Triticum durum Desf

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Triticum durum Desf
Ann. de l’INRAT, 2008, 81
Note de recherche n°1
LE RÔLE DES TRAITS ARCHITECTURAUX DES
RACINES DANS L'ADAPTATION DU BLÉ DUR
(TRITICUM DURUM DESF.) AUX
ENVIRONNEMENTS À CONTRAINTE HYDRIQUE
R. SAYAR (1) M. MOSBAHI (1), H. BCHINI (3) et
H. KHEMIRA (2)
(1) Institut National de la Recherche Agronomique de Tunisie, Unité
d’Expérimentations Agricoles Le Kef,
7119 Boulifa, le Kef, Tunisie.
(2) Faculté des Sciences de Gabès, Cité Erriyadh, Zrig, 6072 Gabès, Tunisie.
(3) Institut National de la Recherche Agronomique de Tunisie, , Unité
d’Expérimentations Agricoles El-Afareg, B.P. 260, 9000 Béja, Tunisie.
RESUME
Une meilleure compréhension de l’architecture
racinaire est essentielle pour la sélection des variétés plus
efficientes du point de vue efficacité de l’utilisation d’eau
sous contrainte hydrique. L’objectif assigné à cette étude
est la mise au point des différences dans les caractéristiques
du système racinaire chez cinq cultivars de blé dur. En
serre, un essai a été conduit selon un dispositif aléatoire
complet dans des tubes en PVC et sous deux régimes
hydriques. Le rendement en grains et six traits racinaires
mesurés durant 3 stades de développement ont été
enregistrés. Les résultats ont montré une grande variabilité
génétique au niveau des traits architecturaux racinaires. La
corrélation entre le régime hydrique et la plupart des
paramètres racinaires est importante. Sous contrainte
hydrique, la longueur de la racine la plus longue (LRPL) et
sa finesse peuvent être considérées comme étant les critères
les plus fiables pour évaluer le niveau de la tolérance à la
sécheresse chez le blé dur.
Mots clés: blé dur ; régime hydrique ; architecture
racinaire ; stade végétatif
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Note de recherche n°1
ARCHITECTURAL ROOT TRAIT’S ROLE IN
DURUM WHEAT (TRITICUM DURUM DESF.)
ADAPTATION INTO WATER-LIMITED
ENVIRONMENTS
ABSTRACT
A better understanding root system structure and
function is critical to crop improvement for water use
efficiency in water-limited environments. This study aims to
examine root system characteristics of five wheat cultivars
regarding tolerance to water limitation. In greenhouse and
under two moisture treatments, single plants were grown in
soil-filled PVC tubes. Six root traits and kernel yield were
measured during three growing stages. The results showed
high genetic variability of root characteristics and grain
yield. In water-limited conditions, the deeper primary root
and its thickness could be considered as the most reliable
criteria for drought tolerance.
Key words: durum wheat; moisture treatments; root
architecture; growing stage.
