Les Champs d`honneur (1990)
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Les Champs d`honneur (1990)
Champs.001a144.xp5 31/07/06 11:32 Page 5 FICHE PROFIL Les Champs d’honneur (1990) Jean Rouaud (né en 1952) Autobiographie XXe siècle R É S U M É Une « loi des séries » (p. 9) frappe la famille du narrateur qui semble condamnée aux deuils à répétition. Le récit remonte le temps, comme pour déceler des indices de cette fatalité et faire revivre les personnages marquants de l’enfance. Première partie : le narrateur fait le portrait de son grand-père maternel, Alphonse Burgaud, commerçant et père de trois filles. Il oppose son indifférence aux aléas de la vie et s’autorise des escapades à l’abbaye voisine ou sur l’île du Levant. Il est l’« axe autour duquel tourne la maisonnée » (p. 48) jusqu’à ce qu’un jour, clôturant l’hécatombe familiale, il disparaisse brusquement. Deuxième partie : la tante Marie précède le grand-père dans la mort et suit de peu celle de son neveu, Joseph, fils de son frère Pierre et père du narrateur. Cette disparition prématurée contredit la foi de la tante en la résurrection des morts et a raison de sa raison. Institutrice, elle compense son célibat forcé en vouant sa vie aux enfants des autres et aux saints. Troisième partie : parmi ces images domine celle du frère adoré de la tante, Joseph, mort au champ d’honneur en 1916 un an avant l’autre frère (Émile) disparu à Commercy. En 1929, le dernier frère, Pierre, grand-père paternel du narrateur, ramènera les restes de ce frère dans des boîtes de madeleines. Quatrième partie : Pierre meurt en 1941, un an après sa femme. Il laisse son fils Joseph orphelin. Le livre s’achève sur la figure de celui qui sera bientôt le père du narrateur, avant que la mort ne le fauche lui aussi dans la force de l’âge. © Hatier - Paris, juin - 2007 Champs.001a144.xp5 31/07/06 P E R S O N N A G E S 11:32 Page 6 P R I N C I P A U X – Le grand-père maternel : personnage central de la famille, il est le gardien du grenier où sont conservées les archives familiales. – La tante Marie : grand-tante du narrateur et figure de mémoire, elle dresse un pont entre deux Joseph, son neveu et son frère mort pendant la guerre 1914-18. – Joseph, le père : figure en creux du récit : c’est sa mort qui précipite l’hécatombe familiale. – Le fils : narrateur et auteur, il s’efface derrière les figures familières de son enfance dont il brosse le portrait. C L É S P O U R L A L E C T U R E 1. L’autobiographie revisitée Jean Rouaud renouvelle le genre de l’autobiographie en mettant au premier plan les figures familières de son enfance. En s’appuyant sur diverses archives, le narrateur recompose librement l’histoire familiale en s’effaçant derrière le nous. 2. Le roman familial Dans cette fiction de ses origines, le narrateur élève de façon inédite des personnes ordinaires au rang d’« hommes illustres ». Archéologue de l’histoire familiale, il décrit comment l’Histoire collective traverse les destinées individuelles des anonymes. 3. Mort et écriture La mort structure le récit. Elle inaugure et conclut chaque partie du livre. L’écriture sérielle se donne pour mission de conjurer la fatalité macabre. © Hatier - Paris, juin - 2007 Champs.001a144.xp5 31/07/06 11:32 Page 7 FICHE PROFIL Pour vos cadeaux (1998) Jean Rouaud (1952-) Autobiographie XXe siècle R É S U M É En 1997, devenu un écrivain célèbre, le narrateur perd sa mère. Il décide alors de consacrer un livre à ce personnage secondaire de ses précédents ouvrages, elle qui en était aussi une lectrice critique. Cela lui permet d’expliquer la distance qui a séparé la mère et le fils en soulignant pourtant leurs ressemblances. Pour vos cadeaux est donc une façon de rectifier le passé en corrigeant la narration des livres antérieurs, comme si la mort de la mère avait levé une censure et autorisait désormais à affirmer le récit comme une fiction vraie. Première partie : l’agonie de la mère inaugure le récit. Une fois sa généalogie familiale rappelée, celle qui est dépeinte comme une « enragée de mort » (p. 9) enterre en effet sa mère, son père et son époux. Cette lecture première est pourtant corrigée : glissant du constat d’une mère peu encline à la maternité à celui d’une veuve condamnée malgré elle à « prendre la place du mort » (p. 109), le narrateur développe l’idée d’une renaissance salvatrice autour du magasin de vaisselle. Deuxième partie : cette partie explore une autre version des faits. À l’ennui et à la difficulté d’exister que partagent mère et enfants font suite en effet la guérison de cette dernière et sa renaissance. Se précisent alors ce qui lie la mère au fils : du magasin à l’écriture, un parti pris pour les humbles et un désir de reconnaissance ; la volonté surtout de ralentir la marche du temps grâce au désordre apparent, à l’accumulation et à l’inventaire. © Hatier - Paris, juin - 2007 Champs.001a144.xp5 31/07/06 11:32 Page 8 Le temps compté de la vieillesse n’est pas pour autant éludé : au magasin d’antan qui ne peut pas lutter contre la modernité et le progrès fait écho, au final, le corps vieillissant vaincu par la maladie. P E R S O N N A G E S P R I N C I P A U X – La mère : veuve avec trois enfants à charge, elle s’occupe du magasin de vaisselle familial. – Le fils : personnage, narrateur et auteur. C L É S P O U R L A L E C T U R E 1. Le livre de la mère Le narrateur dédie un livre à sa mère. L’incompréhension qui les a opposés est donc explorée au fil du projet autobiographique qui se dévoile. L’énigme maternelle s’explique par le deuil du père, mais au-delà des apparences, c’est dans l’idée de seconde naissance que ce portrait trouve sa cohérence. 2. Une relecture du projet autobiographique Pour vos cadeaux est le texte central du cycle romanesque : entre commentaire et récit, le projet autobiographique y est explicité. Cette autobiographie critique rappelle que tout dans le récit est fiction, même le narrateur qui n’est plus le fils orphelin d’autrefois, mais un auteur qui s’invente au fil de l’œuvre. 3. L’écriture de l’intime et de la filiation Le narrateur s’attaque à la figure la plus intime de son roman familial, jusque-là à peine esquissée : sa mère. La distance qui les séparait fait d’elle une lectrice critique mais aussi paradoxale, puisqu’elle ne lira jamais ce livre qui lui est dédié. © Hatier - Paris, juin - 2007