12 FRANCECatholique N°3054 12 JANVIER 2007

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12 FRANCECatholique N°3054 12 JANVIER 2007
FRANCE
FRANCE
Catholique
Catholique
83 ème année - Hebdomadaire
n°3054 -
12 janvier 2007
www.france-catholique.fr
2,90 €
Jérusalem
centre du
monde
PRESIDENTIELLE
Les chrétiens
et la politique
ŒCUMENISME
L’autorité
dans l’Eglise
CINEMA
Le Grand
Silence,
Terre sainte...
...l’autre Mur
3:HIKLMI=YUW^U[:?n@k@f@e@a;
phénomène
de société
M 01284 - 3054 - F: 2,90 E
ISSN 0015-9506
FRANCE
Un hebdo
engagé
pour l’Amour
et la Vérité
BRÈVES
MONDE
FRANCE
EUROPE : Un sondage effectué par l’Institut Gallup à la demande de la Commission de Bruxelles révèle que les Européens sont de moins en moins satisfaits
de l’euro. 600 milliards d’euros sont actuellement en circulation dans le monde.
La Bulgarie et la Roumanie ont rejoint
l’Union européenne le 1er janvier, tandis
que la Slovénie passait à l’euro. D’après
les chiffres publiés le 5 janvier par Eurostat, le taux de chômage de la zone
euro a atteint en novembre 2006, avec
7,6%, son niveau le plus bas depuis 1993.
NIGERIA : Une explosion survenue sur un
oléoduc à Lagos a fait plus de 300 morts
le 26 décembre.
IRAK : Saddam Hussein a été pendu le
30 décembre à l’aube. L’exécution, filmée
clandestinement, a été montrée sur internet.
ETATS-UNIS : L’ancien président Gérald
Ford est décédé le 27 décembre, à 93 ans.
BIELORUSSIE : Moscou et Minsk ont
signé le 31 décembre un accord de dernière minute sur le prix des livraisons de
gaz russe, mais un nouveau bras de fer
est commencé à propos du pétrole.
PALESTINE : Les forces de sécurité du
président Mahmoud Abbas, ont reçu à
Gaza le 28 décembre des armes en provenance d’Egypte, avec l’accord d’Israël.
ITALIE : Rome a lancé le 29 décembre un
appel d’offres en vue de la cession d’au
moins 30% du capital de la compagnie
aérienne Alitalia.
ESPAGNE : Une voiture piégée a explosé
le 30 décembre au matin dans un parking
de l’aéroport de Madrid, tuant deux personnes. Le gouvernement a annoncé la
suspension de tout contact avec l’Eta
dont une branche avait revendiqué l’attentat.
INDONESIE : Environ 500 personnes ont
été portées disparues le 30 décembre
après le naufrage d’un ferry au large de
l’île de Java.
CLIMAT : D’après l’Office météorologique
britannique, la température moyenne
mondiale devrait atteindre avec 14,5°
degrés un niveau record en 2007. La douceur du climat pèse sur les marchés
pétroliers : le prix du baril pourrait même
chuter à 50 $ contre 78 l’été dernier. Pour
la première fois depuis neuf ans, la
consommation française d’électricité a
baissé de 1% en 2006.
POLITIQUE : Le Conseil supérieur de l’audio-visuel a regretté le 5 janvier que certaines chaînes reproduisent la bipolarisation excessive au profit de S. Royal et N.
Sarkozy.
FISCALITE : Le président de la République
a défini le 4 janvier un programme économique et social pour les cinq ans à
venir, en particulier l’abaissement de 33 à
20% de l’impôt sur les sociétés afin de
lutter contre la concurrence fiscale entre
pays européens. Il a également plaidé
pour le développement des services publics.
LOGEMENTS : Alors que les prix des logements ont atteint des sommets l’an
passé, près de 44% des acquisitions ont
été le fait de ménages modestes. Le
nombre de mises en chantier a établi
cette année un nouveau record à près de
430 000 ; les permis de construire ont
atteint le chiffre de 565 000 environ.
SDF : Nicolas Sarkozy a chargé le 27
décembre l’avocat Arno Klarsfeld d’une
mission sur l’hébergement des sanslogis ; l’avocat a proposé la création dans
les villes de centres "à taille humaine"
avec l’accord des municipalités ; mais il
s’est déclaré hostile aux réquisitions. Les
centres d’accueil seront désormais plus
largement ouverts et le gouvernement
s’est donné pour objectif de passer de
1 100 "places de stabilisation" actuellement à 10 500 fin 2007.
BOURSE : Après avoir enregistré un gain
de plus de 17% en 2006, la bourse
devrait, selon les experts, connaître une
nouvelle année de hausse en 2007 : le
CAC 40 pourrait atteindre jusqu’à 6 300
points en fin d’année ; mais les cours
seront vraisemblablement plus volatiles
en raison des élections présidentielle et
législatives.
SOCIAL : Un projet de loi instaurant un
"bouclier social" pour les très petites entreprises sous forme d’une modification
des charges sociales sera présenté prochainement au conseil des ministres.
La Cour des comptes a demandé fin décembre aux élus du comité d’entreprise
d’EDF de s’expliquer sur une gestion défaillante et des coûts de revient exorbitants ; depuis 1946, les œuvres sociales
des industries électriques et gazières sont
dirigées par la CGT.
JUSTICE : Fait rarissime, trois enfants de
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10 ans pourraient être mis en examen
après expertise psychiatrique pour avoir
allumé volontairement un feu qui a
détruit la ludothèque de Chelles (Seineet-Marne) le 3 janvier.
Le président PS de la région Ile-deFrance, J.P. Huchon, comparaît depuis le
8 janvier devant le tribunal correctionnel
de Paris pour prise illégale d’intérêts dans
la passation de marchés publics.
ACCIDENTS : Trois personnes ont trouvé
la mort le 7 janvier dans un accident
d’hélicoptère en Camargue ; les victimes
ont été écrasées par l’appareil dont les
passagers sont indemnes ; le sous-préfet
des Bouches-du-Rhône a critiqué "l’irresponsabilité" qui a entouré cet accident.
CHOMAGE : Après une pause en octobre,
le nombre de demandeurs d’emploi a repris sa baisse (-0,8% en novembre) à
2 110 000, soit un recul de 10% en un
an ; c’est le niveau le plus bas depuis
juillet 2001. Le taux de chômage au sens
du BIT s’établit à 8,7% de la population
active. D’après un collectif d’associations
qui s’appuie sur une définition plus large
du chômage, le nombre de demandeurs
d’emploi serait proche de 4,5 millions.
SANTE : Un rapport du président de la
Haute Autorité de la Santé sur l’auto–médication, dévoilé le 27 décembre,
entend encourager l’achat direct de
médicaments en pharmacie par les usagers sans passer par le médecin et donc
sans remboursement.
Un décret publié le 23 décembre détaille
le dispositif "bébés–médicaments", procédure autorisant la conception d’un enfant exempt de maladie génétique en vue
de soigner un aîné malade grâce au sang
du placenta ou à un don de moelle
osseuse.
POLYNESIE : Gaston Tong Sang, proche
de Gaston Flosse, a été élu président de la
Polynésie française le 26 décembre ; il
succède à l’indépendantiste Oscar Temaru.
ESPACE : Le satellite français Corot, chercheur de planètes hors du système solaire, a été lancé le 27 décembre de
Baïkonour.
NAVIGATION : Après 41 jours de mer, le
rameur Romain Vergé a coupé le 29 décembre la ligne d’arrivée de l’épreuve
"Rames Guyane 2006" ; il devançait largement les neuf rescapés de la course
partis de St-Louis du Sénégal le 19
novembre.
Jacques LECAILLON
EDITORIAL
SOMMAIRE
ACTUALITÉ
4 AFRIQUE
Somalie, un Afghanistan africain
Tous logés ?
Alice Tulle
6 RETROSPECTIVE
2006, année bioéthique
Tugdual Derville
DOSSIER
8 TERRE SAINTE
Jérusalem, centre du monde
Don Patrick de Laubier
ESPRIT
14
MEMOIRE DES JOURS Libye : non à la barbarie
15
ECCLESIA
Robert Masson
Les chrétiens et la politique
Cardinal Philippe Barbarin
17
LECTURES
18
ESPRIT
20
ŒCUMENISME
Le mariage est-ce si naturel ?
Père Michel Gitton
Lettres de Polunsky Unit n°889
Père Daniel-Ange
L’autorité dans l’Eglise
Père Patrice Mahieu
MAGAZINE
23
LETTRES
Journal, en terminant l’année
26
CINEMA
"Le Grand Silence"
31
CINEMA "Harold Crick", "Le petit peintre..."
Gérard Leclerc
Philip Gröning
"Le serpent", "Une grande année"
Marie-Christine Renaud d’André / Marie-Lorraine Roussel
32
EXPOSITIONS
Katagami
33
EXPOSITIONS
Zaborov : livres éternels
Alain Solari
A.S.
34
THEATRE
35
TELEVISION
36
TELEVISION
38
BLOC-NOTES
Fest’hiver à Avignon
Pierre François
"La traque des nazis"
"Le maître du jeu", "La colline aux mille enfants"
Marie-Christine Renaud d’André
Votre début de soirée
M.-Ch. R. d’A.
Vie associative et d’Eglise
Brigitte Pondaven
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Couverture © CHAUNU
Rendez-vous sur le stand de
France Catholique au salon RELIGIO
du samedi 13 au lundi 15 janvier 2007
de 10 h à 18 h
Espace Champerret - Paris
L’Eglise polonaise
à l’épreuve
a démission de Mgr Stanislas Wielgus, nouvel archevêque de
Varsovie et successeur du cardinal Glemp, juste avant la messe
de son installation, constitue un événement douloureux pour
l’Eglise de Pologne et indique combien est difficile la période qui
succède à la disparition de celui qui fut pour elle un maître
incomparable. Jean-Paul II, en effet, disposait de tout le prestige possible
auprès de ses compatriotes pour mener à bien la délicate transition du
totalitarisme à la liberté. Comment éviter les écueils contraires du relativisme éthique lié d’un côté à la mutation consumériste et de l’autre à un
extrémisme politico-religieux prompt aux repliements idéologiques et à la
désignation de boucs émissaires ? Par ailleurs, tous les pays délivrés du
communisme ont eu à gérer leur passé proche,
en cherchant souvent à éviter l’épuration brutale qui aurait ravivé blessures et rancœurs.
L’ancien président tchèque Vaclav Havel ne
s’était-il pas lui-même montré d’une extrême
prudence à l’égard de ses anciens persécuteurs, sachant que le régime policier qui était
tombé en 1989 avait fait de ses concitoyens à
la fois “des victimes et des coupables” ?
L’ouverture des archives, de Moscou à
par Gérard LECLERC
Berlin, en passant par Varsovie, a non seulement rappelé que la surveillance policière structurait toute la vie sociale
des régimes anciens, mais aussi que la règle d’un tel système supposait la
complicité la plus vaste possible d’individus dévolus, contre leur gré, à un
rôle d’indicateurs. Que l’Eglise polonaise ait été victime de telles pratiques
et que son clergé ait été particulièrement utilisé à de telles fins ne saurait
étonner. Ce jeu avait d’ailleurs des subtilités qui pouvaient se retourner
contre le régime. Dans quelle mesure Mgr Wielgus fut-il victime et coupable ? Peu de gens sauraient vraiment le dire, à un moment où l’utilisation du passé permet les règlements de comptes anciens et des coups justifiés par l’anticléricalisme d’un nouveau genre qui sévit à Varsovie, avec
l’appui de quelques publicistes parisiens, peu soucieux de se mettre au net
avec leur propre passé totalitaire.
La décision prise par l’éphémère successeur du cardinal Glemp, et aussitôt ratifiée par Benoît XVI, est dictée par la sagesse. L’avenir du catholicisme dans la patrie de Stefan Wyszynski et de Karol Wojtyla ne doit
pas être grevé par l’apurement indéfini du passé. Il doit largement s’ouvrir
à des perspectives créatrices, à des projets missionnaires proportionnés
aux enjeux d’un âge qui bouleverse toutes les données. Il faut sortir des
pièges où on voudrait enfoncer le christianisme de ce début de millénaire,
pour lui permettre, conformément à sa vocation, de féconder un avenir à
visage humano-divin. ■
L
FRANCECatholique N°3054 12 JANVIER 2007
D.R.
Yves La Marck
5 SOCIAL
3
ACTUALITE
CORNE DE L’AFRIQUE
Somalie
un Afghanistan
africain
L’histoire récente de la Somalie n’est pas sans analogies
avec celle de l’Afghanistan. Les leçons de l’une devraient
empêcher de nouvelles erreurs pour l’autre.
a séquence des événements est un classique :
partage du pays entre des
chefs de guerre, réaction
unitaire islamiste, ici les
étudiants (taliban), là les tribunaux (charia), puis renversement
du pouvoir déconsidéré par ses
excès fondamentalistes, instauration d’un pouvoir semi-démocratique avec appui occidental,
direct et indirect via un protecteur régional, ici le Pakistan, là
l’Ethiopie. Le pouvoir légal,
soutenu par la communauté
internationale, ne peut alors
durer qu’en s’appuyant à nouveau sur les ex-chefs de guerre.
Les trafics continuent, mais au
moins les "experts" étrangers
peuvent opérer contre les réseaux terroristes. Le pouvoir
apparent contrôle les villes principales. Le pays demeure organisé traditionnellement selon les
divisions en clans et sous-clans.
La négociation interne est le seul
mode de gouvernement reconnu.
La Somalie présente un intérêt stratégique rigoureusement
parallèle à celui de l’Afghanistan.
Les deux pays sont équidistants
par rapport au centre constitué
par l’Irak et le Golfe. Ce sont les
deux abris idéaux pour les réseaux terroristes voulant prendre
le Moyen-Orient en tenaille. Il
est impérieux pour Washington
de contrôler et l’un et l’autre.
C’est aujourd’hui chose faite. Les
Etats-Unis reviennent de loin
dans les deux cas. Personne n’a
oublié la piteuse expédition de
L
(
Mogadiscio immortalisée par le
cinéma (La chute du faucon noir).
La prise de la même ville treize
ans plus tard depuis l’Ethiopie
est vécue comme une revanche
de l’Histoire. Les bases de ce
retournement sont cependant
fragiles.
L’influence américaine y est prépondérante. On ne peut en dire
autant du Pakistan, créé idéologiquement comme Etat national musulman.
Il faut compter avec l’inimitié ancestrale entre Ethiopiens et
Somaliens. “Ramené dans les
L’Ethiopie est un allié auquel
on peut faire plus de confiance
que le Pakistan. Certes, elle
compte environ une moitié de
musulmans à l’intérieur de sa
population, ce qui est souvent
méconnu, y compris une partie
purement somalie (l’Ogaden,
objet de vieilles luttes longues et
sanglantes). Le pouvoir d’AddisAbeba demeure néanmoins
identifié comme "chrétien".
fourgons de l’étranger”, le
gouvernement formé à Nairobi
en 2004 et péniblement installé
dans une bourgade frontalière,
Baidoa, va devoir faire la
preuve qu’il peut tenir tout seul.
Il ne le peut donc qu’en négociant avec les ex-chefs de guerre
et les clans. Venant du Nord, il
est automatiquement associé
aux Darods dominant dans
l’Ogaden dont la colonisation
Personne n’a oublié la piteuse expédition
de Mogasdiscio immortalisée par le cinéma
4 FRANCECatholique N°3054 12 JANVIER 2007
par Yves LA MARCK
somalie est elle-même venue du
Nord, c’est-à-dire de l’actuel
Somaliland, Etat quasiment indépendant depuis l’effondrement de l’Etat Somalien en 1991.
Un troisième morceau, le Puntland, intermédiaire, vit également sa vie propre. L’un des
enjeux du nouveau gouvernement sera de savoir s’il est capable de fédérer ces trois
démembrements. Washington,
souvent sollicité de reconnaître
le Somaliland, avait sagement
attendu...
Si les Ethiopiens ne sont pas
les bienvenus, un retour visible des Occidentaux, Américains
en tête, susciterait des réactions de rejet
violentes. La
solution sera
recherchée
dans un cadre
multilatéral.
Comme au
Darfour, l’Union Africaine
a été sollicitée
pour servir de
relais à l’ONU.
Rwandais, Ougandais, SudAfricains, Sahéliens
de l’Ouest, qui sait ? seront
approchés pour fournir des
contingents chargés de policer
Mogadiscio à la place d’autres
nationalités trop blanches, ou
trop voisines...
La communauté internationale doit avancer avant que la
résistance ne se réorganise, les
milices, comme en Afghanistan,
ayant préféré gagner le désert
plutôt que de livrer bataille. Ainsi
demeurent-elles presque intactes. Gare à la retraite des
vainqueurs d’aujourd’hui ! ■
ACTUALITE
LEGISLATION
par Alice TULLE
Tous logés ?
ur la question du logement des personnes
sans abri, les promesses
des dirigeants politiques ont été nombreuses et déterminées. Dans un
livre-programme (1) publié en
1994, Jacques Chirac constatait
que "plusieurs millions de nos
compatriotes privés d’emploi, de
logement… sont sur la pente de
l’exclusion" (p. 48) et concluait :
"Maire d’une grande ville, je
connais trop leur détresse pour
n’être pas résolu à agir vite"
(p. 83). Mais l’action entreprise
par le docteur Xavier Emmanuelli
à la tête du ministère à l’Action
humanitaire n’avait pas été déterminante.
Le Parti socialiste s’était engagé en 2002 à résoudre la question, mais en juillet 2006 Bertrand
Delanoë, maire de Paris, avait fait
prestement déménager les sansabri qui vivaient sous des tentes
plantées au bord de la Seine . Le
18 décembre dernier, des SDF qui
campaient sous le pont d’Austerlitz avaient été chassés – alors
que l’action des "Enfants de don
Quichotte” était lancée depuis
48 heures.
Cette association récemment
créée a pris pour devise une
phrase du P. Joseph Wrésinski :
« Là où les hommes sont condamnés à vivre dans la misère, les
droits de l’homme sont violés.
S’unir pour les faire respecter est
un devoir sacré ». Et il est vrai
que sa charte a été signée par
des personnalités très diverses.
Elle a installé des tentes le long
du canal St-Martin, convié des
vedettes, alerté la presse et la
S
traditionnelle complainte médiatique sur les pauvres pendant les
fêtes s’est transformée pendant
la non moins traditionnelle trêve
des confiseurs en affaire politique de première importance.
A toutes les étapes de la
mobilisation en faveur des sans
abris, la télévision a joué un rôle
décisif et certaines associations
humanitaires qui agissent depuis
des années dans l’indifférence
quasi-générale en ont éprouvé
une compréhensible amertume.
Mais le fait est que le gouvernement veut agir vite.
Après consultation des organisations humanitaires (Secours
catholique, Emmaüs...) et d’associations de défense des mal logés
et des sans abri, après lecture du
tout dernier rapport (le 12ème)
commandé à Xavier Emmanuelli,
fondateur du Samu Social et président du Haut Comité pour le
logement des personnes défavorisées, le Premier ministre a annoncé le 3
janvier
qu’un projet de loi sera présenté
à l’Assemblée nationale à l’issue
du Conseil des ministres du 17
du même mois.
Principale disposition envisagée : l’institution d’un droit
au logement opposable. Le principe est simple : lorsqu’un droit
est déclaré "opposable" tout citoyen privé de ce droit peut saisir
la justice.
Le "droit à un logement digne
et décent" avait été reconnu par
la loi Besson de 1990 et, en 1995,
"la possibilité pour toute personne
de disposer d’un logement décent"
a été proclamée "principe à valeur
constitutionnelle". L’idée de
rendre ce droit opposable n’est
pas nouvelle : J.-P. Raffarin en
était partisan et, en septembre
2005, Christine Boutin avait déposé une proposition de loi en ce
sens.
Il ne fait pas de doute, désormais, que le projet sera voté
par la majorité et probablement
par la gauche. La question du
logement sera-t-elle résolue
pour autant ?
Malheureusement pas tout
de suite : le droit au logement ne
crée pas automatiquement les
logements qui permettront de
donner satisfaction aux requérants. D’ailleurs, Xavier Emmanuelli estime à six ans "le temps
minimum nécessaire" pour répondre aux besoins à partir du
moment où le droit au logement
opposable sera institué.
Le 3 janvier, Dominique de
Villepin a prévenu qu’il faudra
être patient car ce droit opposable "pourra être mis en oeuvre
dès la fin de l’année 2008" pour
les personnes en grande difficulté (sans domicile fixe, femme
seule avec enfant…) et à partir
du 1er janvier 2012 pour l’ensemble des mal-logés.
Mais la patience n’est pas la
principale qualité des associations très médiatisées qui ont
occupé un immeuble vide du
centre de Paris pour y installer un
"ministère de la crise du logement". La pression sur le gouvernement ne retombera pas de
sitôt. ■
La complainte médiatique sur les pauvres
s’est transformée en affaire politique
(
Grâce à l’appui décisif des chaînes de télévision,"Les Enfants
de don Quichotte" vont faire reconnaître par le législateur un
“droit au logement opposable” dont on parlait depuis longtemps.
FRANCECatholique N°3054 12 JANVIER 2007
5
ACTUALITE
RETROSPECTIVE
2006, année b
Les controverses
liées à la vie et
à la famille se sont
multipliées en 2006,
dessinant une ligne
de fracture politique
dont l’humanité
est l’enjeu.
Début de la vie
En France, alors que le débat
sur l’avortement semblait interdit,
des statistiques tendent à le réveiller. Malgré un taux record d’usage de la contraception, on
découvre en septembre que l’IVG a
grimpé encore de 3,6% de 2003 à
2004. La contradiction n’est qu’apparente : la mentalité contraceptive fait peser sur les femmes une
injonction "morale" à n’accueillir
que les enfants "programmés". Les
techniques de contraception ont
une forte "efficacité théorique"
mais leur "efficacité pratique" est
aléatoire : les "accidents de contraception" sont les premiers mobiles
de l’IVG.
Entre 1990 et 2003, l’avortement des 15-17 ans a augmenté de
32% ! Face à ce constat, une fuite
en avant se dessine : un tiers des
filles de 15 à 24 ans ont déjà pris
la pilule du lendemain Norlevo,
produit aux effets mal connus,
partiellement anti-nidatoire, donc
abortif précoce. Un million de
boites ont été diffusées en 2005 et
la tendance est à la hausse. Que le
Norlevo qu’on présentait comme
(
un recours exceptionnel se banalise comme "oral de rattrapage"
interroge les professionnels de
l’éducation : serait-il déresponsabilisant ? Fin 2006 les autorités
sanitaires préconisent de rendre
libre et gratuite la contraception
pour les mineures, au risque d’amputer davantage la mission éducative des parents.
seuls… où à émigrer. Les "féministes" occidentales découvrent
qu’un geste conçu comme libératoire pour les femmes en fait les
premières victimes. Un reportage
diffusé en octobre sur Arte estime
à cent millions le nombre de
femmes manquantes en Asie.
Dans le monde, le contraste
des situations révèle un malaise :
au Portugal, interminable débat
avant un nouveau référendum sur
l’avortement (qui reste quasi illégal) ; en Espagne, scandale des
filières catalanes d’avortements
tardifs (jusqu’au 8e mois !) ; en
Grande-Bretagne rejet d’une proposition de loi qui aurait réduit le
délai légal qui demeure donc à 22
semaines ; en Pologne étude d’un
projet visant à rendre l’avortement
inconstitutionnel ; aux Etats-Unis
interrogations sur le renouvellement de la Cour suprême américaine et l’initiative du Dakota du
Sud interdisant l’avortement. C’est
d’Asie que pourrait venir la prise de
conscience : le 2 août, un militant
chinois des droits de l’homme est
condamné pour avoir dénoncé des
milliers d’avortements forcés. En
Inde, c’est un charnier de fœtus de
sexe féminin qui est découvert
pendant l’été. Dans ces pays
comme au Pakistan les avortements sélectifs des filles (illégaux)
ont pris des proportions gigantesques à mesure des progrès du
dépistage prénatal du sexe. Un
déséquilibre de la pyramide démographique y induit des problèmes
ingérables, compte tenu du nombre
d’hommes condamnés à vivre
En France, alors que les dernières lois bioéthiques se mettent
en place, c’est à l’approche du 20e
Téléthon que s’ouvre une controverse inédite.
