8: regarde! - Courtauld Institute of Art

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8: regarde! - Courtauld Institute of Art
8: REGARDE!:
QUELLES FEMMES?
De la femme idéalisée dans le portrait
d'histoire, à la femme du quotidien faisant
sa toilette, les esquisses des maîtres
en France nous donnent un intéressant
aperçu d'une certaine société et de ses
restrictions, bousculées au fil du temps. Les
changements sont notables, et nous font
voir en filigrane les dessous de l'Histoire.
Pourtant, le sujet de représentation
principal, la femme, est souvent la grande
absente du tableau, et la place de celles-ci
reste effacée dans un monde largement
masculin.
Commençons notre exploration par
Watteau. Dans le Satyr Pouring Wine
de 1717, le corps nu est prétexte à la
représentation d'une scène à caractère
mythologique. À cette époque en effet, les
seules représentations du corps humain nu
autorisées étaient celles le plaçant dans un
contexte soit d’une scène d'histoire, soit
d’une scène mythologique ou religieuse.
Comme on peut d'ailleurs le voir
représenté dans l'aquarelle de Natoire The
Life Class at the Royal Academy of Painting
and Sculpture de 1746, tous les artistes
de l'Académie se devaient d'apprendre à
représenter le nu en copiant les anciens
ou lors de séances avec modèles vivants.
Cependant, la représentation du nu n’est
pas anodine dans l’art, et a toujours été
sujet à controverse. En effet, le nu doit
porter des valeurs morales et esthétiques
masquant le côté érotique du corps,
afin d’être accepté par une société qui
condamne fermement la pornographie.
Alors que les artistes commencent à
représenter des nus qui s’éloignent de plus
en plus des représentations inscrites dans
un cadre formel, tel La Toilette de Manet
de 1860, le Salon renforce la censure, et
les artistes qui s’en voient refuser l’accès
sont obligés de trouver une alternative: ils
créent et exposent leurs œuvres au Salon
des Refusés.
Au début de la Troisième République, avec
le démantèlement du bureau de la censure
du Salon en 1880 facilitant la circulation
d’images de nus, la représentation de la
nudité dans le contexte du quotidien se
généralise. Alors que la femme alanguie
dans Study for « La Grande Odalisque
» de Ingres de 1814 se justifie dans
un imaginaire orientalisant, la Female
Nude de Seurat de 1879-81 ou la Seated
Woman de Matisse de 1919 ne font plus
semblant de s’inscrire dans un contexte
autre que celui de leur quotidien, et elles
sont là, simplement, offertes au regard du
spectateur.
Mais quelle est la place de la femme dans
ce monde où artistes, commanditaires
et spectateurs sont en immense majorité
des hommes? À la fin du XIXème siècle,
ce sont en très grande partie les femmes
qui posent sous l’œil attentif des hommes.
Bien qu’elles deviennent le centre
d’attention, trop peu de témoignages
de leur expérience en tant que modèle
perdurent, et aujourd’hui, nous nous
souvenons seulement de ceux qui les ont
immortalisées en de gracieuses évocations.
Cette absence de reconnaissance sociale,
qui est même légiféré dans la société
française de cette époque, cache pourtant
trop souvent un traitement dur, parfois
cruel, réservé aux modèles. Grâce à Alice
Michel et son article intitulé ‘Degas et son
Modèle’ publié en 1919 dans le Mercure de
France, on voit comment Pauline, modèle
du peintre, subit chaque jours la pénibilité
des poses imposées par l’artiste, souffre
du froid, de la saleté de l’atelier, et de
l’attitude parfois brutale de Degas à son
égard. Le récit de cette femme nous offre
un nouveau regard sur les représentations
de nus. Dans Sheet with two Studies of
a Female Nude de Delacroix, le modèle
n’a t’elle pas pris froid ? N’a t’elle pas
souffert de crampes terribles ? À quoi
pense le modèle de Study for « La Grande
Odalisque » de Ingres de 1814? Redoutet-elle de possibles violences que le peintre
pourrait commettre sur elle si elle ne
parvenait pas à tenir la pose suffisamment
longtemps?
