Ségolène Royal invitée de "J`ai une question à vous poser" le 19

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Ségolène Royal invitée de "J`ai une question à vous poser" le 19
Ségolène Royal invitée de "J'ai une question à vous poser"
le 19 février 2007 sur TF1.
Ségolène Royal répond aux questions des Français.
Patrick Poivre d'arvor
Ségolène Royal bonsoir.
Ségolène Royal
Bonsoir.
Patrick Poivre d'Arvor
Vous connaissez le principe de cette émission.
Ségolène Royal
Oui.
Patrick Poivre d'Arvor
Vous connaissez le principe également des débats participatifs.
Ségolène Royal
Oui.
Patrick Poivre d'Arvor
Donc pour qu’il y ait débat, il faut qu’il y ait échange, que les questions soient assez courtes et les
réponses pas trop longues. Alors on a beaucoup écouté ce matin tous les 100 Français de tout horizon, de
tout bord qui ont été sélectionnés par la SOFRES et nous avons remarqué que dans les thèmes les plus
importants qui arrivaient, il y avait le problème des retraites et de la santé. Et comme c’est toujours la
première question qui est la plus difficile à venir, j’ai choisi quelqu’un d’assez volubile, qui est Jean qui
va vous poser cette première question. Je vous laisse avec eux.
Jean Terras, 74 ans, professeur des écoles à la retraite.
Le problème de l’aménagement du temps de travail et de l’âge de la retraite n’est pas un problème
nouveau, mais c’est un problème qui fâche, et tous les gouvernements jusqu’à présent ont pris la balle et
ont passé au suivant en se disant celui qui sera au bout se débrouillera. Et le dernier qui l’a eu, c’est le
trois quarts droit de l’équipe de l’UMP, c’est un nommé Villepin. Ce nommé Villepin et c’est courageux
de sa part, il a pris la balle et il est allé aplatir sur le bureau de l’Assemblée nationale. Maintenant tout le
monde le sait, la France est malade de ses retraites et il va falloir s’en doute opérer. Seulement je n’ai pas
trop confiance dans l’équipe médicale qui est à son chevet, je me demande si la France d’en bas, on ne va
pas l’amputer de la jambe. La France du milieu seulement du pied, alors que celle d’en haut, on se
contenterait peut-être de lui couper les ongles. Et moi qui suis à la retraite, je suis un petit peu inquiet, estce que je ne suis pas en train de grignoter la retraite de mes enfants ou de mes petits-enfants ? Alors
docteur Royal, si le scrutin vous désigne comme notre médecin référent, est-ce que vous confirmerez le
diagnostique et qu’elle serait votre thérapeutique ? Merci.
Ségolène Royal
En tout cas vous avez le sens de l’humour.
Patrick Poivre d'Arvor On l’avait repéré celui- là.
Ségolène Royal
Oui. Il y a beaucoup de choses dans votre question et je retiendrais surtout l’inquiétude des retraités. C’est
vrai que cette inquiétude est prégnante, je l’ai entendu dans les débats participatifs comme celui auquel
j’appartiens, je participe à l’instant. Je crois qu’il y a surtout une inquiétude très très forte sur le niveau
des retraites et sur la baisse de leur pouvoir d’achat. Et c’est pour ça que dans mon pacte présidentiel,
l’une des priorités, c’est la revalorisation des petites retraites. Qu’est-ce que c’est qu’une petite retraite,
c’est une retraite égale ou inférieure au SMIC, au SMIC net, inférieur à 984 euros. Qui peut vivre
aujourd'hui avec 984 euros ? Et quand je dis je vais revaloriser les petites retraites et qu’on me dit, c’est
trop, ou la France ne peut pas payer ça, je dis si. Je crois qu’il y a un vrai problème sur les bas revenus
dans notre pays et vous l’avez dit avec un sentiment d’injustice, trop d’inégalités, trop de hauts revenus
d’un côté et trop de bas revenus de l’autre. Et donc je revaloriserais les petites retraites dès mon élection,
de 5 %. C’est un premier pas et ensuite je réformerais l’indice des prix parce que pourquoi est-ce que le
pouvoir d’achat des retraites baisse ? C’est parce que l’indice des prix, c'est-à-dire le calcul du coût de la
vie pour les petits retraités ne correspond pas à la réalité, dans l’indice du coût de la vie aujourd'hui il y a
par exemple les appareils technologiques dont le prix baissent, les écrans plats dont le prix baisse et
forcément les petits retraités n’ont pas accès ou n’achètent pas tous les mois ce type de produits. Et donc
ils ont poussé un cri d’alarme en disant le pouvoir de nos petites retraites baisse et c’est pourquoi j’en
ferais une priorité. Et c’est pourquoi ce sera une décision qui sera prise tout de suite dès mon élection,
l’augmentation de 5 % des petites retraites et la surveillance du calcul de la hausse des prix, c'est-à-dire
que les petites retraites seront désormais indexées sur un vrai indice des prix qui correspond bien à ce que
coûtent les choses pour les personnes concernées.
Patrick Poivre d'Arvor
Alors sur le même sujet, il y a une que stion de Christine, je crois et puis une question de Joël, mais il me
semble que c’est à peu près la même question, sauf si Joël veut intervenir.
Christine Picasso, 46 ans, conseilliere en économie d’impôts à la retraite.
Oui alors moi ma question, elle était un petit peu plus générale sur les retraites, ce n’était pas simplement
sur les petites retraites, c’était sur le financement en général des retraites. Il y a à l’heure actuelle 2,2
actifs pour un inactif, c’était les chiffres de 2005, il est prévu qu’en 2015, c'est-à-dire dans moins de 8
ans, il y ait 1,4 actif pour un inactif, donc ça veut dire qu’il y a un vrai problème de financement des
retraites en général. Alors il avait été décidé de faire un fonds de réserve des retraites, qui est alimenté à
hauteur de 0,12 % du PIB à l’heure actuelle, ce n’est pas suffisant du tout. Il y a des pays comme l’Irlande
qui met 1 % du PIB, d’autres pays qui mettent des chiffres entre les deux. Donc je voulais savoir qu’estce qui était prévu, qu’est-ce que vous avie z prévu de faire pour compenser ce manque à gagner qu’il va y
avoir dans les années à venir et pour éviter d’alourdir la dette pour nos enfants ?
Patrick Poivre d'Arvor Joël, c’était à peu près la même question ?
Joël Bernat, 55 ans, guide de tourisme.
Madame Royal bonsoir.
Ségolène ROYAL
Bonsoir.
Joël Bernat
Au-delà des fonctions, je dirais régalienne du président de la République, vous vous êtes étendue sur des
sujets bien précis comme la retraite évidemment qui vient d’être développée en indiquant que vous alliez
les revaloriser de 5 % pour les petites retraites. Mais, 5 % sur le minimum vieillesse, ça fait 30 euros par
mois à peu près.
Ségolène Royal
50.
Joël Bernat
Oui. Ne croyez- vous pas qu’il serait préférable de rallonger la date de départ à la retraite à 70 ans et de
permettre à tous ceux qui la prennent de la prendre avec au moins un montant égal au SMIC quand même
?
Ségolène Royal
Alors non monsieur, je ne crois pas qu’il faille repousser l’âge de la retraite à 70 ans. Pourquoi ? Parce
qu’il y a déjà beaucoup de chômage chez les personnes de plus de 60 ans et même de, pardon de plus de
50 ans et notamment beaucoup de femmes au chômage. Et ça rejoint la question que vous posiez
madame, c'est-à-dire en effet que la relation entre le nombre d’actifs qui donc cotisent pour le nombre
d’inactifs est trop faible en France. Pourquoi ? Parce que nous avons à la fois le taux de chômage le plus
élevé chez les jeunes, 23 % des jeunes en France sont au chômage. Et le taux de chômage le plus élevé
chez les plus de 55 ans, et même chez les plus de 50 ans et ça c’est le vrai scandale du blocage d’une
machine économique qui doit absolument repartir. Alors bien sûr il faut abonder le fonds de réserve des
retraites, mais il faut le faire à partir de quoi ? A partir de la relance de la croissance. Et c’est pourquoi
quand je vous parle de revalorisation des petites retraites et donc de défense du pouvoir d’achat, ça fait
partie d’un projet global et cohérent qui vise à faire une France plus juste et qui répartie mieux à la fois
les fruits de la croissance mais qui aussi fait en sorte de relancer la machine économique. C’est ça que je
propose aujourd'hui de relancer la machine économique, de donner confiance à nouveau à notre pays, de
relancer les petites et moyennes entreprises qui sont celles qui embauchent le plus aujourd'hui. Et
comment le faire ? En investissant essentiellement dans la formation professionnelle. Vous savez pour
lutter contre le chômage des jeunes, puisque ça rejoint très directement, il faut plus d’actifs pour cotiser et
certainement pas faire travailler jusqu’à 70 ans, si vous me le permettez, puisqu’à ce moment là on
augmentera aussi le chômage. Et donc je crois qu’il faut être cohérent par rapport à cela et la proposition
que je fais dans mon pacte présidentiel, c’est qu’il n’y ait plus un seul jeune au chômage pendant plus de
six mois, plus un seul jeune au chômage pendant plus de six mois. D’autres pays du Nord de l’Europe ont
réussi à le faire, pourquoi pas nous. Pourquoi pas nous ? Moi, je serais la présidente de la République qui
se battra avec acharnement contre le chômage des jeunes parce que je pense que c’est ça qui déstabilise
un pays comme le notre, qui gaspille des talents. Et je pense au potentiel des jeunes diplômés, des jeunes
formés qui ne trouvent pas d’emploi, ce sont les petits frères et les petites sœurs ensuite qui sont
découragés, parce qu’on leur dit “ travailles à l’école, tu vas avoir un emploi ”, et s’ils voient le grand
frère ou la grande sœur qui a fait un effort à l’école, qui a une qualification, qui a une formation et qui se
trouve au chômage alors c’est toute la société qui vacille et moi je veux remettre debout la maison France
en lui redonnant ses principes fondamentaux. Alors certains se moquent de moi en disant, mais ce n’est
pas de la politique, mais si c’est de la politique, de remettre débout les choses, là où elles doivent être, que
la famille fonctionne bien, que l’école fonctionne bien, que quand un jeune a une qualification, une
formation, il trouve un trava il, et il soit correctement rémunéré, que le travail soit correctement payé, que
les gens soient sécurisés dans leur emploi. Et je pense qu’il n’y a pas d’incompatibilité et c’est ça qui est
le regard nouveau sur la société entre la sécurisation professionnelle et la compétitivité des entreprises. Il
y a un autre modèle qui pense qu’il faut précariser les salariés pour rendre l’entreprise compétitive, je
pense tout le contraire, autrement dit je pense que la France a besoin d’un changement profond, qu’on
regarde les choses différemment et sur les sujets que vous posez, je crois qu’il y a des solutions nouvelles.
Patrick Poivre d’Arvor
Alors sur un sujet voisin justement puisqu’on parle de petits frères, de petites sœurs, il y a le témoignage
de Dalila, qui avait une question à vous poser. A condition qu’on lui donne le micro.
Dalila Brahimi, 36 ans, secrétaire commerciale.
Bonsoir madame Ségolène Royal. J’avais une question à vous poser concernant en fait les familles
monoparentales, à savoir que bon je prends mon cas. J’élève seule ma fille et, excusez-moi, je suis émue,
et je voudrais savoir ce que vous comptez mettre en place pour les familles monoparentales puisqu’il y en
a beaucoup plus aujourd'hui que des familles qui vivent en couple. A savoir les aides et les crèches.
Quand j’ai eu ma fille qui était très jeune, je ne pouvais pas aller chercher du travail donc les Assedic me
harcelaient pour trouver du travail, et je ne pouvais pas trouver du travail avec un bébé dans les bras, me
présenter à un entretien avec un bébé dans les bras et le problème c’était la crèche. Donc on sait
aujourd'hui que pour avoir une place en crèche, il faut inscrire son bébé avant même qu'il ne soit conçu et
ça, je ne trouve pas ça normal, et pourquoi pas donner la priorité en fait aux mamans qui sont célibataires
et qui élèvent seules leur enfant pour une place en crèche ?
Patrick Poivre d’Arvor
Il y avait le cas de votre fille et puis de votre mère aussi.
Dalila Brahimi
Le cas de ma mère, c’est pour la retraite aussi, donc ma maman a élevé, donc elle a eu 14 enfants et donc
elle a passé toute sa vie à élever ses enfants. Et aujourd'hui mon papa est décédé, et ma mère donc reçoit à
peu près un peu plus de 60 % de la pension de reversion. Est-ce que vous pensez faire une hausse de ce
pourcentage pour qu’elle puisse bénéficier de plus de ce qu’elle a, parce qu’elle a du mal à joindre les
deux bouts ?
Ségolène Royal
Alors je commence tout de suite par la deuxième partie de votre question, la revalorisation de la pension
de réversion suivra ce que je viens de dire, c'est-à-dire la revalorisation des petites retraites jusqu’à ce
qu’elles atteignent sur la durée des 5 ans du quinquennat, jusqu’à ce qu’elles atteignent le salaire
minimum, le SMIC. Donc nous revaloriserons et la première décision, je l’ai dit sera de 5 % tout de suite
et ensuite nous montrons en puissance et donc la pension de réversion fait partie de cette revalorisation
globale si elle se situe justement dans cette catégorie des petites retraites. Sur la première que stion, je
voudrais vous dire que je tiens beaucoup à la conciliation entre la vie familiale et la vie professionnelle.
Vous savez la France a beaucoup de difficultés en ce moment, mais elle a aussi des moyens de s’en sortir
et l’un des signes les plus optimistes de la situation de l’avenir, c’est pour cela que nous devons
reconstruire les choses et trouver d’autres façons de voir et d’agir, c’est que nous mettons au monde le
plus grand nombre d’enfants de tous les pays européens. Et ça c’est parce que les femmes font beaucoup
d’efforts pour concilier leur vie familiale et leur vie professionnelle et je veux les y aider. Quand j’étais
ministre de la Famille, je l’ai prouvé, puisque j’avais mis en place un plan de création de crèches, de 80
000 places en crèche, qui ont été ensuite malheureusement interrompues et dans le pacte présidentiel que
je propose, il y a la création d’un service public de la petite enfance pour les enfants de moins de 3 ans et
l’obligation scolaire à partir de 3 ans. Puisqu’on voit aujourd'hui malheureusement qu’avec la politique
actuelle, et la suppression d’un certain nombre d’enseignants, on voit remettre en cause la scolarisation à
l’école maternelle. Certains enfants de 3 ans aujourd'hui ne sont plus accueillis, d’autres enfants étaient
accueillis à partir de l’âge de 2 ans, ça dépend de la maturité de l’enfant, parfois c’est la crèche qui est
plus adaptée, parfois l’école maternelle. Et je pense qu’il faut mettre en place ce service public de la petite
enfance gratuit, qui sera désormais gratuit avec les collectivités territoriales et ça va nous permettre aussi
de créer des emplois dans tous ces métiers de l’aide à la personne, il y a des milliers d’emplois à créer qui
ne sont pas délocalisables. Et donc voici la réponse que je peux vous faire et je crois que c’est en effet très
important puisque nous avons à la fois un taux d’activité féminin élevé, une démographie élevée, et donc
il est normal de faire cet effort.
Patrick Poivre d’Arvor
Sur des questions assez proches, questions de santé notamment, beaucoup, beaucoup de questions. Il y a
une question de Henri-François.
Henri-François Vernhes, 50 ans, cadre supérieur de santé.
Bonsoir madame. Depuis 1983, l’encadrement des dépenses hospitalières a été une préoccupation de
l’ensemble des gouvernements. Malgré tout on constate aujourd'hui que l’hôpital est malade, que l’hôpital
est en crise. Alors les principaux dysfonctionnements sont globalement les insatisfactions de l’ensemble
du personnel toute catégorie confondue, et depuis peu une augmentation de l’insatisfaction des malades et
de leurs familles. Ils se plaignent particulièrement du manque de disponibilité des soignants à leur égard,
à leur chevet et également des délais d’hospitalisation et des délais de rendez- vous pour des consultations
qu’ils trouvent beaucoup trop longs. Donc en fonction de cela, j’aimerais vous interpeller sur une
question, quelle politique d’équilibre entre l’adaptation de l’offre de soin au besoin et la maîtrise des
dépenses de santé envisagez-vous ? Et à partir de quels moyens ? Merci.
Patrick Poivre d’Arvor
Je crois que Françoise avait à peu près ce type de question.
Françoise Dusuel, 52 ans, agent hospitalier.
Oui bonsoir madame. Justement ma question était, que pensez- vous faire pour le manque de personnel
dans les milieux hospitaliers ?
Ségolène Royal
Je pense que ce sont des questions très importantes là que vous posez également. Je crois que l’état de
santé d’un pays et la qualité des soins révèlent aussi l’état de civilisation d’un pays. Et en particulier je
crois que derrière votre question, il y a le problème plus crucial de l’égalité d’accès à la santé. Les gens
ont le sentiment, je le vois dans toutes les consultations que j’ai conduite, que cette égalité recule. Et donc
c’est une de mes préoccupations et en particulier en milieu rural où il n’y a plus les services de soins de
proximité, dans les quartiers populaires, où il n’y a plus de médecine de proximité et donc les citoyens
vont directement à l’hôpital. Je crois qu’il faut d’abord que la santé revienne vers les gens et c’est
pourquoi dans mon pacte présidentiel, j’ai proposé la création d’une nouvelle génération de dispensaires.
C’est-à-dire pour qu’on puisse accéder facilement aux premiers soins, à la santé au quotidien. Là où il n’y
a plus de médecin. Et donc pour rétablir en milieu rural et en milieu urbain, dans les quartiers où il n’y a
plus de médecin, l’égalité d’accès aux soins. En ce qui concerne les soins à l’hôpital, je sais puisque tous
les rapports le prouvent que les malades ont le sentiment d’une dégradation des soins. Que les personnels
aussi sont sous tension parce qu’il y a un manque évident de personnel et donc il va falloir remettre à
niveau les besoins en personnel dans l’hôpital public. Et pour remettre à niveau les besoins en personnel
dans l’hôpital public, c'est-à-dire identifier là où il y a des besoins de personnel, là où il faut refaire la
carte sanitaire, parce que tout ce travail de la carte sanitaire est en train d’être refait à l’échelle du
territoire, j’organiserais des états généraux de la santé, pour voir comment on peut compléter l’hôpital et
la médecine de proximité. Et enfin je m’élève vraiment très fortement contre la fermeture des hôpitaux en
milieu rural parce que la société française avance dans le grand âge et donc il y a des besoins médicaux
très importants pour nos anciens et je crois que les hôpitaux ruraux au lieu de fermer doivent se
transformer en lieu de soins de proximité pour que nos anciens puissent rester à domicile. Et donc cette
démarche aussi est plus économe en terme de santé. Et enfin j’ai proposé dans ce pacte présidentiel aussi
qu’il y ait une santé gratuite pour les jeunes, je pense que c’est par la prévention que nous ferons le plus
d’économie et en particulier de la prévention dans le milieu scolaire. Et là il y a un manque cruel
d’infirmière, de médecin scolaire qu’il faudra remettre dans le milieu scolaire parce que je crois que c’est
dans la prévention de même que dans la médecine du travail où on manque cruellement de médecin, qu’il
faudra remettre à niveau les effectifs. Pour cela, je crois qu’il faudra desserrer le numérus clausus des
études médicales parce je pense que la France ne forme pas assez de médecins, pour accompagner les
mutations que je viens d’expliquer, c'est-à-dire le rapprochement de la médecine vers les gens. Et je crois
que c’est dans cette médecine de proximité et de prévention que l’on fera à la fois des économies, et
qu’en même temps on pourra investir dans les hautes technologies médicales dans les hôpitaux pour que,
aussi, tous les Français puissent accéder à la haute technologie médicale, dans les CHU en particulier et
pas seulement quelques Français, que tout le monde puisse accéder au meilleur de la santé.
