Perspectives économiques mondiales 2014-2015 - Coe

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Perspectives économiques mondiales 2014-2015 - Coe
Document
de travail n°47
Perspectives économiques
2014-2015
Croissance sous stimulant monétaire
mars 2014
Ce document de travail a été réalisé par
l’équipe de conjoncture et de prévisions
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Mars 2014
Perspectives économiques 2014-2015
Sommaire
Croissance sous stimulant monétaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3
Situation et perspectives de l’économie mondiale pour 2014 et 2015 . . . . . . . . . . . . . 5
Fléchissement des économies émergentes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 5
Rebond d’investissement aux Etats-Unis,
croissance décevante fin 2013 au Japon . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 6
Investissement sans crédit en zone euro . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 7
Situation et perspectives de l’économie française pour 2014 et 2015 . . . . . . . . . . . . . 9
Situation et perspectives de la zone euro pour 2014 et 2015. . . . . . . . . . . . . . . . . . . 12
Situation et perspectives Etats-Unis, Japon, économies émergentes . . . . . . . . . . . . . 17
Etats-Unis : croissance soutenue malgré le « shutdown ». . . . . . . . . . . . . 17
Japon : une croissance sans réelle accélération . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 18
Economies émergentes : le ralentissement se poursuit,
les déséquilibres demeurent . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 20
Marchés de matières premières, de taux et de change. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23
Légère hausse des cours du pétrole. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23
Les taux directeurs inchangés . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23
Le change euro-dollar vers sa PPA de 1,28 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 24
1
Mars 2014
Perspectives économiques 2014-2015
Croissance sous stimulant monétaire
Le scénario d’un redressement graduel de l’activité à l’échelle mondiale que nous privilégions depuis plusieurs
trimestres se confirme : le PIB mondial progresse au rythme de 3,5 % l’an depuis trois trimestres. Cette progression « tendancielle » masque une redistribution de sa provenance. La part de la croissance en provenance
des pays émergents a fléchi au bénéfice de celle des économies de l’OCDE. L’économie mondiale ne dévierait
pas de cette trajectoire en 2014. Les risques autour de ce scénario plutôt consensuel n’ont pas diminué d’intensité. Ils tournent à l’échelle mondiale et renvoient à l’accumulation de dette privée comme publique dont
des politiques monétaires sur-actives tentent de piloter le coût à la baisse. Une redistribution de la croissance
mondiale est en cours. Elle se poursuivrait en 2014.
Fléchissement des économies émergentes
Les économies qui pâtissent d’un ralentissement plus ou moins marqué sont les économies émergentes gagnées
par les déséquilibres structurels les plus prononcés (déficits jumeaux, inflation structurelle). Toutes ces économies
connaîtront une croissance plus faible en 2014 qu’en 2013. Une des questions clé à court terme est de savoir si la
Chine se joindra ou non au groupe des économies en ralentissement et, si oui, dans quelle ampleur. Les signes
d’un fléchissement d’activité ne manquent pas. Le pari de la préservation de la croissance chinoise prévaudra probablement, quitte à repousser encore un peu plus loin les niveaux d’endettement et de stimulation par le crédit,
voire à entrer dans le jeu mondial de la course à la dépréciation de la devise.
L’investissement, ce moteur…
Au Japon, la porte de la croissance est étroite. Elle a été ouverte à grand renfort de sur-stimulations budgétaire et
monétaire simultanées mais elle ne paraît pas devoir se refermer. Aux Etats-Unis, la croissance resterait au rendezvous, au-delà de l’aléa climatique défavorable du début 2014, pour peu que le redémarrage de l’investissement productif se manifeste. Les arguments en faveur du redressement de ce dernier ne manquent cependant pas (des profits
élevés comme du cash disponible dans les entreprises, des conditions de financement favorables). Le sur-activisme
monétaire a stimulé un rebond de l’immobilier (investissement en logement, évolution de prix) qui se prolongerait.
La problématique de la reprise de l’investissement productif est également au cœur du scénario européen. Des signaux positifs ont été émis en 2013. Les conditions du crédit aux ménages ou aux entreprises se détendent progressivement. Pour autant, il est peu probable que le crédit se redresse avant que la vérification de la qualité des
actifs bancaires (étape préalable à l’Union Bancaire prévue pour octobre) ne soit intervenue. En outre, le poids
toujours croissant des créances douteuses au Sud de l’Europe briderait toute accélération de la distribution de
crédit. La progression de l’investissement reposerait alors sur les capacités de financement des sociétés non financières, inégales au sein de l’espace européen.
Répit et non disparition des tensions
Deux risques propres à la zone euro se manifestent. Le premier tient à l’extension du risque déflationniste au-delà
du cas grec. Le second tient à la difficile consolidation budgétaire en Europe. Un répit a été accordé mais les divergences intra-européennes demeurent, voire s’accroissent. Une trajectoire crédible de rééquilibrage budgétaire
et plus encore d’endiguement de la dette publique, dont la hausse se poursuivrait en 2014-2015 notamment en
France, en Italie et en Espagne, reste indispensable pour éviter la résurgence des tensions.
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n° 47
Perspectives économiques 2014-2015
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Mars 2014
Situation et perspectives de l’économie mondiale
pour 2014 et 2015
L’économie mondiale a renoué au second semestre 2013 avec une croissance annuelle proche de
3,5 %. Elle est toutefois freinée début 2014 par le ralentissement d’activité dans les économies
émergentes touchées par des crises de change de grande ampleur. Mais ce fléchissement resterait
temporaire. Après une progression de 3,1 % en moyenne annuelle en 2014, la croissance
mondiale accélérera modestement à 3,5 % en 2015, soit un rythme proche de sa tendance
annuelle observée depuis quarante ans.
Dans les pays de l’OCDE, en revanche, l’accélération de la croissance survenue en 2013 se poursuivrait en 2014. La croissance américaine, qui était de 1,9 % en 2013, atteindrait 2,5 % en 2014
puis 2,7 % en 2015. La sortie de la déflation se confirmera au Japon, corolaire d’une croissance
restaurée. Après être sortie de récession au cours du premier semestre, la zone euro verrait une
croissance lente mais régulière se réinstaller en 2014 puis en 2015 (1 % puis 1,4 %). Comme aux
Etats-Unis, au Royaume-Uni ou encore au Japon, le rythme de croissance y dépendra étroitement
de l’évolution de l’investissement. Les politiques monétaires resteront très accommodantes sur
l’ensemble de la période, afin de favoriser le redressement des dépenses en capital.
Le scénario d’un redressement graduel de l’activité
à l’échelle mondiale que nous privilégions depuis
plusieurs trimestres se confirme. Le PIB mondial
progresse à un rythme proche de 3,5 % l’an depuis
trois trimestres. Cette progression « tendancielle »
masque une redistribution en cours de la croissance mondiale. Celle-ci se poursuivrait en 2014.
en outre, la plupart d’entre elles ont été conduites
à relever, parfois en urgence, leurs taux directeurs,
une probable modération du crédit interviendra,
bridant tout redressement de l’investissement. En
PIB mondial
Fléchissement des économies émergentes
6
Les économies qui pâtissent d’un ralentissement
plus ou moins marqué sont les économies émergentes gagnées par les déséquilibres macroéconomiques les plus prononcés (déficits jumeaux, inflation structurelle). Brésil, Inde, Indonésie, Afrique
du Sud, Argentine, Turquie, Russie ont tous subi un
décrochage majeur de la valeur de leur devise. Ce
faisant, c’est un prélèvement sur le pouvoir d’achat
de leur économie qui s’opère via la hausse du prix
des importations. Toutes choses égales par ailleurs,
ce prélèvement représente l’équivalent de 0,4 à
0,6 point du PIB mondial. Toutes ces économies
connaîtront ainsi probablement un rythme de
croissance plus faible en 2014 qu’en 2013. Comme,
4
Calcul sur 53 pays, variation en %
2
0
-2
sur un an
sur un trimestre
au taux annuel
-4
-6
2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014
Source : Systèmes nationaux
de comptabilité nationale
Agrégation Coe-Rexecode
© Coe-Rexecode
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n° 47
Perspectives économiques 2014-2015
revanche, un regain de compétitivité occasionné
par les dépréciations de devises permettrait un
redémarrage graduel de leur croissance courant
2015.