Le décret d’application permettant l’expérimentation sur les
embryons "surnuméraires" est
signé le 7 février. Pour Mgr André
Vingt-Trois "on nous fait rêver d’un
avenir fantasmatique où l’on pourrait guérir les maladies de Parkinson ou d’Alzheimer. Il s’agit d’un
acte de foi que l’on n’oserait pas
demander dans le domaine religieux". Le professeur Marc Peschanki est le premier chercheur à
mettre en œuvre cette transgression en France. Qu’il le fasse avec
le financement de l’Association
Française contre les Myopathies
(AFM) qui héberge son laboratoire
n’est pas étranger à la polémique
ouverte avant le Téléthon 2006. A
partir d’une note de l’observatoire
sociopolitique du diocèse de Toulon, des évêques mettent en cause
l’usage des fonds récoltés. Ils pointent la chosification de l’embryon
humain par la recherche et la pratique du DPI (Diagnostic préimplantatoire ou tri embryonnaire),
une technique revendiquée par
l’AFM et qui s’est développée grâce
aux résultats de la recherche.
Science & bioéthique
A cause de l’avortement sélectif des filles, 100
millions de femmes seraient manquantes en Asie
6 FRANCECatholique N°3054 12 JANVIER 2007
Même si l’Eglise est accusée d’inhumanité, elle a su – sans que s’effondrent les dons à l’AFM – briser
le silence sur une dérive inquiétante : est-il "thérapeutique" de
supprimer des malades au stade
précoce de leur existence ?
Avec l’échographie, les tests
sanguins, l’amniocentèse et l’avortement "médical" ce sont les personnes trisomiques qu’on tend
déjà à éradiquer. Un système de
santé très "protecteur" a tellement
accru la surveillance des grossesses, qu’elle les rend de plus en plus
"anxiogènes"… et sélectives.
Le 27 septembre, on découvre
que le DPI est désormais utilisé à
Strasbourg pour certaines prédispositions génétiques au cancer.
Cette nouvelle option divise les
scientifiques. La France est l’un des
pays du monde qui "flirte" le plus
avec l’eugénisme avoue le professeur Didier Sicard. Président du Comité consultatif national d’éthique,
il affirme pourtant à propos des
positions de l’Eglise sur l’embryon
qu’elle "n’a pas le droit d’en faire
une manifestation publique".
Rendu à la veille du Téléthon
un rapport parlementaire préconise de généraliser l’expérimentation sur l’embryon et de légaliser
le clonage pour la recherche, renommé "transposition nucléaire"
pour échapper à l’opprobre qui
pèse sur le mot.
Aux Etats-Unis, le 19 Juillet,
le président Bush exerce son premier véto historique contre le financement public de la recherche
sur l’embryon. Ce succès est attribué aux lobbies religieux. De son
côté, le Vatican organise en septembre un congrès scientifique
international sur les potentialités
des cellules souches adultes. Un
ACTUALITE
par Tugdual DERVILLE
changement de ton est alors observé chez les journalistes spécialisés : pourquoi des recherches
ayant déjà fait leur preuve et éthiquement neutres ne bénéficientelles pas de la médiatisation et des
financements obtenus par la recherche embryonnaire qui n’a pour
le moment donné aucun résultat ?
Une "fascination" douteuse pour
l’embryon est suspectée.
Définition de la famille
& sexualité
En France, le débat s’est focalisé sur la légalisation du mariage
entre personnes de même sexe
assortie d’un droit à l’adoption
d’enfants.
Le non-lieu prononcé le 27
septembre sur l’affaire Sébastien
Nouchet (un homme qui s’était dit
victime d’une atroce agression en
raison de son homosexualité) suggère que c’est sans-doute une
tentative de suicide qui nous a valu
le dispositif de lutte contre l’homophobie intégré à la loi à la suite
de ce drame. Quant aux "mariés"
emblématiques de Bègles, ils sont
condamnés en octobre pour escroquerie…
De son côté, le député Christian Vanneste est condamné le 12
décembre pour avoir jugé l’homosexualité "inférieure" à l’hétérosexualité. Sa liberté d’expression
a été sacrifiée sur l’autel du politiquement correct. Mais les députés rejettent un amendement qui
prétendait aligner la fiscalité du
Pacs sur le mariage.
L’année 2006 aura surtout vu
se cristalliser les prises de position
préélectorales : le 9 juin, le ralliement de Ségolène Royal au mariage et à l’adoption homosexuels
lève le dernier obstacle à son adou-
bement par le PS. Même Lionel
Jospin la suit fin août dans ce revirement (il envisage alors d’être
candidat). A droite, François
Bayrou reste au milieu du gué en
proposant "l’adoption simple".
Nicolas Sarkozy tente le compromis avec une Union civile, en mairie mais sans adoption. Les affiches
de Philippe de Villiers contestent
"le mariage homo" et Jean-Marie
Le Pen, qui reste hostile au mariage
gay, dit s’accommoder du Pacs. La
plupart de ces postures traduisent
une érosion de l’opinion, surtout
chez les plus jeunes. Pourtant, selon le sondage Ifop commandité
en novembre par l’Appel des
maires pour l’enfance (12 563
signataires), 74% des maires se
disent hostiles au mariage et à
l’adoption homosexuels et 81 %
souhaitent "maintenir le modèle
parental avec un père et une mère
au nom de l'intérêt de l'enfant".
Leur prise de position rejoint celle
de l’entente parlementaire réunie
sur le même thème derrière le député Jean-Marc Nesme (174 signataires le 11 janvier 2006, et près de
300 fin 2006, tous de la majorité).
Des personnes homosexuelles
n’attendent pas la loi pour utiliser
des systèmes de procréation artificielle (inséminations "bricolées"
en privé, ou modalités plus techniques obtenues à l’étranger) et
faire valoir les nouvelles revendications que les dérives bioéthiques
leur ouvrent. Pour la troisième fois,
une adoption simple est prononcée
en octobre (à Belfort) pour la
"compagne" d’une femme ayant
conçu en Belgique un enfant par
insémination artificielle.
La Belgique achève de légaliser l’adoption homosexuelle le 20
avril, rejoignant des pays d’Europe
du nord, l’Angleterre et l’Espagne.
Dans un tout autre domaine,
l’approche de la coupe du monde
de Football déclenche le scandale
sexuel planétaire de l’année : une
gigantesque maison close s’est
ouverte près d’un stade. En Allemagne, la prostitution est légale
et l’on parle de dizaines de milliers
de prostituées "importées" des pays
de l’Est. Des pays abolitionnistes –
qui considèrent que la prostitution
porte atteinte à la dignité humaine
– menacent l’événement sportif de
boycott. Dès le match d’ouverture,
le sport reprend ses droits...
Fin de vie & euthanasie
En France, le procès de Berck
n’aura pas lieu. Le 2 janvier 2006,
le procureur de Béthune prononce
un double non-lieu pour Marie
Humbert et le docteur Chaussoy
27 mois après l’euthanasie de Vincent Humbert. Son motif : une
"contrainte psychologique" aurait
pesé sur la mère de Vincent, par
"la pression" de son fils, et sur le
médecin réanimateur par les médias. A la fois déçus et soulagés les
bénéficiaires des non-lieux se
mobilisent : une pièce de théâtre
prétendant jouer le procès est présentée à la mairie de Paris le 17
septembre par l’association "Faut
qu’on s’active" ; un téléfilm, réalisé
à l’automne 2006, doit diffuser en
2007 sur TF1 une version orientée
de l’affaire.
Le lobby de l’euthanasie se
rabat sur un autre fait divers, celui
C’est d’Italie qu’est venue, en
toute fin d’année, une nouvelle
affaire à retentissement international. Après qu’il a demandé en
vain à la Justice d’ordonner son
euthanasie Piergiorgio Welby,
sexagénaire atteint d'une dystrophie musculaire incurable meurt
cinq jours avant Noël : son médecin anesthésiste a débranché le
respirateur qui le maintenait en
vie depuis des années.
Comme pour l’euthanasie de
Terri Schiavo en 2005, l’Eglise se
prononce au plus haut niveau
contre le suicide assisté de M.
Welby, et le cardinal Ruini, tout en
proposant une messe d’intercession, refuse à la famille du défunt
des obsèques religieuses. Critiquée, sa position vise à défendre
la dignité des personnes dépendantes et à ne pas cautionner un
geste suicidaire. Une fois encore
la liberté de l’Eglise se manifeste
face aux mises en demeure du
monde… et aux pressions médiatiques. ■
81% des maires souhaitent maintenir le
modèle parental avec un père et une mère
(
ioéthique
de Dordogne. Cette fois, la Justice
ne peut se dérober sous peine de
provoquer une dépénalisation jurisprudentielle de l’euthanasie. Le
18 mai, Chantal Chanel et Laurence
Tramois, respectivement infirmière
et médecin, sont logiquement
renvoyées en Cour d’Assise pour
l’euthanasie de Paulette Drouais.
Leur procès devrait se dérouler en
mars 2007, avant les élections
présidentielles…
Pendant ce temps, l’Association pour le Droit de Mourir dans
la Dignité (ADMD) obtient au
mois d’août un agrément ministériel national pour représenter
les usagers des hôpitaux dans
leurs instances officielles. L’Alliance pour les Droits de la Vie
porte l’affaire devant la justice
administrative et lance un "Appel
contre le lobby de l’euthanasie à
l’hôpital".
FRANCECatholique N°3054 12 JANVIER 2007
7
DOSSIER
Jérusalem
centre du m
par Don Patrick
de LAUBIER
Le 1er janvier, dans un discours qui
citait la dernière guerre du Liban, le
Pape a adressé ses vœux au monde,
“en particulier à ceux qui sont dans
la douleur et dans la souffrance, à
ceux qui vivent menacés par la
violence et par la force des armes”.
Il a développé sa conception de “la
personne humaine, cœur de la paix”.
“S'il est vrai que la paix entre les
individus et entre les peuples —
capacité de vivre les uns à côté des
autres en tissant des relations de
justice et de solidarité — représente
un engagement qui ne connaît pas
de répit, il est aussi vrai, et même
encore plus vrai, que la paix est un
don de Dieu [...] C'est un point qu'il
faut rappeler avec clarté: une guerre
au nom de Dieu n'est jamais
acceptable !” Après Ratisbonne
et Istanbul, beaucoup ont émis
l’hypothèse que la prochaine
étape de ce discours sur
l’alliance de la raison et de la
foi contre les idéologies
meurtrières, pourrait bien être
Jérusalem. C’est en tout cas
dans cette perspective que
nous rouvrons ce dossier.
8 FRANCECatholique N°3054 12 JANVIER 2007
e centre du monde ? Il se trouve à Jérusalem : de Sion l’on dira tout homme y est
né (ps 87). D’année en année on peut
constater l’extraordinaire importance
religieuse, politique et même économique du Moyen Orient dont le centre spirituel
est incontestablement Jérusalem ville du monothéisme, ville trois fois sainte : pour le judaïsme,
le christianisme et l’islam.
La bibliothèque d’ouvrages sur la situation actuelle en Israël ne cesse de s’enrichir et il semble
que tout a été dit. Pourtant certains témoins méritent encore d’être entendus parce que leurs diagnostics sont confirmés par les faits. On ne s’improvise pas prophète, mais l’expérience et une
certaine connaturalité née de la sympathie et
même de l’amour, permettent de voir plus clair.
Nous en retiendrons deux, le Père Marcel Dubois (1) , dominicain vivant à Jérusalem depuis
1962, grand prix d’Israël, et Jimmy Carter (2) ancien président des Etats-Unis (1977-1981), qui
avait obtenu en 1978 un traité de paix entre
l’Egypte et Israël signé par Anouar el-Sadate,
Menahem Begin et lui-même. Le prix Nobel de la
paix lui fut attribué en 2002 pour son action au
service de la paix dans le monde.
L’un et l’autre ont montré combien ils étaient
attachés à Israël et leurs diagnostics sur la condition palestinienne
méritent d’autant
plus l’attention que
des guerres civiles
menacent de se multiplier dans la région
en risquant de créer
un chaos très dangereux pour Israël mais
aussi pour le monde.
On se souvient que la
première guerre mondiale a été déclenchée
par un attentat à Sarajevo qui se produisit
L
DOSSIER
© HUBERT DEBBASCH
onde
dans les Balkans en proie à des conflits incessants.
Aujourd’hui un nouvel élément capital intervient : la religion. Au XXe siècle, des idéologies
antireligieuses avaient caractérisé les totalitarismes ; au siècle suivant, c’est au nom de la religion que la politique s’avance masquée et bientôt
ce qui n’était qu’un prétexte est en train de devenir la cause principale.
La situation géopolitique en Palestine
Rappelons d’abord la déclaration établissant
l’Etat d’Israël le 14 mai 1948 : L’Etat d’Israël sera
ouvert à l’immigration juive et en vue de l’accueil
des exilés ; il développera le pays dans l’intérêt de
ses habitants, il sera basé sur la liberté, la justice
et la paix dans l’esprit des prophètes d’Israël ; il
assurera l’égalité des droits sociaux et politiques
de tous ses habitants quels que soient leur religion, leur race ou leur sexe ; il garantira la liberté
de religion, de conscience, de langue, d’éducation
et de culture ; il assurera la garantie des lieux
saints de toutes les religions et sera fidèle aux
principes de la Charte des Nations unies.
Dès les discussions préparatoires de 1947,
environ 55% de la Palestine avaient été donnés
C’est au
nom de la
religion que
la politique
s’avance
masquée
au futur Etat juif. Après la guerre de 1948, l’armistice de 1949 donna à l’Etat d’Israël 77% de la
Palestine. En 1967, Israël, menacé par quatre
Etats arabes, occupa les hauteurs de Golan, Gaza,
le Sinaï et la Cisjordanie avec Jérusalem. Six mois
plus tard, la résolution 242 des Nations unies exigea, en vain, d’Israël le retrait des territoires occupés. En 1973, l’Egypte et la Syrie attaquèrent
Israël par surprise, mais furent repoussées. Grâce
aux efforts de l’administration Carter, alors président, des contacts furent rétablis entre Israël et
l’Egypte. Le Sinaï fut rendu à l’Egypte qui signa
un traité de paix avec Israël en 1979, mais les
autres Etats arabes refusèrent de s’engager. Le
processus de paix sur la base de la résolution 242
des Nations Unies prévoyait un accord de paix
entre les belligérants et l’autonomie de la
Cisjordanie et de Gaza.
Depuis 1967, Israël occupe donc la Cisjordanie dont la frontière avec Israël est maintenant
longée par un mur qui ne suit pas celle de 1967
pour pouvoir inclure des colonies israéliennes qui
se sont aussi multipliées en Cisjordanie. (3)
L’évacuation récente des colonies de Gaza ne
signifie pas pour les habitants de cette parcelle,
pourtant en bordure de mer et du désert égyptien
du Sinaï, une liberté d’action extérieure, car l’Etat
d’Israël contrôle étroitement ses frontières.
FRANCECatholique N°3054 12 JANVIER 2007
9
© HUBERT DEBBASCH
DOSSIER
Mur des lamentations
En Cisjordanie, les colonies continuent à se
fonder illégalement, mais avec l’appui d’instances
administratives. Quatre cents barrages entravent
les communications et constituent une source
permanente d’humiliations pour une population
privée de citoyenneté et vivant dans la misère.
On se trouve aujourd’hui dans la situation suivante : 9,4 millions de Palestiniens se répartissent
ainsi : 3,7 millions vivent en Cisjordanie et à Gaza,
200 000 à Jérusalem Est, 1 million en Israël et
4,5 millions réfugiés dans d’autres pays. A Gaza,
A Gaza,
les 90.000
habitants de
1948 sont
maintenant
1,4 million
Lettre du Pape aux chrétiens du Moyen Orient
(25 décembre 2006 - extraits)
Comme il vous a été dit, très chers frères et sœurs, j’espère vivement que la
Providence fasse que les circonstances permettent mon pèlerinage sur la Terre
restée sainte des événements de l’Histoire du Salut. J’espère aussi pouvoir prier
à Jérusalem, “patrie de cœur de tous les descendants spirituels d’Abraham, pour
qui elle est très chère” (Jean-Paul II, Redemptionis anno, 1984). Je suis en effet
convaincu qu’elle peut devenir “un symbole de rencontre, d’union et de paix
pour toute la famille humaine (…)” La paix est un bien suffisamment grand et
urgent pour justifier des sacrifices aussi grands de la part de tous.
Et c’est pourquoi il faut honorer et reconnaître les droits de tous. Et Jean-Paul II
ajoutait : “Il n’y a pas de justice sans pardon.” Normalement, si on ne transige
pas sur les erreurs passées, on ne pourra arriver à un accord qui permettrait de
rouvrir le dialogue en vue d’une future collaboration. Le pardon, dans ce cas,
est la condition indispensable pour être libre de projeter un nouveau futur. Du
pardon concédé et accueilli peuvent naître et se développer tant d’œuvres de
solidarité, dans le sillage de celles qui existent déjà amplement dans votre
région, du fait des initiatives de l’Église, comme des gouvernements et des
instances non gouvernementales. ■
10 FRANCECatholique N°3054 12 JANVIER 2007
les 90 000 habitants de 1948 sont maintenant
1,4 million avec une croissance démographique
de 4,5 % par an.
Le principe de la formation d’un Etat palestinien est maintenant acquis; ce qui ne l’est pas est
le tracé des frontières et sa réalisation effective.
Dans les territoires occupés, deux forces politiques palestiniennes sont en présence, l’Organisation pour la libération de la Palestine (OLP)
et le Mouvement de résistance islamique
(HAMAS).
L’OLP a été créée en 1964 par Arafat dans un
esprit essentiellement politique. Chassée de
Jordanie en 1970 (septembre noir), elle renonça
au terrorisme et se vit reconnaître en 1980 par
l’Union Européenne. En 1993, eut lieu l’échange
de reconnaissance entre l’OLP et Israël et le prix
Nobel de la paix fut attribué à Arafat et Rabin qui
fut assassiné l’année suivante par un juif.
La Charte de l’OLP (1968) assure que : Sur le
plan spirituel, la libération de la Palestine créera
en Terre sainte une atmosphère de paix et de tranquillité, assurant la sauvegarde de toutes les institutions religieuses, et la garantie de la liberté du
culte… sans discrimination et sans distinction de
race, de langue et de religion. C’est pourquoi le
peuple palestinien attend le soutien de toutes les
forces spirituelles dans le monde (16).
Le peuple arabe palestinien s’exprimant par sa
révolution armée, rejette toute solution de rem-
DOSSIER
© HUBERT DEBBASCH
Tombe de Y. Arafat à Ramallah
© RYAN BEILER
placement à la libération totale de la Palestine…
celle de l’OLP qui est essentiellement politique :
la libération de la Palestine détruira la présence
Le prophète… a dit "Le Temps ne viendra pas avant
sioniste et impérialiste et contribuera à l’instauraque les musulmans ne combattent les juifs et ne
tion de la paix au Proche Orient et dans le monde
les tuent”. Le Hamas considère le nationalisme
entier (21).
comme une part intégrante de la foi religieuse : Il
En 1993, à Oslo, Israël et l’OLP se sont reconn’y a rien de plus noble et de plus profond dans le
nus mutuellement.
nationalisme que de mener le jihad contre l’enneLe Hamas a été fondé en 1988 par Ahmed
mi et de l’affronter dès qu’il pose le pied sur la
Yassine qui fut assassiné en
terre des musulmans. (12)
2004 par Israël qui avait
il n’y a pas de solution
commencé par favoriser le
au problème palestinien, si
mouvement afin de l’oppoce n’est par le jihad (13) au
ser à l’OLP. Il constitue une
sein du conflit contre le
sorte de branche palestisionisme mondial, le
nienne des Frères musulHamas se considère
mans d’origine égyptienne.
comme le fer de lance et
Son inspiration est essenl’avant-garde…
tiellement religieuse, il se
propose d’établir la charia
et refuse de reconnaître
Israël et la condition
l’Etat d’Israël. Ses premières
palestinienne
attaques terroristes datent Confrontation entre partisans du Hamas
et forces de l’ordre présidentielles à Gaza
de 1994 (500 entre 2000
Voyons maintenant comet 2006). L’Union Européenne déclara le Hamas
ment les Israéliens et les Palestiniens vivent cette
organisation terroriste en 2003. Trois ans plus
situation compliquée.
tard, en janvier 2006, ce dernier obtenait une
Le Père Marcel Dubois s’exprime ainsi : L’ercourte mais tout de même spectaculaire victoire
reur de la droite israélienne en particulier est de
électorale.
confondre le choix nationaliste et le dessein de
Sa Charte, qui fut adoptée en 1988, revêt une
Dieu. Chez ceux qui fondent les nouvelles implansignification d’abord religieuse contrairement à
tations, il y a une espèce de nostalgie religieuse
FRANCECatholique N°3054 12 JANVIER 2007
11
© HUBERT DEBBASCH
© RYAN BEILER
© MICHEL VEUTHEY
© MICHEL VEUTHEY
Commentaires de Jeff Halper,
Check point à Ramallah
12 FRANCECatholique N°3054 12 JANVIER 2007
© MICHEL VEUTHEY
«Dans un “blog” (Virtual Talmud) le rabbin Elyahu Stern a comparé Jimmy Carter
avec les juifs orthodoxes qui ont fait cause commune avec le président Ahmadinejad
qui a organisé une conférence visant à nier l’existence de la Shoah. Cette
comparaison est vraiment pathétique si elle est motivée par le seul titre de l’ouvrage
de Carter : Palestine : Paix et non Apartheid. L’emploi par Carter du terme
"apartheid" pour décrire ce qui se passe depuis 40 ans dans les territoires occupés par
Israël, est à la fois exact et utile. Exact pare que l’apartheid est une réalité en
Palestine occupée par Israël. Quest-ce que l’apartheid ? C’est la séparation forcée de
populations quand un peuple établit un régime de domination permanente et
structurée sur un autre (que ce soit pour des raisons raciales comme ce fut le cas en
Afrique du Sud, ou pour des motifs d’ordre national ou religieux comme l’Etat
d’Israël le pratique). Cet apartheid est exactement ce qu’Israël met en œuvre en
annexant des blocs de colonies considérables derrière des murs et des barrières
électrifiées. Je ne comprends même pas quelle "controverse" il peut y avoir à ce
sujet.Il suffit d’aller en Cisjordanie, à Gaza ou à Jérusalem Est et d’ouvrir les yeux.
L’usage de ce mot par Carter est utile parce qu’il permet de donner un nom à la
chose : apartheid est le seul terme qui désigne les caractères systémiques du régime
de domination établi par Israël. Ce n’est pas seulement une politique, ou une réponse
au terrorisme ou une occupation, c’est très précisément un système de contrôle
pensé et délibéré. L’Etat d’Israël désigne lui-même sa politique par un mot (hafrata)
qui signifie séparation, et finalement apartheid. Il faut même remercier Carter de
nous donner une manière de désigner cette situation. Arrêtons les discussions
sémantiques et décidons d’arrêter cette politique. Les juifs, nouveaux Afrikaners !
Voilà une pensée qui donne froid dans le dos ! » ■
© HUBERT DEBBASCH
coordinateur du Comité israélien contre les démolitions des maisons (palestiniennes).
Ce Comité est basé à Jérusalem.
DOSSIER
fanatique, le sentiment qu’“on va sur une terre qui
est nôtre", l’on renoue avec le passé sur une terre
que Dieu nous a donnée. Et cependant, au départ,
ce sont les juifs religieux qui ont le plus résisté au
sionisme ! En effet les moyens que les colons
emploient sont infidèles à la vocation d’Israël. (4)
Plus loin il ajoute : en Terre sainte, actuellement, le débat est faussement théologique. Il est
évidemment politique. Ce sont des nationalismes
qui s’affrontent et qui trouvent pour justifier leur
antagonisme, des arguments puisés dans des
aveuglements religieux ou des différences religieuses de foi à foi. (5)
Et il conclut en ces termes : Comme chrétien, je
me suis réjoui de la pensée que le peuple de la
Bible retrouve la terre de la Bible, mais la tragédie
actuelle réside en l’infidélité de ceux qui conduisent le destin d’Israël vers un destin terrestre de
réussite, de violence et de conquête. (6)
Ecoutons maintenant Jimmy Carter qui
connaît la situation des Palestiniens pour l’avoir
lui-même observée depuis les années 1970 :
Nombre de Palestiniens, écrit-il, affirment être
privés des droits de l’homme les plus élémentaires.