‫ملخـــص‬
‫دور الخاصيات الشكلية للجذور في تحمل الجفاف لدى القمح‬
‫الصلب‬
‫لمزيد فهم أهمية شكل الجذور في كفاءة إستعمال الماء أجريت تجربة‬
‫في بيت محمي و باختيار تصميم القطاعات العشوائية الكامل هذه التجربة على‬
‫ أصناف من القمح الصلب تحت مستوين من الرطوبة و خلل ثلث مراحل نمو‬5
‫ و لقد‬.‫و ذلك لتقييم خاصيات الجذور و مدى مساهمتها على تحمل الجفاف‬
‫ إن‬.‫بينت النتائج فوارق جينية كبيرة سواء بالنسبة لقيم الجذور أو للغلة الحبية‬
‫ أما‬.‫الترابط بين معظم خاصيات الجذور و مستوى الرطوبة كان قويا و موجبا‬
‫تحت ظروف الجفاف يعتبر الجذر الطول والدق من أكثر الخصائص و الصفات‬
.‫لتقييم قدرة الصنف على تحمل الجفاف‬
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‫ خاصــيات‬،‫ تحمــل الجفــاف‬،‫ مستوى الرطوبــة‬،‫ قمح صلب‬: ‫كلمات مفتاح ّية‬
.‫الجذور و مرحلة النمو‬
INTRODUCTION
La céréaliculture pluviale en Tunisie couvre environ
1,5 millions d’hectares. La superficie céréalière
potentiellement irrigable n’est que de 6% seulement. La
variation moyenne inter-annuelle des précipitations est
élevée de telle sorte que presque aucune année n’est
similaire à l’autre (Sayar et al., 2005). En effet, il a été
montré que le développement et la croissance des plantes
sont très sensibles à la carence hydrique (Passioura 2006) et
que la photosynthèse, le métabolisme des carbohydrates et
de l’azote sont profondément altérés (Luan, 2002). Chez le
blé dur (Triticum durum) des différences génotypiques en
réponse au déficit hydrique ont été mises en évidence pour
l’activité stomatique (Quarrie, 1980), le potentiel osmotique
et hydrique des feuilles (Sayar et al., 2005), le taux
d’accumulation du proline (Luan, 2002) et celui d’acide
abscissique (Bray, 2002), la capacité des feuilles à retenir
l’eau (Burghardt, 2003), la profondeur de l’enracinement
(Sayar et al., 2007), la glaucescence des feuilles (Richards,
1983), la présence des barbes (Matthew et al.,2007) et
l’utilisation de l’eau pour la fabrication de la matière sèche
(Blum, 2005). Araus et al., (2003) soulignent l’importance
du critère de sélection à adopter en notant qu’un
améliorateur peut ruiner une population en optant pour un
critère qui s’avère mauvais ou inapproprié pour
l’amélioration du rendement final. Nass et Sterling (1981)
notent qu’aucun test ne peut à lui seul déterminer la réaction
globale du blé et de l’orge à la sécheresse. Marshal (1985)
remarque que les résultats des études morphophysiologiques ou biochimiques conduites sur la résistance
à la sécheresse ont en général été ignorés par les
améliorateurs en raison de l’absence d’une relation directe
évidente entre les caractères identifiés de résistance et le
rendement final obtenu en condition de carence hydrique.
Néanmoins, des caractères morphologiques ou des
paramètres faciles à déterminer pourraient constituer une
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aide à la sélection tels que la racine la plus longue et le
rendement grenier (Smith, 1987). Sous conditions de
contrainte hydrique, l’absorption d’un supplément d’eau
disponible profondément dans le profil peut aider
à l’amélioration du rendement en grains. En effet, celui-ci
est tributaire en partie des caractéristiques racinaire et de la
quantité d’eau disponible entre l’anthèse et la maturité (Ho
MD et al., 2005). Les études sur le système racinaire des
plantes sont moins développées que celles sur la partie
aérienne, notamment celles qui concernent les plantes
cultivées au champ (Wang et Smith, 2004). Récemment un
effort important a été réalisé sur l’étude de la contribution de
différents paramètres des racines dans la tolérance au stress
hydrique chez le blé dur (Manschadi et al., 2006). Par
ailleurs certains travaux ont montré qu’il existait des
interactions fortes entres paramètres racinaires et tolérance à
la sécheresse, ainsi Sayar et al., (2007) ont clairement
démontré l’importance de quelques caractéristiques du
système racinaire dans l’absorption de l’eau stockée dans le
sol en profondeur.
Plusieurs auteurs accordent beaucoup d’importance à
la longueur racinaire (Richards et al. 2002). En effet, ce sont
les plantes ayant développé des racines capables de pomper
l'eau profondément dans le sol qui seront en mesure de
l'utiliser ultérieurement. Le nombre de racines primaires et
le volume racinaire interviennent dans l’augmentation de la
surface colonisée par les racines (Benlaribi et al., 1990).
Traditionnellement, un système racinaire vigoureux permet
une meilleure résistance à la sécheresse (Bchini et al.,
2002). Toutefois, Miglietta et al., (1987) supposent que
l’idéotype de blé doit avoir un système racinaire très
développé durant les périodes sèches et restreint quand l’eau
n’est pas un facteur limitant.