Une des questions clé à court terme est de savoir si
la Chine se joindra ou non au groupe des économies en ralentissement et, si oui, dans quelle
ampleur. Les signes d’un fléchissement d’activité
ne manquent pas : enquêtes PMI, production
d’acier, investissement dans les zones urbaines,
constructions terminées… Mais, en contrepoint,
les ventes de voitures particulières ne fléchissent
pas, de même que les importations de marchandises signe d’une demande interne robuste. C’est à
nouveau la manière dont sera pilotée la politique
de distribution du crédit qui sera déterminante de
la croissance chinoise. En l’espace de cinq ans,
l’endettement des agents non financiers s’est accru
de l’équivalent de 50 points de PIB. Cet endettement débridé a permis à la Chine de pallier la dérobade de la croissance en provenance de l’extérieur
du fait des récessions américaine puis européennes. Il ne paraît plus d’actualité, du moins
dans les discours ou dans quelques gestes de
portée pour l’instant symbolique (défaut sur les
obligations d’une entreprise de l’industrie photovoltaïque notoirement surcapacitaire).
Indice PMI - Monde
60
Indice composite (manufacturier et services)
55
50
45
40
35
2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014
Source : Enquête PMI, Markit
6
© Coe-Rexecode
Le pari de la préservation de la croissance chinoise
prévaudra probablement, quitte à repousser encore
un peu plus loin les niveaux d’endettement et de
stimulation par le crédit, voire à entrer dans le jeu
mondial de la course à la dépréciation de la devise.
Au-delà du petit recul du yuan contre le dollar des
dernières semaines, nous retenons que l’appréciation de la devise chinoise se poursuivrait mais à un
rythme moins soutenu. Au total, la Chine ralentirait, sans rupture, n’affichant plus qu’une croissance limitée à 7,4 % en 2014 et 7,1 % en 2015.
Rebond d’investissement aux Etats-Unis,
croissance décevante fin 2013 au Japon
La croissance américaine resterait au rendez-vous,
au-delà de l’aléa climatique défavorable du début
2014, pour peu que le redémarrage de l’investissement productif se manifeste. Par le passé, c’est
toujours ce poste de dépenses qui a scandé les
véritables reprises américaines. Les signaux sur ce
point restent mitigés comme en témoignent les
hésitations des commandes nouvelles aux industries de biens d’équipement (hors défense et aéronautique). Les arguments en faveur du redressement de l’investissement productif ne manquent
cependant pas. Ils renvoient au niveau des profits
comme du cash disponible dans les entreprises, un
élément présent déjà de longue date mais qui n’a
pas vraiment embrayé sur un rebond de l’investissement. Ils tiennent aussi au pilotage au plus bas
possible du coût de la ressource financière par une
politique monétaire dont l’activisme a été à peine
écorné depuis l’été. Outre la baisse du coût du
financement de la dette publique, ce sur-activisme
monétaire a stimulé le rebond de l’immobilier sous
toutes ses formes (investissement en logement,
évolution de prix). Aux Etats-Unis, comme au
Royaume-Uni, la politique monétaire a ainsi
contribué à la réapparition d’effets de richesse
favorables à la dépense de consommation mais
encore peu à une véritable reprise de l’investissement productif.
La croissance japonaise a déçu en fin d’année. Elle
doit passer l’écueil d’une forte hausse de la TVA
début avril. Surtout, de prêteur net sur les marchés
financiers mondiaux, l’économie japonaise a
Mars 2014
désormais mué en emprunteur net. Ce basculement compliquera à terme la résolution de l’équation du financement d’un endettement public sans
cesse poussé plus haut. Dans l’immédiat, l’issue à
une déflation vieille de près de vingt ans a été
trouvée. L’étape suivante à franchir est celle d’une
progression des salaires réels qui fait encore
défaut. La porte de la croissance japonaise est
encore étroite. Elle a été ouverte à grand renfort de
sur-stimulations budgétaire et monétaire simultanées mais elle ne paraît pas devoir se refermer.
Investissement sans crédit en zone euro
La problématique de la reprise de l’investissement
productif est également au cœur du scénario européen. Des signaux positifs ont été émis en 2013.
L’Espagne a connu quatre trimestres de hausse de
l’investissement en biens d’équipement. Celui-ci
s’oriente à nouveau à la hausse en Allemagne,
ainsi qu’en Italie ou en France. Il convient toutefois
de faire la part, dans ce dernier cas, de ce qui
relève d’éléments circonstanciels et fondamentaux.
Les conditions du crédit que ce soit à destination
des ménages ou des entreprises se détendent
progressivement. La réduction du levier bancaire
(crédits aux agents non financiers / fonds propres)
a également été déjà impressionnante depuis 2008.
Elle a ralenti sensiblement en 2013. Pour autant, il
est peu probable que le crédit se redresse avant
que l’étape de la vérification de la qualité des actifs
du système bancaire (préalable à l’Union Bancaire
prévue pour octobre) n’ait été franchie. Dans l’attente, la fragilité du système bancaire grevée par
des encours de créances douteuses toujours croissants au sud de l’Europe, empêcherait toute accélération de la distribution de crédit. La progression
de l’investissement reposerait alors sur les capacités de financement des sociétés non financières.
Celles-ci sont assez inégales au sein de l’espace
européen : le rétablissement des profits depuis
l’entrée en récession en 2007 a été impressionnant
en Espagne, plus diffus en Allemagne, inexistant
en Italie et en France. Cette hiérarchie pourrait
désormais se répercuter sur les évolutions relatives
de l’investissement productif.
Deux risques propres à la zone euro se
manifestent. Le premier tient à l’extension du risque déflationniste au-delà du cas
grec. Il gagne en probabilité à mesure du
ralentissement des prix. Pour autant, le tassement de l’inflation observé jusqu’à présent
reflète surtout la modération des seuls prix des
produits alimentaires et le recul des prix de
l’énergie. Surtout, les anticipations de prix formulées par les ménages comme par les chefs d’entreprise ne pointent pas pour l’heure vers une amplification du tassement des prix. La zone euro resterait ainsi à la lisière de la déflation. Le second
risque tient à la difficile consolidation budgétaire
en Europe. Un répit a été accordé par l’introduction
de l’OMT, par le sursis décidé par le Conseil européen au printemps 2013 (sursis valable jusque 2014
inclus) et par la rotation du risque à l’échelle
mondiale. Celle-ci a permis une baisse des taux sur
les titres souverains espagnols, italiens, portugais… Ce répit ne saurait toutefois rester durable
en l’absence d’une trajectoire crédible de retour à
l’équilibre budgétaire et plus encore d’endiguement de la dette publique dont la hausse se poursuivrait en 2014-2015 notamment en France, en
Italie et en Espagne. ¢
Inflation mondiale
12
Variations sur 1 an en %
9
6
3
0
Pays développés
Pays en voie
de développement
Monde
-3
01 02 03 04 05 06 07 08 09 10 11 12 13 14
Source : FMI
© Coe-Rexecode
Les prévisions présentées dans ce document sont établies sur la base des informations disponibles du 18 mars 2014. La rédaction
des textes a été achevée le 20 mars 2014.