Ils ne peuvent se réunir pacifiquement, voyager
sans restrictions ni posséder des biens sans risquer
d’en être dépossédé au moyen d’une multitude de
ruses légales. En tant que peuple, ils sont stigmatisés par les autorités officielles comme des terroristes, et la plus légère marque de mécontentement leur vaut les plus sévères sanctions des
autorités militaires. Ils se plaignent des arrestations sans procès pour de longues périodes, avec
parfois des tortures pour obtenir des aveux ; certains sont exécutés et les procès se déroulent avec
leurs accusateurs en place de juges. Leurs propres
juristes ne peuvent les défendre devant les instances israéliennes et les procédures de recours en
appel sont coûteuses longues et en général n’aboutissent pas. Les démonstrations contre les
abus israéliens provoquent des arrestations de
masse, même s’il s’agit d’enfants qui jettent des
pierres ou des spectateurs non impliqués dans les
démonstrations, ou encore les familles des manifestants, il suffit même qui d’être connu pour tenir
des propos hostiles à l’occupation… cette politique consistant à faire des milliers de prisonniers
finit par affecter toutes les familles et être la
source d’un vif ressentiment. (7) On compte officiellement 10 000 Palestiniens prisonniers dans
les prisons israéliennes.
L’ouvrage de l’ancien président a provoqué de
vives critiques dans les milieux juifs américains,
notamment l’expression d’apartheid et on a
contesté l’exactitude de ses informations. .Jimmy
Carter a répliqué en disant : Ayant voyagé pendant 33 ans en Terre Sainte, en particulier dans les
territoires occupés, j’étais qualifié pour décrire la
situation en utilisant mes propres observations…
J. Carter explique que cet apartheid n’est pas
à proprement parler un racisme mais l’expression
d’une volonté de la part d’une minorité d’Israéliens de s’emparer des terres des Palestiniens et
d’utiliser la violence pour arriver à leurs fins. Cependant la comparaison, voire l’assimilation avec
les Afrikaners en Afrique du Sud n’est pas loin...
Elle fait d’ailleurs l’objet de nombreux débats
dans la presse et sur internet en Israël, et la propagande pacifiste ou palestinienne s’en font l’écho jusque par des slogans sur le mur lui-même.
Quant à la nomination récente, comme vicepremier ministre d’Avigdor Libermann, chef du
parti extrémiste Israël Beitenou ("Israël notre
maison", parti des russophones), elle a provoqué
le commentaire suivant du journal israélien Haaretz : Choisir le dirigeant le plus irresponsable et le
plus dépourvu de retenue pour occuper la fonction
de ministre des "menaces stratégiques" constitue
en soi une menace stratégique. L’absence de modération d’Avigdor Libermann et ses déclarations
intempestives - comparables seulement à celles
du président de l’Iran - risquent de provoquer un
désastre dans toute la région. (9)
On
compte
officiellement
10000
Palestiniens
On voit par ces témoignages, comment se
pose la question palestinienne. La solution est
prisonniers bien difficile à formuler pratiquement, mais il
faut commencer par voir la réalité pour éviter
dans les
que des rêves tournent au cauchemar.
prisons
Le centre du monde est aussi le miroir de la
situation
Partout on entend des cliqueisraéliennes tis d’armesmondiale.
effrayants et des cris de guerre .
Benoît XVI a annoncé un voyage en Israël
lorsque les circonstances le permettront. Ce sera
le troisième pape à s’y rendre depuis que Pierre
l’a quittée pour Antioche puis Rome. Le Christ
avait dit : vous ne me verrez plus jusqu’à ce que
vous disiez : Béni soit celui qui vient au nom du
Seigneur. Les successeurs de Pierre "doux Christ
de la terre" (Catherine de Sienne) préparent, dans
l’espérance, la venue de Celui qui doit venir. ■
48 HEURE POUR LA TERRE SAINTE
Journée d'entraide au profit de la Terre
Sainte organisée par l'Ordre du SaintSépulcre de Jérusalem, les samedi et
dimanche 10 et 11 mars.
Vente au profit des chrétiens de Terre
Sainte à Notre-Dame de Grâce de
Passy, 8 bis, rue de l'Annoncation Paris
16e, métro La Muette ou Passy.
Nombreux comptoirs, vaste choix :
l'intégralité de la recette de ces 48 h
pour la Terre Sainte sera envoyé pour
les besoins de première urgence :
écoles, maternités, hôpitaux.
(1) Marcel-Jacques Dubois, Nostalgie d’Israël,
entretiens avec Olivier-Thomas Venard, avec la
collaboration d’Annie Laurent, Cerf 2006. Robert Masson en a fait un compte rendu dans FC.
(2) Jimmy Carter, Palestine, Peace not Apartheid,
Simon Schuster NY 2006
(3) Selon des calculs officiels 40% des terres
colonisées ont été prises sur des domaines appartenant à des Arabes.
(4) op.cit p.113
(5) ibidem p.128
(6) ibidemp.167
(7) op.cit p.118-119
(8) Jimmy Carter, Lettre du 15 décembre 2006 à
l’intention de la communauté juive (américaine)
à propos de son ouvrage Peace not Apartheid.
(9) Haaretz, Tel Aviv 24 octobre 2006, cité dans
Le Monde diplomatique, décembre 2006.
FRANCECatholique N°3054 12 JANVIER 2007
13
ESPRIT
En
mémoire des jours
Non à la barbarie
Par
Robert Masson
tupeur dans le monde,
après ces verdicts d’iniquité, rendus à l’encontre de cinq infirmières bulgares, et d’un médecin palestinien, accusés sans preuve
d’avoir inoculé le virus du
sida à des enfants dont ils
avaient la charge.
L’affaire remonte à pusieurs
années déjà, et elle avait entraîné une première condamnation à mort devant la protestation internationale Tripoli avait dû reculer mais il
n'avait pas renoncé. Les vices
de forme et de fond sautent
aux yeux de tous, et aussi
bien les mobiles. Qu'est-ce
qui aurait bien pu pousser ces
auxiliaires de santé à commettre un crime sans nom et
sans raison ? Des centaines
d’enfants en effet avaient été
contaminés, et quelques dizaines d’entre eux sont déjà
morts. Mais les responsables
de ce malheur n’étaient pas
ceux qu’on prétendait. C’est
du côté des hôpitaux libyens
qu’il aurait fallu regarder. Les
spécialistes en tous cas sont
unanimes dans leur conclusion : c’est bien l’état déplorable des hôpitaux, et non les
services de santé qu’il faudrait incriminer. Et non des
personnes livrées à la vindicte
publique, dans des procé-
S
dures qui n’avaient rien à voir
avec ce qu’on appelle la justice.
A preuve ce deuxième procès aussi inique que le premier. De grandes compétences avaient rendu leurs
conclusions, dont les juges
ne tinrent aucun compte. Ce
n’est pas la justice dont il
s'agit mais de sa parodie.
Le problème c’est que ceux
qu’on traînait sur des bancs
de justice étaient des boucs
émissaires. Rien n’a manqué
dans ces procédures barbares. Pas même la torture,
sous sa forme la plus effroyable. Les femmes en effet,
étaient soumises à tous les
traitements, y compris le viol.
Autant de procédés sans rapport avec la dignité humaine.
Un premier procès s’était
déroulé, et avait abouti à des
condamnations à mort. La
réprobation fut telle dans le
monde qu’il fallu tout recommencer, mais dans les
mêmes conditions. Et avec,
bien sûr, les mêmes résultats.
Comment aurait-il pu en être
autrement dans un pays où
ce n’est pas vraiment la justice que l’on rend. On est en
présence d’une pratique barbare, qui en dit assez sur la
nature du régime qui l’inspire. Il est totalitaire, au sens
le plus exact des mots. Les
défenseurs du droit humain
ne devraient pas se tromper
de contestations. Ce n’est
pas la clémence qu’il faut
demander pour ces condamnés, mais leur libération, et
qu’on engage enfin dans la
réforme des services hospitaliers. Il y a évidemment urgence, car les sentences sont
tombées, et rien ne dit qu’on
ne les exécutera pas. L’affaire
a de quoi embarrasser Kadhafi, qui espérait depuis un
14 FRANCECatholique N°3054 12 JANVIER 2007
moment donner une image
de lui-même un peu plus
engageante. Il avait pour
cela renoncé à poursuivre
plus avant les recherches
atomiques. Il donnait à croire
qu’il n’était plus l’une des
incarnations du mal, aux
yeux de Washington et aussi
aux nôtres. On avait fini par
faire reconnaître à Tripoli ses
responsabilités dans les affreux attentats dont nos
avions avaient souffert.
Le procès à charge qui
vient de se dérouler à Bengazi est là pour nous rappeler
un devoir de vigilance et de
stricte humanité. De la manière la plus ferme, nos gouvernants devraient donner de
la voix. Sans autre préoccupation que le respect élémentaire de la justice. On
peut craindre des faiblesses
de notre côté. La Libye tient
une place sans rapport avec
sa puissance effective. Il y a
d’abord le pétrole. Il y a aussi
les émigrations de la faim,
qui poussent des populations
entières à émigrer à travers
les sables libyens, dans l’espoir d’atteindre les rivages de
nos lieux d’opulence : Kadhafi n’est sans doute pas
fâché d’avoir un rôle à jouer
comme sentinelle. Toutes ces
raisons ne sauraient justifier
une quelconque indulgence.
Il est grand temps de faire
part à Tripoli de notre détermination.
On aimerait parler d’autre
chose, en ces jours de Nouvel
An. Jadis, on respectait ainsi,
à des moments semblables
"des trêves de Dieu". Les
hommes hélas, ont rendu
plus fragiles les plus simples
espérances. Les forces obscures qui nous habitent ne
rendent pas facilement les
armes.
Parfois il y a malgré tout
de bonnes surprises. Comme
au Turkménistan, où la dictature sommaire de Saparmourat Niazov alias Turkmenbashi, s’effondre. Elle ne
savait guère qu’élever des
statues revêtues d’or, à l’effigie du maître des lieux. Sans
souci des situations réelles
d’un peuple, qui est parmi les
plus pauvres du monde. C’est
sans illusion sur la suite des
temps, où l’on peut se souhaiter les uns aux autres, des
vœux de Nouvel An.
Demain ne sera pas plus
propice qu’hier probablement. Dieu veille qu’il ne le
soit pas moins. Et qu’on
renonce à toutes ces potences, en haut desquelles
des innocents parfois se balancent. Notre monde a
grand besoin d’apprendre les
chemins de la justice. Mais
pas comme on les entend à
Tripoli, ou en d’autres lieux
de notre univers.
L’actualité n'est pas non
plus pour nous de tout repos.
Elle ne le fut jamais. Raison
de plus de travailler à l’avenir
d’un monde un peu plus pacifié. Au fait, saurons-nous
faire le lien avec nos responsabilités de citoyens, où nous
serons appelés à faire des
choix d'importance cette
année ? Privilège dans un
univers en état d’urgence.
Il se fait tard à l’horloge de
notre histoire, mais pas au
point de céder à la tentation
du renoncement. Le véritable
enjeu, c’est la cause de
l’homme. Celle dont De
Gaulle disait qu’elle l’emportait sur tout le reste. On en
sait quelque chose, à Tripoli
et à l’hôpital de Benghazi, en
ces heures incertaines où il
en va de la barbarie et de la
civilisation. ■
IRAK
L’engagement politique
L
© F. LESPES
es "présidentielles" et les "législatives" occupent déjà
la première place dans les médias, et cela va durer
plusieurs mois. De fait, l’enjeu est important, car il
touche la vie sociale et l’équilibre politique de notre pays.
Les disciples du Christ prennent leur place dans ces débats,
et beaucoup s’y engagent personnellement. Ils apportent
leur contribution à la réflexion commune et, dans le secret
ou dans les rassemblements communautaires, ils prient à
par Philippe Barbarin
cette intention. Les évêques de France ont écrit, il y a deux
mois déjà, un texte intitulé Qu’as-tu fait de ton frère ?, qui parcourt l’ensemble des
questions et y porte un regard chrétien.
En tant qu’institution, l’Église garde une certaine distance par rapport à la campagne, tout en y étant attentive, car sa mission est de servir la société, et tout ce
qui touche l’homme la concerne. Une phrase de Benoît XVI, tirée de l’encyclique
Dieu est amour, peut lui servir de boussole en ce domaine : "L’Église ne peut ni ne
doit prendre en main la bataille politique pour édifier une société la plus juste
possible. Elle ne peut ni ne doit se mettre à la place de l’Etat. Mais elle ne peut ni
ne doit non plus rester à l’écart de la lutte pour la justice. Elle doit s’insérer en elle
par la voie de l’argumentation rationnelle et elle doit réveiller les forces spirituelles
sans lesquelles la justice, qui requiert aussi des renoncements, ne peut s’affirmer ni
se développer…"
Notre témoignage de chrétiens peut être en ce moment d’énoncer les points qui
nous paraissent les plus importants pour le bien commun, pour la bonne marche
de notre pays et son avenir, et d’expliquer pourquoi.
Nous avons par exemple besoin d’un État fort qui ne se laisse pas influencer par
la pression des lobbyes et qui organise la vie commune. À la base de la vie sociale,
il y a le respect de la vie humaine et la famille. Le Code civil lui-même énonce cet
engagement majeur : "La loi garantit le respect de l’être humain dès le commencement de la vie". Comment se fait-il que depuis trente ans, on permette tant
d’exceptions à cet article ? Pour l’instruction des enfants et l’éducation des jeunes
à la liberté, l’attente est grande, aussi bien dans les familles que dans le corps
social. Personnellement, c’est une grâce que je demande au Seigneur : le renouveau des congrégations vouées à l’éducation ou l’apparition de nouvelles
initiatives en ce domaine.
Un second point est celui du travail et de sa juste rémunération. Tous les partis
sont attentifs à la souffrance que représente le chômage. C’est justice que chacun
trouve sa place dans le service et la construction de la société. Pour cela, il faut
s’opposer à un capitalisme qui deviendrait purement financier.
La question de l’immigration demande aussi un nouveau positionnement. Elle
appelle des mesures intérieures pour assurer la possibilité de vivre ensemble et
garantir la paix sociale. Mais elle ne sera jamais résolue si l’on ne remonte pas aux
causes, au niveau d’une concertation internationale qui fasse sortir chaque pays de
ses intérêts propres. Si l’on ne s’y attaque pas, le dramatique déséquilibre des
ressources dans notre planète continuera d’appauvrir les pays les plus pauvres, de
les priver de leurs élites, et personne ne pourra empêcher les pauvres de quitter
leur pays pour tenter leur chance dans un monde occidental qu’on leur présente
comme un mirage.
La sonnette d’alarme des menaces écologiques est maintenant tirée. Tout le
monde comprend qu’il ne s’agit pas d’une lubie des "verts", mais d’un enjeu vital
pour la survie du genre humain. L’engagement écologique rencontre une forte résonance dans le cœur des croyants. Respecter la création et ne pas voler les générations futures, c’est un devoir que Dieu nous fait.
Il faudrait aussi arriver à s’expliquer sur la place des Eglises et des religions, dans
A l’annonce de l’exécution de Saddam Hussein, le P. Federico Lombardi,
sj, directeur de la salle de presse du
Saint-Siège, a déclaré le 30 décembre :
«Une exécution capitale est toujours
une nouvelle tragique, un motif de
tristesse, même lorsqu’il s’agit d’une
personne qui s’est rendue coupable de
graves crimes » ajoutant : « La position
de l’Eglise catholique, contre la peine
de mort, a été répétée à plusieurs reprises. Le fait de tuer le coupable n’est
pas la voie pour reconstruire la justice
et pour réconcilier la société. Il y a au
contraire le risque d’alimenter l’esprit
de vengeance et que l’on sème une
nouvelle violence » [...] « En cette
époque sombre de la vie du peuple
irakien, on ne peut que souhaiter que
tous les responsables fassent vraiment
tous les efforts possibles afin que dans
une situation dramatique il y ait enfin
des ouvertures vers la réconciliation et
la paix ».
ZF07010103
TAIZÉ
La communauté de Taizé animera
sa 30e rencontre européenne de jeunes
à Genève entre Noël et le Nouvel an
2007. Elle répond ainsi à l'invitation
conjointe des Eglises protestantes et catholique de Genève et du canton de
Vaud.
La nouvelle a été communiquée par
frère Alois, successeur de frère Roger,
au cours de la prière du soir du 30 décembre aux 40.000 jeunes qui ont participé à la rencontre européenne à Zagreb jusqu’au 1er janvier.
Frère Alois a annoncé aussi qu'une
rencontre latino-américaine de jeunes
aura lieu du 10 au 14 octobre à Cochabamba, en Bolivie.
Les dernières rencontres ont eu lieu
à Lisbonne, Hambourg, Milan, et Zagreb en 2006.
ZF07010106
POLOGNE
Le nouvel archevêque de Varsovie,
Mgr Stanislaw Wielgus, 67 ans, et qui
avait pris ses fonctions vendredi 5
janvier, a été contraint le dimanche
FRANCECatholique N°3054 12 JANVIER 2007 15
la société. Le mot "laïcité" a des sens tellement variés - et contradictoires dans la
bouche de ses différents utilisateurs ! La construction de l’Europe, où se mêlent
des traditions diverses, peut aider la France à trouver en ce domaine un chemin
nouveau.
L’influence d’un citoyen peut paraître minime, si elle se limite à son bulletin de
vote. Mais l’action d’un chrétien ne saurait s’arrêter à l’accomplissement de son
devoir électoral. Nul ne doit minimiser sa responsabilité. La communauté chrétienne encourage tous ses membres, en particulier les jeunes, à s’engager dans la
"chose politique" (res publica). Le Pape Pie XI nous a éclairés en affirmant que
l’engagement politique est la forme suprême de la charité.
Pour autant, les chrétiens n’oublient pas qu’ils ont d’abord pour mission de
"toujours prier sans se décourager" (Luc 18, 1). Prions donc pour les candidats aux
élections présidentielles, législatives ou municipales. Ce n’est pas facile de prier
pour ceux que l’on regarde comme des adversaires ou des dangers pour la vie
sociale. Prions aussi pour les électeurs, afin que leur choix soit inspiré par l’amour
des autres et le bien commun, plutôt que par l’intérêt personnel. Il est heureux
que l’on entende ces intentions à la prière universelle, au cours de nos eucharisties ; j’espère qu’elles ont aussi place dans le secret de notre prière personnelle.
Nous avons mission de prier pour l’ensemble de la société civile, afin qu’elle vive
les mois à venir comme un vrai débat où les convictions de chacun puissent être
exprimées librement et dans le respect des autres. On peut prier dès maintenant
pour ceux qui seront élus car les responsabilités qui les attendent sont grandes et
difficiles à exercer. Les chrétiens qui assument la responsabilité de gouverner ou
de légiférer ont particulièrement besoin de notre aide et de notre soutien dans
leur travail. Ils sont appelés à montrer une cohérence entre leur foi et leur
engagement, l’esprit de l’Évangile et le service de la société actuelle. Puissent-ils,
comme dit le Concile, "Mener toutes leurs activités terrestres en unissant dans
une vivante synthèse tous les efforts humains, familiaux, professionnels,
scientifiques ou techniques, et les valeurs religieuses, sous la haute ordonnance
desquelles tout est coordonné à la gloire de Dieu". (1)
Cardinal Philippe Barbarin
Archevêque de Lyon
(1) Gaudium et Spes, 43. Voir aussi Questions sur l’engagement et le comportement des catholiques dans la
vie politique, Note doctrinale de la Congrégation pour la Doctrine de la foi, in La Documentation catholique,
2 février 2003, n° 2285.
suivant à la démission, une démission
acceptée par Benoît XVI.
L’archevêque n’a donc pas été
«installé» et la messe prévue en la
cathédrale Saint-Jean-Baptiste de Varsovie, a été une messe d’action de
grâce célébrée par le cardinal Glemp.
On se souvient que face aux accusations récurrentes lancées contre le
nouvel archevêque nommé le 6 décembre dernier, le Saint-Siège avait
jusqu’ici réaffirmé la confiance de Benoît XVI dans le successeur du cardinal
Josef Glemp, qui prenait sa retraite, à
77 ans, tout en conservant son titre de
Primat de Pologne.
Or, selon une commission d'enquête de l'Eglise catholique polonaise,
Mgr Wielgus a été recruté par la police
secrète polonaise, la SB en 1967, alors
qu'il étudiait la philosophie à l'Université catholique de Lublin.
Cependant, la commission ne fait
état d’aucun rapport écrit de sa main et
n'a pas établi que ses rapports oraux
aux services communistes aient nuit à
quelqu’un.
La note de la nonciature se réfère à
l’article du Code de droit canonique de
l’Eglise latine selon lequel « l'évêque
diocésain qui, en raison d'une maladie
ou d'une autre cause grave, se trouve
16 FRANCECatholique N°3054 12 JANVIER 2007
moins apte à l'accomplissement de sa
fonction est vivement invité à présenter
sa démission » (canon 401, § 2).
Dans sa longue homélie, le cardinal
Glemp a déploré, la façon dont les accusations ont été lancées contre Mgr
Wielgus.
ZF07010703
Le directeur de la salle de presse du
Saint-Siège, le P. Federico Lombardi,
sj, a reconnu, au micro de Radio Vatican, que « le comportement de Mgr
Wielgus dans les années du régime
communiste en Pologne a compromis
gravement son autorité, y compris auprès des fidèles. C’est pourquoi, en dépit de son humble et émouvante demande de pardon, le renoncement au
siège de Varsovie et sa prompte acceptation par le Saint-Père sont apparues
comme une solution adéquate pour
faire face à la situation de désorientation qui s’était créée dans cette nation ».
Pour le porte-parole du Saint-Siège,
l’Eglise de Pologne a maintenant besoin de la solidarité de toute l’Eglise.
« C’est, ajoutait-il, un moment de
grande souffrance pour une Eglise à
laquelle nous devons tous beaucoup,
et qui nous a donné des pasteurs de la
grandeur du cardinal Wyszynski et sur-
tout du pape Jean-Paul II. L’Eglise
universelle doit se sentir spirituellement solidaire de l’Eglise qui est en Pologne, et l’accompagner de sa prière
en l’encourageant, afin qu’elle puisse
retrouver promptement sa sérénité ».
Mais surtout le P. Lombardi dénonçait une manœuvre des anciens persécuteurs de l’Eglise en disant : « En
même temps, il est bon d’observer que
le cas de Mgr Wielgus n’est pas le premier et probablement ne sera pas le
dernier cas d’une attaque contre une
personnalité de l’Eglise sur la base de
documents des services du régime
passé. Il s’agit d’un matériel immense
et, tout en cherchant à en évaluer la
valeur et à en tirer des conclusions
fiables, il ne faut pas oublier qu’il a été
produit par des fonctionnaires d’un régime oppresseur et maître chanteur ».
« A tant d’années de distance de la
fin du régime communiste, une fois
disparue la grande figure inattaquable
du pape Jean-Paul II, la vague actuelle
d’attaques contre l’Eglise catholique de
Pologne, revêt l’aspect d’une étrange
alliance entre les persécuteurs d’alors
et d’autres adversaires de l’Eglise, et
plus l’aspect d’une vengeance de la
part de qui ont été défaits par la foi et
par la volonté de liberté du peuple
polonais, que celui d’une recherche
sincère de transparence et de vérité ».
ZF07010704
RDC
Le cardinal Frédéric Etsou-NzabiBamungwabi, archevêque de Kinshasa,
âgé de 76 ans, est décédé le 6 janvier
dans un hôpital de Louvain, en Belgique, où il avait été hospitalisé il y a
quelques mois.
Originaire du Zaïre, religieux de la
congrégation du Cœur immaculé de
Marie, le cardinal Etsou avait été ordonné prêtre en 1958. Il avait été
nommé évêque coadjuteur de Mbandaka en 1976. Archevêque de Kinshasa depuis 1990, il avait été créé cardinal par Jean-Paul II en 1991.
Avec la disparition du cardinal Etsou, le collège cardinalice compte 185
cardinaux dont 111 électeurs et 74 non
électeurs.
