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Adaptation du logement
Photo S. Jarrat / Corbis — Photononstop
Photo E. Audras / Onoky — Photononstop
Bien vieillir
L’âge de départ en maison de
retraite étant de plus en plus
tardif, le maintien à domicile
est devenu un enjeu de société
majeur. D’autant que vieillir
chez soi est souvent bénéfique
pour les personnes âgées.
ous les médecins le reconnaissent : rester chez soi le plus longtemps possible offre un meilleur
confort de vie, entretient l’autonomie
des personnes âgées, favorise le lien
social et retarde les effets du vieillissement. Sans compter que le maintien à
domicile limite le coût de la prise en
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charge pour les familles. D’après le
baromètre France Info-Le Monde-Orcip,
80 % des Français sont préoccupés par
le sujet de la dépendance et du maintien à domicile. Et pour vivre dans son
foyer le plus longtemps possible,
l’adaptation du logement est souvent
incontournable. En effet, les seniors
totalisent les deux tiers des hospitalisations et la moitié des décès dus aux
accidents domestiques. (1) « On enregistre 11 millions d’accidents de la vie
courante chaque année, a souligné Luc
Machard, président de la Commission
sécurité consommateurs, lors du dernier Salon des Seniors de Paris. Et plus
de 18 000 décès. La moitié concernent
des personnes âgées. C’est la troisième
Le Fil des ans n° 215 — Septembre-octobre 2011
cause de mortalité après le cancer et
les maladies cardiovasculaires. Un tiers
des plus de 65 ans et une personne sur
deux parmi les plus de 85 ans font au
moins une chute par an, dont les deux
tiers à domicile. Des chiffres qui incitent à prendre des mesures, d’autant
que la plupart des risques sont évitables. » Aujourd’hui, contribuer au bienvieillir est l’un des objectifs majeurs
des politiques. Un programme de mise
en sécurité a été lancé en septembre
2010 par le ministère de l’Économie
afin de sensibiliser les seniors à ces
risques. Il est constitué de trois volets
: la prévention, l’expérimentation et
l’information. Par ailleurs, plusieurs
expériences ont déjà été menées. Par
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chez soi
Un coup
de pouce
financier
exemple, le département de la Corrèze
a réalisé une enquête et testé un pack
domotique sur 100 foyers. Il a été
prouvé qu’un éclairage automatique
dans les passages et couloirs permettait
de diviser par trois les risques de chute.
À l’issue de cette démarche, 52 % des
foyers ont fait l’objet de mesures de
bon sens, 43 % de petit bricolage et 15 %
ont été mis en relation avec des organismes spécialisés pour envisager des
travaux plus importants.
La domotique au secours
du maintien à domicile
Aujourd’hui, la domotique représente
en effet une aide précieuse pour le
maintien à domicile. Elle s’adapte à
Photo E. Audras / Onoky — Photononstop
Photo B. Fasani / Corbis — Photononstop — Fancy / Photononstop
Grâce à sa caisse de
retraite, madame J., de
Sevran (Seine-Saint-Denis),
a fait réaliser des travaux
chez elle pour une
meilleure accessibilité.
Elle témoigne.
« Je suis atteinte
d’une maladie évolutive
et maintenant en fauteuil
roulant. J’avais déjà fait
remplacer la baignoire par
une douche il y a quelques
années mais il m’est
devenu difficile de monter
la petite marche d’accès. Il
fallait donc la supprimer et
installer une pompe pour
évacuer l’eau. En 2010,
j’ai obtenu une aide de
ma caisse de retraite pour
réaliser ces travaux. Je suis
très satisfaite parce que
les aménagements réalisés
me facilitent grandement
le quotidien. Malgré
mon handicap, je suis très
active. Je souhaite rester
chez moi le plus longtemps
possible et d’ailleurs, mon
médecin m’y encourage. »
chaque cas, facilite le quotidien et
réduit les risques d’accident domestique. Elle permet aussi de maintenir
un contact avec ses proches et même
de sécuriser le suivi médical. « Qu’il
s’agisse d’ouvrir les volets, d’allumer
la lumière ou d’arroser le jardin, de
nombreuses actions quotidiennes peuvent être automatisées, explique
Patrice Rogemont, dirigeant de la Maison de la Domotique. Cela peut se faire
via une centrale, si la maison a été
câblée, ou par courant porteur. Dans ce
cas, il faut installer des petits modules
au pied des lampes, des interrupteurs
et un récepteur sur le réseau électrique. Il est aussi possible de mettre
des diodes colorées sur les plinthes
pour retrouver son chemin dans l’appartement. »
Pour une personne âgée vivant seule,
les systèmes de téléassistance permettent également de communiquer avec
une hôtesse grâce à un boîtier vocal
branché sur la ligne téléphonique. En
cas de malaise, il suffit d’appuyer sur
le bouton d’un médaillon ou d’un bracelet pour être mis en relation avec une
personne qui écoute et, si nécessaire,
alerter les secours. En cas de chute, un
numéro préprogrammé est immédiatement joint. Le monde des capteurs, très
vaste, a largement fait avancer la
domotique. Placés à des endroits straSuite de l’article en page 10
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tégiques du logement, ils permettent
de détecter des situations à risques :
présence de fumée ou de gaz, absence
de mouvement (non-réveil, non-passage aux toilettes, non-déclenchement
de la cafetière…). Les données sur les
activités journalières sont transmises à
un serveur et analysées par un logiciel.
