Bulletin n° 29-30 de sept-oct 1999

Transcription

Bulletin n° 29-30 de sept-oct 1999
BULLETIN DE LIAISON
DES ANCIENS ET AMIS DES AUBERGES DE
JEUNESSE DE LA RÉGION RHÔNE-ALPES
Siège social:
AnAAJ Rhône-Alpes, 15, Avenue d'Italie 73100 Aix les bains
NUMERO 29-30
Juin-Sept. 1999
Un Bulletin double
J'entends les copains penser
"Ça veut dire quoi ?" Si j'en crois
Doudou certains se sont plaints de
ne pas avoir le bulletin de juin.
Alors il faut savoir que le soidisant rédacteur en chef de ce numéro a passé plus de 70 heures
pour sortir ces quelques pages, et
il y a encore l'impression et l'envoi. Pas aussi simple. J'espère que
les copains seront plus regardants
sur la qualité de ce numéro que ce
soit pour la forme ou le contenu,
que sur la périodicité. Malgré mes
efforts la sortie en juin n'a pas été
possible, désolé.
Ce numéro prépare la prochaine assemblée générale, nous
souhaitons que vous soyez nombreux… alors inscrivez-vous vite
et notez qu'il y aussi urgence pour
commander "L'embellie de Marseille" et s'inscrire à certaines activités. Les délais sont très courts.
Note que ce bulletin tient lieu de convocation à l'Assemblée
générale. Si tu ne peux venir, tu peux te faire représenter, ou
nous écrire pour nous faire part de ton point de vue. Merci.
PROCHAINES RENCONTRES
RHÔNE-ALPES
ouvertes à tous
Week-end et AG des 13/14 Novembre 1999
Auberge de jeunesse du Vieux Lyon
Vous trouverez aussi des échos
de la France ajiste, ce qui est apprécié par les copains isolés que
nous avons un peu partout. Pensez à renouveler votre abonnement si ce n'est déjà fait…
Enfin, des témoignages sur les
années sombres feront sans doute
ressurgir des souvenirs qu'il ne
faudrait pas laisser disparaître.
Alors j'attends vos réactions et
vos propres histoires. Un copain
qui fut du MIAJ nous suggère une
tribune libre… cela allait tellement de soi que chacun pouvait
s'exprimer dans nos colonnes que
je ne l'avais jamais formulé ainsi…
Alors bonne lecture…
Daniel Bret
(voir page 2 pour les détails)
propositions de Béton restant à mettre au point :
Une sortie en Octobre peut être à la nouvelle AJ d'Autrans…
sinon une autre proposition pourra être faite
aux copains qui se manifesteraient
1
Vie de l'Anaaj Rhône Alpes
Assemblée Générale de Lyon 13/14 Novembre 1999
Coordonnées de l’AJ
Samedi 13
Dimanche 14
tél : 04 78 15 05 50
adresse : 41/45 Rue du Chemin neuf
69005 Lyon
14 h 30 Arrivée, installation. Prévoir du temps pour se garer dans ce
vieux quartier pauvre en parkings. On
peut utiliser le parking du Théâtre Antique à 250 mètres de l’AJ.
15 h Départ pour :
La colline de Fourvière : la Basilique,
le théâtre romain, le musée gallo-romain.
18 h à 20 h Assemblée Générale.
20 h Départ pour le repas et la visite du Vieux Lyon “by night”.
8 h - 9 h Petit déjeuner
9 h - 12 h Activités à choisir
- Musée St Pierre
- Marché de la création sur les
quais du Rhône
- Traboules de la Croix-Rousse
- Parc de la Tête d’or
- Quais de la Saône
12 h Retrouvailles Place des Terreaux pour le repas de clôture.
* programme pouvant être modifié,
suivant le temps.
Attention ! Etant donnés les difficultés de stationnement, Raymonde
suggère de se regrouper.
Inscriptions auprès de :
Raymonde Faurite
136 Rue Dr E. Locard 69005 LYON
tél : 04 78 25 79 77
avec 80 F d’arrhes et au plus tard
le 1er Novembre 1999 pour que, si nous
sommes plus de 20, on puisse essayer
d’obtenir plus de places.
Activités et rencontres
Qui aimerait visiter
“Le Dauphiné Libéré”…?
Le mercredi 21 Avril, Galinette et
moi, invités par des amis, avions visité
de 21 h 30 à 23 heures la Rédaction et
l’Imprimerie du Dauphiné Libéré à Veurey à une quinzaine de kilomètres de
Grenoble près de la RN 532 (GrenobleValence) par la rive gauche de l’Isère. Il
nous a été présenté l’énorme documentation, la réception des informations, la
mise en pages, l’ensemble électronique
commandant aux rotatives de tirer quotidiennement les 400 000 exemplaires en
quinze éditions, la réserve de papier journal, les pliages et routages, etc…
J’ai demandé au présentateur si nous
pouvions revenir avec les anciens et actuels des AJ. Il m’a répondu d’écrire dès
que possible afin d’obtenir un rendezvous dans plusieurs mois. Nous proposons d’essayer d’organiser cette sortie
passionnante un vendredi soir dans les
mois qui viennent.
Les copains intéressés doivent se
faire connaître le plus vite possible, de
préférence par lettre, auprès de Béton : Georges Rieux
46 Rue Thiers 38000 GRENOBLE.
Téléphone : 04 76 47 89 40.
Béton
Week-end à l'AJ d'Autrans
Béton a pris des contacts avec la nouvelle AJ d'Autrans où nos copains du
groupe de Lyon ont déjà fait un séjour
sympathique.
Il serait possible d'y aller le week-end
des 16/17 Octobre. mais cela reste à
confirmer… il n'y a rien de sûr au moment où je mets à l'impression.
donc les copains qui seraient intéressés doivent prendre contact avec
Béton dès réception de ce courrier.
Georges Rieux
46 Rue Thiers 38000 GRENOBLE.
Téléphone : 04 76 47 89 40.
Pierre Rieux, un copain disparu
Pierre, le frère de notre co-président,
Georges Rieux dit Béton, est décédé le
20 mai 1999. Il y a quelques années il
avait subi cinq pontages coronnariens. Il
était en retraite de professeur de mathématiques depuis la rentrée scolaire de
1998. Nous avons demandé à Béton de
nous parler un peu de son frère. Il s’est
aussi exprimé au nom de son épouse Galinette et de son fils Christophe.
Pierrot participait beaucoup aux activités culturelles et sportives de l’Association Sportive Ouvrière d’Antibes, club
amateur FSGT, l’un des plus importants
de cette ville, notamment dans les domaines du vidéo-reportage et du cinéma
amateur. Nous avions vu l’un de ses
courts-métrages au Festival de Grenoble. Il avait aussi été figurant dans
deux films : “Le Ruffian” et “Papy fait
de la Résistance”, grâce à son ami cinéaste, José Giovanni.
En 1954, j’avais effectué avec lui
notre premier voyage en Angleterre. Ne
connaissant pas l’anglais, c’est l’adolescent Pierrot qui s’entretenait dans leur
2
langue, notamment avec les automobilistes qui nous avaient pris en stop et
avec les accueils des auberges de jeunesse qui nous hébergaient. Je me rappelle deux faits : le premier à Earl Court,
c’est son jeune âge qui nous avait permis
de dormir dans cette AJ, complète lors
de notre arrivée. Le second lorsqu’un un
automobiliste qui nous avait pris en stop
dans les Cornouailles, nous laissa en
pleine nuit dans Londres. Aussitôt Pierrot fit signe à la première voiture, qui se
révèla une patrouilleuse de la police;
dont les agents, très aimablement, nous
conduisirent à la gare où, tôt dans la matinée, nous allions reprendre un train de
banlieue.
Plus tard, souvent, Pierrot nous a emmené en voilier pour des mini-croisières
au large du Cap d’Antibes et des îles de
Lerins. Je me souviens d’un bivouac
dans une grotte de l’île SainteMarguerite où nous nous étions rendus.
Pierrot était toujours resté mon petitfrère bien qu’il ait plus grandi que moi.
Aussi nous partageons notre immense
peine et notre profond chagrin avec sa
femme Lucette, sa fille Claire et son fils
Vincent.
Béton
Vie de l'Anaaj Rhône Alpes
Le point sur notre association
Si on se reporte à notre dernière Assemblée Générale on peut se rappeler les
orientations que nous avions définies :
Cotisations :
le niveau modique a été compensé
par de nombreuses cotisations de soutien.
Les résultats sont les suivants :
Année
Cotisations Abonnements
1999
201
190
1998
230
217
1997
214
inclu cotis.
1996
146
"
1995
114
"
Réviseur aux comptes :
ne sont pas encore entrés en action.
Programme 98-99
Sorties :
Echirolles, Lyon, peut être Autrans
seront réalisées.
Chamrousse, Le Trayas, la Clusaz :
en Janvier sont à revoir… en semaine ?
Balade en péniche menée à bien.
Bulletin
Un bulletin trimestriel n'a pas été possible. Le bulletin de diffusion nationale
est parti normalement de même que le
n°28. Ceux de Juin et Septembre se
confondent. Les critères permettant de
boucler à temps doivent être mieux respectés. Noter que l'élaboration de ce numéro aura nécessité plus de 60 heures de
travail !
Carnets et cassettes :
on finit maintenant de servir les derniers acheteurs et un petit stock a été
constitué pour répondre aux futures demandes.
Projet vidéo :
Daniel Bret a acheté sur ses deniers
un équipement numérique assez cher
mais très efficace et attend une réponse
de la FUAJ pour une participation éventuelle. Trois enregistrements ont été effectués lors d'une rencontre des anciens
PA à Lanslebourg. Ça semble très positif. Mais la FUAJ sera-t-elle intéressée ?
L'enveloppe de 8 000 F votée n'a
guère été utilisée.
De nouveaux enregistrements seront
effectués d'ici l'AG et nous permettront
de mieux juger de l'utilité du procédé.
Edition d’un annuaire :
une centaine de personnes sont inscrites. La phase de réalisation devrait se
faire avant la fin de l'année.
contacts intéressants avec les anciens de
Savoie. Le travail de Charles Jourdanet
avec "L'embellie de Marseille" pourrait
nous servir d'exemple.
Situation comptable au 28 Sept. 99
Abonnements
recettes................................3 825,00
dépenses.............................-3 395,10
résultats................................+429,90
Adhésions
recettes cot.......................... 2 060,00
soutien.................................7 631,00
dépenses................................-628,30
résultats.............................+9 062,70
Autocollants
recettes...................................177,00
dépenses....................................-2,70
résultats................................+174,30
Carnets de chants
recettes................................8 280,00
dépenses...........................-15 802,63
résultats..............................-7 522,63
Cassettes audio reportages
recettes...................................350,00
dépenses..................................-56,50
résultats................................+293,50
Cassettes chants
recettes................................3 605,00
dépenses.............................-2 384,65
résultats.............................+1 220,35
Divers (à imputer adhésions)
recettes.......................................0,00
dépenses................................-193,00
résultats.................................-193,00
Mémoire ajiste
recettes.......................................0,00
dépenses................................-133,70
résultats.................................-173,70
Rassemblements
recettes.......................................0,00
dépenses................................-462,50
résultats.................................-462,50
Répertoire national
recettes.......................................0,00
dépenses................................-343,92
résultats.................................-343,92
Reportages vidéo
recettes.......................................0,00
dépenses.............................-1 482,90
résultats..............................-1 482,90
Vie statutaires
recettes.......................................0,00
dépenses................................-169,20
résultats.................................-169,20
Solde général de............... +837,90
Ces chiffres sont à modérer avec les précisions suivantes :
1- nous avons un stock de carnets estimés à 14 000 F.
2- les frais de secrétariat ne sont pas tous
inclus, ni le coût de ce bulletin (3000 F)
Ski pour les plus de 70 ans
Olivier Barillier et Béton nous signalent les stations de ski offrant des
forfaits gratuits au plus de 70 ans :
descente (D) ou fond (F). Vérifier
quand même.
Chamrousse (DF), Alpe d'Huez
(DF), Bois Barbu (Villard de Lans)
(F), Côte 2000 (D), Les Sept Laux
(D), Corrençon (D). Aux Deux Alpes
(D) pour les plus de 75 ans.
DESSERTS
A la fin du repas se trouvent les délices.
J'ai dégusté, bien sûr, des mets de cuisinier,
Les partageant souvent avec d'autres complices.
Les plaisirs épicés, mélis-mélos-malices
Font surtout le bonheur des malins taverniers;
On y trouve la lie au final des calices,
Ils nous laissent amers, déçus et rancuniers.
A la fin du repas se trouvent les délices.
Ici, comme en amour, les bonheurs sont princiers:
Champagnes et douceurs, mokas, alcools, mélisses.
Ils effacent les jours, les heures de supplices.
Les désirs, au début hâtifs, distraits, grossiers,
S'affinent, car on sait que se cache en coulisses
La pendule du temps aux mille balanciers
Qui nous fait, de la vie, un moment créanciers,
Jusqu'au demier dessert, quand la mort rentre en lice...
Archives mémoire ajiste
pas beaucoup de documents mais des
Jean-Jacques BLOCH
3
Vie de l'Anaaj Rhône Alpes
Carnets de Chants (suite et presque fin)
Quand chaque année vous avez régulièrement demandé le nouveau carnet, la
nouvelle cassette; quand d'un coup certains nous commandent nos cinq carnets
et cassettes, ça nous fait chaud au coeur
Ça montre que ces chants qui ont si
bien embelli notre jeunesse, qu'avec joie
nous avons chanté toute notre vie ; ces
chants qui nous ont demandé beaucoup
de travail, correspondaient à un besoin et
qu'il fallait les transmettre. Nous ne regrettons donc pas le temps que nous y
avons consacré..
