Focus on… MIROIR EGYPTIEN

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Focus on… MIROIR EGYPTIEN
Focus on…
MIROIR EGYPTIEN
Miroir égyptien
Bronze
Egypte, Nouvel Empire, début jusqu’au milieu de la XVIIIe dynastie, circa 1550-1425 AC
H 25.2 cm
Provenance: Collection HIRSCH Hotel Drouot July 1921; Charles Gillet (1879-1972), Lausanne
Ce magnifique objet en bronze appartient à une série de miroirs à manche en forme de
statuettes féminines apparue au Nouvel Empire. Chaque statuette est unique, car coulée à la cire
perdue, une technique parfaitement maîtrisée à cette époque. Une riche symbolique se dégage de
leurs particularités. Une analyse formelle et stylistique de ce groupe l’a révélée et elle a déterminé une
séquence chronologique entre le Nouvel Empire et la Basse Époque.
La nouveauté de ces miroirs réside
dans l’usage du corps féminin nu dans un rôle
architectural comparable à celui d’une
colonnette. Si souvent évoquée dans la
littérature poétique égyptienne, la nudité qui
les singularise est doublée de divers autres
motifs à caractère érotique. Ce corps dressé,
un pied légèrement avancé, peut adopter
différentes attitudes.
Il est couronné d’un élément végétal papyrus, palmier, lotus, lys-, qui fait office de
transition décorative et qui maintient au
moyen de rivets un disque métallique
réfléchissant. La forme de ce disque est
rarement circulaire, mais s’étire légèrement
vers la soie, pour être cordiforme. Sur cet
exemplaire, la soie est fixée dans un chapiteau
en forme de lys.
Ce miroir exceptionnel séduit par les détails de la parure, par la coiffure, ainsi que par
différents autres détails qui lui sont propres. Ainsi, les boucles d’oreilles rondes frappent d’emblée par
leur diamètre et leur volume exagérés. Ce type d’ornement circulaire apparaît dans la peinture
égyptienne durant le règne d’Amenhotep II, en parallèle avec une coiffure enveloppante. La perruque,
ornement de séduction par excellence, entoure ici les épaules jusqu’à la naissance des seins.
Elle est composée de longues mèches torsadées, stylisées par des traits obliques inclinés
uniformément, et elle est bordée dans la partie inférieure par de courtes mèches plus serrées. Cette
coiffure est agrémentée d’une fleur de lotus épanouie qui déborde de la coiffure à l’aplomb du nez. La
peinture et la sculpture du règne d’Amenhotep II jusqu’à la fin du Nouvel Empire en donnent de très
nombreux exemples. Toutefois, la longueur de cette perruque est plus spécifique au règne
d’Amenhotep III. Le traitement du visage semble d’ailleurs conforme à l’esthétique de cette période.
D’autres atours parent le corps de cette jeune fille. Les hanches sont soulignées par une ceinture
de danse, hachurée, accentuant le triangle du pubis et l’arrondi du ventre. Ces ceintures étaient
généralement constituées de coquillage cauris, un symbole féminin. Des ceintures de danse de ce type
ont été mises au jour sur de nombreuses momies égyptiennes et sont abondamment présentées dans
l’iconographie.
Moins fréquentes sont les parures de peau en forme de figures de dieu Bès – des tatouages –
comme elles se présentent ici sur l’avant des cuisses. Néanmoins, ces ornements sont présents sur
quelques autres miroirs: un miroir de Brooklyn (inv. 60.27.1), et un autre à Khartoum (inv.MN18595),
pour ne citer que quelques-uns. Ce génie, qui appartient à l’univers féminin, a été intégré au monde
du plaisir et de la sexualité, sans doute par un rapprochement avec la déesse Hathor, déesse de la
musique, de la danse et de l’amour. Rien d’étonnant de trouver, dans l’art égyptien, l’effigie de Bès sur
le corps des musiciennes, des danseuses et des nageuses. Ces tatouages sont également attestés sur
de nombreuses momies à partir du Nouvel Empire. Notons encore la parure de cou de la jeune fille,
un large collier figuré par plusieurs lignes en arc de cercle, entre les deux côtés de la chevelure. Toutes
ces remarques situent, selon nous, ce très beau miroir en bronze à l’époque d’Amenhotep III.
Les parures citées, qui mettent la
nudité en exergue, évoquent de toute
évidence la jeunesse. En effet, dans l’art
égyptien, la nudité est l’apanage des
enfants ou de très jeunes filles et des jeunes
hommes. Remarquons toutefois qu’aucun
miroir en forme de statuette masculine
n’est connu.
Enfin, deux particularités de cet
exemplaire doivent encore être relevées. Le
végétal, porté dans la main droite le long du
corps, est sans doute une fleur de lotus. Peu
de comparaisons existent dans le groupe de
miroirs, en revanche, elles sont nombreuses
dans la peinture et les reliefs égyptiens.
Dans la main gauche ramenée vers la
poitrine, la jeune fille porte un objet ovoïde.
Cette forme est-elle originelle ou le résultat
d’un nettoyage du métal ? Une photo avant
nettoyage semble la donner comme telle.
Dans la majorité des cas, un oiseau
ou un canard est lové dans la paume de la
main; parfois c’est un chat ou
exceptionnellement un enfant. Ici, un fruit
-mandragore, grenade, persea- ou à un œuf
serait plausible. L’un et l’autre s’inscrivent dans une même sphère symbolique : érotisme, sexualité et
fécondité. La statuette du miroir de Philadelphie (inv. E10312), qui tient également une forme arrondie
dans la main ramenée vers la poitrine, peut être citée comme parallèle.
Cette analyse dévoile la signification symbolique de l’objet dont la charge n’est pas négligeable.
Le miroir en effet montre des signes codés. La connotation solaire du disque-luminaire fait référence
au dieu créateur Rê. Le jeu des combinaisons nudité et perruque, nudité couplée avec l’oiseau/fruit,
nudité et parure/tatouage expriment la jeunesse et la beauté certes, mais aussi la sensualité et
l’érotisme. Il évoque l’univers hathorique.
Ces allusions au dieu Rê et à l’univers de sa fille, la déesse Hathor, donnent à l’objet un pouvoir
de renouvellement perpétuel de la vie. Dès lors, on comprend mieux, pourquoi la plupart des miroirs
en forme de statuette féminine étaient emportés pour l’éternité, comme garant d’une jeunesse
éternellement renouvelée à l’image du soleil.
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