ART, CULTURE ET HANDICAP
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ART, CULTURE ET HANDICAP
Rencontre Arcadi Art, culture et handicap – 5 novembre 2010 ART, CULTURE ET HANDICAP RENCONTRE ARCADI 5 NOVEMBRE 2010 I COMPTOIR GÉNÉRAL I PARIS La notion dʼaccessibilité concerne une vaste population. Plus de 400 000 personnes sont reconnues handicapées et plus de 2 millions expriment une gêne importante dans leur vie quotidienne. Ce volume de la population concernée reste assez méconnu en France. On note une grande disparité en Île-de-France des politiques culturelles en matière de handicap : une disparité entre le milieu rural et le milieu urbain et entre Paris et la banlieue. Le potentiel dʼétablissements culturels engagés dans cette démarche dʼaccessibilité est important mais ce sont essentiellement les bibliothèques, les musées et les lieux de patrimoine, le spectacle vivant étant encore en retrait - en dehors des grands établissements nationaux. Cependant, le secteur culturel est plutôt en avance dans sa connaissance du sujet par rapport à dʼautres secteurs professionnels. LʼACCESSIBILITÉ CULTURELLE : ENJEUX, VALEURS ET CONTEXTE La loi n°2005-102 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées du 11 février 2005 englobe tous les aspects de lʼaccessibilité : - Accessibilité au cadre bâti - Accessibilité à lʼoffre culturelle - Accès à lʼinformation. Cette loi renouvelle la prise en compte des questions de handicap notamment en inscrivant un principe de droit dʼaccès de tous et de citoyenneté. La principale différence par rapport à la loi de 1975 réside dans la prise en compte de lʼensemble des situations de handicap : physique, sensoriel, mental, psychique et cognitif. Un autre apport important de la loi est la notion de libre choix du projet de vie de la personne handicapée. Lʼautonomie des personnes handicapées est mise en avant. La loi insiste sur le fait que la personne handicapée puisse participer et soit au centre des dispositifs qui la concernent. Si aucun chapitre ne traite spécifiquement de culture, il est pourtant nécessaire de comprendre que tous les chapitres sont susceptibles de concerner les professionnels du secteur culturel. Rencontre Arcadi Art, culture et handicap – 5 novembre 2010 Sur lʼaccessibilité des établissements recevant du public La loi fixe lʼéchéance au 11 janvier 2015 pour lʼaccessibilité des établissements recevant du public. Il sʼagit de tous les sites existants, pas seulement les sites neufs. Pour ces établissements, il sʼagit donc dʼidentifier les besoins en termes de remise aux normes en réalisant au préalable un diagnostic dʼaccessibilité. Le diagnostic est donc une obligation légale. Le calendrier concernant ce diagnostic est très strict : il doit être réalisé pour le 1er janvier 2010 pour les établissements recevant du public (ERP) de 1ère et 2e catégorie (très gros établissements, ceux appartenant à lʼEtat…). Pour les établissements de 3e et 4e catégorie, il doit être terminé au 1er janvier 2011. Un cahier des charges dʼappel dʼoffre pour le diagnostiqueur est disponible en téléchargement sur le site du Ministère de la culture et de la communication. Un diagnostic est étroitement lié au projet culturel et concerne lʼéquipe, toutes les personnes qui sont en lien avec des publics, les responsables de la sécurité, sont directement concernées. Lʼécueil à éviter est que le prestataire donne des solutions « clefs en main » qui ne soient pas en cohérence avec le projet. On peut aussi réaliser ce diagnostic en interne. Un cahier des charges dʼautodiagnostic est également téléchargeable sur le site du Ministère. Les petits établissements (5e catégorie) nʼont pas obligation de faire ce diagnostic. La loi prévoit des dérogations. Par exemple, dans le cas de certains grands lieux classés au titre monuments historiques. Ces dérogations peuvent être accordées par exemple en cas dʼimpossibilité technique ou de préservation du patrimoine ou encore lorsque lʼon justifie dʼune disproportion entre les améliorations apportées et la vie de lʼétablissement. Cependant une dérogation nʼentraîne pas lʼabandon des réflexions concernant dʼautres aspects de lʼaccessibilité (exemple : signalétique, accueil, etc). Les dérogations sont exceptionnelles et appellent des mesures de substitution (à titre dʼexemple, la mise en place dʼun site de visite virtuelle pour pallier à un défaut dʼaccessibilité à certains endroits du site). La loi prévoit des contrôles renforcés et des sanctions. Dès lʼachèvement des travaux, un expert contrôle et valide les travaux mis en place. La loi a renforcé les sanctions pénales et financières. A titre dʼexemple, un responsable dʼéquipement peut être pénalement responsable de lʼinaccessibilité de son équipement. Il est utile de se rapprocher des pôles ressources, des professionnels de lʼaccessibilité, des associations représentatives des personnes handicapées et enfin des usagers dans cette réflexion. Quelques exemples de travaux Sorties, évacuations, sécurité incendie, dépose-minute, marquage au sol, tables tactiles, visites en langue des signes… Le lieu nʼest pas isolé : il est nécessaire de prendre en compte son environnement, la proximité et lʼaccès aux transports, la mise en place dʼune signalisation adaptée… Lʼinformation et la communication sont essentielles (pictogrammes, transmission auprès des relais spécialisés, espaces dédiés qui permet de préparer sa visite…). Rencontre Arcadi Art, culture et handicap – 5 novembre 2010 La Commission nationale Culture et Handicap Créée en 2001, cʼest un lieu dʼéchanges de huit associations représentatives. Elle est co-présidée par le ministre de la culture et le ministre chargé des personnes handicapées. Elle traite des problématiques liées à lʼaccès à lʼoffre culturelle, à lʼoffre de pratiques artistiques et lʼaccès aux industries culturelles. Cette Commission permet de mettre à la disposition des professionnels quelques outils, comme : • Les diagnostics cités plus haut • Les guides. A ce jour, trois guides ont été publiés : un premier généraliste, un deuxième sur le spectacle vivant et un troisième sur le handicap mental. De nouveaux guides sont prévus pour 2012 : sur lʼaccès au cinéma, aux expositions et aux bibliothèques. • Une mission handicap confiée aux établissements publics culturels, qui produit des cahiers des charges, des outils… • Une formation continue des professionnels du cadre bâti du Ministère. En mars 2011 est prévue une rencontre sur lʼaccessibilité au cadre bâti. • Des partenariats interministériels • Un élargissement de la convention culture-santé (pour favoriser les projets de jumelage) • Une valorisation des actions exemplaires par un prix. Le concept de la « chaîne de lʼaccessibilité culturelle » : Lʼaccessibilité ne commence et ne sʼarrête pas aux portes du théâtre ou du lieu culturel : il faut travailler ensemble au-delà des secteurs professionnels. Les personnes handicapées ne sont pas au rendez-vous de la vie culturelle : ce constat peut sʼexpliquer de différentes manières, par le problème des transports qui ne sont pas toujours adaptés, de la méconnaissance des institutions culturelles, de la vision particulière des pouvoirs publics… Le problème doit être envisagé de manière globale. LʼACCÈS AUX LIEUX ET AUX ŒUVRES Le décret dʼapplication de la loi datant de 2006 rappelle que les prestations sont également concernées par ces questions dʼaccessibilité posées par la loi de 2005, au même titre que le cadre bâti. Mais autant l'accessibilité en matière de bâti est assez claire, autant cela semble plus flou en matière de prestation. A titre dʼexemple, qu'est-ce qu'un enseignement artistique accessible ? Selon la loi, "l'activité doit être accessible à égale qualité d'usage que pour les personnes valides" Mais qu'est-ce que cela signifie concrètement ? Rencontre Arcadi Art, culture et handicap – 5 novembre 2010 Quʼest-ce quʼun établissement accessible ? Hervé Guillon : lʼexemple dʼun architecte La démarche est dʼapporter des solutions au bénéfice de tous usagers. Les solutions proposées prônent une architecture intégrée plutôt que superposée, évitant ainsi de stigmatiser le handicap. Un établissement accessible est un maillon dans la chaîne de déplacement qui doit être sans rupture. Un établissement accessible est un établissement qui prend en compte le quotidien des usagers et toutes les spécificités