Voici d'ailleurs, dans votre courrier de ces derniers mois, quelques-unes
de vos appréciations :
BARBARA de ST-ALEXANDRE
(30) : Je me suis régalée avec les carnets
de chants et cassettes ; certaines chansons remontent à la surface, avec le plaisir de redécouvrir ce que l'on croyait perdu.
BRIGITTE D'UNIEUX (42) : merci
pour votre excellent travail ; je retrouve
avec plaisir les chants qui ont bercé ma
jeunesse.
GILBERT de BILLANCOURT (92) :
formidable votre travail de mémoire sur
notre jeunesse ajiste. Ca me rappelle que
je dois écrire aussi.
GERARD de VILLENEUVE LES
MAGUELONE (34) : chapeau et remerciements à tous ceux et celles qui s'occupent si bien de tout ça !
JEAN d'ALENCON (61) bravo pour
votre magnifique travail ; tenez-moi au
courant pour la suite.
GEORGES (BIBI) de FLOGNY LA
CHAPELLE (89) : merci encore pour les
chansons ; c'est un vrai régal.
GERARD de MARLY (78) : vous
avez tous fait un travail formidable qui
servira à transmettre la mémoire de nos
soirées de camps chantant devant le traditionnel feu de bois et de joie. La qualité de l'enregistrement est très bonne ainsi
que celle des textes chantés. Toute
l'équipe qui a oeuvré pour ces éditions
avec tant de soins, mérite un grand bravo
et beaucoup de remerciements
semble".
MICHELE DAVIEAU : notre camarade, Présidente nationale de l'association-soeur des AMIS DE LA NATURE
(où se retrouvent beaucoup d'ajistes)
écrit dans un éditorial "Chantons ensemble" de la dernière revue des A.N. :
"même si chaque région a son répertoire,
il existe malgré tour un "pot commun" de
chansons traditionnelles que tous les
Amis de la Nature connaissent. Et si par
chance, nous avons parmi nous un
"DOUDOU " ou un "FIFI", alors c'est
parti pour une chorale d'occasion qui,
d'une certaine façon, cimente encore un
peu plus les liens qui nous unissent dans
la poursuite d'une aventure commune...
Mais cette œuvre collective de longue
haleine, échelonnée de 1993 à 1999 n'est
pas terminée. Nous projetons de publier
un récapitulatif de nos 500 chants reclassés par ordre alphabétique, par thèmes, et
par la première ligne du premier couplet.
Puis éventuellement les corrections diverses apportées aux carnets depuis leur
sortie.
... Ils ont bien raison ceux qui se sont
attelés à la tâche de reconstituer tout le
patrimoine de chants traditionnels, appris
souvent d'abord avec les ajistes, puis
chez les A.N. Grâce à eux, pourra ainsi
se perpétuer notre répertoire et nous
pourrons encore longtemps "chanter enDÉPARTEMENTS
ISÈRE
LOIRE-ATLANTIQUE
PARIS
HAUTE-SAVOIE
RHÔNE
SAVOIE
VAR
BOUCHES DU RHÔNE
HAUTS DE SEINE
VAUCLUSE
A notre tour, remercions la
FRANCE-AJISTE de s'être procuré nos
carnets et cassette, puisque nous les
avons diffusé dans 82 départements, en
SUISSE, en ALLEMAGNE et même
aux USA. Voici d'ailleurs dans l'encadré
ci-contre les chiffres concernant les 10
premiers départements acheteurs.
Ensuite, il reste à travailler sur l'origine des chants, globale et individuelle
avec leurs auteurs, parcours etc...
D'autres projets existent dont nous vous
parlerons s'ils se concrétisent.
Enfin, DANIEL puis RENÉ ne seront
bientôt plus libres ; ils risquent de s'absenter. Profitez que nous sommes tous
là pour vous fabriquer et expédier joyeusement les carnets et cassettes qui manquent encore à votre collection.
DOUDOU Ajiste et Ami de la Nature
CARNETS
VENDUS
CASSETTES
VENDUES
TOTAL
119
78
57
53
42
39
38
37
32
37
82
33
37
20
23
22
20
18
22
12
201
111
94
73
65
61
58
55
54
49
illustration de Marcel Andujar pour
"Cloches du Soir"
4
Vie de l'Anaaj Rhône Alpes
Voyage en péniche sur le Canal de Bourgogne
Ambiance Ajiste
à bord de la Matisse
De bâbord
à tribord…
Par un beau samedi 1er mai, quatorze
ajistes (6 garçons et 8 filles) embarquaient à St Florentin.
Répartis sur deux péniches bien aménagées, avec l’équipement, le matériel
nécessaire pour affronter cette croisière,
nous avions les hommes capables de
nous conduire sans danger. Nous, les
femmes, assurions sur notre bateau, les
repas et la participation à l’éclusage (responsabilité importante !)
Quatorze intrépides
rhônalpins
n’ont pas hésité, la
première semaine de
mai à jouer les corsaires sur le Canal de
Bourgogne, avec une
témérité bien ajiste,
ils ont dompté ces
modernes drakkars
que l’on appelle trop
modestement “pénichettes”.
Nous naviguions aux abords des
champs de colza, près des forêts denses,
accompagnés par les chants d’oiseaux ,
un décor de carte postale, enfin le grand
calme !
Au passage, nous avons visité le château d’Ancy le Franc, la ville de Tonnerre avec sa fosse Dionne, l’Hospice,
etc… A Ancy le Libre, visite du pigeonnier de 1673 ; le propriétaire, très aimable, est même venu prendre l’apéritif
sur notre péniche. Puis ce fut le beau
château de Tanlay (XVème siècle) et
quelques abbayes, tout ceci à vélo ou à
pied, selon la distance.
Pour les écluses, à peu près trente et
autant au retour, nous avions acquis un
certain savoir ; quelques audacieux n’hésitaient pas à prendre leur vélo pour aider
à la prochaine station, afin de gagner du
temps.
Jacques, notre animateur musical,
jouait du saxo : “La Bourgogne” pour
charmer les éclusières. Cela nous donnait
l’occasion de chanter et danser ; quelques uns en profitaient pour s’approvisionner en Chably, cidre, miel.
Le soir, sortie en vélo ou à pied, le
long du chemin de halage ou quelques
essais de danses folkloriques.
Il y eu aussi la soirée crêpes, la soirée
punch, la soirée Brassens. Enfin, nous
avons beaucoup chanté dans une ambiance très ajiste. Et contrairement à
quelques légendes ou chansons, nous
n’avons pas manqué de vivres.
De retour à Saint Florentin, le samedi
8 mai, nous étions à l’heure convenue, et
tous en forme. Malgré quelques enlisements, nous nous sommes bien
conduits. Nous avons eu peut-être aussi
la chance d’être peu nombreux à cette
époque sur le canal.
Sur deux bateaux,
partant de Saint Florentin, après une installation dans les cabines et un inventaire
Chateau d'Ancy-le-franc : cour intérieure
détaillé de ce qui allait être notre lieu de
vie durant huit jours,
un employé de la base nous fit une démonstration du maniement de la pénichette, et vogue la galère… ! Après
Pour tout l’équipage Rhône-alpin
quelques tâtonnements et la marche en
venu de Lyon, Grenoble, Aix, Annecy,
crabe du début, nos flibustiers d’eau
Roanne, la croisière en péniche sur le cadouce trouvèrent le bon cap nécessaire
nal de Bourgogne fut très gaie et très dépour entrer correctement dans les… cintendue.
quante deux écluses du parcours St Florentin - Ravières aller-retour, car il fallait
Sur le “Griffon”, les dames ont tenu
revenir à St Florentin.
la barre, certaines sont même entrées
dans les écluses ! Les bons repas qu’elles
Les nombreuses écluses procurent
nous ont préparés ont bien soutenu le
l’opportunité de contacts, d’informations
moral des marins. Dans le carré, l’amsur la région, nous avons visité Tonnerre
biance à table était très conviviale.
et deux châteaux à Ancy le Franc et Tanlay, à l’occasion on donne un coup de
Et nous étions très occupés : entre la
main à l’éclusière, on prend des photos,
navigation, le passage des écluses, les
on chante et on danse aussi.
courses, le paysage qui défile à contempler, photographier : les grands champs
Le bateau est bien équipé : cuisine,
jaunes des colzas, les blés verts, les fofour, frigo, salle d’eau, douche et même
rêts, les villages bourguignons ; puis les
eau chaude. Les vélos sur le toit étaient
visites aux lavoirs, chapelles, vieilles
bien utiles pour se dégourdir les jambes à
maisons, les bavardages avec le barreur,
l’étape en pleine nature. La navigation
les concerts de Jacques au saxo, etc…
fluviale calme et sereine en cette période
est recommandée aux personnes stresDès la fermeture des écluses, les pésées et que la Bourgogne est belle par cet
niches amarrées dans un coin tranquille,
autre chemin qu’est le canal !
les cyclistes s’élancent sur le chemin de
halage et les petites routes environDéplorons que la disparition de la nanantes.
vigation commerciale marque un certain
abandon de l’entretien du Canal, c’est
Presque tous les soirs, les deux équibien dommage car c’est une richesse napages se regroupent pour la veillée :
turelle à sauvegarder.
chants avec ou sans carnet. Une longue
soirée, nous avons même chanté tard,
De l’avis de tous ce fut une joyeuse
dans le noir, tout de mémoire !
et enrichissante semaine.
Ohé du bateau
Miette et Jacques Cogez
de la péniche “Griffon”
Raymonde Faurite de la “Matisse”.
5
Georges Douart dit Doudou
Matelot sur “Le Griffon”.
Vie des Anaaj des différentes régions
Prochain rassemblement de 2001
Notre amie Jeannette Skapovski, présidente de l'Anaaj de Paris nous écrit :
A la fin du rassemblement des anciens ajistes du Sud-Ouest à Aspet, s'est
tenue, le lundi 6 septembre 1999, une réunion "informelle" dans le but de discuter du prochain rassemblement de 2001.
Etaient présents les responsables des
groupes suivants : Sud-Ouest, Marseille,
la Borie, Nord, Paris. Les Picards (LoireAtlantique) avaient dû partir vu l'horaire,
et ceux de Rhône-Alpes n'avaient pas
participé au rassemblement, retenus par
d'autres activités. Etaient présents également une bonne vingtaine de camarades.
Au préalable, tout le monde a été
d'accord pour s'aligner sur la position de
Marseille à propos de la "Méridienne
2000", à savoir que rien ne serait fait au
plan national.
Pour ce qui est du rassemblement
2000, trois décisions essentielles sont à
prendre : le lieu, la date, l'équipe d'organisation.
Bien évidemment, il n'était pas question de prendre des décisions ce jour là.
De la discussion à bâtons rompus qui
s'est instaurée, on peut retenir les conclusions suivantes :
- seules les AJ de Strasbourg, la Rochelle et Paris-Clichy peuvent convenir à
cette rencontre. Pas d'opposition à rechercher ailleurs une structure d'accueil
favorable,
- le rassemblement 2001 sera qualifié
d'Interrégional (et non "national" qui
peut choquer certains),
- chaque groupe fera une proposition
pour un lieu et une date, ceci avant minovembre. Faute d'autre volontaire, c'est
Paris qui centralisera les propositions
(Jeannette Skapovski 3 Rue Friant 75014
Paris) et en fera la synthèse avec les copains du Nord (Odette Schietecatte). Ce
travail pourra être discuté par chaque
groupe avant une autre réunion. Il n'est
pas inutile non plus de donner un avis
sur l'équipe d'organisation.
- les inscriptions se ferons au sein de
chaque groupe puis centralisées,
- la gestion financière se fera par le
compte "mémoire ajiste" ouvert pour
Strasbourg (1997) et non clos à ce jour.
Pour vos recherches, voici une liste
(non exhaustive) des critères aux quels
devrait répondre la structure d'accueil :
1- capacité d'hébergement en lits non
superposés minimum 220/230.
2- capacité de la (ou des) salle de repas ?
3- capacité d'une salle polyvalente
(ou amphi) ?
4- possibilité de parking.
5- possibilité d'accueil pour quelques
camping-cars et tentes.
6- Accès par le train et car. Arrêt du
car ou de la gare SNCF à quelle distance ?
7- Prix consenti par personne pour
200 minimum (250 FF par jour maxi).
8- Nombre de gratuités consenties ?
9- Date conseillée selon la région
(juin ? mai ? septembre ?)
10- Eventuellement, ressources touristiques de la région.
Exit la Méridienne verte de l'an 2000 !
Exit le projet d'un an 2000 ajiste et
vert…! La rencontre d'Aspet dont nous
publions les conclusions ci-dessus a tiré
un trait sur toute célébration de l'An
2000. Moi qui aime bien les chiffres particuliers genre 7 et 13 et quelques autres
dont ce chiffre 2000, je suis un peu déçu.
C'est vrai que cette célébration d'une ère
chrétienne s'oppose à une certaine orthodoxie "ajiste" et a pu en déranger quelques uns… L'idée aussi de cette méridienne verte, pour moi qui suit un peu
écolo et qui aime l'idée de cette ligne
imaginaire recoupant par hasard des
lieux remarquables me plaisait aussi…
Seul monument
d'ampleur
nationale de l'an
2000,
il oublie la pierre,
le métal ou le
béton !
il se traduira par
une libre
participation de
tous à l'édification
d'un vaste ruban
de verdure, de
fleurs, de
pique-niques…
Mais la vie n'est-elle pas faite aussi
de choses que l'on ne fera pas et que l'on
garde en rêve… bref l'an 2001 sera lui un
événement anaajiste…!