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n° 47
Perspectives économiques 2014-2015
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Mars 2014
Situation et perspectives
pour l’économie française pour 2014 et 2015
Hoquets de croissance
L’économie française peine à embrayer sur la timide reprise européenne. Depuis 2011, des trimestres de faible repli de l’activité alternent avec des trimestres de croissance modérée. Cette
tendance se prolonge au début de l’année 2014. Après une croissance positive fin 2013, la plupart
des indicateurs quantitatifs portant sur le premier trimestre ont été décevants. Un repli de faible
ampleur du niveau du PIB est possible début 2014. Il laisserait ensuite place à une croissance
modeste, inférieure à celle observée pour l’ensemble de la zone euro (0,6 % en 2014 puis 1 % en
2015).
Les raisons de ce décalage sont à rechercher dans la fragilité financière des entreprises françaises,
plus marquée que dans le reste de la zone euro. Elles tiennent également à un ajustement budgétaire plus tardif. Elles renvoient enfin à un déficit de compétitivité plus que jamais préoccupant :
la part des exportations françaises dans les exportations de la zone euro a même légèrement
reculé au second semestre 2013 après trois années de quasi-stabilisation.
Les trimestres de progression du niveau d’activité
alternent avec des trimestres de faible recul du PIB
depuis plus de deux ans. Le début d’année vient
prolonger ce mouvement. Un recul modéré du
niveau du PIB pourrait intervenir au premier
trimestre après un petit redressement observé fin
2013. Cette hausse avait elle-même reposé en
partie sur des éléments circonstanciels (hausse de
l’investissement en matériels de transport en anticipation de la mise en place d’une nouvelle norme
anti-pollution, anticipation de la hausse de la TVA
et du durcissement du bonus-malus automobile ).
Ces éléments ne jouent plus début 2014. Ils occasionneraient même une compensation négative au
premier semestre.
Repli d’activité début 2014
De fait, les indicateurs quantitatifs disponibles
pour le début d’année ont été pour la plupart décevants : tassement des dépenses de consommation
des ménages, fléchissement des immatriculations
de tous types de véhicules sur le bimestre
janvier/février, stagnation des exportations de
marchandises en valeur et progression des importations, repli de l’emploi intérimaire... Cette tona-
lité vaut aussi pour les indicateurs qualitatifs. A
l’exception du secteur industriel, les indices
synthétiques du climat des affaires par grands
secteurs sont, en février, dernier point connu, à un
niveau inférieur à celui observé en moyenne au
quatrième trimestre 2013. Les anticipations d’évolution des effectifs se replient dans l’industrie, les
France
Indicateur synthétique du climat des affaires
120
Niveau 100 = moyenne de longue période
110
100
90
80
70
dans l'industrie manufacturière
dans les services
60
2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014
Source : Insee
© Coe-Rexecode
9
n° 47
Perspectives économiques 2014-2015
services ou encore la construction. Sur tous ces
points, les résultats des enquêtes conduites en
France se distinguent défavorablement de ceux
relevés dans les enquêtes européennes.
L’économie française paraît ainsi rester à l’écart de
la timide reprise européenne en cours.
Cette inertie relative de l’économie française risque
de déboucher sur un retard dans le redémarrage de
l’investissement. Le scénario que nous retenons
pour l’ensemble de la zone euro table sur un petit
surcroît de croissance en Europe en 2014 (+1 %
après -0,4 % en 2013) principalement attribuable au
dégrippage de l’investissement. De fait, alors que la
progression de l’investissement total en France a été
constamment un peu plus vive ou a moins reculé
que dans l’ensemble européen depuis 2007, cette
observation n’est plus vérifiée pour la première fois
fin 2013. Au dernier trimestre de l’année dernière, le
glissement annuel de l’investissement total est
même redevenu très légèrement positif en zone
euro pour la première fois depuis deux ans
(+0,1 %). Il poursuit son repli en France à un
rythme qui va toutefois en s’atténuant (-0,7 %).
Ce décalage de rythme d’investissement entre la
France et la zone euro pourrait s’amplifier, comme
le suggèrent les divergences d’évolution des déter-
Sociétés non financières
Taux d'autofinancement de l'investissement
120
Autofinancement brut, en % de la FBCF
(moy. mobile sur 2 trimestres)
105
90
75
France
Zone euro
60
01 02 03 04 05 06 07 08 09 10 11 12 13 14
Sources : Eurostat et INSEE
10
© Coe-Rexecode
minants de l’investissement. Tout d’abord, le taux
d’utilisation des capacités de production dans l’industrie poursuit son effritement alors qu’il a
amorcé un redressement, tout en restant bas, en
zone euro. Ensuite, les marges de manœuvre
financière des agents apparaissent plus étroites en
France où le taux d’épargne des sociétés non
financières (SNF) s’inscrit sept points en-dessous
de celui observé dans l’ensemble de la zone euro.
Cet écart n’était que de deux points en 2007. Une
telle situation illustre les divergences d’évolution
des profits après impôts des sociétés non financières : en recul de 8,7 % par rapport à leur niveau
de 2007 en valeur en France, en progression de
3,5 % dans l’ensemble de la zone euro et singulièrement en Espagne.
Des trajectoires divergentes
de l’investissement se dessinent
Sur un autre plan, 2014 marquera l’entrée dans la
phase récessive du cycle électoral communal et
donc de l’investissement public. Une phase qui
promet d’être très accusée en raison de la réduction à venir des dotations de l’Etat aux collectivités locales. Enfin, l’investissement en logement
des ménages resterait tiré vers le bas au cours de
2014 et ne ferait que se stabiliser en 2015. En
comparaison, le point bas dans ce domaine est
probablement proche dans plusieurs pays européens (Espagne, Italie), voire est désormais franchement dépassé (Allemagne). A l’inverse, l’introduction de fait du CICE en 2014, puis sa montée en
puissance en 2015, permettrait de soutenir les
profits après impôts des SNF (anticipation d’une
progression de 8 % de ces derniers en 2014). La
faiblesse maintenue des taux d’intérêt permettrait
également de minorer les coûts d’emprunt même
si le ralentissement de l’inflation se traduirait par
une petite remontée des taux réels. En tout état de
cause, si les trajectoires de l’investissement entre
la France et la zone euro venaient à s’écarter durablement, le décalage actuel de conjoncture deviendrait alors un décrochage.
La faible inflation actuelle paraît devoir perdurer.
En dépit de la hausse de la TVA intervenue au
Mars 2014
France
4
Pouvoir d'achat du revenu
disponible brut des ménages
RDB déflaté par l'indice des prix
à la consommation (var. sur un an, en %)
3
2
1
0
-1
-2
rythme un peu plus faible qu’auparavant, des prélèvements sur les ménages et
la modération des prestations sociales pèseraient aussi sur le pouvoir d’achat du revenu
des ménages. Cette situation est à front renversé
de celle observée tout au long des années 2000.
Celles-ci avaient notamment été marquées par une
progression du pouvoir d’achat du RDB supérieure
à celle du PIB. En conséquence, la consommation
ne pourra s’affirmer comme un élément de stimulation de la dépense. Une réduction de l’effort
d’épargne des ménages, dont le taux d’épargne
refluerait de 15,7 % en 2013 à 15,1 % en 2015,
soutiendrait la consommation.
