de l'hypothèque, du gage ou du privilège.
D.4.
Exemptions
87.- Plusieurs dispositions du Code prévoient une exemption du droit sur les constitutions
d'hypothèque, de gage sur fonds de commerce ou de privilège agricole (cf. notamment,
articles 159, 9°, 161,1°, 161,6°, 162,4°, 162,34° à 35°quater, ou encore 301, 2°et 3° du CDE).
49
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E.
Droit de partage de biens immeubles situés en Belgique
E.1.
Notions
88.- Le partage et la cession de parts indivises entre copropriétaires présupposent
l'existence d'une indivision ou copropriété.
L’indivision peut être définie comme la coexistence sur un même bien de droits de même
nature appartenant à des personnes différentes. Lorsque l’indivision porte sur la propriété d’un
bien, on la nomme "copropriété".
L'indivision peut notamment trouver son origine dans une succession (légale ou
testamentaire), dans l'acquisition entre vifs d'un bien par plusieurs personnes ensemble, dans
la dissolution d'une société,… La sous-indivision est l'indivision qui s'est formée entre un
groupe d'intéressés, à l'égard d'une quotité indivise déterminée, à un titre distinct de celui de
l'indivision principale (ou indivision originaire).
Il n'y a pas d'indivision entre l'usufruitier et le nu-propriétaire dans la mesure où il ne s’agit
pas de droits de même nature. Dès lors, et sauf application de l'article 109, 3° du CDE:
- si l'usufruitier cède son usufruit au nu-propriétaire, moyennant un prix, ou,
inversement, si le nu-propriétaire cède son droit à l'usufruitier, l'opération doit être
imposée au droit de vente (et non au droit de 1%);
- si l'usufruitier et le nu-propriétaire conviennent de se partager les biens en pleine
propriété, l'opération s'analyse en un échange par lequel l'usufruitier cède l'usufruit du
bien mis en pleine propriété dans le lot du nu-propriétaire, moyennant l'abandon par
celui-ci de la nue-propriété du bien attribué en pleine propriété à l'usufruitier.
Le "partage" est l'acte qui met fin à l'indivision, par l'attribution à chacun des ayants droit
d'une portion divise des biens, portion correspondant à la part de l'attributaire dans
l'indivision.
La "cession équipollente à partage" est la cession à titre onéreux de parts indivises qui
intervient entre tous les copropriétaires et qui a pour effet de faire cesser l'indivision à l'égard
de certains indivisaires.
E.2.
Taux
89.- Le droit d'enregistrement établi sur les partages, les cessions à titre onéreux entre
copropriétaires et la conversion de l'usufruit du conjoint survivant, en propriété, en une
somme d'argent ou en une rente, est fixé à 1 % (article 109 du CDE).
E.3.
Champ d'application
90.-
Sont soumis au droit de 1 % :
50
Luc HERVE - Séminaire Stagiaires IPCF - Droits d'enregistrement et de succession
a)
les partages, partiels ou totaux, de biens immeubles sis en Belgique, que ces partages
soient amiables, judiciaires, sous seing privé ou authentiques; si le partage amiable est
verbal, il doit faire l’objet d’une déclaration ;
b)
les cessions, à titre onéreux, entre copropriétaires, de parts indivises dans des
immeubles situés en Belgique ;
c)
la conversion prévue aux articles 745quater et 745quinquies du Code civil même si,
pour ce dernier cas, il n'y a pas d'indivision; l'art. 109, 3° du CDE crée, pour la
perception du droit d'enregistrement sur les conversions d'usufruit du conjoint
survivant, une indivision fictive entre l'usufruit et la nue-propriété.
L'opération doit porter sur la propriété ou l'usufruit d'immeubles situés en Belgique.
Par conséquent, ne constituent pas des partages ou des cessions de parts indivises, à titre
onéreux et entre copropriétaires, et donc sont assujettis à un droit proportionnel autre que
celui prévu à l'article 109 :
- la vente (ou la cession à titre onéreux) d'une quotité indivise dans un immeuble situé
en Belgique, à un non-indivisaire (est dû le droit établi par l'article 44 du CDE);
- les donations de quotités indivises, même si elles sont faites entre copropriétaires (le
droit de donation est dû) ;
- l'apport à une société belge d'une quotité indivise dans un immeuble, même si la
société est propriétaire du surplus (le droit d'apport est dû - articles 44 et 115 du CDE).
Quand un même acte instrumentaire constate deux partages successifs, indépendants l'un de
l'autre, mais portant sur les mêmes biens, le droit de 1% n'est dû qu'une fois sur la valeur de
ces biens.
E.4.
Base imposable
91.- La base imposable est la valeur conventionnelle des biens, telle qu’elle résulte des
stipulations de l’acte, ou la valeur vénale, si elle lui est supérieure. Sur ce point, il est renvoyé
aux développements relatifs à la vente d’immeubles.
Pour les biens pour lesquels l'acte fait cesser l'indivision entre tous les copropriétaires, le droit
est liquidé sur la valeur de ces biens (article 110 du CDE). Lorsque l'acte ne fait pas cesser
l'indivision entre tous les copropriétaires, le droit est liquidé sur la valeur des quotités cédées.
Le cas échéant, il faut tenir compte de l'existence d'une sous-indivision : le droit est dû sur la
valeur de cette sous-indivision, si le partage ou la cession y met fin. Si l'indivision cesse pour
certains immeubles et pas pour d'autres, il faut examiner la situation pour chaque bien
séparément.
E.5.
Cession de parts indivises ou attribution par partage à celui qui est entré dans
une indivision par acquisition conventionnelle d'une part indivise (article 113 du
CDE)
51
Luc HERVE - Séminaire Stagiaires IPCF - Droits d'enregistrement et de succession
92.-
L'article 113 du CDE prévoit ce qui suit :
"En cas d'attribution par partage ou de cession de parts indivises à un tiers qui a acquis
conventionnellement une part indivise de biens appartenant à une ou à plusieurs personnes,
le droit est perçu, par dérogation à l'article 109, au taux prévu pour les transmissions à titre
onéreux sur les quotités dont le tiers devient propriétaire par l'effet de la convention et selon
les règles fixées aux articles 45 à 50.
Cette disposition est applicable dans le cas où l'attribution de biens ou la cession de parts
indivises est consentie aux héritiers ou légataires du tiers acquéreur décédé. Elle n'est pas
applicable dans le cas où le tiers attributaire ou cessionnaire a acquis avec d'autres la
totalité d'un ou plusieurs biens".
Le tiers acquéreur conventionnel, au sens de l'article 113 du CDE est toute personne
(physique ou morale) qui s'est introduite dans une indivision, exclusivement par une
acquisition conventionnelle de parts indivises, en manière telle que le titre de cette personne
soit différent de celui de ses co-indivisaires.
Chaque fois que le tiers acquéreur conventionnel acquiert, dans le bien indivis, une quotité
supplémentaire, par un partage ou par une cession à titre onéreux entre copropriétaires (c'està-dire par une convention visée à l'article 109 du CDE), l'opération est soumise au droit de
vente, à l'exclusion du droit de 1%. L'opération est donc fiscalement traitée comme une
transmission à titre onéreux au sens de l'article 44 du CDE
Le droit de vente se perçoit sur la valeur des quotités supplémentaires acquises par le tiers
(même si l'opération met fin à l'indivision), conformément aux règles fixées aux articles 45 à
50 du CDE Le cas échéant, les réductions prévues aux articles 51 et suivants du CDE peuvent
s'appliquer. Il en va de même pour les règles de l'échange.
E.6.
Exemption
93.- Conformément aux principes généraux, les partages et les cessions à titre onéreux
entre copropriétaires peuvent être exemptés du droit proportionnel, en vertu des articles 159,
161 et 301 du CDE.
Ainsi, les dispositions de l'article 159, 8° du CDE examinées dans le cadre des transmissions à
titre onéreux, sont susceptibles de s'appliquer en cas de partage, de cession équipollente à
partage ou de cession de parts indivises entre copropriétaires.
En conséquence, le partage et la cession de quotités indivises entre copropriétaires sont
exemptés du droit proportionnel, dans la mesure où ils concernent des bâtiments à ériger, en
cours de construction ou nouvellement construits, lorsque :
- ce partage ou cette cession rentre dans le champ d'application de la T.V.A. et que,
- toutes les autres conditions prévues à l'article 159, 8° du CDE, se trouvent remplies.
52
Luc HERVE - Séminaire Stagiaires IPCF - Droits d'enregistrement et de succession
L'exemption ne s'applique pas au terrain compris dans l'opération puisqu’il ne rentre pas dans
le champ d'application de la T.V.A. Le droit prévu à l'article 109 du CDE est donc dû, soit sur
les quotités cédées si l'acte ne fait pas cesser l'indivision du terrain entre tous les
copropriétaires, soit sur la totalité du terrain dans le cas contraire (article 110 du CDE).
Dans l’hypothèse où la cession entre dans le champ d’application de la TVA, les distinctions
suivantes doivent encore être opérées :
- soit toutes les quotités cédées sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée : dans ce
cas, aucun droit proportionnel d'enregistrement ne sera dû, même lorsque, par l'effet de
la cession, une seule personne devient propriétaire de la totalité du bâtiment ;
- soit seules certaines des quotités cédées sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée,
alors que l'indivision du bâtiment ne cesse pas à l'égard de tous les copropriétaires : le
droit d'enregistrement de 1 % sera dû sur les quotités cédées non soumises à la taxe sur
la valeur ajoutée ;
- soit, enfin, seules certaines quotités cédées sont soumises à la taxe sur la valeur
ajoutée, mais l'indivision cesse à l'égard de tous les copropriétaires. Dans ce cas, le
droit d'enregistrement de 1 % sera perçu sur les quotités cédées non soumises à la taxe
sur la valeur ajoutée et sur les quotités qui restent appartenir au cessionnaire. En effet,
en vertu de l’article 110 du CDE, l'opération est passible du droit de 1% sur la totalité
du bâtiment.
F.
Les apports en société
F.1.
Notions
F.1.1. Les sociétés concernées
94.- Les sociétés peuvent être constituées sous diverses formes et différents statuts. En
outre, différents classements sont possibles. On peut ainsi distinguer :
a)
les sociétés belges (c'est-à-dire celles qui ont soit leur siège de direction effective en
Belgique, soit leur siège statutaire en Belgique et leur siège de direction effective hors de
l'U.E.) et les sociétés étrangères (c'est-à-dire celles dont le siège de direction effective et le
siège statutaire sont à l'étranger, ou dont le siège statutaire est en Belgique, mais avec leur
siège de direction effective dans un autre pays de l'U.E.).
b) 
les sociétés civiles et les sociétés commerciales (les sociétés commerciales sont celles
qui ont pour objet des actes de commerce, toute autre société étant civile);
c)
les sociétés ayant la personnalité juridique et les sociétés sans personnalité juridique;
en droit belge, la loi reconnaît comme société à forme commerciale dotée de la personnalité
juridique: la société en nom collectif (SNC), la société en commandite simple (SCS), la
société anonyme (SA), la société en commandite par actions (SCA), la société privée à
responsabilité limitée (SPRL), la société coopérative (sans distinguer selon qu'il s'agit d'une
53
Luc HERVE - Séminaire Stagiaires IPCF - Droits d'enregistrement et de succession
société coopérative à responsabilité limitée (SCRL) ou illimitée (SCRI), le groupement
d'intérêt économique (GIE) et la société agricole (S. Agr.); les autres sociétés, à savoir la
société de droit commun, la société momentanée (auparavant appelée "association
commerciale momentanée") et la société interne (auparavant appelée "association
commerciale en participation"), n'ont pas la personnalité juridique;
d)
les sociétés de personnes (exemple : la société en nom collectif) et les sociétés de
capitaux (exemple : la société anonyme).
F.1.2. Les apports concernés
95.- L’"apport" peut être défini comme l’ensemble des biens qui sont apportés dans le
patrimoine de la société (en vue de la réalisation de son objet), pour être soumis aux mêmes
risques que ce patrimoine, et en contrepartie desquels les associés reçoivent des droits
sociaux, c'est-à-dire les divers avantages attachés à la qualité d'associé.
Les apports peuvent être faits lors de la constitution de la société ou ultérieurement. Ils
peuvent porter sur des biens déterminés (exemples : tel immeuble, une somme d'argent), sur
des ensembles de biens (exemples : un fonds de commerce, une branche de l'activité exercée
par telle société), voire même sur tout ou partie du patrimoine d'une société préexistante
(exemple : apport à une société nouvelle de tout le patrimoine d'une société en liquidation).
Ils peuvent se faire en propriété ou en jouissance (droit personnel ou droit réel de jouissance).
Ils peuvent se réaliser sous forme d'apport d'industrie ou de services (apport de l'industrie de
telle personne, dans telle matière).
Par conséquent, tous les biens, dans l'acception la plus large du terme (les biens meubles ou
immeubles, corporels ou incorporels, présents ou futurs) peuvent être apportés en propriété ou
jouissance, à condition toutefois que ces biens soient susceptibles d'estimation économique.
L'apport doit être rémunéré en droits sociaux. Si, en échange des biens transférés à la société,
une personne qualifiée "apporteur" reçoit non des droits sociaux, mais uniquement une valeur
certaine - une somme d'argent, des obligations de la société, un bien en nature, une reprise de
dettes, etc. - il y a vente ou, le cas échéant, échange, prêt, contrat d'entreprise, louage
d'ouvrage ou du service, et non apport en société.
Mais rien n'empêche qu'un même apport soit rémunéré pour partie en droits sociaux et pour
partie autrement (on dit alors que l'apport est "mixte" ou à titre onéreux). Des règles
particulières sont d'ailleurs prévues pour ce cas par l'article 120 du CDE.
L'apport en société n'implique pas obligatoirement que les biens apportés soient
immédiatement transférés à la société : il suffit que l'apportant assume l'obligation de mettre
quelque chose dans la société.
F.2.
Principes d’imposition
54
Luc HERVE - Séminaire Stagiaires IPCF - Droits d'enregistrement et de succession
96.- Les règles de perception du droit sur les apports en société diffèrent selon qu'il s'agit
d'un apport à une société belge ou d'un apport à une société étrangère, et selon qu'il s'agit d'un
apport de biens meubles ou immeubles autres que ceux affectés ou destinés partiellement ou
totalement à l'habitation et apportés par une personne physique, ou d'un apport de biens
immeubles affectés ou destinés partiellement ou totalement à l'habitation et apportés par une
personne physique.
En outre, il faut distinguer l'apport ordinaire (ou pur et simple), l'apport mixte, l'apport de
l'universalité des biens d'une société (fusion, scission, etc.), l'apport d'une ou plusieurs des
branches d'activité d'une société et l'échange d'actions ("fusion à l'anglaise").
Le régime des actes accomplis par les sociétés ou qui intéressent les sociétés peut, en ce qui
concerne les droits d'enregistrement, se résumer comme suit.
a)
Les actes ordinaires, qui ne sont pas propres aux sociétés, comme la vente, l'échange,
le bail, la constitution d'hypothèque, la donation ou le partage d'une indivision ordinaire dans
laquelle une société possède une part, sont assujettis aux règles ordinaires : le fait qu'une
société y soit partie n'exerce aucune influence.
b)
Depuis le 1er janvier 2006, les apports à des sociétés belges (lors de leur constitution
ou ultérieurement) sont assujettis à la perception d’un droit de 0 %, sur la base de la valeur
conventionnelle de l’apport avec minimum la valeur vénale des biens apportés (cf. articles 47
à 50, 115, 115bis et 119 du CDE).
Toutefois, le droit de perception est fixé à :
- 10 % pour les apports de biens immeubles situés en Région flamande, affectés ou
destinés partiellement ou totalement à l'habitation et apportés par une personne
physique, sur base de la valeur conventionnelle de l'apport, avec comme minimum la
valeur vénale des biens apportés (cf. article 44 du CDE Rég. Flam., 45 à 50, 115bis et
159, 7° du CDE);
- 12,50 % pour les apports de biens immeubles situés en Région wallonne ou
bruxelloise, affectés ou destinés partiellement ou totalement à l'habitation et apportés
par une personne physique, sur base de la valeur conventionnelle de l'apport, avec
comme minimum la valeur vénale des biens apportés (cf. article 44 - Région wallonne
ou bruxelloise - à 50, 115bis et 159, 7° du CDE).
En cas d'apport mixte, c'est-à-dire en cas d'apport rémunéré pour partie en droits sociaux et
pour partie autrement, le "droit d'apport" de 10 ou 12,50 %, selon le cas, n'est normalement
dû que dans la mesure de la partie rémunérée en droits sociaux : pour le surplus, c'est (en
principe) le droit ordinaire de transmission à titre onéreux qui est dû (droit de vente, droit de
cession de bail, etc. selon le cas) – article 120 du CDE.
c)
Les apports à des sociétés étrangères ne sont pas soumis à un droit proportionnel,
même s'ils ont pour objet des immeubles situés en Belgique. Cependant, quand il s'agit d'un
apport mixte, le droit ordinaire de transmission à titre onéreux s'applique à la partie rémunérée
autrement qu'en droits sociaux (sur ce point les sociétés étrangères sont soumises au même
régime que les sociétés belges).
55
Luc HERVE - Séminaire Stagiaires IPCF - Droits d'enregistrement et de succession
d)
L'augmentation du capital statutaire, sans apport nouveau, d'une société belge n'est
également soumise qu'au droit de 0 % (article 116 du CDE).
e)
Le partage des biens d'une société sans personnalité juridique est traité de la même
manière que le partage d'une indivision ordinaire (droit de partage de 1% sur les immeubles
situés en Belgique, sauf application de l'article 113 du CDE).
De la même manière, la cession de parts entre associés dans une société sans personnalité
juridique, relève du même régime que la cession de parts indivises entre copropriétaires.
Lorsque la cession de parts a lieu au profit d'un tiers-acquéreur (soit non encore associé, soit
déjà associé mais devenu copropriétaire de l'immeuble apporté suite à l'apport de cet
immeuble par un autre associé), l'opération s'analyse en une transmission ordinaire de parts
indivises (vente, donation, etc., de quotités indivises).
En effet, les associés d'une société sans personnalité juridique sont simplement considérés
comme propriétaires indivis des biens de la société.
f)
Les cessions de parts sociales dans une société dotée de la personnalité juridique
s'analysent en une transmission de valeurs mobilières, sans application d’un droit
proportionnel si la cession s'opère à titre onéreux.
g)
Le partage (entre les associés) des immeubles (situés en Belgique) appartenant à une
société, belge ou étrangère, dotée de la personnalité juridique est soumis au régime particulier
des articles 129 et 130 du CDE : en principe, le droit établi pour les ventes est d'application,
sauf, lorsque la société est une société en nom collectif ou en commandite simple, une SPRL
ou une société agricole, dans les deux hypothèses suivantes :
-
pour les immeubles apportés à la société, lorsqu'ils sont acquis par la personne qui
a effectué l'apport ;
pour les immeubles acquis par la société avec paiement du droit d'enregistrement
fixé pour les ventes, lorsque l'associé qui devient propriétaire de ces immeubles
faisait partie de la société au jour de l'acquisition par celle-ci.
h)
Les autres actes des sociétés ne donnent lieu qu'à la perception du droit fixe général.
F.3.
Apports à des sociétés belges
F.3.1. Apports ordinaires
97.- Depuis le 1er janvier 2006, sont assujettis à un droit de 0 % les apports à des sociétés
civiles ou commerciales ayant soit leur siège de direction effective en Belgique, soit leur siège
statutaire en Belgique et leur siège de direction effective hors du territoire des Etats membres
de l'Union européenne et ayant pour objet :
56
Luc HERVE - Séminaire Stagiaires IPCF - Droits d'enregistrement et de succession
- soit des biens meubles (article 115, al. 1er du CDE) ;
- soit des biens immeubles autres que ceux affectés ou destinés partiellement ou
totalement à l'habitation et effectués par une personne physique (article 115bis, al. 1er
du CDE).
Il n’y a pas lieu de faire de distinction entre :
- les apports de biens meubles, les apports d'immeubles visés à l'article 115bis (situés
en Belgique ou à l'étranger), les apports d'industrie et les apports de droits éventuels ou
soumis à une condition suspensive;
- les apports immédiats (transfert immédiat de propriété au profit de la société) et les
apports à terme (transfert de propriété retardé);
- les apports effectués au moment de la constitution de la société et les apports
ultérieurs (décidés au cours de l'existence de la société);
- les apports de biens étrangers (avant l'apport) à la société et les apports ayant pour
objet des créances contre la société elle-même (exemple : conversion en actions
d'obligations émises par une société anonyme).
Peu importe également que les apports se fassent en propriété ou en jouissance, ou qu'ils
soient effectués par des personnes physiques ou par des personnes morales (une autre société,
par exemple).
Le "droit d'apport" est liquidé sur le montant total des apports (article 115, al. 2 du CDE).
F.3.2. Apports mixtes
98.- L'apport est dit "à titre onéreux" ou "mixte" quand, en rémunération de son apport,
l'associé qui l'effectue reçoit non seulement des droits sociaux (actions, parts,…), mais encore
des avantages d'une autre nature, soustraits aux risques de la société.
Ces avantages peuvent consister notamment dans:
- la prise en charge par la société de dettes contractées par l'apportant;
- l'inscription en compte courant comme une dette de la société vis-à-vis de
l'apportant;
- le paiement d'une soulte, par la société à l'apportant;
- l'attribution à l'apportant d'un bien (meuble ou immeuble) de la société;
- la remise à l'apportant d'obligations émises par la société;
- la remise de dettes qu'a l'apportant vis-à-vis de la société.
En principe, l'apport mixte est imposé de la manière suivante :
a)
le "droit d'apport" n'est dû que dans la mesure où il y a attribution de droits sociaux;
b)
pour la partie à concurrence de laquelle l'apport est rémunéré autrement que par
l'attribution de droits sociaux, la convention est, dans la mesure de cette rémunération,
assujettie au droit d'enregistrement fixé pour les conventions à titre onéreux ayant pour
objet des biens de même nature que ceux apportés (article 120 du CDE).
57
Luc HERVE - Séminaire Stagiaires IPCF - Droits d'enregistrement et de succession
Ainsi :
- en cas d'apport mixte d'immeubles situés en Belgique, il est dû le droit de vente;
- en cas d'apport mixte de marchandises, il y a pas matière à perception du droit
d'enregistrement;
- en cas d'apport mixte d'un bail, d'un droit d'emphytéose ou d'un droit de superficie, le
droit prévu pour la cession de bail (0,2 %) est dû;
- etc…
F.3.3. Immeubles affectés ou destinés (partiellement ou totalement) à l'habitation
99.- L'apport par une personne physique d'immeubles affectés ou destinés, partiellement ou
totalement, à l'habitation est soumis au droit de vente de 10 %, si cet apport est fait à une
société belge, ou au droit de vente de 12,50 %, si cet apport est fait à une société étrangère si
ces immeubles sont situés en Région flamande, et au droit de vente de 12,5 %, que cet apport
soit fait à une société belge ou étrangère lorsque ces immeubles sont situés dans les Régions
wallonne et bruxelloise.
Il n'y a pas lieu d'examiner si l'immeuble est occupé à titre de logement principal ou d'appoint,
ni s'il est occupé par une famille ou par une personne seule. N'est pas relevante non plus la
question de savoir combien de temps l'immeuble a été utilisé comme habitation ou s'il servira
encore à cet usage.
Quant à l'"affectation à l'habitation", seule la situation existant au moment de l'apport est
déterminante. L'utilisation d'un immeuble comme habitation au moment de l'apport n'est
toutefois pas le seul critère déterminant. En effet, le critère de "destination à l'habitation"
renvoie à une situation future. Cette destination s'apprécie notamment en fonction de
l'aménagement naturel de l'immeuble, c.-à-d. de l'utilisation normale pour laquelle il a été
conçu.
Tant l'affectation que la destination s'apprécient au moment de l'apport. Une modification
momentanée de la destination initiale (l'habitation) n'influence en rien la perception. Sont de
même irrelevants, un changement de l'usage effectif du bien et une modification de sa
destination après l'apport.
La charge de la preuve que l'immeuble apporté répond aux conditions d'affectation ou de
destination incombe entièrement aux parties à la convention. Cette preuve peut être rapportée
par toutes voies de droit.
100.- Lorsque l’apport porte sur un immeuble à usage mixte, c’est à dire servant
partiellement à l'habitation et pour le surplus à des fins industrielles, agricoles, commerciales
ou de bureaux, il est en principe entièrement soumis au droit de vente (article 44 du CDE / du
CDE Rég. Flam. et 115bis du CDE).
Toutefois, cette règle ne s'applique pas lorsque la partie destinée à l’habitation et les autres
sont reprises séparément dans les descriptions cadastrales, et ont des désignations et des
revenus cadastraux distincts. Dans ce cas, seule la partie habitée est soumise au droit de vente
(article 169bis du CDE).
58
Luc HERVE - Séminaire Stagiaires IPCF - Droits d'enregistrement et de succession
L’article 169bis du CDE permet d’apprécier également l’affectation ou la destination de
l’immeuble par partie parcelle cadastrale, lorsque cette partie forme soit un logement séparé,
soit un département ou une division de production ou d'activité susceptibles de fonctionner
séparément, soit une entité dissociable des autres biens ou parties formant la parcelle.
F.3.4. Base imposable
101.- Les règles suivantes sont d'application :
a)
En cas d'apport ordinaire visé aux articles 115, 115bis et/ou 118 du CDE, la base
imposable consiste dans la valeur des droits sociaux (actions, parts, etc.) attribués à
l'apportant, en contrepartie de son apport, avec comme minimum la valeur vénale des biens
apportés (article 119 du CDE).
b)
Lors de la constitution d'une société, la valeur des actions ou parts ne peut être
inférieure à leur valeur nominale ou au montant nominal du capital qu'elles représentent. Il en
est de même lors de l'augmentation du capital d'une société.
On peut donc dire que le "droit d'apport" est toujours dû, au minimum, sur le montant du
capital social (en cas de constitution de société) ou sur le montant de l'augmentation du capital
(en cas d'apport ultérieur).
Mais il peut arriver que la valeur réelle des actions ou parts soit supérieure à leur valeur
nominale. Dans ce cas c'est la valeur réelle des actions ou parts qui doit être prise en
considération pour la perception du "droit d'apport".
c)
En cas d'apport de numéraire, la base imposable se détermine exclusivement par le
montant des sommes qui font l'objet de l'apport, sans qu'il faille se préoccuper de la valeur des
droits sociaux attribués en contrepartie.
d)
Quand l'apport de biens en nature (autre que du numéraire) est rémunéré par des
actions ou parts et aussi par des titres non représentatifs d'une quote-part du capital social
(parts de fondateurs ou parts bénéficiaires, etc.), la valeur de ces titres doit être ajoutée, pour
la perception, à la valeur des actions ou parts.
e)
Si les stipulations de l'acte ne permettent pas de déterminer la valeur des droits sociaux
attribués, la base de perception doit être déterminée par une déclaration complétive (article
168 du CDE). Si la valeur vénale des biens apportés est supérieure à celle des droits sociaux
attribués, cette valeur vénale doit également être indiquée dans une déclaration complétive.
f)
Les apports ayant pour objet des choses autres que du numéraire ou des biens en
nature (par exemple, les apports d'industrie, de crédit commercial ou de caution personnelle)
59
Luc HERVE - Séminaire Stagiaires IPCF - Droits d'enregistrement et de succession
sont évalués par comparaison avec les apports de numéraire ou de biens en nature, eu égard
aux parts respectives des apportants dans les bénéfices (article 119, al. 2 du CDE). Cette
méthode d'évaluation constitue une présomption légale irréfragable.
g)
En cas d'apport de l'usufruit d'immeubles situés en Belgique ou de la nue-propriété de
pareils biens, la valeur vénale est déterminée conformément aux articles 47 à 50 du CDE.
h)
En cas d'apport mixte, la question de la base de perception se règle de la façon
suivante :
- le "droit d'apport" est dû sur base de la valeur des droits sociaux attribués à
l'apportant, avec comme minimum la valeur vénale des biens, déduction faite des
charges (autres que l'attribution des droits sociaux) supportées par la société qui reçoit
l'apport (article 119 du CDE);
- le droit de transmission à titre onéreux, éventuellement dû, se perçoit exclusivement
sur la valeur des charges (autres que l'attribution des droits sociaux) supportées par la
société qui reçoit l'apport.
Par conséquent, si la valeur vénale des biens qui font l'objet de l'apport mixte est supérieure
au total formé par la valeur des droits sociaux et celle des autres avantages attribués à
l'apportant (en d'autres termes : si la valeur vénale des biens est supérieure à leur valeur
conventionnelle), la différence ne peut être assujettie qu'"au droit d'apport".
G.
Les donations
G.1.
Le donateur a sa résidence fiscale en Région Wallonne ou en Région de
Bruxelles-Capitale
102.- En vertu des articles 131 et 159, 7° du CDE, tels qu’applicables dans les Régions
concernées, le droit proportionnel de donation frappe, avec un tarif progressif, les donations
entre vifs d’immeubles sis en Belgique et de biens meubles.
Ce droit proportionnel s’applique sur la valeur vénale des biens faisant l’objet de la donation.
Cette valeur vénale doit faire l’objet d’une déclaration des parties. La valeur vénale de
l’usufruit et de la nue-propriété d’un immeuble est déterminée de la même manière que dans
le cas d’une vente.
Le régime d’imposition est le suivant :
a)
Le droit de donation est progressif par tranches. Afin d’éviter le recours à des
donations successives visant à éluder la progressivité de l’impôt, l’article 137 du CDE prévoit
que la base imposable de la dernière donation intervenue est ajoutée à la base des droits
perçus sur les donations enregistrées entre les mêmes parties pendant les trois dernière années,
en ce qui concerne les donations soumises au droit de l'article 131 ou de l'article 131ter du
CDE.
60
Luc HERVE - Séminaire Stagiaires IPCF - Droits d'enregistrement et de succession
b)
Le tarif régionalisé dépend de la résidence fiscale du donateur.
c)
Le tarif dépend du lien de parenté ou d’alliance.
d)
Une réduction est applicable si le donataire a, au jour de la donation, au moins trois
enfants n’ayant pas atteint l’âge de 21 ans.
e)
L’article 140 du CDE organise un régime de faveur au bénéfice de certaines donations
(exemple : les donations aux ASBL).
f)
Quant aux articles 140 bis et suivants du CDE, ils prévoient un taux réduit subordonné
à la réunion de certaines conditions, pour les donations d'"entreprises". Ces
dispositions seront examinées ultérieurement.
g)
Il existe un régime particulier pour les donations entre vifs de biens meubles (article
131bis du CDE en Région wallonne et article 131, § 2 du CDE en Région bruxelloise),
subordonné à la réunion de certaines conditions, avec application d'un taux de 3 %
pour les donations entre époux, en ligne directe et entre cohabitants, de 5 % pour les
donations entre frères et sœurs, et entre oncles ou tantes et neveux ou nièces
(uniquement pour la Région wallonne), et de 7 % pour les donations à d'autres
personnes.
h)
Enfin, il existe un régime particulier pour les donations en ligne directe, entre époux et
entre cohabitants légaux, de la part en pleine propriété du donateur dans un immeuble
destiné en tout ou en partie à l'habitation, qui est situé en Région wallonne ou en
Région bruxelloise, et dans lequel le donateur a sa résidence principale depuis cinq ans
au moins à la date de la donation (article 131ter du CDE en Région wallonne et article
131bis du CDE en Région bruxelloise).
G.2.
Le donateur a sa résidence fiscale en Région Flamande
103.- En vertu des articles 131 et 159, 7° du CDE, le droit proportionnel de donation frappe,
avec un tarif progressif, les donations entre vifs d’immeubles sis en Belgique. Tant pour les
biens meubles que pour les biens immeubles, la base imposable est égale à la valeur vénale
des biens faisant l’objet de la donation, sous déduction des charges.
Pour les donations d’"entreprises", un taux de 2 % est applicable en Région flamande, à
condition que ces donations répondent à des conditions particulières. Ces dispositions seront
examinées ultérieurement.
Il existe également un régime particulier pour les donations entre vifs de biens meubles avec
application d'un taux de 3 % pour les donations en ligne directe, entre époux et entre
cohabitants et de 7 % pour les donations à d'autres personnes.
Enfin, il existait un régime particulier temporaire, venu à échéance le 31 décembre 2009, pour
les donations de parcelles destinées à la construction d'habitations selon les prescriptions
d'urbanisme.
61
Luc HERVE - Séminaire Stagiaires IPCF - Droits d'enregistrement et de succession
H.
Les jugements et arrêts
H.1.
Catégories de droits proportionnels
104.- Il existe deux catégories distinctes de droits proportionnels :
a)
un droit de condamnation, c.-à-d. un droit sur les condamnations, liquidations et
collocations de sommes et valeurs mobilières (articles 142 à 145 du CDE), fixé à 3% (article
142 du CDE).
Le droit s’applique :
- en cas de condamnation de sommes ou valeurs mobilières, sur le montant cumulé, en
principal, des condamnations prononcées à charge d'une même personne, abstraction
faite des intérêts dont le montant n'est pas fixé par le juge;
- en cas de liquidation de sommes ou valeurs mobilières, sur le montant cumulé, en
principal, des sommes mises en mouvement par le jugement portant liquidation à
charge d'une même personne, abstraction faite des intérêts dont le montant n'est pas
fixé par le juge et des dépens;
- en cas de collocation, sur le montant total des sommes distribuées aux créanciers
d'une même personne (article 142, alinéa 2 du CDE).
Si une décision judiciaire contient plusieurs condamnations ou liquidations sujettes au droit,
ces diverses condamnations ou liquidations sont réunies pour fixer la base imposable, même
si elles sont indépendantes l'une de l'autre, mais pour autant qu'elles soient établies à charge
d'une même personne.
b)
un droit de titre applicable, lorsqu’un jugement ou un arrêt fait titre d'une convention
translative ou déclarative de propriété ou d'usufruit d'immeubles situés en Belgique, qui n'a
pas subi l'impôt y afférent (articles 146 à 148 du CDE).
Le droit de titre se perçoit suivant les règles (taux, base, réductions ou exemptions
éventuelles) qui gouvernent les conventions immobilières.
H.2.
Jugements et arrêts visés
105.- Sont exclusivement visés :
a)
les jugements et arrêts rendus en Belgique ;
b)
les exequaturs donnés par les tribunaux belges soit à des sentences arbitrales, soit à des
décisions judiciaires rendues à l'étranger ;
c)
les décisions judiciaires rendues en pays étranger, quand ces décisions sont exécutoires
de plein droit en Belgique.
62
Luc HERVE - Séminaire Stagiaires IPCF - Droits d'enregistrement et de succession
SECTION 3.
DROITS FIXES SPECIFIQUES
106.- Les droits fixes spécifiques sont ceux dont le montant est une somme fixe qui varie
d'après la nature de l'opération imposable.
Donnent ainsi lieu à la perception d'un droit fixe spécifique :
1°
les actes de protêts (5 €, article 157 du CDE);
2°
les lettres patentes de noblesse (en principe : 740 €, articles 248 et suivants du CDE) ;
3°
les autorisations de changement ou d'adjonction de nom ou de prénoms (49, 490 ou
740 €, selon le cas, articles 249 à 254 du CDE);
4°
les donations, y compris les apports à titre gratuit, faites aux fondations privées et
d'utilité publique ainsi qu'à certaines personnes morales, lorsque le donateur est luimême l'une de ces fondations ou personnes morales (100 €, article 140, 3° du CDE).
SECTION 4.
DROIT FIXE GENERAL
107.- Le droit fixe général (montant égal à 25 €) s'applique à tous les actes ou écrits
constatant des opérations autres que celles soumises aux droits proportionnels ou aux droits
fixes spécifiques.
*
*
*
63
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CHAPITRE V.
RESTITUTIONS
SECTION 1.
A.
GENERALITES
Principe
108.- L'article 208 du CDE prévoit ce qui suit :
"Les droits régulièrement perçus ne peuvent être restitués, quels que soient les événements
ultérieurs, sauf les cas prévus par le présent titre".
B.
Exceptions au regard des droits
109.- La restitution des droits d'enregistrement est exceptionnellement permise, notamment
dans les cas suivants :
a)
il y a lieu à restitution des droits, lorsque ceux-ci n'ont pas été régulièrement perçus
(article 208 du CDE a contrario);
b)
si, après la fixation du revenu cadastral du bien, une réduction du droit est accordée en
matière de petites propriétés rurales et d'habitations modestes (articles 56 à 58 du
CDE);
c)
s’il est octroyé une réduction du droit de donation en cas de naissance, après
l'enregistrement, d'un enfant du donataire conçu avant l'exigibilité de l'impôt (article
136, alinéa 3 du CDE);
d)
si les parties avaient omis de mentionner, dans l'acte ou la déclaration, soit que la
convention avait déjà subi l'impôt, soit que les conditions auxquelles est subordonnée
une exemption ou une réduction de droit sont réunies, sauf si l'existence de cette
mention constitue une condition formelle du bénéfice de la faveur fiscale (article 209,
1° du CDE);
e)
les droits proportionnels perçus soit du chef d'un acte qui a été déclaré faux, soit du
chef d'une convention dont la nullité ou la rescision est prononcée ou constatée, par un
jugement ou un arrêt passé en force de chose jugée doivent être restitués (article 209,
2° du CDE / Rég. Wall.);
f)
de la même manière, les droits proportionnels perçus du chef d'une convention dont la
résolution ou la révocation a été prononcée ou constatée par un jugement ou un arrêt
passé en force de chose jugée, devront également être restitués, à condition qu'il
résulte de la décision que la convention n'est pas antérieure de plus d'un an à une
demande en résolution, en révocation ou en constatation de résolution ou de
révocation, même si elle a été introduite devant un juge incompétent (article 209, 3°
du CDE / Rég. Wall.);
64
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g)
les droits proportionnels perçus du chef d'un acte juridique fait par une personne
morale et infirmé par l'autorité supérieure peuvent être restitués en application de
l'article 209, 4° du CDE;
h)
l'article 209, 5° du CDE permet la restitution du droit d'apport perçu sur certaines
augmentations de capital ;
i)
en cas d'infirmation totale ou partielle d'un jugement ou arrêt par une autre décision
judiciaire passée en force de chose jugée, des droits proportionnels perçus sur la
décision infirmée feront l’objet d’une restitution totale ou partielle (article 210 du
CDE);
j)
par application de l'article 212 du CDE, il y a une restitution partielle (trois cinquièmes
en Région wallonne et en Région flamande; 36 % en Région de Bruxelles-Capitale) du
droit fixé par l'article 44 du CDE payé pour l'achat d'un immeuble, en cas de revente
par acte authentique dans les deux ans à compter de la date de l'acte authentique
d'acquisition.