Ce travail a été conduit dans l’objectif d’évaluer la
contribution des caractéristiques racinaires dans la résistance
à la sécheresse chez cinq variétés de blé dur (Tableau 1) en
vue de déterminer l’idéotype qui valorise au maximum
chaque goutte d’eau de pluie tombée et pouvant servir
comme géniteur dans un programme d’amélioration de la
résistance à la sécheresse.
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Tableau 1: Tableau récapitulatif des caractéristiques agronomiques
des cinq variétés utilisées dans l’étude (selon Sayar et al., 2007).
*: Inscrite au catalogue officiel des variétés; INRAT : Institut National de la Recherche
Agronomique de Tunisie ; CIMMYT : Centro Internacional de Mejoramiento de Maíz y de
Trigo; ICARDA: International Center for Agricultural Research in the Dry Areas.
Abréviations : (BD290273=BD ; INRAT69= IN ; Karim=KR ; Khiar =
KH et Omrabia = OMR).
1. MATERIEL ET METHODES
L’étude a été conduite à la station expérimentale de
l’INRAT au Kef pour étudier les caractéristiques de
l’enracinement du blé dur sous deux régimes hydriques. Le
premier consiste à porter le sol à la capacité au champ (CC)
une fois par semaine et le second consiste à maintenir le sol
à 1/3 de la capacité au champ. Le semis a été réalisé dans
des tubes en PVC de 20cm de diamètre et de 133 cm de
longueur (Dracup et al., 1993), les tubes sont remplis d’un
mélange tamisé de terre du profil de culture et de sable
constituant une texture limono-argilo-sablonneuse. Chaque
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tube contient une seule plante, l’essai comprend trois
répétitions, chacune d’elle comprend les trois stades
(tallage, épiaison et maturation), les cinq variétés et les deux
régimes hydriques. Les mesures ont été réalisées au cours
des trois stades végétatifs, les tubes sont immergés dans
l’eau
contenant
une
solution
dispersante
l’hexamétaphosphate de sodium à 5% pendant 24 heures
(Bhôm, 1979), la terre est séparée des racines par un jet
modéré d’eau de robinet, les racines sont ensuite lavées dans
un bac avant de procéder aux mesures. Les paramètres
étudiés sont :
* Le nombre des racines primaires (NRP), déterminé par le
comptage des racines de longueur supérieure à 1 cm.
* Le volume racinaire (VR), exprimé en cm3, a été déterminé
selon la méthode de Musick et al. (1965) en comparant les
niveaux de l’eau avant et après immersion de la totalité des
racines dans un volume d’eau connu.
* La longueur totale des racines primaires (LTR), paramètre
plus fréquemment retenu, a été mesuré en cm. Il représente
le cumul des mesures de chaque axe pris individuellement.
* La longueur de la racine la plus longue (LRPL), exprimée
en cm et confère aux variétés de blé dur une accommodation
décisive sous contrainte hydrique.
* La masse de la matière sèche racinaire (MSR), exprimée
en gramme (gr), a été déterminée après séchage à l’étuve à
60°c pendant 96 heures (Heitholt 1989).
* La finesse racinaire (FR), exprimée en cm /gramme de
matière sèche, a été estimée par le rapport de la longueur
racinaire au poids sec racinaire (Wilhelm et al., 1982).
* Indice de sensibilité à la sécheresse (ISS)
L’indice de sensibilité à la sécheresse de Fischer et Maurer
(1978) a été calculé selon la formule suivante:
(ISS) = [(1-Yd)/Yp] / [(1- Xd)/Xp],
Yd: rendement sous stress hydrique (1/3CC).
Yp : rendement sous condition favorable (CC).
Xd : rendement moyen de toutes les variétés sous stress
hydrique (1/3 CC).
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Xp : rendement moyen de toutes les variétés sous condition
favorable (CC).
En outre, BLUM (1973) définit l’indice de sensibilité à la
sécheresse comme étant le rapport entre Yd et Yp (ISS
=Yd/Yp).
Des mesures ont été faites également sur le
rendement en grains à une humidité de 12%.
