Les façades de la désobéissance : tags, graffs et fresques murales

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Les façades de la désobéissance : tags, graffs et fresques murales
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ANNY BLOCH
UMR du CNRS 5057 "Diasporas"
Maison de la Recherche,
Université Toulouse-Le Mirail
[email protected]
Les façades
de la désobéissance :
tags, graffs et fresques murales1
Anny Bloch
re » des autres groupes politiques. Les
tags deviennent un enjeu politique, une
des incivilités à l’origine de l’insécurité.
Il est vrai qu’une véritable demande de
la population victime de tags s’exprime et
les réactions aux graffitis sont souvent
violentes de la part des propriétaires de
murs tagués :
« Si vous croyez que c’est de l’art, ah
vous voulez immortaliser cela » (commentaire à une prise de vue).
« On ne peut pas les arrêter, ils font
cela la nuit ils recommencent dès qu’un
mur est propre » nous explique un commerçant à Strasbourg. Une petite affichette à côté du mur tagué d’un magasin
d’un antiquaire le long d’un quai à Strasbourg indique : « Pauvre tagueur » (souligné deux fois) « c’est dur d’être minable »
(souligné deux fois).
La colère et l’exaspération des habitants renvoient au questionnement du sens
des tags et graffitis dans la ville :
En ont-ils un ?
De quel langage s’agit-il ?
A quelles logiques répondent les
tagueurs et les graffeurs ?
Sont-il des individus ou des groupes et
comment circulent-ils dans la ville ?
Bref rappel
L
es « tags », simples inscriptions,
signatures, et les « graffs », formes
élaborées de graphisme lettré2,
incompréhensibles aux yeux du public,
répandus sans ordre apparent sur les murs
de la ville, sont perçus comme des actes
de vandalisme, des signes d’incivilité, et
sont associés très souvent au désordre
social, voire même au délitement qui
règneraient dans les villes…
Ces inscriptions désobéissent aux
règles habituelles de l’espace urbain,
enfreignent les codes traditionnels de
l’aménagement, transgressent les interdits et apparaissent comme une violence
au regard de nombre d’habitants. Le tag
s’inscrit dans une thématique « gigogne »
reposant sur le tryptique « violences,
insécurité, incivilités »3.
L’incompréhension de ces marques
dans la ville, leur absence de rationalité apparente, le non-respect de la propriété privée et publique provoquent un
certain malaise, voire même la colère et
l’indignation4.
Pourtant, ces marques ne sont pas des
phénomènes récents. Rappelons les
périodes de révolte ou de grands rassemblements durant lesquels les manifestants
se réapproprient les murs de la ville sous
forme de slogans, de conseils, de
réflexions et d’incitation à l’action : ces
dernières étaient porteuses de sens, liées
à des événements précis.
Les tags ou graffitis, dénués de sens au
premier abord, ont été d’abord un phénomène urbain localisé dans les espaces
périphériques de la grande ville américaine ou européenne : souterrains, murs le
long des voies ferrées, départs d’autoroutes, palissades, espaces intervalles de
la ville. Mais ils conquièrent actuellement
les centres-villes.
Ces signatures en effet s’imposent sur
les bâtiments publics et privés, posent problème aux habitants, à la police et aux services municipaux de propreté. Pour
répondre aux appels très nombreux, la
Communauté Urbaine de Strasbourg, par
exemple, dispose d’un service gratuit de
nettoyage des murs dont les dépenses
s’élèvent environ à 200 000 francs par
mois. Ce service ne peut cependant
répondre rapidement aux demandes de la
population, le délai d’enlèvement des
tags dure plus de quinze jours. En outre,
si les demandes regroupées par secteur
sont traitées d’une manière égalitaire, les
interventions prioritaires se situent au
centre ville autour de la cathédrale. Image
d’une ville propre oblige5.
Dans d’autres villes, comme à Toulouse, des brigades de propreté ont effacé non seulement tags et graffs du centre
ville mais aussi certaines fresques, compositions d’artistes qui avaient été tolérées
depuis 1996.