En cas de problème, les proches ou l’aidant sont prévenus. Autre nouveauté :
des distributeurs de pilules programmés
pour une semaine. Lorsqu’il est l’heure
de prendre son médicament, une
alarme retentit et le pilulier, qui était
verrouillé, s’ouvre.
Pour adapter et équiper son logement,
le mieux est de s’adresser à un bureau
d’études pour évaluer les besoins. Les
ergothérapeutes peuvent également
vous mettre en relation avec un domoticien.
Du bon sens et de la praticité
Sans aller si loin, de petits changements
peuvent aussi se révéler essentiels. On
peut, par exemple, remplacer les interrupteurs classiques par des modèles
phosphorescents et installer un détecteur de mouvement dans le couloir pour
déclencher la lumière quand on se lève.
Avec une canne, un déambulateur ou un
fauteuil roulant, les sols durs (carrelage, parquet, PVC) sont plus praticables que la moquette. Attention aux
tapis et aux fils, qui sont sources de
chute, à moins d’être fixés par des clous
ou du papier collant double face. Les
escaliers représentent également un
obstacle majeur lorsqu’on vieillit. Si la
personne est suffisamment valide, on
peut se contenter de fixer une rampe
de chaque côté et des bandes de couleur sur l’arête des marches. Sinon, il
existe des monte-escaliers électriques.
Ou bien, peut-être est-ce le moment
L’avis des professionnels
e docteur Christine Chansiaux-Bucalo
L fait partie de l’équipe mobile géria-
trique externe de l’hôpital Bretonneau de
Paris. Olivier Marousé est ergothérapeute
au sein de l’équipe mobile Alzheimer du
réseau Filiéris Carmi-est, à Metz. Pour
eux, la question du maintien à domicile
des personnes âgées se pose au quotidien.
Le Fil des ans : Le maintien à domicile est-il
toujours la meilleure solution pour une personne âgée ?
Christine Chansiaux-Bucalo, gériatre : Il est toujours préférable de prolonger le maintien à domicile, lorsque cela est
possible. En restant dans un environnement familier, avec
ses proches, une personne entretient naturellement son
esprit. C’est plus compliqué lorsque l’on est isolé et que l’on
développe des troubles cognitifs. On est moins actif et l’état
général se dégrade. Dans ce cas, il est possible de faire appel
à une aide à domicile, afin de retarder le moment d’entrer
en maison de retraite. Et pour les plus désorientés, il existe
des accueils de jour où ils sont stimulés tout en étant socialisés. Les personnes peuvent rentrer chez elles le soir.
En revanche, lorsque l’appartement est inadapté (en étage
sans ascenseur, vétuste, sans eau chaude ni toilettes, avec
un réseau électrique trop ancien, ou insalubre), la maison de
retraite s’impose souvent comme la meilleure solution. En
effet, accéder à un autre logement peut prendre des mois.
Il y a aussi le problème de la solitude, dont peuvent souffrir
certaines personnes âgées.
On leur propose alors de faire un séjour temporaire en établissement. Souvent, une fois qu’elles y ont goûté, elles expriment elles-mêmes le souhait de s’y installer.
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Olivier Marousé, ergothérapeute : Il existe plusieurs
freins majeurs au maintien à domicile. Ce peut être l’importance de la dépendance de la personne en cas de
maladie évolutive, la solitude et l’isolement. Les réticences familiales, l’inadaptation du logement et le
défaut de coordination des différents acteurs du maintien à domicile comptent également.
Comment faire pour prolonger
le maintien à domicile dans de bonnes conditions ?
C. C.-B. : Il faut bien s’alimenter, sans négliger les
apports de protéines. Lorsqu’on commence à maigrir, le
risque de chute est multiplié par dix, car l’on perd du
muscle. Il faut aussi faire un peu d’exercice chaque jour.
Il est également important d’entretenir sa cognition en
faisant des activités différentes, et de conserver une
convivialité en recevant ses amis, en voyant sa famille,
même lorsque l’état de santé se dégrade. On peut aussi
prendre de la vitamine D afin de bien fixer le calcium,
dont manquent souvent les personnes âgées.
O. M. : Avant d’envisager l’adaptation du logement, il
faut que la personne garde une bonne forme physique
et reste active. Une attention particulière doit être portée aux chaussures et aux lunettes. Ensuite, la circulation dans le logement est prioritaire. Ainsi, l’éclairage,
en particulier la nuit dans les couloirs et les escaliers,
doit être suffisant et les interrupteurs accessibles. Mieux
vaut éviter les sols cirés, glissants ou mouillés. Il est préférable d’enlever les tapis, les guéridons, etc.