L'an 2000 sera
vert et mais pas
anaajiste !
db
Des quatre coins de l'Hexagone
Amicale Poitevine des Anciens
des Auberges de Jeunesse
Organise les 2/3 Octobre 1999 un séjour en Pays de Brande. Maison familiale. Visites et petites randos : Lussacles-Chateauxx, Civaux, Chauvigny, etc
Inscription avant le 30 Août mais
peut être restent-ils des places… Jean
Ringenbach (Paname) (02 51 00 88 81)
Petits Echos de notre…AJ
midi-pyrénées n°16
Après un édito de Jean Chanabé qui
évoque l'an 2000, Marcel nous parle de
leur balade dans le Lauragais : visite d'un
moulin pour la production à l'ancienne
d'huiles et de farines. Après St Julia c'est
la découverte d'un élevage de pigeons.
Denise raconte la visite du Parc Pyrénéen de l'Art Préhistorique à Tarascon
sur Ariège et ses découvertes. Jacques
Bénichou, propose une tribune libre à
propos des écolos et des anciens ajistes :
c'est une réflexion sur la place des ajistes
en tant qu'écolos et des écolos dans la
politique. Georges Dupuy rappelle ce
qu'était l'AJ de Toulouse, agréable, et les
tractations en cours pour une nouvelle
AJ sont bien longues… Enfin Roger
6
nous parle en poésie des vieux à l'ombre
du grand chêne. Le rassemblement d'Aspet les 4/5/6 Septembre est annoncé…
Les 16/17 Octobre ce sera à Fontbonne.
Notre Amitié n°80
Région Parisienne
Toujours copieux, mais les ressources
humaines sont bien supérieures à celles
de notre région… ou est-ce la motivation ?
Voici un peu vite ce que j'ai rencontré : l'Adieu à Petit Jean, et à Rolande
Darcque. Jeannette raconte les retrouvailles avec la Chapelle des bois, ainsi
Vie des Anaaj des différentes régions
L'Embellie de Marseille
L'ami Charles Jourdanet de Marseille réédite son très important livre
"L'Embellie de Marseille". Pour nous
il a accepté de reculer au 15 Octobre la
date limite de souscription des copains à
cette nouvelle et dernière édition. Si tu
es intéressé ne laisse pas passer une minute pour envoyer ta commande à
Charlot. Voir la présentation cidessous.
Cet "Album-Souvenir" est l'oeuvre
collective d'Anciens des Auberges de
Jeunesse durant les années 1934-42 à
Marseille, en Provence et plusieurs régions de France.
Très documenté et rempli d'anecdotes, cet ouvrage vient à point nommé
pour participer à toutes les initiatives
déjà effectuées en vue de perpétuer la
Mémoire Ajiste.
Un ouvrage (hors-commerce) de 242
pages, (format A4) avec 100 photos +
dessins, cédé au prix de : 185 Fr. (+
Port : 30 Fr.)
S'adresser à :
Ch. Jourdanet, 50, rue de France,
06000 NICE
Date limite :
le 15 Octobre1999
Sommaire de L'Embellie de Marseille
` L'Embellie de Marseille
En guise de Préface
Chronique rapide des Auberges
Historique de la 1ère A.J de Marseille
Inauguration Ajiste de "La Corniche"
D'autres Auberges en Provence
Clubs CLAJ (Provence-Côte d'Azur)
Stand A.J marseillais à la Foire
La "Nuit des Auberges " (Marseille)
Bulletin "Vive la Vie" (Marseille
1937-38)
Le Congrès CLAJ (Toulouse 1938)
Vie culturelle à Marseille (34-39)
Muse DALBRAY à Marseille (spectacle)
Musiques et Chants Ajistes
Humour et dérision
GIONO et les Auberges
Le martyre de l'Espagne républicaine
` Les Années sombres
La seconde guerre mondiale
L'Occupation et l'Etat français
La lente agonie du CLAJ
L'école des Cadres d'Uriage
Les Stages de Mollans
Les Camarades de la Route
Théâtre du "Chariot" et "Fariboles"
Les Jeunes Laïcs Combattants
Le "Croquefruit" et les Ajistes
Varian FRY à Marseille
` Le Temps des Souvenirs
La "galaxie "Ajiste
Nos Peines (incendie / bombardements)
Des Anciens des Auberges racontent
Les Films Ajistes
` Documents annexes
INFOS / Dernière minute
Célestin FREINET et les A.J.
La Presse Ajiste
Le Cinéma et les Auberges
Ils sont sortis de l'Auberge :
(quelques "célébrités"Ajistes)
Jeux de Pistes dans le Passé
Dans le Rétroviseur des Années
Amicales et Groupes d'Anciens A.J.
Lettre à nos descendants
Témoignages de gratitude
Annonces (gracieuses)
Les derniers Romantiques
Petits secrets d'une gestation
Bibliographie
Pour vous y retrouver (T. Matières)
Des quatre coins de l'Hexagone (suite)
que Gigi et Paulette : ski de fond, raquettes, musée, piscine, sauna, cinéma,
bal. La fête de l'Anaaj 99 s'est faite à
Bierville, un retour aux sources. Très
belle ambiance. Un texte d'Henri Mercier
dit en cette occasion : la Mare aux Fées.
Sudel 99 : au parc Montreau à Montreuil.
Un bon repas, des conversations nombreuses par groupes. Janguy et Minnie
évoquent, chacun à sa manière la croisière sur le Canal de l'Ourcq. Erminio
Buratto choisit ce moment pour aborder
l'idée de "vouloir mourir dignement".
Réflexion de plus en plus d'actualité…
malheureusement ou heureusement… car
des progrès sur cette douloureuse question sont bien nécessaires. Enfin, sur un
mode plus gai, Gigi nous parle des chevreuils, Jean Bernard de l'église de son
quartier avec le pope Hulot, le boudhiste
Eric et le mormon Tagnard… etc… La
bande des quatre réplique au billet du
Bourbonnais (élections : piège à cons) et
remet les choses au point. Merci.
Quant au Remue Anaaj, les rendezvous sont nombreux : Morvan le 24 Septembre, Cergy, le 26. Puis déjà une idée
de la programmation pour 2000 : Janvier,
Center-Parc de Sologne, mars, skiraquettes à la Chapelle des Bois, Fête de
l'Anaaj, Avril : Sudel, journée sur l'eau,
pénichettes, Mai : à vélo, séjour Avey-
ron, Juin : rassemblement de printemps,
Vercors, Septembre : le Pérou, Val d'Allier… tout cela sera discuté à l'AG du
mois de Novembre.
Les anciens des Auberges
Groupe de la Borie Août 99
Pierre Pellegrin parle de Cadouin et
de ses environs où un groupe de copains
sont allés. La prochaine rencontre était
le 12 Septembre à l'AJ de Fontaine de
Vaucluse. Puis on nous explique ce que
sont les gabares, ces bateaux qui remontaient la Dordogne chargés de sel et de
poisson sèché.
Les anciens des auberges
Groupe de Marseille 4ème tri.
Ils commencent par les activités : 16
Oct. Bec de Sormiou, 13 Nov. La Glacière Bertagne, 4/5 Déc. Rastau et les
Dentelles de Montmirail. Les réunions
mensuelles à l'AJ de la Fontasse les 15/
10, 5/11 et 3/12. AG à Arles le 18 Décembre 99. Roger se lance ensuite dans
une évocation poétique de 2600 ans, le
passé de Massilia. Laurent R. adopte
pour les vestiges de Mastrabala, un style
typiquement marseillais : il faut lire son
texte avec l'accent… Marcel surenchérit
à la manière de Raimu sur les marins
7
grecs. Max a fait une étrange randonnée
dans les Cévennes, quelle déveine ! Marcel, et avec ses dessins, nous emmène à
la presqu'île du "Moulon" puis dans la
fête du 19 juin de Massalia : 400 000
personnes pour la grande parade de Marseille ! Enfin, toujours grâce à lui, vous
pourrez savoir d'où vient le mot canebière. En cherchant bien vous pouvez
peut être deviner, ça commence comme
un produit plutôt illégal…
L'Ancien Ajiste Loire
Atlantique Sept. 99
L'édito de Roger Tudal fait le point
sur les activités, sortie en pénichettes,
rassemblement de Pentecôte, séjour à
Peysey-Nancroix en juin. Au calendrier :
18 sept. Spectacle à Nantes, 25/26/27
Sept. Sortie "Moules", 16/17 Oct. sortie
à Vioreau, 21 Nov. AG à Savenay, 18/19
Déc. Réveillon à Piriac. Tout cela parait
donc très dynamique… Plus triste la disparition de trois copains.
Madeleine raconte ensuite la sortie du
9 juin à Grasla : balade, repas, jeux, une
belle journée. Jean Macquart de Niort, en
mode musical évoque, sur l'air du "marché de Brive la Gaillarde" de Brassens,
le séjour à Peysey. "
db
Les Auberges aujourd'hui
Inauguration de l'AJ de Lille le 30 Avril 1999
Inauguration en
grandes
pompes !
Ainsi en juillet
1997, la nouvelle auberge de Lille “naissait” dans une ancienne maternité en
plein centre ville,
tout près des places
typiques et rues piétonnes (3 Rue Malpart 59000 Lille, téléphone : 03 20 57
08 94, fax : 03 20 63
98 93). Et le 30 Avril
dernier, veille de
l’Assemblée Générale de la FUAJ au
Grand Palais de
Lille, Pierre Mauroy,
Sénateur-Maire de
Lille (ancien premier
ministre et président
actuel de l’Internationale Socialiste) inaugurait cette nouvelle auberge de 168
lits dans des locaux
Photo et légende dans un journal de Lille en 1993 :
rénovés offrant un
Enfant du Front Populaire, l’Auberge de Jeunesse de Lille, très bon confort.
rasée, a disparu dans les poubelles de l’Histoire.
Lille et son agglomération retrouvaient
une installation de ce qui fut avantDisparition en 1993…
guerre un symbole du Front Populaire et
En 1993, l’une des plus anciennes audu Centre Laïque des Auberges de Jeuberges de jeunesse de France (avec Biernesse. C’est pour cela que cette AJ est
ville, les Rousses, Nîmes, etc…), celle
appelée “Madeleine et Léo Lagrange”.
de Lille que Léo Lagrange avait inauguré
en 1939, avait été démolie pour perPierre Mauroy et Léo Lagrange
mettre la construction de centres comDans son allocution, Pierre Mauroy
merciaux et palais des congrès.
rappela le rôle éminent de celui qui fut le
premier “Sous-Secrétaire d’Etat à la JeuDepuis l’Association des AJ du Nord
nesse et aux Sports”, qui alla plusieurs
et les anciens ajistes locaux avaient mulfois à la rencontre des jeunes, notamment
tiplié les initiatives pour obtenir la consen auberges de jeunesse (Léo Lagrange
truction d’une nouvelle auberge. Notamétait Président du CLAJ), qui créa les
ment en mai 1993, ils avaient fait signer
billets de congés payés et bien d’autres
une pétition aux deux cents quarante anavancées (dont nous profitons toujours
ciens présents au Rassemblement natioactuellement).
nal d’Arles.
De Cap Monde à FUAJ'mag
Pour des raisons de copyright la revue de la FUAJ change de nom, mais
elle reste toujours aussi pertinente. On
trouve dans le n° 14 de Juin-Août 99 les
articles suivants : un dossier sur les emplois jeunes à la FUAJ, assez nombreux ;
une présentation de quelques possibilités
de stages en AJ ; l'annonce d'un remarquable tour du monde à vélo avec Béatrice et Emmanuel. Ils devaient partir cet
été d'Anchorage en Alaska pour descendre jusqu'à Ushaïa, en utilisant les
AJ ; les rois de la Jongle à Grenoble ; en
VTT d'Autrans à la Corse pour trois Québecois qui ont participé à l'ouverture de
cette AJ ; les Auberges accueillent le
Maroc ; le livre de Jamel Bahli, "Les
Routes de la Foi" : 18 000 kilomètres en
courant ; les AJ en Afrique de l'Ouest ; le
Service Volontaire Européen (pas de rapport avec le SCI) ; des adresses pratiques, les nouvelles AJ dans le monde et
enfin une invitations sur le Net à
www.fuaj.org.
8
Ensuite Pierre Mauroy dédicaça son
livre sur la vie et l’œuvre de Léo Lagrange et la période historique concernée. (Vous pouvez commander ce livre
“Léo Lagrange” à la FUAJ 27 Rue Pajol
75018 Paris tél: 01 44 89 87 57, contre
98 francs + les frais de port, et aussi un
autre livre dont nous avions déjà parlé
dans ces colonnes : “Le présent indéfini,
mémoires d’une vie” de Robert Bernard
et Albert Ronsin, contre 95 francs + frais
de port, ou l’ensemble des deux livres
pour 200 francs port compris).
Les anciens étaient présent
Assistaient à cette inauguration une
bonne vingtaine d’anciens ajistes, notamment les nordiques : Raymonde et Victor
Vankeilsbeck, Jeanne et Jean Detré, Mireille, Odette, Paul, Yvonne, Baleps,
etc… et aussi beaucoup de délégués à
l’Assemblée Générale de la FUAJ des 1
et 2 Mai 1999 : Serge Goupil, Edith Arnoult, Patrick Bernard et le Comité Directeur, les Rhône-Alpins Georges Couget, Maurice Preioni, Suzanne Cagnon,
Jo Radic, Galinette et moi ainsi qu’un
bon nombre de militants directeurs et
employés d’auberges de jeunesse.