Patrick Poivre d’Arvor
Bernard avait deux questions spécifiques à vous poser.
Bernard
Bonsoir madame Royal.
Ségolène Royal
Bonsoir.
Patrick Poivre d’Arvor
Pardon, c’était Bernard qui est là.
Bernard Bontron, 60 ans, Invalide.
Bonsoir madame, si vous voulez j’ai deux questions. La première qui est une question qui rejoint un petit
peu celle des autres, une question de gros sous, à savoir que vous savez que dans les départements, vous
avez une commission qui s’appelle la COTOREP, donc qui décide du degré du handicap, et donc qui
décide de l’allocation adulte handicapé. Dans les textes de la COTOREP, il est dit que pour percevoir
l’allocation d’adulte handicapé, il faut que la personne soit inactive pendant un an. Ce que j’aimerais
savoir c’est d’abord comment cette personne là, si elle n’a déjà pas les moyens de vivre, comment elle fait
pour survivre pendant un an ? Ensuite le deuxième volet de ma question, c’est vous voyez mon état, donc
je suis atteint de sclérose en plaques depuis 34 ans, et donc quels sont vos projets au sujet de la recherche
médicale sur les maladies neurodégénératives, style sclérose en plaques, Alzheimer, Parkinson, sclérose
amyotrophique, et polyarthrite rhumatoïde ? Merci.
Ségolène Royal
D’abord je voudrais saluer votre courage d’être là, merci monsieur de venir jusqu’ici témoigner et prendre
la parole sur un problème extrêmement difficile et injuste. Vous avez raison l’AH et les COTOREP ne
prennent pas suffisamment en compte les maladies dites évolutives et cette question là sera réglée. Je
vous le dis vraiment très très nettement. Il y a aussi beaucoup de besoins, vous venez de l’évoquer sur la
question de la recherche, sur toutes ces maladies. La recherche a beaucoup reculé ces derniers temps dans
l’ensemble des secteurs y compris le secteur de la santé, là aussi je veux remettre à niveau, je l’ai dit,
j’augmenterais de 10 % par an les efforts de recherche et je crois que sur toutes ces questions là, l’Europe
aura quelque chose à faire. Vous savez on parle beaucoup de remettre l’Europe debout et de la faire
avancer et moi ce qui me choque, c’est qu’aujourd'hui chaque pays cherche dans son coin si j’ose dire,
alors que nous sommes tous confrontés à ces mêmes difficultés, à ces besoins considérables de recherche.
Et je veux relancer, je veux lancer tout simplement même, puisqu’elle n’existe pas encore suffisamment
l’Europe de la santé, et l’Europe de la recherche. Mais je voudrais dire aussi parce que j’étais ministre
vous le savez, chargée des personnes en situation de handicap, qu’il faut changer le regard de la société
sur le handicap et moi je suis très choquée lorsque l’on regarde le nombre de personnes en situation de
handicap, ceux qui souffrent comme vous d’une maladie, ceux qui ont été victimes d’accident de la route,
les jeunes, beaucoup de jeunes handicapés que l’on ne vo it pas dans la société, je veux que l’on puisse
voir les personnes en situation de handicap dans la société, qu’ils osent venir vivre au milieu de tous et en
particulier à l’école. J’ai créé le plan Handiscol quand j’étais ministre de l’enseignement scolaire et je suis
choquée de voir aujourd'hui que les moyens ont été supprimés et qu’aujourd'hui les enfants handicapés
restent à la porte des écoles. Et je ferais de la question du handicap parce que c’est une question de
citoyenneté, de progrès pour la société, toute entière… je vais vous raconter une petite anecdote, vous
savez il y a quelques années quand on entrait dans une pièce et qu’on ne voyait que des hommes, on disait
c’est quand même bizarre, il n’y a que des hommes et petit à petit la parité a fait un progrès, quand on
rentre dans une salle et qu’il n’y a que des hommes, on se dit c’est quand même bizarre. Eh bien on en est
encore là aujourd'hui en ce qui concerne les personnes en situation de handicap. Dans une réunion où il y
a une vingtaine de personnes, il devrait y avoir au moins une ou deux personnes en situation de handicap.
Si ce n’est pas le cas, ça veut dire qu’elles subissent une discrimination. Et là aussi dans les pays du Nord
de l’Europe qui sont très en avance, vous n’avez pas une seule réunion de 20 personnes parce qu’ils ont
pris ce critère là en se disant s’il n’y a pas de personne en situation de handicap autour de la table, c’est
qu’il y a un problème. Elles n’ont pas osé venir, elles ont été discriminées, elles sont discriminées dans
l’emploi et je veux que les entreprises et que les services publics qui souvent ne le font pas, respectent le
quota de 6 % de personnes en situation de handicap. Donc il y a un travail considérable qui nous concerne
tous, qui concerne 6 millions de personnes en France et monsieur, je voudrais vous dire merci d’être là et
par votre témoignage de revendiquer d’une certaine façon aussi la visibilité des personnes qui ne sont pas
debout, mais justement.
Bernard Bontron
C’est justement un petit peu la raison de mon acharnement à être ici en fauteuil parce qu’effectivement
dans une émission comme celle-ci comme dans des émissions de jeux, ou de divertissements, on n’a pas
l’occasion jamais de voir une personne handicapée, qu’elle soit en fauteuil ou pas et donc je pense que
c’est quand même important que cette discrimination comme vous le dites n’existe plus parce
qu’effectivement quand je vais dans les écoles pour parler de la maladie, les enfants eux sont très naturels,
pour eux quelqu’un de malade ou quelqu’un en fauteuil, c’est quelqu’un de normal, le regard des grandes
personnes, des gens dits valides malheureusement ce n’est pas tout à fait la même chose. Il y a des choses
à reprendre un petit peu, c’est ce que m’a dit un de mes amis américains qui est mort, il avait 93 ans, de
dire que la normalité, la normalité c’est le handicap.
Ségolène Royal
Je ne peux pas, non, non, ça va aller ?
Bernard Bontron
Que la normalité, c’est le handicap et si on arrive à faire en sorte que l’accessibilité soit accordée aux
personnes handicapées, tout le monde pourra en profiter et ça je crois que c’est quelque chose qu’il
faudrait arriver à faire passer dans le reste des gens et voilà.
Ségolène Royal
Et dans toute la société.
Bernard Bontron
C’est un petit peu ma question. Exactement, merci.
Patrick Poivre d’Arvor
Merci beaucoup Bernard pour votre témoignage. Il y a ici d’autres personnes qui sont… dans leur chair,
ou par leurs enfants, par exemple le témoignage de François, et puis je voudrais que Sandrine…
Ségolène Royal
Je peux dire un petit mot quand même. Vous voyez monsieur c’est qu’il n’y a pas d’accessibilité, vous
n’êtes pas placé comme les autres et ça ce n’est pas normal, n’est-ce pas monsieur Patrick Poivre d’Arvor,
la prochaine fois.
Patrick Poivre d’Arvor
On en a pris bien soin.
Ségolène Royal
C’est vrai partout, c’est vrai à l’Assemblée nationale où il n’y a pas de place d’accessibilité, donc vous
voyez je crois que c’est toute la société qu’il faut remettre d’aplomb par rapport à ce problème là. merci.
Patrick Poivre d’Arvor
Deux questions qui sont en fait deux témoignages, d’ailleurs, celle de François et puis celle de Sandrine
aussi après.
François Hebert, 67 ans, Artisan à la retraite.
Madame Royal bonsoir. Je vous remercie dans votre 9ème amendement de prévoir 5 % d’augmentation
pour les handicapés, j’ai une fille qui est sourde et qui souffre de ne pas avoir accès à la culture. Il n’y a
pas un musée ou un établissement culturel qui ait un traducteur gestuel. En plus, ma fille souffre de ne pas
pouvoir avoir accès aux informations parce qu’il n’y a pas de traduction, il n’y a pas de sous titre, ni aux
informations, ni aux débats qu’ils soient techniques, politiques, scientifiques. Pardon excusez- moi, voilà
qu’est-ce que vous pouvez faire, pouvez-vous avec votre prochain ministre du handicap regarder ce sujet,
le sujet des sourds dont on parle peu ? Et pourtant c’est des électeurs qui ne votent pas parce qu’ils sont
découragés.
Patrick Poivre d’Arvor
Et Sandrine ?
Sandrine Rousseau, 24 ans, étudiante en licence de droit
Bonsoir madame Royal, donc moi je souhaiterais vous parler des hôpitaux psychiatriques précisément
puisque donc comme vous devez bien le savoir, il y a beaucoup de jeunes qui se droguent aujourd'hui . Et
donc moi j’ai ma sœur, ma petite sœur qui a 22 ans qui a pris des drogues, donc pour les citer du
cannabis, des extasies et qui aujourd'hui n’a plus du tout de fonctions motrices on va dire, dans le
cerveau, qui est quasiment devenue un peu, une loque si je peux me permettre. Donc on l’a fait à huit
reprises, fait enfermer entre guillemets dans l’hôpital psychiatrique de Dijon qui au bout de 15 jours, l’a
bourré de cachetons, la laisse sortir pour qu’elle devienne SDF à Marseille, ou errer dans la rue. Enfin elle
ne fait rien de spécial de sa vie, elle a 22 ans, elle est incapable de travailler. Et donc tout ce qu’on nous
répond à l’hôpital psychiatrique, c’est qu’elle est majeure et qu’on ne peut rien faire. Qu’est-ce que vous
comptez faire donc pour cet hôpital qui est censé s’occuper des gens comme ça ? Merci.
Ségolène Royal
Donc voilà deux questions de société aussi très très importantes, sur la question des malentendants,
d’ailleurs j’avais demandé que ce soir l’émission soit sous titrée, parce que justement j’ai pensé aux
questions des malentendants et c’est vrai aussi que les équipements sont insuffisants. Dans toutes mes
réunions publiques, il y a quelqu’un qui pratique la langue des signes, parce que je veux que tout le
monde puisse accéder au débat public. Mais vous posez plus largement la question des équipements
culturels, c’est tellement vrai. La question de l’école aussi et dans le contrat que je ferais avec l’école et
que j’ai prévu dans le pacte présidentiel, c’est aussi justement les équipements, surtout que les
technologies ont beaucoup évolué, se sont beaucoup améliorés, donc il n’y a même plus l’excuse du coût
de l’équipement. Et c’est vrai que tout les équipements culturels, tous les lieux publics, tous les
équipements scolaires, tous les lieux politiques aussi doivent maintenant penser aux personnes qui ont des
difficultés d’audition et merci aussi de donner ce témoignage personnel qui nous pousse à bouger et à
bouger vite. Sur la question de la psychiatrie, je connais la question de la pénurie du nombre de
psychiatres. D’abord là aussi, ça fait des années qu’à l’issue des études de médecine de moins en moins
d’élèves choisissent cette spécialité là, qu’on en manque cruellement, tous les territoires le savent, tous les
départements le savent et là aussi je pense qu’au regard de ce que je disais tout à l’heure sur la
redéfinition des études de médecine et sur les critères de sélection dans les premières années de médecine,
parce qu’on voit que des jeunes qui se destinent à des spécialités comme la psychiatrie sont sélectio nnés
très durement par des matières mathématique et des matières scientifiques lourdes au début des études de
médecine, et il y a eu des enquêtes récentes qui ont montré que des vocations sont ainsi stoppées nettes,
parce que les études de médecine ont besoin d’être rénovées et je suis très consciente de cette pénurie
considérable. Ce qui est mieux aussi c’est qu’il y ait un accompagnement préventif, ce qui est dramatique
c’est qu’un jeune puisse subir de tel dégât suite à la toxicomanie et moi je veux de l’encadrement
beaucoup plus serré dans les établissements scolaires, des accompagnements de psychothérapeutes, avant
d’aller dans la psychiatrie, il y a d’autres métiers en amont pour aider les jeunes à reprendre confiance en
eux, les raccrocher à quelque chose de positif, les empêcher de sombrer, épauler les parents en difficulté.
Et je pense qu’il y a un chantier considérable sur la question de l’adolescence. Vous savez, si on épaule
les parents au bon moment, si on repère vite un élève ou un jeune qui commence à avoir des difficultés, si
on intervient tout de suite avant qu’il soit trop tard, je pense qu’on évitera de plus en plus des itinéraires
dramatiques comme celui que vous évoquez à l’instant.
Patrick Poivre d’Arvor
Ségolène Royal, il y avait une question de Sauveur, non pas forcément en son propre nom mais au nom
d’un de ses amis.
Sauveur Fiore , 65 ans, vendeur radio tele hi- fi.
Oui, bonsoir madame Royal. Permettez- moi de vous poser cette question s’il vous plait, j’ai un ami qui a
42 ans, qui a un cancer de l’œsophage, qui aujourd'hui a trois ans, est en rémission. Il a envie de reprendre
une activité. A ce jour toutes les portes sont fermées. Ce monsieur pense à sa retraite et quand on est
malade et qu’on a des gros problèmes de santé, comme moi j’ai eu aussi, on ne pense pas à la maladie. Je
voudrais savoir de quelle façon vous pouvez aider cette personne que je connais, mais c’est un anonyme
parmi tant d’autres, parce qu’il y a plusieurs milliers que nous ne connaissons pas. Pourquoi fermonsnous les portes à ces gens là ? Pourquoi nous les mettons en dehors de la société quand ils demandent
quelque chose, de vivre comme tout le monde et de ne pas être accrochés à la société ? Est- il possible la
France va réagir et leur ouvrir les portes des droits qu’ils ont comme tout à chacun parce que chacun de
nous du jour au lendemain, on peut avoir le même problème, la maladie peut toucher tout le monde du
jour au lendemain. Il n’y a pas de discrimination là dessus. Je vous remercie de m’avoir écouté. Bonsoir
madame.
Ségolène Royal
Merci pour ce cri du cœur qui est au fond la revendication de vivre comme tout le monde même lorsqu’on
a eu un accident de la vie. Et moi je souhaite que ceux qui vivent comme ça des épreuves personnelles,
puissent par exemple plus facilement accéder à la formation professionnelle, c'est-à-dire pour se sortir
d’une épreuve comme celle-ci, pour se raccrocher à quelque chose de positif, on peut très bien imaginer,
je le fais en tout cas dans ma région, la région que je préside, puisque nous avons la compétence de la
formation professionnelle, eh bien nous essayons de repérer justement les gens qui ont le plus soufferts,
qui sont les plus éloignés du marché de l’emploi, pour leur remettre le pied dans la vie en leur redonnant
confiance en eux par des formations professionnelles qu’ils choisissent. Et puis je pense que nous
pouvons aussi imaginer des emplois d’intérêt général, parce que quand on a beaucoup souffert, soi- même,
on a aussi une expérience finalement quand on a surmonté ses difficultés, qu’on peut mettre au service
des autres dans les associations, dans un certain nombre d’activités, et c’est pour ça aussi que je veux
créer un certain nombre d’emplois d’intérêt général qui permettront à ceux qui ont une expérience
personnelle dans leur vie humaine, dans les épreuves qu’ils ont surmonté, de se mettre ensuite au service
des autres, dans des emplois rémunérés qui aident ensuite les autres à s’en sortir en les encadrant dans des
associations.
Patrick Poivre d’Arvor
J’aimerais que l’on puisse clore ce chapitre avec une question que voulait poser Daniel.
Daniel Hennick, 45 ans,Métérologue.
Bonsoir madame Royal. J’ai été bouleversé il y a quelques années par le décès de Vincent Humbert qui
aux vues du refus de l’institution a vu une mère tuer son propre fils. Pensez- vous légiférer sur un droit à
aider les personnes demandantes de mourir dans la dignité ?
Ségolène Royal
Oui. Oui je pense qu’il faut avoir le courage d’ouvrir un débat sur cette question là. J’ai moi même été
confrontée à ce drame terrible où l’un de mes meilleurs amis est décédé dans des souffrances
épouvantables, s’accrochait à moi, à ses amis, en nous demandant de l’aider, ce qu’on ne pouvait pas faire
bien évidemment. Et donc je crois que dans le respect des personnes, il faut faire ce qu’on fait d’autres
pays européens, ouvrir le débat et mettre en place une législation qui permette d’apaiser les souffrances
les plus intolérables. Et ça se fera en toute démocratie, en toute transparence avec des débats avec les
associations de malades, des associations des médecins bien évidemment, des associations d’usagers de
l’hôpital donc l’ensemble des parties prenantes autour de ce problème là, sera conduit à venir débattre et
le Parlement sera saisi d’un texte de loi.
Patrick Poivre d’Arvor
Ségolène Royal, il y a eu beaucoup, beaucoup de questions également autour du SMIC et de votre
proposition du SMIC à 1 500 euros, alors je voudrais peut-être qu’on interroge Anne-Laure et puis son
voisin, je crois qu’ils ont tous les deux des questions à poser. Anne-Laure et Laurent qui est à côté d’elle.
Anne-Laure Couchoux, 43 ans, technicienne logistique.
Bonsoir madame. Donc vous avez fait une proposition du SMIC à 1 500 euros, et je voudrais savoir déjà
comment vous allez le financer parce que bon il y a beaucoup de salaires qui sont un petit peu au dessus
et donc ces salaires vont devenir, être payé au SMIC alors que souvent ils sont occupés par des gens
qualifiés. Et donc voilà je voulais savoir comment vous comptez financer cette mise en place. Et moi ce
que je crains, c’est que ça crée de l’inflation, parce que bon, en fait ce que les Français ont besoin, c’est
un pouvoir d’achat. Que le SMIC soit à 1 000 euros, 1 500 euros, plus ou moins, en fait ce qui est
important chez les Français, c’est le pouvoir d’achat. Alors qu’est-ce que vous comptez mettre en place
pour que le pouvoir d’achat des Français soit meilleur et qu’il ne continue pas à se dégrader ?
Patrick Poivre d’Arvor
Laurent peut-être pendant que vous y êtes.
Laurent Frenkel, 41 ans, Chauffeur de VIP.
Bonsoir madame Royal. Donc ma question toujours pareil par rapport au SMIC. Le SMIC à 1 500 euros
évidemment on parle de 1 500 euros brut, donc ça risque d’augmenter un petit peu, mais ce qui est plus
important, toujours par rapport au pouvoir d’achat et également par rapport à l’emploi, je pense que c’est
intéressant aussi de réduire les charges patronales, ainsi que les charges salariales. Je pense que ça c’est
quelque chose d’intéressant. J’aimerais connaître votre avis sur la question. Merci beaucoup
Patrick Poivre d’Arvor
Et puis pendant que j’y suis Anna peut-être aussi.
Anna Starzec, 55 ans Ingénieur d’études en faculté de science.