Nous examinerons ci-après quelques unes des hypothèses qui précèdent.
C.
Restitution des amendes
110.- En ce qui concerne les amendes éventuellement appliquées, la restitution n'est possible
que dans les cas suivants :
a)
quand la loi a été mal appliquée, soit que les amendes seules aient été mal calculées
par le receveur, soit qu'elles aient été liquidées proportionnellement à des droits
irrégulièrement perçus et restituables;
b)
quand il s'agit d'amendes payées proportionnellement à des droits qui sont restituables,
soit par application de l'article 209, 1° du CDE, soit pour le motif que l'acte a été
déclaré faux par un jugement ou arrêt passé en force de chose jugée;
c)
quand une remise ou réduction est accordée pour une amende déjà payée.
D.
Bénéficiaires de la restitution et prescription
111.- Sauf exceptions légales, la restitution a lieu au bénéfice de la personne qui a effectué
le paiement.
La restitution peut toutefois avoir lieu au profit de celui qui doit supporter, en définitive, la
charge de l'impôt, s'il établit avoir désintéressé la personne qui a payé ou s'il rapporte le
consentement écrit de cette dernière.
65
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Lorsque la restitution résulte d’un événement ultérieur qui est le fait de l'une des parties à
l'acte, la restitution est faite à cette personne sans exiger la justification qu'elle a remboursé
celui qui a payé l'impôt.
Le délai de prescription de l'action en restitution des droits, intérêts et amendes est en principe
de deux ans, à compter du jour où l'action est née (art. 215 du CDE).
SECTION 2.
A.
EXAMEN DE QUELQUES HYPOTHESES DE RESTITUTION
Perception irrégulière (article 208 du CDE)
112.- L'article 208 du CDE autorise implicitement la restitution lorsque la perception n'est
pas régulière, c'est-à-dire lorsque la loi a été mal appliquée par le receveur à l'acte, la
convention ou la déclaration présentée à la formalité. Il y a alors matière à restitution non
seulement des droits, mais aussi des amendes.
Au contraire, les erreurs commises par les parties, dans l'acte ou dans une déclaration
complétive (par exemple, une erreur d'appréciation quant à la valeur des biens), n'autorisent,
en principe, aucune restitution.
Par exception toutefois, l'administration admet que la restitution peut être accordée quand il
est établi, de manière indiscutable, que les parties ont simplement commis une erreur
matérielle. En d'autres termes, le texte de l'acte ou de la déclaration présenté à la formalité ne
correspond alors clairement pas à ce que les parties ont voulu écrire.
B.
Erreur spécifique des parties (article 209, 1° du CDE / Rég. Wall.)
113.- "Sont sujets à restitution :
1° les droits perçus à défaut par les parties d'avoir mentionné dans l'acte ou la déclaration:
a) que la convention avait déjà subi l'impôt;
b) que les conditions auxquelles est subordonnée une exemption ou une réduction de droits
sont réunies, à moins que la loi n'ait fait de l'existence de cette mention une condition
formelle du bénéfice de la faveur fiscale.
(…)
La restitution s'effectue sous déduction, le cas échéant, du droit fixe général".
a)
La première hypothèse de restitution visée à l'article 209, 1° du CDE est celle où les
parties ont omis de mentionner dans l'acte ou la déclaration que la convention avait déjà subi
l'impôt, de manière telle que cette convention a été imposée une seconde fois : ce second
impôt est restituable (sauf à retenir, s'il y a lieu, le droit fixe général).
Le cas échéant, la restitution du montant payé en trop pour droit entraîne restitution du
montant payé en trop pour amende proportionnelle au droit.
66
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b)
La seconde hypothèse de restitution prévue à l'article 209, 1° du CDE vise notamment
les cas suivants:
- acte de vente de l'usufruit au nu-propriétaire (enregistré contre paiement du droit
proportionnel) : il n'a pas été indiqué que le nu-propriétaire avait, lors de l'acquisition
de son droit, payé l'impôt sur la pleine propriété (art. 159, 3° du CDE);
- cession de parts indivises dans un immeuble consentie par un acte qui ne précise pas
que la cession est faite à un copropriétaire, de manière telle qu'il est perçu le droit de
vente alors que le droit réellement dû est fixé par l'article 109 du CDE.
C.
Acte déclaré faux et nullité ou rescision prononcée ou constatée par décision
judiciaire (article 209, 2° du CDE / Rég. Wall.)
114.- "Sont sujets à restitution :
2° les droits proportionnels perçus soit du chef d'un acte qui a été déclaré faux, soit du chef
d'une convention dont la nullité ou la rescision est prononcée ou constatée par un jugement
ou arrêt passé en force de chose jugée.
(…)
La restitution s'effectue sous la seule déduction, le cas échéant, du droit fixe spécifique de 10
euros prévu par l'article 159bis ".
a)
L'application de l'article 209, 2° du CDE suppose la réunion des conditions suivantes :
1°
un acte ou une convention (vente, bail, donation, etc.) enregistré contre paiement du
droit proportionnel (l'article 209, 2° du CDE n'est pas applicable au droit fixe
spécifique et au droit fixe général);
2°
un jugement ou arrêt passé en force de chose jugée, peu importe le temps qui s'est
écoulé entre la date de l'acte ou de la convention et celle de la demande en justice qui a
donné lieu au jugement ou à l'arrêt;
3°
un jugement ou arrêt prononcé entre les parties à l'acte ou à la convention;
4°
un jugement ou arrêt qui déclare, prononce ou constate :
- soit que l'acte est faux (le mot acte est employé ici dans le sens d'écrit ; l'article 209
2° du CDE s'applique notamment lorsque la décision judiciaire reconnaît que les
signatures apposées sur l'écrit sont fausses) ;
- soit que la convention est mise à néant pour cause de nullité ou de rescision, peu
importe le caractère ou la cause de la nullité ou de la rescision.
b)
La restitution visée à l’article 209, 2° du CDE ne peut être appliquée lorsque la
décision judiciaire se borne à constater que la convention est simulée (fausse) et doit être
traitée d'après son caractère véritable, ou que la preuve de l'existence de la convention n'est
pas rapportée, de sorte qu'il n'y a alors pas "annulation" ou "rescision".
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D.
Résolution ou révocation prononcée ou constatée par décision judiciaire
(article 209, 3° du CDE / Rég. Wall.)
115.- "Sont sujets à restitution :
3° les droits proportionnels perçus du chef d'une convention dont la résolution ou la
révocation a été prononcée ou constatée par un jugement ou un arrêt passé en force de chose
jugée, à condition qu'il résulte de la décision que la convention n'est pas antérieure de plus
d'un an à une demande en résolution, en révocation ou en constatation de résolution ou de
révocation, même si elle a été introduite devant un juge incompétent.
(…)
La restitution s'effectue sous la seule déduction, le cas échéant, du droit fixe spécifique de 10
euros prévu par l'article 159bis ".
a)
L'application de l'article 209, 3° CDE suppose la réunion des conditions suivantes :
1°
une convention (vente, bail, donation, etc.) enregistrée contre paiement du droit
proportionnel;
2°
un jugement ou arrêt passé en force de chose jugée;
3°
un jugement ou arrêt prononcé entre les parties à l'acte ou à la convention;
4°
un jugement ou arrêt qui prononce ou constate la résolution ou la révocation de la
convention;
5°
un jugement ou arrêt qui statue sur une demande en résolution ou en révocation qui
n'est pas postérieure de plus d'un an à la convention visée par la demande, même si
elle a été introduite devant un juge incompétent;
b)
La restitution visée à l’article 209, 3° CDE ne peut être appliquée lorsque la résolution
amiable d'une convention a été décidée entre parties, sans jugement ou arrêt, et la transaction
exécutée.
E.
Réduction du prix de vente prononcée par décision judiciaire pour cause de
garantie du vendeur contre l'éviction et les vices cachés
(article 209, 3bis° du CDE / Rég. Wall.)
116.- Les droits proportionnels de mutation perçus conformément aux articles 44 à 71, 72,
alinéa 2, 74 et 75 du CDE sont sujets à restitution lorsque les conditions suivantes sont
réunies :
68
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1°
une convention qui fait l'objet d'une réduction du prix de vente pour cause de garantie
du vendeur en application de l'article 1637 (garantie contre l'éviction) et de l'article
1644 (garantie contre les vices cachés) du Code civil;
2°
un jugement ou arrêt passé en force de chose jugée prononçant la réduction du prix de
vente;
3°
un jugement ou arrêt prononcé entre les parties à l'acte ou à la convention;
4°
un jugement ou arrêt qui statue sur une demande principalement ou subsidiairement
fondée sur les articles 1637 et 1644 du Code civil, qui n'est pas postérieure de plus
d'un an à la convention visée par la demande, même si elle a été introduite devant un
juge incompétent.
La restitution est égale
d'achat remboursée par
puisse avoir pour effet
inférieure à la valeur
l'acquisition.
F.
au montant des droits proportionnels acquittés sur la partie du prix
le vendeur ou ses ayants droits, sans toutefois que cette restitution
que le droit de mutation soit perçu sur une base imposable totale
vénale de l'immeuble, eu égard à son état réel au moment de
Annulation, rescision, résolution, ou résolution amiable entre parties
(article 209, 3ter ° du CDE / Rég. Wall.)
117.- Les droits proportionnels perçus conformément aux articles 44 à 71, 72, alinéa 2, 74 et
75 (droit de mutation), 109 à 114 (droit de partage), 131 à 140octies (droit de donation), sont
sujets à restitution lorsque les conditions suivantes sont réunies :
1°
une convention qui fait l'objet d'une annulation, rescision, résolution ou résiliation
convenue amiablement entre parties;
2°
une convention d'annulation, rescision, résolution ou résiliation qui est présentée à
l'enregistrement au plus tard en même temps que la demande de restitution;
3°
une convention annulée, rescindée, résolue ou résiliée qui n'a pas encore été constatée
par un acte authentique;
4°
une convention annulée, rescindée, résolue ou résiliée qui n'est pas antérieure de plus
d'un an à la conclusion de la convention d'annulation, rescision, résolution ou
résiliation.
La restitution s'effectue sous la seule déduction, le cas échéant, du droit fixe spécifique de 10
euros prévu par l'article 159bis du CDE.
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G.
Condition résolutoire opérant de plein droit
(article 209, 3quater ° du CDE / Rég. Wall.)
118.- Les droits proportionnels perçus conformément aux articles 44 à 71, 72, alinéa 2, 74 et
75 (droit de mutation), 109 à 114 (droit de partage), 131 à 140octies (droit de donation), sont
également sujets à restitution lorsque les conditions suivantes sont réunies :
1°
une convention dont la résolution résulte de l'application d'une condition résolutoire
opérant de plein droit;
2°
la réalisation de la condition résolutoire qui est constatée dans un acte (authentique ou
non) signé par toutes les parties et présenté à l'enregistrement au plus tard en même
temps que la demande de restitution;
3°
une convention résolue qui n'est pas antérieure de plus d'un an à la date de réalisation
de la condition résolutoire.
La restitution s'effectue sous la seule déduction, le cas échéant, du droit fixe spécifique de 10
euros prévu par l'article 159bis du CDE.
H.
Décision infirmée par l'autorité supérieure
(article 209, 4° du CDE / Rég. Wall.)
119.- Il y a restitution des droits proportionnels perçus du chef d'un acte juridique fait par
une personne morale et infirmé par l'autorité supérieure.
La restitution s'effectue sous déduction, le cas échéant, du droit fixe général.
I.
Demande de taux réduit en matière de donation d'entreprises
(article 209, 7° du CDE / Rég. Wall.)
120.- Il y a restitution du droit proportionnel de donation perçu à défaut pour le donataire
d'avoir satisfait aux obligations prévues à l'article 140bis, § 2, 3° du CDE, dans le corps de
l'acte ou au pied de l'acte, lorsque les conditions suivantes sont réunies :
1°
dans le cas prévu à l'article 140bis, § 2, 3°, dernier alinéa du CDE, le donataire qui
introduit une demande pour bénéficier du taux réduit de l'article 140bis du CDE;
2°
une demande qui est introduite dans les deux ans de présentation de l'acte à
l'enregistrement;
3°
une demande qui contient la déclaration du donataire que les conditions de l'article
140bis du CDE sont réunies et qui comporte, en annexe, la déclaration signée et les
pièces devant l'accompagner
70
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J.
Décision judiciaire infirmée
(article 210 du CDE)
121.- "En cas d'infirmation totale ou partielle d'un jugement ou arrêt par une autre décision
judiciaire passée en force de chose jugée, les droits proportionnels perçus sur la décision
infirmée sont sujets à restitution, en tout ou en partie.
Le droit est restitué intégralement si les sommes cumulées faisant l'objet des condamnations,
des liquidations ou des collocations pour lesquelles la perception a été effectuée, sont
ramenées à un montant qui ne dépasse pas celui fixé par l'article 143, dernier alinéa".
Il y a infirmation d'une décision judiciaire (jugement ou arrêt), lorsque cette décision est mise
à néant, ou tout au moins modifiée, par une autre décision judiciaire (d'une juridiction
supérieure ou de la même juridiction), agissant avec effet rétroactif, qui est rendue sur base
d'un recours (opposition, appel, pourvoi en cassation), exercé par l'une des parties au procès
contre l'autre conformément aux règles de la procédure.
L'article 210 du CDE s'applique tant au droit de titre, perçu sur base de la convention dont la
décision judiciaire constate l'existence, qu'au droit perçu pour condamnation, liquidation ou
collocation.
Cette disposition ne vise toutefois que le droit. Elle n'autorise pas la restitution des amendes
perçues pour enregistrement tardif de la convention dont cette décision consacre l'existence
(article 41, 1° du CDE), pour présentation tardive à l'enregistrement de la décision judiciaire
(article 43 du CDE) ou pour défaut de paiement des droits et amendes dans le mois de l'envoi
de l'avis de paiement.
K.
Revente d'immeuble
(article 212 du CDE)
122.- "En cas de revente d'un immeuble que le vendeur ou ses auteurs ont acquis par un
acte ayant subi le droit fixé par l'article 44, ce droit est restitué au revendeur à concurrence
des trois cinquièmes (36 % en Région de Bruxelles-Capitale) si la revente est constatée par
un acte authentique passé dans les deux ans de la date de l'acte authentique d'acquisition.
Lorsque l'acquisition ou la revente a eu lieu sous une condition suspensive, le délai de revente
se calcule en fonction de la date de la réalisation de cette condition (…)".
a)
La restitution des trois cinquièmes du droit d'enregistrement requiert la réunion des
conditions suivantes :
1°
une acquisition constatée par acte authentique de biens ayant subi le droit ordinaire
fixé pour les ventes, peu importe à cet égard qu'il s'agisse d'une véritable vente en droit
civil ou d'une opération imposée comme vente par l'effet d'une fiction ou d'une
présomption fiscale;
71
Luc HERVE - Séminaire Stagiaires IPCF - Droits d'enregistrement et de succession
2°
une revente totale ou partielle du bien acquis : cette condition n'est, par conséquent,
pas remplie quand le bien acquis est retransmis par partage, échange ou donation ;
3°
une revente faite par l'acquéreur ou ses ayants droits;
4°
une revente constatée par un acte authentique dans les deux ans de la date de l'acte
authentique d'acquisition.
b)
Le délai de deux ans est calculé d'après les règles du droit commun. Le dies a quo
(jour qui sert de point de départ du délai) n'est pas compté, mais bien le jour de la revente
(dies ad quem).
Le délai n'est pas susceptible de prorogation, même s'il expire un samedi, un dimanche ou un
jour férié légal, ni même en cas de force majeure.
c)
Lorsque l'acquisition ou la revente a lieu sous condition suspensive, le délai se calcule
sur base de la date où la condition est réalisée (article 212, alinéa 2 du CDE).
Si la convention assujettie à une condition suspensive est constatée dans un acte sous seing
privé, le délai ne commence à courir qu'à compter de la date de l'acte authentique qui constate
que la condition est remplie.
*
*
*
72
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CHAPITRE VI.
AMENDES
SECTION 1.
PRINCIPES
123.- Les infractions aux dispositions du CDE entraînent l’application de peines
pécuniaires : les amendes fiscales.
Des sanctions pénales peuvent également être appliquées en cas de fraude.
SECTION 2.
REGLES DE PERCEPTION
124.- Les règles générales suivantes sont applicables :
a)
Les amendes sont établies par le Code des droits d’enregistrement et sont dues de plein
droit par le seul fait de l’infraction.
b)
Les amendes sont dues même en l’absence de toute intention frauduleuse dans le chef
du contrevenant.
c)
Dans les limites prévues par la loi, le montant des amendes fiscales proportionnelles et
des accroissements est fixé par un barème (article 219 alinéa 5 du CDE - A.R. du 30
janvier 1987) ; ce barème n’est cependant pas applicable au montant des amendes
proportionnelles prévues par les articles 203, alinéa 1 et 204 du CDE (fraude).
d)
Le décès du contrevenant est sans incidence sur l’exigibilité de l’amende.
SECTION 3.
A.
TYPES D'AMENDES
Amende pour enregistrement tardif
125.- Les différentes hypothèses dans lesquelles une amende pour enregistrement tardif est
due sont les suivantes:
a)
"Encourent indivisiblement une amende égale au montant des droits, sans qu'elle
puisse être inférieure à 25 EUR :
1° les personnes qui n'ont pas fait enregistrer dans les délais prescrits, les actes ou
déclarations qu'elles sont tenues de soumettre à la formalité;
2° les personnes désignées à l'article 37 qui n'ont pas fait, dans le délai qui leur est
assigné à cet effet, la consignation prévue par l'article 36;
73
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3° les personnes désignées à l'article 35, alinéas 3 et 4, qui n'ont pas fait, dans le délai
prescrit, le paiement prévu par l'alinéa 5 dudit article" (article 41 du CDE).
L'amende prévue à l'article 41, 1° du CDE est due même quand il s'agit d'actes enregistrables
gratuitement. Elle s'élève, dans ce cas, au minimum de 25,00 EUR.
Quand un acte sous seing privé portant vente sous condition suspensive d'un immeuble situé
en Belgique n'est pas présenté à la formalité de l'enregistrement dans le délai de quatre mois
après l'accomplissement de la condition, l'amende prévue à l'article 41, 1°du CDE est due.
b)
"Les personnes qui n'ont pas acquitté, de la manière et dans le délai prescrits, les
droits dus pour les actes dispensés de la formalité de l'enregistrement, qui n'ont pas déposé
une copie desdits actes ou qui ne se sont pas conformés aux règles complémentaires fixées
par le Roi en exécution de l'article 8bis, encourent indivisiblement une amende de 25 à 250
EUR par infraction.
Le montant de l'amende est fixé, dans ces limites, par le directeur régional de la taxe sur la
valeur ajoutée, de l'enregistrement et des domaines.
Les personnes visées à l'alinéa 1er encourent indivisiblement une amende égale au droit éludé
pour tout acte auquel elles ont appliqué à tort la dispense de la formalité prévue à l'article
8bis" (article 41bis du CDE).
c)
"Il est encouru une amende de 25 EUR par les notaires et huissiers de justice, pour
toute contravention à l'article 26" (article 42 du CDE).
d)
"Encourent une amende de 25 EUR par contravention les greffiers qui n'ont pas fait
enregistrer dans le délai prescrit les arrêts et jugements qu'ils sont tenus de soumettre à la
formalité" (article 43 du CDE).
B.
Amende pour insuffisance d’estimation
126.- Lorsque l’insuffisance d’estimation porte sur des biens sujets à une expertise de
contrôle, et que l'insuffisance constatée atteint ou dépasse le huitième du prix énoncé ou de la
valeur déclarée, l'acquéreur encourt une amende égale au droit éludé (article 201 du CDE).
Par contre, lorsqu'il n'y a pas matière à expertise et qu'une estimation faite pour permettre la
liquidation des droits est reconnue insuffisante, le droit éludé est dû indivisiblement par les
auteurs de l'estimation. Ceux-ci encourent en outre indivisiblement une amende égale au droit
supplémentaire, si l'insuffisance atteint ou dépasse le huitième de ladite estimation (article
202, alinéa 1er du CDE).
74
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Dans le premier cas (expertise), l'amende n'est due que par l'acquéreur des biens. Dans le
second cas (absence d'expertise), l'amende est due par les auteurs de l'estimation, plus
précisément, par toutes les parties responsables de l'estimation, notamment l'acquéreur et le
cédant.
Toute autre inexactitude (autre qu'une insuffisance d'estimation) constatée dans les éléments
fournis par une déclaration insérée dans le corps ou au pied de l'acte pour permettre la
liquidation de l'impôt, est punie d'une amende égale au droit éludé, outre le paiement de ce
droit, le tout indivisiblement à charge des auteurs de ladite déclaration (article 202, alinéa 2 du
CDE).
C.
Amende pour dissimulation du prix ou des charges
127.- En cas de dissimulation au sujet du prix et des charges ou de la valeur conventionnelle,
il est dû individuellement par chacune des parties contractantes une amende égale au droit
éludé. Celui-ci est dû indivisiblement par toutes les parties (article 203, alinéa 1er du CDE).
Cette disposition vise tous les contrats, qu'ils portent ou non sur la propriété ou l'usufruit
d'immeubles situés en Belgique, qu'il s'agisse d'actes sous seing privé ou d'actes authentiques.
Elle s'applique sans qu'il faille distinguer selon que la dissimulation concerne une partie du
prix proprement dit, une charge à ajouter au prix pour la perception ou tout autre élément de
la valeur stipulée conventionnellement par les parties.
La preuve de la dissimulation incombe à l'administration, étant entendu toutefois que celle-ci
peut recourir à toutes voies de droit, témoignages et présomptions compris, à l’exception du
serment.
Dès que la preuve du fait matériel de la dissimulation de prix dans l'acte notarié est faite, les
parties contractantes à cet acte notarié sont de plein droit tenues indivisiblement au paiement
des droits éludés par le fait de la dissimulation de prix et chacune des parties est redevable
d'une amende égale au droit éludé. La bonne ou la mauvaise foi dans le chef de certaines
parties contractantes est sans influence.
D.
Amende pour simulation
128.- Lorsque la convention constatée dans un acte n'est pas celle qui a été conclue entre les
parties ou que, s'agissant d'une convention visée à l'article 19, 2° ou 5°, l'acte est incomplet ou
inexact, en ce sens qu'il ne révèle pas tous les éléments de cette convention, il est dû
individuellement par chacune des parties contractantes une amende égale au droit éludé.
Celui-ci est dû indivisiblement par toutes les parties (article 204 du CDE).
75
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a)
L'article 204 du CDE est de stricte application et il vise deux situations biens
distinctes:
1° la convention réellement intervenue est autre que celle qui a été constatée dans
l'acte présenté à la formalité, en manière telle qu'un droit inférieur a été perçu;
2° l'acte présenté à la formalité révèle la convention réellement conclue, mais d'une
manière incomplète ou inexacte afin de payer moins de droits d'enregistrement ; dans
cette hypothèse, l'article 204 du CDE ne s'applique toutefois que lorsqu'il s'agit d'une
convention visée à l'article 19, 2°ou 5° du CDE, c'est-à-dire une convention translative
ou déclarative de propriété ou d'usufruit d'immeubles situés en Belgique, ou d'un
apport à une société belge possédant la personnalité juridique.
b)
La preuve de la simulation incombe à l'administration, étant entendu toutefois que
celle-ci peut recourir à toutes voies de droit, témoignages et présomptions compris, à
l’exception du serment.
Pour le recouvrement des droits dus en cas de simulation, le délai de prescription est de
quinze ans, et il commence à courir à compter du jour où l’action est née (article 214, alinéa 1,
7° du CDE).
E.
Cumul d’amendes
129.- Il peut arriver qu'un même acte donne lieu à plusieurs amendes : enregistrement tardif,
insuffisance d'estimation, dissimulation de prix ou simulation.
Il faut alors tenir compte des règles suivantes :
a)
l'amende due pour enregistrement tardif se détermine exclusivement d'après le montant
des droits dus au moment de l'enregistrement de l'acte (donc abstraction faite de
l'insuffisance, de la dissimulation ou de la simulation);
b)
le montant des amendes pour dissimulation de prix n'est pas diminué par le fait qu'une
insuffisance a antérieurement été relevée;
c)
le montant des amendes pour simulation est calculé en fonction du montant des droits
supplémentaires qui auraient été exigibles si les parties avaient déclaré la valeur réelle
dans l'acte;
d)
le montant de l'amende pour insuffisance d'estimation est établi en fonction du
montant des droits supplémentaires qui auraient été exigibles si l'acte avait constaté la
convention sans simulation.
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CHAPITRE VII.
PRESOMPTIONS LEGALES
SECTION 1.
INTRODUCTION
130.- Dans les hypothèses où les personnes intéressées ne satisfont pas aux obligations que
le CDE leur impose, l'administration dispose du moyen d'obtenir le paiement forcé des droits
dus et des amendes encourues, en recourant à l'action par voie de contrainte (article 220 du
CDE).
Le recouvrement par voie de contrainte suppose que l'exigibilité des sommes réclamées soit
préalablement démontrée.
Conformément aux principes généraux du droit, la preuve de cette exigibilité incombe à
l'administration (articles 1315 du Code civil et 870 du Code judiciaire).
L'administration dispose à cet égard de différents moyens. Elle peut ainsi recourir :
a)
aux moyens de preuve du droit commun, témoignages et présomptions compris, mais à
l'exception du serment (article 185 du CDE);
b)
aux procès-verbaux de ses agents (article 185 du CDE);
c)
à diverses présomptions légales, à caractère purement fiscal (c'est-à-dire sans influence
sur les intérêts civils des parties - articles 74, 75, 187, 188 et 231 du CDE);
d)
à l'expertise de contrôle (mais uniquement pour déterminer la valeur vénale des
immeubles - articles 189 à 200 du CDE).
Nous n’examinerons ci-après que les présomptions légales contenues dans les articles 74, 75,
187 et 188 du CDE.
SECTION 2.
A.
EXAMEN DE QUELQUES
PARTICULIERES
PRESOMPTIONS
LEGALES
Acquisition séparée du fonds et de la superficie (articles 74 et 75 du CDE)
131.- En vertu de l'article 74 du CDE, celui qui, ayant acquis par une convention translative
à titre onéreux autre qu’un apport en société visé à l’article 115bis du CDE, la propriété soit
de bois sur pied avec obligation de les abattre, soit de constructions avec obligation de les
démolir, acquiert ultérieurement entre vifs la propriété du fonds avant que les bois soient
77
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entièrement abattus ou que les constructions soient complètement démolies, doit acquitter, en
raison de la première acquisition et sur la base indiquée aux articles 45 et suivants du CDE
(droit de mutation), le droit fixé pour les ventes d’immeubles, déduction faite du droit
proportionnel d’enregistrement éventuellement acquitté sur cette acquisition.
En vertu de l'article 75 du CDE, est considérée comme une transmission d’immeuble celle
qui, résultant d’une convention entre vifs à titre onéreux autre qu’un apport en société visé à
l’article 115bis, porte sur la propriété soit de bois sur pied, soit de constructions, si ladite
transmission est consentie au profit du propriétaire du fonds.
Les conventions portant sur des récoltes ou des arbres coupés, sur les matériaux provenant de
la démolition de bâtiments ou sur des minéraux extraits du sol, conclues avant la séparation de
ces éléments de l’immeuble auquel ils sont incorporés, sont considérées comme des
conventions portant sur des biens meubles.
Les ventes ou autres conventions translatives à titre onéreux qui ont pour objet des
constructions à démolir ou des arbres à abattre sont donc normalement des opérations
mobilières échappant à l’application des articles 44 et suivants du CDE.
En cas de vente d’un fonds bâti ou arboré, ces conventions pourraient être utilisées pour faire
échec à la perception du droit de vente sur les bâtiments ou les arbres : il suffirait, en effet, de
scinder la vente en deux parties, l’une portant sur le fonds, l’autre sur les bâtiments ou les
arbres, lesquels seraient présentés comme devant être démolis ou abattus.
Les articles 74 et 75 du CDE ont pour but de faire échec à ce type de fraude : la vente des
constructions ou des bois sur pied est fiscalement considérée comme une vente d’immeuble
soumise au droit de vente lorsqu’elle est consentie soit au propriétaire du fonds, soit à une
personne qui acquiert ultérieurement le fonds.
Ces dispositions ne sont pas applicables si la TVA est due pour la livraison des biens faisant
l’objet de la convention.
B.
Changement dans la propriété ou l'usufruit d'un immeuble situé en Belgique
(article 187 du CDE)
132.- Le changement dans la propriété ou l'usufruit d'un immeuble situé en Belgique, par
suite d'une convention translative ou déclarative, est suffisamment établi, pour la réclamation
du droit au nouveau propriétaire ou usufruitier, par des actes de disposition ou
d'administration ou autres actes constatant ou impliquant, dans son chef, la propriété ou
l'usufruit.
Pour que cette présomption soit d'application, deux conditions sont requises :
78
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1° il doit s'agir de la propriété ou de l'usufruit d'un immeuble situé en Belgique (au
sens de l'article 19, 2° du CDE);
2° l'administration doit établir que, par rapport à tel immeuble, appartenant
apparemment à telle personne, une autre personne a pratiqué un acte de disposition ou
d'administration ou tout autre impliquant, dans son chef la propriété ou l'usufruit du
bien.
Lorsque la présomption joue, l'administration ne peut poursuivre le recouvrement du droit et,
le cas échéant, de l'amende pour enregistrement tardif, que contre le nouvel acquéreur.
Le changement dans la propriété (ou l'usufruit) est considéré (jusqu'à preuve contraire)
comme s'étant produit à la date de l'acte qui sert de base à la présomption légale. C'est donc à
cette date qu'il faut se placer pour déterminer la consistance du bien et sa valeur.
C'est au redevable intéressé qu'il appartient de déclarer le titre (donation, vente,…) en vertu
duquel la mutation s'est produite à son profit. Tant qu'il n'a pas fourni cette déclaration, c'est
en principe le droit de mutation à titre onéreux qui lui est réclamé.
La présomption peut être renversée par la preuve contraire, qui peut être administrée par tous
moyens de droit, à l'exception du serment.
C.
Acquisition par un intermédiaire (article 188 du CDE)
133.- Est considérée comme ayant acheté pour son propre compte et ne peut exciper de la
qualité de mandataire ou de commissionnaire du vendeur, toute personne qui négocie la vente
d'un immeuble, lorsqu'il est établi que, dès avant la réalisation de cette vente, elle a payé ou
s'est engagée à payer au propriétaire le prix ou toute somme à provenir de la vente.
L'intermédiaire est alors réputé avoir acquis l'immeuble à la date du paiement ou de
l'engagement de payer.
L'application de l'article 188 du CDE suppose que :
1° un intermédiaire (professionnel ou non) se charge de négocier la vente d'un
immeuble (c'est-à-dire de trouver acheteur pour un immeuble que le propriétaire désire
vendre);
2° cet intermédiaire, avant d'avoir réalisé la vente (c'est-à-dire avant d'avoir trouvé
acquéreur), paye ou s'engage à payer au vendeur, soit le prix demandé par celui-ci, soit
une partie de ce prix.
Dès que les conditions sont réunies, cette présomption juris et de jure n’est plus susceptible
d’être renversée.
79
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CHAPITRE VIII.
PRESCRIPTION
SECTION 1.
NOTION
134.- La prescription extinctive est un mode d’extinction d’une dette qui, après l’écoulement
d’un certain temps, permet au débiteur de ne plus payer ce qu’il doit.
La prescription n'affecte pas l'existence de la dette, mais seulement son exigibilité. Il s'ensuit
que le paiement volontaire d'une dette prescrite, même par ignorance, ne donne pas ouverture
à un droit à remboursement dans le chef du débiteur.
En droit fiscal, la prescription est susceptible de s'appliquer tant aux actions en recouvrement
(prescription contre l'Etat au profit du contribuable) qu'aux actions en restitution (prescription
contre le contribuable au profit de l'Etat).
La prescription est d’ordre public. Il n’est donc pas permis d’y renoncer d'avance. Une
renonciation au temps couru de la prescription par le seul redevable est toutefois valable.
SECTION 2.
DELAIS
135.- La prescription se compte par jours (article 2260 du Code civil). Elle est acquise
lorsque le dernier jour du terme, le dies ad quem, est accompli (article 2261 du Code civil). Le
dies a quo, c'est-à-dire le jour où se produit l'événement qui fait courir la prescription, n'est
pas compté dans le délai.
La prescription est acquise à l’expiration du dernier jour du délai, même s’il s’agit d’un
samedi, d’un dimanche ou d’un jour férié légal.
La prescription des droits et amendes en matière de droits d'enregistrement est réglée par les
articles 214 à 218 du CDE.
A.
Délais de prescription de l’action en recouvrement des droits et amendes
136.- Les délais de prescription de l'action en recouvrement peuvent être schématiquement
présentés comme suit :
Action en recouvrement
Délai de prescription
Point de départ
1° des droits et amendes dont la cause d'exigibilité 2 ans
Le
jour
est révélée de manière suffisante pour exclure la
l'enregistrement
nécessité de toute recherche ultérieure par un acte ou
l'acte
écrit enregistré (art. 214, 1° du CDE)
révélateur
ou
de
de
de
l'écrit
80
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2° des droits et amendes dus en cas d'insuffisance
2 ans
le
jour
de
d'estimation, qu'il y ait ou non matière à expertise de
l'enregistrement
de
contrôle (art. 214, 2° du CDE)
l'acte
la
ou
de
déclaration
contenant
l'estimation insuffisante
3° des droits dus en cas d'inexécution des conditions
10 ans
le
jour
de
l'acte
prévues à l'article 60 du CDE - réduction du droit de
d'acquisition (et non, de
mutation en cas de ventes de petites propriétés
l'enregistrement
rurales et d'habitations modestes (art. 214, 3° du
l'acte)
de
CDE)
4° des droits et amendes dus dans le cas prévu à 2 ans
le retrait de la prime
l'article 52, al. 2 du CDE - perte du tarif réduit à 1,50
% pour les ventes d'habitations en cas de retrait de la
prime accordée par l'Etat (art. 214, 4° du CDE)
5° des droits et amendes dus en cas d'inexactitude
2 ans
le
jour
de
dans les énonciations ou attestations prévues à
l'enregistrement
de
l'article 55, 2° du CDE - notamment quant au revenu
l'acte d'acquisition
cadastral en cas de ventes de petites propriétés
rurales et d'habitations modestes (art. 214, 5° du
CDE)
6° des amendes dues dans les cas prévus aux articles
2 ans
le
jour
1811 à 183 du CDE - contraventions aux devoirs de
contravention
communication (art. 214, 6° du CDE)
constatée
7° des droits et amendes dus dans les cas autres que
15 ans
ceux prévus aux points 1° à 6° (art. 214, 7° du CDE)
où
la
a
été
le jour où est née
l'action de l'Etat
L'article 18 du CDE est applicable au point de vue de la prescription.
B.
Délai de prescription de l’action en restitution des droits, intérêts et amendes
137.- Ce délai est invariablement fixé à deux ans (article 215 du CDE), sauf pour la
demande en restitution visée à l'article 212ter du CDE qui se prescrit par six mois.
Elle a pour point de départ le jour où l'action en restitution est née (jour de la perception, en
cas de perception irrégulière; jour où le revenu cadastral a été fixé définitivement, dans le cas
des articles 56 à 58 du CDE; jour où le jugement ou arrêt est passé en force de chose jugée,
dans les cas visés aux articles 209, 2° et 3°, et 210 du CDE, etc…)
SECTION 3.
CAUSES D'INTERRUPTION DE LA PRESCRIPTION
138.- Les articles 216, 217-1 et 217-2 du CDE énumèrent différentes causes d'interruption
de la prescription, de droit commun (article 2244 du Code civil) ou spécifiques.
81
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CHAPITRE IX.
POURSUITES
SECTION 1.
GENERALITES
139.- Les lois des 15 et 23 mars 1999 ont soumis les contestations relatives à l'application
d'une loi d'impôt relèvent à la compétence exclusive du tribunal de première instance (article
569, alinéa 1er, 32° du Code judiciaire).
La notion de "loi d'impôt" recouvre, entre autres, les lois en matière d'impôts sur les revenus,
de T.V.A., de droits de succession et de droits d'enregistrement.
Avant de s'adresser au tribunal fiscal, le contribuable peut toujours s'adresser au ministre des
Finances (article 219, alinéa 1 du CDE). En matière de droits d'enregistrement, ce recours au
ministre des Finances ne constitue pas une procédure préalable obligatoire. S'il le souhaite, le
contribuable peut immédiatement saisir le tribunal de première instance.
SECTION 2.
INSTANCE ADMINISTRATIVE
140.- La solution des difficultés qui peuvent s'élever relativement à la perception des droits
d'enregistrement avant l'introduction des instances appartient au ministre des Finances ou au
fonctionnaire délégué par lui (article 219, alinéa 1 du CDE).
Le ministre des Finances conclut les transactions avec les contribuables, pourvu qu'elles
n'impliquent pas exemption ou modération d'impôt (article 219, alinéa 4 du CDE).
L'instance administrative n'est soumise à aucune forme particulière. En pratique, le redevable
qui croit avoir des raisons de critiquer la taxation faite à son égard, expose ces raisons dans
une lettre (ou requête) adressée au ministre des Finances ou au directeur régional délégué.
La demande du contribuable fait l'objet d'une instruction administrative. Elle donne lieu à une
décision qui, en principe, n'a pas, en elle-même, de force obligatoire.
SECTION 3.
CONTRAINTE
141.- Le premier acte de poursuite pour le recouvrement des droits ou amendes fiscales et
des accessoires est une contrainte (article 220, alinéa 1 du CDE).
82
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La contrainte est un acte extra-judiciaire qui est décerné par l’autorité administrative et qui
tient lieu de titre exécutoire pour le recouvrement des droits dus. Elle est décernée par le
receveur chargé du recouvrement.
Aucune forme sacramentelle n’est exigée. La contrainte doit cependant mentionner l’objet et
la cause de la demande de manière suffisante pour permettre au contribuable d’en apprécier le
bien-fondé. Elle doit désigner précisément l’identité du débiteur (nom, prénoms et domicile)
et doit être signée.
La contrainte doit ensuite être visée et rendue exécutoire par le directeur régional de la TVA,
de l’enregistrement et des domaines, et signifiée par exploit d'huissier de justice (article 220,
alinéa 2 du CDE). Si la contrainte est simplement notifiée par lettre recommandée à la poste,
elle n'a pas un caractère exécutoire.
SECTION 4.
INSTANCE(S) JUDICIAIRE(S)
142.- L'exécution de la contrainte ne peut être interrompue que par une action en justice
(article 221 du CDE).