des personnes handicapées (handicaps physique, psychique, cognitif, mental). Le quotidien des usagers : différents éléments à prendre en compte Un bon repérage et une bonne orientation améliore lʼaccessibilité des personnes en situation de handicap : trouver les entrées, repérer facilement les sorties et localiser tous les services proposés par lʼétablissement (par exemple, avec des éléments architecturaux forts, la mise en place dʼune signalétique, des repères au sol…). La deuxième action à mettre en œuvre est de prévoir lʼaccès aux bâtiments et aux locaux. Les personnes doivent pouvoir circuler horizontalement et verticalement en toute fluidité. Pour cela, on peut prévoir des sols non meubles, rampes, élévateurs, etc. Lʼaccessibilité consiste aussi à pouvoir accéder à toute lʼinformation et pouvoir participer à toutes les activités proposées. Dès lʼentrée dans lʼétablissement, il faut penser à adapter le guichet dʼaccueil, utiliser des interfaces techniques, prévoir un accès à une information écrite, soigner la sonorisation pour éviter résonance…Il faut penser aux éléments permettant de se reposer tout au long du parcours, pour sʼappuyer, sʼasseoir, marquer une pause… Les usagers doivent aussi se sentir en sécurité : repérer les évacuations, retrouver la sortie, être informé dʼun danger le cas échéant, pouvoir être secouru en toute sécurité… Il est important de donner une information sonore mais aussi visuelle au niveau des systèmes dʼalarme. Sur les cheminements de sortie comme sur tous les cheminements, il faut dégager tous les obstacles. Enfin, il ne sert à rien de rendre accessible un bâtiment si la prestation nʼest pas accessible ! Le développement des moyens dʼaccès : lʼassociation Accès Culture Lʼassociation Accès Culture propose des aides techniques gratuites permettant aux personnes aveugles, malvoyantes, sourdes, malentendantes dʼassister à des représentations de théâtre, de danse ou dʼopéra de manière autonome. Accès Culture est une association créée en 1993 qui a une double mission : la gestion de services dʼaudiodescription et de surtitrage pour les théâtres équipés et lʼélargissement de ces services à dʼautres structures culturelles. Lʼobjectif est de créer un lieu de partage des coûts et des compétences. Aujourdʼhui, lʼassociation travaille avec une cinquantaine de lieux en France. Dans les années 90, très peu dʼactions étaient mises en place concernant lʼaccessibilité aux spectacles des personnes handicapées. Seul le cinéma était parfois équipé et rendu accessible. Rencontre Arcadi Art, culture et handicap – 5 novembre 2010 A Chaillot, sous lʼimpulsion de Jérôme Savary, est mise en place la première audiodescription pour un spectacle, le Songe dʼune nuit dʼété. Lʼaudiodescription est lʼadaptation dʼune technique du cinéma qui consiste à décrire des éléments sur scène et des événements, tout cela devant sʼintercaler dans les silences des comédiens. Une volonté politique a commencé à voir le jour avec Jack Lang. Les premiers protocoles dʼaccès à la culture ont vu le jour mais sont restés lettre morte. Cependant ce mouvement a permis à certains dʼobtenir des financements. La première convention dʼaccessibilité à la culture a été signée entre le Théâtre de Chaillot et le Ministère de la culture et de la communication. Des sous titrage ont été réalisés sur certains spectacles pour les personnes sourdes. Dans le même temps, le Théâtre a mis à la disposition du public des casques pour aveugles et un système pour les personnes malentendantes. Après avoir été contacté par des associations de sourds LSF, les premières séances avec langue des signes sur scène ont eu lieu. Les financements ont été acquis progressivement auprès des théâtres. Pratiquement tous les théâtres prennent aujourdʼhui en charge dans leur budget les coûts liés à cette accessibilité. La question des financements Pour que les projets voient le jour, les associations ne doivent pas œuvrer de manière individuelle. Les DRAC peuvent accompagner les projets. Elles disposent de subventions aux crédits dʼinvestissements octroyés pour lʼaménagement des sites. Pour lʼaccès à lʼemploi, il existe deux fonds pour lʼaménagement de postes de