Lors de notre séjour nous avons beaucoup apprécié l’accueil et la convivialité
des gens du Nord, l’animation des rues et
places bordées de beaucoup de maisons
anciennes. Lille et les environs sont très
intéressants et valent le voyage au “plat
pays”.
Béton avec l’aide de Victor.
PS : après l’AG, Galinette et moi
nous nous sommes rendus à Boulogne
sur Mer. AJ très confortable, tenue par
Annette, bien placée près de la gare et du
centre ville. Visite: vieille ville fortifiée,
port de pêche le plus important de France
et surtout grand aquarium Nausicaa
(quatre heures). Auparavant nous étions
allés à Londres où la vie est chère, y
compris en AJ.
Congrès IYHF
La FUAJ organisera au cours de
l'An 2000 conjointement avec la Fédération allemande le congrès international
des AJ. Les anciens y seront sans doute
associés… reste à voir comment. En effet, on peut imaginer ce qu'implique
comme préparation une telle organisation. On ne peut que souhaiter bon courage aux copains qui se sont mis ça sur le
dos… et éventuellement apporter un
concours témoignage si ça peut servir à
quelque chose.
Mémoire ajiste : témoignages
Ce que les auberges de jeunesse m'ont apporté…
Individualistes et
non-conformistes
Les Auberges n’ont-elles pas, en partie, façonné nos personnalités actuelles ?
Nous tenions à la simplicité du vêtement,
pantalons de velours, chemises de couleur à carreaux, chaussures-sport. Surtout
pas de costumes trois pièces, de cravates,
de souliers vernis. Nous aimions l’originalité, le non-conformisme, les barbes,
les moustaches et pas les cheveux gominés ! Qu’en est-il aujourd’hui ?
Très individualistes, les ajistes n’apprécient pas l’Autorité, les Chefs, les Patrons, les Ordres, les Directeurs, l’Armée, les Officiers, les Gendarmes, le
Clergé ! Ils supportent tout juste les Responsables. On sent poindre le caractère
anarcho-syndicaliste très présent dans la
région nantaise : ni Dieu, ni Maître !
Groupes de jeunes, menés par des
jeunes, donc un peu excessifs, on chante
et récite des poètes contestataires : Brassens, Gaston Couté, Léo Ferré, Aristide
Bruant, Prévert et Kosma. On est solidaires des travailleurs, des exploités. Pacifistes, Internationalistes, on est
de gauche et d’extrême gauche, mais tiraillés entre ses différentes composantes
qui s’affrontent lors des congrès.
Une pépinière de militants
Les AJ qui n’étaient pas suivies d’un
mouvement d’adultes ont été une pépinière de militants. Vaccinés par leurs
quelques années d’ajisme, beaucoup sont
passés… aux Amis de la Nature où ils
ont retrouvé les mêmes copains, dans les
syndicats (FO), les partis politiques de
gauche, les amicales laïques, aux parents
d’élèves (FCPE), à l’espéranto, l’écologie, le pacifisme, le S.C.I., les activités
culturelles (MJC), pères Aubs aussi. Comme dit Jean-Jacques Brest : “mes
meilleurs copains sont des “4A” : ajistes,
anars, anti-nucléaires, AN. Mes “3A” à
moi furent les AJ, l’Association du Service Civil International, enfin les AN.
Authentiques jeunes prolos, fils d’ouvriers, élevés dans les quartiers populaires des villes industrielles, que serions-nous devenus sans les AJ ?
Militants ouvriers, politiques ou syndicalistes, mais plus limités dans notre vision
des choses et nos objectifs.
De nombreux
meneurs de chants
Aux veillées ajistes, nous avons aussi
appris à lancer les chants sur un ton correct, à bien chanter en groupe. Sans
connaître la musique, mais chantant
juste, des copains ont, toute leur vie,
mené des chorales à deux voix. Certains
se sont lancés dans les chorales à quatre
voix, les danses folkloriques et même la
musique classique.
Ainsi, sortis des AJ meneurs de
chants, nous le sommes restés toute notre
existence, à vie. Partout où nous sommes
passés, nous n’avons jamais cessé de lancer ces chants que nous aimons
tant. Dans les chantiers S.C.I., dans les
séjours U.C.P.A., dans les chalets et
campings A.N., dans les AJ RhôneAlpines avec l’Anaaj lors des rassemblements, rencontres, veillées, dans les
voyages, les cars, les randonnées, et bien
sûr, les repas. Rappelez-vous l’ambiance
chantée si dynamique, vécue et créée lors
de nos rassemblements de Bourges,
Arles et Strasbourg.
Ces chants qui expriment tous les
sentiments : les filles et l’amour, la route
Le groupe des chambériens
au sommet du Mont-Blanc.
(Voir pages suivantes)
9
et l’amitié, les rencontres et les séparations, le soleil et la pluie, le travail et la
fatigue, la joie et la tristesse, la mer et les
bateaux, la montagne et les bergers, les
voyages et les retours : n’aident-ils pas à
créer une ambiance, à souder les participants d’un groupe dont toutes les voix se
fondent en une seule.
Vivre la mixité
Grâce à la mixité pratiquée aux Auberges, nous avons eu, nous garçons et
filles, la grande chance et le grand plaisir
de passer ensemble nos loisirs. Ainsi
nous avons appris à vivre, jouer, discuter
en copains, à surmonter côte à côte fatigues, épreuves, difficultés, à nous soucier des idées et des préférences de
l’autre !
En général, les copains ont épousé
des copines ajistes, ayant le même mode
de vie et des distractions communes où
ils ont ensemble passé leurs loisirs : vie
dans la nature, randonnées, campingcaravaning, montagne, ski, mer, natation,
cyclisme,
chorales,
conférences,
voyages, etc… Ce qui, dans un couple,
est un grand facteur de cohésion.
Nous avons même transmis ces loisirs à nos enfants, qui à leur tour, skient,
marchent, campent, voyagent sacs au
dos. Souvent, ils ne sont ni ajistes, ni
A.N., mais autre chose !
En conclusion, jeunes à la sortie de la
guerre, nous avons eu la chance d’être
happés dans le grand enthousiasme de la
Libération, puis d’être entraînés dans les
Mouvements de Jeunesse, qui nous ont
beaucoup marqués. Que serions-nous si
nous avions vingt ans aujourd’hui ?
Georges Douart dit Doudou.
Mémoire ajiste : témoignages
Onze ajistes chambériens
au sommet du Mont-Blanc en 1947 (1)
Micheline Dumaz-Lapeyere et Marius Dépouly nous ont fait parvenir deux récits "d'époque" qui
évoquent cette expédition pleine d'enthousiasme. Le premier compte-rendu est celui de Micheline qui fut
responsable du groupe ajiste de Chambéry, le second est celui d'un journaliste ami. Nous avons conservé
les deux textes car ils sont plutôt complémentaires.
“Dites, les copains, on fait le
Mont-Blanc le 14 juillet ?”
lance Jo de sa voix tonitruante un
certain mercredi. “Pourquoi pas ?” répondirent les durs.
“Et nous, vous nous emmènerez, demandèrent anxieusement Lila, Miche et
Germaine ?”
“Bien sûr…”
Et ce ne sont pas les moins emballées. “Crampons, piolet, lunettes de soleil, pantalon” a hurlé Jo, “c’est indispensable”. Pendant deux mois, on se
prépare, on fait des stocks de confiture,
de biscottes. “Beaucoup de sucre, a dit le
Baron, surtout pas de sardines !” On dirait que ça lui rappelle des heures
lourdes !
Montée jusqu'à Tête-Rousse
Le 12 juillet au soir, onze ajistes
chambériens, en short et grosses pompes,
hérissés de pointes de crampons et de
piolets convergent vers le sympathique
café des Houches en stop, à vélo, en
train. Nos côtes endolories nous réveillent à 5 heures. Le jour pointe dans
une brume légère et avec lui apparaissent
les montagnes, les glaciers sur un ciel
clair encore semé d’étoiles. Le torrent,
dans un vacarme assourdissant, se fracasse contre les roches. En route ! Le télé
des Houches nous hisse jusqu’à Bellevue. Jo ne perd pas de temps et forme
trois cordées. Roger, le Baron et luimême prendront la tête. Une fille dans
chaque. Dédaignant le tacot poussif,
toussotant et crachotant, la colonne gravit allégrement la pente de Plan-Lachat,
chemine entre les rails et débouche tout à
coup du tunnel au milieu des pierres et
glaciers. C’est le Nid d’Aigle. Premiers
cris émerveillés et premières gouttes de
sueur. Bionassey étale sa peau d’éléphant crevassée au dessus de nous. Un
soleil éblouissant dans un ciel bleu et
pur. La montée se poursuit parmi les névés et la rocaille et voici Tête-Rousse à
plus de 3 000 mètres.
Repas et monte-charge
Les estomacs se révèlent pantagruéliques. Repas important qu’il faut faire
aussi copieux que possible parce que demain fatigue et altitude nous ôteront
peut-être l’appétit. Le Baron mange,
mange… et nous montre malicieusement
l’Aiguille du Goûter à 3 800. Chic ! Le
câble fonctionne, on pourra faire monter
nos sacs. Mais Roger revient avec une
mimique désabusée, expressive : 15
francs le kilo. Un rapide calcul. On en a
bien pour 200 francs chacun. Mercanti
va ! La montagne retentit de jurons les
plus inattendus. Évidemment il n’est
plus question de faire monter les tyroliens. En avant donc ! Un passage difficile dans la coulée. On se hisse de roche
en roche, tâtant les prises sous l’œil anxieux de Jo qui de son pas montagnard,
élève lentement sa caravane. Attention
Germaine. Encore un passage délicat.
Oh ! mais les filles s’en tirent très bien,
et inondés de sueur, chauffés au rouge,
les onze s’affalent devant le refuge.
Beauté et foule au refuge
Louis, béat et satisfait, parle tout
seul : “Que c’est beau !” Miche pleure
presque de joie en apercevant TêteRousse là-dessous à pic. Roger lance une
tyrolienne qui s’étrangle. Les montagnes
se découpent nettes sur une nappe bleu
foncé. Pas un nuage. Un temps miraculeux.
Solitude des sommets ! …Ils sont
déjà au moins cinquante dans le refuge. Le gardien se démène, envoie coucher le trop plein. Nous pourrons enfin
entrer. Une impressionnante pile de sacs,
de cordes et de piolets. “Il faut manger,
dit Jo, tant que vous pouvez…” Un dernier coup d’œil à l’extérieur sur le coucher de soleil : un ciel flamboyant à l’horizon, quelque chose d’irréel, englobant
l’immensité des montagnes, d’un ocre
prononcé, pour se fondre en une tache
mauve, puis grise, quelque chose qui
nous laisse sans voix et en extase. Et serrons-nous sur les bât-flancs. Le gardien
promène une lampe soucieuse parmi les
têtes mêlées et les pieds enchevêtrés. Encore quatre en bas. Et tout à coup dans le
silence, une voix, celle de Jo naturellement “il reste encore un strapontin !” Incroyable ! Soixante jeunes, dans une
même pièce, essayent de dormir dans un
air doublement raréfié, alors que dehors
il gèle. Seul, Jo, la tête sur les crampons,
ronfle comme une locomotive.
Une cordée : quatre copains qui
n'en font qu'un
Quatre heures. Debout. Un temps
splendide. Quelques uns refusent déjà la
nourriture. Vite, les crampons, les cor-
10
dées. “Surtout ne laissez pas traîner les
cordes, faites des anneaux, répète Jo,
marchez lentement”. L’air est vif et commence à se raréfier. La colonne s’ébranle
lentement en cadence. Il n’y a pas onze
ajistes, mais trois cordées et dans chaque
cordée, quatre copains qui ne font qu’un,
qui se liguent contre l’obstacle. Tout à
coup, l’estomac de Lila a des soubresauts
inquiétants et la grande carcasse du Baron s’arcboute à chaque pas davantage
vers la neige. Un petit coup de rhum,
deux sucres et on redémarre. Oh, pas
pour longtemps. Cette fois, c’est Miche
qui s’affale au Col du Goûter, les pieds à
demi-gelés. Une bonne friction, des
chaussettes sèches, un tas de douceurs
qu’on lui fourre dans la bouche, la vue
du Mont-Blanc au loin et la voilà repartie. Encore un effort et voici Vallot, étincelant sur un bout de rocher. A l’intérieur, quelques malades n’ont même pas
eu le courage d’enlever leurs crampons. Jo mange… et il est le seul. Quel
type !
Des chenilles sur l'arête…
on domine l'Europe
Encore deux heures, mais sans
sac. La pente est très raide, les jambes
faiblissent, le souffle devient court. On
s’arrête souvent. Le Mont-Blanc ressemble ce jour à un boulevard. Des tas
de chenilles ondulent sur l’arête. Le sommet ! Ça y est. 9 heures trente. Les onze
sont au sommet. Jean s’abat derechef.
Une bise âpre cingle les visages. Les
yeux éblouis ne voient que montagnes :
la vallée du Pô, le Cervin, la Suisse, le
Massif
Central…
On
confond
tout. Qu’importe. On est arrivé. On domine l’Europe.
Et c’est la descente vers Vallot. Avec
un style qui laisse rêveurs les guides que
nous croisons. Ô sieste bienfaisante et
casse-croûte réconfortant !
Retour par le téléphérique
Le soleil envoie ses rayons cuisants.
Et c’est la descente dans la fournaise des
grands et petits plateaux parmi les séracs. Bientôt le refuge des Grands Mulets, juché sur un promontoire rocheux et
l’interminable traversée du Glacier des
Bossons dans la Jonction. Et je te saute
des crevasses, et je te hisse, et je te
prends mon élan. C’est une course éperdue, pendant trois heures, dans un décor
féerique pour arriver pile à l’Aiguille du
Mémoire ajiste : témoignages
Onze ajistes chambériens
au sommet du Mont-Blanc en 1947 (2)
Midi au départ du télé.