L’opposition à contrainte est l’acte introductif d’instance. En vertu de l'article 1385decies du
Code judiciaire, elle est en principe introduite par requête contradictoire devant le tribunal de
première instance. L’administration admet toutefois que l’opposition puisse être faite par
citation.
L'action en restitution est introduite devant le même tribunal et de la même manière que
l’opposition à l'action en recouvrement.
Les jugements rendus par le tribunal de première instance dans des contestations relatives à
l'application d'une loi d'impôt sont toujours susceptibles d'appel et ceci, quel que soit le
montant de la contestation (art. 617 du Code judiciaire).
Les délais d'opposition, d'appel et de cassation, ainsi que l'opposition, l'appel et le pourvoi en
cassation sont suspensifs de l'exécution de la décision de justice (article 225bis du CDE).
La requête introduisant le pourvoi en cassation et la réponse au pourvoi peuvent être signées
et déposées par un avocat.
*
*
*
83
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CHAPITRE X.
DONATIONS D'ENTREPRISES
SECTION 1.
INTRODUCTION
143.- Un régime favorable est prévu en faveur des donations d’entreprises, depuis une loi
fédérale du 22 décembre 1998 "portant des dispositions fiscales et autres" (Mon.B., 15 janvier
1999) qui a modifié le CDE en y introduisant les articles 140bis à 140octies. Le droit
ordinaire de donation a alors été réduit à 3% en ce qui concerne les donations d’entreprises,
moyennant le respect de certaines conditions. Le but poursuivi par le législateur était de créer
une certaine cohérence entre les droits de succession et les droits de donation applicables aux
transmissions d’entreprises familiales.
En 2001, les Régions se sont vues attribuer des compétences fiscales propres, notamment en
matière de droits d’enregistrement. Aussi, à partir de ce moment, chaque Conseil Régional a
apporté diverses modifications à la loi de 1998. En région wallonne, le taux est désormais
réduit à 0 %.
La loi spéciale du 16 janvier 1989 relative au financement des Communautés et des Régions
précise les critères de localisation à appliquer en matière d'impôts régionaux (article 5). Il
convient également de se référer à la Circulaire n° 12/2005 du 20 octobre 2005 (AAF 16/2005
– Dos. E.E./L.151) déterminant les critères de localisation des différentes opérations en
matière de droits d'enregistrement.
Lorsque le donateur est un habitant du Royaume depuis cinq ans, personne physique, est
compétente la Région dans laquelle le donateur a son domicile fiscal au moment de la
donation. Si, dans les cinq ans précédant la donation, le donateur a eu son domicile fiscal dans
au moins deux Régions, on retient la Région dans laquelle son domicile fiscal est resté le plus
longtemps pendant ces cinq ans.
Si le donateur est une personne morale résidente, on considère la Région dans laquelle le
donateur a son siège de direction effective au moment de la donation. Si, dans les cinq ans
précédant la donation, le donateur a eu son siège de direction effective dans au moins deux
Régions, on retient la Région dans laquelle son siège de direction est resté le plus longtemps
pendant ces cinq ans.
SECTION 2.
A.
DONATIONS D'ENTREPRISES EN RÉGION WALLONNE
Présentation
144.- La matière a été modifiée à plusieurs reprises, notamment par le Décret wallon du 30
avril 2009, applicable à partir du 1er juillet 2009.
84
Luc HERVE - Séminaire Stagiaires IPCF - Droits d'enregistrement et de succession
Cette matière a encore été modifiée de manière ponctuelle, et pour la dernière fois, par le
Décret wallon du 10 décembre 2009 "d'équité fiscale et d'efficacité environnementale pour le
parc automobile et les maisons passives", applicable pour l'essentiel depuis le 23 décembre
2009 (Mon.B. du 23 décembre 2009).
On mentionnera encore l'arrêté Gouvernement w1allon du 7 janvier 2010 complété par un
arrêté ministériel du 25 janvier 2010 portant exécution de l'arrêté du Gouvernement wallon du
29 juin 2006, relatif aux taux réduits des droits de succession et des droits de donation,
notamment en cas de transmission d'entreprises (Mon.B., 12 février 2010).
Le droit de donation est uniformément réduit à 0 %, sans qu'il y ait lieu à distinguer selon que
l'entreprise est une P.M.E. ou non, pour les donations d'entreprises visées aux articles 140bis à
140octies du CDE. Le régime de faveur est applicable, quel que soit le degré de parenté entre
le donateur et le donataire.
Ce taux est appliqué, en vertu de l’article 133 du CDE, sur la valeur vénale des biens donné,
sans déduction des charges. Toutefois l’administration a admis, dans une Décision du 12 avril
2001 (E140bis/02-01), que le droit soit liquidé sur base de la valeur nette de l’entreprise.
B.
Champ d'application
145.- Sont visées les donations d'entreprises qui sont constatées par acte authentique et qui
ont pour objet (article 140bis, § 1 du CDE) :
a)
Transmission à titre gratuit d’un droit réel sur des biens composant une
universalité de biens, une branche d’activité ou un fonds de commerce
Il doit s'agir d’un droit réel sur des biens composant une universalité de biens, une branche
d’activité ou un fonds de commerce au moyen desquels le donateur, seul ou avec d'autres
personnes, exerce, au jour de la donation, une activité industrielle, commerciale, artisanale,
agricole ou forestière, une profession libérale ou une charge ou office.
Par ces termes, le législateur wallon vise la donation de la propriété, de la nue-propriété, de
l’usufruit, de l’emphytéose, de la superficie de l’entreprise, d’une branche d’activité de cette
entreprise ou d’un fonds de commerce.
Ce régime s’applique tant aux donateurs entrepreneurs personnes physiques qu’aux
professions libérales (avocats, comptables, médecins,…) et aux personnes responsables d’une
charge ou d’un office (huissier, notaire).
La donation doit porter sur une universalité, une branche d’activité ou un fonds de commerce.
Ainsi, la donation d’une partie des biens de l’entreprise ne peut bénéficier du taux réduit et
sera soumise au taux normal.
85
Luc HERVE - Séminaire Stagiaires IPCF - Droits d'enregistrement et de succession
Toutefois, en cas de transmission de terres agricoles à l'exploitant ou au co-exploitant de
l'activité agricole qui y est exercée, ainsi qu'en ligne directe, entre époux et cohabitants
légaux, indépendamment de la transmission de toute quotité de l'activité agricole qui y est
exercée, ces terres sont considérées comme des biens composant une universalité de biens,
une branche d'activité ou un fonds de commerce dans le chef du donateur, à la condition
qu'elles fassent l'objet, à la date de la donation, d'un bail à ferme conformément au Code civil.
Dans ce cas, l'entreprise devant répondre à certaines conditions en vertu du CDE, est
l'entreprise agricole du donataire, exploitant effectif de l'activité agricole qui est exercée sur
ces terres, en considérant cette entreprise dans son entièreté et dans sa situation après transfert
des terres.
Le droit plein reste toutefois applicable aux transmissions suivantes :
1°
des droits réels sur des biens immeubles affectés totalement à l'habitation au moment
de l'acte authentique de la donation ;
2°
des droits réels sur des biens immeubles affectés partiellement à l'habitation au
moment de l'acte authentique de la donation, dans la mesure de la valeur vénale de la
partie de l'immeuble affectée à l'habitation, par rapport à la valeur vénale totale de
l'immeuble.
b)
Transmission à titre gratuit d’un droit réel portant sur des titres de certaines
sociétés ou des créances sur ces sociétés
Il doit s'agir d'une société dont le siège de direction effective est situé dans un Etat membre de
l'Union européenne et qui exerce, elle-même ou elle-même et ses filiales, une activité
industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou forestière, une profession libérale ou une
charge ou office, à titre principal sur une base consolidée pour la société et ses filiales, pour
l'exercice comptable en cours de la société et pour chacun des deux derniers exercices
comptables de la société clôturés au moment de l'acte authentique de la donation.
Cette exigence exclut du régime favorable les sociétés immobilières et les sociétés
patrimoniales "pures", mais pas les sociétés qui exercent de manière accessoire une de ces
activités.
b-1)
Par "titres", il faut entendre (article 140bis, § 3 du CDE) :
1°
les actions, parts bénéficiaires, droits de souscription et parts d'une société ;
2°
les "certificats" se rapportant à ces derniers titres :
86
Luc HERVE - Séminaire Stagiaires IPCF - Droits d'enregistrement et de succession
- lorsqu'ils sont émis par des personnes morales qui ont leur siège dans l'un des Etats
membres de l'Espace économique européen et qui sont propriétaires des titres auxquels
se rapportent les certificats ;
- lorsque l'émetteur des certificats exerce tous les droits attachés aux titres auxquels ils
se rapportent, en ce compris le droit de vote ;
- et lorsque ce certificat constate, au bénéfice de son titulaire, le droit d'exiger de
l'émetteur propriétaire des titres tout produit et revenu attaché aux titres visés par
l'opération de certification.
b-2) Par "créance", il faut entendre tout prêt d'argent, représenté ou non par des titres,
consenti par le donateur à une société dont il possède des titres, lorsque ce prêt a un lien direct
avec les besoins de l'activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou forestière, de la
profession libérale ou de la charge ou office, exercée soit par la société elle-même, soit par la
société elle-même et ses filiales (article 140bis, § 4 du CDE).
La créance doit être justifiée sur le plan économique, elle doit avoir été consentie pour les
besoins de l'activité. Cette précision vise clairement à éviter que les prêts consentis dans un
but d’évasion fiscale puissent bénéficier du taux réduit.
Sont toutefois exclues les créances précitées, dans la mesure où le montant nominal total des
créances excède la partie du capital social qui est réellement libérée et qui n'a fait l'objet ni
d'une réduction, ni d'un remboursement, dans le chef du donateur, à la date de l'acte
authentique de la donation. Les bénéfices, autres que les bénéfices distribués et imposés
comme tels, qui sont incorporés au capital, ne sont pas considérés comme du capital libéré.
Selon la circulaire administrative, "cette limite au bénéfice du tarif réduit est préventive de
fraude aux droits de succession". En effet, on pourrait imaginer qu’un donateur profite d’une
créance pour transférer à une société une somme (sans lien avec l’activité de celle-ci) qui
échapperait ainsi aux droits de succession.
On observera que l’exclusion relative aux immeubles affectés à l’habitation prévue en cas de
transmission à titre gratuit de biens composant une universalité, une branche d'activité ou un
fonds de commerce, n'est pas exprimée ici.
C.
Conditions d'octroi du tarif réduit
146.- La réduction du droit à 0 % est subordonnée à la réunion des conditions suivantes
énumérées ci-après (article 140bis, § 2 du CDE).
Si l'une des conditions n'est pas remplie, au plus tard lors de la présentation de l'acte à la
formalité, ce dernier est enregistré au droit établi par les articles 131 à 140 du CDE (article
140quater du CDE).
87
Luc HERVE - Séminaire Stagiaires IPCF - Droits d'enregistrement et de succession
a)
Quant à l'entreprise
L'entreprise doit, soit dans son chef, soit dans le chef de la société elle-même ou de la société
et de ses filiales :
-
soit occuper dans l'Espace économique européen du personnel engagé sous contrat de
travail, à la date de l'acte authentique de la donation ;
-
soit, si elle n'occupe pas de personnel, être dans la situation où le ou les exploitants et
leur conjoint, leur cohabitant légal, leurs parents au premier degré et alliés sont la
seule main d'œuvre occupée dans l'entreprise dans l'Espace économique européen, et
sont affiliés auprès d'une caisse d'assurance sociale pour travailleurs indépendants, à la
date de l'acte authentique de la donation.
b)
Quant aux titres et créances
L'ensemble des titres transmis doit représenter au moins 10% des droits de vote à l'assemblée
générale, dans le chef du donateur, à la date de l'acte authentique de la donation.
Si les titres représentent moins de 50% des droits de vote à l'assemblée générale, un pacte
d'actionnariat doit en outre être conclu pour une période minimale de cinq ans à compter de la
date de l'acte authentique de la donation, et porter sur au moins 50% des droits de vote à
l'assemblée générale.
Dans ce pacte, les parties s'engagent à respecter les conditions de maintien du droit réduit
visées à l'article 140 quinquies, § 1 du CDE.
L'exigence précitée n'est toutefois applicable, lorsque l'ensemble des droits de vote à
l'assemblée générale atteint au moins 50 % au jour de la donation et que les droits sont
détenus :
- par le donateur,
- par son conjoint ou cohabitant légal,
- par des ascendants ou descendants du donateur et de son conjoint ou cohabitant légal,
ainsi que leurs époux ou cohabitants légaux,
- par des descendants des frères et sœurs du donateur et de son conjoint ou cohabitant
légal ainsi que leurs époux ou cohabitants légaux.
c)
Quant à la forme
La donation doit être constatée par acte authentique.
88
Luc HERVE - Séminaire Stagiaires IPCF - Droits d'enregistrement et de succession
En outre, le donataire demandant l'application du droit réduit (appelé "le continuateur"), doit
remettre au receveur compétent une attestation délivrée par le Gouvernement de la Région
wallonne qui confirme que les conditions requises sont remplies pour les donataires y
mentionnés.
Lorsque l'attestation n'est pas remise au receveur au plus tard en même temps que
l'enregistrement de l'acte, les droits sont calculés au tarif normal, sous réserve d'une restitution
dans les conditions de l'article 209, 7° du CDE, auquel cas les articles 140bis à 140octies sont
applicables aux biens pour lesquels le droit est restitué (article 140bis, § 2, 3° du CDE).
D.
Conditions de maintien du tarif réduit
147.- Le droit réduit n'est maintenu qu'aux conditions suivantes (article 140 quinquies du
CDE):
a)
L'entreprise doit poursuivre une activité admise pendant au moins cinq ans à compter
de la date de l'acte authentique de la donation, soit dans le chef de l'entreprise, soit
dans le chef de la société elle-même ou de la société et de ses filiales.
b)
Le total du nombre de travailleurs et des personnes indépendantes, exprimé en unités
de temps plein, doit être maintenu au moins à 75 %, et ce, en moyenne pour les cinq
premières années à compter de la date de l'acte authentique de la donation, soit dans le
chef de l'entreprise, soit dans le chef de la société elle-même et de ses filiales.
Cette moyenne est calculée en divisant par 5, le total des moyennes annuelles des
unités de temps plein pour les cinq années précitées. Si une moyenne annuelle des
unités de temps plein n'est pas un nombre entier, elle est arrondie à l'unité inférieure ou
supérieure selon que sa première décimale est ou non égale ou supérieure à 5.
c)
Les avoirs investis dans une activité, une profession libérale ou une charge ou office,
ou le capital social d'une société, ne doivent pas diminuer à la suite de prélèvements ou
de distributions au cours des cinq premières années à compter de la date de l'acte
authentique de la donation?
d)
En ce qui concerne les droits réels portant sur des biens immeubles, ces biens ne
doivent pas être affectés à l'habitation, partiellement ou totalement, pendant une durée
ininterrompue de cinq ans à compter de la date de l'acte authentique de la donation.
En cas d'affectation nouvelle ou supplémentaire partielle à l'habitation du bien
immeuble, le droit réduit n'est toutefois retiré que dans la mesure de la valeur vénale
de la partie de l'immeuble nouvellement ou supplémentairement affectée à l'habitation,
par rapport à la valeur vénale totale de l'immeuble transmis avec le bénéfice du droit
réduit.
89
Luc HERVE - Séminaire Stagiaires IPCF - Droits d'enregistrement et de succession
Les continuateurs qui n'ont pas offert de payer le droit plein dû visé à l'article 140sexies du
CDE, doivent fournir, à l'issue de la période de cinq ans à compter de la date de l'acte
authentique de donation une déclaration signée attestant que les conditions visées aux a) à d),
restent remplies.
A toute réquisition des agents désignés par le Gouvernement wallon au cours de la période de
cinq ans à compter de la date de l'acte authentique de donation, les continuateurs qui n'ont pas
offert de payer le droit plein dû tel visé à l'article 140sexies du CDE, doivent communiquer
par écrit, dans le mois de la date d'envoi de la demande (ce délai pouvant être prolongé pour
de justes motifs), les éléments établissant que les conditions pour bénéficier du droit réduit
restent remplies, lorsque des indices peuvent induire que les conditions visées aux a) à d), ne
seraient plus remplies. La demande précise ces indices pouvant induire que les conditions
visées aux a) à d) ne seraient plus remplies.
E.
Sanctions
148.- Il convient de distinguer le non-respect des conditions relatives à l'octroi du taux réduit
et celui des conditions relatives au maintien de ce taux.
a)
Au niveau de l'octroi du droit réduit
A défaut de remplir l'une des conditions prévues à l'article 140bis du CDE, au plus tard lors de
la présentation de l'acte à la formalité, ce dernier est enregistré au droit plein.
Aucune demande en restitution n'est recevable, sous réserve d'une restitution dans les
conditions de l'article 209, 7° du CDE (article 140 quater du CDE).
b)
Au niveau du maintien du droit réduit
Sauf "cas de force majeure", le droit plein devient exigible à charge du continuateur, à partir
du moment où les conditions prescrites par l'article 140 quinquies, § 1 du CDE ne sont plus
remplies. Ce droit est majoré de l'intérêt légal au taux fixé en matière civile à compter de la
date de l'enregistrement de la donation (article 140 quinquies, § 2 du CDE).
La "force majeure" est un événement indépendant de la volonté du donataire, qui n'a pu être
prévu au moment de la donation ni être empêché par lui, et qui a rendu impossible l'exécution
de son obligation. Cette notion est susceptible de donner lieu à des interprétations divergentes,
quant à ses contours et quant à ses effets.
90
Luc HERVE - Séminaire Stagiaires IPCF - Droits d'enregistrement et de succession
Depuis le Décret wallon du 30 avril 2009 (Mon.B., 1er juillet 2009), le droit plein n'est
toutefois pas exigible dans le cas où le droit réel sur les biens ayant bénéficié du droit réduit
fait l'objet d'une transmission à titre gratuit en faveur du donateur initial avant l'expiration du
délai de cinq ans pendant lequel les conditions de l'article 140quinquies, § 1er du CDE,
doivent être maintenues (article 140 septies du CDE).
Cette disposition existait initialement et elle fut abrogée par le Décret wallon du 15 décembre
2005. Elle est désormais rétablie, son entrée en vigueur ayant été fixée rétroactivement au 1er
janvier 2006.
Il est dérogé à l'exigibilité du droit plein, lorsque le continuateur qui a bénéficié de la
réduction du droit a fait usage de la possibilité d'offrir de payer le droit dû conformément aux
articles 131 à 140 du CDE, majoré de l'intérêt légal au taux fixé en matière civile, exigible à
compter de la date de l'enregistrement de la donation, avant l'expiration du délai de cinq ans
pendant lequel les conditions doivent être maintenues et avant l'arrivée du moment où les
conditions prescrites ne sont plus remplies (article 140 sexies du CDE).
Dans ce dernier cas, le continuateur doit présenter à l'enregistrement au bureau qui a perçu le
droit réduit, une déclaration déterminant la consistance et la valeur des biens pour lesquels il
désire acquitter le droit plein (article 140 octies, alinéa 2 du CDE).
Lorsque le droit plein est dû dans les cas visés à l'article 140 quinquies, § 2 du CDE, le droit
et les intérêts sont liquidés sur une déclaration qui doit être présentée à l'enregistrement dans
les quatre premiers mois suivant l'expiration de l'année pendant laquelle l'une des causes de
débition du droit dû conformément aux articles 131 à 140 du CDE est intervenue et sous peine
d'une amende égale à ce droit, au bureau d'enregistrement précité (article 140 octies, alinéa 1
du CDE).
Les déclarations précitées doivent être signées par le continuateur en deux exemplaires, dont
l'un reste déposé au bureau de l'enregistrement. Les déclarations mentionnent l'acte, le fait
nouveau qui détermine la débition du droit plein dû et tous les éléments nécessaires à la
liquidation de l'impôt (article 140 octies, alinéa 1 du CDE).
L'administration dispose a priori du délai de prescription prévu par le droit commun, à savoir
quinze ans à compter du jour où est née l'action de l'Etat (article 214, 7° du CDE), pour
contrôler si les conditions ont bien été respectées.
SECTION 3.
A.
DONATIONS D'ENTREPRISES
BRUXELLES-CAPITALE
DANS
LA
RÉGION
DE
Présentation
91
Luc HERVE - Séminaire Stagiaires IPCF - Droits d'enregistrement et de succession
149.- Le droit de donation est réduit à 3 %, sans qu'il y ait lieu à distinguer selon que
l'entreprise est une P.M.E. ou non, pour les donations d'entreprises visées aux articles 140bis à
140octies du CDE. Ce régime de faveur est applicable, quel que soit le degré de parenté (ou
l’absence de lien) entre le donateur et le donataire.
En vertu de l’article 133 du CDE, le droit est calculé sur base de la valeur vénale des biens
donnés, sans déduction des charges. Cependant, l’Administration a admis, dans une Décision
du 12 avril 2001 ( E140bis/02-01), que le droit soit calculé sur la base de la valeur nette de
l’entreprise.
B.
Champ d'application
150.- Sont visées les donations d'entreprises qui sont constatées par acte authentique et qui
ont pour objet :
a)
La transmission à titre gratuit de la pleine propriété d’une universalité de biens
ou d’une branche d’activité
Il doit s'agir de la transmission de la pleine propriété des biens composant une universalité de
biens ou une branche d’activité au moyen desquels s’exerce, au jour de la donation, une
activité industrielle, commerciale, artisanale ou agricole, une profession libérale ou une
charge ou office.
Par ces termes, le législateur bruxellois vise la donation de la propriété de l’entreprise ou
d’une branche d’activité de cette entreprise. Est donc exclue la donation de l’usufruit ou de
tout autre droit réel sur ces biens.
La donation doit porter sur l’ensemble des biens composant l’activité ou une branche
d’activité. Ainsi, la donation d’une partie des biens de l’entreprise ne peut bénéficier du taux
réduit : elle est soumise au taux normal de l’article 131 du CDE.
Ce régime s’applique tant aux donateurs entrepreneurs personnes physiques qu’aux
professions libérales (avocats, comptables, médecins,…) et aux personnes responsables d’une
charge ou d’un office (huissiers, notaires).
Sont exclus de ce régime de faveur les immeubles affectés ou destinés partiellement ou
totalement à l’habitation. Ils restent soumis au taux normal de l’article 131 du CDE.
b)
La transmission à titre gratuit de la pleine propriété de titres de certaines
sociétés
Il doit s'agir d'une société :
92
Luc HERVE - Séminaire Stagiaires IPCF - Droits d'enregistrement et de succession
-
C.
dont le siège de direction effective est situé dans un Etat membre de l'Union
européenne, et,
qui exerce une activité industrielle, commerciale, artisanale ou agricole, une
profession libérale ou une charge ou office.
Conditions d'octroi du tarif réduit
151.- La réduction du droit à 3 % est subordonnée à la réunion des conditions décrites ciaprès (article 140ter du CDE).
Il importe d'observer que dans tous les cas, le donateur et le donataire doivent être des
personnes physiques.
a)
Quant aux conditions spécifiques aux donations d’une universalité de biens ou
d’une branche d’activité
L’acte lui-même ou une déclaration certifiée et signée apposée au pied de ce dernier doit faire
mention des circonstances suivantes :
1°
la donation porte sur la pleine propriété d’une universalité de biens ou d’une branche
d’activité au moyen desquels s’exerce une activité industrielle, commerciale, artisanale
ou agricole, une profession libérale ou une charge ou office ;
2°
il doit être précisé si les biens immeubles faisant, le cas échéant, objet de la donation
sont ou non affectés ou destinés, partiellement ou totalement, à l’habitation ;
3°
l’engagement du donataire à poursuivre l’activité pendant une période ininterrompue
de cinq ans à compter de la date de l’acte authentique de la donation et à en fournir la
preuve annuellement au receveur de l’enregistrement du bureau où l’acte a été
enregistré ;
4°
l’engagement du donataire que les immeubles faisant l’objet de la donation et auxquels
le droit réduit a été appliqué ne soient pas affectés, partiellement ou totalement, à
l’habitation pendant une durée ininterrompue de cinq ans à compter de la date de l’acte
authentique de la donation.
b)
Quant aux conditions spécifiques aux donations de titres dans certaines sociétés
Le donataire doit produire certaines attestations :
93
Luc HERVE - Séminaire Stagiaires IPCF - Droits d'enregistrement et de succession
1°
attestation signée par un notaire, un réviseur d’entreprises ou un expert-comptable,
certifiant que la donation porte sur un ensemble de titres représentant au moins 10%
des droits de vote à l’assemblée générale ;
2°
un pacte d’actionnaire réunissant des actionnaires détenteurs d’au moins 50% des
droits de vote à l’assemblée générale, si l’ensemble des titres faisant l’objet de la
donation représente moins de 50% des droits de vote à l’assemblée générale.
L’acte lui-même ou une déclaration certifiée et signée au pied de l’acte par le donataire doit
mentionner :
1°
l’engagement du donataire de conserver la pleine propriété de ces titres pendant une
durée ininterrompue de cinq ans à compter de la date de l’acte authentique de la
donation ;
2°
l’engagement du donataire d’apporter la preuve, annuellement, au receveur de
l’enregistrement du bureau où l’acte a été enregistré, du maintien dans son chef de la
pleine propriété des titres.
c)
Quant aux conditions de forme
La donation doit être constatée par acte authentique. On y joindra les différentes attestations
énoncées ci-dessus.
D.
Conditions de maintien du tarif réduit
152.- Le droit plein est dû, majoré de l'intérêt légal, lorsque :
a)
les conditions prescrites par l'article 140ter du CDE ne sont plus remplies ;
b)
il y a cession dans le délai de cinq ans de tout ou partie des biens faisant l’objet de la
donation sauf si, d’une part, cette cession est justifiée par l’exercice de l’activité, de la
profession libérale ou de la charge ou officine, ou, d’autre part, si cette cession a lieu
par succession ou par donation et que les ayants droit ou donataires reprennent les
engagements souscrits par le défunt ou par le donateur ;
c)
il y a cession dans le délai de cinq ans des titres détenus dans les sociétés précitées,
sauf si cette cession a lieu soit par succession, soit pas donation, soit par cession à titre
onéreux à un autre membre du pacte d’actionnariat et que les ayants droit, les
donataires ou l’acquéreur reprennent les engagements souscrits par le défunt, le
donateur ou le cédant ;
94
Luc HERVE - Séminaire Stagiaires IPCF - Droits d'enregistrement et de succession
d)
il y a un transfert du siège de direction effective de la société dans un Etat non membre
de l’Union Européenne.
E.
Sanctions
153.- Il convient de distinguer le non-respect des conditions relatives à l'octroi du taux réduit
et celui des conditions relatives au maintien de ce taux.
a)
Au niveau de l'octroi du droit réduit
A défaut de remplir l'une des conditions prévues aux articles 140bis et 140ter du CDE, au
plus tard lors de la présentation de l'acte à la formalité, ce dernier est enregistré au droit plein.
Aucune demande en restitution n'est recevable (article 140 quater du CDE).
b)
Au niveau du maintien du droit réduit
Sauf "cas de force majeure", le droit plein devient exigible à charge du continuateur, à partir
du moment où les conditions prescrites par l'article 140 quinquies du CDE ne sont plus
remplies.
Ce droit est majoré de l'intérêt légal au taux fixé en matière civile à compter de la date de
l'enregistrement de la donation.
Il est dérogé à ce qui précède, lorsque le donataire qui a bénéficié de la réduction du droit a
fait usage de la possibilité d'offrir de payer le droit dû conformément aux articles 131 à 140
du CDE, majoré de l'intérêt légal au taux fixé en matière civile, exigible à compter de la date
de l'enregistrement de la donation, avant le moment où les conditions prescrites ne sont plus
réunies, conformément à l'article 140 sexies du CDE
Au plus tard, cette offre de paiement doit intervenir avant l'expiration du délai de cinq ans
pendant lequel ces conditions doivent être maintenues.
De même, le droit n’est pas exigible dans le cas où la pleine propriété des biens ou des titres
fait l’objet d’une transmission à titre gratuit en faveur du donateur initial dans le délai de cinq
ans pendant lequel l’activité doit être poursuivie ou la pleine propriété des titres doit être
maintenue.
Dans le cas prévu à l'article 140 sexies du CDE, le donataire doit présenter à l'enregistrement
au bureau qui a perçu le droit réduit une déclaration déterminant la consistance et la valeur
des biens pour lesquels il désire acquitter le droit plein (article 140 octies du CDE).
95
Luc HERVE - Séminaire Stagiaires IPCF - Droits d'enregistrement et de succession
Lorsque le droit plein est dû dans les cas visés à l'article 140 quinquies du CDE, le droit et les
intérêts sont liquidés sur une déclaration qui doit être présentée à l'enregistrement dans les
quatre premiers mois suivant l'expiration de l'année pendant laquelle l'une des causes de
débition du droit dû conformément aux articles 131 à 140 du CDE est intervenue et sous peine
d'une amende égale à ce droit, au bureau d'enregistrement précité (article 140 octies du CDE).
Les déclarations précitées doivent être signées par les continuateurs en deux exemplaires, dont
l'un reste déposé au bureau de l'enregistrement. Les déclarations mentionnent l'acte, le fait
nouveau qui détermine la débition du droit plein dû et tous les éléments nécessaires à la
liquidation de l'impôt.
L'administration dispose a priori du délai de prescription prévu par le droit commun, à savoir
quinze ans à compter du jour où est née l'action de l'Etat (article 214, 7° du CDE), pour
contrôler si les conditions ont bien été respectées.
SECTION 4.
A.
DONATIONS D'ENTREPRISES EN RÉGION FLAMANDE
Présentation
154.- Le régime des donations d’entreprises a été inséré par le législateur fédéral dans le
Code des droits d’enregistrement, d’hypothèque et de greffe par la loi du 22 décembre 1998
"portant des dispositions fiscales et autres".
Le parlement de la Région flamande a modifié cette réglementation par un décret du 17 juin
2003 "contenant diverses mesures d’accompagnement de l’ajustement du budget
2003"(Mon.B., 12 septembre 2003) et un décret du 19 décembre 2003 "contenant diverses
mesures d’accompagnement du budget 2004" (Mon.B., 31 décembre 2003) allant dans le sens
d’un assouplissement des conditions d’application et des sanctions.
Ce régime est par ailleurs commenté dans deux circulaires :
-
Circulaire n° 19/2003 du 3 novembre 2003 ;
Circulaire n° 5/2004 du 7 avril 2004.
Le droit de donation est désormais uniformément réduit à 2 %, pour les donations
d'entreprises visées aux articles 140bis à 140quinquies du CDE. Le régime de faveur est
applicable, quel que soit le degré de parenté entre le donateur et le donataire.
Ce taux est appliqué, en vertu de l’article 133 du CDE, sur la valeur vénale des biens donnés
sans déduction des charges. Toutefois l’administration a admis, dans une Décision du 12 avril
2001 (E140bis/02-01), que le droit soit liquidé sur base de la valeur nette de l’entreprise.
96
Luc HERVE - Séminaire Stagiaires IPCF - Droits d'enregistrement et de succession
B.
Champ d'application
155.- Sont visées les donations d'entreprises qui sont constatées par acte authentique et qui
ont pour objet (article 140bis, § 1 du CDE) :
a)
La transmission à titre gratuit de la pleine propriété ou de l’usufruit d’une
universalité de biens ou d’une branche d’activité, ou d’une part indivise d’au
moins la moitié de ces droits
Il doit s'agir du droit de propriété ou de l’usufruit sur des biens composant une universalité de
biens, une branche d’activité au moyen desquels le donateur, seul ou avec d'autres personnes,
exerce, au jour de la donation, une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou
forestière, une profession libérale ou une charge ou office.
Le taux réduit ne sera toutefois pas applicable pour les biens faisant partie de la donation qui
sont affectés ou destinés partiellement ou totalement à l’habitation unique.
b)
La transmission à titre gratuit de la pleine propriété ou de l'usufruit d'actions
d'une société
-
dont le siège de direction effective est situé dans un Etat membre de l'Union
européenne, et,
qui a pour objet l'exercice d'une activité industrielle, commerciale, artisanale ou
agricole, une profession libérale ou une charge ou office.
Les actions ou parts doivent représenter soit au moins 10% des droits de vote à l’assemblée
générale, soit au moins 10% de toutes les actions ou parts de la société. Le seuil de 10% est
apprécié dans le chef du donateur.
Aucun pacte d’actionnaire ne doit cependant être conclu si la participation est inférieure à
50%, comme c’est le cas pour les réglementations wallonne et bruxelloise.
Par "actions", on entend également :
- les droits sociaux dans de telles sociétés;
- les certificats d'actions délivrés par des personnes morales ayant leur siège dans l'un
des Etats membres de l'Espace économique européen, à titre de représentation
d'actions de la société concernée, à condition que la personne morale ait l'obligation de
transmettre sans délai et au plus tard dans le mois, les dividendes et autres plus-values
au porteur du certificat.
97
Luc HERVE - Séminaire Stagiaires IPCF - Droits d'enregistrement et de succession
c)
La transmission à titre gratuit de la pleine propriété ou de l'usufruit de créances
sur certaines sociétés
Le législateur flamand permet d’enregistrer la donation d’une ou de plusieurs créances sur une
société, au tarif réduit, si le même acte contient une donation d’actions ou parts de cette même
société et à la condition que cette dernière soit également enregistrée au tarif réduit.
Par "créances", on entend également les certificats de créances délivrés par des personnes
morales ayant leur siège dans l'un des Etats membres de l'Espace économique européen, à
titre de représentation de créances sur une telle société, à condition que la personne morale ait
l'obligation de transmettre sans délai et au plus tard dans le mois, les intérêts et autres plusvalues au porteur du certificat.
C.
Conditions d'octroi et de maintien du tarif réduit
156.- La réduction du droit à 2 % est subordonnée à la réunion de plusieurs conditions
(article 140ter du CDE).
Contrairement à ce qui est prévu pour la Région de Bruxelles-Capitale, le donateur et le
donataire ne doivent pas nécessairement être des personnes physiques.
a)
Conditions spécifiques aux donations d’une universalité de biens ou d’une
branche d’activité
1°
l'activité de l'universalité de biens ou de la branche d'activité doit être poursuivie
pendant une durée ininterrompue de cinq ans à compter de la date de l'acte de donation
(mais pas nécessairement par le donataire lui-même) ;
2°
les biens immeubles transmis en application du droit réduit ne peuvent pas être
affectés, ni destinés partiellement ou totalement à l'habitation pendant une durée
ininterrompue de cinq ans à compter de la date de l'acte de donation.
b)
Conditions spécifiques aux donations de titres dans certaines sociétés
1°
l'activité de la société doit être poursuivie pendant une durée ininterrompue de cinq
ans à compter de la date de la donation (mais pas nécessairement par le donataire luimême) ;
2°
le siège de direction effective ne doit pas être transféré dans un Etat qui n'est pas
membre de l'Union européenne, pendant cinq ans à compter de la date de la donation.
98
Luc HERVE - Séminaire Stagiaires IPCF - Droits d'enregistrement et de succession
c)
Conditions spécifiques aux donations de créances dans certaines sociétés
1°
la créance ne doit pas être payée pendant cinq ans à compter de la date de la donation;
2°
l'activité de la société doit être poursuivie pendant une durée ininterrompue de cinq
ans à compter de la date de la donation;
3°
le siège de direction effective ne doit pas être transféré dans un Etat non membre de
l'Union européenne pendant cinq ans à compter de la date de la donation.
d)
Conditions de forme
La donation doit être constatée par acte authentique, conformément aux dispositions du Code
civil.
De plus, les parties doivent déclarer dans l’acte (article 140bis, § 2 du CDE) :
-
que les conditions de l’article 140bis, § 1er du CDE sont réunies ;
biens transmis qui font partie de l’universalité, de la branche d’activité ou du
paquet d’actions, dans le cas où la donation comprend d’autres biens que ceux-là
(cas de la "donation mixte").
Si cette déclaration fait défaut, le taux ordinaire sera appliqué à la donation, sans possibilité de
restitution.
Le notaire ou une attestation d’un réviseur d’entreprises doit préciser dans l’acte que les
actions données représentent, soit au moins 10% des droits de vote de l’assemblée générale de
la société, soit au moins 10% de la totalité des actions de la société (article 140bis, § 2, alinéa
2 du CDE)
D.
Sanctions (articles 140 quater et quinquies du CDE)
157.- Sauf en cas de force majeure, dès que les conditions requises ne sont plus réunies, le
taux ordinaire doit être acquitté, déduction faite du droit déjà payé.
Si une partie de la créance est remboursée dans le délai de cinq ans à partir du jour de
l’enregistrement de l’acte, le droit ordinaire ne sera dû que proportionnellement au montant de
la créance remboursée.
En outre, l'intérêt légal est dû de plein droit sur les droits additionnels à compter de la date
d'enregistrement de la donation et au taux fixé en matière civile.
99
Luc HERVE - Séminaire Stagiaires IPCF - Droits d'enregistrement et de succession
Si une condition requise pour le maintien du droit réduit n'est plus remplie, cette circonstance
doit être notifiée par le donataire dans les quatre mois à compter du moment où la condition
n'est plus remplie, au receveur du bureau où l'acte de donation a été enregistré.
Cette notification doit se faire par une déclaration signée et faite en deux exemplaires, dont
l'un reste déposé au bureau d'enregistrement.
La déclaration mentionne : le rapport d'enregistrement repris dans l'acte de donation, le fait
ayant donné lieu à l'exigibilité des droits additionnels et la date, le cas échéant, la circonstance
de force majeure qui empêche de continuer à remplir la condition, et toutes les informations
requises pour la liquidation des droits additionnels.
Le donataire qui a bénéficié du taux réduit et qui, dans les cinq ans de la date de la donation,
n'en a pas perdu le bénéfice ou ne l’a perdu que partiellement, est tenu de prouver au receveur
du bureau où le droit réduit a été levé, dans les quatre mois de l'expiration de la période visée,
que les conditions requises pour le maintien du tarif ont été remplies pendant la période
requise.
Si cette preuve n’est pas rapportée ou l’est de manière insuffisante, les droits additionnels et
l'intérêt légal visés au premier alinéa de l'article 140quater du CDE deviennent exigibles, à
compter de la date de l'enregistrement de la donation.
*
*
*
100
Luc HERVE - Séminaire Stagiaires IPCF - Droits d'enregistrement et de succession
DEUXIEME PARTIE : DROITS DE SUCCESSION
CHAPITRE I.
INTRODUCTION
SECTION 1.
