Article pour le journal

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Article pour le journal
La mission Roumanie par Michel Poupard
Le parking. C’est le changement de voiture. le moteur de notre voiture malheureusement a
lâché. Nous sommes cinq : Rachel, un gars de Planay, Rémi, un gars de Scherwiller, un gars
de la Savoie et moi.
L’aéroport. On devait prendre l’avion à 12h06. Les bagages sont restés derrière nous et sont
partis par l’avion de 16h36. Nous sommes arrivés à l’aéroport de là-bas à 14h15. De
l’aéroport on a pris une voiture de location. La voiture bien mais, merci pour les fesses. On a
fait la route toute la nuit et tout le jour. Il pleuvait, on était mal, on avait chaud, on avait froid.
Les routes sont goudronnées, ce sont des routes à deux voies mais la signalisation est
compliquée. La nuit il y a des camions garés sur les bas côtés tous feux éteints, c’est
dangereux. J’ai posé la question, il y a beaucoup d’accidents, beaucoup de morts.
Arrivée en ville. Iasi, une gare magnifique du 19e siècle, classée monument historique. Il y a
de la pub partout, pour les cigarettes, pour l’alcool. Par contre il n’y en a aucune avec de
belles filles sur les murs.
Communauté Emmaüs, Iasi. Elle est très grande et d’ailleurs très jolie, avec des murs
anciens, classée elle aussi. Compagnons et compagnes, là-bas ils sont 36. Il n’y a pas
d’enfant. Sitôt qu’une femme a un enfant il est placé dans une famille d’accueil. Ça m’a
choqué. Il y avait plus haut une autre maison qu’ils ont eu il n’y a pas longtemps et qu’ils sont
en train restaurer. Il y a ici deux responsables qui dirigent les travaux de la maison et ceux du
magasin. Ils se sont retrouvé tous les deux, ils ont créé la communauté. C’est une
communauté de très jeunes personnes, le plus vieux a 26 ans. Lorsque j’y étais, une jeune fille
de 16 ans est arrivée. C’était le seul lieu d’accueil pour elle. En Roumanie, apparemment,
beaucoup de jeunes filles sont contraintes à se prostituer pour survivre.
On a installé l’échafaudage le long de la maison sur le trottoir en assemblant deux
échafaudages. La façade était dégradée. On a fini de mettre à nu le mur en brique rouge. Le
crépi de la façade nord avait été refait l’année dernière lors de la mission précédente.
Il y a cette femme, je l’ai prise en photo. Elle me semblait si triste, elle doit avoir la
cinquantaine passée, et vit dans la rue. Des personnes il y en a dans chaque coin de rue et ils
préfèrent y rester plutôt que d’être enfermé au niveau d’ici. Je travaillais sur le chantier
dehors, ça me permettait de rencontrer des gens. « J’aime me balader, voir du monde »
m’ont-ils dit. Ils préfèrent être libres.
Les règles sont les mêmes là-bas qu’ici dans les communautés. Les horaires sont à peu près
les mêmes. Il y a trois jeunes filles dont le travail est de faire le ménage. Les hommes
rénovent la communauté, avancent les travaux ou travaillent avec les autres jeunes filles au
magasin. Ils font des ramassages mais ils n’ont pas d’autre camion que celui pour le transport.
Ils enlèvent alors les sièges du minibus et ils démontent les meubles. Il y a des personnes qui
donnent mais sans doute moins qu’ici. Au magasin on trouve surtout des meubles, des
vêtements et des bibelots.
Emmaüs organise un gros transport de France : canapés, sièges, lits, armoires, des grands
buffets, des tables basses, tout ce qui peut se revendre là-bas et qu’on ne leur donne pas
forcément. Ils n’ont pas encore assez de surface, les matelas sont empilés les uns sur les
autres, tout est englobé, il n’y a pas de passage, donc, on voit mal les articles. Mais des fois il
y a des trésors. Il y a de belles petites armoires qui sont arrivées et sont parties de suite. Les
prix sont beaucoup moins chers qu’en France. J’en ai vu beaucoup qui viennent regarder
mais… Les acheteurs sont plutôt des gens pauvres.
