CSTC Revue n° 2002/2 p60

Transcription

CSTC Revue n° 2002/2 p60
m
LA RÉSISTANCE AU FEU
DES CONSTRUCTIONS
ET LES EUROCODES
a
S
T
C
e
C
g a z i n
3e PARTIE : CALCUL DU
COMPORTEMENT AU FEU
DES MACONNERIES
Yves Martin, ir., chercheur, division
Avant-dernier volet consacré au calcul de la résistance au
Structures, animateur Antenne-Norme
feu des structures sur la base des Eurocodes, le présent
«Prévention contre l’incendie»
article apporte quelques éclaircissements au sujet de la
Benoît Parmentier, ir., chef de projet,
prénorme européenne ENV 1996-1-2 Eurocode 6 : calcul
division Structures, animateur AntenneNorme «Eurocodes»
des ouvrages en maçonnerie. Partie 1.2 : règles générales; calcul du comportement au feu. Les deux précédents
articles, parus dans nos éditions d’automne et d’hiver 2001, traitaient respectivement du calcul du comportement au feu des structures en béton et des structures
en bois. Le dernier volet à paraître abordera le comportement au feu des structures
en acier.
1
2
EVALUATION
DE LA RESISTANCE
AU FEU PAR VALEURS TABULEES
PRINCIPES
DE BASE
Norme belge enregistrée
sous l’indicatif NBN ENV
1996-1-2 (1), la prénorme
européenne ENV 1996-1-2 traite du comportement au feu des ouvrages en maçonnerie.
Elle s’accompagne, dans notre pays, du document d’application national (DAN - 1999) fournissant les spécifications belges.
L’annexe C
du projet de
norme Eurocode 6 (partie 1-2) présente des tableaux qui se différencient par les
paramètres suivants :
◆ taux de chargement (mur fortement chargé,
faiblement chargé ou non chargé)
◆ fonction de la maçonnerie (fonction séparative ou non)
◆ type de blocs de maçonnerie.
Comme explicité dans les deux articles précédents [6, 7], la résistance au feu d’un élément
de construction peut être justifiée non seulement par des essais, mais aussi par l’un des
moyens suivants :
◆ soit à l’aide de valeurs tabulées, c’est-à-dire
de données empiriques ou provenant de
l’évaluation de résultats d’essai
◆ soit à l’aide d’une méthode de calcul simple
(analogue à un calcul à l’état limite ultime à
froid) ou d’une méthode de calcul dite
“avancée”.
Des essais sur des matériaux mis en œuvre
usuellement en Belgique ont permis de compléter un certain nombre de ces tableaux. L’interprétation des résultats d’essai a montré que
le taux de chargement n’avait pas d’influence
significative sur la résistance au feu des murs
ayant une fonction séparative (dans les conditions des essais disponibles; voir plus loin).
Ainsi, le document d’application national n’a
pas opéré de différence entre les murs fortement chargés, faiblement chargés ou non chargés.
Contrairement aux Eurocodes traitant de la
résistance au feu des éléments en béton, en
acier ou en bois, le projet de norme Eurocode 6,
partie 1-2, ne livre, à l’heure actuelle, aucune
méthode de calcul permettant de déterminer la
résistance au feu des ouvrages en maçonnerie.
Par ailleurs, les tableaux reprenant les valeurs
tabulées ne sont pas encore disponibles. Le
document d’application national a cependant
complété cette prénorme en fournissant des
tableaux de valeurs basées sur des essais de
résistance au feu réalisés en Belgique.
Le tableau ci-contre, synthèse des tableaux de
l’Eurocode, rassemble les résultats d’essai et
indique l’épaisseur minimale de la maçonnerie (critère REI) nécessaire pour atteindre une
résistance au feu comprise entre 30 minutes et
4 heures selon différents types de matériaux :
terre cuite, béton silico-calcaire, béton cellulaire et béton d’agrégats. Pour chaque type de
(1) Projet de norme soumis à l’enquête publique en février dernier.
60
ETE
2002
C
N
S
T
C
m
Epaisseur
minimale des
maçonneries
séparatives
nécessaire pour
atteindre une
résistance au feu
comprise entre
30 minutes et
4 heures (les
colonnes en vert
reprennent les
résistances au feu
demandées en
Belgique).