2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014
Sources : Insee
© Coe-Rexecode
1er janvier 2014, les prix progressent à peine
(0,9 % sur un an en février et +1,3 % l’an sur
trois mois). Toutefois, les anticipations sur les
évolutions de prix que formulent tant les chefs
d’entreprise que les ménages ne pointent pas vers
une amplification du recul des prix. Une mécanique déflationniste ne paraît ainsi pas d’ores et
déjà installée. Ce risque se renforce mais, pour
l’heure, l’économie française reste à la lisière de la
déflation. Cette faible inflation est l’un des principaux éléments de soutien du pouvoir d’achat du
revenu disponible brut (RDB). Depuis 2010, la
progression de ce dernier est devenue inférieure à
celle du PIB en volume (en 2013, leurs évolutions
ont été parallèles). Cette situation se prolongerait
en 2014 et 2015. Nous ne retenons qu’une progression limitée à 0,4 % en cumul sur les deux ans du
pouvoir d’achat du RDB des ménages pour une
hausse cumulée de 1,6 % du PIB en volume en
2015 par rapport à 2013. Une telle situation s’explique par une modération salariale qui s’installerait progressivement dans le prolongement du
ralentissement des salaires déjà observé en 2013
d’une part et par la stabilité de l’emploi total
comme de l’emploi salarié du secteur marchand
d’autre part. La poursuite de la hausse, même à un
Nous retenons, en accord avec les hypothèses de
la Commission européenne, que l’effort de réduction du déficit public structurel serait de l’ordre de
0,5 point de PIB en 2014. Il en irait de même en
2015. En conséquence, le poids du déficit public
resterait supérieur au seuil de 3 % du PIB en
2015 : un nouveau « sursis » s’avérerait donc
nécessaire. Un risque majeur porte sur les conséquences d’un tel nouvel écart par rapport aux
objectifs. Nous retenons toutefois que les taux sur
obligations d’Etat ne se tendraient pas significativement, limitant ainsi la montée de la charge de la
dette. Elle resterait inférieure à 3 points de PIB en
dépit d’une dette publique qui avoisinerait le seuil
de 100 % fin 2015. Elle dépasserait 2000 milliards
d’euros dès la fin 2014.
Le premier vecteur immédiat de croissance résiderait dans la demande extérieure. Le modeste redémarrage des importations de la zone euro stimulerait les exportations françaises, à parts de marché
inchangées, à hauteur de 0,4 puis de 0,6 point de
PIB en 2014 et 2015 (hors importations induites).
Cette situation est à l’inverse de celle observée en
2012 et 2013, quand la demande d’importations en
provenance de la zone euro se contractait. Pour
qu’elle se manifeste effectivement, cette stimulation suppose que les voies et moyens d’une
réponse au nouveau défi posé par la restauration
de la compétitivité des pays du sud de l’Europe
soient rapidement mises en œuvre. ¢
11
n° 47
Perspectives économiques 2014-2015
Situation et perspectives de la Zone euro
pour 2014 et 2015
Après être sortie de récession au cours du premier semestre, la zone euro verrait une croissance
lente mais régulière se réinstaller en 2014 puis en 2015 (1 % puis 1,4 %). Elle a déjà connu, fin
2013, une interruption du recul des effectifs employés. La zone euro dans son ensemble évitera
l’entrée en déflation. Le rythme de croissance dépendra étroitement de l’évolution de l’investissement. La politique monétaire restera très accommodante sur l’ensemble de la période afin de
favoriser le redressement des dépenses en capital.
Même si le sentiment général est que les risques propres à la zone euro se sont atténués depuis
2012, ils n’ont pas disparu. Les créances douteuses pèsent de plus en plus sur les bilans bancaires,
notamment au sud de l’Europe, et donc sur le redémarrage du crédit. Surtout, la divergence entre
les économies membres de la zone euro demeure. Elle s’amplifie même en ce qui concerne les
trajectoires des dettes publiques nationales. Dans ces circonstances, seule une croissance européenne modérée paraît probable.
Le PIB en volume de la zone euro a progressé au
rythme de 1,1 % au taux annuel au quatrième
trimestre 2013. Les enquêtes de conjoncture suggèrent une prolongation de ce redressement au cours
des prochains mois. L’indice PMI composite s’est
apprécié pour le huitième mois consécutif en
février et semble franchement installé au-dessus
de la ligne des 50. Toutefois, des facteurs de frein
Zone euro
Taux de chômage harmonisé
13
%
12
11
(moy.1989-2009) 9.1%
10
9
8
7
demeurent qui nous incitent à la prudence. Le
rythme de progression du PIB resterait faible à 1 %
en 2014 et 1,4 % en 2015.
A mesure que les effets sédatifs liés à la consolidation budgétaire et à la fragmentation financière qui
s’est installée au sein de la zone euro se dissiperaient, la demande domestique deviendrait
progressivement le principal soutien à la croissance. La consommation des ménages bénéficierait de l’étiolement des efforts structurels de
consolidation budgétaire. Ce facteur moins pénalisant ne serait pas renforcé par une amélioration
sensible du marché du travail. Le regain d’activité
serait insuffisant pour soutenir l’emploi (+0,1 %
en 2014 puis +0,3 % en 2015). Compte tenu de la
faible progression de la population active cependant, la maigre progression de l’emploi permettrait
un léger reflux du taux de chômage (12,1 % en
2013 puis 11,9 % en 2014). Les situations sur les
marchés du travail nationaux resteraient très
disparates au sein de la zone, mais un reflux est
anticipé dans la plupart des économies.
2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014
Source : Eurostat
12
© Coe-Rexecode
La dynamique désinflationniste serait soutenue
par la faiblesse de l’inflation sous-jacente, la
Mars 2014
modération salariale ou encore la résistance de
l’euro face au dollar à 1,36 en 2014. Par ailleurs,
les prix à la production continuaient de baisser au
mois de janvier. La zone euro resterait à la lisière
de la baisse des prix.
contribuant alors négativement à la
croissance. Ceci entrainerait une consolidation moins prononcée des comptes
courants au cours des trimestres à venir
notamment au sein des pays « périphériques ».
L’année 2014 devrait confirmer le redressement de
l’investissement initié au cours des deux derniers
trimestres. Les indicateurs disponibles plaident en
faveur d’un accroissement modéré de l’investissement en biens d’équipement des entreprises : les
perspectives de production ont retrouvé leur
niveau de long terme sur lequel elles culminent,
les carnets de commandes domestiques et étrangers se sont notablement redressés et le taux d’utilisation des capacités de production, bien qu’à un
niveau encore déprimé, a esquissé un redressement sensible début 2014. A cela s’ajouteraient
des conditions de financement plus favorables.
La résorption des déficits publics se serait davantage expliquée par une augmentation des recettes
Déficit public
En % du PIB
5
0
-5
Malgré le niveau élevé de la monnaie européenne,
l’excédent commercial se gonflerait à nouveau en
2014 sous l’effet d’un net regain de la demande
adressée par le reste du monde. Le surplus d’activité et particulièrement de l’investissement
soutiendrait les importations, qui en 2015, pourraient progresser plus vite que les exportations,
France
Allemagne
Italie
Espagne
-10
-15
1995
1998
2001
2004
Source : Commission européenne
2007
2010
2013
© Coe-Rexecode
Zone euro
Indicateurs synthétiques de confiance dans l’industrie
10
Enquête Commission européenne
Soldes d'opinions en %
indice PMI - Markit
60
55
0
50
-10
45
-20
40
-30
35
-40
30
98 99 00 01 02 03 04 05 06 07 08 09 10 11 12 13 14
Sources : Commission européenne, Markit
98 99 00 01 02 03 04 05 06 07 08 09 10 11 12 13 14
© Coe-Rexecode
13
n° 47
Perspectives économiques 2014-2015
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que par une contraction des dépenses. Ce constat
pourrait s’inverser en 2014 et en 2015, ce qui
impliquerait toutefois une consolidation budgétaire moins prononcée. Après une augmentation
de l’ordre de trois points de PIB en 2013 (95,7 %),
la dette publique agrégée connaîtrait une légère
progression en 2014 (96,4 %). Elles se stabiliseraient en 2015 (96,2 %).