L’essai a été conduit selon un dispositif aléatoire
complet à deux facteurs. L’analyse statistique a été réalisée
grâce au logiciel MSTAT de Nissen, (1990). L’ensemble
des mesures a fait l’objet d’une analyse de la variance à
plusieurs facteurs, suivant le cas, par le test de FisherSnedecor au seuil de risque de 5%. L’analyse est complétée
par des comparaisons multiples des moyennes par le test de
Newman et Keuls.
2. RESULTATS
Les résultats obtenus montrent une variabilité
génétique importante des caractéristiques de l’enracinement
chez les variétés testées au cours des trois stades végétatifs
(Tableau 2 et 3). Tous les paramètres mesurés varient en
fonction du génotype, du régime hydrique et du stade de
développement. Cette variabilité est observée aussi au
niveau du rendement en grains. Ces résultats sont en accord
avec ceux Ali Dib et al., (1992), qui ont montré que les
caractéristiques de l’enracinement sont contrôlées
génétiquement. L’analyse de la variance révèle des
différences hautement significatives au seuil 5% (P<0,0001)
entre les variétés et les stades de développement (tableau 2).
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Tableau 2: Analyse de la variance montrant la somme des carrés des
écarts de l’année, du régime hydrique, de la variété, du stade et de leurs
interactions pour (NRP), (VR) , la (LRPL), la (LTR) , la (MSR) et
la (FR).
*, **, *** : significatif respectivement
à P<0.05, 0.01 et 0.001
2.1. Paramètres racinaires
2.1.1. Le nombre de racines primaires (NRP)
Le nombre de racines primaires émises a été très
influencé par le régime hydrique et le stade végétatif chez
toutes les variétés (Tableau 3). Contrairement à la lignée BD
considérée sensible à la sécheresse, la variété OMR a
présenté les NRP les plus élevés au cours des trois stades
végétatifs pour les deux régimes hydriques. Sous le régime
hydrique (1/3 CC), les réductions moyennes du NRP au
stade tallage, épiaison et maturité ont été respectivement de
14,55%, 26,74% et 22,27%. Le NRP évolue en fonction du
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temps pour atteindre son maximum au stade épiaison chez
les cinq génotypes (Tableau 3).
2.1.2. Le volume racinaire (VR)
En conditions de contrainte hydrique, le VR a été
fortement réduit par rapport au témoin (CC) au stade
épiaison à la suite d’un ralentissement de croissance se
traduisant par une faible ramification chez toutes les
variétés. Les réductions ont varié de 35,68% pour BD à
29,51% pour OMR avec une moyenne de 32,88% (Tableau
3). Pour toutes les variétés le VR continue à augmenter pour
atteindre son maximum au stade épiaison et ce quel que soit
le régime hydrique appliqué.
2.1.3. La longueur totale des racines (LTR)
La contrainte hydrique a causé une réduction
moyenne de la longueur cumulée des axes principaux des
racines de 19,31% (Tableau 3). Cette diminution de la LTR
a été enregistrée chez toutes les variétés aux stades tallage,
épiaison et maturité respectivement de 14,11%, 17,09% et
26,74%. Sous les deux régimes hydriques et durant les trois
stades de développement, la variété OMR a présenté la
valeur la plus élevée de LTR (1620,55 cm à l’épiaison),
alors que la lignée BD (546,53 cm à l’épiaison) s’est avérée
la moins performante, ce qui explique sa sensibilité à la
sécheresse.
2.1.4. La longueur de la racine la plus
longue (LRPL)
L’augmentation moyenne de LRPL a été de 9,89%
au cours de trois stades. Bien que les différences inter-stades
soient minimes, l’effet du stress hydrique sur la LRPL est
positif et se traduit par une augmentation respective de
9,821%, 9,91% et 9,92% (Tableau 3). La vitesse moyenne
d’allongement de la RLPL pour les deux régimes hydriques
est de 0,51 cm par jour au stade tallage. Elle s’accélère à
l’épiaison (0,83 cm par jour) et ralentit ensuite pour
atteindre 0,11 cm par jour.