ZF07010705
Vous pouvez envoyer votre
cotisation 2007 (20 euros)
à l’ADCC (60, rue de Fontenay
92350 Le Plessis-Robinson),
association qui soutient
France Catholique.
LECTURES
2ÈME DIMANCHE DU TEMPS ORDINAIRE
Année C
Le mariage,
est-ce si naturel ?
par le Père Michel GITTON
a lecture de ce dimanche nous fait entendre le récit des Noces
de Cana. On peut certes commenter cette page d’évangile de
bien des manières, on peut y voir, avec saint Jean, le premier
des "signes" de Jésus, exemplaire de tous les miracles ultérieurs, y
remarquer le rôle de Marie, "femme" jouant le rôle d’aide intelligente jadis départi à Eve, y contempler l’Epoux véritable donné à
l’humanité, lorsque l’"heure" (son Heure) sera venue et qu’il pourra
partager largement le vin généreux de sa Passion...
Mais il ne faut quand même pas oublier que tout ceci se déroule
à l’occasion d’une noce villageoise, à laquelle Jésus et ses disciples,
ainsi que Marie, étaient invités, des cousins sans doute, habitant
Cana, non loin de Nazareth. Si Jésus a accepté cette invitation et si
le banquet de noces fut le cadre de son premier miracle, il est
difficile de penser que le mariage, dans sa réalité humaine, ne soit
pas concerné de quelque façon par sa présence.
Il est frappant que le mariage de ces deux-là qui ce jour-là
unissaient leur vie pour fonder une famille ait abouti à un manque :
le vin, signe de joie, "vint à manquer". Le mariage, promesse de
bonheur que se font un homme et une femme, risque de tourner
court, si le Christ n’y intervient pas.
Et comment y intervient-il ? En prenant ce qui semble à première
vue bien éloigné de la joie, l’eau, sans doute nécessaire à la vie, mais
passablement insipide. Il fait de cette eau, tirée non sans effort du
puits, eau du don de soi et du sacrifice, la matière du miracle, pour
en obtenir du vin, un vin capiteux, excellent, bien supérieur à celui
qui manquait, un vin surtout qui n’est pas près de se tarir.
Il est difficile de ne pas voir là l’annonce du sacrement de
mariage, qui transforme l’attente humaine, encore impuissante, en
un don plénier. Il s’agit de passer de cette attente de bonheur, que
comporte toute promesse de mariage, en un don définitif fondé sur
celui du Christ, qui a donné sa vie pour son Epouse. Lui seul,
comme nous l’explique saint Paul, a pu aller jusqu’à l’aimer dans ce
moment où elle n’avait plus rien d’attirant, plus rien d’aimable, où
elle le rejetait. Son amour à lui, crucifié, maintenu dans l’extrême
d’une totale "dissymétrie", et maintenant ressuscité, rend possible
aux époux chrétiens un amour inconditionnel, qui ne dépend plus
de conditions extérieures, et qui peut donc être irrévocable ; c’est
ainsi qu’il peut permettre d’affronter le sentiment d’être seul à
donner, seul à rester fidèle.
Et là est le secret paradoxal du bonheur, car ce don maintenu,
peut transfigurer l’amour, il peut souvent le faire renaître, là où il
paraissait définitivement compromis. C’est un vin plus riche, qui
n’exclue pas les larmes, mais leur donne un sens.
On nous dit, et c’est vrai, que le mariage est "de droit naturel",
c’est-à-dire qu’il a toujours existé à l’horizon des noces humaines. Et
pour cause : l’union indissoluble d’un homme et d’une femme pour
donner ensemble la vie résulte du plan créateur de Dieu, et correspond profondément à la requête du cœur humain Mais avouons que
dans la pratique, ce n’est pas cela qui existe. Toutes les religions,
toutes les cultures, toutes les législations ont accepté la polygamie
(au moins successive, c’est-à-dire le divorce). Il a suffi que l’influence
sociale du christianisme régresse pour qu’on voie revenir au grand
jour les aberrations qu’avait connues le monde antique. Seul le Christ
peut assurer à l’amour humain, si grand et si fragile, son avenir.
Osons proposer tout à la fois, nous n’en aurons pas fait assez en
insistant sur les valeurs humaines de l’amour et du mariage, il faut
partager la foi, qui seule rend possible l’impossible. ■
L
ESPRIT
COULOIRS DE LA MORT
Lettres de Polunsky
par le Père DANIEL-ANGE
fondateur de l’école d’évangélisation Jeunesse-Lumière
Condamné à mort pour
un meurtre qu’il n’a pas
commis, Roger MacGowen
croupit depuis vingt ans
dans les couloirs de la
mort au Texas. Le Père
Daniel-Ange correspond
régulièrement avec lui.
e 13 décembre dernier, en Floride, Angel Diaz était mis à
mort par injection létale. Le
processus s'enraye. Il lui faut
34 mn pour mourir. La mort
prend le temps de torturer sa victime
sous les yeux de témoins qui croyaient
assister à l'élimination "propre" - et
pourquoi pas "humaine" ? - d'un coupable. Et voilà que la souffrance lui restitue aux yeux de tous, ce que le couloir
de la mort lui avait arraché : sa dignité
d'homme. La Floride décide jusqu'à nouvel ordre, la suspension des exécutions.
Lueur possible pour Roger et tous
ceux qui comme lui, essaient de survivre
en espérant ne pas être exécutés ?
Roger : matricule n° 889 au milieu
des ombres dans l'enfer de Polunsky
Unit (Texas). Une âme, une grande âme
comme il en existe peu… Voilà qui vient
bousculer notre prêt à penser : "s'il est
là, c'est qu'il l'a cherché", "Il n'y a pas de
fumée sans feu"... Il y a surtout de
sombres détours qui peuvent définitivement fracasser le cours d'une existence.
Roger est né dans un des pires ghettos
de Houston. A 22 ans, il gère un petit
restaurant. Il prête sa voiture à son frère
et son cousin qui commettent un holdup : la tenancière d'un bar est tuée. La
C
(
Le 23 décembre 2006,
Roger a “fêté”
son 43e anniversaire
à Polunsky Unit…
police recherche le propriétaire de la
voiture : Roger est arrêté. Croyant son
frère coupable, il se tait pour le protéger.
D'avocats commis d'office en irrégularités graves dans le procès, Roger est
envoyé dans le couloir de la mort. Il a
alors 23 ans… c'était il y a 20 ans.
A Jeunesse-Lumière (2), nous avons le
Nous avons le privilège de correspondre
avec lui depuis maintenant trois ans
18 FRANCECatholique N°3054 12 JANVIER 2007
privilège de correspondre avec lui depuis maintenant plus de 3 ans. Un de
ces privilèges dont on mesure la grandeur en tremblant. C'est à lui maintenant que nous laisserons la parole. Laissons–le rompre nos digues intérieures.
Déposons nos certitudes comme on dépose les armes et recevons, à travers ses
paroles, la certitude qu'aucun enfer ne
pourra jamais tuer l'espérance pourvu
que l'on consente à chasser de notre
enclos, les ombres de la haine. ■
ESPRIT
Unit n°889
Oui, les choses semblent aller plus mal
chaque jour, et le règlement aussi. Oui, le
nombre de timbres, le nombre de livres,
tout est limité. Nous ne sommes plus
autorisés maintenant à avoir des photos
au mur. Si tu jettes un papier quelconque
par terre, c’est un cas disciplinaire. Il est
interdit de boire de l’eau pendant la récréation. Tu ne peux rien avoir sur la tête
pendant que tu es dehors quelles que
soient la pluie et la température...
Ce n’est pas facile de décrire ce que
l’on éprouve ici. Cela change tellement
tout au long de la journée. Parfois, il y a
tellement de bruit qu’on ne peut réfléchir.
Mais j’aime le bruit des conversations.
C’est signe qu’il y a encore de la vie dans le
couloir de la mort. Rosy.
***
L’amour est ici, en ce lieu. Il est caché
par l’indifférence, mais il est là. On peut le
voir et le sentir. Aimer n’est pas difficile. Je
n’ai pas de difficulté à aimer les gens ici. Je
suis dérouté par ceux qui ne comprennent
pas "pourquoi" j’arrive à aimer. Mais je ne
peux donner que ce qui est en moi. Souvent, je souris. Et je me déplace sans jamais dire un mot face aux abus, parfois, le
silence indique à lui seul, le chemin de la
justice.
Les gens ont perdu l’espérance, parce
qu’ils n’ont plus de but. Nous devons leur
montrer qu’ils sont aussi importants les
uns que les autres et que leur vie a un sens.
Toutes les prisons sont une offense à la
nature humaine, parce que l’homme n’a
pas été créé pour être en cage. Polunsky
Unit est réputé pour ne pas être un lieu
agréable. Les prisons ne sont pas faites
pour être des hôtels, mais elles ne doivent
pas non plus devenir des chambres de torture. Le seul moyen de vivre cela, est d’embrasser l’amour autant qu’il en est possible. Sinon, cet endroit conduit à la folie.
Je suis enfermé 23 heures par jour.
Mon plus grand combat est celui contre
mon esprit.
Dieu peut changer notre route pendant toute une année, seulement pour
que l’on puisse offrir 5 minutes de bonté
et d’amour à quelqu’un.
Dans ce genre de situation, si quelqu’un me remercie je lui réponds toujours :
"transmets cet amour".
Tout le monde est encore contrarié à
cause de la nourriture aujourd’hui. C’est jour
férié, une commémoration. La prison a fait
un barbecue, et dans le couloir de la mort,
on s’est imaginé qu’ils nous serviraient de la
même façon, alors qu’ils nous ont littéralement privés de nourriture… Ils ont fait, pour
les habitants réguliers de la prison un barbecue et leur ont donné d’autres sucreries, et
dans le couloir de la mort, ils ont servi une
espèce de viande moulue avec des os
dedans. Je n’ai pu manger parce que les os
me blessaient à chaque bouchée.
J’ai déposé mon plateau par terre, et
j’ai commencé à t’écrire. Je n’étais pas en
colère parce qu’ils nous ont donné des os.
Je sais que quelqu’un quelque part, serait
très heureux d’avoir ce repas. J’étais simplement heureux, en fin de compte, que
cela m’ait été offert.
***
Comment je survis ? Je refuse de participer à la haine qui m'entoure. Je passe
mon temps à essayer de rappeler à mes
amis, et aux gardiens également qu'ils
sont meilleurs qu'ils ne croient l'être.
Je suis triste pour ceux qui nous torturent parce qu'ils se font davantage de
mal à eux-mêmes qu'à ceux qu'ils persécutent. As-tu déjà fait du mal à quelqu'un
en sachant que tu fais du mal ? Tu sais
bien que tu ne peux plus en dormir, et
quand tu vois cette personne, tu ne peux la
regarder dans les yeux. Quand nous faisons du mal aux autres, nous nous faisons
du mal à nous-mêmes. Je ne peux pas haïr
une personne qui ignore qu'elle se fait du
mal à elle-même.
***
On ne peut utiliser la peine de mort de
manière équitable aux Etats Unis car il y a
encore trop de racisme. La population du
couloir de la mort est composée principalement d'Afro-américains et de Latinoaméricains.
Un reporter qui couvrait un procès
pour meurtre est sorti pour fumer, une fois
le verdict énoncé et les jurés congédiés. Là,
il a rencontré un des jurés qui était un
blanc. L'accusé était noir. Le reporter a
commencé la conversation avec l'homme
qui ne savait pas que celui à qui il parlait
était reporter. Celui-ci lui a demandé s'il
était difficile de prononcer un tel verdict.
Le juré l'a regardé, a souri et a dit que ça
ne faisait pas de différence que l'on s'intéresse ou non aux preuves : "ils sont tous
coupables". Il parlait des Noirs en Amérique… Le reporter a écrit un article à ce
sujet dans “la Chronique de Houston”.
***
Nous avons appris que la beauté, c’est
la perfection. C’est pour cela que, lorsque
nous voulons que la beauté n’ait aucune
faille, nous entrons dans la comparaison
les uns avec les autres. Nous devons
comprendre que la beauté existe jusque
dans les failles. La beauté en toute chose
vivante, c’est cela la vie !
Personne n’a été créé semblable. Ce
qui est une fragilité chez l’un, fera la
beauté de l’autre. Ce que nous n’avons pas
en nous-mêmes, nous le trouvons dans les
autres. Quand nous aurons commencé non
seulement à voir mais à reconnaître la
lumière et la beauté en nous, alors nous
pourrons les voir chez les autres.
***
Merci à tous pour vos cartes d’anniversaire et vos souhaits de Noël. Votre amour,
votre force et vos prières ont été la terre
dans laquelle mes pieds se sont enracinés
durant ces deux derniers mois. J’ai senti
votre amour et votre force me nourrir
quand j’étais affamé et me guider quand
je me suis senti le dernier de tous.
Nous devons devenir amour et nous
consacrer à l’amour. Devenir aimables,
doux, compatissants, pleins d’action de
grâces. Le don de soi est quelque chose qui
devrait être naturel en tout être humain.
Nous pouvons apprendre les uns des
autres, si nous regardons seulement ce qui
est bon dans les autres.
Nous avons tous des moments où nous
sommes fatigués et tristes. Cela fait partie
de notre côté humain. La bonne nouvelle,
c’est que notre côté spirituel est plus fort
que l’humain et que notre tristesse ne peut
durer longtemps. Ta joie, tu dois la proclamer. N’oublie jamais cela ! ■
A lire : Pierre Pradervant, “Roger Mc
Gowen, Messages de vie du couloir de la
mort”, éd. Jouvence, 224 pages, 16 €.
www.rogermcgowen.org
FRANCECatholique N°3054 12 JANVIER 2007
19
ESPRIT
CIVILISATION
L’œcuménisme de
aux prises a
En cette semaine de prière
pour l’unité des chrétiens,
revenons sur la réception
de l’archevêque de
Cantorbery par Benoît XVI
en novembre dernier
et sur la rencontre
du Pape avec le patriarche
de Constantinople.
enoît XVI a vécu les semaines
qui ont précédé Noël dans
une perspective éminemment
œcuménique. D’un côté, on
venait lui rendre visite ; d’un
autre, il se rendait lui-même en visite. Mais la teneur même des déclarations ne laissait pas place au doute.
Les difficultés prenaient la couleur de
la crise d’un côté, alors qu’elles s’ouvraient sur l’espérance de l’autre. Au
cœur des rencontres, se trouvait la
question de l’autorité dans l’Église.
Le 23 novembre, Sa Grâce, le docteur Rowan Williams, archevêque de
Cantorbéry vient célébrer le quarantième anniversaire de la mémorable
rencontre entre l’archevêque d’alors,
le docteur Ramsey, et le pape Paul VI.
C’est l’époque du lancement de
l’ARCIC, la commission de dialogue
théologique entre l’Église catholique
et la Communion anglicane. Au cours
des années qui suivent, elle publie des
documents de première importance,
sur l’Eucharistie, l’Église, les questions
morales... En 1999, paraît le document The Gift of Authority (le don de
B
(
l’autorité) qui analyse le mode
d’exercice de l’autorité dans l’Église
et qui envisage les possibilités d’une
forme d’exercice de l’autorité de l’évêque de Rome vis-à-vis de la Communion anglicane. En 2005, la doctrine mariale, avec les dogmes définis sur l’Immaculée Conception et
l’Assomption de Marie, sont au cœur
du document Mary : Grace and
Hope in Christ (Marie : grâce et espérance dans le Christ). Que de chemin
parcouru depuis 1966 !
Pourtant, comme le reconnaît la
déclaration finale, signée par Benoît
XVI et l’archevêque R. Williams,
"dans le même temps, notre long
parcours rend nécessaire de reconnaître publiquement le défi représenté par les nouveaux développements qui, en plus d’être une source
de division pour les anglicans, sont
de graves obstacles pour notre progrès œcuménique". En effet, l’archevêque reconnaît publiquement que
la Communion anglicane est menacée
dans son existence même, par les décisions prises dans certaines de ses
provinces, toutes canoniquement autonomes les unes par rapport aux autres, dans le domaine ecclésial et
moral. À la suite de l’ordination de
femmes au sacerdoce, une crise avait
éclaté en Grande Bretagne, obligeant
les autorités anglicanes à créer de
nouvelles structures pour les fidèles
qui refusaient cette décision. Le vote
de l’Église d’Angleterre en faveur de
l’ordination de femmes à l’épiscopat
(ce qui se fait déjà dans plusieurs
Églises de la Communion anglicane)
va faire surgir des difficultés encore
L’Archevêque n’a aucune autorité
réelle à l’intérieure de la Communion
20 FRANCECatholique N°3054 12 JANVIER 2007
plus importantes, car les moyens alternatifs n’existent pas, et la création
d’une province spéciale pour un
clergé uniquement masculin (en plus
des deux provinces de Cantorbéry et
de York) n’est pas envisageable.
Aux questions concernant les ministères ordonnés, s’ajoutent les prises
de décision en matière morale. L’Église
anglicane aux Etats-Unis, appelée l’Église épiscopalienne, a élu comme
évêque du New Hampshire Gene Robinson, un prêtre, marié puis divorcé,
qui vit publiquement une relation
homosexuelle. Dans le diocèse anglican de New Westminster, plusieurs paroisses ont été autorisées à
célébrer des cérémonies de bénédiction pour des couples de personnes
du même sexe.
Lors de la dernière Conférence de
Lambeth, en 1998, qui réunit tous les
évêques de la Communion anglicane, une résolution avait été adoptée déclarant "qu’il existe de puissants arguments bibliques et théologiques justifiant une compréhension
chrétienne historique selon laquelle
les relations homosexuelles actives
ne représentent pas un témoignage
fidèle de chasteté et de sainteté pour
les disciples du Christ". Dans la
même ligne, le Conseil consultatif
anglican de septembre 2002 avait invité "les diocèses et les évêques à
n’entreprendre aucune action unilatérale et à n’adopter aucune ligne de
conduite susceptible de créer des difficultés à [leur] communion". Néanmoins, ces déclarations sont indicatives et n’ont pas de valeur coercitive. Pourtant, suite aux deux cas
mentionnés, les réactions au sein de
la Communion anglicane ne se sont
pas fait attendre. L’archevêque Peter
Akinola, primat du Nigeria, a fait sa-
ESPRIT
Benoît XVI
par le Frère Patrice MAHIEU
moine de Solesmes
vec l’autorité dans l’Église
gagent pas les différentes provinces.
Nous nous trouvons dans le cas d’un
sérieux déficit structurel d’autorité.
Le climat est tout autre les 29 et
30 novembre à Istanbul, l’ancienne
Constantinople, où Benoît XVI vient
rencontrer le patriarche œcuménique Bartholomaios Ier. Benoît XVI
connaît le monde orthodoxe qu’il
estime et aime. Le cardinal Ratzinger, archevêque de Munich, fut
membre de la commission internationale catholique-orthodoxe pour le
dialogue théologique. Il reçut d’ailleurs cette commission à Munich en
1982, où fut rendu public le premier
document théologique commun sur
le mystère de l’Église et de l’Eucharistie à la lumière du mystère de la
Sainte Trinité.
Cette rencontre au Phanar comporte une part d’anamnèse des relations entre les deux Églises. Elle intervient un peu plus de quarante ans
après la rencontre de Paul VI et Athénagoras Ier, à Jérusalem, les 5 et 6
janvier 1964. En 1967, Paul VI se
rendit le premier au Phanar, en
juillet, et Athénagoras vint à Rome
en octobre.
À Jérusalem, lors de leur première
rencontre, Paul VI et Athénagoras
avaient eu un entretien privé, rendu
public seulement à la mort d’Athénagoras. En voici quelques extraits :
"Paul VI : Tout ce qui regarde la discipline, les honneurs, les prérogatives, je suis tout à fait disposé à écouter ce que Votre Sainteté croit être le
mieux. Athénagoras : La même
chose de ma part. Paul VI : Aucune
question de prestige, de primauté qui
ne soit celle de... fixée par le Christ.
Mais d’honneurs, de privilèges, rien
de tout cela. Voyons ce que le Christ
nous demande, et chacun prend sa
position, mais pas avec les idées humaines de prévaloir, d’avoir de la
louange, d’avoir des avantages. Mais
de servir. Athénagoras : Comme vous
m’êtes cher au fond du cœur.
Paul VI : Mais de servir."
Le programme de Benoît XVI comprenait, à son tour, un long moment
d’entretien privé avec le patriarche.
L’avenir nous en révélera la fécondité.
Quarante ans auparavant, le patriarche Athénagoras nourrissait un
désir très vif. Il le confiait au P. Duprey, venu lui rendre visite, le 10
septembre 1966. Le patriarche lui disait : "Nous, n’avons-nous pas, nous,
orthodoxes catholiques, la même foi,
le même baptême, la même Eucharistie, la même réalité, la même
foi eucharistique, et ceci à travers la
même succession apostolique ?
Nous devons faire tous nos efforts
pour arriver à un même calice. Je
l’attends le calice commun ! Je le
tiens déjà à la main le calice commun !".
Benoît XVI et Bartholomaios Ier se
sont replacés dans ce même héritage, l’héritage du dialogue de l’amour, du Tomos Agapis. Ils ont souligné les acquis théologiques de ces
quarante ans : "Les rapports entre les
Églises doivent être enracinés dans
une fidélité totale à l’unique Seigneur Jésus-Christ et dans un respect
mutuel de leurs propres traditions".
Mais la grande question, qui
Nous devons faire tous nos efforts
pour arriver à un même calice
FRANCECatholique N°3054 12 JANVIER 2007
(
voir que l’Église anglicane du Nigeria avait rompu ses relations avec
la province de New Westminster.
L’ordination épiscopale de Gene Robinson ayant quand même eu lieu,
plusieurs primats réagirent. L’archevêque Bernard Malango, primat de
l’Afrique Occidentale, a qualifié la décision "de sérieux manquement à la foi
et aux principes qui ont maintenu l’Église unie pendant des siècles". Il éprouvait une grande souffrance devant
cette décision qui "avait détruit la
Communion anglicane" et reconnaissait qu’il ressentait "un sentiment accablant d’une désorientation de la
Communion anglicane".
Malgré cette situation douloureuse, Benoît XVI et l’archevêque
Williams n’ont pas omis de rendre
grâces pour le chemin accompli,
mais en même temps ont pris acte
d’un état de blocage. Le Pape a
formé le vœu, dans son discours à
l’Archevêque, que "la Communion
anglicane demeure enracinée dans
les Évangiles et la Tradition apostolique qui forment notre patrimoine
commun et qui constituent la base
de notre aspiration commune à travailler au service de l’unité pleine et
visible". L’archevêque de Cantorbéry
prenait acte de la situation, et, semblait demander pardon lorsqu’il reconnaissait que "la façon dont nous
appliquons l’Évangile aux défis que
pose la société moderne peut souvent obscurcir, voire menacer les résultats du dialogue, du témoignage
commun, du service". Paroles pathétiques qui soulignent que l’archevêque n’a aucune autorité réelle à
l’intérieur de la Communion anglicane, si bien que les résolutions de
la Conférence de Lambeth ou bien
du Conseil consultatif anglican n’en-
21
ESPRIT
transparaît dans les discours et allocutions concerne l’autorité dans l’Église. C’est précisément le thème
actuellement étudié par la commission théologique catholique-orthodoxe qui s’est réunie cet automne à
Belgrade : "Conciliarité et autorité
dans l’Église". Benoît XVI insiste dans
son homélie, à l’issue de la divine
liturgie du 30 novembre, sur la complémentarité des missions. "Simon
Pierre et André furent appelés ensemble à devenir des pécheurs
d’hommes. Mais cette même mission
prit une forme différente chez chacun des deux frères". Tous les deux
ont servi l’Évangile ; tous les deux
ont exercé une responsabilité, un
ministère, mais ceux-ci ont pris des
formes différentes. La responsabilité
universelle de Pierre "a malheureusement été à l’origine de nos différences d’opinion que nous espérons
surmonter" précise le Pape, avec des
mots emplis de délicatesse.
Le Patriarche se situe dans une
perspective liturgique. C’est dans la
liturgie qu’orthodoxes et catholiques
sont déjà unis, même si des différences qui n’ont pas encore été toutes
clarifiées empêchent la participation
au calice commun. "La liturgie nous
enseigne à élargir nos horizons et
notre vision. À parler le langage de
l’amour et de la communion".