Les risques attenants à ce scénario demeurent.
L’occurrence d’une boucle, la remontée du risque
émergent et ses effets de contagion, les répercussions du tapering américain (hausse de l’écart de
taux entre les Etats-Unis et l’Europe), la fragmentation financière qui s’est installée au sein de la
zone euro et qui aurait des conséquences sur les
redémarrages individuels des économies notam-
14
ment à travers des disparités dans les conditions
de financement, la santé du secteur bancaire européen toujours confronté à la montée du taux de
créances douteuses et engagé dans un processus
d’assainissement des bilans sont autant d’éléments qui influeront sur le climat conjoncturel au
cours des prochains mois.
05C ;-D>
En Allemagne, les indicateurs d’activité récents
laissent globalement présager un rythme de croissance modéré mais qui s’accélèrerait au cours des
prochains mois. Nous conservons notre scénario
d’une reprise graduelle de l’activité soutenue principalement par la demande domestique sur l’ensemble de l’horizon de prévision. L’évolution de la
demande, les conditions de financement et la
situation financière des entreprises outre-Rhin
sont autant de facteurs qui devraient contribuer à
stimuler l’investissement. La consommation des
ménages pourrait s’accélérer en 2014 puis en 2015,
portée par l’évolution favorable du marché de
l’emploi. Le bas niveau d’inflation (1,3 % en 2014)
constituerait un autre élément de soutien.
Toutefois la progression des coûts salariaux ainsi
que la reprise de l’activité nous conduisent à anticiper une accélération des prix pour 2015 (1,8 %).
Parallèlement, malgré le net renforcement de la
Allemagne
Enquête IFO - climat des affaires
120
2005=100
110
100
90
80
2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014
Source : IFO
© Coe-Rexecode
Mars 2014
demande mondiale adressée à l’Allemagne en
2014, le soutien apporté par le commerce extérieur
à la croissance serait freiné par la progression plus
vive des importations relativement aux exportations qui laisse augurer une réduction de l’excédent courant d’ici 2015. Enfin, la neutralité des
finances publiques devrait se confirmer. Au final,
nous prévoyons une croissance du PIB de 1,7 % en
2014 puis 1,9 % en 2015.
En Italie, l’activité continuerait à se stabiliser. La
croissance du PIB, prévue à 0,5 % en 2014, puis
0,9 % en 2015, confirmerait le redressement
amorcé au quatrième trimestre 2013. La demande
interne, en berne, cesserait de reculer. La consommation privée, bridée par un marché de travail
toujours dégradé, diminuerait de 0,1 % en 2014,
puis progresserait de 0,7 % en 2015. Le taux de
chômage (plus de 12%) se stabiliserait en 2014. De
son côté, l’investissement dans le secteur de la
construction verrait sa contraction se modérer.
L’investissement en biens d’équipement se redresserait pour les biens d’équipement, à des rythmes
relativement faibles aux deux premiers trimestres
de 2014, eu égard à la mollesse de la demande et
de perspectives à l’exportation peu améliorées. La
Espagne
12
Coût salarial
Variations sur 1 an en %
9
nominal
réel
6
3
0
-3
-6
2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014
Source : INE. Instituto Nacional de Estadística
© Coe-Rexecode
hausse des exportations, supérieure à la
demande mondiale adressée à l’Italie,
traduirait une perte de compétitivité. Les
importations se redresseraient, en raison
notamment d’une hausse de la demande
interne. L’excédent commercial se gonflerait donc
encore. L’excédent courant, consolidé en 2014, se
stabiliserait en 2015. Du côté des finances
publiques, le déficit budgétaire cesserait de se
réduire. Sans tenir compte des réformes de
M. Renzi (baisses des impôts sur les bas revenus
et de la taxe professionnelle, généralisation de l’indemnité chômage), dont les modalités de financement sont floues, ce déficit stagnerait à 2,9 % du
PIB. La dette publique augmenterait à 135 % du
PIB en 2015.
En Espagne, la sortie de récession se confirmerait.
Le PIB progresserait de 0,8% en 2014 et de 1,3%
en 2015, tiré par les exportations et les investissements en biens d’équipement. La hausse de ces
derniers tiendrait à l’amélioration des résultats des
SNF, liée à l’effondrement de la masse salariale. La
diminution du coût salarial unitaire se poursuivrait, dans un contexte de chômage élevé et de
baisse de charges. Entre 2007 et 2013, les profits
bruts d’amortissement avant impôts des SNF se
sont accrus dc 32,9%, Cette amélioration se poursuivrait. Le taux d’autofinancement des SNF
dépasse 100% en 2013, réduisant l’impératif de
l’accès au crédit. Parallèlement, la dévaluation
salariale et les réformes adoptées depuis trois ans
se traduiraient par un regain de compétitivité. Le
déficit commercial se réduirait donc en 2014. Le
solde courant resterait proche de l’équilibre en
2015. Le dynamisme des exportations stimulerait
l’investissement et, conjuguée à la hausse de la
demande domestique, redresserait les importations. Toutefois, la consommation privée reste
fragile. Les taux d’intérêt et de créances douteuses
élevés limiteraient le crédit. Le taux de chômage,
malgré une légère baisse en février 2014, resterait
supérieur à 25 %. Les salaires réels continueraient
à reculer, mais la légère reprise de l’inflation
empêcherait une spirale déflationniste. La consom-
15
n° 47
Perspectives économiques 2014-2015
Royaume-Uni
0
Comptes extérieurs
Milliards de £ l'an
-20
-40
-60
Balance commerciale
Balance courante
-80
-100
-120
2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014
Source : UK National Statistics
© Coe-Rexecode
mation publique se contracterait encore en 2014 et
stagnerait en 2015. Le déficit public se réduirait à
6% en 2015, et la dette publique dépasserait 100 %
du PIB, ce qui justifierait une austérité freinant la
croissance en 2015.
Au Royaume-Uni, la croissance a accélérée au
rythme de 1.8% en 2013 et afficherait un rythme de
progression supérieur à 2% en 2014 et 2015 grâce à
une politique monétaire très active. La consommation des ménages continuerait d’être dynamique en
2014, soutenue par des effets de richesse positifs
16
liés au rebond des prix de l’immobilier.
L’amélioration du marché du travail et les gains
mensuels réels redeviendraient légèrement positifs
après plusieurs années de baisse, deux évolutions
qui soutiendraient également la consommation des
ménages. Un relais important pour la croissance
sera le redressement attendu du cycle de l’investissement productif. Les entreprises sont en bonne
position pour investir, bénéficiant de conditions de
crédits favorables qui devraient continuer de
s’améliorer en 2014 du fait du recentrage du
programme « Funding for lending » (programme
mis en place par la banque d’Angleterre visant à
soutenir l’investissement à la fois en logement des
ménages et celui des entreprises). Les dépenses de
consommation et l’investissement publics pâtiraient, en revanche, d’une politique budgétaire
restrictive visant à la réduction du déficit public.