Nos faces de homards aux lèvres craquelées lancent un dernier regard satisfait au dôme ocré sous le couchant. Et
c’est un retour de durs, la joie dans les
yeux, en stop, à vélo, à moto, en train
aussi avec de multiples incidents.
Avec un débours de six cent francs au
minimum*, deux jours et demi de congé,
un temps et un enneigement exceptionnels, mais aussi dix-huit heures de
marche qui demandent du cran, de la résistance et beaucoup d’endurance.
Micheline Dumaz (Chambéry)
Les participants : Jo Dépouly, Louis
Veiry (frère de Jo), Roger Corréard, Roger Bontron, Le Baron Louis Peycru (décédé en 93), Jules X, Jean le copain
d’Oullins, Micheline Dumaz-Lapeyre,
"Lila" Julia
Guichon-Morel,
Germaine Biasetti, Pierre Garin (décédé)
* nous avons essayé de resituer le
coût de la vie à l'époque ce qui nous
amené à conclure que les 600 Francs représentaient la somme totale dépensée
par le groupe. En 1947, la location mensuel d'un appartement de 74 m2 était de
320F, la pension de reversion de la mère
de Micheline était de 900 F par mois. En
1942, le traitement d'une auxiliaire à la
Trésorerie était de 800 F par mois. Une
pension complète au restaurant était de
900 F par mois. En 1949, il faut un mois
de salaire pour payer un cyclo sur mesures de 2500 F.
Alpinisme
et bourses plates
extrait du journal communiste “Le
Travailleur Alpin” du 22 Juillet 1947.
Document ressorti par Marius Dépouly
que nous remercions.
ÉTANT, de ceux qui ont connu à
vingt ans les 20 francs par jour pour 9
heures de travail, mais aussi les cars à
cent sous pour la Féclaz, j'ai voulu savoir
comment les «vingt ans» d'aujourd’hui
résolvaient les problèmes financiers que
pose la passion de la montagne. J'avais
trouvé la solution, il y a bientôt quinze
ans, en limitant le menu de mon repas du
soir au potage et au fromage, ce qui
m’assurait les trente francs hebdomadaires qui m'étaient nécessaires pour le
ski et l'alpinisme.
Ce groupe composé de jeunes ouvriers
ou employés allait fournir la réponse à la
question que je me posais. Rencontrant
Jo, sa précoce calvitie naissante, et ses
lunettes, je lui posais la question :
- Que fais-tu pour le 14 juillet ?
- Le Mont-Blanc avec quelques copains.
- Vous m'acceptez parmi vous ?
- Bien sûr !
- Alors à dimanche.
- A dimanche au télé des Houches.
Une équipe sympathique .
Me voici donc, dimanche 13 juillet
descendant de ma moto devant le téléphérique des Houches. Au pied des
marches de l'escalier un groupe en short
et grosses “pompes” entoure un amoncellement de sacs hérissé de crampons et de
piolets.
Jo en émerge et vient au-devant de
moi. Les présentations sont vite faites :
- Roger I, Roger II, Jules, Lila, Miche
et Germaine, un copain de Lyon.
Traditionnelle poignée de mains. En
route.
Jo Dépouly au pied du Mt Blanc
Deux jours chez les “4.000”
Bellevue, tout le monde descend.
Sac au dos, Lila, Miche et Germaine
disparaissent sous les gros tyroliens qui
les font se courber en avant sous la
charge, mais aucune ne se plaint et c'est
la montée à Tête Rousse dans la matinée
radieuse.
Comment fait-on aujourd'hui ?
Loin sous nos pieds, la vallée est encore noyée dans une brume légère que
tout à l’heure le soleil boira. Le chemin
serpente à travers les « arcosses » puis
emprunte bientôt la voie du T.M.B. qui
toussotant et crachotant, se hisse, loin
dans le bas.
Bionnassey étale sa peau d’éléphant
crevassée à cinq cent mètres en dessous
de nous. Plusieurs voient pour la première fois une telle masse glaciaire et en
sont émerveillés.
Casse-croûte au Nid d'Aigle et c’est
la lente progression sur le sentier de Tête
Que fais-tu pour le 14 Juillet ?
Jo est l'animateur d'un groupe qui,
chaque dimanche, s'évade vers les cimes.
11
Rousse.
Le névé traversé face à l’impressionnante face nord de la Bionnassey, nous
voici à Tête Rousse. Sac à terre et c’est
le grand repas de midi. Celui qu’il faut
faire aussi copieux que possible parce
que demain fatigue et altitude nous ôteront peut-être l’appétit.
- Chic, le câble fonctionne. On pourra
faire monter nos sacs. Hélas, trois fois
hélas, le Viandox coûte 52 francs et pour
être à l’unisson la montée des sacs se
paie 15 francs le kilo. Et le dit si bien le
gérant du chalet :
- L'an dernier c'était dix, il faut bien
15 cette année.
Dix sacs par voyage, deux cents
francs le sac, dix voyages dans l’aprèsmidi, 20.000 francs avec un litre d’essence, bonne affaire !
Comment voyager
à bon marché
Évidemment il n'est plus question de.
faire monter les sacs et cet intermède me
donne l’occasion d’orienter la conversation sur le sujet qui m'intéresse.
J’apprends bientôt que l'on peut
voyager .à bon marché à condition de ne
pas être très pressé, ni très fixé sur son
itinéraire.
Si Roger I a fait les 120 kilomètres à
bicyclette, Roger II est venu en stop, un
stop de trois voitures, deux filles avec un
stop de 5 voitures.
Voilà, je tiens la solution du problème.
Pas d'argent, mais du culot,du cran et
de l'enthousiasme. L'enthousiasme qui,
comme “la foi soulève les montagnes”,
permet de les escalader, même si l'escarcelle est vide et qui a fait de l'ouvrier parisien Pierre Allain,l’alpiniste remarquable qui a conquis la considération des
guides et dont Lionel Terray me parlait
en connaisseur il y a quelques mois.
Mon travail était terminé, je le savais.
Maintenant je n'étais plus le journaliste
aux aguets,mais l'amoureux de la montagne à laquelle j'allais pouvoir me donner tout entier.
Aussi, ne vous raconterais je pas
notre ascension au Mont-Blanc, le cran
de nos jeunes dans le couloir, dans la
pierraille de l'Aiguille du Goûter, leur assurance dans la traversée de la Jonction.
Je vous dirai simplement que Roger I
remonta sur sa selle et refit en sens inverse les 120 «bornes», que Germaine et
Lila. attendaient à 8 heures du soir un
stop problématique à Megève; et que Roger II le veinard était déposé par mes
soins à sa porte à 11 heures du soir. •
article de A.P. Dominique,
en fait Pierre Garin qui tenait à cette
époque le café de l'horloge à Chambéry.
Mémoire ajiste : témoignages
Découverte des AJ : La Roche du Page, 18 Août 1942
Dans notre précédent numéro nous avions publié un texte d’Yvonne Humm d’Epinal qui nous racontait comment elle avait été invitée à venir en AJ. Nous poursuivons ce récit avec la première expérience d’Yvonne Humm à l’AJ de la Roche du Page…
Quatre sauvages arrivent…
Bonjour Père Aub !
Fidèle au rendez-vous, j’arrive suant
et soufflant avec un vélo lourdement
chargé que je hisse à grand peine dans un
sentier vosgien par excellence. Enfin voici l’Auberge… j’ai la désagréable surprise de constater que je suis la première
arrivée et que la maison est vide. Un peu
déçue, j’abandonne le vélo et je vais me
reposer dans le pré voisin. Peu après, je
vois arriver quatre sauvages : deux filles
et deux garçons, hâlés, vêtus ou plutôt
dévêtus le plus pittoresquement du
monde, des barbes fantaisistes, des chevelures bohêmes et quatre paires d’yeux
et quatre sourires éblouissants de vie, de
santé et de gaité. Et tout de suite quatre
questions semblables :
- Tu viens à l’AJ ? De quel pays ?
Seule ?
Sur la porte en plein cintre de la
grange, un panonceau PERE AUBERGISTE. La camarade Andrée entre après
un “Suis-moi” énergique. Un couloir tout
noir et au bout un “Bonjour Père Aub’
déclenchant la réplique “Bonjour Andrée” et je pénètre dans une grande cuisine vosgienne où mes yeux surpris par
le demi-jour ne distinguent d’abord
qu’une fenêtre à petits carreaux. Malgré
tout je lance moi aussi un “Bonjour” qui
m’attire aussitôt une vigoureuse et cordiale poignée de mains avec un Bonjour ?… auquel j’ajoute impulsivement
“Yvonne” laquelle bienvenue m’est aussitôt répétée par la Mère Aubergiste qui
vient d’entrer. Ça y est ! Ces imposantes
formalités étant accomplies, je suis
ajiste. Je me sens chez moi, tout à fait à
mon aise dans cette atmosphère simple,
cordiale et joyeuse qui vivifie le cœur et
l’âme comme l’air vif de nos montagnes
vivifie les poumons et le sang.
Le tutoiement devient naturel
On m’avait bien dit que le tutoiement
était de rigueur entre ajistes mais ce tu
brutal me déconcerte et si je m’empresse
de répondre, je m’adresse aux quatre à la
fois afin de légitimer le vous qui me
vient aux lèvres malgré moi. Et puis
brusquement, j’ai la sensation du normal,
du naturel de cette prise de contact. Evidemment nous ne nous connaissons pas
et pourtant nous savons des tas de choses
l’un et l’autre. Puisque nous nous
retrouvons là, dans cette Auberge perdue
dans la montagne c’est que nous avions
le même désir de partir loin des villes,
loin du monde, vers les grands espaces
lumineux, vers les fatigues et les joiens
d’une vie rustique et sportive, vers une
camaraderie simple et saine. Et une amicale discussion suivit sur la meilleure façon de raccommoder un pneu fatigué
avec de la ficelle, des chiffons, de la
colle et réunit les quatre spécialistes autour du vélo douloureusement amputé de
l’une de ses roues.
C’est ainsi que me découvrent les
deux premiers camarades du groupe… et
ils me jugèrent tout à fait dans l’ambiance.
Aussitôt grand conseil pour organiser
repas et coucher pour la dizaine qui devait encore arriver ce soir très tard. Nous
sommes l’avant garde et nous en acceptons joyeusement l’honneur.
Mais montons d’abord chez le Père
Aubergiste, c’est-à-dire jusqu’à une
ferme 500 mètres plus haut. Un sentier
bien raide entre deux colonnades de sapins dont les branches forment voûte, un
petit bout de pré et nous y voici.
et du non moins imposant fromage, deux
arguments de valeur incontestée !
Puis nous redescendons à l’Auberge
où nous réquisitionnons pour notre
troupe deux dortoirs vides et bon nombre
de couvertures. Vite un bouquet de
bruyère dans cette vieille cruche abandonnée et hop ! fini le gros de l’installation. Allons maintenant à la rencontre
des camarades qui doivent eux aussi
ployer sous le sac.
Des ombres noires étrangement
bossues !
Tiens déjà le soir ! La montagne est
toute bleue et une grosse lune à l’air bonnasse sort peu à peu des sapins là-bas sur
la Schlucht.
- Plus de neuf heures déjà !
- Pas possible, alors vite, vite.
Nous dévalons sur nos vélos un étroit
petit sentier à pente rapide puis un chemin plus large, rocailleux et voici la
route… et on ne s’est pas cassé le cou !
Quelques bons coups de pédales et
c’est la descente rapide vers le Saut des
Cuves où un attroupement d’ombres
noires étrangement bossues nous arrêtent
avec des cris bizarres et de grands
gestes. Immédiatement nous nous trouvons désarçonnées, bousculées, ahuries
et démanchées par de vigoureux serrements de mains accompagnés de
bruyants saluts… Et la troupe s’ébranle
nous faisant rebrousser chemin et refusant tout allégement d’épaules pourtant
lourdement chargées. Passant à l’offensive, nous capturons deux ou trois sacs
qui viennent garnir guidons et portebagages en trophés glorieux.
Une horde sauvage et attentive
Défilé des Vosges
extrait du livre
"Le Tour de France par deux enfants"
Face aux appétits féroces
Mais pas une minute à perdre !
Andrée et moi, bientôt rejointes par
Jean, nous organisons rapidement, avec
le concours de la MA un repas consistant
pour la douzaine d’appétits féroces qui
crieront famine autour de la grande table
dans quelques heures. Malgré cette effroyable vision d’avenir, nous sentons
une douce quiétude nous envahir à la vue
de l’imposant “hot” de pommes de terres
12
Une chanson part à l’avant, nous la
poursuivons et l’adoptons, elle devient
une grande clameur rythmée qui doit
faire pâmer d’effroi les vieux hiboux taciturnes. Elle résiste vaillamment aux
trois kilomètres de route pour se perdre
haletante dès l’attaque du raidillon.
Brève halte à l’Auberge pour poser
les sacs puis arrivés en trombe chez le
PA où les quelques copains encore là
battent joyeusement en retraite devant
cette horde sauvage et affamée qui, après
de rapides mais sonores saluts, prend
d’assaut la longue table préparée. Un silence !… puis les deux coudes sur la
table, chacun accorde enfin à la tablée un
coup d’œil sympathique. Des questions,
des exclamations s’entrecroisent puis un
autoritaire “Silence” et l’amie Nanous
commence l’appel dans un calme très relatif.