travail et une formation peut être financée sur lʼintégration dʼune personne handicapée dans une équipe. La convention Culture et handicap permet de co-financer des projets dʼaccès aux pratiques pour des personnes accueillies en centre médico-social. Elle permet dʼavoir des financements croisés entre Drac (Direction régionale des affaires culturelles) et ex-Drass (Direction régionale des affaires sanitaires et sociales). Depuis mai 2010, une nouvelle convention a été signée entre les deux ministères avec un élargissement de la convention Culture et Hôpital. Les projets soutenus seront a priori ceux qui permettent à lʼhôpital dʼaccueillir un projet artistique ou culturel sur du long terme avec un travail de restitution valorisé dans les institutions sociales ou les institutions culturelles. Pour beaucoup, lʼoffre culturelle nʼest pas très visible : quʼest-ce quʼun enseignement artistique accessible à tous ? Pour balayer le flou qui entoure la notion dʼégalité dʼusage, des référentiels pourraient être mis en débat. Rencontre Arcadi Art, culture et handicap – 5 novembre 2010 LʼACCÈS AUX PRATIQUES ARTISTIQUES ET CULTURELLES La prise en compte de lʼaccessibilité au travers de quelques exemples : Georges Nikolaidis, directeur artistique de Gradisca Gradisca est un collectif pluridisciplinaire réunissant 200 artistes. La majorité des actions du collectif a lieu en direction des personnes handicapées ou celles résidant en milieu hospitalier. Au sein du conservatoire à rayonnement départemental (et bientôt régional) dʼEvry, Georges Nikolaidis propose un enseignement en six étapes : fonder un référent dans chaque établissement, réaliser un bilan et noter les propositions qui en découlent, motiver et sensibiliser les équipes dans les établissements, accompagner et former les équipes, communiquer avec les publics, organiser des formations. Delphine Demont a fondé la compagnie Acajou en 2005. Une grande partie des projets de la compagnie est en direction des publics déficients visuels. Les déficiences visuelles recouvrent une multiplicité de cas et des situations complexes et variées. La recherche chorégraphique ne porte pas que sur ce que lʼon voit mais aussi sur les autres sens et sur la sensation du mouvement. Le projet se décline autour de quatre axes : 1) permettre aux personnes dʼavoir accès à la pratique de la danse. Permettre à ceux qui nʼont jamais vu de danse dʼavoir envie de danser. Mettre en place des ateliers de sensibilisation de publics déficients visuels. 2) Elaboration dʼateliers réguliers à Micandanses (partenaire depuis 2005), ouverts aux adultes mais qui ne leur sont pas réservés. Sensibilisation dʼautres professionnels à lʼaccueil de ces publics. La compagnie propose aux personnes de pouvoir danser sur scène. 3 ) Travail sur lʼaccès à la représentation du mouvement dansé. Faire correspondre une perception sensorielle claire et une représentation du mouvement qui fait naitre cette perception. Création dʼun outil depuis 2008 : lʼacajouet : représentation en relief de la notation Laban. Cet outil permet de décomposer les mouvements que lʼon fait. Dʼautres outils sont en création dont Les doigts qui rêvent, coffret sur le ballet Gisèle. La compagnie souhaite donner les moyens aux publics de sʼimaginer les scènes essentielles de ce ballet. Le troisième outil, lʼobjet dansant, repose sur un travail avec des balles. Passer par un objet permet souvent dʼamener des personnes qui nʼont pas beaucoup dʼimaginaire à explorer dʼautres choses. Le dernier projet a pour objectif de nourrir lʼimaginaire de la danse. La plupart des non voyants ne font pas le lien entre la danse et les autres arts. Ils ne connaissent pas non plus les autres arts. La compagnie souhaite proposer des ateliers de mouvement, mettre en place des projets avec des musées… Par ailleurs, par un abonnement à la Revue Repères, cahier de danse, la compagnie souhaite nourrir le vocabulaire et donc lʼimaginaire de chacun. Rencontre Arcadi Art, culture et handicap – 5 novembre 2010 Catherine Crespi / MESH Lʼobjectif de MESH est de regrouper, mutualiser les démarches, rendre certaines actions plus visibles. Lʼassociation a été créée en 1984, sur une