La femme, objet de contemplation de
l’homme artiste, commanditaire ou simple
spectateur reste donc dans l’histoire
comme un objet silencieux, gracieusement
offert aux regards. Les contemplerionsnous de la même manière si nous pouvions
entendre ce que ces femmes ont à nous
dire ?
REGARDE! Quelles femmes?
Written by Marie Sautin.
CURRICULUM LINKS: KS3&KS4+
MFL French, Art History and other
Humanities.
LA FEMALE NUDE DE SEURAT DE 1879-81 NE
FAIT PLUS SEMBLANT DE S’INSCRIRE DANS
UN CONTEXTE AUTRE QUE CELUI DE SON
QUOTIDIEN, ET ELLES EST LÀ, SIMPLEMENT,
OFFERTE AU REGARD DU SPECTATEUR
”
ACTIVITÉS
LE CORPS ET LA ROUTINE JOURNALIÈRE
KS3
En regardant les dessins de nus, décrivez
les différentes parties du corps. Ces descriptions peuvent devenir une occasion
d’utiliser des comparatifs et des superlatifs,
soit en comparants les différents tableaux
entre eux, soit en les comparants avec son
propre corps. De plus, pour les dessins
représentants la toilette, l’observation et
la description peuvent devenir un prétexte
pour parler de la routine journalière aussi
bien pour « je » ou « elle/il », que pour
parler au passé et au présent. Nos corps
et nos habitudes ont-elles changées au fil
des siècles ? Les élèves les plus téméraires pourront même tenter de décrire
à l’imparfait et à la troisième personne
du singulier la routine quotidienne d’un
modèle de tel ou tel peintre !
LA FEMME DANS L’HISTOIRE EN FRANCE
KS4 ET KS5
En observant les esquisses de femmes nues
au fil des siècles dans cette exposition, on
observe bien sûr des changements dans le
traitement du corps, soit s’inscrivant dans
le moule conformiste de la représentation du nu dans la peinture d’histoire ou
mythologique, soit dans la sphère privée
ou le simple regard se transforme parfois
en celui de voyeur. Cependant, bien que le
monde représenté soit celui de la femme,
cette dernière n’est que peu présente dans
ce monde d’artistes et commanditaires
masculins. Quelle est la position sociale de
la femme au sein du monde de l’art, tant
dans la représentation que dans la critique
ou encore la production ? Et plus généralement, quel est le rôle qu’occupe la femme
dans la sphère privée et publique des
époques représentées ? Que dit la loi sur
la position des femmes dans la société aux
périodes évoquées ?
Left top:
Jean-Antoine Watteau
Satyr Pouring Wine
1717
Black, red and white chalk
Left bottom:
Right:
Georges Seurat
Female Nude
Around 1879–81
Black Conté crayon over stumped graphite
Above:
Charles-Joseph Natoire
The Life Class at the Royal Academy of Painting and
Sculpture
1746
Pen, black and brown ink, grey wash and watercolour
over black chalk
Ces questionnements et analyses peuvent
mener les élèves à faire des recherches sur
Olympe de Gouge (1748-1793), Eugénie
Niboyet (1796-1883), ou encore Suzanne
Valadon (1865-1938), figures féministes
importantes, contemporaines de la période
de l’exposition. De plus, parler du combat
de ces femmes permettrait aux élèves
de faire le lien avec les périodes d’aprèsguerres, jusqu’à la société d’aujourd’hui,
afin de comparer la position des femmes
dans l’histoire en France.
REGARDE!: WHICH WOMEN?
FULL ENGLISH TRANSLATION
From idealised women in historical
paintings to the women washing in their
everyday lives, sketches from French
masters give us an interesting viewpoint
of a society and its restrictions, disrupted
over time. The changes are significant and
enable us to see the ornate underbelly of
history. However, the main subject of the
representations, women, are often brushed
to the side, and their position in society is
almost completely diluted in a man’s world.
Beginning our exploration with Watteau, in
a Satyr Pouring Wine from 1717, mythology
becomes a pretext for the representation
of nudity. During this period, the only
authorised representations of nudes were
those that were placed in a historical,
mythological or religious context.