Lors de sa visite au Phanar, le 30
novembre 1979, Jean-Paul II avait
posé la question suivante : "Qu’estce qui peut justifier le fait que nous
soyons séparés ? Cette question
constitue l’arrière-plan de la déclaration commune signée par Benoît XVI
et Bartholomaios Ier. "Nous ne pouvons pas ignorer la montée de la sécularisation, du relativisme, voire du
nihilisme, surtout dans le monde
D.R.
Le travail du groupe Saint Irénée
Le Groupe de travail orthodoxe-catholique Saint-Irénée a tenu sa troisième session au
monastère bénédictin de Chevetogne (Belgique) du 29 novembre au 3 décembre 2006. La
rencontre coïncidait avec la visite du pape Benoît XVI au patriarche œcuménique
Bartholomée, elle avait pour thème : "La doctrine et la pratique de la primauté au premier
millénaire". Les écrits des Pères fondés sur l’Écriture sainte montrent qu’il existe un
charisme de la primauté, dont la fonction spécifique est de préserver l’unité de l’Église.
Cette fonction doit être assumée au niveau local, régional et patriarcal, et au sein de
l’Église entière. Au premier millénaire ces fonctions primatiales furent toujours enracinées
dans une structure synodale. On ne peut pas traiter légitimement de la primauté sans
traiter de la synodalité, ni traiter de la synodalité sans traiter de la primauté. En ce qui
concerne la primauté de l’évêque de Rome, les études menées en commun ont montré
qu’il n’existe pas, au premier millénaire, d’acception univoque de la primauté romaine.
[cependant] la conscience commune n'en reconnaissait pas moins que l'évêque de Rome
jouait un rôle primatial dans l'Église entière.
Le Groupe de travail Saint-Irénée a été fondé à Paderborn (Allemagne) en 2004. Il se
définit comme un groupe international de travail théologique, sur le long terme,
transcendant les frontières linguistiques et culturelles. Il comprend 13 théologiens
orthodoxes (appartenant aux patriarcats de Constantinople, d’Antioche, de Moscou, de
Serbie, de Roumanie, de Bulgarie, aux Églises orthodoxes de Grèce, de Pologne, de
Slovaquie, d’Estonie, ainsi qu’à l’Église orthodoxe en Amérique), et 13 théologiens
catholiques
(appartenant à l’Église
catholique en
Allemagne, Autriche,
Belgique, France,
Italie, Pays-Bas,
Pologne, États-Unis).
La deuxième
rencontre du Groupe
de travail avait eu lieu
en novembre 2005 au
monastère Penteli
d’Athènes, la
prochaine session se
tiendra en novembre
2007 en Serbie. ■
22 FRANCECatholique N°3054 12 JANVIER 2007
occidental. /.../ En Europe, nous devons unir nos efforts pour préserver
les racines, les traditions et les valeurs chrétiennes /.../ pour contribuer
à la culture de la future Europe".
Les difficultés sont donc d’un autre
ordre que celles qui sont allées s’amplifiant avec la Communion anglicane.
Dans les relations orthodoxes-catholiques, elles se situent autour du respect des différences qui sont compatibles
avec la communion - différences théologiques, liturgiques, canoniques... -, et
autour de l’autonomie des Églises orthodoxes, suivant leurs traditions canonique et ecclésiologique, autonomie qui pourrait être articulée sur une
certaine forme de service d’unité remplie par l’évêque de Rome.
Le Pape affirmait : "Ce n’est qu’à
travers la communion fraternelle
entre les chrétiens et à travers leur
amour mutuel que le message de l’amour de Dieu pour tous les hommes
et les femmes deviendra crédible". Et
le patriarche reprenait en écho :
"Nous confessons dans une profonde
affliction de ne pas pouvoir encore
célébrer unis les saints sacrements.
Prions pour que vienne le jour où
cette unité sacramentelle sera pleinement réalisée".
Cette première rencontre entre le
Patriarche œcuménique et le Pape et
les espérances qu’elle a revivifiées
ont trouvé aussitôt leur prolongement dans la visite de l’archevêque
d’Athènes à Rome, le 14 décembre.
Ce qui était impensable, il y a seulement six ans, a pu se réaliser, grâce à
la décision prophétique de Jean-Paul
II de ce rendre à Athènes en 2001. Le
trait marquant de la rencontre du 14
décembre est peut-être un vrai réalisme évangélique, gage d’avancées
décisives. Benoît XVI lui-même a
donné le ton en disant : "Aujourd’hui, nos relations reprennent lentement, mais en profondeur et avec un
souci d’authenticité". L’archevêque
Christodolous, de son côté, confie
son désir de "transcender les obstacles dogmatiques qui entravent le
chemin de l’unité dans la foi [...], de
vivre par le consensus la pleine unité
et de communier au Corps et au
Sang précieux du Seigneur ".
À la lumière de ces rencontres, la
meilleure attitude des fidèles n’estelle pas l’espérance active ? ■
IDEES
JOURNAL DE GERARD LECLERC
En terminant l’année
6 DECEMBRE
Lundi, débat sur Radio Courtoisie avec
l’abbé Claude Barthe, sous l’arbitrage de
Philippe Maxence, rédacteur en chef du bimensuel l’Homme Nouveau. C’est moi qui
suis à l’origine de cette rencontre puisque
j’ai analysé dans France Catholique l’intervention de l’animateur théologique de la
revue Catholica en lui posant quelques
questions. Je continue donc à défendre
Vatican II en terre traditionaliste, ce qui me
semble assez bien accepté parce que je ne
rejette pas les arguments contraires in
infernis. La discussion n’en est pas moins
assez pointue, bien que souvent incomplète. Nous demeurons sur le bord de
beaucoup de sujets, parce qu’il y a trop à
dire et qu’il faut du temps pour démêler les
difficultés. Et pour reprendre une expression que j’affectionne (je ne l’ai pas
inventée) il est nécessaire de s’évaluer
mutuellement pour saisir exactement les
zones d’accord, et si l’on n’est pas d’accord,
énoncer de bons désaccords, c’est-à-dire
des désaccords intéressants, prometteurs
de futurs développements. Des désaccords
assez nettement perçus, car ne résultant
pas d’une incompréhension réciproque.
Nous sommes revenus sur l’allocution
de décembre 2005 où Benoît XVI avait
énoncé les principes d’une herméneutique
de Vatican II. Celle-ci ne saurait se concevoir hors de la tradition ecclésiale et donc
de la continuité de l’enseignement de
l’Eglise. Là-dessus, l’abbé Barthe pose une
objection assez redoutable. Jusqu’alors en
effet la perspective était plutôt inverse.
C’était le dernier des conciles qui permettait d’interpréter les précédents, dans la
mesure où il ajoutait en précisions doctrinales. Si Vatican II doit être analysé à la
lumière de ce qui a précédé, n’est-ce pas
qu’il a péché par imprécision et qu’il est
parfois même hasardeux au point d’appeler
des éclaircissements, aventureux au point
d’appeler des mises au point. Je n’ai pas
répondu directement, mais en invoquant le
témoignage du père de Lubac sur “un
concile trahi” et sur les clivages post-
conciliaires, j’ai amorcé une direction de
réflexion. Même s’il est atypique par rapport aux autres conciles, Vatican II a voulu
formuler une synthèse ecclésiologique permettant d’accéder à “la Lumière des nations”. C’est ce côté synthétique qui est
inédit, ainsi que ce qu’il y a de programmatique dans certaines directions nouvelles.
Mais cette synthèse est éclairante, elle permet de comprendre l’économie de la Révélation, ses développements et son actualité.
Et, s’il y a besoin d’une herméneutique,
c’est parce que tout un “péri-concile” a
caché le concile et qu’un “esprit du concile” sans cesse invoqué a concouru à dévaloriser le concile en ses enseignements au
profit d’une aspiration censée inaugurer
une Histoire après l’Histoire, une Eglise
après l’Eglise. Quand Michel de Certeau
déclarait qu’il n’attendait plus rien d’une
Eglise-institution et tout des prophètes
d’une “rupture instauratrice”, il indiquait
exactement la cause de la méprise à propos
de Vatican II. Un certain nombre d’interprètes ont signifié la fin d’un certaine Eglise
pour l’avènement d’un vrai christianisme.
D’où la longue étude du père de Lubac sur
la “postérité de Joachim de Flore” qui
dénonçait, avec toutes les ressources d’une
vaste érudition, le mythe d’un nouveau
christianisme.
Malheureusement je n’ai pas eu l’occasion de développer complètement ma
réflexion, qui grâce au père de Lubac,
aurait pu éclaircir complètement le problème de la vraie et de la fausse herméneutique de Vatican II.
J’ai avalé hier le mémoire d’une universitaire hollandaise Dirkje Donders, thèse de
théologie, 1997, à l’université de Nimègues,
sur “La femme dans la société et l’Eglise”. Il
s’agit pour l’essentiel de l’analyse des travaux d’une commission pontificale qui
avait été nommée par Paul VI (1973-1976).
J’ai peu à dire sur le mémoire lui-même qui
n’exprime jamais que l’idéologie régnant au
sein de la mouvance progressiste de ces
années post-conciliaires. L’auteur est délibérément partiale, tout au service de sa
démonstration, désagréable avec l’adversaire “réactionnaire”. L’intérêt tient
cependant dans le rappel des oppositions
frontales entre des figures de premier plan
de la théologie : d’un côté, Ignace de La
Potterie, de l’autre : Karl Rahner.
7 DECEMBRE
J’ai relu aujourd’hui la lettre de Karl
Rahner adressée à Ignace de La Potterie en
date du 30 août 1973 qui est reproduite en
annexe de la thèse de Mme Donders. La recopier ici serait par trop fastidieux. Il est
d’ailleurs possible d’en concentrer le contenu, sans trahir, dans une proposition
simple : l’Ecriture sainte ne peut rien nous
apprendre, en ce qui concerne la différence
entre les sexes., de plus que ce que le
savoir ordinaire nous apprend et qui est lié
à la contingence historique. Le grand argument est d’ordre herméneutique : il s’agit
de distinguer constamment le domaine de
la révélation de ces conditions historiques.
De plus, l’utilisation incontestable des catégories sexuées pour signifier les relations
de Dieu avec l’humanité (l’Eglise-épouse,
ou l’Esprit-Saint comme lié à une “fonction
féminine” dans la Trinité) ne peut être majorée car ces catégories métaphoriques ne
sont pas pensables en termes de principes
rigoureux. Dans un tel domaine, la preuve
n’est pas possible.
Je le croirais volontiers, car il est vrai
qu’il est problématique de traduire directement, en logique formelle, ce qui relève de
la suggestion symbolique ou poétique.
Jusqu’à un certain point seulement, car la
réflexion peut rebondir sur la suggestion
pour donner lieu à des spéculations tout à
fait décisives. C’est une des découvertes de
la psychanalyse, mise notamment en évidence, par Pierre Legendre. Les travaux de
Marie Balmary vont tout à fait dans ce
sens, lorsqu’elle étudie la Genèse et en fait
ressortir une signification anthropologique
dont la pertinence nous atteint directement malgré la distance considérable qui
nous sépare de son insertion culturelle et
sociale.
FRANCECatholique N°3054 12 JANVIER 2007
23
IDEES
10 DECEMBRE
Rahner toujours. Sa relativisation des
expressions bibliques relève de la logique
de démythologisation qui a travaillé toute
l’exégèse scientifique à la suite de Bultmann. Un des gros défauts d’une telle réduction est de substituer à une herméneutique biblique, une herméneutique philosophique. En l’espèce, avec Bultmann, heideggerienne ou existentialiste. Si on utilisait des termes polémiques, on pourrait
parler de passage à la moulinette existentialiste. Serait-ce si injuste ?
Et même si Rahner est moins sensible à
la démythologisation que d’autres, j’imagine que son interprétation est commandée
par des idées “modernes” comme celle de
l’émancipation féminine, qui, en ellemême, n’est pas critiquable. Mais l’idée que
l’on a de la femme n’est pas neutre. On s’en
aperçoit mieux aujourd’hui avec l’idéologie
des genders. En se privant de toute théologie de la différence sexuelle - et de l’amour
humain - la question de la vocation de la
femme est livrée à l’arbitraire, à la manipulation idéologique.
11 DECEMBRE
La vocation de la femme et Edith Stein...
Un essai de Vincent Aucante (éd. Parole et
Silence) sur sa philosophie politique me
rappelle le “féminisme” de celle qui a lutté
de toutes ses forces pour la promotion de la
femme, ses droits civiques, son accession à
toutes les professions. Est-ce à dire qu’elle
partageait, comme on l’a donné à croire,
les revendications pour le sacerdoce féminin ? Il y a méprise sur le sujet : “Cette
question de l’ordination des femmes, chez
Edith Stein a fait l’objet de plusieurs interprétations erronées”. Vincent Aucante renvoie à la mise au point définitive de S.
Bingelli dans la Nouvelle revue théologique
de Louvain. Notre amie Janine Hourcade,
dans son ouvrage, Des femmes prêtres ?,
(également chez Parole et Silence), fait une
mise au point intéressante qui me paraît
rejoindre le point de vue d’un Balthasar sur
le charisme marial et le charisme pétrinien.
Ce n’est pas la première fois que je suis
amené à confronter les figures de Simone
Weil et d’Edith Stein dans leur contraste
sur fond d’appartenance commune. Les
appartenances sont manifestes : familles
(
juives, attirance pour le christianisme,
compétence et génie philosophiques, intérêt pour les questions politiques et sociales,
passion pour la théologie... Leurs différences sont déjà évidentes sur le terrain de la
pensée pure, leur formation n’est pas identique, l’une disciple d’Alain, l’autre assistante de Husserl, la première éloignée de
saint Thomas, la seconde proche en raison
de la phénoménologie. Sur le terrain civique, Edith n’a jamais partagé l’extrémisme révolutionnaire de Simone. Sur
Israël, elles sont aux antipodes l’une de
l’autre. Il est vrai que Simone n’était pas
d’une famille pratiquante comme Edith et
qu’elle n’a pas sa sensibilité native à l’égard
du peuple juif. Si elles s’étaient connues,
Edith n’aurait pas compris les sévérités de
Simone sur l’Ancien Testament (pas tous
les livres !) et sur les violents reproches à
Israël d’avoir accaparé le Dieu unique. On
rêve, en revanche, du dialogue qu’elles
auraient noué sur Jésus et le christianisme
l’une sur le seuil de l’Eglise, l’autre entrée
au Carmel. Les convergences eussent été
profondes et même décisives. Qui sait ? Simone aurait-elle eu les réponses qu’elle
attendait de la part d’un être de pareille
envergure, une sainte de la dimension d’un
docteur de la foi ?
dispose d’une légalité incontestable. Certes,
il reste des menaces. La réussite et la fiabilité de ces dirigeants ne sont pas assurées.
J’ai des sentiments contradictoires
quant à la justice qui aurait dû condamner
Pinochet et aux regrets amers des victimes.
Il m’est arrivé de traiter de la question de
la sortie du totalitarisme et de la dictature
avec les solutions diverses qui ont été choisies ici ou là - celle de l’Afrique du Sud se
distinguant par sa volonté de pacification
et de réconciliation. Il faut faire attention
de ne pas prolonger règlements de compte
et haines réciproques. Par ailleurs on ne
peut pas ne pas s’interroger sur la différence de traitement des anciens dirigeants
selon les pays et les idéologies. Pour un
Saddam Hussein qui sera pendu combien
de dictateurs sanguinaires morts dans leur
lit ? En découvrant la couverture bien sentie que mes collègues de Libération ont dédiée à Pinochet, je n’ai pu m’empêcher de
songer à celle que le même journal avait
consacrée à Mao-Tsé-Toung. Certes je n’ai
plus exactement en tête le style des articles nécrologiques sur le Grand Timonier.
Mais je doute que leur sévérité ait été
égale à celle déployée pour le dictateur
chilien.
19 DECEMBRE
18 DECEMBRE
Je n’ai eu aucune envie de commenter
la mort du général Augusto Pinochet. Son
coup d’Etat ne m’avait laissé rien présager
de bon et ses mesures de répression brutales - le stade de Santiago - me répugnaient profondément. Même si je m’étais
auparavant interrogé sur la viabilité de
l’expérience Allende et si l’ébullition du
continent sud-américain dans son ensemble, m’avait fait craindre une instabilité
politique défavorable aux Etats de droit.
C’est une dimension un peu oubliée aujourd’hui. Les Américains soutenaient Pinochet - ils avaient sans doute préparé le
pronunciamento - parce qu’une gigantesque lutte d’influence les opposait aux
Soviétiques et à leurs alliés. L’exemple
cubain était censé être contagieux et il l’était dans une certaine mesure. En contrecoup : les dictatures d’extrême-droite.
Nous en sommes heureusement sortis et je
préfère mille fois l’expérience Lulla au Brésil à tout ce qui a précédé. Même Chavez
Il existe une logique implacable
de refoulement du religieux
24 FRANCECatholique N°3054 12 JANVIER 2007
La question des sectes revient en
France avec un rapport de la Commission
parlementaire qui se charge de suivre les
dossiers. C’est une occasion de plus pour
constater le fossé - plus que cela - qui
nous sépare, sur ce terrain, de la mentalité
anglo-saxonne. On l’a bien vu avec l’affaire
Gettliffe dont le traitement judiciaire au
Canada a scandalisé toute la France alors
qu’il apparaît tout à fait normal là-bas.
Qu’un père, membre d’une secte, ait la
garde de ses enfants à la suite de son divorce nous scandalise, d’autant que la
mère, retournée inopinément au Canada a
été retenue en prison, puis sévèrement
condamnée. Dans le monde anglo-saxon,
c’est notre attitude à nous qui scandalise.
Qui a raison ? Ceux qui prônent la liberté
de conscience à tout prix ? Ou ceux qui
veulent à tout prix protéger cette liberté de
ce qui risque de la supprimer à force de
manipulation mentale et d’encadrement
sectaire ? Il me semble que la suspicion
française va parfois un peu loin, jusqu’à
soupçonner certaines formes de vie communautaire de type charismatique.
C’est à partir d’un débat comme celuilà que nous pouvons donc apprécier notre
IDEES
différence dont la nature est d’ordre philosophico-religieux et dont la portée
englobe tout l’ordre socio-politique. Nous
sommes renvoyés aux origines des EtatsUnis - le Canada vit de la même civilisation
- avec la segmentation religieuse originaire
et les principes inentamables de la pluralité
confessionnelle. Au même moment, la Révolution française se distingue d’abord par
une tentative d’assujettissement de l’Eglise
catholique à l’Etat, puis par une persécution qui vise à l’éradication du christianisme. Bien sûr nous sommes loin de ces
origines. Le temps a fait son œuvre. Mais il
nous en reste beaucoup de choses. La
conception française de la laïcité par
exemple, et la farouche détermination
américaine à défendre la liberté religieuse
ainsi d’ailleurs que la liberté d’expression.
Après discussion avec un ami avocat
québecois, il faudrait apporter des compléments à ces réflexions rapides, notamment
d’ordre juridique. L’attitude de la justice
canadienne à l’égard de la maman qui a
“enlevé” ses enfants a des motifs liés à une
situation particulière par rapport à un tribunal donné. Il y a des contrastes entre le
Québec et les autres provinces canadiennes, et même les Etats-Unis sont divisés en plusieurs grandes zones où les mentalités et les pratiques juridiques divergent.
27 DECEMBRE
Radio-Vatican m’a interrogé assez longuement à propos de la polémique qui a
sévi ces derniers temps sur la célébration
publique de Noël, que des pays comme
l’Angleterre sont enclins à limiter afin de
ne pas indisposer les non-chrétiens. Il y a
même eu, à Rome, une manifestation gauchiste contre la crèche du Vatican !
J’ai été pris un peu au dépourvu, n’ayant guère réfléchi au problème. Mais il ne
m’est pas possible de ne pas réagir à une
tendance à l’éradication de l’identité chrétienne des anciennes nations européennes.
Je sais bien qu’il y a une tendance de fond,
dans un contexte de pluralisme religieux et
de forte immigration, à mettre en valeur
les principes de laïcité, et en tout cas de
réserve sur les connotations confessionnelles. Jusqu’à quel point cette tendance
est-elle suscitée ou renforcée par des évolutions internes à la société et par une
sorte de juridisme laïciste qui serait le
point d’aboutissement du phénomène de
sécularisation ? Il me semble qu’il y a des
deux, l’un appelant l’autre...
Je ne suis pas sûr que les exigences de
déconfessionalisation de Noël viennent
“d’en bas”. Les musulmans d’Angleterre ou
de France ne m’apparaissent pas indisposés
par le souvenir explicite de la naissance de
Jésus, qui est mentionné dans leurs Ecritures. Je crois beaucoup plus aux méfaits
d’une idéologie qui fait d’autant mieux l’économie de la religion qu’elle est pressée
de la voir disparaître de l’espace public où
elle lui pèse et où elle voudrait avoir le monopole de l’expression philosophique et en
général de ce qui fait lien social. Le lien social renvoit précisément à l’étymologie de
religion, ce qui relie.
Il existe une logique implacable de refoulement du religieux, désormais interdit
de créer du lien social, cette fonction étant
désormais dévolue à une religion civile
seule habilité à organiser l’espace public.
Telle est du moins ma réaction spontanée à
cette phobie du Noël chrétien.
Retour à Albert Camus grâce à Jean
Daniel, dont l’essai sur l’auteur de L’Etranger, m’a instruit sur une des raisons essentielles de ma connivence avec l’éditorialiste
du Nouvel Observateur, Camus, précisément, dont il a été l’ami très proche, dont il
a toujours professé le culte, et poursuivi
l’ambition journalistique. Le sous-titre
choisi me plaît énormément : “Comment
résister à l’air du temps”. C’est toute une
philosophie ! Certains la caractériseront
sans doute comme réactionnaire, ce qui ne
serait me terroriser mais demande quand
même quelque explication. Résister à l’air
de son temps ne signifie sûrement pas
qu’on voudrait être d’un autre temps parce
qu’on déteste le sien. Cela, c’est plutôt la
nostalgie des ailleurs rêvés et des âges d’or
disparus. Ce n’est pas non plus prendre une
pose négative de contempteur de ses
contemporains. C’est plutôt ne jamais
abdiquer sa liberté et sa liberté de jugement.
Dans la dernière conversation que Camus a eu avec Daniel, un mot de ce dernier
l’avait indisposé : “inéluctable”. L’indépendance de l’Algérie, en fait la prise de
pouvoir par le FLN était “inéluctable”.
N’était-ce pas le sens de l’Histoire tant célébré à l’époque, et qui correspondant au
canon le moins discuté du marxisme ? Et
bien ça ne marchait pas du tout avec lui.
Sûrement pas avec son idée de la justice et
ce qu’il avait de commun avec une Germaine Tillon, à laquelle Jean Daniel consacre quelques belles pages. Je ne veux pas
revenir ici sur l’affaire algérienne, mais
tout ce qu’en rappelle cet essai me ramène
à des années de jeunesse où elle a énormé-
ment compté. Et, a posteriori, ce que je
retiens de l’attitude de Camus qui y fut
impliqué dans sa chair, sa sensibilité, ses
réflexes les plus profonds, c’est ce qu’elle
eut de non-idéologique. C’est sans doute
pour cela que l’écrivain peut être reconnu
aujourd’hui sur les deux bords de la
Méditerranée (Avec Camus, Gallimard).
28 DECEMBRE
J’ai toujours aimé Camus, lu dès la terminale. Je suis resté attaché à La Peste
alors que c’est sans doute aujourd’hui le
roman le plus mal considéré de l’écrivain.
D’une fable se détachent des figures qui
me touchent, celle de Grieux, celle de Panelou aussi (où on a voulu reconnaître le
futur cardinal Daniélou, ce qui m’intéresse
directement car j’ai toujours été fasciné
par ce grand jésuite si vivant). A ce propos
Jean Daniel rappelle que Camus ne s’est
jamais reconnu dans l’anticléricalisme qui
l’avait pourtant formé et qu’il appréciait la
conversation des jésuites et des dominicains : « Il voyait dans le combat anticlérical une sorte de vulgarité, sinon de bassesse [...] Il disait volontiers qu’il était préférable d’avoir quelques religieux autour de
soi, “on ne sait jamais, on ne peut jamais
savoir”. Laïc, agnostique, athée peut-être,
cet homme n’a jamais voulu dire un non
radical aux religieux, sinon à la religion». Il
aimait Bernanos, celui de Dialogues des
Carmélites, avait adapté la pièce de Faulkner, Requiem pour une nonne et s’était
consacré à la première édition des œuvres
complètes de Simone Weil...