initiative dʼune musicologue, musicienne, pédagogue, qui a souhaité porter un aspect artistique auprès de personnes en situation de handicap. La mise en place de stages a donné lieu à des créations, à la demande des personnes handicapées qui souhaitaient poursuivre plus loin lʼexpérience. A ses débuts, lʼassociation a souhait émettre en place des pratiques avec un objectif dʼintégrer les publics en situation de handicap dans le milieu dit ordinaire. Les ateliers avec les professeurs de conservatoire peuvent à termes être pris en charge par lʼinstitution elle-même. Lʼassociation met également en place des ateliers de sensibilisation auprès des professionnels (réseau musique et handicap dans le Val dʼOise…). Lʼobjectif est de permettre lʼaccès à un enseignement de la musique quelque soit le handicap et dʼaccompagner les professionnels et les personnes handicapées dans leur pratique artistique. Lʼassociation travaille sur lʼadaptation des cursus, des contenus, des politiques tarifaires, la communication… et permet aux professionnels de se regrouper, échanger, travailler en réseau. Yselle Bazin, chargée des relations publiques au Théâtre 13 Les personnes non voyantes et malvoyantes sont de plus en plus nombreuses à venir au théâtre. Sur la saison 2009 – 2010, le théâtre a accueilli une cinquantaine de personnes qui viennent plutôt voir des pièces classiques et sont plus réticentes sur les auteurs contemporains. Le travail en réseau avec les relais est primordial notamment en ce qui concerne la communication, pour informer ces personnes en situation de handicap. Lʼencadrement des personnes en situation de handicap engendre un coût supplémentaire car ce groupe nécessite un encadrement. Ce type dʼencadrement nʼest pas pris en compte dans les politiques tarifaires du théâtre. Diane Maroger, festival Retour dʼImages Le festival est une association qui accompagne les exploitants qui le souhaitent à faire une programmation accessible. La spécialité de lʼassociation est dʼavoir monté des actions avec les municipalités ; souvent avec les cinémas municipaux. Retour dʼImages est un festival où tous les films sont adaptés ; les salles recontactent souvent lʼassociation après le festival pour avoir les films adaptés. Des rencontres sont organisées, accompagnées dʼun traducteur LSF. Tout cela demande un financement important. Lʼassociation organise aussi des monotypies qui consistent à projeter les paroles de lʼintervenant sur un écran ; ce dispositif est très coûteux. Adapter chaque séance coûte environ 5000 euros. Concernant les exploitants privés, ce sont souvent les plus petits exploitants qui sont le plus sensibles à la démarche. Rencontre Arcadi Art, culture et handicap – 5 novembre 2010 Delphine Rabin, Centre Pompidou La politique dʼaccessibilité est très développée au Centre Pompidou. Quatre personnes au sein de la direction des publics sont en charge de développer cette accessibilité. Cette notion est entendue au sens large : les personnes « empêchées » ne sont pas seulement celles en situation de handicap mais aussi celles qui sont empêchées pour des raisons économiques et sociales. Différents aspects sont pris en compte, lʼaccessibilité physique du bâtiment, les moyens de transports, des parcours tactiles, des ateliers mixtes, une sensibilisation du personnel (souvent vacataire), des formations en langue des signes, un site internet adapté… Lʼimportant est dʼexpérimenter différents types de formules. Une prochaine étape pourrait être de créer un groupe de travail avec des usagers. Le Centre essaie de le mettre en place à la suite des conférences, moments dʼéchanges, et de recueillir les impressions des personnes. Les publics / usagers sont-ils au rendez-vous ? Pourquoi le public ne répond-il pas toujours présent ? Plusieurs hypothèses sont avancées : le peu dʼaccès à lʼéducation artistique, une communication pas toujours optimale (nécessité de passer par des relais spécialisés tout en communiquant en direction du grand public) dans l'optique de sensibiliser le plus grand nombre aux questions d'accessibilité. De plus le grand public est aussi un vecteur d'informations pour son entourage. Travailler sur l'accessibilité des