As we can see in the watercolor The Life
Class at the Royal Academy of Painting
and Sculpture by Natoire from 1746, all
artists from the Academy either had to
learn how to draw the nude by copying
their predecessors, or during life drawing
classes. However, the nude form is not
insignificant in art, as it has continuously
been a source of controversy. Indeed, the
naked body needed to convey moral and
aesthetical values while hiding eroticism
in order to be accepted by a society firmly
condemning pornography. When artists
started moving away from conventional
representations of the naked body, such as
in Manet’s La Toilette from 1860, the Salon
reinforced censorship, and rejected artists
had no other alternative than to create and
display their works of art at the Salon des
Refusés.
At the start of the Third Republic the
dismantlement of the Bureau of Censorship
in 1880 consequently eased the circulation
of nude images and representing the
naked body in everyday life became more
common. Whereas the listless woman in
Study for ‘La Grande Odalisque’ by Ingres,
1813-14 justifies herself by an imaginary
Orient, the Female Nude by Seurat,
1879-81 or the Seated Woman by Matisse,
1919, no longer pretend to be a part of
any context other than that of everyday
life; they are simply there, offered to the
onlooker.
But what place is given to women in a
world where the vast majority of artists,
sponsors and viewers are men? At the end
of the 19th century, the female form was
the central subject of art and while some
models may have become the main focus,
too few testimonies of their experiences
remain. Today we only remember the
men who have immortalised them.
This absence of social recognition, an
accepted practice at this time in French
society, too often hid the harsh and cruel
treatment of the models. Thanks to the
article, “Modeling for Degas”, written by
Alice Michel and published in 1919 in the
Mercure de France, we see how Pauline,
Degas’s model, is forced daily into difficult
poses, suffers from the cold and dirt of
the studio, and even occasionally falls
victim to physical abuse by Degas himself.
This woman’s story leads us to consider
the nude model differently. In Delacroix’s
Sheet with Two Studies of a Female Nude,
did the model not catch cold? Did she
not suffer from terrible cramps? What is
the model of Ingres’s Study for La Grande
Odalisque thinking about? Is she dreading
the possible violent consequences if she is
unable to hold the pose long enough?
Woman, frozen in history as a silent,
contemplative object, graciously offered up
to the gaze of man; artist, patron or even
simply an onlooker. Would we gaze upon
them in the same way if we knew what
these women really had to say to us?
ACTIVITIES:
BODY PARTS AND DAILY ROUTINE
Intended for KS3
While looking at the drawings, describe the
different body parts. These descriptions
can be an opportunity to use comparative
words and superlatives, either by
comparing drawings together, or by
comparing them with the actual body.
Furthermore, for the drawings that depict
washing up, observation and description
can become the starting point to talking
about our daily routine not only for ‘me’
but also for ‘she’ or ‘he’, in the present
or in the past. Have our bodies or habits
changed over the years? For the most
daring pupils, describing the models’ daily
lives in the imperfect tense could be quite
challenging!
WOMEN IN FRENCH HISTORY
Intended for KS4 and KS5
This exhibition juxtaposes sketches of nude
women from different centuries. We notice
changes in the way bodies are represented
according to their context: historical or
mythological scenes, or later in the private
sphere, the viewer becomes a peeping
Tom. Even though women are at the heart
of these works of art, they are noticeably
absent from the exclusive male art world.
What is the social position of women in this
world, both by their artistic production or
the way they are represented? And more
generally, how are women perceived in
both the private and the public spheres
during the period when these drawings
were produced? What does the law say
regarding women’s rights and duties in
society at these times?
These questions and the subsequent
analyses could lead pupils to conduct some
research on Olympe de Gouge (1748-1793),
Eugénie Niboyet (1796-1883), or Suzanne
Valadon (1865-1938), important feminist
figures contemporary to the period of the
exhibition. Moreover, talking about these
women’s fight for rights could enable
pupils to make a connection between
these drawings and the post-war periods
up to today’s society, in order to compare
women’s rights and their position in French
history.

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