LEGISLATION
158.- Le Code des Droits de Succession (en abrégé, "CDS") a été établi par l'arrêté royal n°
308 du 31 mars 1936, pris en exécution de l'article 1er, § 1er, litt. a, de la loi du 31 juillet 1934
(prorogée et complétée par les lois des 7 décembre 1934, 15 mars et 30 mars 1935) et
confirmé par la loi du 4 mai 1936. Une modification fondamentale a été réalisée par l'arrêté
royal n° 12 du 18 avril 1967.
En outre, la loi spéciale du 16 janvier 1989 relative au financement des Communautés et des
Régions a fait des droits de succession et des droits de mutation par décès des impôts
régionaux et a attribué aux différentes Régions la compétence de fixer les tarifs et de modifier
ou supprimer les exemptions et les réductions, ou même d'en introduire de nouvelles. Les
autres dispositions du CDS restent de la compétence de l'autorité fédérale.
SECTION 2.
DROIT DE SUCCESSION - NOTION
159.- La cause d'exigibilité de l'impôt successoral est la transmission des biens par décès. En
principe, l'impôt ne peut frapper que les biens qui font partie du patrimoine délaissé par le
défunt. Cette règle subit quelques exceptions, à savoir les fictions légales (articles 3 à 14 du
CDS) et les legs secondaires de sommes d'argent (article 64, al. 1ER du CDS).
Il ne faut dès lors pas confondre une transmission par décès et une transmission entre vifs se
réalisant à l'occasion du décès.
Ainsi, soit la situation suivante : par acte notarié, A fait donation de sa maison à B et C,
chacun pour moitié, qui acceptent. L'acte stipule que la part de B accroîtra celle de C, si C
survit à B. Au décès de B, C obtient la part de B dans la maison, non par succession, mais en
vertu de l'acte de donation. Cet acte prévoyait un accroissement sous une condition suspensive
qui s'est réalisée (le prédécès de B). Dans ce cas, ce n'est pas le droit de succession, mais bien
le droit d'enregistrement qui est exigible.
La dette d'impôt successoral naît avec l'ouverture de la succession et frappe la transmission
héréditaire déterminée au jour du décès, conformément à la dévolution légale ou testamentaire
à ce moment, sans pouvoir être influencée par les évènements postérieurs et sans que la
volonté de quiconque puisse y porter atteinte.
101
Luc HERVE - Séminaire Stagiaires IPCF - Droits d'enregistrement et de succession
Les conventions que les héritiers peuvent conclure avec des tiers ou entre eux restent donc, en
principe, sans influence sur l'impôt. Cette affirmation devra cependant être nuancée,
notamment en cas de renonciation à la succession par un héritier et lorsque le partage
intervient. Tant la renonciation que le partage ont un effet rétroactif.
L'impôt successoral frappe la transmission des biens par décès, telle qu'elle est déterminée par
les règles du droit civil.
SECTION 3.
NOTIONS DE DROIT CIVIL
160.- La dévolution est l’opération par laquelle on détermine la ou les personnes appelées à
recueillir la succession du défunt. Elle est "testamentaire", lorsque le défunt a organisé la
dévolution de sa succession dans un testament, et "légale" en l’absence de testament.
Le testament est l’acte par lequel le testateur dispose, pour le temps où il n’existera plus, de
tout ou partie de ses biens, et qu’il peut révoquer. Le testament est olographe lorsqu’il est
rédigé de la main du testateur. Il est authentique lorsqu’il est rédigé par un notaire, sous la
dictée du testateur en présence de deux témoins.
Les personnes désignées dans un testament s’appellent "légataires". Les "héritiers" sont ceux
qui ont vocation à la succession en vertu de la loi. Parmi les héritiers, certains sont
"réservataires" (enfants, parents et conjoint) et se voient ainsi reconnaître un droit impératif à
recevoir une quotité du patrimoine en propriété ou en usufruit.
Lorsque, en l’absence de testament, la loi organise la dévolution de la succession, l’ordre de
celle-ci dépend de la parenté des héritiers par rapport au défunt et du degré de celle-ci.
A cet égard, les descendants du défunt sont les personnes qui lui doivent la vie (enfants,
petits-enfants…) et ses ascendants sont ceux à qui il doit la vie (parents, grands-parents,…).
Les collatéraux du défunt sont les personnes qui ont avec lui un auteur commun (frère, sœur,
neveu, oncle, tante,…).
Le degré de parenté indique le nombre de générations qui séparent deux personnes
légitimement apparentées. Chaque génération forme un degré. La suite des degrés forme une
ligne : ligne directe pour les personnes qui descendent l’une de l’autre, et ligne collatérale
pour les personnes qui descendent d’un auteur commun.
En ligne directe, on compte autant de degrés qu’il y a de générations entre les personnes. En
ligne collatérale, le calcul s’effectue différemment : les degrés se comptent par les
générations, depuis le parent concerné jusque et non compris l’auteur commun et depuis
celui-ci jusqu’à l’autre parent concerné. Ainsi, un oncle et son neveu sont des parents
collatéraux au 3ème degré.
102
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La succession testamentaire prime la succession légale : les règles de la dévolution légale ne
s’appliqueront qu’en l’absence de testament.
Les dispositions comprises dans le testament s’appellent des "legs". Le legs peut être :
-
-
universel : le testateur donne à une ou plusieurs personnes l’universalité des biens
qu’il laissera à son décès ;
à titre universel : le testateur lègue soit une quote-part de sa succession, soit tous ses
meubles ou tous ses immeubles, soit une quote-part de ses meubles ou une quote-part
de ses immeubles ;
à titre particulier : le testateur lègue seulement certains biens au légataire.
*
*
*
103
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CHAPITRE II.
ETABLISSEMENT DES DROITS
SECTION 1.
A.
DISTINCTION ENTRE DROIT DE SUCCESSION ET DROIT
DE MUTATION PAR DECES
Principes
161.- L'article 1 du CDS définit les deux impôts qui peuvent frapper les transmissions par
décès :
-
-
le droit de succession stricto sensu qui s’applique sur la valeur, déduction faite des
dettes, de tout ce qui est recueilli dans la succession d'un habitant du royaume
(article 1, 1°).
le droit de mutation par décès qui s’applique sur la valeur des biens immeubles situés
en Belgique, recueillis dans la succession d'un non-habitant du royaume (article 1,
2°).
Le critère de distinction entre ces deux impôts est donc la qualité d'habitant du royaume.
Cette distinction est capitale, car elle détermine toute l'imposition, la masse imposable
différant sensiblement selon que le défunt était ou non un habitant du royaume.
Si le défunt était un habitant du royaume, le droit de succession est perçu sur la valeur de tous
les biens que le défunt possédait au moment de son décès, tant les biens meubles que les
immeubles, sans distinguer suivant que ces biens se trouvent en Belgique ou à l'étranger, mais
sous déduction des dettes que le défunt avait, à ce même moment, et des frais funéraires.
Si, au contraire, le défunt n'était pas un habitant du royaume, le droit de mutation par décès est
perçu exclusivement sur la valeur des biens immeubles que le défunt possédait en Belgique,
sans possibilité de déduction des dettes.
Est "habitant du royaume" celui qui a établi dans le Royaume (Belgique) son habitation
réelle, effective, continue, ainsi que sa famille, le centre de ses activités, le siège de ses
affaires et de ses occupations.
C'est donc le lieu d'où le défunt, comme propriétaire, gérait ou surveillait l'administration de
ses biens qui importe, et non le lieu de la situation de ses biens. Ce domicile est quelquefois
appelé "domicile fiscal".
Pour déterminer si quelqu'un est ou non un habitant du royaume, il faut donc se baser
entièrement sur des éléments de fait, à savoir le domicile effectif et non le domicile légal. Il
existe toutefois différentes dérogations à ce principe ressortant notamment des protocoles de
la Communauté Européenne ou de Conventions internationales.
104
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B.
Différences et similitudes les plus importantes
162.- Le droit de succession est dû sur tout ce qui est recueilli dans la succession d'un
habitant du royaume, sous déduction des dettes du défunt (articles 1, 1°, et 15 du CDS).
Le droit de mutation par décès est perçu uniquement sur les biens immeubles situés en
Belgique et recueillis dans la succession d'un non-habitant du royaume, sans distraction des
dettes (articles 1, 2°, et 18).
163.- La déclaration de succession doit être déposée, en principe, par les héritiers et les
légataires ou donataires universels, à l'exclusion de tous autres légataires ou donataires.
Le bureau compétent est le bureau des droits de succession dans le ressort duquel le défunt a
eu son dernier domicile fiscal. Si le domicile fiscal du défunt a été établi dans plus d’une
Région au cours de la période de cinq ans précédant son décès, la déclaration doit être
introduite au bureau des droits de succession de son dernier domicile fiscal dans la Région
dans laquelle le domicile fiscal du défunt a été établi le plus longtemps durant ladite période.
(article 38, 1° du CDS).
La déclaration de mutation par décès doit être déposée par les héritiers, légataires ou
donataires qui recueillent les immeubles situés en Belgique. Le bureau compétent est celui
dans le ressort duquel les immeubles sont situés. Si les immeubles recueillis par un même
héritier, légataire ou donataire, sont situés dans le ressort de différents bureaux, le bureau
compétent est celui dans le ressort duquel se trouve la partie des biens qui présente le revenu
cadastral fédéral le plus élevé (article 38, 2° du CDS).
Le délai de dépôt est le même pour les déclarations de succession et les déclarations de
mutation par décès, à savoir cinq, six ou sept mois suivant le lieu du décès (article 40 du
CDS).
Il existe un même tarif pour le calcul du droit de succession ou du droit de mutation par décès
(article 48, alinéa 1).
164.- En ce qui concerne les abattements et minima imposables, une autre distinction doit
être opérée, en fonction de la Région compétente :
a)
S’il s’agit d’une succession imposable en Région wallonne et dans la Région de
Bruxelles-Capitale, un abattement est prévu pour les droits de succession. De plus, les
successions dont l'actif net ne dépasse pas un montant déterminé sont exonérées du droit.
Il n'est prévu ni abattement, ni minimum imposable pour le droit de mutation par décès
(article 54 du CDS).
105
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b)
S’il s’agit d’une succession imposable en Région flamande, il existe des réductions
d'impôt qui donnent lieu à une réduction limitée des droits calculés, tenant compte de la
consistance de la part héréditaire de l'héritier. Ces réductions dégressives applicables en
Région flamande valent tant pour le droit de succession que pour le droit de mutation par
décès (article 56 du CDS - Région flamande).
165.- Pour les deux impôts, il est prévu une réduction, qui est toutefois différente selon les
Régions, tant eu égard à son montant qu'à la personne de l'héritier. Elle est établie soit pour
cause de charge d'enfants, soit en raison du fait que l'on n'a pas encore atteint l'âge de 21 ans.
(article 56 du CDS). Il s'agit chaque fois d'une réduction calculée sur l'impôt liquidé.
166.- Personnes tenues au paiement des droits :
a)
Pour les droits de succession : chacun des héritiers, légataires ou donataires est tenu au
paiement des droits de succession dus sur ce qu'il recueille personnellement.
En outre, les héritiers, légataires ou donataires universels sont tenus, chacun en proportion de
leur part héréditaire, au paiement des droits dus par les légataires et donataires à titre universel
ou à titre particulier.
b)
Pour les droits de mutation par décès : chacun des ayants droit du défunt, peu importe
sa qualité, est tenu au paiement des droits dus sur ce qu'il recueille personnellement.
167.- La même date d'exigibilité vaut pour les deux impôts : le paiement doit avoir lieu dans
les deux mois à compter de l'expiration du délai de dépôt de la déclaration (article 77, alinéa 1
du CDS).
Le directeur général peut, moyennant garantie, autoriser les débiteurs de l'impôt à se libérer
par paiements partiels. Cette possibilité existe tant pour le droit de succession que pour le
droit de mutation par décès (article 77, alinéa 2 du CDS).
Cependant la faculté offerte, sous certaines conditions, à l'héritier, au légataire ou au donataire
qui recueille un bien en nue-propriété dans la succession d'un habitant du royaume de différer
le paiement du droit de succession dû à raison de ce bien, jusqu'à l'extinction de l'usufruit
(article 79 du CDS) n'existe pas pour le droit de mutation par décès.
168.- Les personnes tenues au dépôt d'une déclaration peuvent demander l'expertise
préalable de tout ou partie de certains biens successoraux se trouvant en Belgique, tant pour le
droit de succession que pour le droit de mutation par décès (article 20 du CDS).
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169.- Tant pour les biens soumis au droit de mutation par décès que pour ceux soumis au
droit de succession, l'administration a la faculté de requérir l'expertise de contrôle des biens
successoraux se trouvant dans le royaume et déclarés pour leur valeur vénale (exceptés les
biens meubles corporels autres que les navires et bateaux).
En matière de succession d'un non-habitant du royaume, les procédures d'expertise de
contrôle et d'expertise préalable s'appliquent uniquement aux immeubles situés en Belgique.
SECTION 2.
A.
TRANSMISSIONS IMPOSABLES
Principes
170.- L’article 2 du CDS prévoit que:
"Ces droits sont dus sur les biens successoraux, sans distinguer selon qu'ils sont transmis en
suite de dévolution légale, de disposition testamentaire ou d'institution contractuelle. Ils sont
dus, en outre, dans les cas indiqués aux articles 3 à 14."
En principe, et sauf les exemptions expressément prévues par le CDS, l'impôt successoral
frappe toutes les transmissions de biens par décès, que ces transmissions aient lieu en vertu de
la dévolution légale, d'un testament ou d'une institution contractuelle.
Cet impôt ne frappe pas les transmissions qui s'opèrent à l'occasion du décès. Constitue une
transmission "à l’occasion du décès", une transmission entre vifs qui s’exécute au jour du
décès ou à l’occasion du décès. Ces transmissions donnent lieu, le cas échéant, à l’application
d’un droit d’enregistrement.
Dans certains cas, pour la perception du droit de succession et, s'il échet, du droit de mutation
par décès, le CDS assimile certaines opérations entre vifs à des transmissions par décès. Ces
assimilations font l'objet des articles 3 à 14 du CDS et concernent des biens qui, au point de
vue du droit civil, ne font plus partie de la succession. Ces fictions seront étudiées
ultérieurement.
Exceptionnellement, et en vertu de dispositions expresses, certaines transmissions ne sont pas
assujetties à l'impôt successoral. Ainsi, les legs faits à l'Etat sont exempts de droit de
succession et de mutation par décès, sauf dans les successions ouvertes en Région flamande
(article 55 du CDS).
B.
Transmission dans le cadre de la dévolution légale
171.- Une succession n’est pas imposée aux héritiers du défunt qui dispose d’une option (un
choix) entre trois possibilités :
107
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a)
Acceptation pure et simple de la succession
Dans cette hypothèse, l’héritier manifeste sa volonté, sans aucune réserve, d’acquérir tout
l’actif et d’assumer la charge de tout le passif. L’acceptation peut être expresse (exprimée
dans un acte, authentique ou privé) ou tacite (c’est le cas lorsque l’héritier pose un acte qui
suppose nécessairement son intention d’accepter et qu’il n’aurait le droit de poser qu’en sa
qualité d’héritier).
En cas d’acceptation pure et simple, l’hériter supportera l’ensemble du passif de la succession.
Si celui-ci dépasse l’actif, l’héritier sera tenu sur son patrimoine propre.
b)
Acceptation sous bénéfice d’inventaire
Dans cette hypothèse, l’héritier accepte tout l’actif, et le passif uniquement dans la mesure où
il n’excède pas l’actif. Il ne sera donc tenu au paiement des dettes qu’à concurrence des biens
qu’il recueille.
L’héritier qui souhaite accepter une succession sous bénéfice d’inventaire doit faire une
déclaration au greffe du tribunal de première instance de l’arrondissement dans lequel la
succession s’est ouverte. Tout comme l’acceptation pure et simple, l’acceptation sous
bénéfice d’inventaire est irrévocable. L’hériter ne pourra ainsi ultérieurement répudier une
succession qu’il a acceptée.
c)
Renonciation
Dans cette hypothèse, l’héritier manifeste sa volonté de répudier la succession.
La renonciation ne se présume pas : elle doit être faite au greffe du tribunal de première
instance de l’arrondissement dans lequel la succession s’est ouverte. L’héritier qui renonce
est censé n’avoir jamais été héritier.
172.- Le droit de succession est dû par les personnes appelées par la loi à recueillir tout ou
partie de l'hérédité, sans que l'Etat ait à fournir la preuve de leur acceptation. La transmission
des biens aux héritiers s'opère, en effet, de plein droit dès l'instant du décès.
L'acceptation sous bénéfice d'inventaire n'exempte les héritiers d'aucune des obligations
prévues par le Code (article 73 du CDS). Seule la renonciation à la succession leur permet de
se soustraire à ces obligations.
173.- En vertu de la règle du retour légal visée à l’article 747 du Code civil, l’ascendant
prend dans la succession de son descendant décédé sans laisser de postérité venant à sa
succession, les biens qu’il lui a donnés par donation entre vifs et qui se retrouvent in specie
dans sa succession avec la qualité de chose donnée.
108
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Si la donation a été faite sous certaines charges, le retour légal n'a lieu que moyennant le
remboursement par le successeur anomal (ascendant donateur) à la succession ordinaire, des
sommes payées par le donataire. La contribution du successeur anomal au passif se calcule sur
la base de la valeur nette de sa part.
Le conjoint survivant venant en concours avec l'ascendant donateur recueille l'usufruit des
biens soumis au retour légal, sauf s'il en a été disposé autrement dans l'acte de donation ou
dans le testament. En ce cas, le retour légal n'a pour objet que la nue-propriété. La
contribution aux dettes de la succession est déterminée en conséquence.
En cas de retour légal, les bénéficiaires de celui-ci recueillent les biens qui en font l'objet en
qualité d'héritiers et doivent contribuer au paiement des dettes de la succession au prorata de
la valeur des biens qu'ils reprennent. Les biens recueillis au titre de retour légal sont donc
passibles de l'impôt.
Le retour légal doit être distingué du cas où le donateur stipule le droit de retour des biens
donnés, pour le cas du prédécès soit du donataire seul, soit du donataire et de ses descendants
(articles 951 et 952 du Code civil). Cette clause, qui institue un "droit de retour", constitue
une condition résolutoire affectant une convention entre vifs. Quand cette condition se réalise,
les biens font retour au donateur sans droit d'enregistrement ni droit de succession.
174.- Le conjoint survivant non divorcé ni séparé de corps, qui recueille une partie ou la
totalité de la succession, doit l'impôt successoral sur ce qu'il recueille.
175.- La succession d'une personne décédée sans laisser ni parents au degré successible, ni
conjoint, est dévolue à l'Etat, qui est un successeur irrégulier. Cette dévolution donne
ouverture au droit de succession.
Par contre, si la succession est imposable en Région wallonne, les legs faits à l'Etat ou à une
Région sont exempts du droit de succession et du droit de mutation par décès (article 55 du
CDS – Région wallonne).
Dans les successions imposables en Région de Bruxelles-Capitale, les legs faits à cette région
sont exempts d'impôt alors que les legs faits à l'Etat ou à une autre Région sont imposables
(article 55 du CDS – Région bruxelloise).
En Région flamande, un legs à l'Etat est imposable, mais un legs à la Région ou à la
Communauté flamande est exempt d'impôt (article 55 du CDS – Région flamande).
C.
Transmission dans le cadre de la dévolution testamentaire
C.1.
Principe
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176.- Celui qui invoque des dispositions testamentaires doit en établir l'existence par un acte
faisant foi. Ceci vaut tant pour l'administration que pour toute autre personne intéressée.
A cet égard :
-
Le testament authentique fait foi jusqu'à inscription de faux (article 1319 du Code
civil).
Le testament olographe a la même force probante qu'un testament authentique si
l'écriture ou la signature du défunt ne sont pas contestées (article 1322 du Code civil).
Dans le cas contraire (ou même si les héritiers ou ayants cause déclarent simplement
ne point connaître l'écriture ou la signature du défunt - article 1323, alinéa 2 du Code
civil), le testament olographe est dénué de force probante tant que la vérification
d'écriture n'en a pas établi la sincérité (article 1324 du Code civil). Dans l’intervalle,
c'est la dévolution légale qui sera retenue (ou la dévolution testamentaire qui résulte
d'un autre testament non contesté). Si ce testament est ultérieurement déclaré valable,
il y aura changement de dévolution.
Dès que l'existence du testament a été établie, il doit en être tenu compte pour la perception de
l'impôt, même s'il est annulable pour l'une ou l'autre cause (insanité d'esprit, captation, etc.). Il
faut donc tenir compte des legs prévus par le testament pour déterminer, sur base des
dispositions du CDS, les personnes qui doivent déposer la déclaration et celles qui doivent
payer les droits.
C.2.
Modalités des legs accordés
177.- Le legs verbal est juridiquement inexistant, aussi bien pour les héritiers que pour
l'administration. Si les héritiers l'exécutent malgré tout, l'administration n’en tiendra compte
que lorsqu'elle y a intérêt.
En qualité de tiers, l'administration peut repousser le legs verbal. Dans ce cas, elle perçoit, en
principe, le droit de succession à charge des héritiers légaux (ou des légataires auxquels
l'inexécution du legs verbal profite) et, le cas échéant, un droit d'enregistrement (en principe
celui établi pour les transmissions à titre onéreux) sur la transmission qui, à ses yeux, s'opère
entre ces héritiers et le légataire à la suite de l'exécution du legs verbal. Si elle admet le legs,
seul le droit de succession à charge du légataire est dû.
178.- Si un legs est fait sous condition suspensive aussi longtemps que la condition n'est pas
accomplie, le legs est négligé pour la perception. Lorsque la condition se réalise, il se produit
un changement dans la dévolution de l'hérédité et le calcul de l'impôt doit être remanié
compte tenu du legs (il peut en résulter un supplément d'impôt ou un excédent sujet à
restitution).
110
Luc HERVE - Séminaire Stagiaires IPCF - Droits d'enregistrement et de succession
Lorsqu’un legs est réalisé sous condition résolutoire, aussi longtemps que la condition ne s'est
pas réalisée, l'impôt est liquidé comme si le legs était pur et simple. Lors de la réalisation de la
condition, le légataire est censé n'avoir jamais recueilli le legs : d'où, changement de
dévolution et révision du calcul de l'impôt suivant la situation nouvelle (il peut en résulter un
supplément d'impôt ou un excédent sujet à restitution).
Le legs à terme est celui dont l'exécution même est différée jusqu'à l'arrivée du terme
(évènement futur et certain). Cette exécution différée a pour effet de procurer au débiteur du
legs le droit aux fruits produits par les choses léguées pendant la durée du terme. Le droit aux
fruits, assimilé à un usufruit, est estimé conformément à l'article 21, VI et VII du CDS (article
22 du CDS).
179.- Le testateur a également la possibilité d’assortir son legs d’une clause d’accroissement
ou de réversion.
a)
La "clause d’accroissement" s’applique lorsqu’un testateur lègue un bien à deux
légataires en stipulant que le bien appartiendra à celui qui survivra.
Au décès du testateur, l'impôt successoral est perçu à charge des deux légataires, suivant leur
degré de parenté avec le testateur, chacun sur la moitié du bien. Lors du décès du premier
mourant, un nouveau droit est dû par le légataire survivant sur la moitié alors recueillie. Ce
droit est perçu suivant le degré de parenté entre le légataire survivant et le testateur.
Le droit perçu initialement à la charge du légataire prémourant n'est pas imputé sur les droits
dus par le survivant du chef de l'accroissement, sauf si celui-ci a lieu dans l'année du décès du
testateur (article 53 du CDS).
b)
Il y a "réversion", notamment, lorsque le testateur, après avoir légué un usufruit ou une
rente, dispose qu'au décès du bénéficiaire, cet usufruit ou cette rente profitera à une
autre personne.
Au décès du testateur, le droit de succession est perçu à charge du légataire suivant le degré
de parenté entre eux. Au décès du légataire et pour autant que le tiers bénéficiaire de la clause
de réversion survive, un nouveau droit de succession est perçu à charge de ce tiers suivant son
degré de parenté avec le légataire.
180.- Les legs sont quelquefois assortis de "charges" imposées par le testateur.
Le principe est le suivant : la charge imposée par le défunt à un héritier, légataire ou donataire
est considérée comme legs au profit du bénéficiaire de la charge, si celle-ci consiste à donner
à titre gratuit à ce bénéficiaire, soit un bien de la succession, soit un capital ou une rente
n'existant pas en nature dans la succession et payable en argent ou en choses fongibles (article
64 du CDS).
111
Luc HERVE - Séminaire Stagiaires IPCF - Droits d'enregistrement et de succession
On ne perdra pas de vue qu'une donation peut également être assortie d'une charge,
notamment financière qui, si elle est fixée de manière raisonnable, compte tenu notamment
des revenus produits par les actifs donnés, n'est pas elle-même considérée comme une
donation.
Si la charge consiste en une autre chose que ce qui précède (par exemple, une obligation de
faire), il en est fait abstraction pour la perception (article 64, alinéa 2 du CDS).
C.3.
Cas des rapports et des réductions
181.- Tout héritier doit rapporter à ses cohéritiers, c'est-à-dire remettre dans la succession
toutes les libéralités (donations entre vifs et legs) qu'il a reçues du défunt, sauf si elles lui
avaient été consenties par préciput et hors part ou avec une dispense de rapport (article 843 du
Code civil).
La succession peut compter des héritiers réservataires (descendants, ascendants ou conjoint).
Dans ce cas, une part de la succession doit obligatoirement leur être dévolue. Le testateur ne
peut disposer de la totalité de ses biens mais uniquement de ce qu’on appelle la quotité
disponible, qui est calculée, d’une part, en fonction du nombre et de la qualité des
réservataires et, d’autre part, en fonction de la qualité des personnes à l’égard desquelles le
défunt a disposé.
Ainsi, en vertu de l'article 913 du Code civil, la quotité disponible est de ½ si le disposant
laisse un enfant, de 1/3 s'il laisse deux enfants, et de ¼ s'il laisse trois enfants ou plus. Par
ailleurs, le conjoint survivant a droit à l'usufruit de la moitié des biens de la succession, avec
au minimum l'usufruit portant sur la totalité du logement principal de la famille au jour du
décès et des meubles meublants qui le garnissent (article 915bis du Code civil).
Lorsque le legs effectué dépasse la quotité disponible, il peut être réduit. La réduction des legs
à la quotité disponible n'a toutefois pas lieu d'office. Elle doit être demandée par les héritiers
réservataires, et seulement par ces derniers.
Tant que la réduction n'est pas demandée, il faut liquider les droits en tenant compte des legs
non réduits. La réduction qui interviendrait ultérieurement serait un évènement nouveau,
emportant un changement dans la dévolution de l'hérédité.
D.
Institution contractuelle
182.- L'institution contractuelle, couramment appelée "donation de biens à venir", est une
convention par laquelle une personne (l'instituant) donne à une autre (l'institué) tout ou partie
des biens qu'elle laissera au jour de son décès. Il y a institution contractuelle lorsque, dans
l'intention des parties, la donation porte sur les biens que comprendra la succession du
donateur.
112
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L'institution contractuelle n'est autorisée que :
-
par contrat de mariage, par des tiers aux futurs époux ou à l'un d'eux;
par contrat de mariage, entre futurs époux;
durant le mariage, entre époux (articles 1082 et s. du Code civil).
Ainsi que le précise l'article 2 du CDS, les bénéficiaires d'une institution contractuelle sont
redevables des droits de succession au même titre que les légataires, suivant leur degré de
parenté avec le défunt auteur de l'institution contractuelle. Le Code qualifie ces bénéficiaires
de donataires.
Bien qu'il s'agisse d'une donation entre vifs, il est possible de renoncer à une institution
contractuelle après le décès du donateur. La renonciation n'est soumise à aucune forme
particulière. Elle ne peut porter préjudice à l'Etat (article 68 du CDS).
SECTION 3.
A.
DECLARATION DE SUCCESSION
Principes
183.- En vertu des articles 35 et 36 du CDS :
"Les droits de succession et de mutation par décès sont liquidés au vu d'une déclaration de
succession."
"Le dépôt de cette déclaration est obligatoire dans tous les cas où un bien est transmis dans
les conditions prévues aux articles 1 à 14."
Le contribuable (héritier ou légataire) doit fixer lui-même les bases d'imposition et ce au
moyen d'une déclaration de succession. Le dépôt d'une telle déclaration est obligatoire lorsque
le défunt a effectivement délaissé des biens ou lorsque, par une fiction légale, certains biens
sont censés appartenir au défunt alors que, sur le plan du droit civil, ce dernier ne les possède
plus. Si le défunt n'est pas habitant du royaume, le dépôt d'une déclaration n'est obligatoire
que s'il laisse un ou plusieurs immeubles situés en Belgique.
Cette obligation de dépôt d'une déclaration subsiste même s'il y a des exemptions ou
réductions (articles 54, 55 et 56 et 60bis du CDS - Région wallonne et Région bruxelloise,
articles 54, 55, 56, 60 et 60bis du CDS - Région flamande) qui ont pour effet que les biens
délaissés échappent à l'impôt, ou encore lorsque la succession accuse un déficit.
Sans renoncer au principe même de cette obligation, l'administration se montre libérale dans
son application et n'exige pas de déclaration, si celle-ci est non passible de droit(s) et s'il n'y a
pas de transmission d'immeubles.
113
Luc HERVE - Séminaire Stagiaires IPCF - Droits d'enregistrement et de succession
B.
Personnes tenues de déclarer
184.- En principe, l'obligation de déposer la déclaration de succession incombe aux héritiers
et aux légataires et donataires universels, à l'exclusion de tous autres légataires ou donataires
(article 38, 1°, al. 1 du CDS). Cette obligation pèse donc en premier lieu sur ceux qui ont
vocation à recueillir toute la succession.
Par contre, les légataires à titre universel, les légataires à titre particulier et les successeurs
anomaux ne sont pas, en principe, astreints au dépôt de la déclaration de succession. Ils
peuvent toutefois être tenus, en cas d'inaction des héritiers et des légataires et donataires
universels, de déposer la déclaration pour ce qui les concerne, lorsqu'ils y sont requis par le
receveur de l'enregistrement par lettre recommandée à la poste (article 38, 1°, al. 2 du CDS).
L'acceptation d'une succession sous bénéfice d'inventaire ne décharge pas les héritiers, les
légataires et donataires universels de leur obligation de déposer la déclaration (article 73 du
CDS). Par contre, l’héritier, le légataire ou le donataire renonçant étant considéré comme
n'ayant jamais eu de vocation héréditaire, il est libéré de toute obligation de dépôt.
C.
Bureau compétent
185.- La déclaration de succession doit être déposée au bureau de l'enregistrement dans le
ressort duquel le défunt avait son dernier domicile fiscal (articles 38, 1°, al. 1er, et 3° à 7° du
CDS).
Il est dérogé à cette règle générale, si le domicile fiscal du défunt a été établi dans plus d’une
région au cours de la période de cinq ans précédant son décès. Dans ce cas, la déclaration doit
être introduite auprès du bureau des droits de succession de la région dans laquelle le domicile
fiscal du défunt a été établi le plus longtemps durant ladite période.
D.
Délai de dépôt
186.- Le calcul du délai dans lequel la déclaration doit être déposée diffère suivant le lieu du
décès du défunt. Il est de :
-
5 mois, si le décès est survenu en Belgique;
6 mois, si le décès est survenu dans un autre pays d'Europe;
7 mois, si le décès est survenu hors d'Europe.
Le point de départ du délai est la date du décès. Le délai ainsi fixé peut être prolongé par le
directeur général de l'enregistrement et des domaines (article 41 du CDS). La prolongation
doit toutefois être accordée avant l'expiration du délai primitif ou du délai déjà prolongé.
114
Luc HERVE - Séminaire Stagiaires IPCF - Droits d'enregistrement et de succession
Le délai fixé par la loi ou prolongé doit être rigoureusement respecté. Le retard dans le dépôt
rend exigible une amende fiscale (article 124 du CDS).
Les délais se calculent de quantième à quantième, quel que soit le nombre de jours ou de mois
durant lesquels ces délais s'écoulent. Le jour du décès, ou dies a quo, n'est pas compté pour le
calcul du délai, conformément au droit commun.
Le dernier jour du délai expire à l'heure réglementaire de fermeture des bureaux. Si le dernier
jour est un jour de fermeture des bureaux (samedi, dimanche ou jour férié légal), le délai est
prorogé jusqu'au premier jour d'ouverture des bureaux qui suit l'expiration du délai (article
123 du CDS).
E.
Forme et contenu de la déclaration
187.- Les déclarations de succession doivent être rédigées sur une formule spéciale, ayant la
forme d'un feuillet double et mise gratuitement à disposition par l'administration. IL peut
également être téléchargé.
Si nécessaire, la déclaration doit contenir les indications prescrites par les articles 42 à 44 et
46 du CDS.
F.
Défaut de déclaration
188.- A défaut de déclaration dans le délai prescrit, l'administration peut arbitrer d'office,
sauf régularisation ultérieure, le montant des sommes dues et en poursuivre le recouvrement
conformément à l'article 142 (article 47 du CDS).
Quand, pour quelque motif que ce soit, les héritiers, légataires ou donataires restent en défaut
de déposer la déclaration, l'administration peut arbitrer d'office la valeur des biens de la
succession et procéder, par voie de contrainte, au recouvrement des sommes dues.
La contrainte doit faire apparaître l'obligation de dépôt d'une déclaration et donc établir qu'il
s'est opéré une transmission successorale de biens (article 36 du CDS), mais il n'est pas requis
que la contrainte indique le détail de l'actif. L'énumération des avoirs sous des termes
génériques, suivie d'une estimation globale, est suffisante.
Lorsque le montant d'une succession a été arbitré d'office par l'administration, conformément
à l'article 47 du CDS, les héritiers ne sont pas recevables à discuter l'imposition d'office
devant le tribunal. Celui-ci n'a pas qualité pour apprécier cette imposition provisoire. S'ils ne
peuvent s'y rallier, les héritiers, légataires ou donataires doivent déposer une déclaration de
succession en bonne et due forme.
115
Luc HERVE - Séminaire Stagiaires IPCF - Droits d'enregistrement et de succession
Ce n'est que par le dépôt de la déclaration que la régularisation ultérieure est possible. Pour
l'application des articles 41 et 47 du CDS, la présentation d'une déclaration irrégulière qui a
été refusée par le receveur est traitée comme le non-dépôt d'une déclaration.
G.
Nouvelle déclaration
189.- L'impôt successoral naît lors de l'ouverture de la succession et est perçu suivant la
situation à ce moment sans qu'il puisse, en principe du moins, être influencé par des
événements ultérieurs. Les conventions que les ayants droit pourraient conclure avec des tiers
ou entre eux restent donc en règle sans influence sur l'impôt.
Toutefois, ce principe n'inclut nullement que tout fait ou évènement ultérieur reste sans
influence sur la perception. Puisque celle-ci doit s'effectuer sur la base de la dévolution légale
ou testamentaire et que cette dévolution peut être modifiée avec effet rétroactif, le principe est
que la perception de l'impôt successoral est influencée par les évènements auxquels la loi
civile accorde un effet rétroactif au jour du décès (le partage excepté).
Par ailleurs, l'article 37 du CDS détermine expressément les cas dans lesquels il y a lieu de
déposer une nouvelle déclaration, à savoir lorsque :
1° un droit tenu en suspens devient exigible (article 37, 1° et 5°);
2° la consistance active de la succession est augmentée (article 37, 2°);
3° il y a un changement de dévolution (article 37, 3°);
4° il y a accroissement ou réversion, ou transmission de biens grevés de la charge de
restitution (article 37, 4° et 6°).
190.- L'impôt successoral frappe exclusivement les biens qui font définitivement partie de la
succession. Pour la perception, on s'en tient à la consistance "économique" de l'hérédité et non
à sa consistance "juridique".
C'est ainsi qu'un bien ou un droit qui appartient au défunt sous condition suspensive, un droit
éventuel ou une action par laquelle le défunt revendique certains biens, ne constituent pas une
matière imposable.
Mais, dès qu'intervient un évènement qui a pour effet de faire rentrer des biens dans le
patrimoine du défunt (ainsi, l'accomplissement d'une condition suspensive, la réalisation d'un
droit éventuel ou la reconnaissance en justice ou à l'amiable du bien-fondé de l'action par
laquelle le défunt revendiquait certains biens), la consistance active de la succession est
augmentée avec effet rétroactif, cette augmentation d'actif donnant lieu à la perception de
droits complémentaires.
C'est pour permettre la liquidation de l'impôt complémentaire dû dans ces cas, que l'article 37,
2° du CDS prescrit le dépôt d'une nouvelle déclaration.
116
Luc HERVE - Séminaire Stagiaires IPCF - Droits d'enregistrement et de succession
191.- De la même manière, lorsqu’il y a changement de dévolution, l’article 37, 3° du CDS
impose le dépôt d’une nouvelle déclaration.
Suivant la loi fiscale, il y a changement de dévolution, lorsque la propriété des biens
successoraux est, par suite d'un évènement postérieur au décès, dévolue autrement qu'elle
l'était d'après la situation ostensible au décès, que le changement procède exclusivement de la
loi ou des dispositions testamentaires ou encore des agissements ultérieurs des héritiers,
légataires ou donataires, mis en rapport avec la loi ou avec les dispositions testamentaires.
Il y a donc changement de dévolution si, par exemple, l'un des évènements suivants se
produit:
-
la réalisation de la condition suspensive ou résolutoire dont un legs était assorti;
l'annulation ou la révocation par une décision judiciaire d'un testament qui avait force
probante jusqu'alors;
le refus d'acceptation, en tout ou en partie, d'un legs fait à une personne morale;
la révocation judiciaire d'un legs;
la renonciation pure et simple à une succession ou à un legs;
la naissance d'un enfant posthume né viable;
la transaction en matière de dévolution, dans certains cas du moins, etc…
La découverte d'un testament dont il résulte une dévolution différente de celle déclarée
antérieurement, emporte changement de dévolution si les héritiers ou légataires n'avaient pas
connaissance de ce testament lors du décès.
192.- L'évènement qui provoque l'accroissement ou la réversion de la propriété, de l'usufruit
ou de tout autre droit temporaire ou viager provenant d'une disposition à cause de mort prise
par le défunt, ne peut pas être considéré comme un changement de dévolution au sens prévu
par l'article 37, 3° du CDS car la deuxième transmission ou la transmission subséquente
n'efface pas la précédente avec effet rétroactif.
Lors de l'arrivée de ces évènements, un nouveau droit est dû par les personnes qui en
profitent, sauf application des articles 53 et 67 du CDS. Pour assurer le paiement des droits
qui peuvent devenir exigibles, l'article 37, 4° et 6° du CDS impose, dans ces cas, le dépôt
d'une nouvelle déclaration.