EPAISSEUR MINIMALE DE LA MAÇONNERIE (EN mm) POUR UNE RÉSISTANCE
AU FEU STANDARD (EN MINUTES)
TYPE DE MATÉRIAU
30
60
90
120
180
240
Eléments en terre cuite (EN 771-1) avec joints en
mortier ordinaire :
– éléments du groupe 1 avec ρ ≥ 1000 kg/m3
– éléments pleins du groupe 1 avec ρ ≥ 1200 kg/m3
– éléments du groupe 2a avec ρ ≥ 700 kg/m3
90
90
90
90
90
90
140
140
140
140
140
140
190
190
140
190
190
190
Eléments en béton silico-calcaire (EN 771-2) avec
joints en mortier ordinaire ou joints minces (*) :
– éléments du groupe 1 avec ρ ≥ 1000 kg/m3
– éléments pleins du groupe 1 avec ρ ≥ 1600 kg/m3
90
90
90
90
140
140
140
140
140
140
140
140
Eléments en béton cellulaire (EN 771-4) du groupe 1
avec ρ ≥ 550 kg/m 3
90
90
90
140
140
140
Eléments en béton d’agrégats (EN 771-3 et 771-5)
avec joints en mortier ordinaire, joints minces ou
joints en mortier léger (**) :
– éléments du groupe 1 avec 500 ≤ ρ ≤ 1500 kg/m3
– éléments du groupe 1 avec ρ > 1500 kg/m3
– éléments du groupe 2 avec ρ ≥ 800 kg/m3
90
90
–
90
90
–
140
140
140
140
140
190
140
190
190
190
190
240
(*) Mortier formulé pour des joints d’une épaisseur comprise entre 1 et 3 mm.
(**) Mortier dont la masse volumique sèche mesurée sur produit durci est inférieure à 1500 kg/m3.
Si tel n’est pas le cas (si la hauteur dépasse les
3 m), il conviendra d’augmenter l’épaisseur
minimale donnée au tableau, en la multipliant
de telle sorte que l’élancement reste inférieur
ou égal à celui du mur testé, soit :
matériau, des différences sont établies en fonction de la masse spécifique apparente (ρ = 400
à 1500 kg/m3) et de la proportion de vides (2) :
◆ groupe 1 : de 0 à 25 %
◆ groupe 2a : de 25 à 45 % (terre cuite) ou de
25 à 50 % (béton d’agrégats)
◆ groupe 2b : de 45 à 55 % (terre cuite) ou de
50 à 60 % (béton d’agrégats)
◆ groupe 3 : < 70 %.
h ht
≤
e et
où h
e
ht
et
Ces valeurs ne sont cependant valables que
pour des murs répondant aux conditions des
essais disponibles, soit :
– effort normal appliqué : N ≤ NRd/γF, NRd étant
la charge de calcul admise pour le mur et γF
un facteur de sécurité égal à 1,5
– hauteur du mur (distance entre les niveaux
constituant un appui efficace durant l’incendie) : h ≤ 3 m.
=
=
=
=
hauteur du mur considéré
épaisseur du mur considéré
hauteur du mur testé, égale à 3 mètres
épaisseur donnée dans le tableau.
Le projet de norme Eurocode 6, partie 1-2,
permet également de déterminer la résistance
au feu des murs creux ou murs doubles (murs
composés de deux parois séparées par un espace). Trois cas sont envisagés (4) :
◆ les deux parois du mur double sont chargées : la résistance au feu de ce mur peut
être déterminée en considérant un mur simple d’épaisseur égale à la somme des épaisseurs des deux parois
◆ une seule paroi du mur double est chargée :
la résistance au feu du mur double est (au
moins) égale à celle de la paroi chargée
Il convient en outre de se conformer aux
prescriptions énoncées dans la prénorme
ENV 1996-1-1, notamment en limitant l’élancement du mur (rapport entre sa hauteur et son
épaisseur) à 27 pour les murs chargés et à 40
pour les murs non chargés (3).