Celui-ci atteindrait selon nos estimations 5.8% du
PIB en 2014 et 4.5% en 2015. Enfin, l’amélioration
perçue sur le marché du travail pose la question du
futur de la politique monétaire de Forward
Guidance. Le taux de chômage atteint 7.1% à la fin
de l’année 2013, seulement six mois après l’identification d’une cible de 7 % pour justifier un
mouvement de politique monétaire. Le seuil et
surtout les indicateurs économiques de suivi de la
politique monétaire seront nécessairement révisés.
Nous n’anticipons aucun relèvement de taux directeur avant la mi-2015. ¢
Mars 2014
Situation et perspectives pour 2013 et 2015
Etats-Unis, Japon, économies émergentes
L’activité mondiale s’est renforcée depuis le printemps 2013. Cette tendance se poursuivrait d’ici
2015. Aux Etats-Unis, la croissance a été soutenue en fin d’exercice malgré le « shutdown » et les
intempéries. Elle tournerait autour de 2,5 % cette année et 2,7 % en 2015, soutenue par une
demande des ménages solide et un investissement productif plus dynamisé. Au Japon,
l’Abenomics continuerait de soutenir l’activité mais resterait insuffisant pour que la croissance
s’auto-accélère. La hausse programmée de la TVA à partir du mois d’avril et l’incertitude autour
de la trajectoire des salaires seraient des facteurs de frein. Les économies émergentes, quant à
elles, verraient leur croissance ralentir de nouveau en 2014 sur fond de déséquilibres structurels
avant de se redresser quelque peu en 2015.
Etats-Unis : croissance soutenue
au-delà des intempéries
Encore soutenue en fin d’exercice passé, la croissance paraît s’être modérée au début 2014 aux
Etats-Unis, mais les intempéries à répétition
rendent difficile la lecture des indicateurs. Le ralentissement nous semble devoir être transitoire et
nous conservons notre scénario prévisionnel d’une
croissance moyenne à 2,5 % en 2014. La demande
des ménages devrait continuer d’assurer un socle
solide à la croissance qui devrait ainsi par ailleurs
être davantage dynamisée par l’investissement
productif. En regard de ces forces expansives, des
freins subsistent qui continueront de brider l’activité : la fuite à l’importation d’une part et surtout
le nécessaire rétablissement à poursuivre des
comptes publics qui demeurent lourdement déficitaires.
* * *
Après révision, la croissance du volume du PIB est
estimée à 2,4 % l’an au quatrième trimestre après
4,1 % l’an au trimestre précédent et 2,5 % au
deuxième. La performance reste remarquable alors
qu’avec le « shutdown », les dépenses publiques
en biens et services ont vivement reculé tandis que
l’investissement logement ont chuté en lien avec la
vague de froid qui a traversé le pays en décembre.
Les données pour le trimestre en cours sont encore
parcellaires. Elles sont en outre difficiles à
décrypter avec la succession des intempéries qui
ont touché le pays au cours des mois de janvier et
février. Elles suggèrent un ralentissement de l’activité. Les indices ISM sont sur ces deux mois inférieurs à leur niveau moyen du quatrième trimestre.
Etats-Unis
Taux de marge des sociétés non financières
38
En %
35
32
29
26
2000
2002
2004
2006
2008
Source : Bureau of Economic Analysis
2010
2012
2014
© Coe-Rexecode
17
n° 47
Perspectives économiques 2014-2015
Le ralentissement en cours, qui n’est pas dû
qu’aux intempéries, nous paraît devoir être temporaire et non annonciateur d’une inflexion majeure.
L’équation conjoncturelle demeure la même. La
demande des ménages devrait continuer d’assurer
un socle solide à la croissance qui devrait ainsi par
ailleurs être davantage dynamisée par l’investissement productif. En regard de ces forces expansives, des freins subsistent qui continueront de
brider l’activité : la fuite à l’importation d’une part
Etats-Unis
Taux de chômage
%
10
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01 02 03 04 05 06 07 08 09 10 11 12 13 14
Source : BLS
© Coe-Rexecode
et surtout le nécessaire rétablissement à poursuivre des comptes publics qui demeurent lourdement déficitaires. Nous conservons notre scénario
d’une croissance tournant autour de 2,5 % cette
année, s’affermissant modérément en 2015 à
2,7 %. Les pressions inflationnistes resteraient
modérées de sorte que la Fed aurait le temps
d’ajuster graduellement sa politique monétaire. Si
le taux de chômage tombé à 6,7 % est proche du
seuil à 6,5 % évoqué antérieurement par les
responsables de la Fed à partir duquel les fonds
fédéraux commenceraient à être relevés, le marché
du travail est loin d’être rétabli. La Fed continuerait cette année à réduire avec précaution ses
achats d’actifs, les fonds fédéraux ne seraient pas
relevés avant l’année prochaine, les taux longs
continueraient de se « normaliser » graduellement.
Japon : une croissance
sans réelle accélération
Au Japon, l’Abenomics a donné une impulsion
positive à l’activité économique en 2013. L’impact
des mesures de politique économique exceptionnelles adoptées s’est toutefois atténué au cours de
la seconde moitié de l’année. La demande domes-
18
05C ;-D>
Mars 2014
Japon
Salaire mensuel
Variations sur un an en % (mm3)
6
3
0
-3
cités de production. La mise en place du
plan de relance de 5 000 milliards de yens
(1 % du PIB) pour limiter l’impact négatif
de la hausse de la TVA devrait soutenir l’investissement et la consommation publics, et par
conséquent, la croissance jusqu’à la fin de
l’année fiscale 2014.
Une incertitude forte réside dans l’évolution de la
consommation des ménages. Celle-ci doit encore
s’intensifier au premier trimestre 2014 avant la
hausse de la TVA. Au-delà, sa reprise pourrait s’es-
Nominal
Réel
-6
-9
2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014
!
!
Source : Japan Ministry of Health, Labor and Welfare
© Coe-Rexecode
tique a été le principal moteur tandis que les exportations ont été à la peine malgré la forte baisse du
yen. A court terme, l’activité resterait inscrite sur
une pente positive mais sans réelle accélération. La
clé de la croissance résidera dans la reprise des
exportations et de l’investissement privé. La croissance de la consommation des ménages serait
limitée par la hausse de la TVA de 5 % à 8 % alors
que la trajectoire des salaires demeure incertaine.
*
*
*
A court terme, l’Abenomics continuerait de
soutenir l’activité. Il resterait cependant insuffisant pour que la croissance s’auto-accélère. La
reprise de la demande mondiale et la poursuite
probable de la baisse du yen en lien avec la dégradation des comptes extérieurs contribueront à
stimuler les ventes nippones à l’étranger. Il n’est
pas encore assuré qu’elles permettent d’interrompre la perte de parts de marché subie de
longue date par l’économie japonaise. L’autre
moteur de la croissance viendrait de l’investissement privé. L’ampleur du rebond anticipé de celuici resterait conditionnée par la reprise des exportations, la poursuite de la lutte contre la déflation et
la volonté des entreprises à accroître leurs capa-
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19
n° 47
Perspectives économiques 2014-2015
souffler. Alors que l’économie se rapproche du
plein emploi avec un taux de chômage au plus bas
depuis 1998 (3,9 %) et que les réformes concrètes
du marché du travail tardent à venir, les pressions
salariales devraient en principe s’accentuer. Les
salaires pourraient s’accélérer mais modestement,
insuffisants probablement dans un premier temps
pour compenser la hausse des prix et améliorer, de
façon nette, le pouvoir d’achat du revenu des
ménages. La lutte contre la déflation se poursuivra. Il nécessitera le maintien d’une politique
de réglage conjoncturel ultra accommodante. Si la
Banque du Japon est prête à intensifier la
« Quantitative Easing », la trajectoire de consolidation budgétaire, déjà retardée à plusieurs
reprises, laisse toutefois peu de marges de
manœuvre pour une relance budgétaire de grande
ampleur. L’accent sera ainsi mis sur la « flèche »
structurelle dont les mesures concrètes manquent
encore jusqu’à présent.