Le phénomène a été particulièrement
sensible avant les élections municipales de
mars 2001. Les tags dans la ville sont perçus comme signe de laxisme, de désordre,
d’insécurité. La lutte contre ces « gribouillis » a été inscrite dans les platesformes des candidats d’extrême droite et
a fait l’objet d’une « attention particuliè-
Les façades de la désobéissance
■
Le tag, le graff et la fresque murale
s’intègrent dans le mouvement hip-hop
(littéralement « compétition de saut ») qui
s’exprime aussi par la break-dance et le
rap (un travail sur les sonorités, le rythme
et la parole). Cet ensemble d’expression a
commencé dans le Bronx en 1975 avec le
travail du Disc Jockey Afrika Bambaataa,
qui pose des codes moraux basés sur la
créativité en donnant naissance à la Zulu
Nation. Ce musicien initie un mode de vie
créatrice, une contestation de la société
américaine. En France, dans les années
1970, cette culture de rue est le fait de
jeunes de la première génération issue de
l’immigration. Elle réapparaît sur les
places de la capitale, le quartier des Halles
plus tard, mais aussi dans les périphéries
sur les murs de la ville sous forme de graffitis dans les années 1987-1988, et trouve
une « scène » dans les rencontres annuelles
des cultures urbaines au Parc de la Villette. Actuellement elle est réappropriée par
des jeunes lycéens, des étudiants, des
jeunes artistes d’écoles d’arts graphiques.6
La culture hip-hop regroupe les arts de
la rue, « une culture populaire, un mouvement de conscience »7 qui s’appuie sur
un certain nombre de valeurs : lutte contre
le racisme et la drogue, combat pour la
tolérance et la solidarité. Ce mouvement
s’identifie aux déracinés, aux minorités,
aux afro-américains, aux colonisés, aux
jeunes immigrés - même s’il traverse
actuellement toutes les classes sociales.8
Il traduit la violence sociale que les jeunes
subissent dans la cité, le désordre dans la
ville, mais un « désordre irréductible,
nécessaire et fécond ».9 En retour, la jeunesse deviendrait une classe dangereuse
associée à la violence et à la banlieue. La
seule présence d’un attroupement d’adolescents provoquerait un sentiment de
peur.10
Que traduisent le rap, la break-danse,
le graff ?
Musique (rap, ragga, djing, beat-box),
danse (break-dance), graphisme (tag,
graff, fresques murales) correspondent à
une logique de dominés qui par le défi (le
challenge), la provocation (attitude de
bandits ou gangsters), et même la violence, notamment celle des sonorités mais
pas seulement, traduit la révolte. Ainsi,
quelles que soient la qualité et la notoriété de certains groupes rap, leurs concerts
ne sont jamais organisés sans risques de
bagarres.
Refuser l’ordre social
et le contester
■
L’attitude du tagueur, du graffeur correspond à une posture de dominés qui
cherche par la déconstruction à s’affranchir de l’ordre : « je pouvais m’affirmer »
dit un ancien tagueur devenu peintre,
graphiste « ou en cassant des choses, ou
en prenant un territoire, dans tous les cas,
en sortant des sentiers battus. Au début,
je me suis fait connaître en détruisant des
clôtures, c’est un délit mineur mais c’est
quand même un délit. Au départ, les
tags, c’est un jeu contre les forces de
l’ordre ou la communauté en général. On
joue à se faire connaître, à marquer son
nom partout ».11
La première étape est celle de l’affranchissement de l’ordre tel qu’il se manifeste par la signalisation ordinaire de la ville.
Il s’agit d’un premier défi, une conduite à
risque : mettre sa marque sur des murs
interdits, jeu de cache-cache où il faut courir vite pour échapper au flagrant délit. On
se fait connaître tout en se cachant. Le groupe s’affranchit de l’ordre dans une miniguérilla urbaine où signatures de bandes
rivales valent kalachnikov.
Que disent les tags ou signatures ?
Les signatures dans la ville ont des
formes extrêmement différentes : cassées,
brisées en zigzags, courbées, simples
numéros ou initiales, elles sont parfois
colorées en fluo, gris argenté ou noir. Les
signatures telles que « Cobra », référence
à l’animal selon un graffeur, « Tempo »,
« MBD », peuvent être celles d’une personne ou d’un groupe, d’une clique, d’un
« crew » (équipage), d’un « cruise » (gang)
ou d’un « posse ».
Le parcours
de reconnaissance
du tagueur :
visibilité et illégalité
■
Tantôt la même signature va se répéter
tout au long du même mur ; tantôt le
même groupe va signer dans différents
quartiers de la ville, quelquefois à la
bombe aérosol ou avec un outil plus fin,
un fusain. L’important est la reconnaissance de la signature à la suite d’exercices
pratiques et répétés dans la rue.
Le tagueur, en élaborant sa propre signature sur les murs, se construit. Il se manifeste par différentes catégories de signes :
les signes visibles pour l’ensemble de la
population, sa démarche, ses vêtements
qui affirment son appartenance au monde
hip-hop ou à celui de « l’outsider », celui
qui est extérieur aux normes. D’autres
signes ne sont reconnus que par le groupe
des tagueurs: la signature reste illisible pour
les non-initiés.
Une des formes de la provocation du
tagueur apparaît ici: dans un monde où tout
doit avoir un sens, où tout se doit d’être
transparent, le tagueur commet un acte
dont le sens est volontairement occulté. Le
tagueur aura d’autant plus de visibilité
qu’il organise son illisibilité.
Ainsi, la rue permet d’être identifié par
les autres ; elle devient un espace où l’on
apprend à écrire, à définir un style, un
graphisme, un autographe.