Avec Michel Onfray, changement de
registre assuré. J’ai tenu à vérifier l’intuition que j’ai depuis plusieurs années et qui
se trouve confirmée clairement dans La
puissance d’exister (Grasset), le dernier
essai de l’athéologien. Décidément, ce qu’il
y a de plus intéressant chez lui ce sont les
préfaces. C’était déjà le cas avec Fééries
anatomiques où une longue préface en
forme de confession m’avait beaucoup plus
instruit que les développements suivants
qui ne m’avaient nullement paru féériques.
Cette fois, il suffit de trente pages pour
saisir le drame d’un gosse abandonné par
ses parents dans un orphelinat dont la description, d’évidence véridique, fait frémir
d’indignation. Que serais-je devenu si j’étais passé par là ? Je suis bien obligé de me
poser la question en m’interrogeant de surplus sur une expérience personnelle ri(à suivre)
goureusement contraire.
FRANCECatholique N°3054 12 JANVIER 2007
25
CINEMA
DOCUMENTAIRE SUR LA GRANDE CHARTREUSE
Le grand
silence
Nous avons eu la grâce de voir “Le grand
silence” le jour de Noël, à Paris, dans une
salle archi-comble et recueillie. Le film de
Philip Gröning, évocation de la relation des
moines de la Grande Chartreuse avec
Dieu, beaucoup plus que simple
reportage, et plus qu’une œuvre d’art
réussie, est une sorte de phénomène de
société. Comme chez nos voisins
espagnols et italiens ou belges, un faible
nombre de copies est diffusé, mais sur la
longue durée, avec un bouche à oreille
remarquable. Quand le film arrivera chez
vous, ne le manquez pas. Malgré sa durée
de 162 minutes, il n’y a aucun temps mort.
Le18 janvier les éditions Jade sortent le
CD de la bande son du film qui sera
encore un autre défi artistique (le bruit du
silence) contribuant à faire du “Grand
Silence” un événement marquant.
L’autorisation de tourner un tel film avait
été demandée en 1984. En 1999 les
Chartreux avaient répondu positivement...
Une chose est certaine : le moment était
bien choisi pour montrer la communauté
en parfait équilibre. La galerie des visages
qui ponctuent différentes parties du film
en témoigne d’ailleurs merveilleusement.
26 FRANCECatholique N°3054 12 JANVIER 2007
Entretien avec
Philip GRÖNING
réalisateur du film
Philip Gröning est né à Düsseldorf
en 1959. Il a grandi dans sa ville
natale et aux Etats-Unis.
Il a beaucoup voyagé en Amérique
du Sud et a étudié la médecine
et la psychologie avant de se
tourner vers la réalisation
cinématographique en 1982.
■ Pourquoi avez-vous choisi de faire un film sur le monastère cartusien ?
Au début, je ne pensais pas tourner un film sur la
vie dans un monastère. Je voulais plutôt faire un film
concernant le temps. Parmi les Ordres où le silence est
observé, j’ai trouvé que celui des Chartreux était le plus
intéressant, puisque chacun des moines reste centré
sur lui-même. Ils vivent dans une petite cellule avec
des lits de paille et pour se chauffer, ils n’ont qu’une
petite boîte en métal. Si le feu s’éteint, il fait un froid
terrible. D’un autre côté, la vie communautaire est très
stable et intense. Les journées sont tellement structurées qu’ils ont rarement le temps de se retrouver seuls.
Il y a des prières même pendant la nuit. C’est la vie
d’ermite, mais dans une communauté.
■ Comment un film sur le temps est-il devenu un film
sur le silence ?
Un film “normal” fonctionne avec le langage et le
langage couvre le temps. La plus grande expérience
qu’un spectateur puisse faire en regardant un film est
de ressentir le temps. D’ordinaire cette expérience est
masquée par l’histoire. Dans un film sur le silence (un
film “muet”), cette expérience du temps est repoussée
vers la surface. Et rien ne peut l’en déloger. Ceci est
directement relié à la façon dont vivent les moines :
dans une structure temporelle extrêmement rigide qui
impose le moment où l’action doit se faire et les règles
selon lesquelles elle doit se faire.
■ Votre film parle du temps sur deux niveaux : nous,
spectateurs, avons le sens du temps réel, mais nous
expérimentons aussi le changement des saisons...
Quelqu’un qui vit toujours dans un même endroit
où les jours se ressemblent à la perfection ressentira le
changement de saisons plus fortement que les autres.
Imaginez-vous, passer votre vie à regarder par la
même fenêtre (toujours la même et unique fenêtre), un
même morceau de jardin ou une certaine montagne.
Le changement de la nature ainsi que du temps prendra forcément une signification différente.
■ La valeur du travail et des objets semble être différente pour les Chartreux...
Les Chartreux vivent dans une grande pauvreté,
mais ils sont pauvres consciemment. Par exemple, le
tailleur garde chaque petit bouton et chaque morceau
de tissu. Lorsqu’un moine meurt, ses boutons sont
réutilisés. Dans une scène du film, on voit la collection
de boutons dans l’atelier du tailleur. Il y a également
des boîtes entières de fils, et même les plus infimes
parties des habits des moines sont recyclées. Si vous
Dans le
silence
ambiant,
tout
déplacement
semblait
démesuré
regardez de près, vous verrez qu’il s’agit d’assemblage
de bouts de tissus. On ne jette rien chez les Chartreux
et tout l’argent qui n’a pas été utilisé est reversé à des
œuvres de charité.
■ Est-ce une philosophie ?
Oui. Je me souviens d’une fois où j’ai jeté quelque
chose. Le tailleur est aussitôt venu me demander pourquoi j’avais fait ça. N’avais-je donc aucun respect pour
celui qui avait travaillé ? Pourquoi pensais-je que tout
à coup, ça n’avait plus de valeur ? Ce n’est pas de l’avarice, mais de l’attention. L’attention avec laquelle on
se préoccupe de tout ici : les objets, le temps, soimême et son âme.
■ La liberté individuelle existe-t-elle dans le monastère ?
Mais oui, absolument ! Je n’ai rencontré que des
individus décidés. Contrairement aux Cisterciens ou
aux Trappistes, qui observent eux aussi le silence, les
Chartreux vivent chacun à leur manière. Leur individualité trouve son expression très fortement dans leur
cellule : on peut voir comment Benjamin, l’Africain, a
assemblé un tas de choses après seulement 6 mois,
alors que Francis, lui, vit dans une cellule pratiquement
vide depuis 7 ans.
■ Pendant le tournage, vous avez vécu comme un moine.
Est-ce parce que vous n’auriez pas pu faire autrement
ou était-ce la volonté d’expérimenter ce style de vie ?
FRANCECatholique N°3054 12 JANVIER 2007
27
CINEMA
Il était préférable de vivre sur place pour comprendre ce que vivent les moines. Si on tourne un film
sur le monastère en vivant dans un hôtel, on ne peut
pas capturer le rythme de cette vie. C’est parce que j’ai
vécu sur place et parmi eux pendant plusieurs mois
que j’ai pu pénétrer dans les rythmes de travail des
moines. J’ai tout fait seul : j’étais derrière la caméra,
j’ai enregistré le son, j’ai porté 20 kilos de matériel. J’ai
souvent cru que je ne n’y arriverais pas jusqu’à ce que
je découvre une autre image qui me fascinait. C’était
plus particulièrement épuisant le soir et je reconnais
que j’ai loupé quelques prières de nuit...
■ Mais vous étiez quand même sur place chaque nuit...
Oui. Durant toute leur vie, les moines chartreux ne
dorment jamais une nuit complète. 3 heures de sommeil sont suivies de 2 ou 3 heures de prière, puis de
nouveau par 3 heures de sommeil. Ils ne se détendent
jamais complètement, mais restent concentrés en permanence, aidés par des vagues d’adrénaline. Les Chartreux n’ont ni vacances ni temps libre. C’est la nuit
qu’ils poursuivent une activité pendant le plus longtemps : la prière de la nuit. Puis il y a la messe du
matin (45 minutes) et celle du soir (30 minutes), sans
oublier les prières dites en cellule 7 fois par jour. En
plus de ça, chacun lave ses propres affaires, fait la
vaisselle, travaille dans le jardin, coupe du bois, lit des
livres et fait des corvées dans le monastère. Le temps
pour soi n’existe pas. Quand je pensais enfin avoir un
peu de répit, une cloche sonnait appelant à une activité.
■ Combien aviez-vous de pellicule à la fin du séjour ?
Environ 120 heures. Je tournais une cassette par
jour, soit 49 minutes. Et comme je suivais les tâches
quotidiennes des moines (lessive, vaisselle, jardinage...),
je n’avais que 2 à 3 heures par jour pour mon travail de
réalisateur. J’ai essayé de ne répéter aucune prise. Si
une scène était bonne, je me forçais à ne pas la retourner. Mon premier objectif était d’éviter les clichés et de
ne pas filmer le type de scènes qu’on s’attend à voir
dans un monastère.
■ Comment avez-vous communiqué si personne ne parlait ?
Durant
toute leur
vie, les
moines
chartreux
ne dorment
jamais une
nuit
complète
Dans le film, on voit dans l’antichambre, la boîte
dans laquelle les moines se laissent des messages. Par
exemple, un moine était contre l’idée du tournage.
Dans ce cas, j’ai insisté pour le rencontrer. S’il s’y opposait au point de quitter le monastère, je ne tournerais
pas. Je lui ai donc laissé un mot avec les lieux et les
heures de tournage pour le jour suivant en lui demandant s’il était d’accord. J’ai fait la même chose pour les
scènes avec le jardinier et le tailleur. Chez les
Chartreux, une règle dit qu’on peut parler si c’est
nécessaire pour son travail. Et comme le tournage était
mon travail, j’ai pu lui dire : “Là, j’ai besoin d’une prise
à trois broches.”
■ Il n’y a pas de vœu de silence à proprement parler ?
La règle des Chartreux veut que l’on parle le moins
possible. Dans certains endroits, il ne faut absolument
pas parler : dans la chapelle, l’antichambre et dans les
couloirs. Par contre, dans d’autres endroits, il est demandé de parler, par exemple lors des promenades du
dimanche. On demande tout de même à ce que chacun
se tienne dans une bulle de solitude. C’est pour cette
raison que les ateliers et les pièces sont très grands. Si
quelqu’un coupe des légumes dans la cuisine, une
autre personne (effectuant la même tâche) doit être
assez éloignée de la première pour oublier sa présence.
C’est évidemment un mécanisme qui rend le fait de
rester silencieux plus facile. Dans cette atmosphère, j’ai
essayé d’être le plus discret et le plus silencieux possible. Au début du tournage, le plus difficile a été de
contrôler le bruit que je faisais moi-même. Dans le
silence ambiant, tout déplacement ou grincement de
matériel semblait démesuré. J’avais même du mal à
supporter le bruit insupportable du mouvement de
tissu de ma veste.
■ C’était une idée dramaturgique formidable d’accompagner un novice, nouvel élément dans cette communauté...
Ça a été un pur hasard. Je venais d’arriver quand
on m’a informé qu’un nouveau arriverait le lendemain
matin à 9h et qu’il était primordial que je filme cet
événement. Je ne me sentais pas prêt à filmer des moments aussi intimes, mais l’occasion ne se représenterait pas de sitôt... Quatre nouveaux moines sont arrivés dans la communauté pendant mes 6 mois de présence chez eux. Ils ne sont pas tous restés. Beaucoup
sont persuadés qu’ils veulent devenir moines, mais ils
se rendent compte que ce n’est vraiment pas conforme
à leurs envies. Je dirais qu’environ 80% des novices ne
restent pas. Parmi les autres 20%, certains sont renvoyés par les moines.
28 FRANCECatholique N°3054 12 JANVIER 2007
FRANCECatholique N°3054 12 JANVIER 2007
29
CINEMA
■ N’est-ce pas épouvantable d’être renvoyé par le monastère ?
Dans la cérémonie d’admission, il est bien spécifié
que chacun est libre de partir et que la communauté a
également le droit de renvoyer qui elle le souhaite.
C’est une protection pour les postulants : si les moines
s’aperçoivent que le postulant ne sera pas capable de
vivre dans un Ordre aussi strict, il est renvoyé. Au début, j’ai essayé de convaincre les moines qui étaient
contre mon film que ce serait une bonne publicité
pour leur monastère. Mais cette idée est absurde pour
un Chartreux. Admettons qu’après 25 ans dans le
monastère, un moine décrète que ce n’est pas le genre
de vie qu’il espérait et décide de quitter les lieux. Il n’y
a rien de pire, parce qu’où ira-t-il ? Aucun des
Chartreux ne se soucie de l’avenir de l’Ordre. Il existe
depuis presque 1000 ans. Si Dieu décide que demain,
c’est terminé, qu’il en soit ainsi.
■ Pourquoi avez-vous choisi de ne pas mettre des commentaires en “voice over” ?
On ne peut pas utiliser le langage pour décrire un
monde qui évolue aussi loin des mécanismes du langage. Les moines s’évertuent à approfondir leur
connaissance des choses. Je ne peux que souhaiter
que le spectateur expérimente également la même
chose. Mais ça ne peut pas fonctionner si j’offre des
explications à tout ce qu’il voit. Il était évident pour
moi que je ferais un film sur la vision des choses et
l’écoute de ces mêmes choses avec précision. Bien
entendu, les commentaires se font après le montage...
Mais ils ont une qualité différente. A travers le montage, le spectateur décide ce qu’il veut voir et entendre, quand c’est clair ou quand ça l’est moins. C’est un
film calme, mais pas muet. La bande sonore est très
intéressante. On entend et on voit tout différemment
dans un monastère. A travers le silence, les objets
deviennent notre double, comme par exemple les boutons pour le tailleur. Certains spectateurs ne comprennent pas tout de suite ce que font les moines... Ça ne
me dérange pas. Mon film n’a pas la réponse à toutes
les questions. S’il suscite l’intérêt du spectateur, celuici pourra surfer sur internet et faire ses propres
recherches.
Aujourd’hui, on croule sous l’information. Ce qui
manque, et c’est ce que chacun doit trouver par luimême, c’est la signification des choses. Mon film veut
également être un film sur le spectateur lui-même,
sur ses perceptions, ses pensées. Il devrait se concentrer sur lui-même.
C’est également un film sur la contemplation.
Pensez à ceci : en moyenne, un moine passe 65 ans de
sa vie là-bas. 65 années au cours desquelles il se livre
au même rituel jour après jour. Je ne peux pas expliquer sa signification au spectateur, qui ne peut avoir
qu’une vague impression à travers les répétitions dans
le film. C’est la seule manière dont je pouvais faire le
film : sans donner aucune direction au spectateur,
mais en lui laissant une liberté totale.
■ Une liberté que les moines ont également ?
30 FRANCECatholique N°3054 12 JANVIER 2007
Les moines ont une certaine liberté malgré la sévérité des règles, puisqu’ils doivent contrôler leur vie. On
pense qu’on peut se modeler une vie, ou qu’on devrait
la modeler afin d’atteindre le bonheur. C’est pour cela
que beaucoup de personnes ont peur de la vie. Le
monastère est un endroit où la peur n’existe pas. Les
moines ont cette confiance séculaire que Dieu dirige
tout. “On ne peut pas utiliser le langage pour décrire
un monde qui évolue aussi loin des mécanismes du
langage.”
On entend
et on voit
tout
différemment
dans un
monastère
■ Dans certaines scènes, les moines ont un côté enfantin...
Absolument. Par exemple, dans une des scènes, ils
s’amusent à glisser sur une pente enneigée et se lancent des boules de neige. Il ne faut pas oublier que les
moines sont très athlétiques. Ils m’ont aidé à porter
mon matériel sur la montagne quand je ne n’en pouvais plus. Même ceux qui avaient un a priori sur le film
m’ont aidé. Pour moi, il y avait un mystère : le contact
physique. Existe-t-il dans le monastère ? Après tout,
c’est une composante primordiale de la vie humaine.
C’est pour cela que les scènes chez le coiffeur sont si
importantes, notamment quand on coupe les cheveux
d’un moine ou quand on passe de la pommade au
vieux moine.
■ Quelle est la position actuelle des Chartreux ? Leur
influence est-elle importante ?
Vous trouverez ces réponses ailleurs. Je n’ai pas
voulu faire un film sur le monastère, mais sur la vie des
moines. Surtout que je vois des parallèles évidents
avec la vie d’artiste. Et sur ma vie quotidienne en tant
que réalisateur. Je suis conscient des sacrifices qu’il
faut faire et de ce qu’il faut rejeter. Dans les deux
mondes, on gère des concepts comme la concentration, la perception et la signification de ces actes. ■
Monastère de la Grande Chartreuse
38380 Saint Pierre de Chartreuse
CINEMA
L’incroyable destin
de Harold Crick
LE PETIT PEINTRE DU RAJASTHAN
Harold Crick, un inspecteur des impôts fasciné
par le pouvoir des chiffres, mène une existence
très ordonnée, où chaque moment de sa journée
est soigneusement minuté. Un jour, il entend une
voix féminine commenter ses faits et gestes...
À partir d'une intrigue originale, Marc
Forster tisse une réflexion passionnante sur le
rapport entre fiction et réalité (qui était déjà le
sujet de son précédent film, le thriller
psychologique «Stay»). Si l'on peut regretter la
facture conventionnelle de sa mise en scène, et
un traitement parfois trop superficiel de
certaines questions soulevées par le scénario, le
film parvient à séduire par la tournure que prend
le récit et le soin accordé à ces savoureux
détails de la vie auxquels le film rend hommage.
Menant une existence solitaire et réglée
comme du papier à musique, Harold Crick
découvre que de petites surprises peuvent être
agréables à vivre. Sa vie se remplit peu à peu
d’émotions communicatives.
M.-L. R.
Comédie dramatique
américaine (2006) de
Marc Forster, avec
Will Ferrel (Harold
Crick), Dustin
Hoffman (Jules
Hilbert), Emma
Thompson (la romancière) (1h45).
(Adolescents). Sortie
le 10 janvier 2006.
Le serpent
Un photographe sur le point de divorcer subit
la vengeance d'un ancien camarade de classe.
Eric Barbier signe un thriller efficace et
bien ficelé qui tient le spectateur en haleine
de bout en bout. Yvan Attal et Clovis Cornillac
sont épatants.
L'atmosphère de cette sombre
histoire, sur fond de vengeance, est
particulièrement oppressante avec quelques
scènes morbides et très violentes.
M.-L. R.
Thriller français (2006)
de Éric Barbier, avec
Yvan Attal (Vincent),
Clovis Cornillac (Jospeh
Plender), Pierre Richard
(Cendras), Simon
Abkarian (Sam), Minna
Haapkyla (Hélène)
(1h59). (Adultes) Sortie
le 10 janvier 2006.
Un
par Marie-Christine RENAUD d’ANDRÉ
regard sur l’Inde
Les havelis sont de grandes
maisons richement ornées
construites sur la fameuse
«route de la soie».
A
vec l'essor économique que
connaît l'Inde, c'est la société
tout entière qui vit une profonde
mutation. Les valeurs traditionnelles se
confrontent sans cesse au défi de la
modernité. Le cinéaste Rajkumar Bhan
a choisi une belle histoire, pleine de
charme et de tendresse, pour commenter habilement cette situation.
Aniket, dix ans, vit avec ses parents,
à Poona, une de ces villes dortoirs
situées au sud de Bombay. Son père,
qui travaille beaucoup, fait tous les
jours de longs trajets jusqu'à la mégalopole indienne. Ses parents le confient
quelque temps à sa grand-mère, qui
habite une petite ville du Rajasthan au
cœur du désert. Le jeune garçon découvre alors avec émerveillement les
magnifiques fresques qui ornent les
palais de la ville et prend conscience de
sa passion pour la peinture.
Cette jolie chronique de
l'enfance touche par l'universalité des
thèmes qu'elle aborde (la découverte
d'une passion, la difficulté à la faire
accepter par son entourage…) et
séduit par son style à la fois simple et
poétique. Le récit, d'une belle fluidité,
dresse un portrait réaliste et passionnant de l'Inde d'aujourd'hui. Certaines
scènes sont très touchantes, comme
celles où le jeune Aniket est saisi
(
Chaque personnage
représente une
sensibilité de l'Inde
d'aujourd'hui
d'émotion à la vue des fresques.
Certes, le film n'évite pas quelques
petites maladresses, comme un sentimentalisme parfois un peu trop appuyé pour notre regard d’Occidentaux
blasés, mais il s'agit d'une réserve mineure tant un sentiment d'enchantement prédomine.
La tendre complicité et la sensibilité artistique qui unissent l'enfant
et sa grand-mère sont particulièrement bien rendues. ■
Le petit peintre du Rajasthan. Comédie dramatique
indienne (2005) de Rajkumar Bhan, avec Salabha Deshpande
(la grand-mère), Omkar Leke (Anirudh), Nandu Madhav
(Aniket), Seetharam Panchal (le peintre), Maithili Zaokar
(Malati) (1h28). (Adolescents). Sortie le 10 janvier 2007.
Une grande année
Alors qu'il mène une brillante carrière à Londres, Max
apprend qu'il a hérité de son oncle un vignoble provençal.
Ce film est l'adaptation d'un roman de Peter Mayle.
Il est assez surprenant de retrouver derrière la caméra Ridley
Scott, plutôt réputé pour ses films d'action spectaculaires, et
qui ne semble pas vraiment à l'aise pour filmer la nonchalance
méridionale. L'ensemble manque d’ailleurs d'émotion même si l'on passe un agréable moment.
Entièrement voué à son travail et au profit qu'il lui procure, Max va, peu à peu, redécouvrir
les petits plaisirs de la vie et renouer avec un passé qu'il avait oublié.
Sabine PEROUSE
Comédie dramatique américaine (2006) de Ridley Scott, avec Russell Crowe (Max Skinner), Albert Finney (oncle Henry), Marion Cotillard (Fanny),
Abbie Cornish (Christie Roberts), Tom Hollander (Charlie Willis), Freddie Highmore (Max jeune), Archie Panjabi (Gemma), Didier Bourdon (Francis
Duflot), Valeria Bruni-Tedeschi (Auzet) (1h58). (Adolescents). Sortie le 3 janvier 2007.
FRANCECatholique N°3054 12 JANVIER 2007 31
EXPOSITIONS
DU JAPON A L’EUROPE
© LES ARTS DÉCORATIFS, MUSÉE DE LA PUBLICITÉ, PARIS - © PHOTO L. SULLY JAULMES
Katagami
La Libre Esthétique,
Salon annuel,
Gisbert Combaz,
1899.
’exposition "Katagami", ne se limite pas
aux élégants pochoirs en papier utilisés
par les Nippons pour teindre les tissus.
Elle prend toute sa dimension en s’étendant à l’influence qu’ils ont pu exercer
sur les arts décoratifs en Occident. Les katagami
sont apparus au XIIIe siècle, mais c’est vers les
années 1860 qu’ils inspirent le "japonisme", prélude à une durable fécondation de l’art européen.
Plus de deux cents pièces sont présentées. Elles
proviennent d’institutions du Pays du Soleil levant
et d’Europe : Musée d’Orsay et des Arts décoratifs
de Paris, Musées Royaux d’Art et d’Histoire de
Bruxelles, MAK de Vienne, Musée des Arts décoratifs de Hambourg.