Bonsoir madame Royal. Je travaille dans la recherche à l’université et l’augmentation du SMIC à 1 500
euros, sera une augmentation pour beaucoup de mes collègues, je suis vraiment ravie. Il y en aura d’autres
comme il a dit Laurent qui vont se retrouver presque au chômage et moi- même ingénieur en biologie, j’ai
25 ans d’expériences dans la recherche, ma formation est Bac plus 10 et mon salaire maintenant est de 1
900 euros brut. Donc bon c’est vrai que c’est plus que le SMIC, mais c’est une situation qui n’incite
sûrement pas les jeunes de faire des longues études. Et d’autre part s’ils font de longues études de
doctorat, ils partent à l’étranger. Qu’est-ce qu’on peut faire pour garder ces jeunes cerveaux en France ?
Ségolène Royal
Ce potentiel, ces cerveaux, cette matière grise. Alors écoutez en tout cas, allez- y.
Anna Starzec
Est-ce que vous pensez que vous comptez donc revaloriser d’autres salaires à l’université ?
Ségolène Royal
Alors d’abord je voudrais vous dire que vous avez tous les trois très bien posé cette question parce que
vous avez évoqué toutes les facettes de la question de l’augmentation des bas salaires. Je vais être très
précise sur cette question. Dans mon projet il y a l’augmentation en effet du SMIC et des bas salaires, je
vais y revenir à 1 500 euros brut en cinq ans. C’est un signal fort que je veux donner. Aujourd'hui le
SMIC, je l’ai dit tout à l’heure est à 984 euros net, c’est quand même très bas, le salaire minimum est l’un
des plus bas d’Europe notamment par rapport aux pays de l’Europe du Nord. C’est en France que les
inégalités salariales sont les plus fortes et donc quand on me dit c’est trop d’augmenter de 5 % le SMIC
tous les ans, je dis écoutez qui peut vivre avec 984 euros ? Donc je veux que le travail paie et je veux que
les…
Patrick Poivre d’Arvor
Quand vous parlez de 1 500 euros, c’est 1 500 brut parce que les gens posent beaucoup la question, en
cinq ans et c’est brut.
Ségolène Royal
En cinq ans, ça veut dire 5 % tout de suite, c’est 50 euros tout de suite. Mais vous avez très bien posé la
question tout à l’heure, il y a aujourd'hui 4 millions de personnes au SMIC, mais il y a un salarié sur deux
qui gagne aujourd'hui moins de 1 500 euros. Donc ça veut dire que beaucoup de gens tout d’un coup se
sont dits, mais si le SMIC passe à 1 500 euros, certains ont cru que c’était tout de suite, j’aimerais bien,
mais c’est dans 5 ans, il faut aussi être réaliste, je veux promettre que ce que je peux tenir, donc tous ceux
qui aujourd'hui gagnent 1 500 euros ou moins, se sont dits, mais alors nous allons devenir smicards. Et
moi je ne veux pas d’écrasement de la hiérarchie des salaires, c’est pour cela que j’ai dit que
l’augmentation du SMIC serait discutée au terme de la conférence salariale, que je réunirais dès mon
élection avec les partenaires sociaux, les représentants des salariés, et les représentants des employeurs,
que je rencontre d’ailleurs en ce moment régulièrement tous, je rencontre les organisations patronales, les
organisations de salariés, pour préparer cette conférence salariale. Et donc dans cette conférence salariale,
on va discuter de la façon dont on maintient la hiérarchie des salaires. Ca veut dire que les salaires qui
sont un petit peu au dessus du SMIC vont également augmenter etc… Se pose ensuite la question des
entreprises, est-ce que les entreprises, certaines d’entre elles qui sont serrées, disons, qui sont un peu en
difficulté, qui sont confrontées à la compétition internationale, vont pouvoir absorber la hausse des bas
salaires ? ma réponse est très précise, ce que je propose à la France aujourd'hui c’est un système gagnant,
gagnant, c'est-à-dire je veux aider les entreprises qui se battent, qui conquièrent des marchés à l’extérieur,
qui créent de l’innovation, qui donnent de la formation professionnelle et donc il y aura un pacte avec ces
entreprises, dans le cadre de cette conférence salaria le. Et les exonérations diverses, exonérations de
charges, les avantages fiscaux, seront donnés en fonction de la masse salariale qu’il y a dans l’entreprise.
Et je modulerais l’impôt sur les sociétés en fonction aussi de la façon dont les entreprises réinvestissent
leur bénéfice. Et celles qui vont réinvestir leurs bénéfices en innovation, en recherche, en formation
professionnelle des salariés seront avantagées par rapport à celles qui distribuent davantage aux
actionnaires. Et ce que je veux faire comprendre ici, c’est que je pense que la France peut redémarrer sa
machine économique, et c’est dans un système de confiance, je ne veux plus que l’on oppose les
entreprises aux salariés. Je veux réconcilier la France avec ses entreprises. ET je crois que c’est aussi par
la qualité du dialogue social, par la sécurisation des salariés, par l’investissement dans la formation
professionnelle et en particulier des salariés qui sont sur le bas de l’échelle des revenus, doivent pouvoir
bénéficier de formation professionnelle. Et donc leur salaire augmentera et donc c’est un plus aussi pour
l’entreprise. Alors il y a des entreprises quand même qui pourraient payer davantage leurs salariés, qui ne
sont pas confrontées à la concurrence internationale, la grande distribution par exemple qui paie très mal
ses caissières, ou qui fait du chômage partiel, ça c’est inadmissible. Donc il y a un message global aux
entreprises qui peuvent quand même revaloriser les bas salaires, elles doivent le faire. Les entreprises qui
sont sur des marchés tendus, elles doivent pouvoir le faire aussi et l’Etat va les y aider. L’Etat va les y
aider en les incitant à innover, à former et à conquérir des marchés.
Patrick Poivre d’Arvor
Ségolène Royal, vous avez une question là haut et ensuite Marjorie.
Stéphane Boussardon, 34 ans, Employé de banque
Bonsoir madame Royal, une petite question, pourquoi attendre cinq ans pour revaloriser les salaires
quand on sait que la plupart de la population est atteinte par les bas salaires ?
Ségolène Royal
Oui, mais j’ai dit que si nous pouvons aller plus vite, nous irons plus vite. Il y a un objectif à 1 500 euros
à condition qu’il ne soit pas rattrapé par la hausse des prix. Vous l’avez dit aussi très judicieusement tout
à l’heure et c’est pour ça que mon système est global et qu’avec la revalorisation des bas salaires, je
réforme aussi l’indice des prix parce que je ne veux pas qu’une hausse des bas salaires soit
immédiatement mangé par une hausse des prix qui serait mal calculée. Donc les bas salaires et le SMIC
seront indexés sur un nouvel indice des prix qui mesurent bien la véritable augmentation des prix, et
notamment de l’alimentation, de l’énergie, du chauffage, des déplacements, etc. Mais si nous pouvons
aller plus vite, nous irons plus vite. Et vous voyez, je pense aujourd'hui que la France souffre de mesures
uniformes. On a donné des exonérations à tout le monde, que ce soit des entreprises qui gagnent beaucoup
d’argents ou celles qui ont des difficultés, que ce soit les entreprises qui ne sont pas confrontées à la
concurrence internationale comme les grandes surfaces ou les banques que j’évoquais tout à l’heure et
celles qui au contraire doivent se battre sur le marché et que nous devons aider. Parce que je voudrais
juste rajouter cela, vous savez aujourd'hui il y a un déficit du commerce extérieur de 30 milliards d’euros.
30 Milliards d’euros, c’est l’équivalent d’un million d’emplois, et donc si la France se bat avec son
énergie, avec ses chercheurs, qui doivent absolument rester ici et donc être correctement payés pour ne
pas partir aux Etats-Unis. Il y a 200 000 jeunes chercheurs européens qui sont aujourd'hui aux Etats-Unis,
c’est un gâchis insupportable, donc je veux que les chercheurs soient là. Et c’est pour cela que j’ai
présenté aussi un système d’emploi tremplin pour les petites entreprises, c'est-à-dire et je le fais aussi
dans ma région, pendant six mois, nous payerons le salaire pendant six mois d’un jeune diplômé, d’un
jeune ingénieur, d’un jeune chercheur et on le met à disposition d’une petite entreprise qui n’a pas les
moyens dans un premier temps de recruter un cadre, un jeune cadre bien formé. Et donc ce jeune qui
arrive dans l’entreprise avec ses diplômes de qualité a sa chance, peut faire ses preuves, l’entreprise peut
développer ses marchés, développer ses produits et donc ensuite c’est le cercle vertueux, l’emploi appelle
l’emploi. C’est pour ça que je suis tellement battante sur la question de l’emploi des jeunes parce que je
pense que si les entreprises tendent la main aux jeunes, si la société toute entière se dit on fait une place
pour les jeunes, c’est le système tout entier qui se redresse, parce que plus de jeunes au travail, c’est des
cotisations qui permettront de payer les retraites, donc c’est le système qui se remet debout et qui se
rééquilibre.
Patrick Poivre d’Arvor
Alors Marjorie s’est levée depuis un petit bout de temps.
Ségolène Royal
Pardon Marjorie, j’ai été un peu longue.
Marjorie Cabanis, 32 ans, ingénieur d’affaires
Bonjour madame Royal. Donc moi j’avais une que stion plus générale en fait, parmi toutes vos
propositions, comment vous comptez financer, qui va payer sans creuser davantage la dette ?
Ségolène Royal
Qui va payer…
Patrick Poivre d’Arvor
Lionel avait une question et madame, toujours sur ces sujets là, si vous voulez. Allez-y.
Christine Egler, 63 ans, enseignante à la retraite.
Je voudrais poser une question sur l’économie sociale qui est aussi un volet très important, alors je
voulais vous dire un constat, à aucun moment dans les discours et les programmes, on a mené une
réflexion sur l’économie sociale, et solidaire et de ses composantes. A savoir les associations, les
coopératives, les mutuelles et les structures qui luttent contre l’exclusion. Or à mon avis ces structures
sont quand même une voie originale, une voie citoyenne créatrice de liens sociaux et qui génèrent de
l’emploi. Par exemple en Alsace d’où je viens, ça représente 68 000 emplois, plus de 68 000 emplois.
Alors ma question à ce sujet, que proposez-vous pour renforcer, soutenir, valoriser le bénévolat associatif
? Avez-vous l’intention de vous appuyer sur la richesse que sont les associations complémentaires de
l’école, qui luttent contre l’exclusion sociale et l’échec scolaire ? Et plus généralement quelle réflexion
menez-vous dans votre partie sur les différentes composantes de l’économie sociale qui sont regroupées
dans les CRES. Par exemple est-ce que les CRES auront bientôt une représentativité dans tous les lieux
de concertations est-ce qu’ils auront des moyens financiers pérennes ? Et comment allez- vous résoudre
les problèmes des différentes économies sociales avec l’Europe, par rapport à l’Europe ?
Patrick Poivre d’Arvor
Je crois qu’il y avait une question de Lionel qui allait dans le sens…
Lionel Fidalgo, 21 ans, étudiant master de finances.
Bonsoir madame Royal.
Ségolène Royal
Bonsoir.
Lionel Fidalgo
Donc moi pour ma part je suis étudiant, je vais rentrer dans la vie active d’ici un an et en tant que futur
contribuable, je me pose une question simple, c’est qu’aujourd'hui dans votre pacte présidentiel vous
mettez en avant plusieurs mesures sociales qui paraissent relativement onéreuses. Et aujourd'hui la
question simple que je me pose, c’est qui va payer. Est-ce que vous allez encore augmenter les impôts et
faire payer encore plus les Français, les entreprises ou allez- vous aggraver la dette de l’Etat et rendre la
situation encore plus délicate qu’elle ne l’est aujourd'hui ?
Ségolène Royal
Bonne question qui rejoint la votre.
Patrick Poivre d’Arvor
Et puis monsieur aussi, à droite comme ça on aura tout le monde.
Grégoire Poirel, 33 ans, Cheminot
Bonsoir madame Royal.
Ségolène Royal
Bonsoir.
Grégoire Poirel
J’ai remarqué depuis pas mal d’années quand même déjà, petit à petit on remplace des hommes par des
machines, autour de moi j’ai l’exemple, par exemple des stations services, dans le temps il y avait un
pompiste, maintenant on le remplace par un automate. Dans ma propre société, j’ai pu lire dans un journal
interne, la semaine dernière que 22 % des billets de train sont vendus par le biais d’Internet. On dispose
aussi également d’automates pour vendre les billets. A aucun moment je suis contre le progrès, je trouve
ça génial on peut acheter son billet de train à minuit chez soi le soir à la dernière minute. Maintenant je
sais que ces automates paient la taxe professionnelle, en revanche ils ne cotisent pas, enfin ils ne paient
pas les cotisations sociales.
Ségolène Royal
Oui.
Patrick Poivre d’Arvor
Alors à ces deux questions, essentiellement sur le financement du programme…
Ségolène Royal
Je vais peut-être commencer par celle-ci parce que là j’ai pris un engagement extrêmement clair, vous
êtes tellement vrai, on est dans un système où le progrès technologique détruit l’emploi et donc
paradoxalement, c’est le capital humain qui est à l’origine des solidarités et des cotisations etc, qui se
trouvent du coup pénalisé lorsqu’il y a un progrès technologique. Et pourtant il ne faut pas empêcher le
progrès technologique qui lui même est créateur d’emplois, donc là aussi ce qui est très important c’est de
faire des cercles vertueux et en même temps je vais être très brève et très nette là dessus. Nous ferons, je
ferais une réforme de différentes cotisations qui garantiront que le travail est moins taxé que le capital. Et
je pense que c’est comme cela qu’une bonne fois pour toute nous pourrons faire en sorte que ce soit les
entreprises de main d’œuvre qui ne soient pas pénalisées par rapport aux entreprises qui remplacent
effectivement les hommes par les machines.
Grégoire Poirel
Merci de la part de tous les travailleurs.
Ségolène Royal
Pardon.
Grégoire Poirel
Merci de la part de tous les travailleurs.
Ségolène Royal
Oui, je crois que c’est quelque chose de très important et là aussi ce qui est très important c’est que cette
démarche là soit faite au niveau européen. Et j’y reviendrais peut-être tout à l’heure, mais dans la façon
dont nous devons faire progresser l’Europe sociale, il y a des principes comme ça qui sont presque du bon
sens finalement, c'est-à-dire on remet en place des fondamentaux qui correspondent au progrès social, au
progrès humain, à la façon d’avancer dans une société. Et donc merci d’avoir posé cette question.
Patrick Poivre d’Arvor
Alors sur le financement maintenant.
Ségolène Royal
Alors le financement, comment on paie, c’est une très bonne question et d’ailleurs vous aurez remarqué
que j’ai commencé mon pacte présidentiel, c’est assez rare en parlant de la dette, en parlant des différents
déficits, aujourd'hui il y a une dette de 18 000 euros par Français, le service de la dette, le coût de la dette
est le deuxième budget de la nation, et c’est vrai que c’est très angoissant cette crise de gestion. Alors
comment est-ce qu’on va payer les avancées sociales qui sont en même temps, vous l’avez dit aussi
indispensables, sur la santé, sur les retraites, sur les bas salaires. La cohérence du projet que je mets en
place, c’est que chaque mesure prise, chaque droit nouveau entraîne aussi des devoirs nouveaux ou une
dynamique économique nouvelle. Quand j’augmente les bas salaires, cela participe aussi de la relance de
la croissance économique par la consommation. Quand on met en place de l’investissement sur la
formation professionnelle, on rend les salariés plus efficaces et donc les entreprises plus compétitives, et
la clé du financement, c’est la relance de la croissance économique. A partir de, comment on relance la
croissance économique ? On fait comme on fait les pays du Nord de l’Europe, il n’y a aucune raison que
la France qui a les mêmes structures que la Suède ou que le Danemark, tous les pays du Nord de
l’Europe, n’arrive… ne parvienne pas à surmonter son taux de chômage, à remettre les jeunes au travail, à
faire en sorte que le déficit extérieur soit moins élevé, je l’ai dit tout à l’heure, 30 milliards d’euros de
déficit, c’est un million d’emplois, donc si on règle cette question là en relançant la machine
économique… Et moi je pense que je suis la mieux à même de relancer la machine économique, pourquoi
? Parce que je crois que c’est en faisant aussi de la valeur ajoutée sociale, vous savez le développement
économique, il faut le voir différemment, il y a l’efficacité économique de l’entreprise, il y a l’efficacité
sociale de l’entreprise et tous les pays qui ont investi dans la formation professionnelle dans le dialogue
social, pour empêcher les grèves dures, pour empêcher les licenciements injustes, pour que les salariés
aient le sentiment d’être correctement traités, pour que les profits soient correctement rétablis, ça
consolide aussi l’entreprise. Et paradoxalement c’est là dans les pays comme la Suède où le taux de
syndicalisation est le plus élevé qu’il n’y a quasiment pas de grève, que les salariés arrivent à changer
d’emploi sans drame et qu’en même temps les bas salaires sont les plus élevés. Et donc c’est possible par
un effort massif dans la formation, dans l’innovation et dans ce que j’appelle la Sécurité sociale
professionnelle. Je veux que les salariés puissent changer d’emploi sans passer par la case chômage parce
que ça sécurise les entreprises qui à un moment ont des difficultés, doivent affronter la concurrence
internationale, donc doivent avoir de l’agilité, de l’adaptation, et donc si elles ont peur de licencier, elles
auront peur d’embaucher. Moi, je veux que les entreprises n’aient plus peur d’embaucher. Comment ? En
leur disant que si à un moment elles ont des difficultés parce qu’elles perdent un marché, parce qu’il y a
une compétition féroce, à ce moment là les salariés pourront se retirer de l’entreprise mais garder leur
rémunération avec une sécurité sociale professionnelle, avec une dignité préservée, pourront se former
pour un autre métier, pourront attendre provisoirement que l’entreprise retrouve son marché. Et donc tout
le monde est sécurisé, les salariés sont sécurisés parce qu’ils sont correctement payés et ils sont bien
considérés. L’entreprise est sécurisée parce qu’elle sait que si elle en a besoin, elle pourra s’adapter
rapidement et que l’Etat va l’aider sur l’innovation et sur la recherche. Et donc je pense que la France a
les moyens, a les talents, a le potentiel, a les entreprises dynamiques, a les jeunes bien formés pour
pouvoir réussir cette mutation qui est très importante.
Patrick Poivre d’Arvor
Alors il y a beaucoup de questions qui se posent également sur les PME, et les toutes petites entreprises
même, il y a des questions de Sylvie je crois qui va la poser, d’Antoine, et de Frédéric…
Sylvie Habib, 45 ans, chef d’entreprise.
Oui bonjour madame Royal, donc moi je suis effectivement chef d’une petite PME, une TPE même donc
moins de dix salariés et nous sommes en France 1 500 000 entreprises PME qui employons 84 % des
salariés du secteur privé. Donc je suis contente de voir que vous parlez beaucoup de nous ce soir parce
que c’est vrai qu’on est souvent passé sous silence. Et donc ma question était effectivement de savoir
quelles mesures concrètes vous comptez prendre. Vous nous en avez donné quelques-unes, mais le
principe encore de trier, de sélectionner, de juger sur l’innovation ou des choses comme ça est assez
délicat parce que nous sommes là pour nous battre, nous sommes des chefs d’entreprise patrimoniaux,
c'est-à-dire que nous sommes dans des petites entreprises quasiment familiales, nous ne sommes pas le
grand capital. Il faut nous aider parce que nous pouvons embaucher. Nous représentons un potentiel
d’embauche très important, voilà donc nous comptons sur vous.