Une jeune rappeuse d’un quartier à qui
je demandais ce que voulaient dire ces tags
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m’a répondu qu’elle n’avait pas de réponses
et ajoute : « c’est l’envie de faire savoir
qu’on est passé par là. Je vais en centre
ville, il y a un blanc alors j’écris mon nom,
comme ça les gens savent que je suis passée par là ».12 Le tagueur parcourt la ville
pour affirmer sa présence, être vu. Pour lui,
taguer est une manière d’exister, mais aussi
d’interpeller, de provoquer. Il tague peu
dans son quartier, mais plutôt en centre
ville, dans les quartiers bourgeois : provocation, défi, prise de territoire. « Les frontières du licite et de l’interdit se désagrègent
au profit du possible et de l’impossible ».13
S’agit-il d’une appropriation de la
rue ? Le tagueur ne s’approprie pas un
territoire d’une manière durable. Il sait
que ses tags sont éphémères, il laisse une
trace, il marque son passage et n’opère
pas véritablement une prise de posses-
sion. Il laisse des traces dans ce que Marc
Augé a appelé des « non-lieux », la plupart du temps, voies rapides, gares, palissades protégeant des travaux, extérieurs
de centres commerciaux, transports qui
constituent l’ultime défi. Et dans ces
non-lieux s’effectue aussi une revendication de meilleure cohésion entre le
nom, l’identité et l’espace, s’exprime un
refus d’anonymat, un refus d’anomie, un
désir de laisser sa trace face au sentiment
d’inexistence sociale.
Chez le tagueur, il y a un désir d’avoir
de l’espace dans la rue ou des murs pour
s’exercer.14 C’est d’abord la surface, la longueur, la forme d’un mur de la ville qui
attire le tagueur. « Il nous faut des murs »,
réclament les graffeurs. « Et nous les cherchons partout: les lieux désaffectés, friches
urbaines, le long des canaux et des ports ».
La signature est hâtive, demande une
grande rapidité d’exécution ; d’autres
tagueurs vont signer à côté, empiler différentes signatures. Un tag attire un autre
tag. Cette accumulation d’informations
déroute.
Selon le tagueur et graffeur Darco,
« l’illégalité fait partie intégrante du style du
graffeur. Elle forge le style, elle imprime sa
griffe personnelle, sa réputation». « C’est le
sens du mot tag en américain». «Le logo est
comme une signature qui nous est propre».
«Plus qu’une référence commune, c’est
avant tout une marque de reconnaissance».
Le tagueur exécute son graphisme souvent la nuit en ciblant des bâtiments particuliers, bâtiments publics, métros, voies
ferrées, car le tagueur se fait reconnaître
des autres par des conduites dangereuses
et un parcours initiatique.
Un rituel initiatique
Les façades de la désobéissance
■
Le deuxième défi est celui de pouvoir
signer de son nom selon une hiérarchie de
difficultés et de prise de risques. Il s’agit
souvent de jeunes qui vont laisser des
traces dans des espaces bien définis :
portes cochères, volets de magasins (on
se sert des rainures comme des lignes
d’un cahier d’écolier), palissades, cadres
formés par les pierres de taille apparente et, surtout, grandes surfaces planes de
murs blancs ou jaunes de préférence. Le
tagueur, selon Barbara Drucker15, est,
sur le plan spatial, conformiste. La plupart d’entre eux s’enferme dans des
cadrages.
Pour être reconnu dans le monde des
tagueurs, on inscrit sa signature sur les
bâtiments publics, écoles, universités,
bâtiments culturels, musées. En ciblant les
édifices symboles du savoir de la société
dominante, le tagueur défie l’ordre social,
se place dans l’illégalité et se rebelle en
transgressant l’ordre institué.
Les bâtiments privés, les magasins, les
volets de maison ou immeubles bourgeois sont alors entrepris. À Strasbourg,
dans le « quartier allemand », où réside
une population cossue, les bâtiments
publics de l École supérieure de commerce, de l’Institut d’études politiques
comme les propriétés privées sont tagués
régulièrement.
La progression dans la difficulté conduit
à une prise de risque de plus en plus grande: il s’agit de signer ou faire des lettres plus
élaborées sous forme de graffs sur les ponts
ou des murs le long des voies ferrées, le long
des voies de métro. Exercice périlleux qui
peut entraîner la mort du tagueur s’il est
coincé par un métro durant cet exercice.
La RATP se fait discrète sur ce type d’accidents mortels. Le tagueur est prêt à risquer
sa vie pour ce type de travail. Cette attitude
fait partie intégrante de son art. Ces expériences-limites nous renvoient aux passions
du risque. David le Breton souligne la
nécessité de rites de passage propres à la
jeunesse, de langages de références communes à la musique, au sport, à la BD, aux
rites de consommation: « Certes la jeunesse instaure des rites propres, très segmentés
d’une classe d’âge à une autre, variant selon
les origines sociales et culturelles des
acteurs ». Mais il insiste sur le maniement
avec la mort: « Le jeu avec l’idée de mort
favorise ainsi une exploration de soi, de sa
relation au monde ».16
Fresque murale du graffeur Tilt
et de la graffeuse Fafi,
centre administratif, Toulouse, 2001
Photographie Anny Bloch
94 Revue des Sciences Sociales, 2002, n° 29, civilité, incivilités
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Anny Bloch
Le tagueur travaille en groupe ou seul
et développe son inspiration. De 1984 à
1987, les tags recouvrent les voitures du
métro de New -York jusqu’à ce qu’un travail de surveillance, de répression et de
nettoyage y mette fin. Des tags se retrouvent à l’heure actuelle sur le métro de
Rome ; on a pu parler de « subway art »
(art du métro).