193.- En ce qui concerne les nouvelles déclarations, l'article 38 du CDS impose l'obligation
de dépôt aux personnes qui, comme redevables, sont concernées par le fait nouveau.
Cependant, si la nouvelle déclaration concerne la succession dans son intégralité (ainsi, en cas
de renonciation profitant à tous les autres héritiers intéressés ou d'augmentation de la
consistance active de la succession profitant à tous les héritiers), l'obligation de dépôt repose
sur les héritiers, légataires et donataires universels visés à l'article 38, 1° du CDS.
117
Luc HERVE - Séminaire Stagiaires IPCF - Droits d'enregistrement et de succession
Les nouvelles déclarations dont question à l'article 37 du CDS doivent toujours être déposées
au bureau où la première déclaration a été ou devait être déposée.
Les délais dans lesquels les nouvelles déclarations doivent être déposées sont les mêmes que
ceux qui valent pour les déclarations primitives. Le délai se calcule comme pour les
déclarations primitives. Il est également prorogé jusqu'au premier jour d'ouverture des
bureaux, lorsque le dernier jour du délai est un jour de fermeture. Les délais ainsi fixés
peuvent être prolongés par le directeur général de l'enregistrement et des domaines.
La durée du délai reste toujours déterminée par le lieu du décès du défunt pour la succession
duquel une nouvelle déclaration doit être déposée, quel que soit le lieu où s'est produit
l'évènement à l'origine du dépôt de cette nouvelle déclaration. Le point de départ du délai est
la date de l'évènement qui motive le dépôt de la nouvelle déclaration.
Le tarif applicable est toujours celui en vigueur au jour du décès (article 61 du CDS). Par
conséquent, si entre la date du décès et la date de l'évènement qui motive le dépôt d'une
nouvelle déclaration, le tarif des droits est modifié, il n'est nullement tenu compte de cette
modification pour la liquidation des droits.
Enfin, il y a lieu de déclarer comme valeur imposable la valeur des biens au jour du jugement,
de la transaction ou de l'évènement, qui constitue le point de départ du délai fixé pour le dépôt
de la nouvelle déclaration.
SECTION 4.
ACTIF IMPOSABLE
194.- L’article 15 du CDS prévoit que "le droit de succession est dû sur l'universalité des
biens en quelque lieu qu'ils se trouvent, appartenant au défunt ou à l'absent, déduction faite
des dettes et sauf application des articles 16 et 17."
Le droit de succession est donc dû sur l'universalité des biens, immeubles ou meubles,
corporels ou incorporels, en quelque lieu qu'ils se trouvent, appartenant au défunt.
Pour déterminer quels biens appartiennent au défunt à son décès, il faut appliquer les règles
du droit civil. Si le défunt était marié, il faut en outre tenir compte de son régime matrimonial.
A.
Biens dépendant de la succession
195.- Les articles 1 et 2 du CDS disposent que le droit de succession frappe la transmission
du patrimoine du défunt qui s'opère par son décès, après déduction des dettes et sans
distinguer suivant que la transmission a lieu en vertu de la loi, d'un testament ou d'une
institution contractuelle.
118
Luc HERVE - Séminaire Stagiaires IPCF - Droits d'enregistrement et de succession
Pour que des biens fassent partie de la masse imposable, il ne suffit pas que ces biens
appartiennent au défunt à son décès, il est en outre requis que ces biens soient transmis par
succession.
A défaut de transmission par décès, l'impôt successoral ne frappe donc pas :
1° les biens dont le défunt était propriétaire, mais qui ne sont pas transmis par décès à
ses héritiers, légataires ou donataires, parce qu'ils passent à ces personnes ou à
d'autres, à un titre différent, par exemple, en vertu d'une clause d'accroissement
stipulée dans un acte entre vifs ou d'un retour conventionnel stipulé dans une
donation ;
2° les biens dont le défunt était propriétaire, mais qui ne passent pas à ses ayants droit,
parce qu'il s'agit de droits viagers, c'est-à-dire de droits qui s'éteignent à son décès,
comme l'usufruit et les rentes constitués sur la tête du défunt ;
3° les droits qui, à l'occasion du décès, prennent naissance directement dans le chef des
héritiers, légataires ou donataires et qui sont acquis par ces derniers jure proprio, c'està-dire en vertu d'un droit qui naît dans leur chef (indépendamment de leur qualité
d'héritier ...), tels que le droit à la pension de veuve ou encore l'indemnité accordée à la
veuve pour dommage moral subi à la suite de l'accident qui a causé la mort de son
mari.
Puisque la réduction de legs concerne manifestement des biens délaissés par le défunt, les
biens qui en font l'objet relèvent de la masse imposable. Ces biens sont imposés dans le chef
du légataire ou, si la réduction est demandée, dans le chef des héritiers réservataires pour la
partie réduite.
196.- En règle générale, le droit de succession frappe exclusivement les biens et les droits
qui font partie définitivement de l'héritage. Ainsi, ne font pas partie de la masse imposable les
biens et les droits qui appartenaient au défunt sous condition suspensive, non encore réalisée.
L'impôt successoral ne sera perçu sur ces biens et droits que lors de l'accomplissement de la
condition.
Une nouvelle déclaration doit alors être déposée (article 37, 2° du CDS). La perception de
l'impôt se fera compte tenu de la nouvelle situation et sur la valeur au jour de
l'accomplissement de la condition, mais suivant le tarif en vigueur au jour du décès (articles
25 et 61 du CDS).
De la même manière, les biens que le défunt a aliénés sous condition résolutoire doivent être
négligés pour la perception de l'impôt successoral. Si la condition se réalise, ils sont
considérés comme faisant à nouveau partie du patrimoine du défunt et ce, avec effet rétroactif.
La perception de l'impôt successoral doit être revue en fonction de la nouvelle situation.
119
Luc HERVE - Séminaire Stagiaires IPCF - Droits d'enregistrement et de succession
Les sommes ou les biens que les ayants droit doivent abandonner lors de l'accomplissement
de la condition peuvent évidemment être portés en déduction de l'actif.
Par contre, les biens aliénés par le défunt sous une condition suspensive, non encore réalisée à
son décès, sont considérés comme faisant partie de son patrimoine et sont donc soumis au
droit de succession. Lors de la réalisation de la condition, les biens disparaissent de l'actif et la
perception doit être revue en fonction de la nouvelle situation. S'il échet, le prix ou les biens
qui se substituent aux biens aliénés doivent être ajoutés à l'actif comme éléments nouveaux du
patrimoine.
De la même manière, les biens et les droits que le défunt possédait sous condition résolutoire,
non encore réalisée, font réellement partie de l'actif successoral. Si la condition se réalise, la
perception doit être remaniée sur la base de la situation nouvelle. L'indemnité que les ayants
droit obtiennent en contrepartie du bien qui disparaît de l'actif, doit cependant être portée à
l'actif de la succession.
B.
Particularités propres à certains biens dépendant de la succession
B.1.
Intérêts dans des sociétés civiles
197.- Contrairement aux sociétés commerciales ou aux sociétés à forme commerciale, la
société civile ne constitue pas une personne morale distincte de celle des associés. Aussi, les
associés dans une société civile sont propriétaires indivis des biens composant l'avoir social.
Dès lors, si le défunt était membre d'une société civile, ses ayants droit doivent déclarer, d'une
part, à l'actif de la succession, la part indivise du défunt dans l'avoir social et, d'autre part, au
passif, sa part dans les dettes de la société.
B.2.
Le défunt était associé dans une société commerciale dotée de la personnalité
juridique
198.- Les sociétés commerciales dotées de la personnalité juridique constituent une
individualité juridique distincte de celle des associés.
Il en résulte que les associés ne sont pas propriétaires indivis des biens sociaux, mais qu'ils
n'ont envers la société qu'un droit de nature mobilière (meuble incorporel) représenté par des
actions (dans les sociétés de capitaux) ou des parts sociales (dans les sociétés de personnes).
Par conséquent, la succession d'un défunt associé dans une société commerciale à personnalité
juridique ne comprend que ses actions ou ses parts.
120
Luc HERVE - Séminaire Stagiaires IPCF - Droits d'enregistrement et de succession
C.
Conséquence du régime matrimonial du défunt
199.- Lorsque le défunt était marié, la détermination de la masse imposable dépend
principalement de son régime matrimonial.
La connaissance de la législation relative aux régimes matrimoniaux est donc indispensable
pour procéder à une exacte perception du droit de succession.
C.1.
Principes
200.- Lorsque les époux sont mariés sous un régime de communauté (régime légal, régime
de communauté universelle), il existe en fait trois patrimoines : celui du mari, celui de la
femme et le patrimoine commun des deux époux.
Le patrimoine commun n'est pas une indivision ordinaire. Sans pour autant avoir une
personnalité juridique distincte de celle des époux, le patrimoine commun constitue une entité
de droit, propriété commune des époux, mais distincte de leur patrimoine propre.
En cas de décès d'un des époux, il importe donc, pour déterminer la masse imposable, de
savoir à quel patrimoine appartiennent les biens qui, au jour du décès, étaient en la possession
des époux.
Pour déterminer la composition du patrimoine commun ainsi que celle des patrimoines
propres des époux, l'administration se contente, pour la perception de l'impôt successoral, des
moyens de preuve qui sont admis entre les époux ou leurs héritiers.
Les biens, tant meubles qu'immeubles, que les époux ont acquis à titre de remploi de deniers
provenant de l'aliénation d'un bien propre, ou à titre d'emploi au moyen de fonds propres,
restent propres.
C.2.
Récompenses
201.- Lorsque les époux sont mariés sous un régime de communauté, il y a trois patrimoines.
Aucun de ces patrimoines ne peut s'enrichir au détriment de l'autre.
Lorsqu'il se produit, directement ou indirectement, un transfert de valeur d'un patrimoine à
l'autre, c'est-à-dire lorsqu'il y a appauvrissement d'un patrimoine au profit de l'autre, la loi
prévoit que l'équilibre est rétabli au moyen d'une indemnité à payer par le patrimoine enrichi.
Cette indemnité est appelée "récompense", qu'elle soit due par un époux au patrimoine
commun ou par celui-ci à l'un des époux. Si l'indemnité est due par un époux à son conjoint,
elle prend le nom de "créance".
121
Luc HERVE - Séminaire Stagiaires IPCF - Droits d'enregistrement et de succession
Dans le chef de chacun des époux, on ne retient que le solde du compte des récompenses, eu
égard à ce qu'il doit au patrimoine commun et à ce qui lui est dû par celui-ci.
Si le compte se solde par un crédit en faveur du patrimoine commun, l'époux débiteur doit en
principe verser une somme équivalente dans l'actif commun. Par contre, si le solde est
favorable à l'un des époux, il ne peut être payé que sur l'actif commun net. Si celui-ci est
insuffisant, l'époux qui n'a pu obtenir la totalité de sa récompense, devient créancier de son
conjoint à concurrence de la moitié de ce qu'il n'a pas reçu.
En vertu de l'article 1438 du Code civil, lorsque les deux époux sont tous deux créanciers ou
débiteurs de récompenses, leurs créances et dettes respectives sont compensées à concurrence
du montant le plus faible.
En principe, le compte des récompenses intervient pour la détermination de la masse
successorale imposable.
L'article 16, alinéa 1 du CDS prévoit toutefois une dérogation à cette règle en prescrivant que,
pour la perception du droit de succession en ligne directe descendante ou entre époux ayant
des enfants ou descendants communs, il est fait abstraction des récompenses qui se rattachent
soit à la communauté ayant existé entre le défunt et son époux (ou épouse) dont il (elle) a, à
son décès, des enfants ou descendants en vie, soit à la communauté ayant existé entre les
ascendants du défunt.
L'article 16 du CDS n'offre pas une simple faculté de négliger les récompenses. Il doit être
appliqué chaque fois que les conditions requises sont remplies, abstraction faite de la question
de savoir si la disposition est ou non avantageuse pour le Trésor.
SECTION 5.
EVALUATION DE L'ACTIF IMPOSABLE
A.
Principes
A.1.
Règles générales
202.- En règle générale, les biens qui, pour la perception du droit de succession, composent
l'actif imposable, doivent être estimés par les déclarants à leur valeur vénale au jour du décès
(article 19, alinéa 1 du CDS).
L'article 19 contient les règles fondamentales suivantes:
a)
Les biens qui composent l'actif imposable doivent être estimés à leur valeur vénale.
Les articles 21 à 24, et 26 du CDS prévoient cependant des règles particulières pour
l'estimation de certains biens.
122
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b)
Les biens doivent être estimés à la date du décès. Dans certains cas, il est dérogé à
cette règle par l'article 25 du CDS.
c)
Les biens doivent être estimés par les déclarants. L'administration se borne à contrôler
les évaluations. Toutefois, l'article 20 du CDS offre aux déclarants la possibilité de
faire évaluer contradictoirement les biens avant le dépôt de la déclaration.
A.2.
Valeur vénale – Notion
203.- Par "valeur vénale" d'un bien, il faut entendre le prix que l'amateur le plus offrant
s'engagerait à payer si le bien était mis en vente dans les conditions les plus favorables et
après une préparation adéquate, le jour où le bien doit être estimé.
La valeur vénale doit être fixée d'une manière objective, sans tenir compte de la valeur de
convenance ou d'affection que le bien aurait pour l'un ou l'autre amateur. En outre, les biens
faisant partie de la succession doivent être estimés tels qu'ils se trouvent dans le patrimoine du
défunt au jour du décès.
Pour la détermination de la valeur vénale, il ne peut donc être tenu compte des charges que le
testament impose aux héritiers en ce qui concerne l'affectation des biens délaissés.
A.3.
Expertise préalable
204.- Par dérogation à l'obligation imposée par l'article 19 du CDS aux héritiers de procéder
eux-mêmes à l'évaluation de l'actif imposable, l'article 20 du CDS donne aux intéressés la
possibilité de faire déterminer cette valeur par une expertise contradictoire avec
l'administration, avant le dépôt de la déclaration.
Cette évaluation, communément appelée expertise préalable, a lieu aux frais des requérants et
peut être demandée pour tous les biens successoraux se trouvant en Belgique et qui doivent ou
peuvent être déclarés pour leur valeur vénale. Elle diffère de l'expertise de contrôle qui est le
moyen que l'administration met en oeuvre pour établir l'insuffisance de la valeur (article 111
du CDS).
L'expertise préalable peut être demandée par toute personne qui, en vertu de l'article 38 du
CDS, est tenue au dépôt de la déclaration. Elle doit être demandée avant le dépôt de la
déclaration et au plus tard avant l'expiration du délai de dépôt (éventuellement prolongé par le
directeur général).
Lorsque, en application de l'article 38, 1°, alinéa 2 du CDS, un légataire particulier est invité à
déposer une déclaration pour ce qui le concerne, il doit demander l'expertise préalable avant
l'expiration du délai d'un mois qui lui est imparti. La demande de l'expertise préalable doit
123
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être faite par lettre recommandée à la poste, adressée au receveur du bureau où la déclaration
doit être déposée.
L'expertise préalable peut être demandée pour tout ou partie des biens successoraux se
trouvant en Belgique et qui doivent ou peuvent être déclarés pour leur valeur vénale.
Il n'est pas requis que l'expertise préalable soit demandée pour tous les biens qui dépendent de
la succession et qui doivent être déclarés pour leur valeur vénale. Les déclarants (requérants)
peuvent demander l'expertise préalable pour une partie seulement de ces biens.
Il n'est pas davantage requis que les biens pour lesquels l'expertise préalable est demandée
appartiennent en totalité au défunt. Ainsi, l'expertise peut être demandée pour un bien qui
n'appartenait au défunt que pour une partie seulement. Mais il est, par contre, indispensable
que les biens se trouvent en Belgique.
L'appréciation des experts chargés de l'expertise préalable lie aussi bien l'administration que
les contribuables et sert de base à la liquidation de l'impôt. La décision des experts n'est
susceptible d'aucun recours.
La procédure à suivre est la même que celle prévue par les articles 113 à 120 et 122 du CDS
pour l'expertise de contrôle.
B.
Règles particulières
B.1.
Immeubles situés à l'étranger (article 21, I du CDS)
205.- En principe, la valeur imposable des immeubles situés à l'étranger consiste dans leur
valeur vénale, si celle-ci résulte d'actes et documents (PV d’expertise, acte de vente
récent,…).
Si la valeur vénale ne résulte pas d'actes ou documents, la valeur à déclarer est la valeur
obtenue en multipliant le produit annuel des biens ou le prix des baux courants par vingt pour
les propriétés bâties, et par trente pour les propriétés non bâties, sans distraction des charges
imposées au locataire ou au fermier.
Il y a une importante réserve : en aucun cas, la valeur imposable ne peut être inférieure à celle
qui a servi de base pour la perception de l'impôt à l'étranger.
B.2.
Créances de sommes d'argent (articles 21, II et 24 du CDS)
206.- Qu'elles soient ou non privilégiées, elles doivent être déclarées pour le montant
nominal du capital, des intérêts échus et non payés et des intérêts courus.
124
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Pour le calcul du prorata d'intérêts courus, les mois sont comptés pour 30 jours et l'année pour
360 jours.
Les créances ne peuvent donc jamais être imposées pour un montant supérieur à celui précisé
ci-dessus, même si, lors d'une cession faite postérieurement au décès, les ayants cause ont
obtenu un prix de vente supérieur.
B.3.
Effets publics (article 21, III du CDS)
207.- La valeur imposable des effets publics est arrêtée d’après le prix courant publié par
ordre du gouvernement, pour autant que les conditions du prix courant répondent à un cours
fait durant le mois pour lequel il est établi.
Le prix courant à employer est celui qui a été publié dans le mois qui suit celui du décès.
Toutefois, les intéressés peuvent se référer à l’un des deux prix courants postérieurs, à la
condition d’indiquer leur choix dans leur déclaration. Ce choix ne peut porter que sur un seul
prix courant qui est applicable à toutes les valeurs délaissées.
En raison de la crise financière intervenue durant l’automne 2008, le décret-programme
wallon du 18 décembre 2008, applicable à cet égard à partir du 30 décembre 2008, prévoit
une mesure temporaire : lorsque le décès est intervenu entre le 1er mai 2008 et le 31 décembre
2009, il était également permis de se référer au prix courant publié dans le quatrième ou le
cinquième mois qui suit celui du décès.
Le même décret-programme contient une autre disposition temporaire applicable aux
instruments financiers au sens de l’article 2, 1° de la loi du 2 août 2002 relative à la
surveillance du secteur financier et aux services financiers, ainsi qu’aux titres de société (au
sens de l’article 60bis du CDS) non déjà visés parmi le capital ou les effets publics.
B.4.
Rentes (articles 21, IV, V et VII et 22 du CDS)
208.- Une distinction est faite entre les rentes perpétuelles et les rentes temporaires, ces
dernières faisant l’objet d’une capitalisation.
B.5.
Usufruit et nue-propriété (articles 21, V à VIII et 22 du CDS)
209.- La valeur imposable de l'usufruit (viager) constitué sur la tête d'un tiers est obtenue en
multipliant le revenu annuel des biens, calculé au taux de 4 % de la valeur de la pleine
propriété des biens sur lesquels l'usufruit est établi, par le même coefficient que celui utilisé
pour le calcul de la valeur imposable d'une rente viagère (article 21, V du CDS).
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Les règles qui valent pour l'évaluation des rentes temporaires sont également applicables en
l'espèce, étant entendu que le revenu annuel est fixé à 4 % de la valeur de la pleine propriété.
La base imposable de la nue-propriété est toujours représentée par la différence entre la valeur
(vénale) de la pleine propriété des biens au jour du décès et la valeur forfaitaire de l'usufruit.
SECTION 6.
PASSIF
210.- Il ressort de l’article 27 du CDS qu'il n'y a que deux catégories de dettes susceptibles
d'être déduites, à savoir les dettes du défunt existant au décès et les frais funéraires. Ces
derniers frais ne sont pas à proprement parler des dettes du défunt mais plutôt des frais qui
résultent directement de son décès.
A.
Dettes existantes
A.1.
Notion
211.- En principe, toutes les obligations dont le défunt était tenu au moment de son décès
sont déductibles de l'actif délaissé, qu'il s'agisse de dettes civiles ou commerciales, de dettes
privilégiées ou hypothécaires ou de dettes sans garantie particulière. Peu importe, en principe,
la cause de la dette.
Toutefois, il est dérogé à cette règle pour les dettes uniquement reconnues par testament du
défunt, qui sont considérées comme des legs pour la perception des droits de succession
(articles 4 et 32 du CDS).
Pour être admissible au passif de la succession, la dette doit exister au moment du décès, ce
qui signifie que le défunt devait être tenu au paiement d'une manière certaine et définitive.
Puisque le droit de succession frappe essentiellement l'enrichissement effectif des ayants
droit, il ne peut être tenu compte, pour la perception des droits de succession, que de la
contribution effective aux dettes. Il importe donc de distinguer la contribution (mesure dans
laquelle chaque débiteur doit en définitive supporter la dette) et l'obligation aux dettes
(mesure dans laquelle chaque débiteur peut être poursuivi en paiement par le créancier).
Ainsi, si à son décès, le défunt était tenu solidairement et indivisiblement avec un co-débiteur
d'une dette de somme d'argent de 10.000 € envers un tiers, la dette ne peut être admise au
passif de la succession du défunt qu'à concurrence de 5.000 € (en principe, sa part
contributoire), alors même que le tiers peut poursuivre les ayants droit du défunt pour le
montant total de 10.000 € (part obligatoire).
126
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Si le défunt s'était engagé en qualité de caution solidaire d'une dette contractée par un débiteur
envers un tiers créancier, il ne peut rien être admis au passif de la succession du chef de cette
dette. En effet, dans cette hypothèse, la part contributoire du défunt est nulle.
A.2.
Particularités
212.- Plusieurs dispositions particulières existent :
a)
Lorsque le défunt a contracté une dette qui s’éteint par suite du décès (par exemple,
une obligation garantie par une assurance-vie qui intervient lors du décès), cette dette ne passe
pas aux ayants droit, et elle ne peut pas être admise au passif de la succession.
b)
En vertu de l’article 205bis, § 1er du Code civil, la succession de l'époux prémourant
doit des aliments au survivant, si celui-ci est dans le besoin au moment du décès. De même, la
succession de l'époux prédécédé sans laisser de postérité, doit des aliments aux ascendants du
défunt qui sont dans le besoin au moment du décès, à concurrence des droits successoraux
dont ils sont privés par des libéralités au profit du conjoint survivant (article 205bis, § 2 du
Code civil).
Ces obligations alimentaires constituent des dettes de la succession. S'il échet, elles peuvent
être portées au passif successoral.
c)
Les dettes conditionnelles obéissent aux mêmes règles que les biens conditionnels.
Ainsi, la dette dont le défunt était tenu sous condition suspensive doit être négligée aussi
longtemps que la condition n'est pas réalisée. Lors de la réalisation de la condition, la
déduction de la dette est autorisée et l'impôt perçu en trop est restituable par application de
l'article 135, 4° du CDS.
Si la dette a été contractée sous condition résolutoire, elle est traitée comme une dette pure et
simple. Lors de la réalisation de la condition, elle disparaît rétroactivement du passif et il en
résulte une augmentation de la base sur laquelle l'impôt successoral doit être perçu (article 37,
2° du CDS).
d)
Lorsqu'avant son décès, le défunt s'était engagé envers un tiers moyennant le paiement
par anticipation d'une somme déterminée, soit à exécuter un certain travail, soit à entretenir
une personne pendant une période qui au moment du décès n'est pas encore révolue, ces dettes
sont admissibles au passif.
e)
L'impôt des personnes physiques qui frappe les revenus encaissés ou recueillis par le
défunt avant son décès constitue une dette du défunt existante au moment du décès, même si
127
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l'impôt n'a été enrôlé qu'après le décès ou s'il a été établi à l'aide de renseignements puisés
dans la déclaration de succession.
Le précompte immobilier qui reste dû au jour du décès pour l'année d'imposition au cours de
laquelle le décès est survenu, n'est admissible au passif qu'au prorata de la jouissance que le
défunt a exercée depuis le 1er janvier de cette année jusqu'au décès.
f)
Tout comme pour l'actif, il faut, pour la détermination du passif, tenir compte du
régime matrimonial qui régit le défunt marié quant à ses biens.
Il importe en premier lieu d'établir quelle est la part contributoire du défunt dans les dettes qui
existent encore lors de la dissolution du régime.
B.
Frais funéraires
213.- Par "frais funéraires", il faut entendre tous les frais occasionnés par les funérailles
selon les convenances et les usages, d'après la situation sociale et la fortune du défunt.
Les frais funéraires naissent seulement après le décès et ont pour seule cause le décès. Les
frais funéraires restent déductibles même si les ayants droit reçoivent "jure proprio" une
indemnité pour couvrir ces frais ou si un tiers supporte spontanément ces frais.
Toutefois, si les frais funéraires sont couverts par une assurance telle que le montant des frais
funéraires est directement payé à l'entrepreneur des pompes funèbres, ils ne peuvent être
repris au passif. La dette causée par le décès est en ce cas éteinte et ne doit plus être supportée
par les ayants droit.
Sont notamment considérés comme frais funéraires, à condition qu'ils ne soient pas exagérés
par rapport à l'actif délaissé :
1°
l'ensevelissement, l'embaumement, le cercueil, la décoration de la chambre mortuaire,
le corbillard et les voitures d'accompagnement, les salaires et pourboires des employés
des pompes funèbres, les taxes de chaises à l'église le jour de l'enterrement;
2°
le rapatriement du corps du défunt, y compris les frais de garde (en cas de décès à
l'étranger) ou le transport du corps du lieu du décès jusqu'au lieu de l'inhumation; les
frais faits pour retrouver le corps;
3°
le service religieux célébré dans la paroisse (ou à tout autre endroit où des services
religieux sont célébrés) du lieu du domicile ou éventuellement au lieu de l'inhumation;
4°
les frais d'incinération, le placement de l'urne cinéraire ou la dispersion des cendres;
128
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5°
les lettres de faire-part, les souvenirs mortuaires et les cartes de remerciement, leur
impression et leur distribution; les avis nécrologiques dans les journaux; les couronnes
mortuaires offertes par les héritiers ensemble;
6°
le repas donné le jour de l'enterrement;
7°
les frais de mise en terre, la concession du terrain, le caveau et la pierre mortuaire ainsi
que leur placement;
8°
les honoraires d'exécution du testament authentique du défunt.
C.
Cas particulier : dettes contractées par le défunt au profit d'un ayant droit
214.- L’article 33 du CDS stipule que : "Ne sont pas admises les dettes contractées par le
défunt au profit d'un de ses héritiers, légataires ou donataires ou de personnes interposées.
Cette disposition est applicable aux dettes contractées par le défunt :
a) au profit d'héritiers qu'il a exclus de sa succession par une disposition testamentaire ou
contractuelle;
b) au profit d'héritiers, légataires ou donataires qui ont renoncé à la succession ou à la
disposition testamentaire ou contractuelle faite en leur faveur.
Sont réputées personnes interposées, les personnes désignées dans les articles 911, dernier
alinéa, et 1100 du Code civil.
Toutefois, les dettes susvisées sont admises :
1° si la preuve de leur sincérité est administrée par les parties déclarantes; cette preuve peut
être faite par tous moyens de droit commun, témoins et présomptions compris, à l'exception
du serment;
2° si elles ont pour cause immédiate et directe l'acquisition, l'amélioration, la conservation ou
le recouvrement d'un bien qui se trouvait dans le patrimoine du défunt au jour de son décès."
Pour que l'article 33 du CDS soit applicable, les trois conditions suivantes doivent être
remplies:
1°
la dette doit procéder d'un contrat;
2°
le contrat doit avoir été conclu par le défunt;
3°
la dette doit avoir été contractée envers un héritier, légataire ou donataire ou une
personne interposée.
L'article 33 du CDS est de stricte interprétation. Il vise donc seulement les dettes contractées
au profit des personnes indiquées dans cet article (héritiers, légataires, donataires et
personnes interposées). La qualité d'héritier, de légataire ou de donataire est appréciée à la
date du décès.
Il est fait exception à cette règle, les dettes étant admises au passif, dans les deux hypothèses
visées dans la finale de cette disposition.
129
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D.
Répartition du passif
215.- Le Code des droits de succession ne contient aucune règle particulière en ce qui
concerne la répartition du passif. En principe, la répartition du passif doit dès lors avoir lieu
conformément aux règles du droit civil.
Le passif est donc supporté, proportionnellement à leur émolument brut, qui est déterminé
abstraction faite des legs de sommes ou de corps certains qu'ils sont tenus de supporter, par :
1°
2°
3°
les héritiers légaux;
les légataires et donataires universels;
les légataires à titre universel;
En principe, les biens ajoutés fictivement à l'actif (articles 4 à 14 du CDS) n'entrent pas en
ligne de compte pour la répartition du passif; il en est ainsi même, lorsque ces biens doivent
être ajoutés à la part d'un héritier légal, d'un légataire universel ou d'un légataire à titre
universel.
Le défunt peut toutefois avoir dérogé par testament aux règles du droit commun quant à la
contribution aux dettes et avoir mis à charge d'un ou de plusieurs héritiers ou légataires une
dette déterminée.
En matière d'impôt successoral, la répartition du passif entre le nu-propriétaire et l'usufruitier
obéit aux mêmes règles que la répartition de l'actif (article 66 du CDS). Cela signifie que si le
successeur recueille l'usufruit ou la nue-propriété de biens dépendant de la succession en
pleine propriété, cet usufruit et cette nue-propriété doivent être estimés, tant en ce qui
concerne l'actif que le passif, suivant les règles contenues dans les articles 21, 22 et 23 du
CDS
En principe, le droit de succession ne frappe que l'actif net délaissé par le défunt.
Si le défunt a consenti des legs particuliers pour un montant qui dépasse l'actif net délaissé,
ces legs doivent, pour la perception du droit de succession, être réduits proportionnellement
au montant de l'actif net, même si, en droit civil, l'héritier ou le légataire universel qui accepte
purement et simplement, est obligé d'acquitter intégralement ces legs. Cette règle, appelée
"règle du restant net", tend donc à ne jamais imposer plus que le solde net qui se retrouve
dans la succession.
SECTION 7.
EVALUATION DU PASSIF
216.- En vertu de l'article 28 du CDS, les règles relatives à l'évaluation des biens composant
l'actif successoral sont applicables à l'évaluation des dettes admissibles au passif. Il y a lieu de
se référer aux articles 21, II, à 25 du CDS.
130
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SECTION 8.
A.
PREUVE DES DETTES ADMISSIBLES AU PASSIF
Principe
217.- Les déclarants doivent établir l'existence des dettes qu'ils déclarent au passif, "par les
modes de preuve admissibles en justice dans un débat entre créancier et débiteur" (article 29,
alinéa 1 du CDS).
En principe, l'existence des dettes doit être établie par la preuve littérale, par un acte
authentique ou un acte sous seing privé. Si la preuve résulte d'un acte sous seing privé, il est
requis que l'écrit présenté satisfasse aux conditions de forme prescrites par le Code civil
(articles 1325 et 1326) et, qu'en outre, l'écrit ait date certaine (article 1328). Si l'écrit ne
satisfait pas à ces conditions, il peut éventuellement servir de commencement de preuve par
écrit.
La preuve par témoignages et présomptions est toutefois admise dans les cas suivants :
a)
si la dette est inférieure ou égale à 375 € (article 1341 du Code civil);
b)
s'il existe un commencement de preuve par écrit (article 1347 du Code civil);
c)
dans les cas où le créancier s'est trouvé dans l'impossibilité de se ménager une preuve
écrite de l'engagement qui a été contracté envers lui (article 1348 du Code civil ainsi
que les autres cas cités par cette disposition légale et notamment en matière
d'engagements résultant de quasi-contrats, de délits ou de quasi-délits);
d)
si, par suite d'un cas fortuit ou de force majeure, le créancier a perdu le titre qui lui
servait de preuve littérale (article 1348, 4° du Code civil);
e)
pour les dettes commerciales.
Les dettes et les frais qui ne sont pas ou qui sont insuffisamment justifiés, sont rejetés du
passif. Dans ce cas, les déclarants peuvent par la suite fournir la preuve requise et obtenir la
restitution des droits payés à la suite du rejet des dettes (article 134, 2° du CDS). Cette preuve
doit cependant être fournie dans les deux ans après le paiement de l'impôt.
Les frais funéraires sont suffisamment prouvés par la production de notes et factures les
concernant.
B.
Modes de preuve particuliers
218.- Par dérogation au principe général précité, l'article 29, alinéa 2 du CDS stipule que les
dettes relatives à la profession du défunt et celles relatives à la dépense domestique de l'année
échue et de l'année courante peuvent toutefois être établies par témoins et présomptions.
131
Luc HERVE - Séminaire Stagiaires IPCF - Droits d'enregistrement et de succession
Sont visées :
a)
toutes les dettes que le défunt a en raison de sa profession ;
Par profession, on vise en particulier les professions libérales et les métiers. Lorsque le
défunt était commerçant, la preuve de ses dettes peut être établie par témoignages et
présomptions.
b)
les dépenses domestiques, c’est-à-dire les dépenses relatives au loyer, à l'éclairage, au
chauffage, à la nourriture et à l'éducation des enfants, le coût des vêtements, les frais
médicaux, ...
Dans la mesure où elles concernent l'année échue et l'année en cours, ces dettes peuvent être
justifiées par témoignages et présomptions.
219.- Pour certaines dettes, limitativement énumérées par l’article 30 du CDS, le législateur a
aggravé la charge de la preuve.
Il s’agit :
des dettes hypothécaires dont l'inscription était, au jour de l'ouverture de la succession,
périmée depuis un an ou radiée;
des intérêts des dettes hypothécaires et non hypothécaires, des loyers et fermages, au
delà de l'année échue et de l'année courante;
des termes, échus depuis plus d'un an avant le décès, des obligations remboursables
par annuités.
Pour ces dettes, "la seule production du titre constitutif ne suffit pas" pour en établir
l’existence. Il faut également démontrer qu’elles existaient encore au jour du décès. Cette
preuve peut être rapportée par toutes voies de droit.
220.- La charge de la preuve est également alourdie dans l’hypothèse visée à l’article 31 du
CDS, qui stipule que "toute dette dont l'existence est justifiée par la production d'un titre
revêtu d'une quittance non datée, est réputée, jusqu'à preuve contraire, avoir été acquittée
antérieurement au décès." La preuve contraire peut être fournie par toutes voies de droit.
221.- En vertu de l’article 34 du CDS, pour les dettes existantes au moment du décès,
l'administration a, dans tous les cas, la faculté d'exiger des déclarants la production d'une
attestation du créancier, à titre de garantie supplémentaire et indépendamment de la preuve de
la dette. Le créancier ne peut pas refuser cette attestation, sous peine de dommages-intérêts,
lorsqu'elle est légitimement réclamée.
Les dettes pour lesquelles l'attestation demandée n'est pas produite sont rejetées du passif,
même si leur existence paraît avoir été régulièrement justifiée.
132
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CHAPITRE III.
TARIF DES DROITS
222.- Les droits de succession sont calculés sur la part nette recueillie par chaque ayant
droit, suivant un tarif progressif qui varie suivant le degré de parenté existant entre le défunt et
ses ayants droit.
Depuis le 1er janvier 1997, les tarifs applicables diffèrent selon le lieu où la succession est
imposable, en Flandre, en Wallonie ou à Bruxelles.
Cependant, si le tarif progressif peut sensiblement varier d’une région à l’autre, on peut
constater que les règles de calcul et de liquidation des droits sont généralement similaires,
surtout en ce qui concerne la Région wallonne et la Région de Bruxelles-Capitale.
SECTION 1.
PRINCIPES
223.- Le tableau reprenant le tarif progressif des droits de succession est contenu dans
l’article 48 du CDS, tel qu’il est applicable à la Région wallonne.
A.
Parenté et alliance
224.- La parenté à prendre en considération pour l'application de l'article 48 du CDS est la
parenté par le sang.
L'article 334 du Code civil prévoit la mise sur pied d'égalité de principe de tous les enfants,
quel que soit le mode d'établissement de leur filiation, et leur complète intégration dans la
famille de leurs auteurs. A partir du moment où la filiation est établie et, par suite, le degré de
parenté avec le défunt, on peut déterminer le tarif à appliquer.
Pour la détermination du tarif applicable, il n'est en principe pas tenu compte du lien de
parenté résultant de l'adoption (article 52², alinéa 1 du CDS). Il existe cependant des
exceptions à ce principe :
a)
Ainsi, le lien de parenté qui naît en cas d'adoption plénière équivaut au lien de parenté
naturelle vis-à-vis tant des auteurs de l'adoption que de leurs parents (article 370 du Code
civil). Le tarif en ligne directe est applicable à ce que l'enfant pleinement adopté ou ses
descendants recueillent dans la succession des époux ou de la personne ayant adopté cet
enfant.
Les enfants pleinement adoptés cessant d'appartenir à leur famille d'origine, l'impôt
successoral est dû selon le tarif prévu pour les transmissions entre personnes non parentes sur
ce qu'ils recueillent dans la succession de membres de cette famille.
133
Luc HERVE - Séminaire Stagiaires IPCF - Droits d'enregistrement et de succession
b)
Dans les cas limitativement énumérés à l’article 522, alinéa 2 du CDS, le législateur
assimile, pour la perception du droit de succession, l'enfant adoptif à un descendant plénier.
Ainsi que le précise cette disposition, moyennant justifications à fournir par les intéressés, il
est tenu compte de la filiation adoptive dans les cas suivants:
1°
lorsque l'enfant adoptif est un enfant du conjoint ou du cohabitant légal de l'adoptant;
2°
lorsque, au moment de l'adoption, l'enfant adoptif était sous la tutelle de l'assistance
publique ou d'un centre public d'aide sociale, ou orphelin d'un père ou d'une mère
morts pour la Belgique;
3°
lorsque l'enfant adoptif a, avant d'avoir atteint l'âge de vingt et un ans et pendant six
années ininterrompues, reçu exclusivement ou principalement, de l'adoptant ou
éventuellement de l'adoptant et de son conjoint ou de son cohabitant légal ensemble,
les secours et les soins que les enfants reçoivent normalement de leurs parents;
4°
lorsque l'adoption a été faite par une personne dont tous les descendants sont morts
pour la Belgique.
225.- L'alliance par mariage est complètement négligée pour la détermination du tarif
applicable, sauf en ce qui concerne la part recueillie par le conjoint survivant.
Ainsi, si une personne alliée recueille des biens dans la succession d'un parent de son
conjoint, c'est toujours le tarif entre toutes autres personnes qui s'applique, sauf si la personne
alliée est également un parent du défunt.
B.