Frédéric Lejour, 33 ans, conseiller investissement financier
Oui bonsoir, la question est identique, c'est-à-dire qu’on est énormément chargé, également le jeune
entrepreneur doit subvenir à ses besoins, également donc ça c’est très dur pour nous. Si vous ne vous
faites pas licencier pour avoir des aides, si vous quittez directement votre emploi, eh bien vous ne pourrez
pas avoir d’aide, enfin subvenir à ses besoins c’est assez difficile. Donc que comptez-vous faire pour nous
aider lorsqu’on crée une société, sachant que je suis un jeune entrepreneur, que je prends les risques
autant pour ma famille également sur le plan financier, et si également vous aviez donc pensé à la fiscalité
de l’entreprise surtout ce qu’on parlait pour les PME et les TPE. Voilà pour ma question, la première. Et
la deuxième c’était pour l’aide à l’embauche, pour nos premiers salariés, que prévoyez-vous de faire,
merci.
Patrick Poivre d’Arvor
Une question d’Antoine qui se trouve lui à votre droite.
Antoine Preizal, 46 ans, restaurateur.
Bonsoir madame Royal, je rejoins un peu mes collègues, je suis également entrepreneur, et finalement
vous parlez beaucoup des grandes entreprises, vous parlez également des grandes surfaces mais je ne
vous ai pas encore entendu parler de commerçants, de micro-entreprises, alors que finalement ce sont des
entreprises qui représentent… 90 % des petites entreprises ont moins de 10 salariés. Alors la difficulté
effectivement c’est d’avoir, en fait l’idée c’est de savoir qu’elles sont les mesures que vous allez prendre,
fiscales et sur le droit du travail, parce que la difficulté que l’on rencontre, en fait on est à la même
enseigne que les grandes entreprises, en matière prud’hommale, donc la difficulté c’est la flexibilité du
travail, vous voyez. Il y a une autre remarque également que je voulais vous faire, c’est que début février
il y a eu le salon des entrepreneurs, il y a eu deux candidats à la présidentielle qui sont venus, il y a eu
monsieur Bayrou et monsieur Sarkozy et on ne vous a pas vu. Alors est-ce que vous pouvez me donner
quelques explications alors que vous représentez quand même le parti socialiste, un grand parti ?
Ségolène Royal
Ecoutez, je serais venue volontiers, mais vous savez je suis aussi à l’action, donc je vais vous parlez de ce
que je connais des entreprises.
Antoine Preizal
Oui vous êtes certainement, vous être peut-être à l’action, mais je crois que vos auriez pu vous faire
représenter.
Ségolène Royal
Oui c’est possible, c’est possible.
Antoine Preizal
Alors je voulais savoir est-ce que éventuellement c’est votre fief ou pas ?
Ségolène Royal
Mais bien sûr, je l’ai dit à l’instant d’ailleurs.
Antoine Preizal
Je n’en suis pas convaincu.
Ségolène Royal
Ecoutez, je vais vous dire très clairement, d’abord merci pour vos témoignages les uns et les autres, moi
je veux être la présidente de la France qui entreprend et qui réhabilite l’esprit d’entreprise, et je pense
même comme cela se fait dans d’autres pays qu’il faut apprendre l’esprit d’entreprendre à l’école. Et je
crois que cette façon là aussi de rendre hommage aux petites et moyennes entreprises, aux très petites
entreprises, vous l’avez dit à l’instant, je l’ai fait, vous l’avez vu si vous avez vu le pacte présidentiel, j’ai
commencé par cela, ce qui n’est pas évident…
Antoine Preizal
Oui mais il n’y a pas grand chose dedans madame Royal.
Ségolène Royal
Si, il y a beaucoup de choses.
Antoine Preizal
Non, il n’y a rien, il n’y a aucun chiffrage. Tout à l’heure, vous parlez depuis le début de l’émission, vous
donnez beaucoup d’idées, mais il n’y a aucun chiffrage dans tout ce que vous dites.
Ségolène Royal
Si, je vais vous dire.
Antoine Preizal
Non, vous n’avez parlé d’aucun chiffre.
Ségolène Royal
Mais si je vais vous dire.
Antoine Preizal
Non, allez-y.
Ségolène Royal
Si, il y a beaucoup de chiffrages, d’abord…
Antoine Preizal
Pour l’instant il n’y a aucun chiffrage.
Ségolène Royal
… j’ai dit beaucoup de choses sur l’aide économique aux entreprises à conditions qu’elles soient bien
ciblées. J’ai mis dans mon pacte présidentiel, je l’ai évoqué tout à l’heure et je le redis, il y a trop d’effets
d’aubaine sur les aides économiques aux entreprises, aux grosses entreprises, et notamment il y a pleins
d’entreprises qui viennent chercher des aides qui n’en ont pas forcément besoin et mon objectif, et ma
volonté, c’est de redéployer ces aides sur les entreprises qui créent de l’emploi, sur les entreprises qui
innovent, sur les entreprises qui recrutent des jeunes diplômés et sur les entreprises qui sont confrontées à
la concurrence internationale. La deuxième chose, je vais vous redonner la parole tout de suite, c’est que
je pense en effet qu’il faut aider les très petites entreprises à se créer et c’est l’idée qui est dans le pacte
présidentiel aussi de donner aux jeunes, aux moins jeunes, aux jeunes diplômés un prêt de 10 000 euros à
taux zéro pour leur permettre de créer leur première activité. Je l’ai fait aussi sur les territoires, nous le
faisons parce qu’il faut regarder concrètement ce qui se passe sur le terrain. Cette action là, cette aide
immédiate, cette bourse tremplin pour créer une très petite et moyenne entreprise en deux ans, nous en
avons créé dans l’ensemb le des régions plus de 10 000 très petites et moyennes entreprises se sont créées
par ces aides directes, en encourageant les personnes à créer leur activité, commerce, artisanat, atelier de
transformation, services etc… Et donc il y a un potentiel considérable dans la capacité d’entreprendre et
je veux encourager cette capacité d’entreprendre. Et je sais que les moyennes et petites entreprises sont
les premières à recruter, c’est elles qui créent le plus d’emplois, donc vous voyez c’est pour cela que je
pense que les aides uniformes qui sont les mêmes aux grosses ou aux petites ne sont pas justes. Il faut
aider les entreprises qui créent des emplois et celles qui sont confrontées à la concurrence internationale
et donc je modulerais l’impôt sur les sociétés, je baisserais l’impôt sur les sociétés, c’est dans le projet,
dans mon pacte présidentiel, sur les entreprises, cet impôt, ces bénéfices qui sont réinvestis dans
l’entreprise seront moins taxés ou ces bénéfices qui servent à conquérir des marchés seront également
moins taxés.
Sylvie Habib
Oui en fait pour rebondir un petit peu sur ce que vous dites, en fait nous dans nos PME, TPE, nous avons
du travail, on est souvent surbooké, le chef d’entreprise travaille énormément, je pense que je représente
pas mal de monde ici, notamment je suis moi même adhérente à la CGPME, donc on a des discussions et
je peux témoigner donc pour l’ensemble, un certain nombre de personnes. Est-ce que vous pouvez vous
engager par exemple pour qu’on puisse embaucher un salarié sans charge parce qu’en fait les charges
sociales, c’est quelque chose d’impossible, quand on donne 1 000 euros à quelqu’un on doit donner 1 000
euros au niveau des charges. Ca veut dire quoi, ça veut dire qu’un salarié soit produire deux fois ce qu’il
est capable de faire y compris son chef d’entreprise, bien sûr. Et croyez- moi on le vit, on le vit. Donc estce que vous pouvez à un moment donné, donner un prix à ce travail, le prix réel, c'est-à-dire que moi je
préférerais payer les salariés plus, et ce n’est pas que je ne veux pas contribuer à la solidarité, ce n’est pas
ça du tout, mais je pense que les gens qui travaillent doivent être rémunérés à leur juste valeur et on ne
peut pas toujours le faire, c’est très difficile. Et quand on parle de CDI, nous on souhaite embaucher en
CDI, pourquoi ? Parce que quand on est en CDI, on met en place une relation pérenne avec nos salariés,
encore heureux, encore une fois, nous sommes très proches, on connaît leur famille, leur vie, donc il faut
tenir compte de ça. Nous sommes très nombreux.
Patrick Poivre d’Arvor
Madame avait également une question à poser.
Cathy Rucquois, 46 ans, gérante de société
Oui, j’ai exactement le même problème, j’ai une entreprise de quatre salariés, une entreprise d’ébénisterie
artisanale, nous on n’a pas besoin d’argent, on a besoin de mains, on dégage une énorme main d’œuvre.
Ce qu’il nous faudrait c’est une baisse des charges pour pouvoir embaucher. Deux fois par semaine je
refuse des chantiers, je préférerais embaucher mais je ne peux pas, je n’ai pas les moyens, c’est trop cher.
Le coût du travail est trop cher, nous n’avons pratiquement pas de fournitures à facturer, nous n’avons
que de la main d’œuvre. Donc dans ces conditions là ce n’est pas possible. La taxe professionnelle
beaucoup trop élevée aussi, on ne peut pas s’en sortir. Moi si vous me dites, je baisse les charges de
moitié, demain j’augmente mes salariés qui le méritent bien et je peux embaucher au moins deux
personnes.
Patrick Poivre d’Arvor
Alors si c’est sur un même sujet madame. Et puis après on laisse madame Royal …
Karima Benhamed, 35 ans, femme au foyer
Bonjour madame Royal
Ségolène Royal
Bonsoir.
Karima Benhamed
Le sujet de ce soir, c’est délocalisation et perte d’emplois. Que pensez- vous de ces sociétés qui importent
des produits qui sont taxés en France entre 2 et 4 % alors qu’en Allemagne ils sont taxés à 68 % ? Alors
que pensez-vous pour pouvoir valoriser les produits français ? Merci.
Patrick Poivre d’Arvor
Voilà sur ce sujet des petites et moyennes entreprises.
Ségolène Royal
Alors sur les… merci d’abord de ces témoignages très directs et très vivants et qui reflètent en effet les
soucis et les difficultés sur la question des embauches par les artisans, les commerçants, les petites
entreprises. Ce que j’ai proposé dans le pacte présidentiel, c’est que les exonérations de charges, de
cotisations seront modulées en fonction de la masse salariale dans l’entreprise. C’est-à-dire que plutôt que
de faire des aides, des exonérations au cas par cas, qui profitent aussi aux entreprises qui n’en ont pas
forcément besoin, l’aide que je veux donner, c’est aux entreprises qui font un effort et qui justement
augmentent leur masse salariale, parce qu’on est dans du gagnant gagnant, il ne faut pas non plus sous
payer le trava il qualifié. Vous parlez des métiers du bâtiment, mais si vous voulez qu’il y ait des jeunes
qui viennent dans les métiers du bâtiment alors qu’il y a une pénurie de recrutement, vous le savez dans
ces métiers, il y a une pénurie, donc il faut aussi que ces jeunes qui rentrent dans les métiers, qui passent,
qui viennent dans les lycées professionnels, dans les centres de formation des apprentis et dans les métiers
du bâtiment aient aussi le sentiment d’être juste rémunérés à la sortie. Et il faut que les entreprises par
leur marché puissent rémunérer correctement ces jeunes. Et l’une des propositions que je fais, c’est que
dans les marchés publics, il y aura désormais une part de ces marchés publics qui seront réservés aux
petites et moyennes entreprises parce que j’en ai assez de voir y compris, je le sais parce que je construis
des lycées en tant que présidente de région, quand je regarde, et c’est vrai aussi pour l’économie solidaire,
à laquelle je n’ai pas répondu, excusez-moi, tout à l’heure, qui est une vraie économie, des vraies filières
de développement, surtout le recyclage par exemple. Une entreprise EMMAUS qui a 300 salariés qui
recyclent les anciens ordinateurs et je viens de découvrir qu’elle échappait aux marchés publics. Et donc
je veux que les petites et moyennes entreprises et que l’économie solidaire aient une part réservée dans
tous les marchés publics. Vous aurez ainsi du chiffre d’affaires, et vous pourrez recruter et vous pourrez
bien payer les bons salariés. Et donc en amont nous pourrons mettre des jeunes dans ces filières de
formation qui ont des besoins, c’est ça le gagnant gagnant, c’est faire du sur mesure en encourageant les
entreprises qui en ont besoin et en allégeant les charges sur les entreprises qui augmentent leur masse
salariale. Nous aurons l’occasion d’en discuter puisque je rencontre aussi les organisations
professionnelles.
Patrick Poivre d’Arvor
Si tout le monde peut intervenir ce serait mieux, comme vous avez déjà posé vos questions, je voudrais
qu’on passe peut-être à un chapitre qui justement est relié aux financements ou chiffrages…
Karima Benhamed
Les délocalisations et d’évaluer les produits français alors que les produits importés sont très peu taxés
alors qu’en Allemagne, ils sont taxés à 68 %. Alors ils se délocalisent, perte d’emploi, crée des emplois à
l’étranger pour payer peu cher les salariés, alors le bénéfice il est où, il faut bien les taxer quelque part ?
Ségolène Royal
D’abord je vais vous dire très clairement que les entreprises qui ont reçu des fonds publics et qui
délocalisent ou qui licencient alors qu’elles font des bénéfices devront rembourser tous les fonds publics
et toutes les exonérations dont elles ont bénéficié parce que je trouve que c’est inadmissible de se
délocaliser après avoir reçu des fonds publics ou des exonérations de charges. Je souhaite ensuite que
l’Europe se protège et que les normes sociales, les normes environnementales soient intégrées pour
égaliser les conditions de la concurrence et enfin je veux que les salariés dans le cadre du dialogue social
puissent anticiper et être associés aux décisions de l’entreprise, comme cela se fait dans d’autres pays.
C’est-à-dire tirer la sonnette d’alarme quand il en ait encore temps, quand j’ai vu moi les salariés d’une
entreprise bien connue, l’entreprise Aubade et je la nomme volontairement, qui a délocalisé parce qu’elle
s’est fait racheter par une entreprise suisse. Elle même possédée par des fonds de pension et que c’est une
entreprise qui fait des bénéfices qui fait un produit à haute valeur ajoutée, et qui s’en va uniquement parce
qu’il faut des licenciements de confort pour augmenter la rémunération des actionnaires, je dis que ce ne
doit plus être possible et je dis qu’il faut anticiper ces problèmes là pour mettre les entreprises devant
leurs responsabilités.
Patrick Poivre d’Arvor
Mesdames s’il vous plait, pour que chacun puisse intervenir, oui mais il y a 100 personnes qui souhaitent
poser des questions.
Karima Benhamed
Allez-vous augmenter la taxe douanière ?
Ségolène Royal
Oui, je vous ai dit que je veux une Europe qui se protège, par rapport à ces questions là. il y a d’autres
solutions d’ailleurs pour se protéger aussi…
Patrick Poivre d’Arvor
Sur le financement, le chiffrage, il y a des questions plus politiques, celle de Geneviève par exemple.
Ségolène Royal
Il y a des personnes qui n’ont pas parlé là.
Geneviève Favario, 61 ans, gérante d’une société dans le batiment
Le micro merci, aujourd'hui une nouvelle fois, votre staff a été mis à pied, est-ce bien sérieux à deux mois
des présidentielles de tout restructurer et que votre équipe soit mise en difficulté ? Est-ce que ce n’est pas
un risque et cela signifierait- il que… excusez- moi, est-ce que votre équipe au risque de signifier des
difficultés a accepté des avis contradictoires ?
Ségolène Royal
Des avis contradictoires.
Patrick Poivre d’Arvor
Alors il y avait une question de Chaabane peut-être aussi sur le même sujet.
Chaabane Arjoud, 53 ans, ouvrier spécialisé
Bonsoir madame Royal. Que des exemples que vous venez de donner sur les pays nordiques par rapport,
tout va bien là bas…
Ségolène Royal
Ce n’est pas ce que j’ai dit…
Chaabane Ajroud
Mais regardons chez nous et plutôt l’Allemagne ou l’Angleterre par rapport au travail et surtout par
rapport aux chômeurs. Par exemple l’Angleterre, elle impose des justificatifs, elle impose des lois pour
les chômeurs longue durée ou autres ou qui n’acceptent pas de travailler. En France on parle, on parle,
mais on ne fait rien. Soit les autres, je ne sais pas vous, vous venez de programmer quelque chose de bien,
j’espère que vous tenez ce que vous dites. En Angleterre l’excédent au niveau commerce international est
de 127 millions d’euros, je pense, en France on est en dessous, beaucoup en dessus, qu’est-ce que vous
pensez faire pour ça ? Et surtout pour donner du travail pour tout le monde, est-ce que vous allez baisser
la TVA par rapport par exemple les matériaux de construction, et c’est là qu’on a besoin pour augmenter
le travail dans le bâtiment ou autres, merci.
Ségolène Royal
Alors, mais vous avez raison qu’on peut regarder dans d’autres pays ce qui marche, ce qui ne marche pas,
j’en ai cité que quelques-uns parce que bon je n’ai pas voulu non plus être trop longue sur l’ensemble des
questions. Mais vous avez raison. Moi, je veux regarder les choses telles qu’elles sont, allez voir dans
d’autres pays ce qui fonctionne, trouver les bonnes idées partout et je pense que c’est comme ça que l’on
peut avancer. Sur le contrôle de ceux qui reçoivent les indemnités de chômage, je crois que c’est ça que
vous vouliez dire, qu’il y ait une obligation en contrepartie d’avoir une recherche active de chômage,
vous avez raison. Moi je veux une société de la responsabilité. Je ne veux pas une société de l’assistanat
et donc c’est du donnant donnant. C’est-à-dire toutes les personnes qui bénéficient d’une prestation, de
fonds publics, de soutien pour justement remonter la pente, il faut à la fois être juste, c'est-à-dire donner
effectivement aux personnes qui en ont besoin et il faut en même temps être exigeant, c'est-à-dire aussi
avoir un vrai service de l’emploi qui accompagne les gens individuellement dans une recherche active de
travail. Vous avez totalement raison. Et moi je ne suis pas pour l’assistanat, je suis pour donner à tous les
citoyens les moyens de maîtriser leur vie et de choisir leur vie. C’est ça la dignité humaine, ce n’est pas
d’être assisté, il y a des gens qui sont très malheureux d’être assistés. Je voyais, je me souvenais encore
dans un débat participatif, un monsieur qui s’est levé, c’était poignant, il disait je suis au RMI et vis à vis
de mes enfants, comment est-ce que je peux leur expliquer que je ne pars pas au travail tous les matins.
J’ai envie de leur donner l’exemple d’un père qui travaille. Donc quand j’entends dire qu’il faudrait
donner des heures supplémentaires à certains alors qu’il y en tant qui voudraient du travail, moi je suis
pour la société du travail pour tous. Pour tous parce que la dignité humaine, elle est là.
Patrick Poivre d’Arvor
Et sur la question de Geneviève, c'est-à-dire votre équipe mise à mal.