Des formes nouvelles
de civilité
■
Paradoxalement, face à une civilité
très codée dans l’espace public et sans
grande invention, se dessineraient ainsi
des modes nouveaux, sans doute violents
et provocateurs, de civilité. Serait civil
celui qui accomplit les différents rites de
passage pour marquer sa trace dans la
ville : savoir, sans se faire repérer, graffer sur les palissades, les murs privés et
publics, répéter cela dans différents quartiers, élaborer des lettrages de plus en
plus complexes, en relief, colorés avec
différentes bombes de couleurs.
Ce nouveau code de civilité s’élaborerait à l’intérieur des groupes de graffeurs. Un code de l’honneur spécifique à
ces groupes serait donc mis à l’épreuve,
code que l’on pourrait aussi appeler code
du savoir-faire ensemble.
La première étape pour un graffeur est
d’être intégré dans un groupe, « crew ».
C’est le signe de reconnaissance des
capacités du graffeur. Savoir dessiner sur
les murs avec rapidité, écrire sa signature en relief ou en bulles avec des couleurs
demande un apprentissage, un savoirfaire qui dépasse les tags des débutants.
Exécuter ce travail collectif exige un
travail en commun, un rythme particulier, un partage qui traduit une reconnaissance de la place de l’autre aussi bien
symbolique que spatiale.
Il faut savoir « se tenir » ensemble. Il
faut se reconnaître et avoir un style commun, une histoire proche, des affinités ou
s’être rencontré.
Avant cette deuxième étape, le jeune
traverse « le temps de l’étrangeté ». « Le
débutant ne sait pas vraiment comment
mener à bien son activité, il n’en maîtrise ni les traditions, ni les savoir-faire, et
surtout il reste influencé par les croyances
spontanées qu’il a pu élaborer à propos
des graffitis ».17
L’une des marques de « respect », le
terme le plus approprié à ce code, est de
ne pas « toyer », taguer ou recouvrir le graf
ou la fresque du groupe qui est arrivé le
premier sur le mur. Recouvrir ou taguer la
fresque constitue une véritable transgression du code de civilité entre graffeurs.
Seuls de tout jeunes tagueurs qui ne
connaissent pas les règles commettent
cette erreur. Ils se font rappeler à l’ordre
et se font « toyer » leur graffitis.
L’espace travaillé par un graffeur ne
doit pas être retouché par un autre groupe. Le lieu illégalement approprié est en
général propriété du groupe qui a travaillé le premier. Celui qui ne respecte
pas cet espace ne respecte pas le code
entre graffeurs. Il ne sera donc ni identifié comme graffeur, ni reconnu. Il est
considéré comme hors du groupe. Il ne
sera pas invité dans des manifestations
collectives ou à des rencontres entre
graffeurs ou sera simplement évité, nonexistant.
Le graffeur reconnu est celui qui part
à la découverte d’espaces nouveaux. Il
graffe régulièrement et donc montre son
travail sur les murs de la ville ou de sa
périphérie. Son travail doit être vu. Il
peut travailler seul mais le plus souvent,
pour se sentir plus à l’aise, davantage stimulé, il opère en petit groupe. Chaque
membre du groupe a sa spécialité, lettrage, personnage, portrait, animaux,
plantes.
L’on reconnaît son style, non seulement par son lettrage plus ou moins
sophistiqué, mais aussi sa manière de travailler, les thématiques qu’il développe :
voitures, habitat, nature, monde animal,
personnages sous forme de lascars ou
plus généralement scène de critique de la
culture urbaine (voiture, HLM, cris,
débris).
Au delà de ces règles générales, un
code de civilité existe entre la nouvelle et
la vieille génération : en général, l’on respecte la « old school » par rapport à la
« new school » même si l’on ne se reconnaît plus dans l’ancienne école. Ce phénomène est sensible dans les villes où le
graff existe depuis une vingtaine d’années. Les anciens, même s’il graffent
moins qu’avant, sont respectés. C’est à
eux que l’on doit les débuts du graff, le
style, la manière de s’approprier les murs
et de s’être fait tolérer par les institutions
de la ville.18
96 Revue des Sciences Sociales, 2002, n° 29, civilité, incivilités
Une nouvelle esthétique,
à chacun son style,
à chacun son langage ■
Ces tags et lettrages, souvent
expressions complémentaires, se
retrouvent aussi bien à Berlin, Rome,
Paris, Brooklyn avec des styles éphémères selon une esthétique très singulière. Une écriture qui crève la vue, un
art qui explose à la figure, un art à
vif. 19
Il s’agit de travailler son style sous
forme d’écritures cassées, brisées
comme on casse la vie. De l’écriture
désarticulée tag, nous passons au graff,
une écriture organisée, avec des règles
formelles comme un langage qui se
dessine dans la ville et qui demande
des exercices de répétition avant d’être
travaillé sur un mur. Le graff est moins
un retour à l’ordre que l’adoption de
conventions, la maîtrise de la perspective, du relief, du volume. L’écriture
devient plastique.