personnes en situation de handicap, c'est aussi améliorer l'accueil de tous les publics. C'est d'autant plus vrai qu'avec le vieillissement de la population, les services proposés vont être profitables à un nombre de plus en plus important de personnes. Lʼimportance des relais hors culture Institutions sanitaires et sociales, transports, élus des collectivités locales... Il est nécessaire dʼavancer avec l'ensemble des acteurs concernés Or, ces acteurs nʼont pas toujours une connaissance approfondie de la notion d'accessibilité culturelle. La question de l'accessibilité doit donc être envisagée de manière globale et en premier lieu avec les structures sanitaires et sociales, les lieux de vie et d'accueil des personnes en situation de handicap... Même si la place de la culture nʼest pas toujours vécue comme une priorité au sein de ces organismes. Pour faire vivre cette chaîne d'acteurs, Cemaforre expérimente à Paris un dispositif nommé Cascad (www.cemaforre.asso.fr/cascad.php). CRÉATION, PROGRAMMATION, HANDICAPÉ STATUT… LA PLACE DE LʼARTISTE Trois points de vue, trois expériences différentes : Stéphane Judé et Baichir Saïfi de lʼIVT, Olivier Couder du Théâtre de Cristal et Jean-Joël Le Chapelain, Directeur de LʼApostrophe, scène nationale de Cergy-Pontoise et du Val dʼOise. Rencontre Arcadi Art, culture et handicap – 5 novembre 2010 Stéphane Judé et Baichir Saïfi de lʼIVT LʼIVT a ouvert son théâtre en 2007. La compagnie existe quant à elle depuis la fin des années 70, une époque qui correspondait au « réveil sourd » pour la communauté des sourds. La compagnie, créée par le metteur en scène sourd Alfredo Corado, a monté les premières pièces uniquement en langue des signes. Elles ont attiré beaucoup de monde immédiatement. Différents metteurs en scène sont passés par lʼIVT, y compris beaucoup dʼentendants ; les travaux sont bilingues et la compagnie cherche toujours à travailler dans la mixité. Lʼaccessibilité de situe des deux « côtés », des sourds et des entendants. En effet, la démarche artistique de la compagnie se fait sur la langue, lʼenjeu se situe dans la rencontre entre les deux cultures. Pour Stéphane Judé, les sourds sont plus confrontés à des problèmes de minorités plutôt que de handicap. Il y a la barrière de la langue mais ce nʼest pas un handicap dans le sens où la barrière pose des problèmes de compréhension des deux côtés. Le credo de lʼIVT se situe moins du point de vue de lʼaccessibilité que dans la façon de montrer la langue et la culture des personnes sourdes, lʼobjectif étant de proposer à ces deux mondes de fusionner à travers les spectacles. Les solutions mises en place concernant lʼaccessibilité des spectacles ne sont pas sans inconvénients (sur-titrage, interprète…) notamment en ce qui concerne le confort de vision du spectacle. Olivier Couder, Théâtre du Cristal Quʼest-ce que recouvre la notion dʼaccessibilité ? Ce mot très important dans lʼhistoire des politiques culturelles françaises : il sʼest imposé dès Malraux dans la définition des missions du Ministère de la culture. Le Ministère doit rendre accessible les œuvres capitales de lʼhumanité au plus grand nombre. Or cette volonté de démocratisation culturelle semble aujourdʼhui être dans une impasse. Pour ce qui est du statut de lʼartiste handicapé, on retrouve la même difficulté : les établissements culturels sont formatés pour accueillir un certain type de public, et de plus en plus centrés sur la diffusion des œuvres que sur le « vivre ensemble ». Un des exemples les plus typiques : le théâtre est un lieu où il nʼest pas admis de faire du bruit, or parfois le handicap peut entraîner du bruit. Jean-Joël Le Chapelain – Directeur de lʼApostrophe, scène nationale de CergyPontoise La problématique dépasse la question de lʼaccessibilité. Un théâtre doit porter lʼambition dʼinscrire le théâtre dans la cité et de faire venir un maximum de personnes. Une difficulté pour le pour directeur du théâtre est que la question de lʼaccessibilité soit traitée sous lʼangle de la mixité cʼest-à-dire de lʼintégration dans les équipes artistiques des personnes de qualités différentes. Dans cette idée de mixité, il y a aussi la recherche de singularité.