Mémoire ajiste : témoignages
À LA ROCHE DU PAGE
Des noms à faire rêvasser…
(suite et fin)
- Les cyclistes : Andrée, Jean,
Yvonne, l’avant garde auteur du souper… (reconnaissantes ovations, une petite réflexion philosophique d’un insatiable sur le fond impudiquement
découvert de la grosse marmite)
- les gens du train : Jean n°2, Pierrot,
Claude, René, Pierre, Nanous, Malou,
Jeanette, Titi.
- Arrière-garde annoncée : Lucile,
Paulette, plus ma sœur Gilberte ajoute
René.
Une radieuse semaine
Paul et Madeleine contemplent d’un
œil calme et souriant cette bonne dizaine
qui deviendra une quinzaine demain.
Et chacun entre avec délices dans
cette radieuse semaine de détente et plus
prosaïquement chacun se glisse voluptueusement dans le chaud duvet et s’endort en pensant au lendemain.
Il arrive vite ce lendemain et il
semble qu’on vient à peine de fermer les
yeux quand une voix énergique crie :
- Allons debout, il est presque huit
heures, vous n’êtes pas honteux ? On
n’est pas ici pour apprécier les
paillasses !
La suite au prochain numéro… si
vous êtes suffisamment nombreux pour
nous la demander…
Yvonne Humm
Mao Bouachrine évoque pour nous
un de ses premiers souvenirs ajistes
(1943-48).
Je ne sais plus comment, est-ce à la
suite de mon naufrage ? Je me retrouve à
faire du canoë (en bois à l’époque) avec
un groupe ajiste ou était-ce pour les
beaux yeux d’une poupée ? J’attendrai
quelques années pour traverser Paname
en canots gonflables avec des ados délinquants puis encore d’autres années pour
construire des canoës en résine (toujours
avec la même clientèle). Quarante ans
plus tard, je me mettrai à bricoler un pédalo avec des bidons que je lancerai sur
le Lac du Bourget avec autant de succès
que mon premier engin non identifié.
Les Foyers Ajistes avaient des noms
à faire rêvasser les campineurs en herbe.
“Hors des murs”, “équinoxe”. Aucun
souvenir du nom de mon foyer du 29
Rue Mathis ? Mais je me souviens bien
des réunions tumultueuses pour décider
de nos prochaines sorties. Il en a fallu
des discussions pour mettre sur pied
notre réveillon de fin d’année dans une
grotte de la gorge de Franchard (Fontainebleau). Il fallait surtout convaincre les
copines qui elles devaient convaincre les
parents, ce qui n’était pas une mince affaire, les parents communistes étant les
plus indécrottables…
“L’Empereur”, l’un des pieds nickelés rencontrés à Achères m’amènera au
foyer de la rue Myrrha (n°51). Ce coin là
c’est encore un peu chez nous, quoiqu’il
se trouve dans le quartier de la Chapelle.
Les potes de ce foyer sont plus aventureux, mais plus politiques aussi. C’est
avec eux que j’irai manifester pour les
billets de train à 50%. Ça s’est passé gare
de l’Est et pour une fois des Eclaireurs
(scouts) étaient mêlés à nous sous la matraque-pélerine et coups de tatane de
flics (ont-ils des enfants ces gens là ?)
Tiens, ça me revient, c’est à Achère
que j’ai aussi fait connaissance d’un
couple sympa : Henry Keffelec et sa
femme. Ils avaient alors un bébé dans
leur sac à dos, cette fois je l’ai faite ma
photo à-la-Doisneau. C’était du temps du
M.L.A.G à tendance anarchiste.
Être anar était surtout un style de vie
plus qu’un acte politique. Une façon pudique moins prétentieuse que de se dire
Humaniste. Il s’agissait de nous tenir à
une éthique de vie dans nos rapports
avec autrui.
Il y avait aussi un groupe ajiste chez
Renault où je bossais. N’est-ce pas un sacré boulot, en plein turbin, rassembler
des jeunes pour autre chose que le syndicat, sans pour cela le remplacer.
C’est avec des ajistes ananars que je
suis allé au Vieux Colombier : Jean Vilar
présentait “Meurtre dans la Cathédrale”. Il n’allait pas tarder à transporter
ses pénates à Avignon.
LA CHAINE DES VERTUS
Chacune des vertus fait à l'autre éclairage.
On n'imagine pas l'absence d'équité
Dans un acte où ressort la preuve du courage;
Mais la justice doit, face à la vérité,
Montrer quand,même un peu de générosité...
En lisant mes conseils, ne prenez pas ombrage,
Vous manqueriez d'humour, sinon d'humilité !
Chacune des vertus fait à l'autre éclairage.
La bonne foi provient de la simplicité.
La politesse veut, envers notre entourage,
Refuser les propos qui provoquent l'orage.
Mémoire, souvenirs...à la fidélité,
A la prudence aussi donnent un repérage.
Pureté, tempérance, amour, fratemité,
En bref, donnent naissance à la civilité;
Elle adoucit, des ans, l'irréparable outrage ..
Henry Keffelec, sa femme et son bébé
Jean-Jacques BLOCH.
13
Mao
Mémoire ajiste : témoignages
La Loge aux bœufs ou l'AJ où l'on n'arrive jamais
André Caquant, de Reiningue, nous livre un nouveau récit dont la scène et les suites se passent dans la soirée du 12 Avril 1949.
(Lui demander une autorisation pour toute reprise de son texte…)
note préalable de AC : Le Guide
san et son attelage qui rentraient au berAjiste du M.L.A.J. signalait simplement
cail.
“Refuge de “la Loge aux Bœufs” à Co“- Dites, Monsieur, pour aller à la
cherel par Lizy-sur-Ourq (Seine et
Loge aux Bœufs ?
Marne)
- La Loge ?… Sacrédié, c’est du côté
de la Ferté-Milon !
Le désert… le bled
- Quoi ? N’y a-t-il pas un hameau de
C’est que la commune de Cocherel
Cocherel ainsi nommé ?
était vaste, si le bourg était réduit ! Il fai- Jamais entendu dans le pays !”
sait encore jour tandis que nous roulions
sur ce territoire, un peu surpris des disUn frisson entre les omoplates
tances, à travers de maigres champs qui
Dans les lueurs qui s’attardaient sur
n’en finissaient pas.
le plateau, nous commencions, Claude et
Un peu le désert. Le bled !
moi, à nous regarder en coulisse. AlluDans le village même où nous nous
mant notre lampe de poche, nous avons
sommes arrêtés, nous nous sommes une
déplié la routière et nous la scrutions à
première fois renseignés. Des lignes du
nous faire mal aux yeux. Mais nulle part,
Guide, nous n’avions retenu que nom du
dans les parages de Cocherel, n’était cilieu-dit “la Loge aux Bœufs”. Personne
tée une loge quelconque. Nous ne lisions
ne connaissait ce lieu, et quelques artique Monsoutin, Chaton et Crêpoil. Une
sans nous déclarèrent qu’il n’existait aucoquille s’était-elle glissée dans le
cune auberge de jeunesse ouverte à tout
Guide ?
venant dans le village.
Bien. Donc c’était en cambrousse !
Retour dans le bourg. Nouvel essai
Nous voila repartis sur la N331, tirant
près d’un riverain…
d’abord vers Montreuil-aux-Lions… Le
“Vous êtes ben sûrs que c’est “…aux
crépuscule était venu et nous arrêtions à
Bœufs” ?
tout bout de champ, interrogeant les rares
- Mais oui, Loge aux Bœufs ! Il y a
passants, cultivateurs attardés.
une auberge de jeunesse dans ce lieu.
Sur trois kilomètres de distance, perVous devriez connaître !…
sonne ne put nous renseigner.
- Ah ! Parce que vous savez, des
Loges, i en a un peu partout dans c’te
Les estafettes
contrée !”
Je sentis un frisson me courir entre
de l'armée mongole !
les omoplates. Claude m’avoua par la
Demi-tour. Nous voilà repartis vers
suite que sa tension artérielle avait seml’agglomération, interrogeant quelques
blé s’amplifier brusquement. Le type
personnes à l’entrée de l’unique rue. Très
nous contemplait bêtement, devant sa
rares devaient être, en cette mémorable
porte, et paraissait se soucier surtout du
année 1949, les ajistes et assimilés qui
contenu de nos sacs.
venaient à la Loge aux Bœufs, car les
gens du crû ignoraient totalement, et
Des gens idiots, pervers ?
d’une, de quelle sorte de gîte nous enquérions. D’autre part, nul ne se souveNous écartant un peu jusqu’à un
nait d’un lieu-dit “Loge au Bœufs” à Coterre-plein lugubre, nous nous interrocherel, et c’était exaspérant.
gions. Était-il possible qu’il y eut pluNous voilà repartis vers Lizy, toursieurs “loges” sur Cocherel ? Dans ce
nant dans les chemins latéraux, revenant
cas, il nous eût fallu une carte d’Etatsur nos pas de crainte de nous égarer,
major pour le moins. Ou bien les gens de
toujours suivis de notre remorque qui
ce patelin étaient-ils idiots, pervers ?
tressautait sur des sols inégaux. Nous
Avaient-ils intérêt à nous laisser ignorer
avons dû faire ainsi dans l’obscurité, en
la situation de ce lieu-dit ? Peu probable.
pleine campagne, une circuit invraisemSortis du village une fois encore, je
blable. Nous passions devant des fermes
commençais à loucher aux environs,
muettes, dans la clarté des porches éclaicherchant l’ombre plus noire d’un boquerés, et des gens nous regardaient avec
teau, d’une haie, quelque lieu abrité pour
ahurissement, comme si nous avions été
y monter nos tentes. Déjà j’avais l’imdes estafettes de l’armée mongole.
pression que cette fin d’étape se solderait
“La Loge aux Bœufs, s’il vous
par une nuit de camping en rase camplaît ?”
pagne. Il nous suffirait de trouver de
Quelques secondes de silence.
l’eau pour la soupe. Il y avait un grand
“Ben ! V’zy tournez l’dos. C’est vers
bois en tirant vers Chambardy…
Crouy !
- Non, à Cocherel… c’est indiqué sur
Nous résolûmes d’essayer une fois
notre guide !
encore avant de nous y résoudre. Une
- Ah ! Alors, j’vois point.”
Nous fîmes encore quelques bornes
sur le plateau, accostant bientôt un pay14
jeune femme s’avançait au mitan de la
route déserte et apparemment peu fréquentée par les véhicules. Depuis Ocquerre, nous n’avions pas rencontré deux
bagnoles.
“Pardon, Madame, la Loge aux
Bœufs… Où que ça se tient-i ?” Intentionnellement nous imitions la syntaxe
des gens du crû… comme pour les rassurer sur nos intentions.
Eléctrisée par le St Esprit
Elle répéta plusieurs fois ce terme
composé, d’un air absent… “Ben, vous
savez, j’vois vraiment pas. J’connais ben
la Loge, mais c’est pas là… Ah non,
c’est pas à Cocherel…”. Soudain elle
tressaillit comme si le Saint Esprit venait
de l’électriser par derrière, en douce.
“Attendez-voir… c’est-y pas c’te ferme
où que les Maquis se cachaient pendant
la guerre ? Oui, ça doit être ce nom là
qu’on donnait à c’t’endroit. Ben c’est au
diable, vous savez ! Et qu’est-ce que
vous allez faire là, à c’t’heure ?”
En deux mots nous lui disions ce
qu’était notre mouvement de jeunesse,
l’existence des relais ruraux pour les
jeunes voyageurs, ajoutant que si c’était
au diable, nous nous faisions fort d’y
parvenir à condition de connaître le chemin qui y menait.
“- C’est qu’avec vot’ charrette… Le
chemin est mauvais et il y a au moins
trois kilomètres.” Elle nous entraîna à
l’écart du village, parmi les guérets obscurs et bientôt, près d’une friche, nous fit
voir l’amorce d’un chemin médiocre,
sorte de piste caillouteuse et herbue.
“Suivez toujours tout droit ; ça monte,
dame ! Vous verrez des arbres, des vieux
murs de pierre. C’est par là quèque part.
Personne n’y va plus. J’y suis ben allée
eune fois en vingt ans !”
Heureusement
la lune était dans son plein
Remerciements et soulagement. Moitié roulant, moitié marchant, nous avons
suivi cette sente sur laquelle la remorque
grinçait à fendre l’âme. Heureusement, la
lune était presque dans son plein et nous
éclairait copieusement. Sans elle, je crois
que nous eussions quitté le chemin, nous
égarant dans les friches plus d’une fois.
Après un temps qui nous parut très long,
nous vîmes poindre quelques bâtisses
écroulées, entourées par ce qui semblait
être un verger retourné à la sauvageriemère…
Nous avons compris bientôt. La Loge
aux Bœufs de Cocherel était un hameau
perdu, abandonné, ruiné. Il devait se
composer d’une dizaine de demeures qui
s’étaient écroulées. Un vrai désastre !
Mémoire ajiste : témoignages
La Loge aux bœufs ou l'AJ où l'on n'arrive jamais (2)
Une sauvagerie poignante, presque
historique.
Abordant un fantôme de fermette
dont un bâtiment conservait un aspect un
peu moins croulant, sur le côté droit
d’une très antique ruelle encombrée,
nous y vîmes le triangle ajiste, en bois
pourri et déteint, cloué sur un panneau de
porte.
éclairait tout autant que nos bougies.
Nous avons mangé de bon appétit, malgré la présence d’araignées énormes, qui
semblaient faire du trapèze entre les
pieds de la table, excitées sans doute par
la lueur du foyer et la chaleur dégagée,
ou comme si elles “tablaient” sur la capture problématique de quelque moucheron printanier et noctambule.