Une signature maîtrisée s’exécute
d’abord par l’outline. Le tracé extérieur - qui délimite les formes - est exécuté avec la bombe, uniquement. La
différenciation des lignes plus ou
moins fines se fait grâce aux embouts
qui filtrent le jet, la sûreté du mouvement, la panoplie des bouchons utilisés
(caps plus ou moins gros), la distance
entre la bombe et la surface du mur. Un
angle droit ne doit pas couler sinon le
graff ne mérite pas d’être signé. 20
Certaines signatures forment un
cercle comme un éternel recommencement, d’autres adoptent un lettrage 21
très géométrique, le « bloc style »,
lettres carrées qui couvrent la totalité
de l’espace délimité, « top to bottom »,
blanc, rainuré, hachuré ; ailleurs, le
lettrage se travaille en rond, en volume
de type ballons (bubbles). D’après
Hugues Bazin, « le graff peut être figuratif, abstrait ou encore représenter un
travail sur les lettrages ». « Les graffeurs sont des perfectionnistes qui travaillent des heures durant sur les croquis qu’ils sélectionnent avant de les
réaliser sur les murs ». 22 « D’un côté il
leur faut perpétuer le graffiti dans la
rue ce qui est illégal mais à la source
même de cet art. De l’autre, ils ont
besoin d’un public, ce qui se fait dans
des lieux qui dénaturent leur approche
artistique », expliquent Sye one et Sem,
membres de l’East Side Team. 23
Le graffeur Mahon tient un autre
discours. Il désire faire du graff un
véritable travail professionnel et pas
seulement un passe-temps. Il crée l’association « Le Repaire » avec des amis
de longue date, graffeurs eux aussi.
Mahon habite à l’origine les quartiers
du Neuhof à Strasbourg. Il travaille sur
un site web pour assurer la promotion
de son groupe.
Nous trouvons la même préoccupation chez les graffeurs à Toulouse, très
nombreux, organisés en groupes
incluant des femmes graffeuses dans la
réalisation de fresques, ce qui est tout
à fait exceptionnel. 24 Ces groupes ont
déjà commencé à graffer depuis les
années 1980. Certains sont associés à
des marques de sports, font des expositions dans les galeries d’art ou de
vêtements, participent à des rencontres
sportives. D’autres opèrent dans différentes villes européennes, américaines et sont devenus des repères culturels incontournables dans la ville. Ils
peignent des fresques d’une très grande complexité sur des murs du centre
ville en collaboration avec des artistes
américains. On trouve au moins deux
générations de graffeurs. Ils s’appellent entre eux « the old school et the
new school » (vieille et nouvelle
école). Et ces groupes existent depuis
plus longtemps que dans d’autres
villes. Entre eux règne cependant peu
de communication, une compétition
de groupe à groupe, une hiérarchie de
notabilité, et pour tous, un désir de
reconnaissance.
Nous sommes en face de configurations de groupes contradictoires, très
mouvants, qui se composent et décomposent très rapidement, visibles, reconnus et clandestins tout à la fois. Cette
culture se veut transgressive : elle
revendique le droit de graffer et de
taguer dans des lieux interdits. Ces
groupes restent difficilement approchables, ne souhaitent pas laisser de
coordonnées si ce n’est sur le net. Des
graffeurs ont été arrêtés, ont payé des
amendes et ont fait parfois de la prison.
Il est nécessaire donc d’aller à leur
recherche.
Les façades de la désobéissance
La rue, espace
d’expérience,
de brassage,
de confrontation
et de maturité
■
« La rue est un espace de transition qui
marque l’articulation entre les espaces du
dedans, du familier et du dehors, public et
étranger. En tant que telle, elle échappe en
partie au modalités de contrôle social (en
l’absence de forces de police) ».25
Le groupe créé par Mahon et son ami
Bonzer, puis avec un ou deux autres s’appelle Macia, bande informelle de copains
de jeux dans la rue : « Mouvement d’Action Cosmopolite, Autonome et Insurrectionnel». Le « groupe, c’est une émulation, une contestation ; on se sent plus fort
quand on est nombreux ». Son groupe,
après avoir tagué sur des murs interdits,
s’exerce sur des murs tolérés dans les
mois d’été, sur les murs d’un terrain de
sport près de la voie ferrée, à la périphérie de la ville, véritables espaces intermédiaires. L’objectif n’est plus de marquer son passage mais de pratiquer son art
en s’exerçant. Les graffeurs travaillent et
retravaillent sur des espace désaffectés. Ils
considèrent que les lettrages donnent un
décor à la ville, animent les lieux où
vivent différentes générations.
Depuis 1989, le graffeur Mahon
dépasse le tag, le lettrage, pour élaborer
un travail complexe, le « masterpiece », la
fresque. Après avoir élaboré une première fresque illégale avec un ami dans le
quartier de l’Esplanade à Strasbourg, il
reprend ce travail et peint avec des jeunes
de 10 à 16 ans du centre socio-culturel de
l’Elsau un premier travail collectif. Cette
équipe compose, avec l’accord de l’Office d’HLM, une fresque représentant les
différentes composantes du hip-hop. Danseurs, rappeurs, B. Boys sont mis en scène
selon les thèmes récurrents du mouvement : la nuit, les voies ferrées, le contexte urbain ; les personnages expriment le
dynamisme du mouvement.