Ségolène Royal
Sur la question de Geneviève, écoutez, vous savez moi je suis une femme qui parle clair, donc j’ai
entendu les commentaires, j’ai vu qu’il y avait un certain nombre d’ajustements à faire, je les fais et en
même temps, je rentre dans une nouvelle phase.
Patrick Poivre d’Arvor
Parce qu’il y avait du flottement dans l’équipe.
Ségolène Royal
Oui mais c’est normal, il y a eu les débats internes, donc il y a eu des petites tensions quand même, vous
avez vu dans les débats internes, donc elles n’ont pas pu s’effacer tout de suite, du jour au lendemain.
Mais moi, je suis très sereine.
Geneviève Favario
Justement nous avons une chance d’avoir une femme qui puisse accéder à un super poste, et pourquoi ne
s’est-elle pas entourée de femmes qui auraient pu la manager avec les idées de femme ?
Ségolène Royal
Vous êtes candidate peut-être madame pour venir me manager. Vous êtes bienvenue.
Geneviève Favario
Non, mais je veux dire par là, c’était l’occasion, vous êtes une femme mise en avant et vous entourer de
femmes, ça aurait été bien pour justement nous représenter.
Patrick Poivre d’Arvor
Et sur ce même sujet Charlotte peut-être aussi.
Ségolène Royal
Je vois un peu deux aspects dans votre question, c’est vrai que ce n’est pas forcément, Charlotte ?
Charlotte Guillemint, 63 ans, cadre commerciale dans le mobilier
Bonsoir madame. Tout d’abord compliments pour être la première femme arrivée jusqu’aux élections
présidentielles, donc je rejoins un peu madame. Mais avec tout le respect que je vous dois madame,
gouverner un pays comme la France ne sera pas chose facile et je ne vous apprends rien. Mais il me
semble tout de même que vous avez été propulsé sur le devant de la scène par une sorte de frénésie
médiatique, que vous vous prépariez plutôt pour 2012 ou tout simplement pour être la première dame de
France auprès de monsieur François Hollande. Donc madame, attaquée de toute part, constamment
déstabilisée comme vous le disiez madame, connaissez- vous vraiment tous les sujets, croyez- vous
sincèrement être prête pour affronter toutes les responsabilités qui incombent à un chef d’Etat ? Et surtout
comment réussirez- vous à vous imposer face à tous ces frustrés du pouvoir qui gravitent autour de vous,
qui se surcroît ont tout fait pour vous évincer avec inélégance parfois ? Pouvez- vous vraiment leur faire
confiance pour former le gouvernement qui va faire avancer la France ? Merci.
Ségolène Royal
Voilà qui est dit au moins, c’est direct. Ecoutez, c’est vrai que je pense que c’est beaucoup plus dire pour
une femme. C’est beaucoup plus dur et en même temps je pense que le moment est venu pour la France
d’avoir une femme présidente de la République. Parce que comme vous l’avez dit à l’instant pour en
arriver là il faut un concours de circonstances exceptionnelles et je pense également que moi qui suis
partie de rien, j’étais une élève boursière, je suis issue d’un milieu moyen, je suis le produit de la réussite
de l’école de la République, j’ai passé un concours difficile, que j’ai reçu grâce à mes enseignants qui
m’ont poussé. Et n’importe quel homme qui aurait mon itinéraire professionnel ne verrait pas mis en
cause comme ça en permanence sa compétence et sa légitimité. Je suis diplômée de l’école nationale
d’administration, j’ai travaillé sept ans auprès de François Mitterand, j’ai fait pour lui l’ensemble des
préparations des sommets internationaux des chefs d’Etat. Je connais donc tous les arcanes et tout le
fonctionnement de la présidence de la République et du gouvernement. J’ai été quatre fois ministre, trois
fois ministre. J’ai été quatre fois réélue députée même quand il y a eu la débâcle de la gauche en 93. Je
suis aujourd'hui présidente de région après avoir battu un ancien Premier ministre, disons que les gens
m’ont fait confiance. Et je construis actuellement et je suis fière de ce que je fais sur mon territoire, ce qui
me fait connaître à la fois les rouages de l’Etat, les rouages des régions, qui me permet de penser une
réforme de l’Etat, qui me permet de voir les choses autrement. Et j’assume mon identité de femme parce
que je pense qu’il y a une grave crise aujourd'hui en France, il y a une crise morale, il y a une crise
politique, il y a une crise démocratique, donc je fais de la politique autrement. Et c’est ça qui déroute. J’ai
pris un mois et demi pour écouter les Français, dans des débats participatifs, on s’est moqué de moi, on a
dit, elle n’a rien à dire, elle n’a pas de projet etc… Mais je revendique ce que j’ai fait, c’est très important
d’écouter comme je le fais ce soir, pour agir juste, pour voir les problèmes, pour être réaliste, pour sortir
des dogmes ou des formules toutes faites. Alors effectivement ça surprend, mais je pense que mes valeurs
fondamentales correspondent à ce dont la France a besoin aujourd'hui, la famille, l’éducation, la sécurité
des liens, la sécurisation, la lutte contre toutes les formes de violences, la relance économique avec
d’autres façons de voir, l’expérience à la fois nationale et l’expérience locale. Donc je pense être prête. Je
pense non seulement être prête, mais je pense être la seule à incarner et à pouvoir réaliser le profond
changement dont la France a besoin et en particulier de nouer un pacte avec les jeunes. Je pense que notre
problème essentiel il est là. Il y a des fractures profondes aujourd'hui en France. Il y a des quartiers qui
sont en déshérence, il y a de la violence qui monte. Il y a une crise profonde, il y a une colère, cette colère
là je la sens, et je la ressens et donc je veux y répondre avec ma liberté.
Patrick Poivre d’Arvor
Il y a une question à votre droite et puis peut-être une question de Mériem aussi puisqu’on parle de
femme, de pouvoir, de politique…
Ségolène Royal
Et donc l’équipe sera rendue publique, pardon je n’ai pas répondu à madame…
Patrick Poivre d’Arvor
Oui la nouvelle équipe ce sera jeudi…
Ségolène Royal
Mais vous savez je suis en adaptation, en écoute permanente, ce qui me permet de tenir compte des
problèmes et de les réajuster, les régler, ça c’est une façon moderne de gouverner. J’entre dans une
nouvelle phase.
Patrick Poivre d’Arvor
Ce sera jeudi.
Ségolène Royal
Le pacte présidentiel est là, et donc c’est l’occasion maintenant de donner de la visibilité à tous ceux qui
travaillent avec moi. Et je pense avoir la me illeure équipe.
Patrick Poivre d’Arvor
Donc la nouvelle équipe, elle sera présentée quand ?
Ségolène Royal
Jeudi.
Patrick Poivre d’Arvor
Donc vous avez une question là…
Ségolène Royal
Et il y aura des femmes.
Yacine Couppe , 21 ans, étudiant en chimie
Bonsoir madame Royal.
Ségolène Royal
Bonsoir.
Yacine Couppe
Lors de votre discours donc de Villepinte, vous avez mis en avant deux points pour moi qui me semblent
essentiels, dont on ne parle pas assez, notamment le co-développement entre la France et l’ Afrique. Vous
parliez bien de co-développement, donc c’est un terme assez spécial. Et il y a un autre thème qui me tient
à cœur, c’est, il y a un an et demi, tout le monde est au courant, il y a eu des émeutes dans les quartiers,
personne n’en parle, je trouve ça, enfin depuis tout à l’heure personne n’en a parlé, c’est peut-être un petit
peu… je ne sais pas, je trouve ça bizarre. Donc, vous avez parlé aussi dans les quartiers de
responsabilisation des parents, dans l’éducation des enfants c’est quelque chose de primordial aussi.
Personne n’en parle non plus. C’est très important les sujets économiques etc, mais il faut aussi parler des
problèmes d’éducation etc… on n’en parle pas du tout.
Patrick Poivre d’Arvor
On y arrive.
Yacine Couppe
D’accord tant mieux. Donc est-ce que tout le monde s’en fout, ça je ne sais pas, est-ce qu’on a peur
d’aborder le problème, je n’en sais rien non plus. J’aimerais que vous me répondiez à ça. Et la France, je
crois, a besoin d’un symbole fort pour rapprocher vraiment la jeunesse de ses quartiers, de l’autre France
on va dire. Donc moi j’ai une proposition à faire, j’aimerais que vous vous y engagiez ce soir, ce serait
pendant six mois, un an, installer la présidence de la République ou des institutions extrêmement
importantes, c'est-à-dire, peut-être pas l’Assemblée nationale, mais des ministères dans des quartiers en
difficulté, type Clichy-sous-Bois, ce serait un symbole fort vraiment pour la France et voilà j’espère que
vous le ferez. Ne riez pas parce que c’est sérieux, c’est vraiment sérieux, je ne suis pas en train de rigoler,
Clichy-sous-Bois, c’est en France.
Ségolène Royal
Mais c’est vrai au sens où derrière la présence symbolique, pourquoi pas les réunions ministérielles dans
les quartiers, pourquoi pas c’est une très bonne idée, il y a la présence du service public dans ces
quartiers.
Yacine Couppe
Pas assez.
Ségolène Royal
Je pense qu’il faut renforcer notamment par l’éducation, vous savez la première prévention contre toutes
les formes de violence, c’est l’éducation. Et si les enfants sont bien cadrés dès le plus jeune âge, et
rattrapés au bon moment y compris avec des internats de proximité, y compris avec des soutiens aux
parents, des écoles de parents, une bonne articulation entre l’école et la famille, je pense qu’il y aurait
déjà beaucoup moins de problèmes. Je pense aussi qu’il faut le respect. Le respect, c'est-à-dire que des
jeunes diplômés de ces quartiers ne subissent plus les discriminations qu’ils subissent, notamment à
l’embauche. De toute façon, il y a un problème global, je l’ai dit tout à l’heure, je n’y reviens pas, sur une
nouvelle donne avec les jeunes, d’où qu’ils viennent. Et cette exigence là, elle est majeure pour redresser
le pays. Sur la question du co-développement c’est un sujet très important, pourquoi ? Je pense que
d’ailleurs c’est une dimension de la politique internationale, la toute première parce que notre avenir, on
ne se sauvera pas tout seul, notre avenir dépend de la capacité que nous aurons à réduire les écarts entre
les pays riches et les pays pauvres. Pourquoi ? C’est très simple, parce que sinon nous avons des
migrations de la misère et on ne pourra pas mettre des barbelés autour de nos pays développés, parce que
pour manger, pour survivre, eh bien on monte dans des embarcations comme je l’ai vu à Dakar où je suis
allée, et j’ai vu les mamans, une centaine de mamans, des jeunes qui se sont noyés en mer parce qu’elles
sont montées sur des embarcations. Qu’est-ce qu’elles m’ont dit ces mamans à Dakar ? Si on avait un peu
de crédit et de développement, on monterait nos petites entreprises, la poissonnerie, c’était un village de
pêcheurs, la poissonnerie, le séchage du poisson, on a besoin d’un camion, d’un camion frigorifique. On
veut une salle de sport pour nos enfants. On est capable… on a envie de rester dans notre village et d’y
vivre bien et d’y garder nos enfants qu’ils n’aillent pas se noyer en mer. Et donc ça, c’est un défi
considérable, à relever. Et moi j’en ai assez des gaspillages des fonds publics sur l’aide au développement
qui sont détournés par des régimes corrompus, on ne sait pas où ils vont, ils vont dans des études diverses,
dans des organismes intermédiaires, je réformerais en profondeur l’aide au développement et notamment
par les circuits courts, et l’aide directe, le micro crédit. Songez que dans les pays d’Afrique, il n’y a même
pas l’équipement des maisons en énergie solaire, on se demande mais qui a conçu les aides au
développement. Il y a une richesse là naturelle qui est l’énergie solaire, l’énergie gratuite et on leur a
imposé des modes de développement avec les énergies fossiles, ce qui fait qu’ils ne peuvent pas décoller,
en plus avec la hausse du coût de l’énergie, donc il y aura des chantiers massifs pour équiper les pays
d’Afrique en énergie solaire, ils auront déjà une des clés du développement économique. Et dans ce
système de co-développement, de respect mutuel pour leur donner les moyens de se développer.
Patrick Poivre d’Arvor
Ségolène Royal, on s’interrompt juste deux minutes et on se retrouve, à tout de suite.
Patrick Poivre d’Arvor
J’avais promis la parole à Meriem.
Meriem Benyoucef, 29 ans, Montpellier (34), secrétaire dans un cabinet juridique
Bonsoir madame Royal. J’ai une question assez simple à vous poser. Est-ce que vous avez idée du
nombre de gens qui ont toujours voté à gauche, depuis qu’ils sont en âge de voter, et qui ne voteront pas
pour vous cette fois-ci ? Est-ce que vous vous êtes posé la question de savoir pourquoi ?
Ségolène Royal
J’espère que… de toute façon la campagne n’est pas terminée. Donc j’espère en mobiliser le plus grand
nombre. Moi je crois que s’il y a parfois un désaveu à l’égard de la gauche, ou à l’égard de la politique
d’ailleurs en général, mais à l’égard de la gauche, parce que c’est ça aussi qui m’interpelle, c’est que
certains Français, certains citoyens, ne se sont pas sentis suffisamment pris en compte. Ou les solutions
n’ont pas été suffisamment efficaces. Et les gens souffrent de la précarité. Et donc je crois que c’est cette
exigence- là aussi de justice qu’il faut porter davantage. Et s’il y a un doute sur l’efficacité de la politique,
à ce moment- là les gens se détournent des urnes. C’est pour ça que je veux changer la politique. C’est
pour ça que j’ai commencé à écouter…
Patrick Poivre d’Arvor
Toujours dans les questions politiques. Monsieur ?
Didier M’Gaides, 51 ans, Salon-de-Provence (13), dentiste
Bonsoir madame Royal. Je voulais vous poser cette question : si vous êtes élue, quelle sera la position de
votre compagnon, François Hollande, sera-t- il dans votre gouvernement, souhaitez- vous qu’il reste
premier secrétaire du PS, allez-vous gouverner à deux ? Je pense que vous y avez déjà réfléchi, donc
donnez- nous votre position ce soir parce que je pense que ça ne relèvera plus de votre vie privée.
Ségolène ROYAL
Alors je comprends que cette situation intrigue, elle n’est pas banale. Mais en même temps peut-être
qu’elle symbolise…
Didier M’Gaides
C’est une première mondiale.
Ségolène Royal
C’est une première mondiale, oui. Cela dit, il y a aussi très peu de premières mondiales où une femme
arrive à la candidature et à une possibilité d’être élue présidente de la République.
Didier M’Gaides
Mais ça s’est quand même déjà plusieurs fois produit dans d’autres pays.
Ségolène Royal
Il n’y a que sept cas à l’échelle de la planète, donc c’est quand même déjà assez restreint. Vous savez,
l’élection présidentielle, c’est un moment essentiel. C’est le moment où la nation va refonder le pacte
démocratique, le pacte républicain, avec un homme ou une femme qui va représenter cette nation, qui va
agir en fonction des engagements qui seront pris. Et je vous ai dit quels sont les engagements qui sont les
miens, je pense que la France mérite mieux que ce qu’elle a, et que je peux la relever, à partir de valeurs
fondamentales. Je pense aussi que je peux tenir la place, faire tenir à la France son rang dans le monde, et
la faire rayonner à l’échelle de la planète, et faire en sorte qu’elle reprenne sa voie, à la fois à la table de
l’Europe, pour peser sur le co-développement et le soutien aux pays pauvres, pour mettre fin aux
migrations de la misère et pour exister aussi face aux États-Unis, sans s’y assujettir et face aux continents
émergents.
Patrick Poivre d’Arvor
Et sur François Hollande, c’est pas un sujet tabou…
Didier M’Gaides
Vous n’avez pas répondu à ma question, excusez- moi…
Ségolène Royal
Mais écoutez, je viens de vous répondre d’une certaine façon.
Didier M’Gaides
De votre façon, oui.
Patrick Poivre d’Arvor
En ne parlant pas de lui.
Ségolène Royal
C’est-à-dire que les Français… l’élection présidentielle…
Didier M’Gaides
Nous attendons des réponses claires, madame Hollande… madame Royal.
Ségolène Royal
Je viens de répondre clairement. Je pense que l’élection présidentielle n’est pas un gadget et que toute
autre personnalité politique, François Hollande a sa personnalité politique en tant que tel, avec le talent
qu’on lui connaît, et donc de ce point de vue- là tous les talents seront utilisés…
Patrick Poivre d’Arvor
Et à quelle place ? On vous posait clairement la question.
Ségolène Royal
Je me suis fixé des règles morales, parce que je pense aussi qu’il y a une crise morale. Et aujourd’hui je
dialogue avec la France, grâce à vous d’ailleurs, et à travers vous. Et c’est ce lien de confiance que je
veux bâtir avec les Français. L’élection présidentielle c’est un lien entre un pays et, en l’occurrence, une
femme. Et c’est ce lien- là que je veux conquérir. C’est pour ça que je veux être élue. Pour accompagner
cette mutation, ce changement profond, sur des va leurs fondamentales, pour remettre la France debout et
pour incarner ce changement. Et le destin…
Patrick Poivre d’Arvor
Donc on ne saura rien de plus sur l’autre lien, le lien familial ?
Ségolène Royal
Mais ça serait indécent de ma part que de commencer à distribuer des places…
Didier M’Gaides
Mais c’est pas ce que je veux dire. Je veux dire que si monsieur Holande reste premier secrétaire du Parti
socialiste, ça risque de vous mettre en porte-à-faux pour la gestion entière du pays.
Ségolène Royal
Mais aucun porte-à-faux. Je pense que nous sommes dans un pays moderne, une nation moderne. Comme
dans tous les couples chacun doit se respecter pour ce qu’il est, avec son indépendance, son autonomie, sa
compétence. Et cette règle- là, qui a si peu été reconnue aux femmes, moi je la reconnais aux hommes. Je
reconnais à tous les hommes leur autonomie, leur indépendance et la reconnaissance de leurs
compétences. En revanche il y aura beaucoup à faire de l’autre côté, en général.
Patrick Poivre d’Arvor
Il y avait une question d’Erwan.
Erwan Jouan de Kervenoael, 29 ans, Nantes (44), graphiste en imprimerie.
Bonsoir madame. Je voulais vous demander, je sais pas si vous vous êtes rendu compte, mais il y a
beaucoup de Français et de Françaises qui aujourd’hui ne se reconnaissent pas forcément dans les
personnalités politiques qui se présentent aux élections et je voulais savoir si un jour le vote blanc sera
reconnu, ou du moins introduit dans la constitution, parce qu’aujourd’hui il n’est pas comptabilisé et je
trouve ça dommage, ça pourrait permettre à des gens de montrer leur désaccord par rapport à une
personnalité qui se présente. Voilà, merci ;
Ségolène Royal
J’y suis favorable. Mais cela veut dire que si le vote blanc est mesuré, alors il faut aussi s’orienter vers
l’obligation de scrutin. Voyez, il y a une cohérence. Donc c’est une possibilité. Vous savez qu’il y aura un
référendum institutionnel sur la modernisation de l’ensemble de nos institutions, et en particulier la fin du
cumul des mandats, la réforme du Sénat pour qu’il soit plus représentatif, la reconnaissance du pouvoir
des citoyens avec le référendum d’initiative populaire. Donc de toute façon il va falloir dépoussiérer et
améliorer le fonctionnement démocratique d’une République nouvelle. Et cette réforme- là pourra très
bien y être intégrée.
