1 - Les Jeunes Socialistes

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représentants syndicaux de policiers en France et
dans plusieurs pays étrangers. « Nous voulions rendre
compte de notre expérience et qu’elle puisse servir
de boîte à outils pour mettre fin aux contrôles au
faciès, explique Laurianne Deniaud. Le président de la
République s’est prononcé sur des objectifs politiques,
après il y a différentes façons d’y arriver. »
Les Jeunes Socialistes remettent les
contrôles au faciès sur le tapis
PAR LOUISE FESSARD
ARTICLE PUBLIÉ LE LUNDI 28 MAI 2012
C’est l’une des premières mesures concernant les
forces de l'ordre prévues par le candidat François
Hollande : faire paraître avant la fin du mois de juin
une circulaire sur la lutte contre les délits de faciès
lors des contrôles d'identité. Que contiendra cette
circulaire ? Consistera-t-elle en un rappel purement
formel au code de déontologie de la police nationale ou
augurera-t-elle d'un vrai changement d’orientation ?
L’ouvrage s’appuie sur le « modèle » du RoyaumeUni, seul pays de l’Union européenne à enregistrer
systématiquement par écrit chaque contrôle ou fouille,
et à débattre publiquement de ces statistiques avec
les communautés locales. D’après les auteurs, ce
dispositif, remis en cause après les attentats de 2007,
avait permis de réduire les contrôles discriminatoires,
d’améliorer les contacts des policiers avec les citoyens
et de donner des outils de pilotage objectifs à leur
hiérarchie.
Un petit livre, écrit pendant la présidentielle par
Laurianne Deniaud, ancienne présidente des Jeunes
Socialistes (aujourd’hui secrétaire nationale du PS en
charge de la vie associative) et son successeur Thierry
Marchal-Beck, et envoyé à l’imprimeur au lendemain
de la victoire socialiste du 6 mai, suggère quelques
pistes, notamment la remise d’une attestation à chaque
personne contrôlée.
Une expérimentation similaire se déroule depuis 2007
en Espagne, dans une banlieue madrilène. Au terme
des six mois de test du ticket de contrôle, le nombre
de contrôles effectués y a été divisé par trois (passant
de 958 à 253 par mois), et leur efficacité a presque
triplé (le pourcentage de contrôles conduisant à une
arrestation ou une autre suite pénale passant de 6 % à
17 %).
En France, une étude du CNRS avait montré en
2009 que, sur cinq sites parisiens étudiés, les Arabes
et les Noirs avaient respectivement 7,8 et 6,7 fois
plus de chances d'être contrôlés que les Blancs. La
probabilité d'être contrôlé était également 11,4 fois
plus élevée pour les personnes habillés « jeunes » (hip
hop, gothique, punk ou tecktonik). « La liberté de
circulation n’est pas la même pour tous, point, écrit
Laurianne Deniaud dans sa conclusion. Et c’est une
forme de barrière d’octroi moyenâgeuse qui subsiste
pour certaines personnes qui n’ont pas la bonne
couleur ou le bon look, qui ne viennent pas du bon
quartier. »
« Il s’agit de maintenir le sujet dans le débat public
», explique le chargé des relations presse des Jeunes
Socialistes. Ces derniers mènent depuis janvier 2011
un travail de fond sur les contrôles au faciès et
ont rencontré associations et ONG (AC-Le Feu,
Stop le contrôle au faciès, Open Society Justice
Initiative notamment), chercheurs, avocats, juges et
Pas de nouveau fichier
Aussi les deux auteurs proposent-ils de réécrire
l’article 78-2 du code de procédure pénale,
aujourd’hui extrêmement flou, en précisant que «
l’officier de police judiciaire devra pouvoir justifier
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des raisons objectives justifiant le contrôle ». Ils
suggèrent également de remettre un formulaire à
chaque contrôle, reprenant les coordonnées de la
personne, le numéro de l’opération, le matricule du
policier, le cadre légal du contrôle, ses motifs et son
résultat (de sans suite jusqu’à l’arrestation).
par Mediapart, Nicolas Comte, secrétaire général du
principal syndicat de gardiens de la paix, Unité Police
SGP FO (plutôt à gauche), reconnaissait à demi-mots
le problème, mais se montrait prudent.