Ce travail permet aux jeunes artistes de
s’impliquer dans un processus de
construction. Le lettrage subsiste, le travail doit pouvoir être lu par tous les habitants du quartier. Le graffeur est passé de
l’apposition d’une signature qui se reven-
diquait illisible à la réalisation d’une
œuvre complète qui peut être déchiffrée
par tous les passants. Le groupe participe
à des interventions institutionnelles et
professionnelles : Fête de la Musique, Eté
jeunes.
Sur les murs de la Laiterie en
juin 2000, le groupe « Repaire » répond
à la demande d’élaboration de fresques en
corrélation avec d’autres groupes. Son
style n’est plus seulement les personnages du hip-hop mais celui de bandes
dessinées. Il travaille également des personnages de la vie quotidienne observés
dans la rue. Par exemple, Christophe dessine ses personnages de jeune en rouge
explosif, animés par des lettrages « new
school », « wild style »… « Questa »
(Qu’est ce que tu as ?), écrit-il, manière
d’arrêter le passant. Ses personnages peuvent être les artistes eux-mêmes mis en
scène. « C’est un peu soi », explique
Christophe. De manière paisible ou électrique, il s’agit d’interpeller le passant. Le
philosophe américain Shusterman parle à
propos de cet art de corporalisation de
l’expérience.
Des formes significatives indiquent la
socialisation du groupe, un retour à des
formes plus connues de civilité. Comme
nombre d’entre eux, « Repaire » a son
adresse e-mail et constitue son site en
2001. Parallèlement, il se confronte à des
artistes d’autres pays avec lesquel il va
composer de nouvelles fresques. Des
graffeurs de la ville de Dresde ont travaillé
l’été 2000 sur un mur toléré aux lisières
de la ville de Strasbourg. Pour un des
groupes toulousains, des graffeurs de la
scène new-yorkaise sont invités à composer une grande fresque murale sur des
murs tolérés en centre-ville de Toulouse.26
Réflexion sur l’art
des fresques murales :
rapport entre esthétique
et politique
■
Au cours de leur expérience, certains
graffeurs élaborent toute une réflexion sur
le mouvement hip-hop qui ne rejette plus
les autres, mais interpelle le passant quel
qu’il soit. Ils amorcent une analyse du travail esthétique dans sa relation avec le
politique. Mahon s’exprime ainsi à propos
du hip-hop : « Le hip-hop, c’est une reli97
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gion, un chemin que nous nous sommes
tracés. Ce mouvement nous laisse beaucoup de liberté avec des instruments
faciles, à notre portée ». C’est aussi une
manière de répondre à la confusion, au
brouillage des analyses des politiques
qui, selon certains graffeurs, ne permet
pas d’identifier les problèmes. Pour lui,
les jeunes des quartiers, ce n’est pas une
affaire des origines mais une affaire de
classes sociales. On appartient à la même
classe sociale.
« Nous ne sommes pas sûrs d’être
complètement acceptés. Nous sommes
des gens qui ne sont pas l’élite et qui font
des choses pour le peuple. C’est notre
manière de faire de la politique. C’est
comme un jet violent. Cela sort. »
Le souci d’un des membres fondateurs
du groupe est d’éviter tout dogmatisme
par rapport au rassemblement hip-hop, il
ne se soucie pas des étiquettes, ou de parler à tort et à travers. Ce qui le rend mal
à l’aise, ce sont les institutions qui
essaient de canaliser le hip-hop sous
forme de récupération du mouvement
« Je ne souhaite pas endosser le rapport mal assumé des institutionnels au
colonialisme, » dit-il. Un artiste n’est pas
un acteur social. Il apporte son témoignage d’artiste sans parler d’intégration
ou de noyau dur, de « hard core ». Sa
contestation politique est dans un travail
graphique sur la ville quelle que soit sa
forme : fresques, BD, graphismes de CD,
interventions sur les murs, commandes
publiques.
« Plutôt que d’aller saloper les murs,
faire des fresques, ça met un autre regard
sur moi-même. Je trouve ça plus
constructif. Je veux des bonnes images,
un travail bien cadré. Peindre sur un
grand mur, ça va le sacraliser comme les
affiches d’un personnage politique, cela
représente une importance dans la ville ;
qu’on a du pouvoir. Un pouvoir politique,
un pouvoir d’expression avec des moyens
différents. Ca va dans le même sens. Ca
va sacraliser le mur ».
Redonner par l’art du sens au politique, occuper les murs au même titre que
les affiches des candidats en campagne,
telle est la revendication de ce graffeur.
Pour lui, le politique semble encore du
ressort de l’espace public mais aussi du
sacré. Donner une place dans l’espace
public à des jeunes « qui ressentent la
formidable résistance de notre société à
assumer son histoire, son ambivalence à
exiger les devoirs inhérents à la nationalité française sans en donner complètement les droits » comme l’écrit David Le
Breton.27
Et sur le choix des personnages dans
ses fresques : « On m’a souvent reproché
que je dessinais des gens trop basanés,
malheureusement pour eux, je dessine des
gens que je vois dehors dans la rue.