Patrick Poivre d’Arvor
Laurent avait une question politique aussi.
Laurent Frenkel, 41 ans, Bordeaux (33), chauffeur de VIP.
Oui, rapide parce que j’ai déjà pris la parole. Juste savoir, finalement vous allez présenter votre équipe
donc jeudi, vous nous l’avez dit, ça veut pas dire évidemment que ça va être votre équipe, on va dire,
ministérielle si jamais vous êtes élue. Moi j’aimerais savoir, parce qu’en fait on est beaucoup ici à se dire
que finalement le clivage gauche-droite aujourd’hui il n’existe plus forcément vraiment et qu’on a envie
finalement, nous le peuple en tout cas, que cette France avance et que cette France finalement réussisse et
donc, quitte à prendre des talents, d’un côté, de l’autre, donc pourquoi pas plus à gauche que vous, et
pourquoi pas un petit peu à droite. Voilà, c’est ma question finalement. Merci.
Ségolène Royal
Mais vous savez, le rassemblement des talents est nécessaire au niveau d’un pays. Mais les clivages
politiques aussi, au bon sens du terme. C’est-à-dire je pense que pour la démocratie soit vivante, il faut
qu’elle ait le choix. Et là on voit bien qu’il y a deux choix, deux projets de société, qui sont là. Et c’est
très important. Moi je veux une société solidaire et efficace, une société d’harmonie, de cercle vertueux,
de gagnant-gagnant. Pas une société où on dresse les gens les uns contre les autres, une société où on
règle les problèmes de fond, où on remet du service public, où on remet du respect, où on lutte contre les
discriminations. Parce que je pense que c’est en progressant sur ces valeurs fondamentales que la France
sera aussi plus efficace et qu’on a besoin de la relever. Vous savez, le sentiment de colère le plus
important auquel j’ai été confronté dans cette phase d’écoute, c’est que les Français, et ils ont raison, ont
le sentiment d’être tirés vers le bas. On l’a vu d’ailleurs tout à l’heure : celui qui gagnait un peu plus que
le SMIC a peur d’être smicard ; celui qui est smicard a peur de perdre son emploi et de tomber au RMI ;
celui qui est au RMI a peur de tomber encore plus bas et de ne plus se faire soigner ; les personnes
retraitées se demandent comment elles vont pouvoir rester dans leur logement. C’est la première fois où je
vois autant de personnes qui m’écrivent, qui me contactent, des personnes qui ont des petites retraites, qui
ne font plus qu’un repas par jour. Mais c’est quand même impensable dans la France d’aujourd’hui. Et
donc remettre de la justice, c’est remettre de la force. Voilà ma conviction profonde. Mais c’est aussi de
l’efficacité et du combat économique, et du réalisme. Alors la réponse est très simple, parce que c’est une
réponse entre les deux tours. Et tous ceux qui viendront, qui se reconnaîtront dans cette vision de la
France et dans ce pacte présidentiel, feront partie de ma majorité parlementaire. Donc il leur appartiendra,
à eux, de choisir. Et moi je pense que je porte des valeurs de gauche, je suis socialiste, je porte des valeurs
de gauche, parce que j’ai farouchement ancré dans mes convictions la nécessité de lutter contre les
inégalités, contre les précarités, contre les violences, et de remettre l’éducation au cœur de tout et en avant
de tout. Et l’investissement dans la valeur humaine et dans la formation professionnelle, et c’est comme
ça qu’on sera compétitif. En même temps je suis moderne, parce que je suis réaliste, et que je veux aider
les entreprises à créer des activités et des emplois. Et donc ceux qui se reconnaîtront dans ces valeurs,
entre les deux tours de l’élection présidentielle, seront bienvenus et feront partie de la majorité
parlementaire.
Patrick Poivre d’Arvor
Une question de Ghali.
Ghali Benaissa, 46 ans, Pierre-Bénite (69), formateur plaquiste.
Bonjour madame Royal. Je voulais savoir, si vous êtes élue, est-ce que vous allez vous entourer de ce
qu’on appelle les éléphants du PS ou est-ce qu’on va voir des nouvelles têtes justement pour faire avancer
le pays ? Merci.
Ségolène Royal
Les deux, j’allais dire. Il faut à la fois de l’expérience et en même temps faire monter une nouvelle
génération. Et des compétences.
Patrick Poivre d’Arvor
Des éléphants et des éléphanteaux, donc.
Ségolène Royal
Non mais il ne faut pas non plus utiliser ces mots- là. Mais je crois qu’il faut… Vous savez, c’est comme
dans toute entreprise humaine, il faut de la mixité au sens où il faut la diversité des talents.
Patrick Poivre d’Arvor
Il y a beaucoup de questions sur l’immigration, peut-être on peut commencer par celle que voulait poser
Gilles ?
Gilles Cartier, 48 ans, Joué les Tours (37), éducateur spécialisé.
Bonsoir madame Royal. Je suis éducateur spécialisé et dans le cadre de mon activité professionnelle,
j’accompagne des jeunes mineurs isolés. Alors j’entends à droite, très à droite mais un peu moins à droite
maintenant, un slogan qui dit “ la France on l’aime ou on la quitte ”. Pour m’occuper de ces jeunes en
particulier, je peux dire que la France ils l’aiment. Vous en parliez tout à l’heure, ils l’ont aimée bien
avant d’y arriver, ils en ont rêvé comme d’un eldorado, ils y sont arrivés parfois au péril de leur vie. Alors
il y a en ce moment sur le territoire français des mineurs ou des adultes migrants qui sont dans des
situations d’illégalité. Quelle est votre position par rapport à cette population ?
Patrick Poivre d’Arvor
Je crois qu’André voulait poser une question semblable ?
André Pol, 38 ans, Tours (37), chauffeur routier.
Bonsoir madame Royal. Ma question c’est la même que celui de monsieur. Selon la politique de monsieur
Nicolas Sarkozy d’immigration zéro ou immigration choisie, souhaitez- vous apporter une amélioration ?
Pour les sans papiers, comptez-vous pour une régularisation massive au cas par cas ou à une conduite à la
frontière comme on l’entend ? Et si c’est au cas par cas, quel serait le cas ? Merci.
Patrick Poivre d’Arvor
Sur l’immigration, oui si vous voulez… C’est sur ce sujet- là ?
Myra Bragant i, 32 ans, Vanves (92), responsable des ressources humaines.
C’est un sujet qui est connexe, si vous me le permettez.
Patrick Poivre d’Arvor
Allez-y, bien sûr.
Myra Braganti
Madame Ségolène Royal bonsoir. Je me permets de vous interpeller sur le sujet de la sécurité qui relie
l’ensemble des questions qui vous ont été posées précédemment. Pourriez-vous m’indiquer clairement et
concrètement quelles sont les mesures aujourd’hui que vous souhaitez mettre en place pour juguler la
délinquance des mineurs. Dans votre pacte présidentiel, vous avez parlé d’alternative à la prison.
Pourriez- vous nous dire concrètement de quoi il s’agit ? Merci.
Ségolène Royal
D’abord je ne veux pas faire d’amalgame entre la question qui est posée précédemment de l’immigration
et de la délinquance. Parce qu’à force de faire des amalgames comme ça, on crée des révoltes, des
humiliations dans les quartiers populaires. Moi je veux pas ici faire de polémique, mais je voudrais quand
même rappeler que rien n’est réglé dans la question des banlieues. Et les images qui ont été données de la
France à l’extérieur, où l’on a cru qu’il y avait des guerres civiles en France il y a un an, ces problèmes- là
ne sont pas réglés. Et s’ils ne sont pas réglés, ce qui se passera dans les cités n’est rien par rapport à ce
que l’on a connu. Je pense que la situation est extrêmement grave, qu’aujourd’hui elle est occultée et que
cette question- là, j’ai l’intention de la régler. Et je pense être au pouvoir la seule à la régler. Parce que moi
je veux de l’ordre juste, et je tiens les deux bouts : la prévention, la justice, l’ordre juste, la répression
quand c’est nécessaire, et en particulier la réponse au premier acte de délinquance. Car ce qui ne va pas
aujourd’hui, c’est qu’au premier petit acte de délinquance, il n’y a aucune intervention parce que la
justice des mineurs est débordée. Or, les éducateurs le disent très clairement, s’il y a une réponse au
premier acte de délinquance proportionné, où l’on fait comprendre très rapidement au jeune qui n’a pas eu
la chance d’être cadré dès le plus jeune âge, ce qui rejoint ce que je disais tout à l’heure, pour prévenir
aussi il faut s’y mettre maintenant pour les petits de l’école maternelle, pour éviter justement ce dérapage
vers les adolescents, parce qu’à partir de 14-15 ans, c’est très difficile, c’est beaucoup plus difficile et ça
demande, vous le savez, beaucoup plus de moyens. Et moi je veux qu’au premier acte de délinquance ou
d’infraction à la loi, il y ait une réponse proportionnée. Parce que ça veut dire qu’on aura 70 % de
récidive en moins. Voilà la société que je veux mettre en place dans le cadre de l’ordre juste, avec des
parents qui assumeront leurs responsabilités, s’ils ont des difficultés on va les épauler et on va les aider à
faire réussir leurs enfants à l’école, et les enfants qui commencent à déraper, on les met en internat de
proximité, avec les mamans qui se regroupent, parce qu’il y a des mamans seules qui ont beaucoup de
difficultés avec les pré-adolescents. Donc mon idée c’est qu’elles se regroupent, on met des petits
internats au milieu du quartier, les mamans ne sont pas disqualifiées, mais elles sont épaulées, et en
particulier avec des jeunes qui vont recevoir des allocations jeunes adultes, ceux qui font des études, qui
viendront aider en contrepartie le gagnant-gagnant, pas de prestation sans obligation nouvelle, ils
viendront aider les petits à faire leurs devoirs et leurs leçons. La base de tout, c’est la réussite à l’école.
Alors pour ceux qui décrochent de l’école et qui basculent dans la délinquance parce qu’ils ne sont pas
encadrés, en effet je veux des alternatives à la prison. Un mineur qui sort de prison va accomplir un acte
de récidive à 80 %. Vous imaginez les dégâts que cela fait. Et je veux que dans la France nouvelle qui va
se lever, que pas un jeune n’ait une seconde chance, y compris par un encadrement militaire,
effectivement. Parce que je crois que remettre des hommes debout, leur redonner l’estime d’eux- mêmes
dans un chantier humanitaire, leur réapprendre à structurer leur vie, leur faire du rattrapage scolaire, leur
faire passer le permis de conduire, leur donner une formation professionnelle, c’est une occasion de les
raccrocher à la réussite. Et donc ce chantier- là… Alors vous dites je ne suis pas allée dans les banlieues.
Si, j’y vais beaucoup, sans médias parce que je travaille beaucoup avec les associations, pour pouvoir très
prochainement vous dire avec beaucoup de précision comment je vais empoigner cette question-là, y
compris en tant que mère. Parce que je ne me satisfais pas de tous ces jeunes que l’on décrit comme déjà
perdus pour l’avenir, c’est insupportable, c’est un potentiel la France, on a besoin de ces jeunes, elle a
besoin de leur énergie. En ce qui concerne l’immigration…
Patrick Poivre d’Arvor
Maintenant parlons de l’immigration et de la régularisation des sans papiers.
Ségolène Royal
La régularisation des sans papiers se fera au cas par cas. Je ne veux pas annoncer de régularisation
massive. D’abord ça serait irréaliste, ensuite ça ferait un effet d’appel, ça donnerait un espoir immense à
des millions de citoyens qui vivent dans les pays pauvres et qui fuient leurs pays comme on l’a vu tout à
l’heure. Et moi je veux faire en sorte que l’aide au développement puisse être efficace. Et donc que les
gens puissent être heureux dans leur pays. Et ceux qui sont ici, qui travaillent au noir, en revanche, je ferai
un pacte avec les entreprises pour qu’elles puissent régulariser les salariés dont l’économie française a
besoin, parce qu’il faut aussi qu’ils soient respectés, qu’ils sortent du travail au noir comme ça a été fait
dans d’autres entreprises. Et ceux-là on pourra les régulariser puisqu’ils travaillent. Do nc la moindre des
choses c’est à la fois qu’ils cotisent, que les employeurs cotisent, et que les salariés soient sécurisés. Enfin
il y a le problème des enfants scolarisés et je veux que les enfants scolarisés soient respectés aussi.
Patrick Poivre d’Arvor
Alors Ségolène Royal, il y avait une question dans mon dos, sur la droite, si vous voulez bien me regarder
parce que c’est assez compliqué pour moi mais aussi pour vous j’imagine, monsieur…
Robert Fernando, 68 ans, Saint-Clément-de-Rivière (34), fonctionnaire à la retraite
Madame Royal bonsoir. Je voulais vous poser une question sur le logement. Alors c’est un petit calcul
arithmétique très facile, c’est une petite logique. Si on ouvre les frontières, comme c’est pratiquement le
cas maintenant, on va avoir forcément une arrivée massive d’étrangers. Conséquence : nous ne pouvons
pas construire de logements sociaux au prorata des arrivées. Donc on va pas résoudre le problème, si vous
voulez. Le problème va perdurer pendant encore… Alors est-ce que vous ave z les moyens, est-ce que
vous avez les moyens de créer un équilibre là-dedans ?
Ségolène Royal
Il n’y a pas forcément de lien entre les deux, monsieur. Le problème du logement, vous savez, il y a non
seulement le problème du logement social, il y a le problème de l’hébergement d’urgence, il y a même les
catégories moyennes maintenant qui ont beaucoup de difficultés à se loger parce que les loyers
augmentent. Et donc je veux régler l’ensemble des aspects de la question du logement. Et ne mélangeons
pas la question du logement et la question de la maîtrise de l’immigration. L’immigration doit être
maîtrisée…
Robert Fernando
Mais c’est un peu lié, quand même.
Ségolène Royal
L’immigration doit être maîtrisée. Je n’ai aucune hésitation là-dessus. Donc ne mélangeons pas tout. En
revanche il y a de plus en plus de personnes qui ont du mal à se loger, parce que les loyers augmentent. Et
donc je veux régulariser et réglementer la question des loyers. Je veux aussi que les logements sociaux
soient construits, je l’ai dit, nous manquons de 120 000 logements sociaux, ça fait aussi des emplois dans
le bâtiment. Et enfin, si vous le permettez, je veux que les communes respectent toutes leurs obligations
de construire des logements sociaux…
Robert Fernando
Très bien, j’attendais ça.
Ségolène Royal
Parce que si tout le monde faisait comme dans certaines communes, vous voyez ce que je veux dire, eh
bien on aurait une drôle de situation, drôlement explosive dans le pays. Et moi je pense que la politique,
c’est la politique par la preuve. C’est les actes qui doivent correspondre aux discours. Et en l’occurrence
je pense que la situation serait extrêmement grave dans le pays si toutes les communes faisaient comme
celle du ministre de l’Intérieur, vous permettrez que je dise cela sans polémiquer, parce que c’est une
question de fond. C’est pour ça que je me permets de le dire.
Robert Fernando
Ce que je voudrais ajouter, quand vous dites il faut que les communes s’y mettent et construisent des
logements sociaux, nous sommes tout à fait d’accord. Mais ce qu’il faudrait penser aussi, c’est qu’en
France il y a des quantités énormes de locaux qui sont désertés, de la SNCF, de l’armée, et j’en passe, et
ces trucs-là on ne parle jamais de les réhabiliter. Et l’autre fois j’ai entendu, comme ça, dans une émission
de télé, où on disait simplement : ah mais on peut pas le faire parce qu’il faut que les terrains on les prête
à la loi du marché. Mais c’est inadmissible, ça.
Ségolène Royal
Oui, c’est vrai, c’est une très bonne idée…
Robert Fernando
Et votre droit de préemption alors ?
Ségolène Royal
Oui, c’est une très bonne idée. Alors j’ai dit dans mon plan sur le logement que les communes auraient le
droit de réquisitionner pour acheter les logements qui sont vides pour des raisons spéculatives, pour les
remettre sur le marché locatif, puisqu’il y a des centaines de milliers de logements qui sont vides pour des
raisons spéculatives, il faut que les communes puissent les réquisitionner en les achetant à leur juste prix
pour les remettre sur le marché locatif. Et sur tous les terrains possédés par l’État, et notamment ceux que
vous évoquez, j’ai dit que ces terrains seraient vendus aux communes à la moitié du prix du marché, pour
qu’elles puissent construire des logements sociaux. Et enfin je veux que les Français puissent plus
facilement accéder à la propriété de leur logement et qu’on s’occupe aussi des gens qui payent bien leur
loyer, et régulièrement leur loyer, et qui font cet effort. Et donc j’ai dit que dans les logements sociaux, au
bout de 15 années de paiement du loyer et des charges régulièrement, quasi régulièrement, les familles
puissent devenir propriétaires de leur logement.
Robert Fernando
Je peux dire…
Patrick Poivre d’Arvor
Non, monsieur s’il vous plaît, pour que chacun puisse avoir la possibilité de s’exprimer…
Ségolène Royal
Et nous ferons aussi un service public de la caution, parce qu’il y a beaucoup de gens, excusez- moi mais
ça c’est très important, qui peuvent payer leur loyer mais qui pour l’entrée dans les lieux, quand il faut
sortir trois mois de loyer, entre les cautions, les garanties et les frais d’agence, ne peuvent pas accéder au
logement. Et donc nous ferons un service public garanti de la caution.
Patrick Poivre d’Arvor
Deux questions, madame et monsieur ens uite.
Elizabeth Bertogal, 29 ans, Paris 15e (75), agent dans les ressources humaines.
Bonsoir madame Royal. Donc moi aussi j’ai une question au sujet des logements. Je suis jeune, j’ai 29
ans, je recherche un appartement dans Paris. Donc j’ai un bon travail, j’ai un salaire moyen et mon
entreprise, je tiens à le préciser, cotise pour le 1 % logement. Donc mon problème, et le problème de
beaucoup de personnes, je voulais savoir comment vous pouvez répondre à ma requête, qui n’est pas
unique, sur la difficulté de se loger dans Paris, en sachant que le prix des loyers est très élevé, que les
dépôts de garantie sont très élevés également et qu’il faut également payer les autres charges, comme les
impôts sur le revenu qui sont très élevés également pour les célibataires, comme moi. Et puis le coût de la
vie ne cesse d’augmenter. Donc voilà ma question.
Patrick Poivre d’Arvor
Deux autres questions, monsieur…
Fabrice Gasthalter, 34 ans, Lunéville (54), sans emploi.