(2) Cf. tableau 3.1 de l’ENV 1996-1-1:1995.
(3) Cf. § 4.4.6 de l’ENV 1996-1-1:1995 et § 3.3(3) de l’ENV 1996-1-2:1995.
(4) Cf. § 3.1.3 de l’ENV 1996-1-2.
61
ETE
2002
a
e
ORMES & REGLEMENTS
g a z i n
m
◆ aucune paroi du mur double n’est chargée :
la résistance au feu du mur double est égale
à la somme des résistances au feu des parois prises individuellement.
T
C
g a z i n
L’annexe A du projet de norme Eurocode 6,
partie 1-2, indique quelles sont les normes
auxquelles il y a lieu de se référer pour réaliser
les essais de résistance au feu des maçonneries : il s’agit de la série de normes européennes EN 1364, EN 1365 et EN 1366, dont certaines sont encore en cours d’élaboration. Le
document d’application belge permettra néanmoins de recourir aux dispositions de la norme
belge NBN 713-020, en attendant l’approbation officielle de ces normes européennes. ■
Enfin, signalons également que, pour des parois de séparation, les joints (verticaux) doivent être remplis complètement. Si cela ne peut
être garanti, un enduit au plâtre de 10 mm
d’épaisseur au minimum doit être appliqué (5).
3
a
S
e
C
EVALUATION DE
LA RESISTANCE AU
FEU PAR ESSAI
La résistance au feu d’un
ouvrage en maçonnerie
peut être justifiée par un
essai en laboratoire, a fortiori si l’ouvrage n’est constitué d’aucun des
matériaux mentionnés dans les tableaux de
l’Eurocode.
Cet article a été élaboré dans le cadre de l’action des Antennes
Normes «Prévention au feu» et «Eurocodes» menée au sein du
CSTC en faveur des PME, avec le soutien du ministère des Affaires
économiques. Ces actions ont pour but d’assurer, auprès des secteurs concernés et en particulier auprès des PME, une diffusion
aussi large que possible des informations relatives à la prévention
des incendies et aux Eurocodes. Pour plus de détails, le lecteur
consultera notre site internet ou s’adressera directement au CSTC :
02/655.77.11
02/653.07.29
[email protected]
http://www.bbri.be/antenne_norm
(5) Cf. article 3.2(6) du DAN belge de l’ENV 1996-1-2.
BIBLIOGRAPHIE
Brüls A. & Vandevelde P.
1
Sécurité contre l’incendie dans les bâtiments. Partie 1 : prévention passive. Gand, Institut de
sécurité incendie (ISIB), mai 2000.
Module 8. Eurocode 6 : maçonneries. Edité dans le cadre de la formation au Fire Safety
2
Engineering «Résistance au feu des constructions. Application des Eurocodes», Université de
Brüls A.
Liège, novembre 2000.
belge de normalisation
3 Institut
NBN ENV 1996-1-1 Eurocode 6 Calcul des ouvrages en maçonnerie. Partie 1-1 : Règles
générales – Règles pour la maçonnerie armée et non armée. Bruxelles, IBN, 1995.
NBN ENV 1996-1-2 Eurocode 6 Calcul des ouvrages en maçonnerie. Partie 1-2 : Règles
4
générales – Calcul du comportement au feu. Bruxelles, IBN, novembre 1995.
Institut belge de normalisation
belge de normalisation
5 Institut
NBN ENV 1996-1-2 NAD Eurocode 6 Calcul des ouvrages en maçonnerie. Partie 1-2 :
Règles générales – Calcul du comportement au feu. Bruxelles, Document d’application national,
IBN, février 2000.
Y. & Parmentier B.
6 Martin
La résistance au feu des constructions et les Eurocodes. 1
ère
partie : actions sur les structures
exposées au feu et calcul du comportement au feu des structures en béton. Bruxelles,
CSTC-Magazine, automne 2001.
Y. & Parmentier B.
7 Martin
La résistance au feu des constructions et les Eurocodes. 2 partie : calcul du comportement
e
au feu des structures en bois. Bruxelles, CSTC-Magazine, hiver 2001.
62
ETE
2002

Documents pareils