Quand je prends le tram, y a pas que des
Alsaciens, il n’y a pas que des Alsaciens
dans le quartier, je dessine les gens que je
vois. Je ne trouve pas qu’il y ait un problème par rapport à cela. Il y a des gens
qui sont focalisés là dessus ».
Dans ces propos sont posés les questions du rapport de l’art à la politique, des
relations entre le politique, l’espace
public et le sacré, ainsi que du dialogue
entre l’artiste et son spectateur, puisque la
population qui regarde son travail a du
mal à accepter que soit ainsi représentée
sa propre réalité, celle de la pluralité culturelle dans laquelle nous vivons.
« Il ne faut pas s’habituer, il faut
changer les murs gris et les repeindre. On
fait changer le décor, on met de la lumière, du mouvement pour éviter le côté figé
de la ville ».
Les tags, les graffitis sont sans doute
perçus comme des signes d’insécurité,
d’incivilité, une menace potentielle. Ne
faut-il pas aussi les considérer comme des
signes marquant l’altérité, la différence,
qui sont sans doute l’expression de la
dégradation des échanges sociaux, de la
disparition des repères politiques mais
aussi traduisent le désir de retrouver un
territoire, de signer sa révolte, son identité, de colorer la grisaille des villes et de
s’inscrire dans des temps novateurs ?
Fresque murale du graffeur Mahon, quartier
de l’Elsau, Strasbourg, 1996 : « Le hiphop,une manière de construire ». Photographie
Anny Bloch
98 Revue des Sciences Sociales, 2002, n° 29, civilité, incivilités
Les façades de la désobéissance
Notes
1. Cet article fait suite à une communication
au colloque « La rue et ses figures : un
bilan pour l’an 2000 », Université Toulouse - Le Mirail, 22-25 novembre 2000,
colloque organisé par Jeanne Brody (souspresse 2002).
2. Tag : productions brèves, plus ou moins
lisibles, en traits simples et d’une seule couleur en général, correspondant à la signature qui prend la forme d’un pseudonyme.
Graff: lettrage selon un tracé plus ou moins
complexe en double ligne avec espace intérieur, extérieur, identification d’un groupe
ou d’un graffeur et de son savoir-faire.
Fresques : productions et compositions
avec lettrages et personnages traduisant les
formes de violence ou l’environnement de
la vie urbaine.
3. Voir l’ouvrage des deux psychosociologues, Marie-Lise Felonneau et Stephanie Busquets, Tags et grafs, les jeunes à la
conquête de la ville, Paris, L’Harmattan,
2000, notamment le chapitre Tags, insécurité, incivilités, pourquoi avons nous
peur des tags ? p. 19-45.
4. Notre enquête de type anthropologique sur
les tags, graffitis, fresques murales est la suite
de l’étude sur le mouvement hip-hop, voir,
« Journal de bord sociologique, la culture
hip-hop, langage urbain d’intégration sociale », Ministère de la Culture et de la communication, DRAC Alsace, 2000, 45 pages,
et de travaux sur « Les figures de l’accueil:
Regards croisés sur les nouvelles cultures
urbaines : processus d’intégration et de
restructuration des jeunes » (en collab. avec
Boualem Ayad), Avancées, Strasbourg, Maison des Sciences de l’Homme, 12 pages (à
paraître 2001) dans le cadre du séminaire
dirigé par Freddy Raphaël sur la notion et les
pratiques de l’accueil.
Les terrains choisis sont les villes de Strasbourg, Toulouse et San Francisco. L’étude
plus spécifique sur les fresques murales se
veut être une comparaison entre la généalogie des fresques dans les villes de Californie,
les mouvements sociaux qui la sous-tendent,
et celle des fresques issues du mouvement
hip-hop dans les villes françaises. Cette
étude a débuté en septembre 2000 à San
Francisco avec les travaux sur les murs de
Diego Rivera et du Public Art Project des
années 1930 qui précèdent le programme
social et artistique WPA, Work Progress of
Art, programme social de soutien aux artistes
sous l’ère du Président Roosevelt. Cf. Anny
Bloch, Expression murale des mouvements
sociaux (Strasbourg-San Francisco), Cultures et sociétés, 25, 2002.
5. Entretien du 15/11/2000 avec le service de
propreté de la Communauté Urbaine de
Strasbourg qui réunit 27 communes.
6. Nous avons pu au cours d’une conférence
donnée sur les tags (CEMRIC, Strasbourg,
décembre 2000) rencontrer des jeunes étudiants d’arts graphiques ayant travaillé sur
des murs à la Laiterie (Centre européen de
la Jeune Création) à Strasbourg en mai 1998
pour la Fête de la Musique, ainsi que sur les
murs du Centre autonome des jeunes,
Molodoï, juste pour l’expérience graphique.
Je pense notamment à la graffeuse Camille et plus tard à Toulouse, à Corail, graffeur
et étudiant en arts graphiques.