Bonsoir madame Royal. J’ai deux questions. Une question qui rejoint un peu ce qui était évoqué tout à
l’heure mais c’est plus centré sur la justice et le milieu carcéral en particulier, notamment l’état des
prisons, les conditions de vie des détenus en France. J’ai l’exemple dans la région, en Meurthe-etMoselle, à Nancy, où l’établissement carcéral principal, c’est dans cet établissement que les conditions
sont vraiment les plus déplorables en France. Et la deuxième question, je suis actuellement alcoolique
abstinent, c’est-à-dire que je ne bois plus d’alcool depuis six ans, ça fera six ans demain, j’aimerais savoir
si vous, pour la prévention, la lutte contre l’alcoolisme, vous avez quelque chose, des mesures concrètes,
parce que moi quand j’ai arrêté j’ai été aidé énormément par des associations, par mon médecin traitant,
mais sinon vous savez qu’on se retrouve souvent obligé de se battre tout seul, et au niveau de l’État j’ai
pas eu vraiment d’aide pour ça. Qu’est-ce que vous comptez faire, est-ce que vous comptez…
Ségolène Royal
C’est vous qui avez dû payer les soins, c’est ça ?
Fabrice Gasthalter
C’est pas que les soins, c’est l’accompagnement qu’il y a après. Il y a autre chose qui me scandalise un
peu, c’est que moi je suis fumeur, j’ai pas réussi encore à arrêter de fumer, ça me gêne pas quand je vois
des placards comme “ Fumer tue ”, “ Fumer rend stérile ”, etc., sur les paquets de cigarettes, mais ça me
scandalise que je vois des bouteilles d’alcool en vente libre et qu’il n’y ait rien dessus. Je sais que la
fumée tue, mais l’alcool tue autant et je suis quand même scandalisé de voir qu’on ne fait rien à ce
niveau-là, au niveau de la prévention entre autre. Merci.
Patrick Poivre d’Arvor
Alors sur le logement dans Paris, sur l’alcoolisme…
Ségolène Royal
Je vais faire une réponse un peu commune à vous deux. C’est-à-dire je pense que ces questions-là, qui
sont très très importantes, doivent être réglées en rapprochant les décisions des territoires. Je m’explique.
C’est dans mon pacte présidentiel. Je crois que le logement des jeunes, c’est-à-dire le logement des jeunes
étudiants et le logement des jeunes travailleurs, doit faire l’objet d’un plan national qui sera financé par
les régions, et je leur donnerai, en tant que chef d’État les moyens financiers de remettre à niveau les
logements pour les jeunes étudiants et les jeunes travailleurs avec une nouvelle génération de logements,
où on mélange les jeunes, qu’ils soient étudiants ou travailleurs, mais pour répondre à ce besoin criant des
jeunes qui se lancent dans la vie. Et c’est la même chose pour les prisons, parce que là aussi, dans le cadre
des financements que j’évoquais tout à l’heure, il va falloir faire des économies. Et je pense qu’on peut
être beaucoup plus efficace et régler les problèmes tout en faisant des économies, en prenant les décisions
à proximité du territoire. Et j’ai dit aussi que la question des travaux dans les prisons, les prisons c’est un
vrai scandale, dans le pays des Droits de l’homme en France, il y a plusieurs enquêtes des droits de
défense de la personne humaine qui disent que les prisons françaises c’est ce qu’il y a de pire, non
seulement dans l’ensemble de l’Europe, mais presque à l’échelle planétaire. Donc ça c’est inadmissible,
c’est intolérable, c’est insupportable. Et cette question-là aussi sera réglée par la régionalisation. Je
donnerai aux régions la responsabilité de faire les travaux dans les prisons pour que la dignité des
personnes soit garantie. Il y aura un autre problème, c’est celui de l’accompagnement, parce qu’il y a eu
des suppressions d’emplois très importantes. C’est-à-dire qu’aujourd’hui il y a de plus en plus de détenus
qui sortent de leur prison sans accompagnement, il y a eu une réduction drastique de tous ces métiers
d’accompagnement, retrouver une formation professionnelle, reprendre confianc e en soi, etc. Et donc le
plan d’action pour les prisons sera à la fois le travail sur les bâtiments, sur la dignité des personnes et sur
l’accompagnement à la sortie de prison. Et sur la prévention de l’alcool, je pense que c’est dès l’école là
aussi. C’est pour ça que j’ai parlé tout à l’heure de la prévention dans le domaine de la santé, c’est dès
l’école qu’il faut éduquer à la prévention de l’alcoolisme, il y a beaucoup d’alcoolisme chez les jeunes,
beaucoup beaucoup trop. Et vous avez raison, le trava il de lutte contre la toxicomanie n’a pas son
équivalent dans la lutte contre l’alcoolisme. Et je souhaite qu’il ait son équivalent de la lutte contre
l’alcoolisme et le soutien aux personnes. Et que les jeunes sont beaucoup moins éduqués à la lutte contre
l’alcoolisme qu’à la lutte contre le tabac et contre la drogue..
Fabrice Gasthalter
D’autant plus…
Ségolène Royal
Et ça sera intégré, excusez- moi, ça sera intégré au programme scolaire, les actions de prévention sur la
santé.
Fabrice Gasthalter
Je vais terminer là-dessus, en plus on est un pays où l’alcool et notamment le vin fait partie, comme je l’ai
entendu dire par un candidat la semaine dernière, du patrimoine culturel. Alors ça me choque un peu
quand même. Je trouve que c’est un peu fort de parler du vin comme un patrimoine culturel…
Patrick Poivre d’Arvor
Ce que ne pensent pas les viticulteurs qui sont ici.
Ségolène Royal
Ah voilà, le débat se noue, ça réagit !
Olivier Dahyot, 34 ans, Saint-Thurial (35), agriculteur
Bonsoir. C’est un sujet tout à fait à part aussi, c’est l’agriculture. Je sais qu’on entretient le paysage
français et les agriculteurs représentent 4 % de la population active en France. Récemment la commissaire
européenne FISHER BOLA a déclaré qu’à partir de 2013 on n’aura plus de prime, ce sera la fin des aides
de l’Europe. Elle a déclaré qu’on devra aller travailler à mi-temps à l’extérieur pour réussir à avoir un
revenu correct. Alors avec de tels propos, comment voulez-vous trouver la motivation dans notre métier.
Quelles perspectives pouvez- vous nous donner, quel type d’agriculture voulez-vous et quels sont vos
projets concrètement pour qu’on assure un revenu ? Merci.
Patrick Canestrari, 53 ans, Pantin (93), retoucheur de photo PAO
C’est aussi un sujet sur l’agriculture et donc l’environnement. Quelle est votre position par rapport aux
OGM, par rapport à l’agriculture biologique. Moi je fais partie d’une AMAP, je sais pas si vous savez ce
que c’est, les AMAP… C’est l’Aide au maintien d’une agriculture paysanne, on achète directement des
produits à des agriculteurs…
Ségolène Royal
Par les circuits courts ?
Patrick Canestri
Voilà, des circuits courts. Donc on est en contact directement avec un paysan biologique qui vient nous
apporter les produits de sa ferme, à un endroit donné, à une date donnée. Et donc on a un contact avec le
paysan et on a des produits qui sont biologiques. Donc quelle est votre position par rapport aux OGM,
aux faucheurs volontaires, justement, dont José BOVÉ, qui sont emprisonnés alors que pour moi c’est des
résistants. Voilà, qu’est-ce que vous pensez de tout ça ?
Patrick Poivre d’Arvor
Deux questions sur l’agriculture et puis monsieur et après…
Hubert Bouillon, 61 ans, Dardilly (69), projeteur à la retraite
Sujet aussi sur l’environnement. C’est un vaste débat, l’environnement. Le plus grand défi que l’humanité
aura à relever les prochaines décennies, ce sera la lutte contre le réchauffement climatique. Donc pour ça
le protocole de Kyoto nous impose de réduire par quatre nos émissions de gaz à effet de serre d’ici 2050.
Vous avez signé le pacte écologique de Nicolas Hulot concernant ce sujet, donc vous vous engagez contre
le réchauffement climatique, la raréfaction des énergies fossiles et en particulier des hydrocarbures. Ma
question : que comptez-vous faire dans le domaine du fret, sachant que pour faire un kilomètre le
ferroviaire consomme quatre à sept fois moins d’énergie que la route et le dégagement de CO2 est
pratiquement nul…
Patrick Poivre d’Arvor
On a compris, en gros comme les Suisses, le fret ferroviaire…
Hubert Bouillon
Deuxième question…
Patrick Poivre d’Arvor
Non non, parce qu’il y en a déjà deux en suspens, donc on va essayer de répondre aux deux questions sur
l’agriculture, notamment l’agriculture bio et puis ensuite celle- là. Madame Ro yal…
Ségolène Royal
Alors c’est très intéressant tout ce que vous venez de poser et ça a des liens. L’excellence
environnementale, l’agriculture, les circuits courts, la question des transports par route, etc. Je l’ai dit, je
le répète, vous savez j’ai été ministre de l’Environnement, donc je connais bien ces sujets-là, j’ai même
parfois été un peu visionnaire parce que déjà à l’époque je demandais qu’il y ait un développement des
éco-industries et je disais à EDF : mais investissez ne serait-ce que 5 % de votre chiffre d’affaires dans les
énergies renouvelables pour que la France soit la première au monde. Et si on m’avait écoutée, il y a
maintenant plus de dix ans, je crois qu’on n’aurait pas le retard que l’on a aujourd’hui. Et donc l’un des
sept piliers de ce pacte présidentiel, c’est que je veux faire de la France le pays de l’excellence,
environnementale. Parce que c’est un pilier du développement économique, et qu’on peut y créer des
centaines de milliers d’emplois qui ne sont pas délocalisables. Et donc la France, qui a du potentiel, qui a
des laboratoires, qui a pris aujourd’hui un certain nombre de retards, doit mettre en place toutes les
productions liées à l’environnement et c’est un des volets très importants de la réforme fiscale puisque je
mettrai en place une réforme fiscale qui va baisser la fiscalité pour encourager toutes les entreprises à
développer les éco-activités. Que ce soit les entreprises du bâtiment, où il y a énormément de choses à
faire sur l’isolation des habitations, vous savez qu’on gaspille 40 % de notre énergie qui part dans
l’atmosphère, et donc avec un chantier d’isolation des bâtiments déjà construits on crée à la fois des
emplois dans le bâtiment et on respecte le protocole de Kyoto. Sur la question de l’agriculture, c’est une
question passionnante et qui a souvent manqué de courage politique, parce qu’on sait exactement ce qui
est en train de se passer, et faute d’anticiper on se prépare des lendemains assez douloureux si les
décisions ne sont pas prises dès maintenant. Et moi je crois que dans des logiques gagnant-gagnant, où il
n’est plus temps d’opposer l’agriculture intensive à l’agriculture protectrice de l’environnement parce que
toutes les agricultures doivent maintenant protéger l’environnement, toutes…
Hubert Bouillon
On le fait déjà.
Ségolène Royal
… il n’y a pas d’issue. Et donc il faut assumer cette phase transitoire pour arrêter les intrants chimiques,
les nitrates, la pollution de l’eau, la pollution des sols, et pour faire en sorte que l’agriculture qui protège
l’environnement, qui utilise des méthodes différentes d’agriculture durable, non polluante, soit davantage
aidée que l’agriculture intensive.
Patrick Poivre d’Arvor
Et sur les faucheurs d’OGM ?
Ségolène Royal
Juste un mot. Aujourd’hui les aides européennes sont très injustes puisque 80 % des aides vont à 20 %
des agriculteurs les plus intensifs…
Olivier Dahyot
Non, c’est le contraire, c’est 80 % des DPU vont à 80 % des agriculteurs.
Ségolène Royal
80 % des aides vont à 20 % des agriculteurs. Donc je veux que ça change. C’est-à-dire je veux qu’il y ait
une réforme de la politique agricole commune, qui rééquilibre avec plus de justice la répartition des aides,
mais qui donne aussi à l’agriculture de nouveaux débouchés. Et une nouvelle reconnaissance. Et c’est
l’environnement qui va nous le permettre, avec les biocarburants, la valorisation de la biomasse. Et je
pense qu’aujourd’hui les agriculteurs sont les nouveaux pionniers de la protection de la planète, grâce à
ces nouvelles filières de développement énergétique. Et on le voit maintenant, ça commence à émerger
sur l’ensemble du territoire, mais c’est insuffisamment encouragé et je veux que fiscalement les
productions de biocarburant, de valorisation de la biomasse, de la filière bois, soient beaucoup plus
fortement encouragées parce qu’on va à la fois créer des emplois et on va protéger la planète. Sur les
OGM je suis favorable à un moratoire des OGM en plein champ. Je l’ai fait dans la région que je préside,
où les maires ont été envoyés au tribunal par le préfet, j’ai trouvé ça scandaleux. Parce que les OGM en
plein champ ont menacé les appellations d’origine contrôlée, et je considère que dans un pays
démocratique il faut un permis de construire, une déclaration de travaux pour construire une barrière ou
pour modifier une fenêtre, et quand il y a des OGM qui sont cultivés en plein champ, le maire n’est même
pas informé. Donc je pense qu’il y a un déficit démocratique. Je ne veux pas freiner la recherche, les
OGM peuvent apporter beaucoup de réponses à des problèmes de santé, des problèmes de sécurité
alimentaire qui peuvent se poser dans le monde, à condition qu’on pose très clairement la question de
savoir où vont les profits tirés des OGM et qu’il y ait une répartition à l’échelle de la planète correcte.
Mais en revanche, je veux un moratoire sur les cultures des OGM en plein champ parce qu’il y a des
risques de dissémination qui ne sont pas acceptables.
Hubert Bouillon
Par rapport aux faucheurs OGM, quelle est votre position ? José BOVÉ qui a déjà fait de la prison, des
amendes…
Ségolène Royal
Mais je trouve ça scandaleux. Je vais vous dire pourquoi. Parce que si les textes européens étaient
transcrits en droit français, notamment avec le principe de précaution, il n’y aurait pas d’OGM en plein
champ. Et je lui ai apporté mon soutien, au tribunal… Et pour l’agriculture biologique, j’y suis bien sûr
favorable, ça peut pas être toute l’agriculture, mais je pense que les aides à l’agriculture biologique
doivent être fortement augmentées, parce que c’est ce qui permet aussi le maintien d’un certain nombre
d’activités.
Patrick Poivre d’Arvor
On clôt provisoirement ce débat, José Bové sera notre invité la semaine prochaine.
Jessy Bitarelle, 19 ans, Caours (80), électricien.
Bonsoir madame. Ma question est sur un sujet qu’on n’aborde jamais. Serait- il possible que les politiciens
ainsi que Bruxelles ne prennent pas les décisions sur les dates d’ouverture et de fermeture de la chasse, et
que ces dates redeviennent comme avant, car ce sont les chasseurs qui peuvent dire quand on peut
chasser, et non vous. Tout simplement. Merci.
Patrick Poivre d’Arvor
C’est les chasseurs et non pas Bruxelles…
Ségolène Royal
De quelle région ?
Jessy Bitarelle
Dans la Somme.
Ségolène Royal
La Somme, ah !
Jessy Bitarelle
Donc je viens défendre la Somme pour les chasseurs.
Ségolène Royal
Sur le gibier d’eau alors ?
Jessy Bitarelle
Pour le gibier d’eau et pour la plaine aussi.
Ségolène Royal
Alors il se trouve que je rencontre les chasseurs demain. Vous savez que moi je suis élue d’un
département rural, les Deux-Sèvres, il y a beaucoup de chasseurs. Et avec eux j’ai fait des contrats de
reboisement, replanter les haies. Parce que voyez parfois il y a des convergences dans une société, on
essaye de voir ce qu’on peut faire en commun. Quand on replante les haies, ça permet aux oiseaux de
nidifier et donc aux chasseurs de se consacrer à leurs loisirs. Je pense qu’il faut les laisser tranquilles, les
chasseurs. Et en même temps il y a des règles. Pourquoi il y a des règles ? Parce qu’il faut protéger aussi
la biodiversité. Et il faut protéger notamment les moments de reproduction, il ne faut pas qu’il y ait de
chasse à ce moment-là, pour protéger la biodiversité. Et donc je pense qu’il faut trouver des solutions
d’équilibre. Et on en trouve. Parce qu’il y a la connaissance de la ressource cynégétique, il y a le respect
d’un loisir qui doit être respecté en tant que tel, il y a le travail que font les chasseurs dans l’espace rural,
je l’ai dit à l’instant, avec le travail d’éducation avec des enfants, sur la variété des espèces animales. Et
donc je pense que les chasseurs ont toute leur place, mais en même temps je ne serai pas tout à fait
d’accord avec vous quand vous dites que c’est à eux de fixer les dates de chasse. Mais c’est à eux d’être
associés. Les chasseurs n’ont pas non plus envie de détruire tout le gibier…
Jessy Bitarelle
On n’est pas des carnassiers.
Ségolène Royal
De toute façon s’ils détruisent tout le gibier au moment de la reproduction, ils n’ont pas de gibier l’année
suivante. Moi je fais confiance à l’intelligence des gens pour discuter et pour faire en sorte que les règles
soient les plus justes possible.
Patrick Poivre d’Arvor
J’essaie de donner la parole à des gens qui n’ont pas posé de questions. Mademoiselle et ensuite
monsieur…
Sonia Boulila, 19 ans, Chenove (21), lycéenne.
Bonsoir madame. Moi j’ai une question essentiellement sur l’inégalité qu’il y a en France aujourd’hui.
J’aurai deux questions en particulier. Pour l’inégalité au sein du travail des femmes. On ne parle pas des
conditions de travail des femmes, essentiellement chez un hard discount allemand qui exploite les
femmes, qui les emploie en CDD ou à la rigueur en CDI 26 heures, elles ne peuvent pas avoir d’enfants,
elles ont des contraintes énormes, elles sont harcelées et aujourd’hui quand elles se retournent vers les
prud’hommes, elles n’ont pas de réponse, ou trop longues. Moralement je pense que c’est dur à subir,
elles savent plus vers qui se tourner et ce soir elles s’adressent à vous. Et la deuxième question, c’est
l’inégalité sociale au niveau scolaire. Vous parlez de la France de demain, la France de demain elle est
dans les écoles et au niveau des cours de soutien scolaire. Aujourd’hui en terminale, si on a besoin de
cours de soutien scolaire, il faut avoir les moyens de pouvoir les assumer et en fait à 26 € l’heure de
cours, en terminale, si on veut deux heures de cours de math par semaine, ça fait 50 € par semaine, on
multiplie ça par 4, ça va faire du 200 € par mois. Il y a une inégalité, c’est pas offert à tout le monde. Que
comptez- vous faire pour ça. Vous parlez de l’égalité des chances pour tout le monde, elle est où
aujourd’hui en France ?
Patrick Poivre d’Arvor
Il y avait une question de Viviane sur la carte scolaire…
Viviane Soulier, 59 ans, Aix-en-Provence (13), assistante familiale.
Bonsoir madame. Pouvez-vous expliquer en quoi la remise en cause de la carte scolaire peut favoriser la
mixité sociale. Ceux qui ont la possibilité, les moyens et les connaissances, choisiront de toute façon plus
facilement les bons établissements que les autres. Et pouvez- vous aussi remettre en cause l’apprentissage
à 14 ans, alors que dans le cadre de mon activité professionnelle, je vois beaucoup d’avantages à cette
mesure qui peut permettre aux enfants de ne plus se trouver en échec scolaire et du coup en échec dans la
société. Ce serait une main tendue, certainement, vers ces enfants. Merci.
Ségolène Royal
Sur l’apprentissage à 14 ans, non madame. Je ne pense pas que ce soit une bonne mesure.