Economies émergentes : le ralentissement
se poursuit, les déséquilibres demeurent
A l’exception de l’Asie émergente qui a montré un
renforcement de son activité au cours du second
semestre 2013, celle des autres zones émergentes a
continué de ralentir. La tendance reste au ralentis-
Chine
Investissement en capital fixe
en zones urbaines
40
Sur un an, cumul (en %)
35
30
25
20
sement malgré un environnement mondial s’améliorant. Les déséquilibres demeurent toutefois
nombreux dans plusieurs des principales économies émergentes. Ils pèseront sur la croissance à
court terme (changements structurels en Asie,
vulnérabilité externe en Inde, Indonésie et en
Amérique latine, crise politique en Europe de
l’Est). Les devises des économies émergentes ne
seraient pas en outre à l’abri de nouveaux mouvements de capitaux étrangers en lien avec la politique de la Fed réduisant ses achats d’actifs.
*
*
*
En Chine, le renforcement de l’activité observé à
l’été 2013 a été de courte durée. Sur l’ensemble de
l’exercice écoulé, elle ressort à 7,7 % comme en
2012. La tendance au ralentissement paraît se
poursuivre si l’on se réfère aux statistiques des
trois premiers mois de 2014. Elle paraît en ligne
avec les objectifs de Pékin visant à donner la priorité aux changements structurels. Malgré les incertitudes liées à la solidité du système financier
(endettement élevé des entreprises et des collectivités locales, expansion du « shadow banking »),
la probabilité d’un « hard landing » de l’économie
chinoise nous paraît faible. Malgré sa probable
modération, l’activité resterait sur une tendance
soutenue. La croissance du PIB pourrait s’établir
autour de 7,4 % en 2014 puis se modèrerait à
7,1 % en 2015. La dynamique principale viendrait
de la demande externe. Les exportations bénéficieraient de la reprise de la demande des pays développés. L’investissement jouerait un rôle de moins
en moins important. Sa contribution à la croissance s’atténuerait en faveur de la consommation
privée. Le rééquilibrage du modèle de croissance
resterait lent toutefois. Les ménages à faibles et
moyens revenus continueraient de favoriser
l’épargne compte tenu du coût des dépenses de
santé et des prix de l’immobilier encore élevés.
15
2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014
Source: National Bureau of Statistics
© Coe-Rexecode
20
En Asie émergente, l’activité économique est
restée soutenue en 2013. Elle s’est même renforcée
au cours de la seconde moitié de l’année malgré
les conséquences négatives des turbulences finan-
Mars 2014
Balances courantes (en % du PIB)
6
En %
3
0
-3
-6
-9
Inde
Indonésie
Brésil
Turquie
-12
2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014
Source : calcul Coe-Rexecode
© Coe-Rexecode
cières de l’été 2013. D’ici 2015, le rythme de croissance se modérerait en lien avec le ralentissement
des économies chinoise, indienne et indonésienne.
Il resterait toutefois le plus dynamique au monde,
autour de 6 %. Le principal moteur de la croissance de la zone viendrait de la demande extérieure. L’activité à l’exportation bénéficierait de la
reprise de l’activité des pays développés, notamment des Etats-Unis et du Japon. Sur le plan
domestique, l’absence d’inflation (sauf en Inde et
en Indonésie) et la poursuite des hausses de
salaires soutiendraient la consommation des
ménages. Les perspectives de l’investissement
restent favorables avec l’amélioration graduelle du
climat des affaires. La demande domestique resterait cependant affaiblie en Thaïlande, en Indonésie
et en Inde où les risques politiques et structurels
seraient toujours présents.
Ressaisies depuis le début de l’année, l’ensemble
des devises de la région (y compris des pays
assortis d’excédent courant massif) ne seraient pas
à l’abri de nouveaux mouvements de sorties de
capitaux étrangers en lien avec la politique de la
Fed réduisant ses achats d’actifs. Le risque d’une
crise de change similaire à celle intervenue dans
les années quatre-vingt-dix est cependant à
exclure. La position extérieure de la région est plus
confortable en termes de balance
courante, de dette externe, de réserves de
change mais aussi de gestion et de régulation financière. La vulnérabilité de l’Indonésie
et de l’Inde demeure néanmoins élevée.
En Amérique Latine, la dépréciation des monnaies
exerce un prélèvement sur le pouvoir d’achat,
accentuant le ralentissement de la consommation
privée. Cette situation contribuerait à la décélération des importations en 2014, du fait de l’effet
volume lié aux dépréciations. Les exportations
seraient soutenues par de meilleures perspectives
de croissance aux Etats-Unis et les gains de
compétitivité à l’exportation liés aux dépréciations. La balance commerciale s’est détériorée en
2013 et début 2014 en raison du renchérissement
des importations lié aux dépréciations. Elle
renouerait toutefois avec l’excédent en 2014, du
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21
n° 47
Perspectives économiques 2014-2015
fait de la substitution des importations par une
production domestique, moins onéreuse. Ce
regonflement contribuerait à la résorption des
déséquilibres courants. Le solde courant continuerait néanmoins d’afficher un déficit, maintenant
les principales devises sur une tendance baissière.
Au total, le PIB agrégé des principaux pays de la
zone augmenterait de 1,4 % en 2014 et 2,6 % en
2015. En 2014, Argentine, Chili et Brésil connaîtraient des fléchissements. Le Mexique, plus
arrimé aux Etats-Unis, se démarquerait par une
croissance soutenue. La lutte contre l’inflation
rétablirait la croissance à horizon 2015. Cette
dernière accélérerait en 2014 et se modérerait en
2015. Elle serait sous contrôle au Chili, au
Mexique et en Colombie, mais préoccupante en
Argentine et au Venezuela.
En Europe centrale et orientale, le regain d’activité observé à la fin de l’année 2013 se poursuivrait au sein des pays les plus intégrés avec la
zone euro. En revanche, les perspectives s’assombrissent du côté de la Russie, de la Turquie et de
l’Ukraine.
22
En Russie et en Turquie, les autorités monétaires
ont été contraintes de remonter drastiquement
leur taux directeur au cours des dernières
semaines pour enrayer les sorties de capitaux qui
alimentent la dépréciation du rouble et de la livre.
Ceci nous conduit à réviser à la baisse nos prévisions de croissance pour 2014 et 2015. En Ukraine,
les évènements récents rendent le diagnostic
conjoncturel particulièrement ardu. Si un recul de
l’activité semble probable en 2014, son ampleur
reste difficile à évaluer. Sur le reste de la zone, le
scénario que nous privilégions est toujours celui
de la poursuite d’un redressement progressif de
l’activité au cours des prochains mois. Ceci tiendrait à une reprise modérée en zone euro qui
profiterait aux économies d’Europe de l’est en
stimulant leurs exportations. Un surplus de
demande domestique pourrait également s’opérer.