Un refuge, disait le Guide. Oui, tout
au plus. Enfin, il y avait un toit !… Je ne
saurais dire si l’huis en était verrouillé ou
bien si, selon les pratiques originales des
relais de l’époque., la clef en était dissimulée “dans la fente de la troisième
marche du perron”. Braquant la lampe de
poche devant nous, nous sommes entrés
dans une pièce vaste et poussiéreuse. Ce
devait être la cuisine de cette maison
agricole antique et je ne pense pas
m’abuser en déclarant que cette bâtisse
avait au moins quatre siècles d’âge !…
On ne pouvait rêver
de situation plus isolée
A la lueur des chandelles
Il devait y avoir une grosse lampe à
carbure suspendue au plafond par un fil
de fer, mais son mode de fonctionnement
nous restait inconnu, et nous fûmes incapables de l’allumer. Probable que la provision de carbure était épuisée. Mais à
force de chercher dans un bahut vermoulu et dans les nombreuses niches évidées
à même la muraille, nous avons fini par y
trouver des bouts de bougies, des chandelles…
Quand la salle s’éclaira enfin, que
nous vîmes ces creux d’ombres, ces renforcements, cet âtre démesuré, ces niches
insolites, nous éclatâmes de rire, comme
deux fadas. Un besoin de détente, de
compensation, après l’agacement et les
crispations qui nous avaient pris aux
tripes à Cocherel.
Matériel déchargé en partie, assis
face à face sur des bancs, accoudés à une
table massive, de part et d’autre d’une
sorte de cierge allumé, nous commentions nos impressions. Puis nous avons
cuisiné dans la cheminée immense, meublée d’une crémaillère qui devait bien
peser un quintal. Le serrurier qui l’avait
conçue devait être un contemporain de
François 1er… Aux murs, un graffiti au
charbon de bois signalait aux éventuels
usagers la présence d’une source à proximité. C’est à force de fureter, lampe braquée, dans les terrains vagues qui entouraient les communs que nous avons enfin
découvert un creux, vasque naturelle à
surface moussue, où l’eau arrivait presque à fleur de sol. Elle était claire au dessous, néanmoins nous l’avons bouillie.
Quant au bois, il ne manquait pas :
vieilles poutres rongées dont certaines attestaient de lointains incendies, lattes de
plafond, branches mortes. Un feu clair
brûlait sur la pierre de l’âtre et nous
… j’écrivais sous les reflets dansants, entre deux feux.
Assis sur une botte de paille pourrie,
ses longues jambes guêtrées étirées vers
la flamme, Claude rêvassait, fumant, la
gourde de cidre à portée de main. Et
entre deux lignes d’écriture péniblement
rédigées sur l’agenda vert, je l’écoutais
parler et ses impressions rejoignaient les
miennes. Nous avions découvert un Cahier d’hébergement plutôt moisi et mal
tenu qui datait de 1946 et semblait avéré,
au relevé des patronymes de plus en plus
espacés, que plus personne ne s’aventurait en ce lieu depuis plus d’une année,
pas même les membres du groupe gestionnaire qui, si mes souvenirs sont bons,
devaient être des ajistes de Meaux.
Rien n’était prévu pour l’année
1949. Ni livre, ni caisse, ni cachet. Lieu
hanté, maudit ? Est-ce qu’on savait ? Ce
devait être grave si les ajistes eux-mêmes
avaient abandonné ce refuge ! Sur la couverture du registre de 1946, il y avait
pourtant un titre évocateur en diable. On
lisait :
“La loge aux bœufs - Cocherel - Relai (sic) Clandestinité”
Claude avait souri, admettant qu’en
effet, on ne pouvait rêver situation plus
isolée, et que les chleuhs (sic) euxmêmes n’avaient jamais dû en soupçonner l’existence. Une désolation, une thébaïde, endroit rêvé par un écrivain en
mal de silence. Cependant nous perçûmes des grattements vers une sorte de
placard aux menuiseries sombres et disjointes. Souris, rats… ou fantômes. Le
vent bruissait sous les lattes du toit, s’insinuait entre des vitres fêlées. Nous sentions des vents coulis partout, et les
flammes des bougies vacillaient. C’était
en somme l’hôtel des courants d’air dans
toute l’acception du terme.
La poésie de ces lieux
était immense
Mais en cette soirée de printemps
rude et fraîche, la poésie de ces lieux désertés était immense et nous la ressentions intensément, lucidement, par les
cinq sens et tous les pores de la peau.
…Des soirs de la vie de jeune homme
qui ne s’effacent pas de si tôt de la mé-
15
moire, parce que pour nous, gens des logis monotones et rangés, un tel décor
était imprévisible. Ce fût pour nous deux
une révélation de certains aspects de
vieille France.
Feu et bougies s’éteignaient. Claude
s’était levé lourdement et cherchait sa
couche à tâtons. Une vieille paillasse posée à même le sol. Il parlait de la présence possible d’acridiens, ajoutant
qu’avec ou sans livre d’hébergement, il
ferait abstraction de la note d’hôtel. Je
lui donnais raison, car enfin, notre installation tenait plutôt du bivouac et pourtant, vingt dieux, je ne demandais, à
l’âge de vingt-cinq ans, qu’à découvrir
de pareils abris à chaque fin d’étape. Je
devais même y prendre goût, mais ceci
est une autre histoire.
Grange ou palais, qu’importait ? Ce
qui comptait était le geste, la création
d’un gîte pour l’errant, le déprimé de
l’usine ou la jeune fille rêveuse. Il en aurait fallu un millier sur l’ensemble du territoire français !…
Tout est apparu mort et
mélancolique
Quand le lendemain matin, foulant de
hautes herbes et des décombres de toutes
sortes, nous avons fait le tour du propriétaire, tout nous est apparu mort et mélancolique sous le soleil. Vieilles choses
grises, noires, blanches et poudreuses où
seules quelques corolles de simples mettaient un peu de relief. Un poème, cette
loge ! Destruction. Mais les ans seuls en
étaient-ils la cause ? Sinon, comment,
pourquoi, par qui* ?
Nous avons quitté ces ruines vers 9 h
30, après un dernier regard à l’unique
pièce habitable de ce groupe de demeures, à son grand âtre à odeur puissante où nos cendres de la veillée
s’amoncelaient en petit tas blanchâtre
que des appels d’air faisaient tournoyer,
et après avoir soigneusement et symboliquement refermé la porte. Nous partions
reposés, mais encore un peu ahuris du
spectacle, et “à la cloche de bois” bien
entendu. Laisser de l’argent là dedans
c’était le mettre à la merci du premier rôdeur venu. Cependant, sur la feuille détachée d’un calepin, nous avions signalé
notre passage, comme par le besoin de
prouver à quelque autre usager de ce refuge, notre présence éphémère et excentrique.
André Caquant
* note de la page 52 du cahier : Ce
hameau a probablement été détruit, et jamais reconstruit, au cours de l’avance de
l’armée allemande sur Meaux, en 1914,
au cours de la bataille dite de l’Ourcq.
Mémoire ajiste : témoignages
Du S.T.O. aux arrestations du 23 mars 1944
Période bien particulière que celle de l'occupation où les AJ semblent avoir été à la fois tolérées par les gouvernements
de l'époque (à quel prix ?) et par ailleurs des lieux où se sont retrouvés des jeunes fuyant le S.T.O. ou rejoignant les maquis
ou encore plus dangereusement, associées aux mouvements de résistance. René Portal nous a transmis un texte remarquable
(peut être déjà été publié dans “Notre Amitié” en 1991) sur l’époque difficile de l’hiver 1943-44, Floréal Dablanc nous raconte son arrestation en juillet 1944 à Lyon. Nous vous proposerons dans le prochain numéro un texte d’Yvonne Humm qui
parle de la même époque et des mêmes lieux. Je sais que, bien que le temps ait effacé pas mal de traces de cette époque, ce
sont des sujets encore brûlants, ainsi René me dit périodiquement qu'il aimerait bien savoir ce que sont devenus les copains
arrêtés en mars 44 et pourquoi et comment cela a pu se faire… D'autres diront pourquoi remuer le passé ? Je crois, quant à
moi que les éclairages sur le passé sont passionnants et utiles… vos témoignages seront bienvenus. (db)
Qu'est-ce qu'on peut faire
quand on a vingt ans…
Qu’est-ce qu’on peut bien faire quand
on est en décembre 43, qu’on a vingt
ans, qu’on a échappé à une rafle au métro république, qu’on a en poche un
contrat S.T.O. pour Schneidemul (?) Prusse orientale-, qu’on n’a que quelques
parents lointains en Auvergne ou en Bretagne paniqués à l’idée d’accueillir un réfractaire, qu’on fait partie des AJ depuis
quatre ans, qu’on y a découvert l’amitié,
la solidarité, l’amour de la nature, de la
montagne, de la paix… de la vie…
Qu’est-ce qu’on fait ? Hein ?
Eh bien, au lieu de prendre le métro à
Italie pour la gare de l’Est, on s’arrête à
la gare de Lyon avec son sac à dos, son
duvet, ses skis (en frêne avec fixation à
ressort à l’arrière). Pas trop près de la
frontière suisse, pas trop loin non plus…
Train bondé, une nuit debout à la fenêtre
du wagon à rêver devant des villages endormis de la France profonde, l’angoisse
à chaque arrêt à guetter les patrouilles
sur les quais (vont-ils monter dans mon
wagon ?) Le jour enfin à Culoz, et cette
vue merveilleuse du lever du soleil sur
les rives du Lac du Bourget que le train
longe jusqu’à Aix-les-bains… Vingt cinq
ans plus tard, quand je choisirai de quitter les embouteillages de Paris… aujourd’hui, c’est cette vue que j’ai de ma
fenêtre.
Expédition punitive au Biot
Thonon. Un car à gazogène remonte
la vallée de la Dranse et me dépose près
de l’AJ du Biot. Quel sympathique accueil de la Mère Aub’… “Oui, tu peux
rester ici, oui, il y a un petit groupe qui
couche au pied de la Dent d’Oche, au col
du Corbier, ils sont cinq, tu les verras, ils
descendent quelquefois”. Je les ai vus, ils
m’ont persuadé de les rejoindre, on les
appelle les maquis. La nuit dans les chalets à foin, le jour… En bas, c’est la vallée d’Abondance, là-bas, c’est la
Suisse… quelques heures de marche.
Mais il y a au Biot une bonne femme
qui garde quelques enfants des villes et
elle trafique avec le chocolat des enfants… Alors le maquis, avec ses fusils
de chasse et son revolver (il ne reste que
cinq balles) décide cette expédition punitive en présence de la population du
village : ligotée sur une chaise, elle est
tondue : “et si tu continues…” on lui
montre l’unique revolver à barillet… J’ai
compris : après un coup pareil on va
avoir de la visite !
Halt Papir !
Je boucle mon sac à dos, et direction :
l’AJ de Morzine (c’est encore plus près
de la Suisse par les Portes du soleil), et
puis on peut s’y entraîner à skis : je n’ai
pas encore bien la méthode française
dans les jambes (tu sais, Emile Allais,
skis parallèles, dérapage latéral sur les
carres…)
“Dis donc, vieux, tu montes cet
après-midi ?
- D’accord ! Le télé est un peu cher,
mais il faut s’entraîner.”
Une descente, deux descentes : on
ouvre moins dans les virages.
“On redescend à l’AJ par le Col des
Gets ?
- Oui, ça fait une belle balade.”
Aux Gets, on peut reprendre la route
enneigée, ou une vague piste qui l’évite.
“- Mon vieux (mais comment s’appelait-il ce copain en blouson kaki qui
m’accompagnait ce jour-là ?), non, je ne
prends pas la route : il y a un risque de
rencontrer une patrouille allemande. J’ai
pris la piste, seul, et le soir à la veillée,
on a attendu le copain…
Sur la route, il avait croisé une patrouille :
“Halt ! Papir !”
De l’intérieur de son blouson, faisant
mine de chercher son portefeuille, il a
sorti un revolver et a descendu un des
deux allemands. L’autre l’a ceinturé…
La Gestapo de Cluses… On ne l’a jamais
revu !
Pélerinage à l'AJ de Chamonix
Quelques provisions, duvet bien serré, sac à dos, skis… la prochaine AJ est
aux Pèlerins à Chamonix et par la mon-
16
tagne cette fois : c’est dur, en janvier 44
et en profonde… L’AJ des Pèlerins (la
nouvelle), j’y étais en 1991 pour l’inauguration (300 personnes, discours et vins
de Savoie, très bien : petits dortoirs
quatre places avec eau chaude, cuisine de
rêve, salles de réception, télé, jukeboxes, escalier central superbe - l’ai-je
bien descendu ? mais Joséphine Baker
n’y était pas, notre ministre Roger Bambuck non plus d’ailleurs). C’est en face,
à cinquante mètres de l’ancienne AJ des
Pèlerins, mais le balcon est tombé, pas
l’escalier qui menait aux dortoirs ; la
vieille cuisinière rouillée gît au milieu
des gravats. Le bureau du Père Aub était
là, à droite : j’y ai découvert Bach et Vivaldi en ce mois de janvier 44 ! Mais à
deux kilomètres de là, il y avait la Gestapo et beaucoup de futurs maquisards passaient à l’AJ avant de s’orienter vers un
groupe organisé.
Précisément, il y avait pas loin d'Annecy un certain Plateau des Glières…
Aujourd’hui, au pied du plateau, près de
Thônes, sur la route de La Clusaz, reposent quelques dizaines de gars d’une
vingtaine d’années que j’aurais pu
connaître et dont j’aurais pu partager le
triste sort.