Le pécule. Ils touchent un peu plus que nous mais il y a beaucoup de dépenses qui ne sont pas
prises en charge par la Communauté. S’ils vont chez le médecin, ils doivent payer la
consultation.
La nourriture, c’est vrai qu’ils mangent midi et soir de la soupe au poulet avec du riz ou des
pâtes. Ils font de temps en temps du poisson. C’est un tout petit poisson, cuit à la friture. C’est
très bon. Les roumains mangent beaucoup de maïs. Il y a des champs de maïs partout. Le pain
est fait à la communauté avec de la farine de maïs. Le pain est blanc et tendre, il est très bon.
Le pain est remis sur la table le soir, il n’y a rien qui est jeté ou gaspillé. Ils donnent les restes
aux chiens de la communauté. A Iasi, il y a des grands magasins, des restaurants mais ils sont
pour les touristes et pas pour les roumains qui ont peu de moyens.
La Communauté n’a apparemment pas assez de financement pour se développer plus. Ils
arrivent tout juste à vivre actuellement, ils tirent sur la ficelle. On sent bien ces difficultés
pour vivre. La viande est horriblement chère. Ils cuisinent les épluchures de pommes de terre
dans la friture et c’est très bon. Le café est curieusement fait. Il décoiffe. Il est directement
mis dans l’eau bouillante, le marc est servi avec.
La ferme. Il y a 7 compagnons qui travaillent et vivent à la ferme. La ferme est à 40km de
Iasi. Ils sont assez isolés, doivent descendre régulièrement à Iasi qui est une grande ville
plutôt riche, entre les deux c’est 100% de différence. On voit des charrettes, des mulets, de la
pauvreté. Ils font un potager : des tomates, des poivrons, des courgettes, du chou, des salades,
des pommes de terre et toujours beaucoup de maïs. Ils ont un hectare de maïs. Il y a une
femme qui vient donner des conseils pour le jardin. Là-bas il y a des prés à perte de vue. C’est
une région rurale avec des petits villages mais vraiment pauvres, j’ai bien regardé leurs
maisons faites en taules, ces quartiers assez chauds avec beaucoup de bagarre.
Le soir quand on rentrait de travailler, on se posait avec eux pour savoir comment ils allaient,
ce qu’ils avaient vécu. De temps en temps le soir, ils sortent pour se distraire. Ils en ont
vraiment besoin car ils sont courageux et ils ont besoin de décompresser.
Ils ont deux chiens, ils font de l’élevage, ils ont un poney, ils ont deux vaches qui donnent du
lait, il y a des poules, des canards, des oies et quelques lapins. Ils fabriquent d’excellents
fromages et de la crème.
Dans la ferme, interdiction de chaussures dedans, tout le monde en pantoufles.
Ils ont restauré une menuiserie l’année dernière, le sol a été bétonnée et les murs enduits par
des compagnons d’ici. Les machines (scie circulaire, machines à bois, dégauchisseuse,
raboteuse, toupie…) viennent de France, de Communautés de l’Est.
Le tramway est le principal transport en commun. Ils sont très dégradés mais ils sont gratuits.
J’ai vu des enfants de treize ans conduire ces tramways. Il y a beaucoup de tourisme dans
cette région, pour visiter des châteaux, des églises orthodoxes. La Mer Noire est à 40 km de
Iasi. On y voit les épaves rouillées de bateaux.
Il y avait un compagnon de là-bas qui parlait français et traduisait. On pouvait échanger avec
les compagnons roumains par des signes et quelques mots. C’est vrai que c’est un peu délicat
pour communiquer. Certains voudraient venir en France moi j’y retournerais volontiers.