En fait, il faut chercher à sécuriser les lieux afin d’éviter les chutes et opter pour des travaux de bon sens. Par
exemple : adapter la hauteur de la boîte aux lettres,
poser des rampes de section ovalaire dans les escaliers,
des barres d’appui, des antidérapants sur les nez de
marche ou au fond de la baignoire et de la douche, installer des portes avec ouvrant extérieur, notamment
pour les toilettes, poser des volets roulants. L’idéal est
de se faire conseiller par un ergothérapeute. Il peut ainsi
élaborer avec la personne et son entourage un projet
individualisé pour ne pas transformer le domicile en
hôpital. Son évaluation prendra en compte les possibilités physiques et psychiques de la personne dans son
environnement, ainsi que les contraintes techniques.
Photos B. Le Guérinel
Vivre chez soi ou entrer
en maison de retraite, le choix
s’impose parfois de lui-même.
Christine Chansiaux-Bucalo ,
gériatre, et Olivier Marousé ,
ergothérapeute,
nous éclairent sur les limites
de chaque solution.
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d’aménager une chambre et une salle d’eau au rez-de-chaussée. Dans la chambre, le lit peut être rehaussé grâce à des
cales afin de faciliter le lever et le coucher. Pour l’éclairage,
le chevet doit fonctionner grâce à un va-et-vient afin d’éviter de se déplacer dans l’obscurité. Et l’on posera, si ce n’est
déjà fait, une prise téléphonique près du lit.
La salle de bains est la pièce la plus dangereuse. On y placera donc plusieurs barres d’appui et des tapis antidérapants.
S’il y a une baignoire, une planche placée en travers peut
permettre de s’asseoir pour y entrer plus facilement. Mais le
mieux est de faire installer une douche avec un receveur de
plain-pied. Quant aux robinets — difficiles à tourner —, ils
peuvent être remplacés par des mitigeurs ergonomiques. On
installera également des barres d’appui dans les toilettes et
un rehausseur sur le siège, et l’on supprimera le verrou. Dans
la cuisine, la praticité doit primer, en plaçant à portée de
main les ustensiles les plus fréquemment utilisés. Un plan de
travail placé près du four sera très utile pour poser les plats
chauds. On peut aussi remplacer les robinets et les boutons
de la plaque de cuisson par des équipements spéciaux destinés aux personnes ayant des problèmes de préhension. Enfin,
dans le salon, on privilégiera le confort, en rehaussant son
canapé ou son fauteuil préféré, en optant pour une télécommande et un téléphone à grosses touches.
Des aides financières pour adapter son logement
Mais tout cela a un coût. Afin d’aider les personnes aux revenus modestes à réaliser les travaux nécessaires, l’Agence
nationale pour l’habitat (Anah) propose, sous conditions de
ressources, une prise en charge de 35 à 50 % des dépenses de
travaux, dans la limite de 20 000 €. Pour estimer les besoins
et faire une demande, les propriétaires peuvent bénéficier
d’un accompagnement technique. Un diagnostic autonomie
ou un rapport d’ergothérapeute est obligatoire pour justifier
la demande. En complément, la personne peut solliciter d’autres financements auprès de sa caisse de retraite, de la Caisse
nationale d’assurance vieillesse et des collectivités locales.
Bon à savoir : pour 2011, l’État proroge le crédit d’impôt en
faveur de l’adaptation des logements. Il représente 25 % des
dépenses liées au remplacement ou à l’installation d’équipements pour personnes âgées et/ou à mobilité réduite. Le montant des dépenses ouvrant droit au crédit d’impôt est limité
à 5 000 € pour une personne seule et à 10 000 € pour un couple. Ces sommes sont majorées de 400 € par personne à
charge.
Bénédicte Le Guérinel
(1) Information issue du Salon des Seniors.
Points de contact
Quelques adresses utiles pour vous aider dans vos
démarches de maintien à domicile.
n Anah (Agence nationale de l’habitat)
Tél. 0 826 80 39 39 ou www.anah.fr
n Association nationale française des ergothérapeutes,
34, avenue Aristide-Briand, 94100 ARCUEIL.
Tél : 01 49 85 12 60, ou www.anfe.asso.fr
n CLIC (Centres locaux d’information et de coordination).
Renseignez-vous auprès de votre mairie pour obtenir
les coordonnées du Clic de votre secteur ou rendez-vous
sur : http://clic-info.personnes-agees.gouv.fr
n Pact Arim pour l’amélioration de l’habitat. Pour connaître celui de votre département, consultez le site Internet www.pact-arim.org ou renseignez-vous auprès de
votre mairie.
n Pensez aussi à contacter votre caisse de retraite.
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