Pour lui, les policiers « ne sont pas prêts à ça (la remise
d’une attestation - ndlr), et le prendraient comme
une mesure de défiance ». « Cela ne peut en tout
cas pas être une première étape, met-il en garde. Les
policiers ont aujourd’hui l’impression d’être livrés
à eux-mêmes dans les quartiers difficiles, avec des
problèmes de fonctionnement liés au manque de
papier, d’ordinateurs, de voitures qui ne fonctionnent
pas, et sans soutien de leur hiérarchie. Si on ne leur
donne pas d’abord ces moyens et ce soutien, leur
demander, en plus, de remettre un papier à chaque
contrôle ne sera ni compris, ni accepté ».
Aucune donnée ethnique donc, les auteurs ne jugeant
pas souhaitable de joindre le débat sur les attestations
de contrôle à celui sur les statistiques ethniques.
Et pour éviter tout fichage nominatif des personnes
contrôlées, ils prévoient que les données personnelles
ne figurent que sur le coupon conservé par la personne
contrôlée, et pas sur celui conservé par les policiers.
Du côté des associations mobilisées, le collectif
contre le contrôle au faciès se réjouit que les
politiques se saisissent enfin du sujet, tabou pendant
des dizaines d’années. « Nous avons beaucoup
travaillé pour porter cette mesure dans le projet
du PS, rappelle Laurianne Deniaud dans l'ouvrage.
Il a fallu convaincre, argumenter, défendre. » Les
représentants de Stop le Contrôle au Faciès avaient
rencontré brièvement Manuel Valls, alors directeur
de communication du candidat socialiste, lors des 48
heures banlieue de François Hollande en avril, et
espèrent un nouveau rendez-vous avec le désormais
ministre de l’intérieur.
Beaucoup de policiers font également le lien avec
la politique du chiffre et les objectifs d’expulsion
d’étrangers en situation irrégulière. « Si on arrête de
demander aux agents de faire du renvoi aux frontières
à tout prix, il y aura moins de course effrénée à
contrôler tout ce qui peut ressembler à un étranger,
estime Alexandre Langlois, secrétaire général adjoint
de la CGT Police, un syndicat très minoritaire (moins
de 1 % aux dernières élections professionnelles).
Quand dans les commissariats, les gradés demandent
à l’appel : “Aujourd’hui, il faut faire du Nord-Africain
ou des gens des pays de l’Est”, c’est bien que le
problème vient du ministère et des consignes données.
» Reste que les contrôles au faciès ne datent pas de la
politique du chiffre.
Face à ces craintes, les Jeunes Socialistes se veulent «
constructifs ». « On a d’un côté des jeunes qui vivent
au quotidien des contrôles d’identité à répétition,
de l’autre des policiers qui ne demandent qu’à
faire leur travail, il faut rétablir entre les deux une
relation de confiance, estime Laurianne Deniaud. La
remise d’attestation ne peut y suffire, il faut aussi
un changement en profondeur : redonner des moyens
aux policiers et gendarmes, revoir leur formation, et
passer d’une police de projection et d’intervention à
une police du quotidien. »
Le collectif fait aujourd’hui appel au pragmatisme de
Manuel Valls, « puisque a priori cette mesure lui
permettra de mieux évaluer sur le terrain l’efficacité
des politiques de sécurité ». Interrogé en mars par
Mediapart, le responsable du pôle sécurité au sein de
l'équipe Hollande, François Rebsamen, était plutôt
réservé. « Je n'ai rien contre le fait qu'on trouve
des formules, mais il ne faut pas qu'elles empêchent
l'activité policière », nous avait-il répondu.
Pas question donc de heurter la sensibilité des
puissants syndicats de police, a priori pas très
favorables à la mesure. « C’est très important que les
policiers soient bien dans leurs bottes et ne reçoivent
pas une pression de dingue », précise le Collectif
contre le contrôle au faciès. Interrogé en mars 2012
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