En effet, l’ampleur des plans d’assainissement des
finances publiques se réduirait considérablement
en 2014 et 2015. En redynamisant les importations,
ceci pourrait renverser d’ici 2015 le mouvement de
résorption des déficits commerciaux entamé en
2012. ¢
Mars 2014
Marchés de matières premières
de taux et de change
Légère hausse des cours du pétrole
Les tensions géopolitiques qui se sont avivées
entre la Russie et l’Ukraine n’ont eu jusqu’ici
pratiquement pas d’impact sur les produits de
base. Cela est à la fois vrai pour les cours du Brent
et pour les prix des autres matières premières.
L’once d’or a poursuivi son redressement sans
aucun emballement. Les prix des métaux
communs, entraînés par ceux du cuivre, se sont
même repliés. Certes, les prix des produits alimentaires ont poursuivi leur envol, ceux des céréales
étant impactés notamment par la crainte d’une
défaillance des exportations de l’Ukraine.
Notre scénario prévisionnel reste le même. Avec
une croissance mondiale de 3,1 % en moyenne en
2014 et 3,5 % en 2015, nous estimons le cours du
pétrole (Brent) à 110 dollars en moyenne en 2014,
à peine au-dessus de 2013 où elle est ressortie à
109 dollars. Pour 2015, nous envisageons une
hausse modeste de 2,6 % à 113 dollars en
moyenne. La production mondiale plafonne à un
niveau record depuis l’été dernier. La marge reste
ainsi confortable s’il fallait répondre à une accélération non prévue de la demande. Elle pourrait
légitimer un scénario baissier sur les prix, scénario
que nous ne retenons pas mais que l’on ne peut
exclure, les cours à un an du WTI restent inférieurs à ceux au comptant. Les Etats-Unis continuent de se diriger vers l’indépendance énergétique. Dans le même temps, le redressement de
l’activité, certes modeste, dans les pays développés et surtout sur la demande chinoise qui a
vocation à encore progresser, ne serait-ce qu’avec
l’envolée du marché automobile se poursuit. Dans
ce pays comme dans les autres émergents, les
consommations d’énergie et de pétrole par habitant restent loin des standards des pays déve-
loppés. Pour les autres produits, nous anticipons
une stabilité sur l’ensemble des deux exercices
projetés : - 2,3 % en 2014 et + 2,7 % en 2015.
Les taux directeurs inchangés
Les taux directeurs des grandes Banques centrales
des pays développés sont restés inchangés. La Fed
a commencé à mettre en œuvre son programme de
réduction d’achats d’actifs au rythme de
10 milliards de dollars par mois et la Banque du
Japon a confirmé qu’elle maintenait ses achats au
rythme de 65 milliards de dollars par mois
environ, son objectif restant le doublement de la
base monétaire à horizon fin 2014 par rapport à fin
2012. La BCE a continué de réduire la taille de son
bilan, laissant se tendre les taux à trois mois qui
sont passés au-dessus des taux américains. Du
côté des pays émergents dont les devises ont été à
nouveau secouées en début d’année, la politique
Cours du pétrole brut (Brent)
150
$/baril
130
110
90
70
50
30
2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014
Source : Wall Street Journal
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23
n° 47
40
Perspectives économiques 2014-2015
Taux des obligations d'Etat à 10 ans
Ecart de taux : ... - Allemagne
En %
35
France
Espagne
Italie
Grèce
Irlande
Portugal
30
25
20
15
Le change euro-dollar
vers sa PPA de 1,28
10
5
0
2011
2012
2013
2014
© Coe-Rexecode
monétaire a été à nouveau durcie afin d’enrayer la
chute de leurs devises et contrer les risques inflationnistes via l’inflation importée.
Aucun relèvement des taux n’est à attendre avant
la fin 2015 en zone euro. Au Japon, le maintien
des taux à zéro est acquis au moins jusque la fin
2014. Au-delà, il est encore trop tôt pour envisager
le cheminement. Aux Etats-Unis, la Fed a calmé
les anticipations de hausse des fonds fédéraux dès
cette année en montrant l’état encore anormalement dégradé du marché du travail pour les standards américains alors que la conjoncture apparaît
moins vigoureuse depuis quelques semaines ce
qui n’est pas dû qu’aux intempéries. Nous conservons la date du début du second semestre 2015
pour un premier relèvement des fonds fédéraux.
Entretemps, l’opération « tapering » se poursuivra
au rythme annoncé de 10 milliards de dollars par
mois.
Les taux longs sur emprunts servant de « valeurrefuge » qui s’étaient tendus jusqu’au tout début
janvier – le dix ans américain passant au-dessus
des 3 % et le dix ans allemand s’approchant des
24
2 %, se sont depuis repliés. Simultanément, la
baisse des taux sur les emprunts émis par les pays
périphériques de la zone euro s’est poursuivie, à
l’exception du taux irlandais. Nous visons un
objectif à 3 % en toute fin 2014 pour le « dix ans
» américain. Le « dix ans » allemand suivrait la
hausse mais de façon amortie. Il pourrait atteindre
2,4 % fin 2014. Les « spreads » se réduiront encore
à l’intérieur de la zone euro.
Après les secousses de l’été dernier sur les devises
des pays émergents dont les comptes courants
étaient déficitaires, le calme était revenu sur les
marchés. La plupart des devises avec les mesures
prises par les autorités se sont stabilisées, voire
même ressaisies. Quelques devises restent fragiles,
notamment celle d’Amérique latine, ainsi que de la
livre turque et du rouble sans parler de la devise
ukrainienne. Le fait nouveau tout récent, et difficile à interpréter pour l’heure, est l’arrêt de la
lente appréciation du yuan contre le dollar, inter-
Taux de change effectif nominal
160
1997=100
150
140
130
Euro
Yen
120
110
100
2011
2012
Source : calcul Coe-Rexecode
2013
2014
© Coe-Rexecode
Mars 2014
venu en janvier et qui laisse même place depuis la
mi-février à une légère dérive baissière, à rebours
de l’unanimité des anticipations. Du côté des
devises des pays développés, l’euro continue de se
renforcer contre le dollar, s’approchant de la ligne
des 1,40. Le yen s’est stabilisé tandis que a poursuivi sa hausse contre le dollar et l’euro.
laissé place à un déficit qui se creuse
avec la dégradation de la balance commerciale. A 103 yens pour un dollar, le taux de
PPA en 2013 pour les prix du PIB, le site de
production japonais n’est pas encore compétitif
et continue de perdre des parts de marché. Nous
visons les 110 yens à horizon fin 2014.
Nous continuons de parier sur un retour du change
de l’euro contre le dollar vers sa PPA sur les prix
du PIB, c’est-à-dire autour de 1,28. L’écart entre les
taux américains et les taux européens devrait
encore croître et la dynamique de l’activité
demeure bien plus nette outre-Atlantique que de ce
côté-ci. En ce qui concerne le yen, la poursuite de
la politique du doublement de la base monétaire
menée par la Banque du Japon ne peut que continuer à rendre le yen plus abondant et donc à affaiblir son change. L’excédent courant a disparu et
De son côté, la devise britannique va cesser de se
renforcer pour même faiblir un peu contre l’euro
et plus encore le dollar en lien avec l’aggravation
des comptes extérieurs. Rappelons que l’OCDE
estime la PPA sur les prix du PIB à 1,44 dollar
pour une livre et à 1,29 pour un euro (moyenne
2013). Pour les monnaies asiatiques, nous n’imaginons pas que le yuan puisse durablement se
déprécier et continuons de parier sur la réévaluation des devises des économies présentant des
comptes extérieurs excédentaires. ¢
25