Si l’impression avec pochoir en papier
apparaît donc au Japon à l’époque de
Kamakura, son emploi n’est réellement
maîtrisé que quelques
siècles plus tard. Le
découpage des katagami se fait au poinçon ("kiri-bori") ou au
canif ("tsuki-bori"). A
partir de l’époque Edo,
les petits motifs appliqués sur le lin ou la
soie sont généralement appelés "komon", et "chûgata"
ceux, relativement
grands, utilisés sur
les cotonnades. Aucun katagami antéKasane en crêpe à motif komon
rieur au XVIII e siècle
Epoque d’Edo – ère Meiji (XIXe siècle)
L
© BU
NKA
GAK
UEN
COS
TUM
EM
USE
UM
Le découpage
des katagami
se fait au
poinçon
ou au canif
32 FRANCECatholique N°3054 12 JANVIER 2007
n’a été conservé. La première partie de l’exposition présente des modèles qui datent, pour la plupart, des XVIIIe et XIXe siècles. Ces modestes outils
de l’industrie textile présentent des dessins, élégants et précis, de toutes sortes. Le résultat de
leur emploi se présente sous forme de vêtements
raffinés : kamishimo (habit de cérémonie des
hommes de la classe des guerriers), suô (à l’origine guerrier, également utilisé dans le théâtre kyôgen), kasane (costume de femme composé de
deux kimonos), hakama (pantalon) ou plus humble yukata (à l’origine sortie de bain, devenue
vêtement d’été des classes populaires).
Le milieu du XIXe siècle voit la fin de l’isolement du Japon et, avec elle, le développement du
commerce avec l’Occident. Commence le japonisme et le goût pour les objets venus de l’archipel. Au moment où l’industrie textile, en voie de
modernisation, délaisse les katagami, ceux-ci font
leur apparition
en Europe où ils
inspirent les artistes. C’est de
cette histoire
que traite la
seconde partie
de l’exposition
en s’intéressant aux
grands foyers
artistiques :
Vienne, Paris,
Bruxelles,
Londres… De
jeunes artistes
Vêtement à motifs bingata
se séparent
XVIIIe-XIXe siècle
d’institutions
conservatrices. La première "Sécession" est fondée
à Munich en 1892, la seconde à Vienne, cinq ans
COLLECTION PARTICULIÈRE - DR
Avec l’exposition
"Katagami", la Maison
de la Culture du Japon
met en valeur l’influence
de ces pochoirs sur le
japonisme, puis sur l’Art
nouveau et l’Art déco.
par Alain SOLARI
EXPOSITIONS
plus tard. On peut observer l’influence des katagami dans le décor floral d’une jardinière en
argent d’un Josef Hoffmann ou dans celui, plus
géométrique, d’une corbeille à pain de Koloman
Moser. En 1862, l’exposition universelle de
Londres présente pour la première fois une section consacrée au Japon. Le mouvement Arts &
Crafts, fondé deux ans plus tôt par William
Morris, prône un retour aux sources artisanales.
On peut trouver des correspondances entre ses
œuvres et les motifs japonais. Dans les années
1890, Bruxelles est un berceau de l’Art nouveau.
Le japonisme y parvient via Paris et le mouvement Arts & Crafts y exerce également une
influence. Les artistes bruxellois sont de fervents amateurs d’art japonais. C’est frappant
dans le dessin – quatre tachibana, orangers
japonais – d’un tapis d’Henry Van de Velde, ou
dans celui – trois poissons en cercle - du coffret
de toilette hexagonal de Philippe Wolfers.
L’exposition se termine en apothéose avec
l’évocation de l’Art nouveau et de l’Art déco en
France. Alors que le japonisme a déjà engendré
une nouvelle esthétique, "l’idée d’utiliser le style
japonais pour donner un nouvel essor aux arts
décoratifs prend forme autour de l’Union Centrale des Arts décoratifs" dans les années 18701880. A Nancy, Gallé (dont on peut voir une
chaise avec un dossier au motif végétal) et les
frères Daum intègrent des motifs japonais dans
leurs œuvres. Jacques Gruber, qui a travaillé
avec Majorelle et les Daum, est présent avec un
vitrail au japonisme évident. Une gravure sur
bois de Félix Vallotton, "la paresse" 1896, mise
en présence d’un katagami de type chûgata, est
très parlante. Quant à René Lalique, avec ses
créations aux courges sinueuses et aux motifs
végétaux, il est particulièrement bien représenté
avec de nombreux et très beaux bijoux, des peignes, une écharpe "Champ de marguerites", et
de magnifiques vases. Deux d’entre
eux, "Baies" (1924) et "Marguerites" (1923), rapprochés de
deux suô aux motifs de chrysanthèmes, introduisent d’ailleurs le
visiteur à l’exposition. "Modèles
d’un japonisme tardif auquel ils
donnent un nouveau souffle, les
katagami ont inspiré non seulement l’Art nouveau, mais aussi bien
Composition
des aspects du style Art déco des avec ovale.
années 1925". ■
1998.
"Katagami, les pochoirs japonais et le japonisme", jusqu’au 20 janvier. Maison de la
Culture du Japon, 101 bis quai Branly,
75015 Paris. Du mardi au samedi (12h19h), nocturne le jeudi (jusqu’à 20h).
Zaborov : livres éternels
Peintre, sculpteur et photographe, Boris Zaborov
demeure méconnu du public français. Pourtant, de nombreuses rétrospectives lui ont été consacrées en Europe.
La Monnaie de Paris expose en ce moment une vingtaine
de ses sculptures, sur le thème des "Livres éternels", ainsi
que la maquette de "monument au livre" qui lui a été commandé par l’université Technion d’Haïfa.
L’artiste est né en Biélorussie, à Minsk, le 16 octobre
1935. Après des études à l’Ecole des Beaux-Arts de la
capitale biélorusse, puis à l’Académie des Beaux-Arts de
Moscou, il réalise des décors de théâtre et illustre des
ouvrages littéraires. 1980 est une grande étape puisque
Relief. 1987.
Boris Zaborov émigre. Depuis, il vit et travaille à Paris. Il
a exposé ses œuvres en de nombreuses villes de France et d’Europe. En 1989, le
Palais de Tokyo, à Paris, lui consacre une rétrospective. En 1995, c’est au tour du
Musée d’Etat d’Art ouest-européen Pouchkine, de Moscou, puis au "Manège" de
Saint-Pétersbourg d’en faire autant. Des collections publiques possèdent des
œuvres de Zaborov en Russie, en Biélorussie, en Autriche, en France…
"Il est difficile de trouver dans l’histoire une découverte qui ait joué un rôle
plus important dans l’évolution et dans la civilisation de l’humanité que l’écriture
et le livre", écrit Boris Zaborov. "En tant qu’objet, le livre est souvent une œuvre
d’art remarquable. Aujourd’hui, le livre, dans ce sens-là, est menacé de disparition. Les nouvelles technologies commencent à remplacer le livre dans sa fonction… C’est ce qui m’a conduit à l‘idée d’ériger un monument au livre. Il serait un
signe fort de notre estime infinie à son
égard". On n’est donc pas surpris de trouver,
au centre de la première salle, un livre d’où
jaillit un flot de caractères typographiques
de toutes tailles. Il s’agit de la maquette, à
l’échelle 1/4, du monument commandé au
sculpteur. L’effet est très réussi. Il le sera certainement encore plus en grandeur réelle,
Couverture de livre. 1990.
lorsque l’œuvre sera installée, en mars 2007, sur le parvis de l’université
Technion d’Haïfa, un prestigieux institut technologique.
Autour de la maquette, dans cette première salle, les "Compositions" I, II et III,
"tableaux" formés eux aussi de caractères d’imprimerie entre lesquels s’inscrivent
d’autres éléments qui apportent une part de mystère, entrent en résonance avec
l’œuvre centrale, "alphabets échappés de vieilles casses de typographes morts
depuis longtemps"*. Au dos d’une "Bible", surgit un Christ en croix… Ces bronzes de Zaborov ne sont pas lisses, brillants ou polis. Ils ont leur part de mystère ;
ce que confirme la douzaine d’œuvres, de différentes tailles, exposées dans la
seconde salle, présentées sur des piédestaux autour
desquels on peut tourner. Les livres de Zaborov ont
l’air vieux, gris, comme empoussiérés, fatigués d’une
lourde histoire suggérée. "Aimer les sculptures de
Zaborov, c’est s’engager dans un débat… entre ce
que l’on voit et se qui se cache. Entre le réel et l’énigme. Car il y a énigme"*. Enigmes et symboles ;
mais lesquels ? Ce que confirme l’artiste lorsqu’il
déclare n’avoir aucune intention délibérée en ébauchant une œuvre, qu’il se laisse porter. Pourtant, parfois, le voile du mystère se déchire. Observons bien la couverture du "Livre D"
(2006) et ce couteau dont la lame laisse deviner un profil connu : c’est celui de
Staline ! "La guerre ! Elle est là, coulée dans les bronzes de Zaborov… ses sculptures témoignent des terreurs, des fuites, des derniers combats..."*. En quittant la
Monnaie de Paris, on se rappelle longtemps les "livres torturés pour qu’à jamais
on se souvienne de ceux qui les ont brûlés…".
A.S.
* Philippe Bidaine
"Zaborov : livres éternels", jusqu’au 14 janvier, tous les jours (13h-18h). Monnaie
de Paris, 11 quai Conti, 75006 Paris, tél. 01.40.46.55.35/33.
FRANCECatholique N°3054 12 JANVIER 2007
33
THEATRE
FEST'HIVER
Les festivals
d’Avignon
par Pierre FRANÇOIS
Seconde édition d’un
festival régional à Avignon,
après le succès de la première,
du 12 au 20 janvier prochains.
Ambiance.
out le monde connaît le festival
d’Avignon, et beaucoup la distinction à
faire entre le in et le off. Mais depuis
l’an dernier il y en a un troisième, qui se
donne en janvier. Et a pour objet de
procurer des scènes aux troupes provençales nomades. Ce sont les cinq théâtres permanents de
la ville, les cinq directeurs les plus anciens (1), qui
se sont regroupés depuis l’an dernier pour offrir
leurs lieux. Il est simplement demandé aux compagnies de préparer une création pour l’occasion
(cette condition étant encore assez souple) et
d’être choisies par un des responsables.
Moyennant quoi il offre une résidence, qui peut
aller jusqu’à un mois, pour préparer la mise en
scène en fonction de la configuration de sa salle.
En plus est prévue la mise à disposition de tous
les moyens professionnels dont ces théâtres
disposent, des compétences du régisseur aux
contacts avec la presse.
Il n’y a pas de thème imposé pour ce festival.
Comment pourrait-il en être autrement alors que
ces cinq complices n’ont pas les mêmes options
artistiques et que tous s’interdisent d’interférer
dans la mise en scène de la création qu’ils accueillent, ce qui conduit l’un d’eux à définir ce
Fest’hiver (2) comme un arc-en-ciel.
Arc électrique aussi car ce festival privilégie
les moments de rencontre entre professionnels
de la scène. Et la réflexion sur le monde culturel.
Ainsi sera organisé un débat entre un homme
désormais libre - Robert Abirached - et un autre
encore en fonction au ministère de la Culture Jean-Luc Bredel – qui devront échanger autour
des enjeux de la décentralisation culturelle.
Des coups de cœur ont lieu, avec la confiance
qui les accompagne. Certes l’Uppercu Théâtre
joue du Camus chez Serge Barbuscia qui aime
cet auteur. Certes Quai Vide, dont la responsable
connaissait Gérard Gelas depuis des années,
34 FRANCECatholique N°3054 12 JANVIER 2007
D.R.
T
Des moments
de rencontre
entre
professionnels
de la scène
aborde un thème local qui n’est pas indifférent à
ce dernier (la réouverture d’une ligne ferroviaire).
Mais il y a aussi Thierry Alcaraz, qui a voulu venir
au Chien qui fume à cause de la réputation familiale et sereine de son équipe. Ou Frédéric Poty
qui est heureux d’avoir été choisi par le théâtre
des Halles. Et même Tandaim, qui a déjà de
beaux succès à son actif, est là, chez André
Benedetto.
Car toutes ces compagnies, quelle que soit
leur notoriété, estiment avoir à gagner en jouant
dans de tels lieux. Les unes espèrent simplement
une meilleure visibilité, les autres y voient une
reconnaissance de leur travail, et pour toutes s’y
ajoute ce qui fait l’âme même de leur métier : le
plaisir de jouer. ■
(1) Alain Timar du théâtre des Halles, Gérard Vantaggioli du théâtre du
Chien qui fume, Gerard Gelas du théâtre du Chêne noir, André Benedetto
du théâtre des Carmes et Serge Barbuscia du théâtre du Balcon.
(2) Fest’hiver, Scènes d’Avignon & Compagnies. Du 12 au 20 janvier, 5
spectacles, 10 représentations, un forum. "Caligula", au théâtre du Balcon,
les 14 et 18 janvier ; "Les Valeureux", au théâtre des Carmes, les 16 et 19
janvier ; "Quai vide", au théâtre du Chêne noir, les 13 et 18 janvier ; "Pièce
dure", au théâtre du Chien qui fume, les 13 et 16 janvier ; "Ca me laisse
sans voix", au théâtre des Halles, les 14 et 19 janvier. Forum sur les enjeux
de la décentralisation culturelle le 17 janvier. www.scenesdavignon.com
TÉLÉVISION
La traque des nazis
Le maître du jeu
par Marie-Christine RENAUD d’ANDRÉ
maîtres dans l’art de mettre en scène leur
procédure judiciaire, qui est spectaculaire.
L’intérêt de cette histoire passionnante,
c’est qu’elle met en relief un dysfonctionnement du système : la manipulation des
membres d’un jury. Gary Fleder («Le collectionneur», «Pas un mot») sait conduire un
thriller, et c’est le mode qu’il a adopté pour
cet extraordinaire suspense. John Cusack
est ambigu à souhait, tandis que Gene
Hackman et Dustin Hoffman (c’est leur
premier film ensemble, bien qu’ils soient
très amis depuis longtemps) s’affrontent
dans un brillant combat d’avocats. De
La guerre est terminée et tout le monde songe à
la reconstruction. Pourtant, le président des
États-Unis, Harry Truman, veut traduire en
justice les principaux responsables nazis survivants. Il parvient à convaincre ses alliés, au
départ réticents, et c’est le procès de
Nuremberg qui verra la condamnation à mort et
l’exécution de la plupart d’entre eux. Pourtant,
de nombreux criminels nazis ont échappé à l’arrestation, et, après quelques années de clandestinité, ont repris tranquillement leurs activités,
que ce soit en Amérique du Sud ou tout simplement en Allemagne. C’est un rescapé des camps
de la mort, Simon Wiesenthal, qui a entrepris la
difficile tâche de rechercher ces criminels et de
les faire traduire en justice. C’est à lui que l’on
doit d’avoir retrouvé la trace d’Adolf Eichmann,
qui fut ensuite enlevé par les services secrets
israéliens, puis jugé, condamné à mort et exécuté à Jérusalem. Après Simon Wiesenthal, c’est
au tour du couple franco-allemand formé de
Beate et Serge Klarsfeld de consacrer sa vie à
débusquer les anciens nazis.
Il faut avoir le cœur bien accroché
pour regarder certaines scènes de ce documentaire. Car Daniel Costelle a réussi à trouver des
images inédites (et abominables !) pour raconter l’histoire de cette traque des nazis. En mettant en parallèle les documents nazis des
années 30 et ceux des années 45, il dénonce la
barbarie nazie avec vigueur. Puis il raconte de
quelle manière les uns et les autres ont consacré leur vie à obtenir que les coupables soient
jugés. Chacun à sa manière (on peut préférer
celle, plus digne, de Simon Wiesenthal) se bat
pour la justice. Un rappel historique aussi nécessaire qu’intéressant, notamment à l’heure des
polémiques sur l’exécution de Saddam Hussein ou
le procès des derniers Khmers rouges...
En automne 1941, le sud de la France est encore
en zone libre. C’est ainsi que de nombreux réfugiés,
qui ont réussi à passer la ligne de démarcation,
frappent à la porte des habitants d’un village des
Cévennes. Très vite, le pasteur Fontaine prend fait et
cause pour eux et exhorte ses paroissiens à faire de
même.
Au départ, il y avait un fait authentique
(qui eut lieu au Chambon-sur-Lignon), que les scénaristes ont repris, en l’arrangeant un
peu. Avec sobriété et talent, Jean-Louis Lorenzi, le réalisateur, raconte cette belle histoire
de résistance devant la barbarie. Chacun à sa place, de la plus modeste à la plus exposée,
refusera l’inacceptable et sauvera le maximum d’enfants. Cette bouleversante histoire d’héroïsme au quotidien a été récompensée de nombreux prix dans le monde. Inutile de préciser
que l’interprétation est impeccable.
C’est le pasteur, le personnage principal de ce beau téléfilm. Avec sa foi vibrante
(ses sermons sont magnifiques !), son courage et son sens de la charité, il saura entraîner
derrière lui toutes ses ouailles.
Docu. français (2006) de Daniel Costelle et Isabelle Clarke. Commentaire dit par Mathieu Kassovitz. Lundi 15 janvier, sur France 2, à 20h50.
Téléfilm français (1995) de Jean-Louis Lorenzi, avec Patrick Raynal (le pasteur Fontaine), Ottavia Piccolo (Martha Fontaine), Jip Winjngaarden (Clara),
Dora Doll (Émilienne), Jean-François Garreaud (Robert Vitrac), Benoît Magimel (René), Philippe Lefebvre (Marc) (1h58). Diffusion le jeudi 18 janvier,
sur France 2, à 20h50
Dans un procès très médiatique,
le roi de la manipulation des
jurys rencontre un juré
particulièrement retors.
eux monstres sacrés de l’art dramatique, des dialogues brillants et une
mise en scène nerveuse, il n’en faut
pas davantage pour réaliser un film palpitant. Lorsque, en prime, le sujet est passionnant, avec une réelle dimension politique, le téléspectateur est à la fête.
Rankin Fitch est le spécialiste incontesté de l’art d’analyser le comportement des jurés, afin de les sélectionner ou
de les récuser, suivant les besoins de son
client. Mais Nick Easter a réussi à tromper
toutes les analyses et à être choisi comme
juré dans un procès opposant une veuve à
un puissant marchand d’armes. Très vite,
Nick offre de manipuler le jury dans le
sens de la partie qui le paiera le mieux, et
il prend contact avec les deux parties.
Les Américains sont passés
D
(
Ce film brillant dénonce
les dérives du système
judiciaire américain,
tout en distrayant
coup de théâtre en retournements de situation, cette œuvre maintient l’intérêt
jusqu’à la fin.
Cette sévère critique du système
américain met en scène, fort heureusement, un avocat intègre. C’est aussi une
dénonciation des dangers de la vente libre
des armes à feu. Quelques violences, notamment une bagarre assez pénible. ■
Le maître du jeu. Comédie dramatique américaine (2003) de
Gary Fleder, avec John Cusack (Nick Easter), Gene Hackman
(Rankin Fitch), Dustin Hoffman (Wendall Rohr), Rachel Weisz
(Marlee), Bruce Davison (Cable), Bruce McGill, Jeremy Piven, Nick
Searcy (2h07). Diffusion le lundi 15 janvier, sur Canal +, à 20h50.
La colline aux mille enfants
FRANCECatholique N°3054 12 JANVIER 2007
35
TELEVISION
Dimanche 14 janvier
Lundi 15 janvier
Mardi 16 janvier
TF1
TF1
TF1
TF1
20.50 Le grand concours des
20.50 Opération Espadon GA.
20.50 Les experts, Manhattan :
36 FRANCECatholique N°3054 12 JANVIER 2007
«Hold-up», «Le tunnel de l’enfer»,
«L’œil du témoin». Série avec Gary
Sinise, Melina Kanakaredes 2.
23.15 Le droit de savoir «Radars
automatiques, permis à points :
Enquête sur la face cachée de la
répression». Magazine présenté
par Charles Villeneuve.
France 2
20.55 Football «Coupe de la
Ligue : Reims /Bordeaux».
23.05 Vivre et laisser mourir GA.
Policier (1972) de Guy Hamilton,
avec Roger Moore, Jane Seymour
(1h56). ឭឭ Efficace.
France 3
20.55 Boomtown : «Sous pression», «Chimère» GA. Téléfilm de
John Avnet, avec Donnie
Wahlberg, Neal McDonough 2.
ឭ Pas mal, mais sans plus.
22.30 Ce soir ou jamais.
Magazine présenté en direct par
Frédéric Taddéi. (et à 23h25)
00.40 NYPD blue. Série avec
Dennis Franz.
Arte
L’argent du foot
20.40 Fifa «Du foot au fric» J. ឭ
Orienté, mais peu convaincant.
21.30 Le match des marques.
Documentaire.
22.00 L’intouchable J. ឭ Peu
convaincant.
22.45 Les oreilles sur le dos A.
Téléfilm avec Béatrice Dalle,
Gérald Laroche (1h29). ឭឭឰ
Une bonne atmosphère, mais des
longueurs.
M6
20.50 Super Nanny.
Divertissement.
21.50 C’est du propre.
Divertissement.
22.45 T’empêches tout le
monde de dormir. Magazine présenté par Marc-Olivier Fogiel.
Canal +
DR
DR
DR
animateurs. Divertissement préPolicier (2001) de Dominic Sena,
senté par Carole Rousseau, avec
avec John Travolta, Hugh Jackman
Nikos Aliagas, Denis Brogniart,
(1h35) 3. ឭឭឰ Bien ficelé,
Benjamin Castaldi, Sophie Costes,
mais un peu sensuel.
Alexandre Debanne, Sophie Favier,
22.40 New York section crimiLaurent Fontaine, Jean-Pierre
nelle. Série avec V. D’Onofrio 2.
Foucault, Thierry Gilardi, etc.
20.50 Premier suspect GA.
France 2
23.10 New York, unité spéTéléfilm avec Natacha Amal,
ciale. Série avec Christopher
Bruno Madinier, Alain Doutey.
Émissions
religieuses
:
Meloni 3.
ឭឭ Un policier original et
08h30 Émissions religieuses : «Voix boudbien mené.
France 2
dhistes», «Islam», «À Bible ouverte», «Source
23.10 Incroyable, mais vrai !
20.50 Le plus grand cabaret
de vie», «Présence protestante» - 10h30 Le
Magazine présenté par Bruno
du monde. Divertissement
jour du Seigneur «Tout à la foi : La grâce» - Roblès et Nathalie Vincent.
présenté par Patrick Sébastien, 11h00 Messe, en direct de l’église Saint00.45 Vol de nuit. Magazine
avec Gérard Jugnot, Nathalie
Boniface, à Ixelles (Belgique).
de Patrick Poivre d’Arvor.
Delon, Jean- Paul Rouve, TcheFrance 2
ky Karyo, Guy Marchand, Frédé20.50 À couteaux tirés GA.
rique Bel, Clovis Cornillac, Agnès
Aventures (1997) de L. Tamahori,
20.50 La traque des nazis GA.
Soral, etc.
avec Anthony Hopkins (1h53) 2.
Documentaire de Isabelle Clarke
23.15 On n’est pas couché.
ឭឭឰ Superbe, mais sanglant.
et Danielle Costelle 3. (Voir notre
Magazine présenté par Laurent
22.55 Un jour/une heure : «Deanalyse page 35)
Ruquier.
waere : Le dernier jour», «Otages :
22.25 Complément d’enquête
Jour de liberté», avec Évelyne
«Présidentielle : Tous les coups
France 3
Bouix, Bertrand Blier, Yves Boisset,
sont permis». Magazine.
20.50 Famille d’accueil «À 1 000
Roger Auque, etc.
France 3
mètres du bonheur» J. Téléfilm
France 3
avec Virginie Lemoine, Christian
20.55 Le temps des yé-yé.
Charmetant, Ginette Garcin.
20.55 Le voyageur de la TousDivertissement présenté par
ឭឭឰ Plein d’humour, mais
saint GA. Téléfilm avec Renaud
Frédérique Courtadon, avec
outrancier.
Cestre, Danièle Lebrun, Michel
Johnny Hallyday, Richard Anthony,
22.50 Personnel et confidentiel
Duchaussoy. ឭឰ Une adaptation
Eddy Mitchell, les Chaussettes
«Quai Branly, l’autre musée».
très moyenne de Simenon.
Noires, Françoise Hardy, Sheila,
23.45 La case de l’oncle Doc
23.20 France Europe Express.
France Gall, Sylvie Vartan, Jean«Bêtes de scène». Documentaire.
Magazine de Christine Ockrent.
Jacques Debout, Michèle Torr, etc.
01.15 Nuits de feu GA. Drame en
22.50 Ce soir ou jamais.
Arte
NB (1937) de M. L’Herbier, avec
Magazine. (et à 23h25)
L’aventure humaine
Gaby Morlaix, V. Francen (1h36).