Viviane Soulier
Ou alors une alternative entre…
Ségolène Royal
Madame, est-ce que vous avez dans votre famille, moi c’est mon cas, un enfant de 14 ans ?
Viviane Soulier
Oui.
Ségolène Royal
Est-ce que vraiment un enfant de 14 ans on va le mettre en apprentissage ? Non madame, je crois que la
scolarité obligatoire jusqu’à 16 ans est un progrès de l’école de la République et qu’il faut absolument
tenir bon sur les progrès fondamentaux et qu’il ne faut pas reculer, il ne faut jamais en rabattre sur des
progrès sociaux qui ont demandé beaucoup d’énergie, beaucoup de courage, beaucoup de service public.
En revanche, il y a des enfants qui s’ennuient à l’école et je suis favorable à ce que les collèges aient une
liberté pédagogique, pour leur permettre à certains enfants de faire des stages en entreprises, de leur
donner une formation concrète, d’avoir des méthodes pédagogiques différentes qui leur permettent de se
raccrocher à l’intérêt scolaire. Je pense qu’il y a beaucoup de souffrance aujourd’hui dans les collèges
chez certains élèves qui n’ont pas eu la chance de départ d’être aidés par des parents ou d’être encadrés,
ou qui ont eu des problèmes personnels très douloureux dans leur famille, ou qui ont été des enfants
maltraités, ou qui sont issus de milieux très défavorisés, et qui n’ont pas eu cette chance, qui ont décroché
à un moment. Et ça je ne le souhaite pour aucun enfant. Et en même temps je crois que la pédagogie a fait
d’immenses progrès, avec les ordinateurs on peut apprendre à lire différemment, on peut se raccrocher
avec la culture, avec le théâtre, avec le sport, et je veux que les collèges aient une liberté pédagogique
pour aider les enfants avant l’âge de 16 ans à se raccrocher à un socle de culture générale, parce que sinon
ils auront beaucoup de mal dans la vie. Mettre les enfants en apprentissage, s’ils ne maîtrisent pas
l’écriture, la lecture…
Viviane Soulier
Mais on pourrait faire en alternance…
Ségolène Royal
… l’expression orale, ils vont devenir des salariés extrêmement malheureux, vous allez les orienter vers le
chômage.
Viviane Soulier
Et vous croyez qu’ils ne sont pas malheureux, moi j’ai quand même l’occasion justement de voir des
enfants qui de 14 ans à 16 ans n’aiment pas l’école. Et vraiment usent leur fond de jean jusqu’à 16 ans
parce qu’ils sont obligés…
Ségolène Royal
Ils viennent d’où, madame, ces enfants, de quel milieu social et familial ?
Viviane Soulier
Défavorisé.
Ségolène Royal
Voilà. Donc est-ce que vous croyez que le rôle d’une République… Moi ma vision de la natio n et de la
République, c’est de ne laisser personne sur le bord du chemin.
Viviane Soulier
Mais les aider différemment.
Ségolène Royal
Et les aider différemment, vous avez raison, je vous rejoins là-dessus.
Viviane Soulier
Mais tel que c’est fait actuellement, ça ne les aide pas.
Ségolène Royal
Eh bien on va trouver des solutions, mais sans leur enlever l’école, vous voyez ce que je veux dire… En
les raccrochant comme les autres enfants, en les raccrochant à l’école mais avec des activités qui peuvent
être des activités dans l’entreprise.
Viviane Soulier
Justement les valoriser, c’est ça qui me tient à cœur.
Corinne Mollien, 45 ans, Amiens (80), responsable d’une boutique de prêt-à-porter.
Madame Royal, bonsoir. Je voulais vous poser une question pour la rentrée scolaire. Vous comptez faire
quoi pour la rentrée scolaire ? Remonter la rentrée scolaire, mais quand ?
Ségolène Royal
L’allocation de rentrée scolaire ?
Corinne Mollien
Voilà.
Ségolène Royal
À la prochaine rentrée l’allocation de rentrée scolaire sera doublée. Elle passera à 540 euros.
Corinne Mollien
540 euros.
Ségolène Royal
Oui.
Corinne Mollien
Pour les lycéennes aussi ?
Ségolène Royal
Oui, mais c’est sous conditions de ressources.
Corinne Mollien
Ah voilà, d’accord.
Ségolène Royal
Ah ben oui. Je pense que les prestations… Mais c’est sous conditions de ressources… Votre enfant
perçoit déjà l’allocation de rentrée scolaire ?
Corinne Mollien
Je touche mais…
Ségolène Royal
Oui, donc si vous relevez de l’allocation de rentrée scolaire, la rentrée prochaine cette allocation sera de
540 euros. Parce que je pense que c’est une façon de relancer aussi le pouvoir d’achat en favorisant
l’égalité scolaire. Veiller que cette allocation profite bien, bien sûr, aux élèves, très concrètement. Et je
n’ai pas répondu à la dame tout à l’heure…
Patrick Poivre d’Arvor
Sur le soutien scolaire.
Ségolène Royal
Sur le soutien scolaire, vous avez tellement raison, tellement raison. Les inégalités, mais les inégalités se
nouent là, entre les familles qui peuvent aider leurs enfants et les autres. Et moi, l’école de la République
que je veux, c’est une école qui donne les mêmes chances, le plus possible, à tous les enfants. Et je veux
que l’école publique, laïque et républicaine s’oriente vers le soutien individualisé aux élèves. Et je pense
qu’on en a la capacité. Il faut maintenant faire du sur- mesure. Et donc soit ce seront les enseignants qui
feront du soutien individualisé s’ils le souhaitent, soit nous créerons un nouveau métier, qui est un métier
de répétiteur, qui va encadrer les élèves gratuitement, ou dans le quartier ou dans le collège, parce qu’il y
a beaucoup de collégiens qui reprennent le ramassage scolaire et qui auront envie aussi que le soutien
scolaire ne se fasse pas forcément au collège, donc ça peut être fait aussi dans le quartier, en articulation
avec les parents pour ne pas les disqualifier, c’est très important, et avec les collectivités locales, donc ça
va être discuté par bassin scolaire, notamment dans les collèges et dans les écoles, avec les départements
et les communes. Mais je veux que le soutien scolaire, c’est dans mon pacte présidentiel, soit gratuit et
puisse aller à tous les élèves pour les raccrocher au bon moment. Et je veux que tous les élèves qui
veulent une place en internat de proximité puissent trouvent une place en internat, pour être bien
encadrés.
Patrick Poivre d’Arvor
Monsieur essaie désespérément de vous poser une question…
Sonia Boulila
Et sur les conditions de travail de la femme…
Patrick Poivre d’Arvor
Non s’il vous plaît madame, que chacun puisse s’exprimer. Monsieur, s’il vous plaît…
Christophe Lavau, 50 ans, Puisseguin (33), viticulteur.
Ma question a trait à la formation, et notamment en France, puisque madame parlait de la formation par
alternance. Je suis président d’un centre de formation par alternance, une maison familiale, à Vert en
Gironde et on pratique cette formation dès l’âge de 14 ans sur les 4ème, 3ème et ainsi de suite, jusqu’à un
haut niveau puisqu’on a des classes notamment sur la formation qualité, post-BTS, sur le notorisme
depuis cette année pour diversifier. Que pensez-vous appliquer par rapport à cette formation et une
question accessoire sur la viticulture, puisque le sujet n’a pas été abordé ce soir.
Patrick Poivre d’Arvor
Il l’a été un peu, mais pas d’une manière…
Ségolène Royal
C’est vrai que les maisons familiales et rurales font un travail par alternance. Mais c’est vrai aussi dans le
secteur public, cette possibilité est ouverte.
Christophe Lavau
On fête les 70 ans de l’enseignement par alternance pratiqué dans les maisons familiales cette année.
C’est pas nouveau, c’est la première institution qui a développé ce système.
Ségolène Royal
Je les connais bien, elles font du bon travail et en même temps je souhaite que les formations par
alternance se fassent aussi dans le secteur public et que les collèges aient la possibilité de le faire. Et
certains d’ailleurs le font. Je veux libérer les initiatives de ce point de vue- là. Parce que, comme vous le
dites, il y a à la fois le lien avec l’éducation scolaire, qui demeure, l’enfant n’est pas envoyé comme ça en
apprentissage à 14 ans, il y a des choses en douceur qui se font, la revalorisation à la fois
professionnelle…
Christophe Lavau
Il y a un lien entre les maîtres de stage, la famille, le corps enseignant.
Ségolène Royal
Exactement. Et je crois que c’est quelque chose de très important… Alors sur la viticulture…
Patrick Poivre d’Arvor
Allez-y monsieur…
Didier Muller, 59 ans, Nantes (44), délégué d’un groupe d’assurances.
Bonsoir madame. Je voulais revenir sur les problèmes de délinquance qui ont été quand même survolés
dans ce débat. On sait que la gauche n’a jamais été très performante pour lutter contre la délinquance,
avec notamment une augmentation de 42 % de la délinquance d’actes violents sur les personnes, sur la
période 98-2002. Qu’est-ce que vous comptez faire pour lutter efficacement contre cette délinquance ?
Merci.
Ségolène Royal
Alors, sans polémiquer, malheureusement la droite non plus n’est pas très performante, puisque les
atteintes aux personnes, en cinq ans, ont augmenté de 80 %. Et moi je ne m’en réjouis pas. Je pense que la
question de la délinquance doit échapper à la polémique politicienne et je crois qu’un des premiers
devoirs d’un État c’est d’assurer la sécurité au quotidien pour tous. Et c’est pour ça que je trouve pas bien
que la police de proximité par exemple ait été supprimée. Donc je remettrai de la police de quartiers,
parce que je pense que la police la plus efficace, c’est celle qui est au contact de la population, qui est
respectée par la population et qui respecte la population. Et donc c’est cette osmose qui est très
importante. Et avec les policiers, y compris avec des avantages matériels, parce que c’est difficile d’être
dans les quartiers les plus sensibles, je veux que le service public revienne dans les quartiers sensibles…
Didier Muller
Excusez- moi de vous couper…
Ségolène Royal
Et je l’ai dit tout à l’heure, ce qui ne va pas aujourd’hui, monsieur, c’est qu’au premier acte de
délinquance il n’y a pas de punition. Donc le gamin, il recommence. Et c’est que la délinquance est de
plus en plus précoce. Maintenant on voit des petits délinquants à 8 ou 9 ans, qui sont utilisés par les plus
grands. Et moi je veux qu’il y ait un encadrement à l’école et que les parents exercent leurs
responsabilités. Et c’est parce que je suis farouchement attachée à ces valeurs de la famille, de l’ordre
juste, de l’éducation des enfants, que je suis la mieux à même de régler ce problème. Parce que je tiens les
deux bouts : la prévention et la sanction, l’éducation et l’encadrement. Et que ça ne me fera pas peur.
Didier Muller
J’ai quand même une petite précision à vous apporter, vous voulez donc remettre la police de proximité
au goût du jour. En fait la police de proximité, donc les commissariats de quartier sont ouverts la nuit et
on sait que les phénomènes de délinquance se produisent… Pardon excusez- moi, je veux dire que les
commissariats de quartier sont ouverts le jour et on sait que les phénomènes de délinquance se produisent
la nuit. Donc ces commissariats de quartier ne servent pas à grand-chose si ce n’est d’avoir un lien entre
la population, c’est vrai agréable, mais pour lutter contre la délinquance c’est totalement inefficace.
Ségolène Royal
Mais vous avez raison. Et je pense que cette question-là devra être débattue avec les professionnels
concernés. La question de l’ouverture des services publics au moment où on en a le plus besoin. Et vous
avez tout à fait raison. C’est vrai aussi pour les éducateurs. Et donc c’est pas en mettant moins de service
public. Quand j’entends l’actuel candidat de droite dire qu’il va supprimer un fonctionnaire sur deux qui
part à la retraite, mais c’est impensable. C’est très grave. C’est même très dangereux. Et je le dis à
nouveau sans polémique puisque c’est un fait, c’est un engagement qui est pris. Mais comment est-ce
qu’on va remettre du service public ? On en a besoin dans l’école, on vient de le voir ; on en a besoin
dans les quartiers, on le voit à l’instant ; on en a besoin dans la santé, on l’a redit. Mais qu’est-ce que ça
veut dire qu’une République qui recule sur son service public ? C’est un système qui s’écroule et c’est un
système qui crée de la violence. Moi je ne veux pas une France violente, je veux une France apaisée où
les gens vivent ensemble et l’État tient debout et assume ses responsabilités.
Patrick Poivre d’Arvor
Une question en face de vous, Amaury ?
Amaury d’Hauteville, 68 ans, Paris 5ème (75), cadre supérieur à la retraite.
Bonsoir madame. Le problème de la France, à mon avis, c’est la classe politique, dont vous faites partie.
Pourquoi ? Parce qu’elle fait partie des gens complètement coupés de la réalité, fonctionnaires en grande
majorité, qui ne courent aucun risque, qui n’en ont jamais couru et qui n’en courront jamais, ni
professionnels, ni personnels. Elle a organisé la société française de telle sorte que lorsqu’on ne fait pas
partie de la famille on n’a pas droit à la parole. Et les réformes que vous proposez, il faut faire des
réformes de fond. Or vous ne proposez pas de réformes de fond, vous proposez des minuscules
réformettes à droite, à gauche, vous promettez bien sûr, vous ne tiendrez pas en fait, vous ne pourrez pas
tenir, bien évidemment. Alors les réformes importantes, aurez- vous le courage de les poser aux Français
par référendum. Parce que vous n’aurez pas le courage de les faire, vous ne pourrez pas les faire. Quelles
sont-elles ? Il faut changer les institutions. Vous avez évoqué tout à l’heure deux ou trois mesures qui
sont bonnes. On peut les reprendre ici. Il faut réformer les mandats électifs, pas plus de deux mandats ; il
faut réformer, introduire le vote blanc, effectivement, l’obligation de vote mais en même temps on ne peut
pas être élu si on n’a pas moins d’un minimum, d’un pourcentage minimum de 33 % des électeurs. Cela
veut dire qu’un électeur ne veut pas ni Pierre ni Paul, il trouve que les deux sont mauvais. Donc ces trois
mesures doivent être liées… Proposez- vous le référendum d’initiative populaire ? Oui ou non. C’est ça la
vraie démocratie.
Patrick Poivre d’Arvor
On va répondre à cette question…
Amaury d’Hauteville
Et enfin vous avez esquivé le problème de l’immigration, tout le monde sait qu’il est grave, tout le monde
sait qu’il empêche la France de sortir de la crise et tout le monde sait qu’elle se fait au détriment des
Français. Donc, inscrirez-vous dans la constitution la priorité aux Français ? Je vous rappelle qu’il y a
déclaration des Droits de l’homme et du citoyen. Vous ne parlez jamais du citoyen.
Ségolène Royal
D’abord je vais vous dire, l’immigration est un problème pour tous les pays du nord. L’immigration de la
misère sont finalement ce qui risque le plus de déstabiliser la planète. Et c’est aussi ce qui porte le plus
atteinte à la dignité des personnes. Et je l’ai dit tout à l’heure, la solution de fond à la question des
migrations de la misère, c’est que et la France et l’Europe mettent enfin en place des politiques de codéveloppement qui permettront aux gens de vivre dignement dans leur pays. On les a assez pillés, les pays
du sud, notamment les pays africains…
Amaury d’Hauteville
Ne dites pas de banalités de ce genre, s’il vous plaît…
Ségolène Royal
On a quand même été chercher les matières premières…
Amaury d’Hauteville
Je vous en prie, je vous en prie, pas de banalités de ce genre…
Ségolène Royal
Aujourd’hui je pense que…
Patrick Poivre d’Arvor
Sur le référendum d’initiative populaire…
Amaury d’Hauteville
… gravissime.
Ségolène Royal
Si si, il y a des solutions de développement et je crois qu’il faut les mettre en place parce que je ne sousestime pas le problème des migrations que vous venez d’évoquer.
Patrick Poivre d’Arvor
Et sur l’utilisation du référendum, vous êtes d’accord ?
Ségolène Royal
D’abord je voudrais vous dire que je ne proposes pas que des réformes à la marge. C’est une autre façon
de faire de la politique que je propose, une autre vision des choses. Je crois que la crise en effet est
suffisamment grave et que les rustines ne suffiront pas. Et c’est pour ça que j’ai montré ce soir qu’il y a
d’autres propositions, que c’est une autre façon de voir les choses, une autre façon de faire, une volonté
politique aussi qui peut redresser la France, et il y aura des référendums, et il y a le référendum
d’initiative populaire, en effet, qui est prévu, la réforme des institutions puisque un million de personnes
qui ont signé un texte de loi pourront obtenir le débat de ce texte de loi à l’Assemblée nationale. Donc làdessus vous avez satisfaction.
Patrick Poivre d’Arvor
J’ai une toute dernière question à votre droite, madame Royal.
Vincent Louault, 34 ans, Cigogne (37), agriculteur.
Madame Royal, j’avais une question sur la morale politique. Hier soir en m’endormant je cherchais un
mot pour définir un peu le mot des hommes et des femmes dont vous êtes des véritables professionnels de
la politique. Ce mot je l’ai trouvé dans le dictionnaire, sa définition c’est “ un peu farceur et personne peu
sérieuse ”. Farceur, sur la définition de vos propositions ; personne peu sérieuse parce que l’État dilapide
l’argent des contribuables avec vos frais et tout plein de choses, l’Élysée par exemple. Ce mot, il s’appelle
fumiste. Je suis désolé de vous le dire. Ma question : allez- vous un jour évoluer et faire évoluer tous ces
golden politique-ciens ? (applaudissements)
Ségolène Royal
Écoutez… Ça, ça plaît toujours, vous avez remarqué ! La réponse est oui, figurez-vous. Je pense que
l’État doit devenir un État modeste. Je pense que le budget de l’Élysée doit sans doute être diminué. Que
le nombre de ministères aussi. Et là aussi je l’ai fait à mon échelle pour l’instant. Vous savez, quand j’ai
été élue présidente de région, j’ai supprimé les grosses voitures. Il y avait des Vel Satis, je me suis dit :
pourquoi je vais rouler, moi, en Vel Satis ? Il y avait des réceptions, avec du champagne, etc. J’ai
supprimé cela. Parce que quand je voyais les gens avoir du mal à joindre les deux bouts, je me disais : au
nom de quoi on va dilapider l’argent ? Moi j’ai été élevée avec le respect justement des choses, le refus du
gaspillage et j’ai une règle simple : un euro dépensé est un euro utile. Et je puis vous dire que l’État que
j’incarnerai sera un État modeste, économe des deniers publics dans le train de vie de l’État. Et c’est la
raison pour laquelle l’État sera en effet réformé, je l’ai dit. Et par exemple il n’y aura plus un seul
ministre qui pourra habiter avec femme et enfants aux frais du ministère, nourris, logés, blanchis. Moi je
ne l’ai jamais fait quand j’étais ministre. Et je trouve ça scandaleux.
Patrick Poivre d’Arvor
Voilà, ce sera sur cette intervention, Ségolène Royal, que nous allons nous quitter. La semaine prochaine
il y aura une autre émission, une dernière émission avec François Bayrou, puis également avec José Bové,
avec Arlette Laguiller et avec Dominique Voynet. Je vous remercie de vous être prêtée à notre jeu des
cent questions.
Ségolène Royal
Merci beaucoup