Cohabitation légale
226.- Pour les successions s'étant ouvertes après le 28 novembre 2001, l'ayant droit qui
cohabite légalement avec le défunt est, sous certaines conditions, imposé selon le même tarif
que le conjoint du défunt ou un successeur en ligne directe (article 48 in fine du CDS - Région
wallonne)
Le tarif entre cohabitants légaux ne peut s'appliquer que si, au jour de l'ouverture de la
succession, il est satisfait aux conditions suivantes :
a)
Le défunt et son ayant droit doivent, au jour de l'ouverture de la succession, cohabiter,
c'est-à-dire, être domiciliés à la même adresse.
b)
Le défunt et son ayant droit doivent avoir le statut de cohabitants légaux au sens du
livre III, titre V bis, du Code civil. Ils doivent donc avoir fait une déclaration écrite de
cohabitation légale conformément à l'article 1476 du Code civil et l'avoir remise au
fonctionnaire de l'Etat civil de leur lieu de résidence commune.
134
Luc HERVE - Séminaire Stagiaires IPCF - Droits d'enregistrement et de succession
c)
La déclaration de cohabitation légale visée à l'article 1476 du Code civil doit avoir été
reçue par le fonctionnaire de l'Etat civil plus d'un an avant l'ouverture de la succession.
A cet égard, c'est la date de l'accusé de réception délivré par le fonctionnaire de l'Etat
civil qui est déterminante, pas celle de la déclaration écrite. Au moment de l'ouverture
de la succession, le défunt et son ayant droit devaient donc cohabiter légalement
depuis plus d'un an.
d)
Il ne peut pas s'agir de personnes qui sont :
- frères et/ou sœurs ;
- oncle et neveu ou nièce ;
- tante et neveu ou nièce.
SECTION 2.
A.
REGLES PARTICULIERES
Tarif entre époux et entre cohabitants légaux
227.- En vertu de l'article 50 du CDS, le tarif "entre époux" ou "entre cohabitants légaux"
n'est pas applicable lorsque les conjoints sont divorcés ou séparés de corps ou que les
cohabitants légaux ont fait une déclaration de cessation de cohabitation légale, et qu'ils n'ont
pas d'enfants ou de descendants communs en vie.
Le tarif "entre époux" ou "entre cohabitants légaux" reste applicable en cas de divorce ou de
séparation de corps et si la cohabitation légale a cessé après plus d'un an (de cohabitation
légale), mais que les conjoints ou les cohabitants ont des enfants ou des descendants
communs.
En vertu de l'article 51 du CDS, lorsque l'époux ou le cohabitant légal survivant vient à la
succession de son conjoint ou de son cohabitant légal, soit en qualité d'héritier légal, soit à
tout autre titre (en cas de mariage entre cousins, par exemple), le droit est liquidé au tarif
"entre époux" ou "entre cohabitants légaux" sur l'intégralité de ce qui lui est dévolu.
Il importe d'observer que le statut de cohabitant légal ne comporte aucune vocation
successorale légale, de sorte que le partenaire cohabitant ne peut venir à la succession que via
une disposition testamentaire. A défaut le tarif "entre toutes autres personnes" lui sera
applicable.
B.
Tarif en ligne directe - Assimilations
228.- En vue d'appliquer le tarif en ligne directe pour les enfants d'une famille recomposée,
le législateur wallon a inséré dans le CDS un article 523, applicable aux successions ouvertes
à partir du 29 novembre 2003, qui prévoit un certain nombre d'assimilations aux "obtentions"
en ligne directe, à savoir les "obtentions" entre :
135
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- une personne et un enfant de son conjoint ;
- un(e) cohabitant(e) et un enfant de la personne avec il (elle) cohabite légalement ;
- une personne et l'enfant que cette personne a éduqué, à titre de parent d'accueil, de
tuteur, subrogé tuteur ou tuteur officieux.
Le tarif en ligne directe est ainsi applicable entre une personne et un enfant issu d'une
précédente relation du conjoint ou du cohabitant légal de cette personne, nonobstant la
circonstance que, par décès, le mariage ait été dissous ou que la cohabitation légale ait cessé.
L'assimilation au tarif en ligne directe s'applique même en cas de prédécès du parent (conjoint
ou cohabitant légal) de l'enfant. Le prédécès de l'autre conjoint ou cohabitant légal ne fait
donc pas obstacle à l'assimilation, pour autant que ce décès ait eu lieu pendant le mariage ou
la cohabitation légale.
Le tarif en ligne directe est applicable entre une personne et l'enfant que cette personne a
éduqué, à titre de parent d'accueil, de tuteur, subrogé tuteur ou tuteur officieux, pour autant
que la condition suivante soit remplie : l'enfant doit, avant d'avoir atteint l'âge de vingt et un
ans et pendant six années ininterrompues, avoir reçu "exclusivement ou principalement de
cette personne, ou éventuellement de cette personne et de son conjoint ou de son cohabitant
légal ensemble, les secours et les soins que les enfants reçoivent normalement de leurs
parents".
C.
Double qualité d'héritier
229.- Il est possible qu'une personne soit parente du défunt aussi bien dans la ligne
maternelle que dans la ligne paternelle et ce, à des degrés de parenté différents.
Lorsqu'une telle personne vient à la succession du défunt, soit en sa double qualité d'héritière,
soit comme légataire ou donataire, le droit est liquidé, selon le tarif le moins élevé, sur tout ce
qu'elle recueille (art. 521 du CDS).
D.
Incertitude quant à la dévolution de la succession ou au degré de parenté
230.- En vertu de l'article 49 du CDS, l'administration peut, quand il y a incertitude au sujet
de la dévolution de la succession ou du degré de parenté des ayants droit, percevoir le droit le
plus élevé qui puisse devenir exigible. Les intéressés peuvent se pourvoir en restitution dès
qu'il est mis fin à l'incertitude.
*
*
*
136
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CHAPITRE IV.
CALCUL DE L'IMPOT DU
231.- En ce qui concerne le calcul de l’impôt dû, la liquidation des droits, ou encore les
réductions et exemptions, des différences existent également entre les trois Régions. Nous
examinerons les règles applicables en Région wallonne.
SECTION 1.
LIQUIDATION DES DROITS
A.
Emolument imposable de chaque héritier, légataire ou donataire
A.1.
Règle générale
232.- En principe, la part imposable de chaque héritier, légataire ou donataire est constituée
par la somme de la valeur totale nette des biens recueillis par chacun d'eux et des biens qui,
dans leur chef, appartiennent fictivement à la succession (articles 4 à 14 du CDS).
Pour déterminer la part imposable, il faut donc tenir compte de la dévolution légale et
testamentaire.
En outre, il faut établir dans quelle mesure les charges imposées par le défunt à ses héritiers,
légataires ou donataires influencent la détermination de cette part.
A.2.
Charges imposées par le défunt
233.- La charge consistant, soit en l'abandon par l'héritier, le légataire ou le donataire, à un
tiers déterminé, de la propriété ou de la jouissance d'un bien de l'hérédité ou de quelque autre
droit réel sur un tel bien, soit en la remise à ce tiers d'une somme d'argent se trouvant dans la
succession, constitue un legs en faveur de ce tiers et est imposable dans le chef de ce dernier.
La charge peut aussi consister en l'obligation imposée par le défunt à ses héritiers, légataires
ou donataires de payer à un tiers nommément désigné, un capital ou une rente (ou une
pension), n'existant pas en nature dans l'hérédité et payable en argent ou en choses fongibles.
Pour la perception du droit de succession, l'article 64, alinéa 1 du CDS assimile une telle
charge à un legs au profit du tiers bénéficiaire.
Si la charge imposée par le défunt à un héritier, légataire ou donataire consiste en une
obligation de faire au profit d'autrui, et en particulier, si la charge consiste à supporter les
droits et frais afférents à un legs fait à une autre personne, cette charge ne peut pas être
considérée comme un legs pour la perception du droit de succession (article 64, alinéa 2 du
CDS).
137
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En d'autres termes, pour la perception du droit de succession, cette charge est négligée et ne
peut donc être déduite de l'émolument net de l'ayant droit qui doit l'exécuter.
Au cas où le défunt fait un legs, soit de biens se trouvant dans la succession, soit d'une somme
d'argent et attribue, en outre, à ce même légataire une somme déterminée, en disposant que
cette somme est destinée à acquitter les droits de succession, cette somme doit, d'une part, être
ajoutée à la part de ce légataire pour déterminer son émolument imposable et, d'autre part, être
déduite de l'émolument de l'héritier, légataire ou donataire qui doit abandonner cette somme.
A.3.
Usufruit - Nue-propriété - Rente
234.- L'article 66 du CDS détermine les règles d'évaluation applicables si une personne
recueille par succession, soit l'usufruit ou la nue-propriété de biens dont la pleine propriété
dépend de l'hérédité, soit une rente ou pension périodique créée par le défunt. Ces droits sont
évalués suivant les règles tracées par les articles 21, 22 et 23 du CDS pour l'estimation de ces
mêmes droits lorsque ceux-ci font partie des biens délaissés par le défunt.
A.4.
Donations faites par le défunt dans les trois ans précédant le décès
235.- Le législateur a édicté quelques règles particulières, pour prévenir des tentatives
d'évitement de la progressivité de l'impôt par le défunt, au moyen de donations à ses ayants
droit.
a)
Article 7 du CDS
Les biens dont le défunt a disposé à titre gratuit dans les trois années précédant son décès par
des libéralités qui n'ont pas été assujetties au droit d'enregistrement établi pour les donations,
sont considérés comme faisant partie de la succession du défunt et recueillis par les
bénéficiaires à titre de legs (cf. infra).
b)
Article 66bis du CDS
Il est tenu compte de certaines donations consenties par le défunt, au profit de ses héritiers,
légataires ou donataires, pour déterminer la base imposable dans le chef de ceux-ci. L’article
66bis du CDS stipule à cet égard que :
"En cas d'existence de donations entre vifs visées à l'article 42, numéro VIIIbis, la base sur
laquelle le droit d'enregistrement a été ou doit être perçu du chef de ces donations s'ajoute à
l'émolument successoral des intéressés pour déterminer le droit progressif de succession ou
de mutation par décès applicable à cet émolument."
138
Luc HERVE - Séminaire Stagiaires IPCF - Droits d'enregistrement et de succession
Les donations visées à l'article 42, VIIIbis du CDS sont :
1° les donations constatées par actes remontant à moins de trois ans avant la date du
décès et qui, avant le décès, ont été enregistrés ou sont devenus obligatoirement
enregistrables (par exemple, un acte notarié constatant une donation de biens meubles
ou immeubles, un acte sous seing privé qui constate une donation de biens meubles et
qui a été enregistré dans les trois ans précédant le décès);
2° les donations constatées par des actes enregistrés ou devenus obligatoirement
enregistrables avant le décès, quelle que soit la date de l'acte, si les donations ont été
faites sous une condition suspensive qui s'est accomplie à la suite du décès du donateur
(le défunt), ou d'un évènement survenu moins de trois ans avant le décès.
Même si toutes les conditions visées ci-avant sont remplies, les donations suivantes ne
tombent toutefois pas dans le champ d'application de l'article 66bis du CDS :
1° les donations de biens meubles consenties par un non-habitant du royaume; elles ne
peuvent nuire à la progressivité de l'impôt puisque ces biens meubles ne sont
normalement pas imposables au droit de mutation par décès; il en va autrement des
donations de biens immeubles situés en Belgique; celles-ci doivent être prises en
considération ;
2° les donations de biens immeubles situés à l'étranger puisque, en vertu de l'article
159, 7°, du CDE, elles ne rendent pas exigible un droit d'enregistrement proportionnel;
3° les donations faites aux personnes morales visées à l'article 59 du CDS puisque le
tarif applicable à ces personnes morales n'est pas progressif ;
4° en Région flamande, l'article 66bis, alinéa 2 du CDS – Région flamande fait sortir
du champ d'application du régime certaines donations.
A.5.
Décès de l'usufruitier dans les six mois de la mort du défunt
236.- En vertu de l’article 67 du CDS, si le bénéficiaire de l'usufruit meurt dans les six mois
du décès du défunt, il n'est de ce chef redevable d'aucun droit. Par contre, le nu-propriétaire
est directement imposé sur la pleine propriété, sauf accroissement ou réversion de l'usufruit au
profit d'une tierce personne.
L'article 67 du CDS vise uniquement l'usufruit qui s'ouvre par le décès. Il est étranger à
l'usufruit qui, comme tel, fait partie des biens délaissés par le défunt.
L'article 67 du CDS n'est pas davantage applicable, si la rente et/ou l'usufruit s'éteignent pour
une cause autre que le décès du bénéficiaire (par exemple, par renonciation à l'usufruit ou
cession de l'usufruit au nu-propriétaire). Les effets de cette disposition se limitent à la
succession même dans laquelle l'usufruit a été recueilli.
139
Luc HERVE - Séminaire Stagiaires IPCF - Droits d'enregistrement et de succession
B.
Détermination du tarif applicable
237.- En vertu de l’article 61 du CDS, "le tarif applicable est celui en vigueur au jour du
décès."
Le tarif auquel les biens délaissés doivent être imposés est toujours celui en vigueur au jour
du décès. Ceci signifie que si une modification de tarif intervient après le décès mais avant le
dépôt de la déclaration de succession, les biens doivent néanmoins être imposés suivant
l'ancien tarif.
Ce principe implique également que si une déclaration complémentaire doit être déposée
ultérieurement en raison de l'une des situations prévues à l'article 37 du CDS, les droits
complémentaires doivent être calculés suivant le tarif applicable au jour du décès.
SECTION 2.
A.
Exemptions
A.1.
Abattements
EXEMPTIONS ET REDUCTIONS
238.- En application de l’article 54 du CDS :
"Est exempt du droit de succession :
1° ce qui est recueilli par un héritier en ligne directe appelé légalement à la succession, ou
entre époux, ou entre cohabitants légaux visés à l'article 48 :
- à concurrence de la première tranche de 12.500,00 euros;
- à concurrence de la deuxième tranche de 12.500,01 euros à 25.000,00 euros, lorsque la part
nette recueillie par cet ayant droit n'excède pas 125.000,00 euros.
Le montant total exempté est augmenté, en faveur des enfants du défunt qui n'ont pas atteint
l'âge de vingt et un ans, de 2.500,00 euros pour chaque année entière restant à courir jusqu'à
ce qu'ils atteignent l'âge de vingt et un ans et, en faveur du conjoint ou du cohabitant légal
survivant, de la moitié des abattements supplémentaires dont bénéficient ensemble les enfants
communs.
Le montant total exempté, éventuellement augmenté, est imputé sur les tranches successives
de la part nette soumise au droit de succession, en commençant par la plus basse;
2° ce qui est recueilli par tous autres héritiers, légataires ou donataires dans les successions
dont le montant net ne dépasse pas 620,00 EUR."
L'abattement dont bénéficie un héritier en ligne directe appelé légalement à la succession, un
époux ou un cohabitant légal, consiste en un abattement ordinaire grâce auquel ce qui est
recueilli est exempt du droit de succession à concurrence de la première tranche de 12.500 €,
quel que soit l'émolument de l'héritier, de l'époux ou du cohabitant légal.
140
Luc HERVE - Séminaire Stagiaires IPCF - Droits d'enregistrement et de succession
Un héritier en ligne directe appelé légalement à la succession, un époux ou un cohabitant légal
peut, en outre, bénéficier d'un abattement majoré si sa part nette n'excède pas 125.000 €.
Dans ce cas, ce qui est recueilli est aussi, à concurrence d'une deuxième tranche de 12.500 €
(donc la tranche de 12.500,01 à 25.000 €), exempt du droit de succession (article 54, 1° du
CDS – Région wallonne).
Pour déterminer si l'émolument imposable de l'ayant droit excède ou non 125.000 €, il faut
calculer la valeur de sa part dans l'actif net (actif brut moins le passif), et y ajouter le cas
échéant la valeur des biens qui, dans son chef, sont réputés appartenir à la succession en vertu
d'une disposition de fiction (articles 4 à 11 du CDS). Par contre, les donations visées à l'article
66bis du CDS ne doivent pas être prises en compte pour déterminer si l'abattement majoré est
ou non applicable.
L'abattement ordinaire et, le cas échéant, l'abattement majoré, précités, sont augmentés, en
faveur des enfants du défunt, qui n'ont pas atteint l'âge de vingt et un ans, de 2.500 € pour
chaque année entière restant à courir jusqu'au jour de leurs 21 ans et, en faveur du conjoint ou
du cohabitant légal survivant, de la moitié des abattements supplémentaires dont bénéficient
ensemble les enfants communs (article 54, 1° du CDS).
Est exempt du droit de succession, ce qui est recueilli par tous autres héritiers, légataires ou
donataires dans les successions dont le montant net ne dépasse pas 620 € (article 54, 2° du
CDS).
L'abattement ordinaire ou majoré est calculé sur la part recueillie par les héritiers en ligne
directe, sans distinction entre les héritiers de la ligne ascendante et ceux de la ligne
descendante.
Pour bénéficier de l'abattement ordinaire ou majoré et de l'abattement supplémentaire, il est
nécessaire et suffisant que l'héritier en ligne directe soit appelé légalement à la succession.
Ainsi, l'abattement peut bénéficier à un ascendant qui, par le retour légal, recueille des biens
dans la succession de son descendant décédé sans postérité.
Par contre, pour bénéficier de cet abattement, il n'est pas requis que le conjoint vienne à la
succession par l'effet de la loi. L'unique exigence est que, au jour du décès, le conjoint
survivant ne soit ni divorcé ni judiciairement séparé de corps et de biens. Toutefois, le
conjoint survivant conserve son droit à l'abattement, même si les époux sont divorcés ou
séparés de corps, lorsqu'au jour du décès ils ont des enfants ou descendants communs en vie.
Des abattements supplémentaires sont accordés aux enfants du défunt qui n'ont pas atteint
l'âge de 21 ans, et au conjoint survivant ou cohabitant légal qui a, avec le défunt, des enfants
communs qui bénéficient d'abattements supplémentaires.
Enfin, en ce qui concerne le minimum imposable, si l'actif net d'une succession n'excède pas
620 €, aucun droit de succession n'est dû. Par contre, si l'actif net dépasse 620 €, tout ce qui
est recueilli est imposable au droit de succession, si minime soit la part recueillie par chacun
des ayants droit.
141
Luc HERVE - Séminaire Stagiaires IPCF - Droits d'enregistrement et de succession
A.2.
Exemptions
239.- Les articles 55 et 55bis du CDS prévoient des exemptions pour les legs faits à la
Région wallonne, à la Communauté française et à la Communauté germanophone, aux
personnes morales de droit public créées par un décret des Régions et Communautés, ainsi
que pour la valeur des biens immobiliers érigés en sites Natura 2000 pour lesquels les droits
de succession et les droits de mutation par décès sont réputés localisés en Région wallonne.
B.
Réductions
B.1.
Réductions de tarif en faveur de certaines personnes morales
240.- Bénéficient d’une réduction de tarif :
a)
les legs aux provinces, aux communes, aux établissements publics provinciaux et
communaux et aux autres établissements cités à l'article 59, 1° du CDS : réduction à
5,50%;
b)
les legs faits aux associations sans but lucratif, aux sociétés mutualistes reconnues, aux
unions professionnelles, aux associations internationales sans but lucratif, aux
fondations privées et aux fondations d'utilité publique : réduction à 7 % (article 59, 2°
du CDS).
B.2.
Réduction de tarif dans le cadre des transmissions d’entreprises familiales
241.- Nous renvoyons à l'article 60bis du CDS qui prévoit, moyennant le respect de
conditions de fond et de forme, la réduction à 0 % du droit de succession et du droit de
mutation par décès. Cette disposition sera commentée ultérieurement.
B.3.
Réduction de tarif en cas de transmission de l'immeuble constituant la résidence
principale du défunt
242.- Un tarif progressif préférentiel (au niveau des tranches et des taux) est prévu par
l'article 60ter du CDS lorsque la succession du défunt comprend au moins une part en pleine
propriété (et non en usufruit ou en nue-propriété) dans l'immeuble où le défunt a eu sa
résidence principale depuis cinq ans au moins à la date de son décès. Il convient de soustraire,
le cas échéant, la valeur de la partie professionnelle dudit immeuble soumise au taux de
l'article 60bis du CDS.
Cet immeuble doit être destiné, en tout ou en partie, à l'habitation et il doit être situé en
Région wallonne. Le bénéficiaire doit être un héritier, un légataire ou un donataire en ligne
directe, le conjoint ou le cohabitant légal du défunt.
142
Luc HERVE - Séminaire Stagiaires IPCF - Droits d'enregistrement et de succession
B.4.
Autres réductions
243.- Il convient encore de mentionner l'existence des réductions suivantes :
a)
Charge d'enfants de moins de 21 ans (article 56 du CDS)
Est visé tout héritier, légataire ou donataire qui a au moins trois enfants en vie, qui n'ont pas
atteint l'âge de vingt et un ans au jour de l'ouverture de la succession.
b)
Transmissions successives (article 57 du CDS)
Pour les biens qui font l'objet, dans l'année de la mort du défunt, d'une ou de plusieurs autres
transmissions par décès, les droits dus à raison de ces dernières transmissions sont réduits de
moitié, sans que la diminution d'impôt à résulter de cette réduction puisse excéder, pour
chacune desdites transmissions par décès, les droits perçus sur la transmission immédiatement
antérieure.
c)
Immeubles sis à l'étranger (article 17 du CDS)
En vertu de l'article 15 du CDS, le droit de succession est dû sur l'universalité des biens
délaissés par un défunt habitant du royaume, sans distinguer suivant que ces biens se trouvent
en Belgique ou à l'étranger.
Cette disposition a pour effet qu'en principe, les immeubles situés à l'étranger et transmis suite
au décès d'un habitant du royaume sont soumis à une double perception : l'une en Belgique,
l'autre dans le pays de la situation des biens.
L'article 17 du CDS apporte un correctif à ce principe : il réduit le droit de succession dû en
Belgique dans la mesure où il frappe les immeubles situés à l'étranger, à concurrence de
l'impôt de succession prélevé par le pays de la situation, converti en euros à la date du
paiement de cet impôt.
d)
Transmissions successives d'un bien en nue-propriété (article 58 du CDS)
Lorsqu'un bien en nue propriété a fait l'objet de plus d'une transmission par décès avant
l'extinction de l'usufruit, l'héritier qui parvient à la jouissance du plein domaine n'est tenu de
payer au maximum, tant pour les droits dont le paiement a été suspendu que pour ceux dont il
serait redevable de son chef, qu'une somme représentant soixante pour cent de la valeur en
pleine propriété du bien à la date où s'est opérée la dernière transmission de la nue propriété.
*
*
*
143
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CHAPITRE V.
TRANSMISSIONS ET DISPOSITIONS ASSIMILEES
AUX MUTATIONS A CAUSE DE MORT
SECTION 1.
INTRODUCTION
244.- Ces assimilations ou fictions ont été prévues pour, d'une part, éviter que le défunt
puisse transmettre son patrimoine à ses successeurs par des opérations qui, suivant le droit
commun, ne seraient pas passibles du droit de succession ou du droit de mutation par décès et,
d'autre part, pour assurer dans certains cas, tel l'envoi en possession des biens d'un absent, la
perception de l'impôt successoral sur la transmission qui a eu lieu en faveur des héritiers
présomptifs.
SECTION 2.
AVANTAGES MATRIMONIAUX
245.- L'article 5 du CDS tend à assimiler à une institution contractuelle ou à un legs, pour la
perception de l'impôt successoral, toute dérogation au partage égal de la communauté, qui a
pour effet d'attribuer au conjoint survivant, sous condition de survie, une part du patrimoine
commun supérieure à la moitié. Par conséquent, l'avantage ainsi obtenu est assujetti à l'impôt
successoral.
Cette assimilation est nécessaire, parce que ces avantages matrimoniaux sont considérés entre
époux comme des conventions à titre onéreux (articles 1458 et 1464 du Code civil) non
soumises, comme telles, à l'impôt successoral.
Pour que l'article 5 du CDS soit applicable, il est donc requis :
a)
que le conjoint survivant puise un avantage dans la clause qui déroge au partage égal
et que cette clause ne soit pas sujette aux règles relatives aux donations; l'avantage
consiste en ce que le conjoint survivant obtient, grâce aux conventions matrimoniales,
au-delà de ce qu'il aurait obtenu en cas de partage égal; s'il y a application de l'article
16 du CDS, il faut faire abstraction des comptes de récompenses tant pour calculer la
part que le conjoint survivant obtient en vertu des conventions matrimoniales que pour
déterminer ce qu'il aurait obtenu en cas de partage égal ;
b)
que la stipulation soit faite sous la condition que l'époux bénéficiaire de cet avantage
survive à son conjoint; cette condition est remplie tant si l'avantage est stipulé au profit
du survivant des deux époux que s'il est stipulé au profit d'un conjoint bien déterminé
et que celui-ci survit.
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SECTION 3.
A.
DONATIONS DANS LES TROIS ANS PRECEDANT LE DECES
Principes
246.- L’article 7 du CDS stipule que:
"Les biens dont l'administration établit que le défunt a disposé à titre gratuit dans les trois
années précédant son décès, sont considérés comme faisant partie de sa succession si la
libéralité n'a pas été assujettie au droit d'enregistrement établi pour les donations, sauf le
recours des héritiers ou légataires contre le donataire pour les droits de succession acquittés
à raison desdits biens.
S'il est établi par l'administration ou par les héritiers et légataires que la libéralité a été faite
à telle personne déterminée, celle-ci est réputée légataire de la chose donnée."
Pour la détermination de la progressivité du droit, il faut tenir compte des donations entre vifs
que le défunt a faites en faveur de ses ayants droit par actes remontant à moins de trois ans
avant la date du décès et qui, avant la même date, ont été présentés à la formalité de
l'enregistrement ou sont devenus obligatoirement enregistrables (article 66bis du CDS). Cette
mesure tend à empêcher que par des donations successives faites de son vivant à ses ayants
droit, le défunt élude une partie de l'impôt en évitant la progressivité du tarif.
L'article 7 du CDS doit être lu en combinaison avec l'article 108 du CDS qui établit une
présomption légale suivant laquelle, jusqu'à preuve contraire, les valeurs dont le défunt a été
propriétaire au cours des trois dernières années de sa vie sont présumées faire encore partie de
la succession. Dès lors, si l'administration est en mesure d'invoquer la présomption légale de
l'article 108 du CDS, les ayants droit ne peuvent pas, en présence de l'article 7 du CDS,
rapporter la preuve contraire, c'est-à-dire justifier l'absence des valeurs dans le patrimoine du
défunt, en prétendant que ces biens ont fait l'objet de donations manuelles par le défunt dans
les trois ans précédant son décès.
Ainsi qu'il résulte de l'article 7 du CDS, c'est à l'administration à fournir la preuve que le
défunt a disposé à titre gratuit dans les trois années précédant son décès de certains biens
déterminés sans que ces donations aient donné lieu à la perception du droit d'enregistrement
établi pour les donations. Cette preuve peut être fournie par tous moyens de droit, à
l'exception du serment.
Une fois la preuve apportée, il existe une présomption juris et de jure. Les biens sont
considérés comme faisant partie de la succession, exactement comme s'ils n'avaient pas été
donnés. Ces biens sont dévolus et imposés de la même manière que les autres biens qui
composent la succession.
Les ayants droit disposent cependant d'un recours contre le donataire pour les droits de
succession acquittés à raison de ces biens. Cependant, si l’identité du donataire est établie par
l'administration ou par les ayants droit, le donataire est réputé légataire de la chose donnée
(article 7, alinéa 2 du CDE). Les droits sont calculés dans son chef, suivant son degré de
parenté avec le défunt et ils peuvent être recouvrés à sa charge.
145
Luc HERVE - Séminaire Stagiaires IPCF - Droits d'enregistrement et de succession
B.
Donations visées
247.- Sont visées :
- toutes les donations, quels qu'en soient la forme (donations par acte, donations
manuelles, donations indirectes), l'objet (meubles corporels, titres, numéraire...) et le
bénéficiaire (un successeur ou une autre personne);
- consenties par le défunt dans les trois ans précédant son décès : si la libéralité a été
consentie sous condition ou à terme, c'est la date de la libéralité elle-même qui doit
être prise en considération, non celle de l'arrivée de la condition ou du terme;
- qui n'ont pas été assujetties au droit d'enregistrement établi pour les donations : pour
que la libéralité échappe à l'article 7 du CDS, il faut que ce droit soit acquis à l'Etat au
décès ou par le fait du décès, même s'il n'a pas encore été effectivement acquitté.
Ainsi, l'article 7 du CDS est applicable aux donations indirectes, telles que la remise de dettes,
l'acquittement de la dette d'un tiers au paiement de laquelle le défunt n'était pas tenu, le
transfert gratuit de titres nominatifs par leur immatriculation au nom du donataire dans le
registre des parts sociales.
L'article 7 du CDS est également applicable aux donations consenties par le défunt moins de
trois ans avant son décès et qui n'ont pas subi le droit de donation, même si ces donations sont
exonérées du droit de donation par une disposition légale expresse.
C.
Conséquences de l'assimilation
248.- La loi considère que les biens visés par l'article 7 du CDS font partie de la succession.
a)
Si l'identité du donataire est établie, l'assimilation à un legs est complète : elle vaut
pour toutes les dispositions du Code.
Néanmoins, la perception sera influencée par le règlement des intérêts civils des parties. Si, à
la demande des héritiers réservataires, la donation est réduite à la quotité disponible,
l'assimilation à un legs ne subsiste que dans la mesure où la donation est maintenue; pour le
surplus, les biens sont censés faire partie de la succession (ordinaire) et l'impôt successoral
sera exigible à charge des héritiers.
b)
Si l'identité du donataire n'est pas établie, les biens donnés sont considérés comme s'ils
avaient été effectivement délaissés par le défunt et dévolus de la même manière que les autres
biens successoraux.
146
Luc HERVE - Séminaire Stagiaires IPCF - Droits d'enregistrement et de succession
c)
En cas de donation dans les trois ans précédant le décès, de titres d'une société visés à
l'article 60bis du CDS, ces titres peuvent être imposés au taux réduit prévu par cette
disposition, mais sous les mêmes conditions que s'ils n'avaient pas été donnés.
SECTION 4.
A.
STIPULATION POUR AUTRUI
Stipulation pour autrui – Notion
249.- Il y a stipulation pour autrui lorsque, dans un contrat, l'un des contractants stipule de
l'autre que ce dernier donnera ou fera quelque chose au profit d'un tiers qui est étranger au
contrat et qui n'y est pas représenté.
Pour être valable, la stipulation pour autrui doit se greffer sur une stipulation que l'on fait pour
soi-même.
Les caractéristiques essentielles d'une stipulation pour autrui sont donc :
qu'elle est la condition d'un contrat principal conclu par le stipulant (ce contrat
principal peut être une vente, une donation, une assurance, la constitution d'une rente,
etc.);
que, par cette stipulation, le stipulant fait naître directement dans le chef d'un tiers
déterminé ou du moins déterminable, qui n'est pas partie au contrat principal, un droit
que ce tiers peut exercer de son propre chef (jure proprio).
Tant que la stipulation n'est pas acceptée, elle peut être révoquée par le stipulant; l'accord de
celui qui doit exécuter la prestation (le cocontractant) n'est, en principe, pas nécessaire. Si la
stipulation est révoquée par le stipulant, elle devient en principe une stipulation pour soimême et le bénéfice de la stipulation sera, le cas échéant, imposable dans la succession
suivant les règles ordinaires.
L'acceptation de la stipulation pour autrui peut être expresse ou tacite. Elle peut même avoir
lieu après le décès du stipulant. Elle ne doit pas être notifiée au stipulant.
B.
Conditions d'application de l'article 8 du CDS
250.- Le bénéfice de la stipulation pour autrui est obtenu directement par le tiers en vertu
d'un droit propre né dans son chef au moment de la stipulation, sans attendre son acceptation.
Comme telle, cette acquisition échappe au champ d'application de l'article 1er du CDS,
puisqu'il n'y a pas de transmission par décès du stipulant au bénéficiaire.
Le caractère de gratuité qu'offrent en général ces stipulations ainsi que la subordination de
leurs effets à la condition du prédécès de l'auteur de la stipulation, ont incité le législateur à
147
Luc HERVE - Séminaire Stagiaires IPCF - Droits d'enregistrement et de succession
assimiler, sous certaines conditions, le bénéfice que le tiers recueille, à un legs fait à son profit
et ainsi à l'imposer au droit de succession dans son chef.
Les sommes, rentes ou valeurs, que le bénéficiaire d'une stipulation pour autrui est appelé à
recevoir à titre gratuit au décès d'une personne déterminée, sont considérées comme
recueillies à titre de legs même lorsque la stipulation émane d'une personne autre que le
défunt, sauf s'il est établi que cette autre personne a elle-même stipulé à titre gratuit au profit
du bénéficiaire.
L'application de l'article 8 du CDS est subordonnée à la réalisation simultanée de plusieurs
conditions dont certaines varient suivant que la stipulation émane du défunt lui-même, de son
conjoint (s'ils étaient mariés sous un régime de communauté), ou d'un tiers:
a)
Il doit évidemment s'agir d'une stipulation pour autrui, sauf dans le cas prévu à l'article
8, alinéa 4 du CDS qui vise le contrat d'assurance sur la vie ou le contrat constitutif d'une
rente, conclu par le conjoint du défunt, commun en biens, à son profit personnel.
b)
La stipulation doit porter sur des sommes, rentes ou valeurs; l'article 8 du CDS ne sera
donc pas applicable, lorsque la stipulation consiste en une obligation de faire (par exemple,
loger et entretenir un tiers) ou en l'obligation de céder à un tiers la propriété ou l'usufruit (ou
tout autre droit réel) de biens autres que des valeurs.
c)
Elle doit être faite au profit d'un tiers déterminé ou déterminable, qui doit en recueillir
le bénéfice à titre gratuit. En vertu de l'article 8, alinéa 5 du CDS, le tiers bénéficiaire est
présumé recevoir à titre gratuit et ce jusqu'à preuve contraire. Suivant l'article 13 du CDS,
cette preuve contraire peut être fournie par tous moyens de droit, témoignages et
présomptions compris, à l'exception du serment.
Lorsqu'il s'agit d'une stipulation pour autrui entre époux, en matière de contrat d'assurance sur
la vie ou de contrat constitutif d'une rente, la circonstance que la stipulation est réciproque
n'enlève pas à celle-ci le caractère de libéralité (article 8, alinéa 4 in fine du CDS).
Le cas d'école de stipulation pour autrui à titre onéreux, qui tombe donc hors du champ
d'application de l'article 8 du CDS, est le contrat d'assurance sur la vie contracté par le défunt
en faveur de son créancier pour garantir le remboursement du solde du prêt qu'il avait
contracté : le montant assuré est attribué à titre onéreux au créancier.
d)
-
Le bénéfice doit être exigible :
si la stipulation émane d'une personne autre que le défunt, au décès du défunt; le décès
doit donc soit constituer la date à laquelle le bénéficiaire peut exiger le paiement des
sommes, rentes ou valeurs, soit tout au moins former le point de départ du délai à
l'expiration duquel il peut exiger le paiement;
148
Luc HERVE - Séminaire Stagiaires IPCF - Droits d'enregistrement et de succession
-
si la stipulation émane du défunt lui-même, au décès du défunt, à une date postérieure
ou dans les trois années précédant le décès du défunt.
e)
La stipulation ne peut pas rentrer dans les quatre cas d'exception visés à l'article 8,
dernier alinéa du CDS.
f)
Le bénéficiaire de la stipulation doit avoir survécu au défunt.
L'article 111 de la loi du 25 juin 1992 sur le contrat d'assurance terrestre prévoit que le droit
aux prestations est intransmissible et qu'en cas de prédécès du bénéficiaire, les prestations
sont dues au preneur d'assurance ou à la succession de celui-ci, sauf si un bénéficiaire
subsidiaire a été désigné.
Au décès du souscripteur, deux hypothèses peuvent se présenter :
1°
Les prestations sont exigibles au décès.
Si le bénéficiaire est prédécédé et qu'aucun bénéficiaire subsidiaire n'a été désigné, les
prestations sont immédiatement imposées à charge des héritiers dans la succession du
preneur, sur base de l'article 1 du CDS.
2°
Les prestations doivent être exécutées après le décès (assurance à terme).
Dans ce cas, le bénéficiaire de l'assurance n'est assuré de recueillir les prestations que
s'il vit jusqu'à la date d'exécution des prestations. S'il décède entre la date du décès du
preneur et celle de l'exécution des prestations, le droit qu'il possédait passe au
bénéficiaire subsidiaire s'il y en a un qui a été désigné ou, à défaut, à la succession du
souscripteur. Si ces conditions sont remplies, le bénéficiaire est imposé au droit de
succession comme s'il était légataire des sommes, rentes ou valeurs.
C.
Epoux mariés sous un régime de communauté (article 8, alinéa 4 du CDS)
251.- En ce qui concerne les époux mariés sous un régime de communauté, il n'est pas
requis que la stipulation faite au profit d'un époux émane de son conjoint - le défunt - ou d'un
tiers.
Le bénéfice est imposable dans le chef d'un époux même s'il a lui-même stipulé à son propre
profit sur la tête de son conjoint (le défunt), lorsqu'il s'agit d'un contrat d'assurance sur la vie
ou d'un contrat constitutif d'une rente. Dans ce cas, il ne s'agit même pas d'une stipulation
pour autrui puisque cet époux a stipulé pour lui-même.
149
Luc HERVE - Séminaire Stagiaires IPCF - Droits d'enregistrement et de succession
L'article 8, alinéa 4 du CDS détermine aussi la base imposable lorsque le bénéfice est recueilli
par le conjoint survivant. En principe, quand le bénéficiaire est le conjoint du défunt avec
lequel il était marié sous un régime de communauté, le bénéfice est imposé à concurrence de
la moitié.
Il y a deux exceptions à cette règle :
1° le bénéfice est imposé pour la totalité s'il est la contrepartie de biens propres au
défunt;
2° le bénéfice n'est pas imposable s'il est la contrepartie de biens propres au conjoint
bénéficiaire.
Si les époux sont mariés sous un régime sans communauté, par exemple la séparation de biens
pure et simple, les sommes, rentes ou valeurs que le conjoint est appelé à recevoir à titre
gratuit en vertu d'une stipulation faite à son profit dans un contrat conclu par le défunt ou par
un tiers, sont considérées comme recueillies à titre de legs par le conjoint pour la totalité.
D.
Cas auxquels l'article 8 du CDS n'est pas applicable
D.1.
Sommes, rentes ou valeurs recueillies en vertu d'une stipulation qui a été
assujettie au droit d'enregistrement établi pour les donations (dernier alinéa, 1°).