Les ateliers de Vitry ou les
camps de la mort
Une lettre me parvint à temps : à Vitry, une place de manœuvre m’attendait
dans les ateliers de réparations de la
S.N.C.F.. J’y étais encore ce 23 mars
1944 où cinquante deux copains ont été
arrêtés : responsables ajistes de ceci ou
de cela : une rafle bien organisée ! A six
heures du matin. Le cinquante troisième
était René Jeulin, responsable de ParisCentre : il avait découché, le veinard ! Le
cinquante quatrième, c’était moi, responsable de Paris-Sud : je venais de partir
pour Vitry quand ils sont arrivés chez
moi : ils ont raflé tous mes cours polycopiés de Droit, ces cons ! et puis aussi un
tas d’insignes des AJ, ces petites maisons
blanches, rouges et vertes que nous aimions tant.
Je les regrette, tu sais… mais pas autant que ces copains qui ce 23 mars 1944
sont partis vers Compiègne, puis Buchenwald, Dachau, Belsen…
O terre de détresse
Où nous devons sans cesse…
René Portal
Mémoire ajiste : témoignages
La descente de police aux Cam'routes de Lyon
Pour sauver les AJ
Pendant l’occupation les “auberges
de la jeunesse” avec leurs nombreux
groupes ajistes passaient aux yeux de Vichy pour une pépinière d’anarchiste, de
gauchistes ou de communistes, qui pour
la très grosse majorité furent d’authentiques résistants et maquisards. Beaucoup
y laissèrent leur vie. Pour sauver les Auberges de la Jeunesse il devenait urgent
d’avoir une nouvelle appellation : les Camarades de la Route, que l’on pourra récuser à la Libération pour retrouver
l’Ajisme. Cela ne trompa guère de
monde, car les meilleurs militants et dirigeants des AJ se retrouvaient naturellement à la tête des “Camarades de la
Route”. On peut citer Robert Auclaire,
Andrée Laforest (la Chèvre), Pierre Ollier de Marichart (POM), Marcel PetitRobert ? Chalon, Maurice Taddier, René
Porte, Rolland Weil (Chicano), Marc
Paillet, Marc Sangnier, etc… J’en oublie
et des meilleurs.
La direction zone-sud des auberges
de la jeunesse, disons “Les Camarades
de la Route”, était à Lyon, Rue du Lieutenant-Colonel Prévot, près du Parc de la
Tête d’Or. C’est là que je fus arrêté durant la première quinzaine de Juillet
1944 avec Maurice Taddier, Roland
Weil et quatre ou cinq autres dont je ne
me souviens plus des noms.
Nous envoyions cet été 44 dans les
AJ des Alpes et du Centre de la France
des pharmacies en bois assez grosses,
contenant des médicaments, des pansements, de l’alcool à 90°, etc… etc… et
les maquisards venaient en prendre possession comme c’était prévu.
Arrête ! Fais pas l'con !
Voici les faits de notre arrestation. J’étais en train de repeindre le plafond des pièces du premier étage avec un
badigeon. N’ayant aucune blouse et pas
de vêtements de rechange, j’étais nu sur
un escabeau avec seulement un slip, et
soudain, j’entends une voix dans mon
dos : “Haut les mains !”. Je réponds sans
me retourner : “Arrête, fais pas l’con !”,
tellement nous avions l’habitude de chahuter et de faire des blagues. On me colle
quelque chose de froid dans le bas du
dos, je continue à peindre “allez, arrête”,
mais je me retourne et je vois un gamin
qui n’avait pas vingt ans me coller sur la
peau une mitraillette. Croyant toujours a
une blague, je dis au gamin : “Mais on
dirait une vraie ?”. Il me répond : “Tu
veux voir si c’est une vraie ? Allez ! en
bas les mains en l’air contre le camion”.
Me voila en slip dans les rues de
Lyon, plein de peinture contre un camion
militaire. Je demande à celui qui paraissait le chef, l’autorisation d’aller m’habiller, lorsqu’arrive un homme (mon fu-
tur beau-père, M. Ferdinand Marce) un
petit paquet à la main. Il me le tend, je le
prends, on fait mine de ne pas se
connaître, je remonte avec mon paquet,
l’ouvre dans ma chambre en m’habillant
et là… oh, stupeur ! il y a dedans un fromage de chèvre, quelques bouts de sucre
mais surtout mes faux papiers… aïe, aïe,
si ces jeunes cons avaient ouvert ce paquet, nous étions fusillés tous les deux, et
après quel interrogatoire ? Je n’ose pas y
penser…
Trois jours sans manger
Le camion nous emmène au Lycée
Ampère, entre Perrache et Bellecour, prison provisoire de la Milice. On nous jette
dans une salle où il y a peut être 80 personnes, beaucoup de jeunes, quelques
vieux. Je passe là trois jours et deux nuits
- sans manger. Des boites de conserves
servent à faire nos besoins, impossible de
se coucher, on arrive à s’asseoir par terre
à tour de rôle. De temps à autre des miliciens jettent un gars ensanglanté parmi
nous, les menottes derrière le dos. Quand
nous arrivons à faire du silence, la nuit
on entend hurler dans les sous-sols. Roland Weil est immobile, moi aussi, on ne
se dit rien. Le premier matin, un milicien
entre, une liste à la main et crie : “Transférés au Fort Monluc : un tel, un tel, un
tel, etc…” On savait ce que ça voulait
dire.
Naïf, souriant avec un air bête
Au troisième jour on m’appelle :
“Sonthonax” (mon faux nom). On me
mène dans un bureau. Il y a là un homme
en uniforme… quel uniforme ? Il parle
calmement. Est-ce Touvier ? Je ne peux
l’assurer. Il me pose des tas de questions.
Ça dure une demie heure, je vous fais
grâce du détail. J’avais fait un stage de
théâtre en 1941, Montée des Carmélites
à Lyon, dirigé par Martenot (le créateur
des ondes Martenot). J’y ai connu Loleh
Bellon et d’autres devenus célèbres. On
nous apprenait à faire un personnage :
soit orgueilleux, soit prétentieux, soit timide, soit naïf souriant avec un air bête.
C’est ce dernier personnage que je
campe. Je réponds très poliment, souriant
l’air confiant. Je vous passe les questions
et mes réponses. Pourtant je les ai toujours en tête, mais ce serait trop long à
écrire.
Je vous relâche
Soudain il me dit : “Je vous relâche”.
Tiens, il me dit “vous”. “Mais rendez
vous dans une heure au lieu où on vous a
arrêté. Rue Lieutenant Colonel Prévost”. Enfin dehors, incroyable, j’aspire
l’air pur de la Rue Ampère, j’ai envie de
rire, de crier ma joie. Mais qu’est-ce que
ça cache ce rendez-vous dans une heure
au siège des AJ ? On va sûrement me
17
suivre discrètement, voir si je vais prévenir Auclaire ou Andrée Laforest. Je parle
intérieurement, je me dis : “Mon vieux
Dablanc Floréal (c’est mon vrai nom), il
faut aller à ce rendez-vous, il faut te rejeter dans les griffes de ces tueurs, c’est le
seul moyen de t’en sortir, sinon, si tu
fuis, si tu vas prévenir les autres, tu seras
repris, tu auras signé ton rôle de réfractaire.
Le piège
Je marche lentement vers le premier
arrêt du tramway. Quand le tram arrive,
je fais semblant de lire sa direction, son
terminus, j’attends que le tram démarre
et je saute dedans, et derrière moi un
homme en courant, monte de justesse.
J’ai la certitude qu’il me suit ou alors
c’est simplement une impression. Je dois
faire un changement de train pour aller
au siège des Cam’routes. Je refais le
même cinéma et là encore un homme ce n’est plus le même - saute dans le wagon.
Je me dégoûte
Arrivé au siège, il y a toujours quelques miliciens. Pendant trois jours, ils
ont tout fouillé, tout regardé. Celui qui
semble le plus âgé, - il a peut être 25 ou
30 ans - s’avance ver moi. Comment me
connaît-il ? Il me dit “vous”. “Vous êtes
venu ? Vous ne vous êtes pas sauvé ?
Vous n’avez donc pas peur qu’on vous
reprenne ?”. Je réponds avec un large
sourire : “Peur de quoi ? De vous ? Non,
vous êtes des Français sympathiques”. Je
suis un vrai lèche-cul, je me dégoûte de
dire ça.
Galettes et ordonnance
Nouvel interrogatoire, assez détendu
pour savoir du détail sur les
“Cam’routes”. Je parle, je parle, pour
noyer le poisson. Mais je n’ai rien mangé
depuis longtemps. Je demande à ce
“sous-chef” la permission d’aller à la
boulangerie voisine. On y prend sans ticket des sortes de galettes affreuses, faites
avec quoi ? Je reviens aux
Cam’routes. Je mange mes galettes. J’ai
si faim que je les trouve délicieuses. J’en
offre une au “sous-chef”, il accepte. La
glace est rompue, je suis un vrai fayot.
On ne me surveille plus, soudain des
coups de feu éclatent, j’entends des
rires : ce sont les jeunes qui tirent sur un
rat. Je ris aussi. Je dis au “sous-chef” :
“Faut que j’aille chercher un médicament
pour mon père, voici l’ordonnance”. J’ai
cette ordonnance dans ma poche depuis
longtemps. Elle m’avait déjà servi à St
Bonnet de Joux, au maquis de Fléchard,
lors de ma première arrestation par les
Allemands et les miliciens.
Je pars sans problème, ils ne me reverront plus, je gagne un maquis voisin
de St Bonnet de Joux, vers Charolles.
Floréal Dablanc 
Autocollants Anaaj
Sommaire de ce numéro 29/30
Edito et prochaines rencontres
p. 01
Activités de l'Anaaj Rhône-Alpes
AG des 13/14 Nov. Activités, Pierre Rieux
Le point sur l'Anaaj Rhône-Alpes
Carnets de chants (suite et fin)
Voyage en péniche sur le canal de Bourgogne
p. 02
p. 03
p. 04
p. 05
Vie des Anaaj des différentes régions
Rassemblement de l'an 2000 et 2001
Des quatre coins de l'Hexagone
L'embellie de Marseille
p. 06
p. 06-07
p. 07
Les AJ d'aujourd'hui
Inauguration de l'AJ de Lille
FUAJ'mag, Congrès IYHF
p. 08
p. 08
Mémoire ajiste : témoignages
Ce que les auberges m'ont apporté (GD)
p. 09
Onze ajistes chambériens sur le Mont-Blanc (MD) p. 10-11
Découverte des AJ : la Roche du Page (Y. H)
p. 12-13
La Loge aux Bœufs où l'on n'arrive jamais (AC)
p. 14-15
Du S.T.O. aux arrestations du 23 mars 1944 (RP)
p. 16
La descente de police aux Cam'routes de Lyon (FD)
p. 17
Sommaire
p. 18
Encart
:
fiche
commandes
et
répertoire
national.
Nous avions été
mandatés lors de
l'Assemblée Générale pour ré-éditer
des
autocollants.
René Mansey avait
accepté de se charger
de faire une étude de
marché. Avec son
efficacité habituelle
ça a rapidement débouché sur l'achat
auprès des copains
de Midi-Pyrénées de
200 autocollants (vitrophanie : à coller à
l'intérieur
d'une
vitre). Tu peux nous en commander avec la fiche ci-jointe. Nous
conservons un prix assez bas, mais tu peux arrondir si tu veux
nous aider.
Daniel Bret
L'original fait 8,5 cm de diamètre.
BULLETIN DE LIAISON
DES ANCIENS ET AMIS DES AUBERGES DE
JEUNESSE DE LA REGION RHONE-ALPES
Petites annonces gratuites
J .J. BLOCH, 4 rue du Centre 12120 CASSAGNES (65 .74.29 .19) dont on trouvera par
ailleurs la poésie vous présente:
MELUSINE
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J.J.Bloch, elle paraît en janvier, mars, mai, sejtembre, novembre. Elle compte, en plus de la couverture bristol, vingt
pages bien remplies, 14x21, où vous trouverez:
TECHNIQUE: Des conseils sur la prosodie, le vocabulaire,
les difficultés de la langue française.
POESIE: Les textes des abonnés et un auteur connu ou
moins connu à découvrir.
INFORMATIONS: Sur les concours, les rencontres et autres
manifestations poétiques, les problèmes de l'édition, la défense
des auteurs etc...
LE COURRIER DES LECTEURS: qui permet à tous d'exprimer ses opinions, ses suggestions ou autres remarques.
Les abonnés sont assurés d'avoir au moins un poème publié
en cours d'année (maximum 20 vers) Bien que les auteurs soient
seuls responsables de leurs écrits, leur congruence est in- dispensable pour leur publication. Les manuscrits ne sont pas rendus, publiés ou non.
RECUEILS: Cette rubrique est une analyse des récents livres
de poésie publiés. Les abonnés y ont droit en priorité.
REVUES: Les revues confraternelles reçues en service de
presse y sont signalées.
LAURIERS: Les récompenses reçues par les lecteurs de la
revue y sont signalées.
Le prix très modique de 19F, soit 95F les cinq numéros, et la
parution bimestrielle assurant une actualité des informations en
font une revue appréciée en France, Belgique, Suisse, Canada,
et la fidélité de certains abonnés depuis le N°1en est une preuve
18
irréfutable.
BULLETIN DE LIAISON
publié par
LES ANCIENS ET AMIS DES AUBERGES DE
JEUNESSE DE LA REGION RHONE-ALPES
Siège social: AnAAJ Rhône-Alpes,
15, Avenue d'Italie 73100 Aix les bains
Présidents-directeurs de publication:
Georges RIEUX, Georges DOUART
Rédacteur en chef: Daniel BRET
Trimestriel tiré à 300 exemplaires
Imprimerie: photocopies