Les fresques murales (mais pas nécessairement les tags et les graffs) sur les murs de
l’Université Marc Bloch à Strasbourg sont
le travail d’étudiants d’arts graphiques
(entretien avec l’un de leurs professeurs). A
l’Université Toulouse le Mirail, ce sont des
graffeuses professionnelles qui ont été sollicitées pour réaliser une fresque à l’entrée
du campus.
7. Voir l’ouvrage de Sandra Bévillard, Comprendre les jeunes, ruptures et émergence
d’une nouvelle culture, éd. chronique sociale, 1998 et l’article, « Patience et respect »,
Cultures en mouvement, dossier « Les
jeunes ont-ils la haine ? », n° 11,
octobre 1999, p. 12-13.
8. Alain Milon, L’Etranger dans la ville, Paris,
Puf, 1999.
9. Voir Sandra Sébillard, Cultures en mouvement, article cité. Nous retrouvons dans ces
lignes les propos du sociologue urbain
américain Richard Sennett, qui souligne la
nécessité de l’anarchie, de la diversité et du
désordre créateur dans la société urbaine :
Les usages du désordre, Identité de la personne et vie urbaine, New York, Londres,
Norton, 1970
10. Dubet, La galère, jeunes en survie, 1987 et
M-L Felonneau, S. Busquets, op. cit., p. 32.
11. Entretien avec Mahon, peintre graffeur, le
2/09/2000, Strasbourg.
12. Entretien avec Wanda, rappeuse, quartier de
l’Elsau (Strasbourg) le 14/9/2000, qui fait
actuellement une carrière de rappeuse en
Allemagne et en France.
13. Cité par David Le Breton, en référence à A.
Ehrenberg, La fatigue d’être soi, Paris,
Odile Jacob, 1998, in Penser la mutation
(sous la dir. d’Armand Touati), Cultures en
Mouvement, 2001, p. 114.
14. Mouvement, Dossier Hip-hop, les pratiques, les marchés, la politique, Paris, éd.
La Découverte, Darco, Mode 2, le graff au
fil du rasoir, p. 13, 1999.
15. Barbara Drucker, dossier de psychosociologie de l’espace, Faculté des sciences
sociales, Université Marc Bloch, Strasbourg, 1997, p. 4/8. Merci à Barbara Drucker de m’avoir donné de précieuses indications sur son travail.
16. David Le Breton, Les passions du risque,
Paris, éd. Métailié, 1°éd.1991, éd. 2000,
p. 97.et p. 104.
17. Felonneau, Busquets, op. cit. p. 69.
18. C’est le cas pour la ville de Toulouse où le
graff constitue un phénomène ancien. Plusieurs générations de graffeurs existent déjà.
L’office du Tourisme en juillet 2001 a organisé une visite guidée des fresques murales
dans la ville.
19. Voir le texte sur la définition du rap par
Richard Shusterman: « Pragmatisme, post
modernisme et autres débats », in Mouvements, Paris, éd. la Découverte, 1999, p. 6976 et son ouvrage, L’art à vif. La pensée pragmatiste et l’esthétique populaire, Paris, éd. de
Minuit, 1992.
20. Hugues Bazin, « La culture hip-hop », Paris,
Desclée de Brouwer, 1995,
21. Exposition « Paroles urbaines », Strasbourg,
La Laiterie: espace culturel de marges où une
vingtaine de graffeurs connus dont l’américain, Sharp, le groupe Alphabétik, réalisent et
exposent leurs graffs en 1996.
22. Hugues Bazin, « La culture hip-hop » p. 172
et entretien avec des graffeurs toulousains qui
préparent longuement leurs maquettes avant
de travailler sur les murs et achètent un
nombre impressionnant de bombes pour
avoir le choix des couleurs (mars-juin 2001).
23. « Les Dernière Nouvelles d’Alsace »,
20 octobre 2000, Dossier, « L’autre planète
hip-hop », pages locales, p. 5.
24. À Toulouse, quatre femmes connues sont
graffeuses, Kat, Plume, Fafi, Lus et Vanessa.
Voir à ce propos leur position et leur statut,
leur itinéraire et les raisons de leur travail dans
le mémoire de licence de sociologie de Stéphanie Grousset, dirigé par Françoise-Paule
Lévy, Le fillisme ou ces toulousaines qui graffent leur mur. Toulouse, juillet 2001.
25. Felonneau, Busquets, op., cit, p. 49.
26. Nous considérons ce mouvement de confrontations internationales et d’ouverture des
frontières comme l’élaboration de nouvelles
routes culturelles européennes et transatlantiques, comme un désir de faire connaître ces
différents groupes sur la scène internationale. Cette tendance est davantage prononcée
dans la musique rap où deux groupes du rap
de Stuttgart ont invité des rappeurs marseillais, parisiens, et la chanteuse rap strasbourgeoise, Wanda Melouki à se produire sur
la scène allemande. L’ensemble vient de produire un CD, French Connection. On peut à
travers cette culture urbaine voir se dessiner
de nouvelles formes de collaboration francoallemande mobilisant des salles entières de
jeunes allemands pour un rap chanté en français.
27. David Le Breton, Une violence à l’autre, Cultures en mouvement, 11, octobre 98, p. 26-30.
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