252.- Pour l'examen de cette condition, il faut se placer au moment du décès. Il est requis
que le droit de donation soit devenu exigible avant le décès ou au plus tard lors du décès du
stipulant, même s'il n'a pas encore été payé à ce moment.
D.2.
Donation secondaire
253.- Lorsque la stipulation pour autrui, portant sur des sommes, rentes ou valeurs, constitue
la condition d'une donation principale consentie à une autre personne par un acte enregistré ou
devenu obligatoirement enregistrable, il se présente une situation particulière. En définitive,
les sommes, rentes ou valeurs stipulées à la charge du donataire principal forment une
donation secondaire.
En vertu de l'article 134 du CDE, la charge consistant en une somme ou une rente ou pension
stipulée à titre gratuit au profit d'un tiers acceptant, est imposée à titre de donation dans le
chef de ce tiers et déduite de l'émolument du donataire principal.
D.3.
Obligation légale
254.- Les rentes et capitaux qui sont constitués en exécution d'une obligation légale ne
tombent pas sous l'application de l'article 8 (dernier alinéa, 2°).
150
Luc HERVE - Séminaire Stagiaires IPCF - Droits d'enregistrement et de succession
Le droit de succession ne doit donc pas être perçu sur :
a)
la pension de la veuve d'un agent de l'Etat, d'un travailleur indépendant;
b)
les rentes et capitaux constitués en exécution de la législation sociale;
c)
le bénéfice obtenu à la suite d'assurances souscrites en vertu d'accords paritaires
rendus obligatoires par arrêté royal;
d)
la rente ou le capital versé conformément à la législation sur la réparation des
accidents du travail.
D.4.
Assurance de groupe - Fonds de prévoyance (dernier alinéa, 3°)
255.- En principe, l'article 8 du CDS n'est pas applicable aux capitaux et rentes constitués à
l'intervention de l'employeur du défunt au profit du conjoint ou, à défaut, au profit des enfants
n'ayant pas encore atteint l'âge de 21 ans ou au profit à la fois du conjoint et des enfants de
moins de 21 ans en exécution, soit d'un contrat d'assurance de groupe souscrit en vertu d'un
règlement obligatoire de l'entreprise et répondant aux conditions déterminées par la
réglementation relative au contrôle de ces contrats, soit du règlement obligatoire d'un fonds de
prévoyance institué au profit du personnel de l'entreprise.
Il n'y a pas d'exemption pour la partie des rentes et capitaux qui provient de cotisations payées
librement en sus de celles stipulées par le règlement. De même, il n'y a pas d'exemption pour
la partie des rentes et capitaux qui provient de cotisations payées par le défunt alors qu'il ne
faisait plus partie du personnel de l'entreprise à l'initiative de laquelle a été souscrit le contrat
d'assurance de groupe.
D.5.
Assurance solde restant dû conclue au profit d'un cohabitant ou d'un conjoint
marié sous le régime de séparation de biens
256.- Généralement, en cas d'achat d'un immeuble par des cohabitants ou des époux mariés
sous un régime de séparation de biens, au moyen d'un prêt hypothécaire ou d'une ouverture de
crédit, chacun des deux partenaires conclut une assurance solde restant dû qui prévoit qu'en
cas de décès de l'un d'eux, la totalité du solde restant dû du prêt consenti ou de l'ouverture de
crédit ouverte sera remboursée à l'institution financière.
L'avantage que le conjoint ou le partenaire survivant tire de l'apurement de la totalité de la
dette (donc aussi de la partie à laquelle le conjoint survivant ou le partenaire était tenu
solidairement et indivisiblement) ne tombe pas sous le coup de l'article 8 du CDS. Cet article
parle en effet de "sommes, rentes ou valeurs" et une interprétation (re)strict(iv)e du texte légal
ne permet pas d'en étendre la portée aux avantages.
151
Luc HERVE - Séminaire Stagiaires IPCF - Droits d'enregistrement et de succession
E.
Base imposable
257.- En principe, le bénéfice recueilli est imposé pour la totalité comme legs dans le chef
du bénéficiaire. Le droit de succession est dû immédiatement, même si les sommes, rentes et
valeurs ne sont payables qu'à une date postérieure au décès.
L'estimation a lieu suivant les règles établies par l'article 21 du CDS.
SECTION 5.
A.
TRANSMISSIONS
A
TITRE
ONEREUX
ACTES
DECLARATIFS PAR LESQUELS LE DEFUNT STIPULE UN
DROIT VIAGER A SON PROFIT
But des articles 9, 10 et 11 du CDS
258.- Tout comme les articles 7 et 8 du CDS, les articles 9, 10 et 11 du CDS tendent à
prévenir et à combattre la fraude. Ils traduisent la volonté du législateur d'empêcher que, de
son vivant, le défunt ne dispose de ses biens au profit des personnes auxquelles il entend
laisser sa succession, et ce à l'abri de tout impôt ou moyennant le paiement d'un droit
d'enregistrement inférieur au droit de succession qui aurait été normalement exigible.
Dans les grandes lignes, les opérations visées présentent les caractéristiques d'une opération à
titre onéreux, mais elles ont pour effet de substituer à la propriété de biens devant
normalement se trouver dans la succession du défunt, des droits viagers qui s'éteignent par le
décès de celui-ci. En se réservant l'usufruit ou un autre droit viager, le défunt a conservé
"certains" droits sur les biens qui étaient les siens, mais ces droits qui se substituent à son
droit de propriété sont viagers.
Ces opérations sont :
1° l'acquisition à titre onéreux de biens meubles ou immeubles, ou l'immatriculation de
titres, en usufruit au nom du défunt et en nue-propriété au nom d'un tiers (article 9 du
CDS) ;
2° le partage ou l'acte équipollent à partage dans lequel il est attribué au défunt un
usufruit, une rente ou tout autre droit devant cesser à sa mort, en contrepartie de ses
droits en propriété (article 10 du CDS) ;
3° la vente, la cession ou l'abandon à titre onéreux de biens meubles ou immeubles par
le défunt à un héritier ou à une autre personne avec réserve d'usufruit, ou moyennant
l'abandon de l'usufruit d'un autre bien ou encore moyennant la stipulation à son profit
d'un droit viager quelconque (article 11 du CDS).
152
Luc HERVE - Séminaire Stagiaires IPCF - Droits d'enregistrement et de succession
Si, dans ces trois cas, les conditions d'application examinées ci-après sont réunies, le bien sur
lequel a porté l'opération est censé dépendre, en pleine propriété, de la succession du défunt et
le cocontractant de celui-ci est réputé légataire du bien. La loi considère, en effet, que
l'opération renferme une libéralité par le défunt au profit de son cocontractant. Cette libéralité
est assimilée à un legs.
Il s'agit, dans chacun de ces cas, d'une présomption légale réfragable, qui peut donc être
renversée, en tout ou en partie, par le contribuable. En d'autres termes, les intéressés peuvent
prouver que l'opération ne déguise pas une libéralité.
En vertu de l'article 13 du CDS, la preuve contraire peut être fournie par tous moyens de droit,
témoins et présomptions compris.
B.
Conditions d’application
B.1.
Conditions quant aux conventions
259.- Les conventions ou opérations visées doivent être à titre onéreux ou, du moins,
présenter ce caractère.
L'article 9 du CDS n'est donc pas applicable si l'acquisition par le défunt pour l'usufruit et par
son héritier pour la nue-propriété procède d'une donation ou d'une succession.
L'article 11 du CDS est de même hors cause en cas de donation par le défunt avec réserve
d'usufruit ou à charge de lui payer une rente. Dans ces cas, il n'y a pas de fraude (sous la
forme d'une libéralité déguisée), l'opération elle-même se présentant déjà clairement comme
une libéralité.
Les articles 9, 10 et 11 du CDS visent tant les conventions enregistrées que les conventions
non enregistrées. Ils sont applicables lorsque les conventions portent sur des meubles ou sur
des immeubles et ce, quelle que soit la date à laquelle la convention est intervenue, donc
même plus de trois années avant le décès.
B.2.
Conditions quant à la personne du cocontractant
260.- Pour que l'une des présomptions légales de legs soit applicable, le cocontractant du
défunt visé aux articles 9, 10 et 11 du CDS doit avoir survécu au défunt stipulant (article 14,
1° du CDS).
En outre, ce cocontractant doit appartenir à l'une des catégories des personnes visées à l'article
33, alinéas 1er, 2 et 3 (article 14, 2° du CDS), c’est à dire être héritier, légataire ou donataire,
au jour du décès ou encore personne interposée.
153
Luc HERVE - Séminaire Stagiaires IPCF - Droits d'enregistrement et de succession
Sont réputées "personnes interposées" :
1°
le père, la mère, les descendants et l'époux de l'héritier, du légataire ou du donataire
(article 911, alinéa 2 du Code civil) ;
2°
toute personne dont l'héritier, le légataire ou le donataire est lui-même héritier
présomptif (article 1100 du Code civil).
Pour que les articles 9, 10 et 11 du CDS puissent être appliqués aux personnes interposées, il
est requis que la présomption d'interposition existe tant au jour de la convention visée par la
loi qu'au jour de l'ouverture de la succession. Ceci diffère donc nettement d'avec la qualité
d'héritier, de légataire ou de donataire, qui ne doit être appréciée qu'au jour du décès.
C.
Objet du legs présumé - Conséquences de l'assimilation
261.- Les biens qui ont fait l'objet des opérations visées par les articles 9, 10 et 11 du CDS
sont censés se retrouver en pleine propriété dans le patrimoine du défunt, et le cocontractant
est considéré comme légataire de ces biens.
Il en résulte que ces biens doivent être déclarés dans la succession dans leur état et d'après
leur valeur au moment du décès.
Qu'en est-il lorsqu'il s'agit d'immeubles et que l'augmentation de valeur provient de travaux
d'amélioration apportés aux biens ou de la construction de nouveaux ouvrages sur les biens
transmis, travaux exécutés après l'opération ?
En principe, le droit est calculé sur la valeur du bien, travaux d'amélioration et de construction
compris.
Toutefois, comme il ne peut y avoir de legs que dans la mesure où la personne réputée
légataire s'est enrichie à titre gratuit, il y a lieu de faire la réserve suivante :
a)
en cas de construction :
1° si la personne réputée légataire prouve qu'elle a érigé les constructions à ses frais, le
montant de la dépense est déduit de la valeur du bien réputé légué;
2° par contre, si les constructions ont été érigées aux frais du défunt, il faut déduire de
la valeur du bien réputé légué le montant de la dépense (matériaux, main-d'oeuvre),
montant dont le nu-propriétaire doit créditer la succession ordinaire du défunt à moins
que ce montant n'ait été remboursé antérieurement (article 555 du Code civil). Si le
défunt avait déclaré renoncer à toute indemnité, il ne peut rien être déduit.
154
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b)
en cas d'amélioration :
Si le tiers réputé légataire prouve qu'avant l'ouverture de la succession, il a fait des
dépenses nécessaires ou utiles qui ont profité au bien acquis, ces frais peuvent être
intégralement déduits de la valeur du bien réputé légué. Aucune déduction n'est
toutefois autorisée en ce qui concerne les dépenses somptuaires (ou voluptuaires, de
pur agrément) faites par le tiers.
La perte du bien par cas fortuit écarte la présomption légale à concurrence de la partie
détruite. Le cas échéant, la présomption légale est reportée sur les indemnités qui seraient
dues ou qui auraient été payées à la suite du sinistre.
Puisque l'assimilation est complète en matière fiscale, l'évaluation des biens doit avoir lieu
conformément aux articles 19 à 26 du CDS. Ceci signifie également qu'en ce qui concerne les
biens qui doivent être estimés à leur valeur vénale, l'expertise préalable est autorisée.
262.- Un temps parfois long peut s'écouler entre la date de l'opération et le décès du défunt.
Il est donc possible que la situation de fait ainsi que la situation juridique des biens se soient
modifiées avant le décès.
Ainsi, la renonciation faite par le défunt à l'usufruit ou au droit viager qu'il s'est réservé ou
dont il a stipulé l'abandon à son profit n'écarte pas l'application des articles 9 à 11 du CDS; au
contraire, elle renforce les présomptions légales de libéralité puisque cet acte fait encore plus
clairement apparaître que le défunt a voulu avantager le tiers.
La solution est la même lorsque le tiers réputé légataire a, avant le décès et sans l'intervention
du défunt, aliéné les droits qu'il tient de la convention visée par les articles 9, 10 et 11 du
CDS. Il ne peut être admis que par sa seule volonté, le tiers puisse modifier les conséquences
fiscales des opérations visées par ces articles.
Par contre, il y a lieu de tenir compte de l'aliénation, lorsque celle-ci a lieu par le défunt et le
tiers réputé légataire, agissant ensemble. En intervenant à l'aliénation, le défunt a modifié les
conditions de ce que la loi répute constituer une libéralité. Dans ce cas, les articles 9, 10 et 11
du CDS continueront à être appliqués à l'enrichissement réel du tiers réputé légataire.
D.
Tempérament prévu par l'article 12 du CDS
263.- Si les intéressés ne peuvent pas prouver que l'opération ne déguise pas une libéralité,
mais peuvent établir (par tous moyens de droit commun, témoignages et présomptions
compris) que le défunt a réellement joui de l'usufruit ou du droit viager, il est admis que, dans
cette mesure, le contrat a été sincère et ne contenait pas de libéralité, de sorte que, dans cette
même mesure, le droit de succession ne peut pas être réclamé.
155
Luc HERVE - Séminaire Stagiaires IPCF - Droits d'enregistrement et de succession
L'article 12 du CDS permet ainsi la réduction proportionnelle de la base imposable au jour du
décès, compte tenu de la valeur de la jouissance et du nombre total d'années entières pendant
lesquelles le défunt a effectivement joui de son droit viager.
E.
Examen séparé des articles 9, 10 et 11 du CDS
E.1.
Article 9 du CDS
264.- Les opérations visées par l'article 9 du CDS sont :
1° l'acquisition à titre onéreux de biens, meubles ou immeubles, simultanément par le
défunt pour l'usufruit et par un tiers pour la nue-propriété ;
2° l'immatriculation de titres nominatifs ou au porteur, au nom du défunt pour
l'usufruit et au nom d'un tiers pour la nue-propriété.
En ce qui concerne les titres au porteur ou nominatifs, la présomption établie par l'article 9 du
CDS s'attache non seulement à l'acquisition à titre onéreux de ces biens, mais aussi au fait
matériel de l'immatriculation des titres nominatifs ou au porteur au nom du défunt pour
l'usufruit et au nom d'un tiers pour la nue-propriété.
Par conséquent, cet article est susceptible d'être appliqué lorsque des titres appartenaient en
pleine propriété au défunt avant l'immatriculation et que le dépouillement du défunt et
l'enrichissement du tiers sont la conséquence de l'immatriculation.
Du reste, cette immatriculation n'est soumise à aucune condition de forme. Ainsi, l'article 9 du
CDS peut trouver application lorsqu'il s'agit de numéraire ou de valeurs qui appartenaient au
défunt et qu'il avait déposés en banque à son nom pour l'usufruit, et au nom d'un tiers pour la
nue-propriété.
Lorsque l'article 9 du CDS est applicable, les biens acquis sont, pour la perception de l'impôt
successoral, considérés comme recueillis à titre de legs par le nu-propriétaire.
L'acquisition de l'usufruit et celle de la nue-propriété doivent avoir lieu en même temps.
Les intéressés ont la possibilité de prouver que l'opération visée ne déguise pas une libéralité
par toutes voies de droit, témoins et présomptions compris, à l'exclusion du serment.
La preuve contraire pourra être considérée comme rapportée :
- si le tiers établit que le bien a été acquis ou que le placement a été fait avec des
deniers qui appartenaient au défunt pour l'usufruit et au tiers pour la nue-propriété,
pour les avoir acquis dans cette mesure dans une autre succession ;
156
Luc HERVE - Séminaire Stagiaires IPCF - Droits d'enregistrement et de succession
- s'il est prouvé que les titres immatriculés au nom du défunt pour l'usufruit et au nom
du tiers pour la nue-propriété, leur appartenaient déjà dans cette même mesure pour les
avoir recueillis dans une succession précédente ou pour les avoir acquis au moyen de
fonds ou en échange de biens qui proviennent dans cette même proportion d'une
succession ou d'une donation faite par une personne autre que le défunt ;
- si le tiers prouve que la partie du prix d'achat qui se rapporte à la nue-propriété qu'il a
acquise, a été payée au moyen de fonds personnels.
Le tiers devra prouver qu'au moment de l'opération, il avait l'argent nécessaire. Cette preuve
doit être faite en dehors de l'acte. Si le tiers n'est pas en mesure de rapporter la preuve
contraire requise, il pourra bénéficier du tempérament visé par l'article 12 du CDS s'il établit
que le défunt a effectivement joui de l'usufruit.
E.2.
Article 10 du CDS
265.- L'article 10 du CDS suppose :
1° qu'il existait une indivision portant sur des biens quelconques, entre le défunt et un
ou plusieurs de ses héritiers, légataires, donataires ou personnes interposées;
2° qu'il a été mis fin à l'indivision par un partage ou une cession équipollente à
partage;
3° que, par ce partage ou cette cession, il a été attribué au défunt, pour le remplir en
tout ou en partie de ses droits en propriété dans l'indivision, un usufruit, une rente ou
tout autre droit devant cesser à sa mort (droit d'usage, droit d'habitation, droit à des
aliments ou à des soins).
L'article 10 du CDS n'est pas applicable dans la mesure où il a été attribué au défunt des biens
en propriété (par exemple, une soulte, un bien en capital) indépendamment des droits viagers ;
en effet, dans cette mesure, il y a une contrepartie, donc pas de libéralité. Dans ce cas, la
présomption de legs se limitera à une fraction des biens attribués aux copartageants du défunt.
L'article 10 du CDS est une disposition d'exception qui a pour but de prévenir et de combattre
la fraude, et qui n'est applicable que sous certaines conditions strictes. Ainsi, lorsque la loi
attribue l'usufruit au conjoint survivant en suite de la dévolution légale et que la convention,
par laquelle le conjoint survivant doit céder la nue-propriété d'immeubles à ses enfants,
attribue à celui-ci une somme d'argent en échange de sa nue-propriété, il ne peut être question
de fraude ni d'impôt éludé.
Les intéressés peuvent renverser la présomption légale, en prouvant, par toutes voies de droit
commun, témoins et présomptions compris (article 13 du CDS) que le partage ou la cession
équipollente à partage ne constituait pas à leur profit une libéralité déguisée.
157
Luc HERVE - Séminaire Stagiaires IPCF - Droits d'enregistrement et de succession
A cette fin, ils doivent prouver deux choses :
1° l'équivalence des prestations (c.-à-d. que les prestations stipulées au profit du défunt
étaient l'équivalent de ce que ce dernier a abandonné);
2° l'exécution effective des prestations stipulées au profit du défunt.
La preuve de l'exécution de la prestation viagère ne suffit pas toujours pour écarter
entièrement l'application de l'article 10 du CDS (il en va de même pour l'article 9 du CDS).
En effet, l'opération peut déguiser une libéralité partielle s'il n'y a pas équivalence des
prestations.
Du deuxième alinéa de l'article 10 du CDS, et de l'article 12 du CDS, qui établissent une
réduction proportionnelle de la base imposable en fonction de ce qui a été effectivement
attribué au défunt, tant en propriété qu'en droits viagers, il résulte que la loi a voulu appliquer
la présomption de legs même si la convention est réelle et sincère et a été ponctuellement
exécutée, mais renferme néanmoins une libéralité partielle au profit du cocontractant.
L'appréciation de l'équivalence des prestations est une pure question de fait.
Lorsque la présomption de l'article 10 du CDS est applicable, la base imposable du legs fictif
est déterminée de la manière suivante :
- il faut d'abord rechercher, pour chaque bénéficiaire, le montant de la libéralité
présumée au jour de l'opération : pour chacun d'eux, ce montant est égal à la différence
entre la valeur, à ce moment, des biens qui lui ont été attribués en propriété et la valeur
de sa part dans la masse indivise;
- il faut alors calculer la valeur proportionnelle du legs présumé d'après la valeur des
biens à la date du décès.
E.3.
Article 11 du CDS
266.- L'article 11 du CDS s'applique à toutes les opérations dans lesquelles une personne (le
défunt) a abandonné, à titre onéreux, un bien quelconque (immeuble, meuble corporel, effets
publics, somme d'argent, etc.) à un de ses héritiers, légataires ou donataires ou à une personne
interposée, en s'en réservant l'usufruit ou en stipulant l'abandon à son profit de l'usufruit d'un
autre bien ou d'un droit viager quel qu'il soit.
Dès lors, si toutes les autres conditions sont remplies, l'article 11 du CDS est certainement
applicable lorsque le défunt a vendu un bien moyennant une rente viagère. Cet article trouve
aussi application lorsque le défunt a vendu un bien moyennant un prix en capital
immédiatement converti en une prestation viagère.
Il en est de même en cas de vente d'une maison avec réserve par le vendeur, sa vie durant, du
droit d'habiter certaines pièces. Dans ce cas, l'article 11 du CDS s'applique à la valeur de la
totalité de la maison et pas seulement à la valeur des pièces réservées.
158
Luc HERVE - Séminaire Stagiaires IPCF - Droits d'enregistrement et de succession
L'article 11 du CDS autorise les contribuables à renverser la présomption légale en prouvant
que la convention ne déguise pas une libéralité, même partielle. La preuve peut ici aussi être
établie par toutes voies de droit, témoins et présomptions compris (article 13 du CDS).
En ce qui concerne l'appréciation de l'équivalence des prestations, le raisonnement est
identique à celui qui prévaut pour l'article 10 du CDS.
Si la présomption de l'article 11 du CDS est établie, le calcul de la base imposable du legs
fictif est effectué comme il est exposé ci-avant pour l’article 10 du CDS.
Si le défunt n'a pas réellement joui des droits viagers qu'il s'est réservés ou qu'il a stipulés à
son profit, et si rien ne lui a été abandonné en propriété, c'est la totalité du bien qui est
imposable en vertu de l'article 11, suivant sa valeur au moment du décès.
Par contre, la présomption de legs n'est que partielle si le défunt a joui des droits viagers ou si
une contrepartie en propriété (par exemple, une somme d'argent) lui a été remise. En ce cas, il
faut calculer le montant de la libéralité déguisée au jour de l'opération et ensuite, au moyen
d'une proportion, établir le montant de la libéralité au jour du décès, compte tenu de la valeur
des biens cédés au jour du décès.
Après avoir déterminé la base imposable, le droit de succession exigible peut être calculé.
Cependant, en l'espèce, le législateur a prévu une exception qui ne figure pas dans les deux
articles précédents. En vertu de l'article 11, alinéa 3, "le droit de mutation qui a été perçu en
Belgique lors de l'enregistrement de l'acte de vente ou de cession et, le cas échéant, le droit
de transcription sont déduits du droit de succession ou du droit de mutation par décès, dans
la mesure où ces derniers droits sont exigibles en vertu de l'article 11".
*
*
*
159
Luc HERVE - Séminaire Stagiaires IPCF - Droits d'enregistrement et de succession
CHAPITRE VI.
RECOUVREMENT DES DROITS, AMENDES ET INTERETS
267.- Cette matière relève de la compétence du législateur fédéral. Il n’y a donc pas lieu ici
de faire de distinction entre les trois Régions.
SECTION 1.
OBLIGATION A LA DETTE D’IMPOT
268.- Les articles 70 à 74 du CDS désignent les personnes auxquelles l'Etat peut réclamer le
paiement des droits de succession, des droits de mutation par décès, des intérêts et des
amendes.
Trois questions peuvent être soulevées à cet égard :
- l'obligation des successeurs au paiement des droits de succession et des intérêts
(article 70);
- l'obligation de toute personne par le fait de laquelle une contravention a été commise,
au paiement des amendes dues (article 71);
- les circonstances qui obligent certains tiers au paiement de la totalité ou d'une partie
des droits, intérêts et amendes (articles 72 et 74).
A.
Obligation des successeurs au paiement des droits de succession, des droits de
mutation par décès et des intérêts
269.- En vertu de l'article 70, alinéa 1 du CDS, "les héritiers, légataires et donataires sont
tenus envers l'Etat des droits de succession ou de mutation par décès et des intérêts, chacun
pour ce qu'il recueille dans la succession".
Cette règle est absolument générale : elle vise toute espèce d'ayant droit du défunt, quel que
soit le titre auquel il est appelé à la succession.
Elle s'applique donc aussi aux légataires à titre universel ou à titre particulier, même s'ils sont
restés étrangers à l'estimation des biens légués faite dans la déclaration déposée pour eux par
les héritiers ou les légataires universels.
Cette règle est également d'application pour les droits et intérêts dus par les personnes
assimilées à des légataires par les articles 4 à 14 du CDS.
En vertu de l'article 70, alinéa 2 du CDS, "les héritiers, légataires et donataires universels
dans la succession d'un habitant du royaume sont tenus ensemble, chacun en proportion de sa
part héréditaire, de la totalité des droits et intérêts dus par les légataires et donataires à titre
universel ou à titre particulier."
160
Luc HERVE - Séminaire Stagiaires IPCF - Droits d'enregistrement et de succession
Par héritiers, légataires et donataires universels, l'article 70 précité du CDS vise les
successeurs qui ont vocation à toute la succession, en vertu de la loi, d'une disposition
testamentaire ou d'une institution contractuelle, peu importe la part qu'ils recueillent
réellement dans la succession, même si, en fait, ils ne recueillent rien.
Il s'ensuit que :
a)
les héritiers qui, lors de l'ouverture de la succession, ont perdu toute vocation
successorale (à ne pas confondre avec la part qu'ils recueillent effectivement), à la
suite d'une disposition testamentaire ou d'une institution contractuelle contenant un
legs universel ou une donation universelle, ne sont pas tenus au paiement des droits et
des intérêts dus par les légataires à titre universel ou à titre particulier;
b)
la réduction d'un legs universel n'empêche nullement que le légataire universel reste
tenu, en proportion de sa part effective (soit la quotité disponible), au paiement des
droits et des intérêts dus par les légataires à titre universel ou à titre particulier.
En ce qui concerne les droits de succession et les intérêts liquidés à charge des successeurs à
titre universel ou à titre particulier, des successeurs anomaux ou des personnes assimilées à
des légataires par les articles 4 à 14 du CDS, l'Etat a deux débiteurs et il peut, à son choix,
actionner l'un ou l'autre.
On observera que c'est à titre de débiteur principal, et non comme caution, que les successeurs
universels sont tenus au paiement des droits de succession et des intérêts liquidés sur
l'émolument des légataires à titre universel et à titre particulier.
Dès lors, l'administration peut poursuivre les successeurs universels, chacun en proportion de
sa part, au paiement des droits de succession et des intérêts dus par les successeurs à titre
universel ou à titre particulier sans avoir au préalable actionné ces derniers.
B.
Obligation de toute personne par le fait de laquelle une contravention a été
commise, au paiement des amendes dues
270.- Le Code prévoit des sanctions sous la forme d'amendes fiscales lorsque les ayants
droit ne remplissent pas strictement les obligations que le Code leur impose ou encore lorsque
des tiers ne satisfont pas à leurs obligations d'information (cf. infra).
Le principe général est que la personne par le fait de laquelle une contravention a été commise
est tenue personnellement de l'amende due pour cette contravention. Cette règle vaut aussi
bien pour les successeurs que pour les tiers.
L'article 71, alinéa 2 du CDS ajoute que lorsqu'une contravention est commise par plusieurs
personnes et donne lieu à une amende proportionnelle au droit, chacun des contrevenants est
tenu de cette amende dans la mesure où il peut être actionné en paiement du droit.
161
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C.
Circonstances qui obligent certains tiers au paiement de la totalité ou d'une
partie des droits, intérêts et amendes
271.- Seront solidairement tenues avec les redevables au paiement des droits éludés, des
intérêts et amendes notamment les personnes qui auront été condamnées comme auteurs ou
complices d'infractions visées aux articles 133 et 133bis du CDS.
Les infractions visées à ces dispositions sont :
a)
avoir, dans une intention frauduleuse et à dessein de nuire (éluder l'impôt), contrevenu
aux dispositions du CDS;
b)
avoir commis un faux en écritures publiques, de commerce ou privées ou avoir fait
usage d'un tel faux pour commettre les infractions visées sub a);
c)
avoir délivré un faux certificat pouvant compromettre les intérêts du Trésor ou avoir
fait usage de pareil certificat.
SECTION 2.
CONTRIBUTION A LA DETTE D’IMPOT
272.- En vertu de l'article 75 du CDS, chaque héritier, légataire et donataire supporte les
droits de succession chacun pour ce qu'il recueille, sauf dispositions contraires.
Ainsi, l'héritier, le légataire ou le donataire qui, dans le cas prévu à l'article 70, alinéa 2 du
CDS, a payé les droits liquidés à charge d'un légataire ou d'un donataire particulier, dispose
donc d'un recours contre cet ayant droit.
Les amendes doivent toujours être supportées personnellement par les contrevenants (article
71 du CDS).
Le défunt peut toutefois disposer par testament que les droits liquidés du chef d'un legs
déterminé seront supportés par les héritiers ou par des légataires autres que le bénéficiaire du
legs. De même, les héritiers, les légataires et les donataires peuvent par convention modifier
leur contribution.
Une telle stipulation ou convention dérogatoire n'influence pas la perception de l'impôt
successoral et elle ne peut nuire aux droits de poursuite de l'Etat. Au contraire, elle peut les
étendre.
162
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SECTION 3.
A.
DELAI DE PAIEMENT
Principes
273.- En vertu de l'article 77 du CDS, le paiement des droits de succession et éventuellement
des amendes, doit avoir lieu "dans les deux mois à compter du jour de l'expiration du délai
fixé par l'article 40. Lorsque le dernier jour du délai est un jour de fermeture des bureaux, ce
délai est prorogé jusqu'au premier jour d'ouverture des bureaux qui suit l'expiration du
délai."
En principe, le paiement doit donc avoir lieu dans les sept, huit et neuf mois à compter du
décès, suivant que le défunt est décédé en Belgique, dans un autre pays d'Europe, ou hors
d'Europe.
Quant aux droits dus suite à des évènements nouveaux qui ont nécessité le dépôt d'une
nouvelle déclaration (article 37 du CDS), le délai ne commence à courir que lors de
l'expiration du délai de dépôt de cette nouvelle déclaration.
Puisque l'article 77 du CDS se réfère au délai de dépôt fixé par l'article 40 du CDS, la
prolongation du délai de dépôt accordée par le directeur général de l'enregistrement et des
domaines en vertu de l'article 41 du CDS reste sans influence quant au délai de paiement de
l'impôt.
Pour déterminer le délai de paiement, on calcule d'abord le délai de dépôt de la déclaration
suivant les règles fixées par les articles 40 et 123 du CDS. Le dernier jour du délai de dépôt
ainsi calculé constitue le point de départ du délai de paiement. Il peut donc arriver que le délai
de dépôt et le délai de paiement soient prorogés jusqu'au premier jour d'ouverture des bureaux
qui suit l'expiration du délai.
B.
Cas particuliers
274.- Si, en raison des circonstances extraordinaires du décès, les héritiers se sont trouvés
dans l'ignorance absolue de celui-ci, les délais ne commencent à courir que du jour où cette
ignorance a cessé.
275.- Si les biens successoraux sont utilisés pour l'exercice d'une activité professionnelle ou
s'ils ne sont pas susceptibles d'une réalisation immédiate sans un préjudice considérable pour
les débiteurs de l'impôt, le directeur général de l'enregistrement et des domaines peut autoriser
ceux-ci, moyennant une garantie, à se libérer de leur dette par paiements partiels. Le délai de
paiement ne peut cependant dépasser cinq ans à partir de la date du décès ou de l'événement
donnant ouverture à l'impôt (article 77, alinéa 2 du CDS).
163
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L'octroi de facilités de paiement n'empêche pas le cours des intérêts légaux sur les droits à
partir de l'expiration du délai légal de paiement (article 81, alinéa 1 du CDS).
276.- En cas de transmissions successives (...) d'un bien acquis sous condition suspensive ou
d'un bien possédé par un tiers, mais revendiqué par la succession, l'impôt est dû (...)
uniquement à raison de la dernière mutation (article 78, alinéa 1 du CDS).
Or, il se peut que la dernière mutation échappe à l'impôt. Ainsi, lorsqu'un bien qui était
litigieux a fait l'objet de plusieurs transmissions successives par décès, et qu'un jugement
reconnaît ultérieurement qu'il était la propriété du premier défunt, l'impôt n'est dû qu'à raison
de la dernière mutation par décès qui a précédé le jugement. Si, pour une raison ou l'autre,
cette dernière transmission n'est pas imposable, les biens échappent à l'impôt successoral.
Par contre, les droits dus sur les biens litigieux en la possession du défunt ou sur les biens
appartenant à celui-ci sous condition résolutoire et qui font l'objet de transmissions
successives par décès, sont immédiatement exigibles lors de chaque transmission, sauf
restitution éventuelle des différents droits perçus si l'actif imposable se trouve diminué par
suite de l'accomplissement de la condition résolutoire ou de la solution du litige au détriment
du premier défunt.
277.- L'article 79 du CDS prévoit que tout ayant droit qui recueille des biens en nuepropriété dans la succession d'un habitant du Royaume a la faculté de différer le paiement du
droit de succession.
Le paiement des droits et de l'intérêt forfaitaire est différé jusqu'à l'extinction de l'usufruit qui
grève les biens recueillis, par la mort de l'usufruitier ou par l'expiration du terme. L'extinction
de l'usufruit pour une autre cause (renonciation, déchéance, etc.) ne met pas fin au sursis de
paiement.
L'extinction de l'usufruit, par la mort de l'usufruitier ou par l'expiration du terme pour lequel il
a été constitué, doit faire l'objet d'une déclaration de cessation d'usufruit, à déposer par les
débiteurs de la somme tenue en suspens, dans les 5, 6 ou 7 mois de l'évènement (articles 37,
5°, 38, 6°, et 44 du CDS). La somme tenue en suspens doit être payée dans les deux mois de
l'expiration du délai de dépôt de la déclaration de cessation d'usufruit.
C.
Sanction : les intérêts moratoires
278.- Si l'impôt n'est pas payé dans le délai prévu au premier alinéa de l'article 77 du CDS,
l'intérêt légal, au taux fixé en matière civile est exigible de plein droit sur les droits, à
l'exclusion des amendes, à compter de l'expiration de ce délai (article 81 du CDS).
164
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La prolongation du délai de dépôt ou de paiement accordée par le directeur général est sans
influence sur l'exigibilité des intérêts.
Le délai à l'expiration duquel les intérêts commencent à courir est dans tous les cas celui fixé
par l'article 77 du CDS. Ainsi, le légataire à titre particulier qui, suite à l'inaction des héritiers
ou légataires universels, a été invité par le receveur à déposer la déclaration de succession
pour ce qui le concerne (article 38 du CDS), est tenu au paiement des intérêts moratoires
calculés selon les règles habituelles, c'est-à-dire à compter de l'expiration du deuxième mois
qui suit le délai pendant lequel les héritiers et légataires universels auraient dû déposer la
déclaration.
Le mode de calcul des intérêts moratoires est réglé par l'article 82 du CDS. L'intérêt est
calculé sur le montant des droits liquidés. En principe, les intérêts doivent, tout comme les
droits, être liquidés séparément pour chaque héritier.
L'article 82, alinéa 4 du CDS porte qu'aucun intérêt n'est réclamé si la somme à payer pour
droits (c'est-à-dire le total des droits dus par chaque héritier séparément) est inférieure à 5 €.
D.
Modes de paiement
279.- Nous renvoyons à l'article 83-2 du CDS et à l’arrêté royal du 15 octobre 1987 qui
impose actuellement le paiement des droits de succession, des amendes et des intérêts selon
les modalités qu’il prescrit, soit par un versement ou un virement au compte du bureau, soit
par un mandat de poste, soit par la remise d’un chèque certifié ou garanti préalablement barré,
soit par paiement entre les mains d’un huissier de justice.
Par exception, les articles 83-1 et 83-3 du CDS permettent d’opérer le paiement des droits :
-
E.
au moyen d’obligations au porteur et des inscriptions nominatives de la dette 4%
unifiée ;
au moyen d’œuvres d’art.
Garanties de l’Etat
280.- Les articles 84 à 93 du CDS établissent les sûretés réelles dont l'Etat dispose pour
recouvrer les droits, les intérêts et éventuellement les frais de poursuite et d'instance. Ils
règlent aussi les modalités de ces sûretés réelles.
Il s'agit de :
a)
b)
c)
un privilège général ;
une hypothèque légale ;
une garantie spéciale.
165
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CHAPITRE VII.
OBLIGATIONS IMPOSEES AUX TIERS EN VUE D’ASSURER
LA PERCEPTION DES DROITS
281.- Les obligations imposées aux tiers sont détaillées dans les articles 96 à 103 du CDS
auxquels nous renvoyons.
Ces dispositions contiennent des mesures de trois ordres :
1)
l'obligation pour les administrations et établissements publics, les fondations d'utilité
publique et les fondations privées, les associations ou sociétés, les banquiers, les
agents de change, les agents d'affaires et les officiers publics ou ministériels d'informer
l'administration des avoirs qu'ils détenaient et qui reviennent aux héritiers, légataires,
donataires ou autres ayants droit du défunt ou à son conjoint (articles 96 à 99 du CDS);
l'obligation pour les assureurs professionnels d'informer l'administration des contrats
d'assurance contre l'incendie, le vol ou tous autres risques d'objets mobiliers corporels,
en cours au jour du décès, et souscrits par le défunt ou son conjoint (article 103 du
CDS);
2)
l'obligation pour les mêmes personnes de fournir des renseignements à l'administration
sur les opérations faites par le défunt, son conjoint, ses héritiers, légataires ou
donataires, et même par des tiers; les renseignements ne peuvent être demandés qu'en
vertu d'une autorisation spéciale du directeur général de l'enregistrement et des
domaines et "si l'enquête porte sur des faits passés plus de trois ans avant l'ouverture
de la succession ou sur des opérations quelconques effectuées par toute autre
personne que le défunt ou son conjoint, ladite autorisation doit préciser les faits qui
font l'objet de la recherche" (article 100, alinéa 3 in fine du CDS);
3)
un ensemble d'obligations pour les personnes qui se livrent habituellement à la
location de coffres-forts, lesquels ne peuvent être ouverts, après le décès du locataire
ou de son conjoint, sans que soit dressé un inventaire ou une liste du contenu du
coffre-fort, en présence d'un délégué de l'administration (articles 101 à 102, et article
98, alinéas 4 et 5 du CDS).
*
*
*
166
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CHAPITRE VIII.
MOYENS DE PREUVE
SECTION 1.