00.40 NYPD blue. Série.
ឭឭឰ Brillant, mais artificiel.
Arte
Arte
20.40 ReGenesis (3 et 4/26) : «Le
L’habit fait le moine
visage de Dieu», «Le fantôme
d’Hira» GA. Série avec Peter Outerbridge (1h40). ឭឭឰ De plus
20.45 Pleins feux sur le
en plus prenant, mais terrible.
Turkmenistan : Karakoum, la
22.20 Des moines en laboratoire
civilisation des oasis J. ឭឭឭ
GA. ឭឭ Intéressant, mais limité.
Superbe.
23.10 Grand format «Les arbres
21.40 Les secrets du Karakoum
de Josh» J. ឭ Émouvant.
J. ឭឭឭ Fascinant.
20.40 Drôle de frimousse J. CoM6
Musica
médie musicale (1957) de Stanley
20.50 Harry, un ami qui vous
22.35 L’homme qui danse.
Donen, avec Audrey Hepburn, Fred
veut du bien A. Thriller (2000) de
23.35 Dans l’ombre du pouvoir
Astaire (1h39). ឭឭ Délicieux.
Dominik Moll, avec Laurent Lucas,
(2/2) GA. Téléfilm avec Michael
22.25 Des rêves sur mesure J. ឭ
Sergi Lopez, Mathilde Seigner
Mendl, Jürgen Hentsch (1h30).
Très moyen.
(1h51) 2. ឭឭឰ Original et bien
ឭឭ Très bien fait.
23.50 Les codes vestimentaires
fait, mais la fin est décevante. Des
«S’habiller
comme
il
faut»
J
.
ឭឭ
M6
images suggestives.
Intéressant.
La trilogie du samedi
23.00 Anatomie A/Ø. Horreur
M6
20.50 Les 4400 «La nouvelle ère».
(2000) de S. Ruzowitzky (1h35) 3.
Série avec Patrick Flueger 2.
20.50 Zone interdite «Profession
ឰឰ Affreux.
22.30 Threshold «Premier
juge : Enquête sur la justice au
Canal +
contact». Série avec Robert Patrick
quotidien». Magazine présenté par
20.50 Le maître du jeu J. ComéBenedict, Carle Gugino 3.
Mélissa Theuriau.
die dramatique (2004) de Gary
00.20 Dead zone. Série.
23.00 Enquête exclusive «Police,
Fleder, avec John Cusack (2h03)
chauffards, SDF : La vie cachée du
Canal +
2. (Voir notre analyse page 35)
périphérique». Magazine.
20.50 In her shoes A. Comédie
KTO
Canal +
(2005) de Curtis Hanson, avec
20.50 Patrons chrétiens.
Cameron Diaz (2h05). ឭឭឰ
21.00 Football «Rennes/Marseille».
Comment concilier la direction
Amusant, mais assez sensuel.
KTO
d’une entreprise avec sa foi ?
KTO
20.50 La foi prise au mot «Éthique
21.45 Un jour, une foi «Chemins de
20.50 VIP. Magazine.
et entreprise», avec Régis Burnet.
vie».
21.45 Concert gospels «Les grou21.45 Un jour, une foi «La vie des
22.10 KTO magazine «Le drame des
pes Tsefanyah et Soul Spirit».
diocèses».
enfants morts-nés».
TF1 - F Pages
Samedi 13 janvier
20.50 Une belle journée J.
Comédie dramatique (2005) de
Gaby Dellal, avec Peter Mullan,
Brenda Blethyn (1h35). ឭឭ
Émouvant et bien fait, mais un
peu trop sentimental.
KTO
20.50 Du bleu sur les hauts-fourneaux. Pour lutter et aider les chômeurs, trois hommes créent une
entreprise qui leur vient en aide.
21.45 Un jour, une foi «Que deviennent-ils ?».
22.10 La foi prise au mot
«Chemins de vie».
TELEVISION
Mercredi 17 janvier
Jeudi 18 janvier
Vendredi 19 janvier
TF1
TF1
TF1
DR
Alexandra Vandernoot, Jérémie
Covillault, Richard Gotainer,
Edward Meeks. ឭ Très moyen.
22.35 Preuve à l’appui : «Meurtre
à la morgue», «Innocentes victimes». Série avec Jill Hennessy 3.
France 2
20.50 Mémoire de glace GA.
Téléfilm avec Yannis Baraban,
Ludmila Mikaël, Natalia
Dontcheva, Patrick Fierry (1h30).
ឭឭឰ Les paysages sont splendides, mais c’est un peu confus et
dramatisé à l’extrême.
22.30 L’arène de France : «L’humanitaire est-il une arnaque ?»,
«Peut-on divorcer à l’amiable ?».
Magazine présenté par Stéphane
Bern.
France 3
20.55 Football «Coupe de la
Ligue : Lyon/Le Mans».
23.25 Ce soir ou jamais.
Magazine présenté en direct par
Frédéric Taddéi.
00.40 NYPD blue. Série avec
Dennis Franz.
Arte
DR
20.50 RIS police scientifique «Le
cercle des initiés» GA. Téléfilm
20.40 Mercredis de l’histoire
«Guerre du Pacifique : Le blues
des GI noirs» GA. ឭឭឰ Intéressant, mais un peu simpliste.
21.35 Zoom Europa. Magazine
présenté par Bruno Duvic.
22.20 Le dessous des cartes
«Mongolie : Au milieu des empires». Magazine.
22.30 Tout ce que vous avez
toujours voulu savoir sur le
sexe sans oser le demander
A/Ø. Comédie (1972) de et avec
Woody Allen, et avec John
Carradine (1h30). ឭឰឰ
Décevant, inégal et très vulgaire.
M6
20.50 L’inventeur de l’année.
Divertissement.
22.20 The unit. Série avec Dennis
Haysbert, Scott Foley, Robert
Patrick 2.
Canal +
20.50 Terrain d’entente. Comédie
(2005) de Bobby et Peter Farrelly,
avec Drew Barrymore, Jimmy
Fallon (1h40).
KTO
20.50 Les oubliés du XXIe siècle
ou la fin du travail. Une enquête
sur la détérioration du travail au
Mexique, en France et au Canada.
21.45 Un jour, une foi «La famille
en questions».
avec Jean-Pierre Michael, Laurent
Olmedo, Coraly Zahonero, PierreLoup Rajot, Aurélie Bargeme,
Barbara Cabrita 3. ឭឭឰ
L’histoire est complexe et sanglante, mais très prenante.
22.55 La méthode Cauet.
Divertissement présenté par
Cauet.
France 2
20.50 La colline aux mille
enfants J. Téléfilm de Jean-Louis
Lorenzi, avec Patrick Raynal, Ottavia Piccolo, Jip Wijngaarden, Dora
Doll, Jean-François Garreaud
(1h58). (Voir notre analyse page
35)
23.00 Infrarouge «Sobibor, 14
octobre 1943, 16 heures» GA.
Documentaire de Claude
Lanzmann. ឭឰ Des témoignages
bouleversants, mais l’ensemble est
assez ennuyeux.
France 3
20.55 Les valseuses Ø. Comédie
(1974) de Bertrand Blier, avec
Gérard Depardieu, Patrick
Dewaere, Miou-Miou, Jeanne
Moreau, Isabelle Huppert (1h57)
3. ឭឭឰឰឰ Brillant et très
amusant, mais très corrosif également.
23.25 Ce soir ou jamais.
Magazine présenté en direct par
Frédéric Taddéi.
00.40 NYPD blue. Série.
Arte
20.40 Aimée et Jaguar. Drame
(1998) de Max Färberböck, avec
Maria Schrader, Juliane Köhler,
Johanna Wokalek (1h59).
22.45 La vie en face «Chacun son
histoire». Documentaire.
M6
20.50 NICS, enquêtes spéciales : «Air Force One», «Le dernier
saut», «Réactions en chaîne». Série
avec Michael Weatherly.
23.30 Killer instinct. Série avec
Johnny Messner 2.
Canal +
20.50 24 heures chrono :
«19h00 - 20h00», «20h00 21h00». Série avec Kiefer
Sutherland 3.
KTO
20.50 Fragile main-d’œuvre. Les
CAT, qui emploient des personnes
handicapés, connaissent des difficultés économiques.
21.45 Un jour, une foi «Art et culture».
marqué les Français». Magazine
présenté par Carole Rousseau et
Jean-Pierre Pernault.
France 2
20.50 Boulevard du Palais «Le
récidiviste» A. Téléfilm avec Anne
Richard, Jean-François Balmer,
Philippe Ambrosini, Marion Game
(1h31) 2. ឭឭឰ Une histoire
prenante, mais sordide et avec des
longueurs.
22.30 Central nuit «Accident
diplomatique» GA. Téléfilm avec
Michel Creton, Clovis Cornillac,
Lucie Jeanne (0h53). ឭឰ Un épisode outrancier et assez invraisemblable.
23.30 Esprits libres. Magazine
présenté par Guillaume Durand.
France 3
20.55 Thalassa «En direct de l’île
de Bréhat». Magazine présenté
par Georges Pernoud.
23.30 C’est ça, la France
«L’épicier du coin». Documentaire.
Arte
20.40 Poison d’avril GA. Téléfilm
de William Karle, avec Olivier
Gourmet, Bruno Todeschini, Anne
Brochet, Patrick Descamps, Valérie
Leboutte (1h33). (Voir notre analyse ci-contre)
Voyages en enfer
22.20 Dante, de l’enfer au paradis J. ឭឭ Une belle analyse de
l’œuvre du poète, illustrée d’une
riche iconographie.
23.35 Vade retro, Satanas GA.
ឭឭឰ Une étude intéressante,
mais pénible.
00.30 Le peintre, le poète et
l’historien J. ឭឭ C’est passionnant, mais un peu ardu et très
didactique.
M6
20.50 Bones : «Le prix de la vérité», «Faux frères», «Une homme
bien». Série avec Emily Deschanel,
David Boréanaz 2.
23.35 Sex & the City. Série avec
Sarah Jessica Parker 2.
Canal +
20.50 La musicale. Magazine
musical présenté par Emma de
Caunes, avec Gnarls Barkley, Ayo,
Kasabian, Fishbone, Jamelia, etc.
KTO
20.50 KTO magazine «L’entreprise
à visage humain».
21.45 Un jour, une foi «Églises du
monde».
22.10 À la découverte de la Bible
(3/4) «La méditation».
RADIOS
Samedi 13 janvier
12h Face aux chrétiens, forum avec
Xavier Bertrand (Ministre de la Santé
et des Solidarités).
16h30 Chrétiens dans le monde
20.50 2006 «Les images qui ont
"Jean-Pierre Delpech, Père blanc,
missionnaire au Mali depuis 38 ans"
19h30 Il était une foi "Les grands
moments de la vie du Christ", avec
Sr Hugonnard (théologienne)
Dimanche 14 janvier
17h Dialogue "Emmanuel Mounier :
un chrétien au cœur du monde",
avec Bernard Comte (historien)
Lundi 15 janvier
14h30 Halte spirituelle "Spécial
Semaine de l'Unité : 'Le Christ fait
entendre les sourds et parler les
muets'" (1/5) [Tous les jours de la
semaine, à 14h30, 20h45 ou 23h]
Jeudi 18 janvier
10h A votre service "Comment re-
trouver ses ancêtres avec Internet ?",
avec Eric Maubant (Président de la société "aide-ordinateur").
France Culture
Dimanche 14 janvier
10h Messe, en direct de l'Eglise St-
DR
20.50 Carla Rubens «Un enfant
en otage» GA. Téléfilm avec
RCF
Nicolas Saint-Marc, à Ville d'Avray,
commentée par le Père Carron de
la Carriere. Prédicateur : Père Francis Cagnac.
18h10 Cultures d'Islam, "Entre Venise et l'Orient", par Abdelwahab
Meddeb, à l'occasion de l'exposition "Venise et l'Orient" à l'Institut
du Monde Arabe, à Paris.
20h30 Atelier de création radiophonique "Des Indes à la Planète Mars"
Lundi 15 janvier
10h Les Humanités "La religion de
l'Etat", par Jacques Le Goff
14h Les sciences "Dieu, l'univers et
la sphère infinie", avec J. Seidengart (Professeur des universités au
département de philosophie).
Jeudi 18 janvier
14h Les sciences "Les scientifiques", avec J.-J. Salomon (philosophe et historien des sciences, auteur de
"Les scientifiques, entre savoir et pouvoir" Ed. A. Michel)
M.B.
sur Arte
Vendredi 19 janvier, à 20h40
Poison d’avril GA
Peu avant le premier tour de l’élection présidentielle de 2002.
ឭឭឰ Brillant documentariste,
William Karel s’attaque à la fiction avec beaucoup de rigueur.
Ses personnages sont bien dessinés et l’ensemble est souvent
drôle et pertinant. Mais la thèse
du réalisateur est très simpliste et
manichéenne.
ឭឰ Il y a un beau personnage
de journaliste lucide et intègre,
mais l’ensemble n’est pas objectif,
car le réalisateur veut nous faire
croire que ce sont les journalistes
qui ont fait perdre Jospin.
T :
J :
GA:
A :
Ø :
ឭ:
ឰ:
Tout public
Repères
Adolescents
Grands adolescents
Adultes
Œuvre (ou scène) nocive
Elément positif
Elément négatif
FRANCECatholique N°3054 12 JANVIER 2007 37
BLOC-NOTES
✂
Paris
✔ Le père Michel Gitton propose,
le 20 janvier, un pèlerinage à pied
de Paris à Saint-Prix (Val-d'Oise)
avec l’Arche de Noé et plusieurs
paroisses, occasion de donner vie
à une antique route de pèlerinage,
messe solennelle et déjeuner à l’arrivée. Rens. ✆ 01.44.92.70.29.
✔ Les Semeurs d'Espérance organisent une Nuit d'Adoration,
introduite par le nouveau spectacle de Damien Ricour "Bienvenue au Paradis !". Rendez-vous
le 19 janvier (20h) à la paroisse
St Séverin, 75005 Paris, avec sac
de couchage et tapis de sol.
Entrée par le 3 rue des Prêtres.
Au programme : enseignement...
messe animée... adoration guidée... relais devant Jésus... sacrement de réconciliation... petit
déjeuner. Rens. ✆ 06.13.16.29.
08 / www.semeurs.org
✔ L'Association Familiale Catholique de Notre-Dame de Grâce
de Passy, propose, dans la salle
Rossini, 8 bis rue de l'Annonciation, 75016 Paris, ✆ 06.61.78.
32.71, une conférence par le
père Jean-Marie Verlinde, le 24
janvier (20h30) "«Face aux défis
de l'Esotérisme», spiritisme, films
d'horreur, sorcellerie, hard rock,
satanisme, jeux de rôles...
«Jeunes : quels dangers, comment s'en sortir ?»", animée par
Thomas Wallut (journaliste, France 2,
France Culture).
Hauts-de-Seine
✔ A l'Eglise Notre-Dame de la
Paix, Place de la Paix, 92150 Suresnes, une "Fête des Peuples" est
organisée le 14 janvier (11h-17h).
La célébration eucharistique
(11h15) sera présidée par Mgr
Gérard Daucourt (évêque de Nanterre). Un buffet commun sera alimenté par tous les participants.
Les boissons et plats seront déposés à l'église à partir de 10h.
Indre
✔ Du 20 (10h) au 21 janvier
(16h), rencontre animée par le
père Yannick Bonnet au santuaire
N-D de Miséricorde, 36180
Pellevoisin, ✆ 02.54.39.06.49,
sur le thème "L'éducation aujourd'hui : le grand défi à relever",
pour les parents et les éducateurs, organisé(e) par le sanctuaire et les frères de Saint Jean.
Deux jours pour découvrir ou
approfondir les notions fonda-
mentales de l'éducation face à un
monde en perte de repères. [email protected]
Pas-de-Calais
✔ Au Foyer de Charité, 19, rue
Sacriquier, BP 105, 62240 Courset, ✆ 03.21.91.62.52, fax 03.21.
83.87.13, une récollection est
prévue les 27 et 28 janvier, sur le
thème, "L'Eglise, la famille de
Dieu sur la terre", par le père
Nicolas Van Lathem. (Accueil des
enfants à partir de 4 ans). Egalement
le témoignage de Tim Guénard le
30 janvier (19h) à l'Espace Louis
Blanc, Allée Louis David, rue du
Chemin vert, et au Foyer de
Charité le 31 janvier (14h).
Rhône
✔ L'association des amis de
L'abbaye d'Ainay (11 rue Bourgelat,
69002 Lyon, ✆ 04.78.42.43.61), des
origines à la dédicace de l'église
Saint-Martin par le pape Pascal II
en janvier 1107, prévoit un colloque les 26 et 27 janvier, à
l'Université Catholique de Lyon,
salle Jean-Paul II, 25 rue du Plat,
69002 Lyon. Des spécialistes en
histoire, archéologie, architecture... traiteront des thèmes :
"Antiquité tardive et culte des
Martyrs", "Histoire et architecture
de l'Abbatiale au XII ème siècle",
"Réforme grégorienne, la dédicace et le décor". Une conférence
"grand public" sera donnée sur la
fête des Merveilles à Lyon. Entrée
libre. Inscription recommandée.
Sarthe
✔ Le centre spirituel Notre-Dame
du Chêne, 2 rue des Bleuets,
72300 Vion, ✆ 02.43. 95.48.01,
fax 02.43.92.31.72, propose une
"Prière pour les malades" à la
basilique Notre-Dame du Chêne,
le 10 février (14h30), animée par
le Renouveau Charismatique, à
l'occasion de la Journée Mondiale de prière pour les malades.
Seine-et-Marne
✔ Le foyer de Combs-la-Ville, 10,
rue Sommeville, 77380 Combsla-Ville, ✆ 01.60.60.20.62, fax
01.60.34.07.48, organise une
retraite en silence, les 27 et 28
janvier, prêchée par le père
Michel Gitton, sur le thème "Sacrifice : un mot qui fait peur, un
amour qui fait signe".
Var
✔ L'Association des Pèlerins de
Notre-Dame-de-Grâces, Sanctuaire, 83570 Cotignac, ✆ 04.94.
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appelez le
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(*) France métropolitaine et DOM uniquement - (**) Pour les personnes n’ayant jamais été abonnées. (***) Dans la limite des stocks disponibles. (****) Le
préciser dans un courrier séparé. (*****) France métropolitaine uniquement. CNIL N° 678405 - Loi informatique & liberté du 6/01/78 : vous disposez d’un
droit d’accès et de rectification aux informations vous concernant. Par notre intermédiaire, vous pouvez être amenés à recevoir des propositions d’autres
entreprises. Si vous ne le souhaitez pas, il suffit de nous écrire ou de nous téléphoner et il en sera tenu compte immédiatement.
BLOC-NOTES
69.64.90 (Marion) fax 04.94.69.
64.91/sanctuaire@nd-de-graces.
com, site : www.nd-de-graces. com
propose les 20 et 21 janvier, deux
journées d'Initiation à la philosophie, par le Frère Stéphane-Marie,
"Comment réussir son BAC et
comment réussir sa vie ?". Et
aussi, les 20 et 21 janvier, deux
journées sur Sainte Hildegarde,
"Les maladies cardio-vasculaires
et leurs remèdes", avec le Dr Pascal Mensah (phytothérapeute et spécialiste de la micro-nutrition), Elodie
et Pedro Telechea (des "Jardins
d’Hildegarde") et le Père SamuelBernard, fsj.
Yvelines
✔ Au Foyer de Charité "La PartDieu", 78300 Poissy, une retraite
sera animée par le Père Jean
Meeûs s.j., du lundi 19 (20h) au
samedi 24 février (9h). "Reste
avec nous..." (Luc 24, 29). Rens. et
inscriptions : Mme Huyghues
Despointes, 4 place de Barcelone, 75016 Paris.
Yvelines
✔ Le Petit Salon des Antiquaires,
crèches anciennes et tables en
fêtes, jusqu'au 15 janvier. Venez
découvrir meubles et tableaux,
argenterie et bibelots, broderies et
dentelles ainsi que beaucoup
d’autres objets de curiosités dans
une des plus jolies villes Renaissance de la région parisienne. Les
vendredis (14h-19h), samedis et
dimanches (11h-19h), dans la galerie du 8, rue de la Moutière,
78490 Montfort-L'Amaury.
Alliance pour
les Droits de la Vie
✔ Le Docteur Xavier Mirabel
(médecin cancérologue et président
de l'Alliance pour les Droits de la Vie),
donnera deux conférences sur le
thème "Comment mettre le respect de toute vie humaine au
cœur de nos débats de société ?"
à Mulhouse, le mercredi 17 janvier (20h15) au Collège Jean
XXIII, 18-24 rue de Thann (A36
sortie Mulhouse Dornach, voie privée
au coin du journal l'Alsace), rens.
✆ 03.89.32.82.18 ; à Strasbourg,
le jeudi 18 janvier (20h15) au
Foyer St Pierre le Jeune, 4 rue
Gloxin (près de la place de Haguenau), rens. ✆ 03.88.79.41.20.
Libre participation aux frais.
Itinéraires
artistique et spirituel
✔ Pour les collégiens, lycéens,
étudiants et jeunes professionnels,
un semaine exceptionnelle en
Italie est prévue du 13 au 22 avril,
avec le mouvement Résurrection
(28 rue de la Convention, 75015 Paris),
[Une expérience passionnante à
travers les villes de Vérone, Venise,
Padoue, Ravenne, Milan, Turin, et
de grandes figures de Saints : Saint
Jean Bosco, Saint Ambroise de
Milan, Saint Antoine de Padoue],
avec les pères de Raucourt, Leverrier, Roder et Michel Gitton.
Voyage en car, logement auprès
des communautés religieuses locales ou en hôtel, repas du soir et
petits déjeuner pris au restaurant.
Environ 430 €. Rens. ✆ 01.
45.78.33.77.
✔ Du 28 mai au 4 juin, un voyage
à Rome est prévu "L'église et les
images : «un regard à deux voix
sur l'art sacré»" proposé par le p.
Alexis Helg (prêtre de la Communauté Saint-Jean et historien d’art), et le
pasteur Flemming Fleinert-Jensen
(de l’Église Réformée de France et du
Groupe des Dombes) . Les œuvres
d’art sacré témoignent aussi bien
de la foi des artistes que des sensibilités confessionnelles à une
époque donnée. Ce parcours de
l’art sacré au fil des siècles depuis
l’antiquité, la période romane, la
renaissance, le baroque à nos jours
a pour but d'essayer de comprendre ces sensibilités y compris durant
la réforme et la contre-réforme
pour mieux connaître et aimer
notre Eglise sans masquer les différences. Ce voyage propose une
vraie démarche spirituelle et une
découverte unique de Rome.
Rens./insc. ✆ 06.11.45.27.48 ou
[email protected]
✔ La paroisse de Notre-Dame de
l’Assomption, 90 rue de l'Assomption, 75016 Paris, propose
aux enfants de CM2 et 6ème, des
vacances spirituelles et de découverte à Lourdes, du 24 février
au 3 mars prochain. Voyage en
train. Prix du séjour 260 €.
Hébergement au centre spirituel
des sœurs de l’Assomption.
Inscriptions, ✆ 06.60.55.63.27.
Circuits touristiques
en Terre
Terre Sainte
✔ Des séjours, d'une semaine, en
Terre Sainte, sont proposés avec
MS Conseil Voyage, 15 place
d'Aligre, 75012 Paris, ✆ 01.55.
78.23.01, fax 01.55.78.23.02,
(licence n° LI07595088) [email protected] Le 1er départ est prévu le 21 janvier. TelAviv, Jaffa, Césarée, Haïfa, SaintJean d'Acre, Tibériade, Nazareth,
Jérusalem, Yardenit, Vallée du
Jourdain, Massada... Tarif : environ 1000 € (règlement en 4 mensualités possible), qui comprend les
vols Paris-Tel-Aviv-Paris, transferts, circuit en car climatisé,
avec guide, entrées des sites. Ne
sont pas compris : les taxes d'aéroport (85 €), frais de visa (si nécessaire), pourboires, et quelques
options...
Pour passer un communiqué, contactez
[email protected]
fax : 01.46.30.04.64
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FRANCECatholique N°3054 12 JANVIER 2007
39

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