MOYENS DE PREUVE DU DROIT COMMUN
282.- Par application des principes juridiques régissant la preuve contenus dans l'article
1315 du Code civil, l'administration qui réclame le paiement de l'impôt successoral doit faire
la preuve de sa créance. L’Etat doit prouver, notamment, qu’un décès a eu lieu, que la
succession comprend tel(s) bien(s), que les biens délaissés sont de telle valeur.
Lorsqu’une déclaration de succession est déposée, la consistance de l'actif et du passif
déclarés dans la déclaration déposée est présumée exacte jusqu'à preuve du contraire.
Si l'administration prétend que la déclaration est inexacte, qu'il y a eu infraction à l'un des
articles du CDS entraînant l'exigibilité de droits et d'amendes, elle doit, conformément aux
principes du droit commun en matière de preuve, établir l'existence de sa créance.
En vertu de l'article 105 du CDS, qui en fait ne déroge pas aux principes prérappelés,
l'administration peut fournir la preuve requise par toutes voies de droit, témoins et
présomptions compris, à l'exception du serment.
Le CDS s’écarte toutefois de ces principes lorsque les ayants droit omettent de déposer une
déclaration. Dans cette hypothèse, l’administration peut procéder à une imposition d’office
dans le chef de ceux-ci (article 47 du CDS). Il suffit qu’elle établisse qu’une transmission de
biens s’est opérée par décès. Son imposition ne requiert pas que l’actif soit détaillé dans la
contrainte.
SECTION 2.
A.
MOYENS DE PREUVE SPECIAUX
Procès-verbaux des agents de l'Administration (article 105 du CDS)
283.- Indépendamment de la possibilité de prouver ses prétentions par témoins et
présomptions, l'administration peut établir, par les procès-verbaux de ses agents, toute
contravention aux dispositions du CDS et tout fait quelconque qui établit ou qui concourt à
établir l'exigibilité d'un droit ou d'une amende.
Les procès-verbaux font foi jusqu'à preuve du contraire. Ils sont notifiés aux intéressés dans le
mois de la constatation de la contravention. Cette notification peut s'effectuer par lettre
recommandée à la poste. En ce cas, le dépôt du pli à la poste vaut notification à compter du
lendemain.
167
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En matière de droits de succession, la rédaction d'un procès-verbal ne se justifie que pour la
constatation d'une contravention qui résulte d'un fait fugitif survenu en présence d'un agent de
l'administration, par exemple, le refus de fournir les renseignements régulièrement demandés
en vertu de l'article 100 du CDS.
B.
Droit d'investigation dans les documents commerciaux du défunt (article 107 du
CDS)
284.- Moyennant l'autorisation du directeur général de l'enregistrement et des domaines, un
fonctionnaire de l'administration a un droit d'investigation dans les livres de commerce,
inventaires, et bilans du fonds de commerce qui étaient en tout ou en partie la propriété du
défunt. Cet article est une extension de l'article 100 du CDS.
Le refus de production de ces documents est frappé d'une amende à fixer par le directeur
régional dans les limites de 250 à 2.500 €.
SECTION 3.
A.
PRESOMPTIONS LEGALES
Généralités
285.- Les effets de ces présomptions sont très importants. Comme il s'agit de présomptions
établies en faveur de l'administration, celle-ci est dispensée de toute autre preuve (article 1352
du Code civil). Les biens visés par ces présomptions sont légalement présumés se trouver
dans le patrimoine du défunt. L'administration ne doit pas prouver qu'ils s'y trouvent
réellement.
La seule preuve à administrer par l'Etat est que la situation qu'il vise tombe sous le coup des
articles 108, 109 ou 110 du CDS.
Les présomptions légales créent donc une situation juridique différente de celle qui résulte de
l'article 105 du CDS qui contraint l'administration à prouver elle-même l'existence de sa
créance.
Il s'agit de présomptions juris tantum, c.-à-d. de présomptions admettant la preuve contraire.
En d'autres termes, les ayants droit peuvent démontrer que les biens qui sont censés appartenir
au défunt ne faisaient plus partie de son patrimoine lors de son décès.
B.
Présomption légale instaurée par l'article 108 du CDS
286.- Pour la demande de droits de succession, l'existence de biens meubles et immeubles
est, jusqu'à preuve contraire, suffisamment établie par les actes de propriété passés par le
défunt à son profit ou à sa requête (article 108, alinéa 1 du CDS).
168
Luc HERVE - Séminaire Stagiaires IPCF - Droits d'enregistrement et de succession
Cette disposition signifie que certains actes suffisent à établir qu'à un moment donné, le
défunt était propriétaire de tel ou tel bien et que si la preuve contraire n'est pas rapportée, ce
bien est censé se trouver dans sa succession. En principe, la date des actes invoqués importe
peu; toutefois, en ce qui concerne certains biens meubles, la présomption n'existe que si l'acte
ne remonte pas à plus de trois ans avant le décès.
Par actes de propriété, passés par le défunt à son profit ou à sa requête, il faut entendre tout
acte, au sens d'écrit, qui émane soit du défunt lui-même, soit d'un tiers agissant pour le compte
du défunt ou dans l'intérêt de celui-ci, et qui révèle de façon certaine que certains biens ou des
valeurs déterminées ont été la propriété du défunt.
La présomption légale n'est applicable que si l'existence du bien résulte de l'acte. Si un acte ou
un écrit ne répond pas aux exigences de l'article 108 du CDS, ce document peut toujours être
invoqué comme présomption simple.
L'article 108 du CDS s'applique à toutes espèces de biens (immeubles, meubles corporels,
créances, titres, numéraire, etc.) dont l'existence est révélée; il n'est même pas nécessaire que
ces biens soient individuellement déterminés, tel le numéraire.
287.- En principe, la date de l'acte établissant l'existence de biens n'a aucune importance.
Il y a cependant une exception : si les actes ou écrits révèlent l'existence de biens auxquels
s'applique l'article 2279 du Code civil (par exemple, des biens meubles corporels, du
numéraire, des titres au porteur), la présomption légale de l'article 108 du CDS ne peut être
invoquée que si l'acte ne remonte pas à plus de trois ans avant le décès.
Si un tel acte remonte à une période plus éloignée, il ne constitue pas un acte qui, à lui seul,
permet à l'administration de considérer que le défunt possédait encore ces biens à son décès.
Ce document ne forme qu'une présomption simple, ou élément de présomption, qui doit être
complétée par d'autres faits.
288.- Si les conditions posées par l'article 108 du CDS sont réunies, les biens dont
l'existence est révélée dans le chef du défunt sont, jusqu'à preuve du contraire, censés
appartenir à sa succession.
L'administration n'a aucune preuve à fournir, sauf celle de l'existence de l'acte qu'elle invoque
comme base de la présomption légale. Cette preuve peut être faite par tous moyens, car
démontrer l'existence d'un acte, c'est rapporter la preuve d'un simple fait matériel.
Puisque la présomption de l'article 108 du CDS est une présomption légale juris tantum, les
parties sont autorisées à administrer la preuve contraire.
169
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C.
Présomption légale instaurée par l'article 109 du CDS
289.- En vertu de l’article 109 du CDS : "Il existe également, jusqu'à preuve contraire, une
présomption légale de propriété pour la demande des droits de succession et de mutation par
décès et des amendes, dans les cas suivants :
1° quant aux immeubles, lorsqu'ils sont inscrits au rôle de la contribution foncière au nom du
défunt et lorsque des paiements ont été faits par celui-ci d'après ce rôle;
2° quant aux rentes et créances hypothécaires, lorsqu'elles sont inscrites à son profit dans les
registres des conservateurs des hypothèques;
3° quant aux créances sur l'Etat belge, lorsqu'elles figurent au nom du défunt dans le grandlivre de la dette publique;
4° quant aux obligations, actions ou autres créances sur les provinces, communes,
établissements publics et fondations d'utilité publique du royaume, lorsqu'elles sont inscrites
au nom du défunt dans leurs registres et comptes."
La présomption prévue par l'article 109 du CDS se limite aux biens nominatifs expressément
cités par le texte. Ce dernier permet au fisc de baser sa réclamation sur des faits matériels (des
inscriptions dans des livres), indépendamment de l'action qu'il peut entreprendre en vertu de
l'article 108 du CDS, sur base de l'opération elle-même. Les deux présomptions sont
cumulatives et se complètent.
Il s'agit aussi d'une présomption légale juris tantum.
D.
Présomptions légales instaurées par l'article 110 du CDS
290.- L'article 110 du CDS contient deux présomptions :
1°
Sont présumés appartenir au défunt pour une part virile :
a) les titres, sommes, valeurs ou objets quelconques déposés dans un coffre-fort tenu
en location conjointement ou solidairement par le défunt et par une ou plusieurs autres
personnes;
b) les choses et sommes, placées ou non dans un coffre fermé, pli ou colis cacheté, qui
sont détenues ou dues par une administration, un établissement public ou d'utilité
publique, une association ou société ayant en Belgique son principal établissement,
une succursale ou un siège d'opérations, un banquier, un agent de change
correspondant, un agent d'affaires, un officier public ou ministériel, quand les choses
détenues et les sommes dues peuvent, d'après la convention, être restituées, payées ou
transférées sur l'ordre d'un des co-intéressés (articles 99 et 110, alinéa 1 du CDS);
2°
Sont considérés comme appartenant au défunt en totalité :
170
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a) les titres, sommes, valeurs ou objets quelconques qui sont placés dans un coffre-fort
tenu en location par le défunt seul;
b) les titres, sommes, valeurs ou objets quelconques placés dans un coffre fermé, pli
ou colis cacheté, déposé au nom du défunt seul, chez une des personnes physiques ou
morales désignées sub 1°, b).
L'application de l'article 110 du CDS se limite strictement aux cas expressément prévus par le
texte. Il ne peut donc être invoqué, si le coffre-fort contenant les titres, sommes ou valeurs, se
trouve ailleurs que chez un loueur, par exemple, s'il est placé au domicile du défunt.
Les présomptions instaurées par l'article 110 du CDS peuvent être renversées par les ayants
droit. La preuve contraire admise présente cependant cette particularité que la première
présomption peut aussi être renversée par l'administration. Ceci signifie que par tous moyens,
celle-ci peut prouver que la part du défunt dans les biens et valeurs visés est supérieure à une
part virile.
SECTION 4.
A.
EXPERTISE DE CONTROLE
Généralités
291.- Les biens composant l'actif imposable doivent être estimés par les déclarants à leur
valeur vénale au jour du décès (article 19, alinéa 1 du CDS), sauf dans les cas prévus aux
articles 21 à 26 du CDS.
La tâche de l'administration se borne au contrôle des évaluations faites.
Ce contrôle donne souvent lieu à des discussions entre l'administration et les redevables. Si
ces derniers contestent la valeur proposée par le receveur, l'administration devrait, en
l'absence de mesures particulières, chaque fois prouver, suivant les règles du droit commun,
que cette valeur est justifiée et que ses exigences en matière de droits complémentaires sont
fondées. Le recours à la procédure du droit commun requiert toujours l'intervention du juge.
Pour éviter ces difficultés tout en veillant à garantir une juste perception de l'impôt, le
législateur a créé, pour certains biens, un système qui, lorsque le receveur et les contribuables
ne s'entendent pas au sujet de l'évaluation, prévoit que l'estimation est faite par un ou
plusieurs experts désignés par les deux parties, de commun accord ou par le juge de paix. La
valeur fixée par l'expert (ou par les experts) forme la base de perception de l'impôt.
B.
Biens soumis à l’expertise
292.- En vertu de l'article 111 du CDS, tous les biens successoraux se trouvant en Belgique,
qui sont déclarés pour leur valeur vénale, peuvent être soumis à l'expertise de contrôle.
171
Luc HERVE - Séminaire Stagiaires IPCF - Droits d'enregistrement et de succession
Toutefois, en ce qui concerne les biens meubles corporels, ce droit d'expertise ne s'applique
qu'aux navires et bateaux.
C.
Demande d'expertise de contrôle - Délai et formalités
293.- Seule l'administration peut requérir l'expertise de contrôle et ce, uniquement comme
mesure de contrôle des valeurs déclarées.
Le délai pour la notification de la demande d'expertise est de deux ans à compter du jour du
dépôt de la déclaration qui mentionne les biens susceptibles d'expertise.
La demande doit désigner les biens dont l'expertise est demandée, et indiquer la valeur à
laquelle l'administration les évalue et le montant présumé dû pour droit et amende. Ces
dernières mentions ne lient pas l'administration; elles sont citées à titre de renseignements.
La demande doit être notifiée aux déclarants eux-mêmes (c.-à-d. aux personnes désignées à
l'article 38 du CDS et qui ont déposé la déclaration), soit au domicile élu par eux, soit à leur
domicile réel.
Dans les quinze jours de la notification de la demande d'expertise, le receveur et les intéressés
peuvent désigner de commun accord l'expert ou un collège de trois experts (article 113 du
CDS). Cet accord est constaté par un procès-verbal.
A défaut d'accord au sujet de la désignation de l'expert (des experts), le receveur adresse au
juge de paix une requête exposant les faits et contenant la demande d'expertise; le juge de paix
compétent est celui dans le ressort duquel se trouve le bureau où la déclaration a été déposée.
Le juge statue dans les quinze jours de la demande; il ordonne l'expertise et nomme un ou
trois experts.
La procédure que les experts doivent respecter est réglée par les articles 117 et 118 du CDS
auxquels il est renvoyé. L'expert ou, le cas échéant, les trois experts donnent leur avis sur la
valeur du bien, dans un rapport dont la minute est déposée au greffe de la justice de paix.
L'évaluation donnée par les experts détermine la valeur vénale du bien au point de vue de la
perception de l'impôt (article 119, alinéa 2 du CDS). C'est le montant de la valeur arrêtée par
l'expertise qui doit servir de base au calcul des droits (supplémentaires) et éventuellement des
amendes. Il en est ainsi, même si l'administration avait antérieurement offert de clore l'affaire
en ramenant transactionnellement la plus-value à un montant inférieur à celui fixé par les
experts.
Aux termes de l'article 120 du CDS, la décision de l'expert (des experts) peut encore être
contestée. Le receveur et le contribuable peuvent agir en nullité de l'expertise devant le
tribunal de première instance.
172
Luc HERVE - Séminaire Stagiaires IPCF - Droits d'enregistrement et de succession
L'expertise effectuée par l'expert peut ainsi être contestée, tant par l'administration que par les
ayants droit du défunt, par le biais d'une action en justice introduite dans le mois de la date de
signification du rapport.
Pour les successions ouvertes à partir du 25 juillet 2004, l'expertise peut être contestée devant
le tribunal sur base de tous les manquements présumés.
Sous l'empire du texte de l'article 120 ancien du CDS, la nullité de l'expertise ne pouvait être
poursuivie que sur base de trois motifs : une contravention à la loi, une erreur matérielle ou
une violation des formes substantielles. Le juge ne pouvait alors ordonner une nouvelle
expertise qu'après avoir constaté l'existence de l'une de ces causes de nullité mais il ne pouvait
pas se prononcer sur la valeur elle-même, fixée par l'expert.
Désormais, le juge est aussi compétent pour se prononcer sur la fixation de la valeur par
l'expert désigné et fixer, souverainement, la valeur des biens sujets de l'expertise.
*
*
*
173
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CHAPITRE IX.
LES AMENDES
SECTION 1.
GENERALITES
294.- Les infractions aux prescriptions du CDS entraînent l’application de peines
pécuniaires : les amendes fiscales.
En outre, des peines correctionnelles sont également applicables en cas de fraude.
Les amendes sont en principe dues de plein droit par le seul fait de l'infraction, peu importe
les circonstances dans lesquelles elle a eu lieu.
Toutefois, aux termes de l’article 141, alinéa 3 du CDS, dans les limites prévues par la loi, le
montant des amendes fiscales proportionnelles est fixé selon un barème.
Le décès du contrevenant n’a aucune influence sur l’exigibilité de l’amende. Toutefois, son
héritier, légataire ou donataire ne peut être tenu du chef de cette amende au paiement d’une
somme supérieure à la moitié des droits, à moins qu’il n’ait concouru personnellement à
l’infraction (article 132 du CDS).
Au moment du dépôt de la déclaration, le receveur doit attirer l'attention des déclarants sur les
irrégularités qui apparaissent à simple lecture, par exemple, l'absence de mention de la police
d'assurance ou du fait que les biens meubles ne sont pas assurés. Les amendes qui
sanctionnent ces irrégularités ne sont exigibles que si les parties ont refusé ou négligé de les
réparer dans le délai fixé par le receveur.
Les amendes fiscales sont établies par les articles 124 et 130 du CDS.
SECTION 2.
INFRACTIONS DONNANT LIEU A AMENDES
295.- On relèvera notamment :
a)
b)
c)
d)
e)
f)
g)
le dépôt tardif de la déclaration ;
le paiement tardif de l'impôt après contrainte ;
l'omission de biens ;
l'insuffisance d'estimation ;
la déclaration inexacte ;
l'offre en paiement de titres ne dépendant pas de la succession ;
des infractions diverses,…
174
Luc HERVE - Séminaire Stagiaires IPCF - Droits d'enregistrement et de succession
CHAPITRE X.
LES RESTITUTIONS
296.- Il ressort du rapport au Roi relatif aux articles 134 et 135 du CDS que les droits de
succession, les intérêts et les amendes ne peuvent être restitués que dans les cas expressément
prévus par le Code, même si, en matière d'impôt successoral, il n'existe pas de texte formel et
clair comme en matière de droits d'enregistrement (article 208 du CDE).
Les causes de restitution sont énumérées aux articles 134 et 135 du CDS. Cette énumération
n'est toutefois pas complète. A ces causes de restitution, il faut ajouter celles qui découlent de
l'application des articles 3, 24 et 28, 56, 57 et 67 du CDS auxquels il est renvoyé.
La restitution des droits peut entraîner la restitution des intérêts moratoires qui auraient été
calculés sur ces droits ainsi que des amendes dans la mesure où leur montant a été influencé
par ces droits.
SECTION 1.
CAS DE RESTITUTION PREVUS PAR L'ARTICLE 134 DU CDS
297.- Application erronée de la loi
298.- Preuve de l'existence de dettes qui avaient été rejetées
SECTION 2.
CAS DE RESTITUTION PREVUS PAR L'ARTICLE 135 DU CDS
299.- Suivant les termes de l'article 135 du CDS, la restitution des droits, intérêts et amendes
dans les cas prévus par cette disposition, est subordonnée au dépôt d'une "déclaration
indiquant le fait donnant lieu à la restitution."
Le dépôt de la déclaration constitue une condition de forme. L'action en restitution n'est pas
recevable, si cette condition n'est pas remplie. Pour le reste, nous renvoyons au contenu de
cette disposition.
SECTION 3.
IMPUTATION
300.- Partant de l'idée que l'impôt successoral constitue une charge de l'hérédité plutôt
qu'une dette personnelle des héritiers, l'article 136 du CDS autorise l'imputation "des sommes
sujettes à restitution sur celles qui seraient dues pour une autre cause à raison de la même
succession", même par un autre ayant droit.
175
Luc HERVE - Séminaire Stagiaires IPCF - Droits d'enregistrement et de succession
Il n'y a aucune distinction à faire suivant la nature des sommes sujettes à restitution ou à
recouvrer (droits, intérêts ou amendes).
Seules les sommes effectivement payées peuvent donner lieu à imputation. Par conséquent,
l'imputation n'est pas possible pour les sommes qui n'ont pu être recouvrées par suite de
l'arrivée de la prescription en faveur du contribuable.
*
*
*
176
Luc HERVE - Séminaire Stagiaires IPCF - Droits d'enregistrement et de succession
CHAPITRE XI.
PRESCRIPTION
SECTION 1.
GENERALITES
301.- La prescription extinctive est un mode d'extinction d'une dette qui, après l'écoulement
d'un certain temps, permet au débiteur de ne plus payer ce qu'il doit.
La prescription étant d'ordre public, il n'est pas permis d'y renoncer d'avance, c.-à-d. avant
qu'elle ait commencé à courir. Par contre, il est permis de renoncer au temps couru de la
prescription.
Si la prescription d'une restitution à charge de l'Etat est acquise au profit de ce dernier, ni le
ministre des Finances, ni les fonctionnaires n'ont qualité pour y renoncer.
La prescription en matière de recouvrement et de restitution des droits, intérêts et amendes fait
l'objet des articles 137 à 140-2 du CDS. Ces dispositions contiennent seulement les principes
généraux de la matière; pour le surplus, il faut recourir au droit commun.
SECTION 2.
CALCUL DES DELAIS DE PRESCRIPTION
302.- Les délais de prescription se comptent de jour à jour. Le jour où se produit l'évènement
(dies a quo) n'est pas compté dans le délai; par contre, le dernier jour du délai (dies ad quem)
est compté.
La prescription est acquise à l'expiration du dernier jour du délai, même si ce jour est un
samedi, un dimanche ou un jour férié légal
Les années se comptent d'une date à l'autre sans égard au nombre de jours qu'elles comptent.
Les années bissextiles sont comptées comme les années ordinaires; si le dernier mois du délai
ne contient pas de jour correspondant au dies a quo (par exemple, si la prescription doit
s'achever le 29 février), le dies ad quem est le dernier jour de ce mois (soit le 28 ou le 29
février).
SECTION 3.
SUSPENSION DE LA PRESCRIPTION
303.- Le CDS ne prévoyant rien en matière de suspension de la prescription, les règles du
droit commun s'appliquent.
177
Luc HERVE - Séminaire Stagiaires IPCF - Droits d'enregistrement et de succession
SECTION 4.
A.
DELAIS DE PRESCRIPTION
Prescription pour le recouvrement des droits (article 137 du CDS)
304.- Il y a prescription pour la demande :
a)
des droits, intérêts et amendes dus sur une déclaration, après deux ans à compter du
jour du dépôt de la déclaration; la prescription de deux ans pour le recouvrement des sommes
dues sur une déclaration déposée court à compter du jour du dépôt de cette déclaration, qu'elle
soit une déclaration primitive, une déclaration nouvelle prévue par l'article 37 du CDS ou une
déclaration supplémentaire ou rectificative ;
b)
de l'action en expertise de biens sujets à pareil contrôle et des droits, intérêts et
amendes en cas d'insuffisance d'évaluation desdits biens, après deux ans;
c)
des droits, intérêts et amendes en cas d'insuffisance d'évaluation de biens non sujets à
l'expertise, après dix ans; le tout à compter du jour du dépôt de la déclaration;
d)
des droits, intérêts et amendes dus en cas d'absence de déclaration, ou d'omission de
biens dans la déclaration, après dix ans à compter du jour où le délai fixé pour le dépôt de la
déclaration par l'article 40 du CDS est expiré; si l'irrégularité porte sur un immeuble situé en
Belgique ou sur des rentes et créances inscrites dans les registres tenus en Belgique par les
conservateurs des hypothèques, ce délai est réduit à cinq ans.
Si le décès est survenu en Belgique, la prescription court à partir du jour de l'expiration du
délai de dépôt, tel qu'il est fixé par l'article 40 du CDS.
En cas de décès en pays étranger, la prescription ne court que du jour de l'inscription de l'acte
de décès aux registres de l'état civil du Royaume ou du jour auquel l'administration a eu
connaissance du décès par des actes enregistrés dans le Royaume. Cette disposition ne peut
avoir pour effet de situer le point de départ du délai de prescription à un moment antérieur à
celui fixé par le 1er alinéa de l'article 137, 3° du CDS, c.-à-d. de le ramener à un moment se
situant avant le jour de l'expiration du délai prévu par l'article 40 du CDS pour le dépôt de la
déclaration. Ainsi, lorsque le décès est inscrit dans les registres de l'état civil du Royaume
avant l'expiration du délai de dépôt de la déclaration, tel que ce délai est fixé par l'article 40
du CDS, la prescription ne commence à courir qu'à partir de l'expiration du délai de dépôt, et
non pas à compter de l'inscription du décès aux registres de l'état civil.
e)
des droits, intérêts et amendes, en cas d'inexactitude des faits indiqués dans la
déclaration, autres que la valeur ou la consistance des biens, après cinq ans à compter du jour
du dépôt de la déclaration;
f)
des sommes éludées et, le cas échéant, des amendes encourues pour contravention à
l'article 83 du CDS, après cinq ans à compter du jour où les titres ont été offerts en paiement;
178
Luc HERVE - Séminaire Stagiaires IPCF - Droits d'enregistrement et de succession
g)
des amendes encourues pour contravention aux articles 34, 46, 95 à 103-1, et 107 du
CDS, après cinq ans à compter du jour où la contravention a été commise;
h)
de l'amende établie par l'article 125 du CDS, après deux ans à compter de la date de la
signification de la contrainte.
B.
Prescription pour l’action en restitution
305.- L'action en restitution des droits, intérêts et amendes est prescrite après cinq ans à
compter du 1er janvier de l'année au cours de laquelle l'action est née (article 138 du CDS).
SECTION 5.
A.
INTERRUPTION DE LA PRESCRIPTION
Prescriptions pour le recouvrement des droits, intérêts et amendes
306.- Ces prescriptions sont interrompues de la manière et dans les conditions prévues aux
articles 2244 et suivants du Code civil.
Ceci signifie que la prescription est interrompue par :
- certains actes émanant de l'Etat (le créancier) : une citation en justice, un
commandement de payer ou une saisie signifiée au débiteur;
- certains actes émanant du contribuable (le débiteur) : la reconnaissance de dette par
le contribuable (débiteur) et la renonciation au temps couru de la prescription prévue
par l'article 140-1, dernier alinéa du CDS (cette renonciation efface le temps déjà
écoulé du délai en cours).
En pratique, la prescription est généralement interrompue par la signification par un huissier
de justice d'une contrainte avec commandement de payer, par la renonciation au temps couru
de la prescription ou par la reconnaissance de la dette par le débiteur.
L'acte interruptif a pour effet d'arrêter la prescription en cours; le temps couru avant
l'interruption est définitivement perdu. Une fois l'interruption accomplie, une nouvelle
prescription prend cours. La durée de cette nouvelle prescription est uniformément de deux
ans, quelles que soient la durée de la prescription interrompue et la manière dont elle l'a été.
Cette prescription biennale peut à son tour être interrompue de la même manière que la
prescription primitive.
179
Luc HERVE - Séminaire Stagiaires IPCF - Droits d'enregistrement et de succession
Dès que le litige est soumis au tribunal (par exemple, par la signification d'une opposition à
contrainte, avec assignation en justice), la prescription cesse de courir pendant toute la durée
de l'instance. Le jugement ou l'arrêt qui intervient ultérieurement et qui prononce des
condamnations à paiement, donne naissance à une action nouvelle et spéciale tendant à
l'exécution des condamnations prononcées (appelée actio judicati); cette action se prescrit par
dix ans (article 2262bis du Code civil).
B.
Prescription de l'action en expertise
307.- Aux termes de l'article 139 du CDS, la prescription de l'action en expertise et de
l'action en recouvrement des droits, intérêts et amendes dus à raison de l'insuffisance "de
biens soumis à expertise" est interrompue par la notification au contribuable de la demande
d'expertise prévue à l'article 112 du CDS.
Cette interruption produit ses effets jusqu'au jour du dépôt au greffe du rapport d'expertise,
quel que soit le temps qui s'écoule entre la notification de la demande et le dépôt.
Le recouvrement des droits, intérêts et amendes exigibles du chef des insuffisances constatées
par le rapport doit être poursuivi dans les deux ans du dépôt de celui-ci. Cette nouvelle
prescription de deux ans ne peut plus être interrompue que de la manière prévue par l'article
140-1 du CDS.
Ainsi, la reconnaissance expresse par le contribuable du montant de l'insuffisance constatée
par le receveur emporte interruption de la prescription afférente aux droits, intérêts et
amendes dus en raison de cette insuffisance.
Par contre, vu les termes de l'article 139 du CDS, la renonciation au temps couru de la
prescription reste sans influence sur la prescription de l'action en expertise, même si cette
renonciation interrompt la prescription pour le recouvrement des droits, intérêts et amendes.
C.
Prescription de l'action en restitution
308.- L'article 140-2 du CDS prévoit deux modes d'interruption de la prescription pour la
restitution de sommes :
a)
La prescription peut être interrompue de la manière et dans les conditions prévues par
les articles 2244 et suivants du Code civil. Dans l’hypothèse où l'interruption de la
prescription résulte d'une citation en justice, elle produit ses effets pendant toute la durée de
l'instance.
Et si le tribunal ordonne la restitution, celle-ci obéit à une nouvelle prescription, qui ne
commence toutefois à courir que lorsque la décision judiciaire est coulée en force de chose
jugée.
180
Luc HERVE - Séminaire Stagiaires IPCF - Droits d'enregistrement et de succession
Si l'interruption résulte d'une reconnaissance par l'Etat du droit à restitution, une nouvelle
prescription prend cours, à compter de la décision administrative impliquant cette
reconnaissance.
b)
La prescription peut également être interrompue par une demande motivée faite par le
contribuable et notifiée par lettre recommandée à la poste au receveur qui a effectué la recette
ou au directeur régional de l'enregistrement et des domaines. Le dépôt des lettres à la poste
vaut notification à compter du lendemain (article 140-2, alinéas 1 et 3 du CDS).
Dans cette hypothèse, l'interruption produit ses effets, soit jusqu'au jour où l'administration
décide d'accorder la restitution, soit jusqu'au jour où la décision de l'administration rejetant la
demande est notifiée aux intéressés par une lettre recommandée à la poste. Dans ce cas-ci, les
intéressés disposent d'un nouveau délai de prescription qui ne peut être interrompu que de la
manière et dans les conditions prévues par les articles 2244 et suivants du Code civil, et qui
n'expire que deux ans après la date à laquelle la décision rejetant la demande leur a été
notifiée par lettre recommandée.
*
*
*
181
Luc HERVE - Séminaire Stagiaires IPCF - Droits d'enregistrement et de succession
CHAPITRE XII.
POURSUITES ET INSTANCES
SECTION 1.
GENERALITES
309.- La procédure fiscale a été modifiée par les lois des 15 et 23 mars 1999. Les
contestations relatives à l'application d'une loi d'impôt relèvent depuis lors exclusivement de
la compétence du tribunal de première instance (article 569, alinéa 1er, 32° du Code
judiciaire).
En matière de droits de succession, avant de saisir le tribunal, le contribuable peut s'adresser
au ministre des Finances (article 141 du CDS), mais il ne s'agit pas d'une procédure préalable
obligatoire.
SECTION 2.
INSTANCE ADMINISTRATIVE
310.- L'article 141, alinéa 1er du CDS donne au ministre des Finances le pouvoir de trancher,
avant l'introduction des instances judiciaires, les différends qui opposent l'administration aux
contribuables en matière de droits de succession et de droits de mutation par décès.
Même s'ils ont eu recours à l'instance administrative, les contribuables conservent le droit
d'assigner l'Etat en justice.
Le recours à la procédure administrative n'est soumis à aucune condition de forme. En
pratique, le contribuable qui s'estime fondé à critiquer un impôt établi à sa charge expose,
dans une simple lettre (une requête) adressée au ministre des Finances ou au directeur
régional compétent, les raisons et moyens de sa critique.
En vertu de l'article 141, alinéa 2 du CDS, le ministre des Finances est compétent pour
conclure des transactions avec les contribuables, pourvu qu'elles n'impliquent pas exemption
ou modération d'impôt.
Il va de soi que le ministre des Finances ne peut jamais renoncer à un impôt légalement dû,
car "nulle exemption ou modération d'impôt ne peut être établie que par une loi" (article 172
de la Constitution). C'est en ce sens que le texte de l'article 141, alinéa 2 du CDS doit être
entendu. Conclure des transactions signifie donc uniquement terminer une contestation en
fixant, en accord avec le contribuable, les bases sur lesquelles l'impôt doit être perçu.
La possibilité de conclure des transactions se limite donc aux contestations relatives à des
questions de fait telles que l'estimation des biens meubles ou immeubles délaissés par le
défunt, ou, en cas d'application de l'article 108 du CDS, la détermination du montant qui doit
être déclaré.
182
Luc HERVE - Séminaire Stagiaires IPCF - Droits d'enregistrement et de succession
Une fois conclues, les transactions intervenues entre les contribuables et le ministre, ou le
fonctionnaire qu'il a délégué, sont obligatoires tant pour l'Etat que pour les contribuables.
SECTION 3.
INSTANCE JUDICIAIRE
311.- En vertu de l'article 142-1 du CDS, les poursuites et instances à intenter par
l'administration ou le contribuable pour obtenir le paiement ou la restitution des droits,
intérêts et amendes, se font de la manière et selon les formes établies par les articles 220, 221,
222 et 224 du CDE.
Il y est cependant dérogé pour les significations et notifications; celles-ci peuvent, contre tous
les héritiers, légataires ou donataires et les personnes désignées à l'article 74 du CDS (les
représentants légaux), se faire valablement au domicile élu dans la déclaration.
312.- En règle, le premier acte de poursuite pour le recouvrement des droits, des amendes et
des accessoires est une contrainte. Celle-ci est décernée par le receveur chargé du
recouvrement, visée et rendue exécutoire par le directeur régional de l'enregistrement et des
domaines et signifiée par exploit d'huissier de justice (article 220 du CDE).
Aucune forme sacramentelle n'est prescrite pour la contrainte. Il est cependant requis qu'elle
fasse connaître l'objet et la cause de la demande d'une manière suffisante pour permettre au
contribuable auquel elle s'adresse d'en apprécier le bien-fondé.
La contrainte, dûment visée et rendue exécutoire, constitue au profit du Trésor un titre ayant
la même force que les actes authentiques et les jugements revêtus de la formule exécutoire.
Elle permet de procéder aux mesures d'exécution prévues par le Code judiciaire : saisie
mobilière, saisie immobilière ou saisie-arrêt.
La contrainte, y compris le visa du directeur, est signifiée par exploit d'huissier de justice
(article 220 du CDE). Cette signification, de même que la signification des actes de poursuites
ultérieurs, peut être faite au domicile élu dans la déclaration.
313.- En matière de droits de succession, le mode le plus fréquent d'introduction d'une
instance relative au recouvrement de droits et d'amendes est l'interruption de l'exécution de la
contrainte par une action en justice. Une telle action est d'ailleurs le seul moyen d'interrompre
cette exécution (article 221 du CDE).
Suivant l'article 1385decies, alinéa 1er, du Code Judiciaire, contre l'administration, la
demande est introduite par requête contradictoire.
183
Luc HERVE - Séminaire Stagiaires IPCF - Droits d'enregistrement et de succession
314.- En l'absence de disposition légale fiscale particulière, la demande en restitution doit
être formée suivant la procédure fiscale commune.
Par conséquent, la demande est introduite auprès du tribunal de première instance de la même
manière qu'une action en recouvrement de droits et d'amendes. Une sommation de restituer
sans citation en justice de l'administration n'est pas introductive d'instance.
*
*
*
184
Luc HERVE - Séminaire Stagiaires IPCF - Droits d'enregistrement et de succession
CHAPITRE XIII.
SUCCESSIONS D'ENTREPRISES
315.- Ce sujet, fort intéressant et complexe, ne sera pas développé dans le cadre limité de la
présente contribution.
185
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APPENDICE.
EXERCICES PRATIQUES
CASUS n° 1 – Droits d'enregistrement
X et Y achètent à leur tante, âgée de 72 ans, l'immeuble dans lequel cette dernière a établi sa
résidence principale.
Le prix stipulé dans l'acte authentique, établi le 1er septembre 2009, est égal à 150.000 EUR.
Afin de permettre à leur tante de rester dans cet immeuble jusqu'à la fin de ses jours, X et Y
lui consentent un bail à vie, moyennant paiement d'un loyer unique et anticipé égal au prix de
vente, soit 150.000 EUR. Le bail est constaté dans le même acte authentique.
a)
Calculez le montant des droits d'enregistrement a priori dus sur la vente et sur le bail.
Expliquez votre réponse.
b)
Le 5 mars 2010, le receveur de l'enregistrement notifie à X et Y une insuffisance
d'estimation pour l'immeuble, en estimant que la valeur réelle de celui-ci avoisine 250.000
EUR.
Dans quel délai et à quelles conditions l'administration est-elle fondée à critiquer le prix prévu
dans l'acte authentique ? Si X et Y ne sont pas d'accord, une procédure est-elle prévue ?
c)
Le 8 mai 2010, le même receveur envoie un avis à X et Y dans lequel il se prévaut de
la simulation. En effet, dès lors que le prix de vente est égal au loyer unique immédiatement
payé, il considère que la vente déguise, en réalité, une donation à X et Y.
L'administration est-elle toujours tenue d'avoir égard à la réalité des opérations qui lui sont
opposées ?
Quelles sont les conséquences d'une requalification de la vente en donation fondée sur la
simulation, au regard des droits d'enregistrement ? Calculez ceux-ci.
d)
Si la tante avait vendu le bâtiment à X et Y tout en en conservant l'usufruit jusqu'à son
décès, la valeur vénale de la pleine propriété étant évaluée à 250.000 EUR, quels auraient été
les droits dus au regard des droits d'enregistrement ?
*
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Luc HERVE - Séminaire Stagiaires IPCF - Droits d'enregistrement et de succession
CASUS n° 2 – Droits de succession
X, marié sous le régime légal, décède et laisse deux enfants, B et C. A était âgé de 78 ans et
son épouse Y est âgée de 73 ans.
La succession de X comprend :
- un véhicule dont la valeur résiduelle s'élève à 7.500 EUR
- des meubles estimés à 5.000 EUR
- des vêtements estimés à 2.000 EUR
- un compte à vue dont le solde positif s'élève à 1.500 EUR
- un compte épargne dont le solde s'élève à 5.000 EUR
- un portefeuille de titres cotés en bourse estimé à 40.000 EUR
- des factures impayées (gaz, eau, électricité) pour 1.000 EUR
- un bâtiment estimé à 150.000 EUR
- une pension de veuf dont le montant s'élève à 1.250 EUR par mois
- l'usufruit de deux garages dont il a hérité au décès de son épouse
Les frais des obsèques s'élèvent à 2.500 EUR, les avis nécrologiques à 250 EUR.
a)
Etablissez un schéma de déclaration de succession en détaillant ce qui figurera à l'actif
et au passif et en déterminant la base imposable aux droits de succession. Calculez le montant
des droits de succession.
b)
Si les héritiers craignent des divergences avec le receveur en ce qui concerne
l'évaluation des biens composant l'actif, quelle démarche peut-on leur conseiller ?
c)
Si le receveur craint que tous les avoirs mobiliers n'aient pas été inclus dans la
déclaration de succession, peut-il interroger les banques et, si oui, dans quel délai et à quelles
conditions ? Quelles sont les obligations imposées aux banques en cas de décès ?
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