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Photo1: Evolution de l’allure générale de l’architecture du système
racinaire des variétés de blé dur sous le régime de la contrainte hydrique
et au cours de stades tallage, épiaison et maturité. Moyennes des 3
répétitions x 2 années.
2.1.5. La masse de la matière sèche racinaire
(MSR)
La variété OMR apparaît la plus consommatrice en
photo-assimilats en les orientant vers ses racines engendrant
un taux de MSR élevé (Figure 1).
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Figure1: Variation de la vitesse d’accumulation de la matière sèche
racinaire (MSR) exprimée en gr/jour en fonction du stade de
développement et sous les deux régimes hydriques Capacité au champ
(CC) et 1/3 de la capacité au champ (1/3 CC)]. Moyennes des 3
répétitions x 2 années.
2.1.6. La finesse racinaire (FR)
Les réponses des variétés à la contrainte hydrique
ont été très variées. Plus les racines sont nombreuses, plus
elles sont fines pouvant résulter d’un effet compensatoire.
2.2. Le rendement en grains (RDT)
L’examen des résultats relatifs au rendement en
grains par plante montre une différence inter variétale et
inter régime hydrique hautement significative (p= 0,001). La
réduction moyenne du RDT a été de 16,8 %. (Tableau 3).
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Tableau 3: Variation (V) en % des paramètres racinaires sous les deux
régimes hydriques (CC et 1/3 CC) au cours des trois stades végétatifs
(Tallage, Epiaison et Maturité) chez les cinq variétés de blé dur étudiées.
Moyennes de 3 répétitions au cours de 2 campagnes.
Abréviations : Variété (Var),Nombre des racines primaires(NRP),
Volume racinaire (VR), longueur de la racine la plus longue (LRPL),
Longueur totale racinaire (LTR), Matière sèche racinaire (MSR) et
Finesse racinaire (FR).
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2.3. Indice de sensibilité à la sécheresse (ISS)
L’indice de sensibilité à la sécheresse (ISS) permet
de juger et classer les variétés sur une seule base (Figure 2).
Selon ISS, la variété BD est la plus sensible présentant un
indice de sensibilité supérieur à l’unité (ISS=2). Parmi les
variétés étudiées, OMR s’avère la plus résistante se
caractérisant par un indice de sensibilité au stress faible
(ISSBlum = 0,47).
Figure 2: Réponse des variétés selon l’indice de sensibilité à la
sécheresse (ISS) de Blum (1973) et de Fisher et Maurer (1978)
3. DISCUSSION
La réduction du NRP après l’épiaison est expliquée
comme étant le résultat du vieillissement d’une proportion
importante des racines au voisinage de la surface. Le
volume racinaire traduit une extension et/ ou une
ramification du système racinaire qui favorise la
colonisation d’un volume plus grand de sol, rendant plus
accessible à la plante les réserves en eau et en éléments
nutritifs (Manschadi et al., 2006).
La longueur totale des racines indique un
enracinement profond permettant de pomper l’eau en
profondeur lorsque celle-ci est limitée dans les couches
superficielles du sol (Curtis et al., 2002). L’allongement des
racines jusqu’à la maturité est d’une importance cruciale
pour la formation et le remplissage des grains. Il est
tributaire d’un système racinaire capable d’absorber l’eau
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Ann. de l’INRAT, 2008, 81
Note de recherche n°1
profondément. Les résultats obtenus dans cette étude
concordent avec ceux de Boyer et Westgate, (2004).
La LRPL permet une appréciation de l’aptitude du
génotype à développer des racines longues. En effet, son
importance contribue à l’augmentation du volume de sol
exploité et par conséquent la recherche en profondeur d’une
quantité plus importante d’eau même si cette profondeur
n’est atteinte que par une seule racine principale. Ce
caractère est contrôlé par des gènes à dominance partielle
chez le blé dur (Sayar et al., 2007). Le manque d’eau
stimule les variétés à augmenter leurs LRPL au stade
épiaison (Photo 1).
Le caractère recherché est la souplesse et
l’accommodation du système racinaire (Miglietta et al.,
1987): Un système racinaire restreint sous conditions
favorables et plus important sous stress. La caractéristique la
plus importante n’est plus la quantité de matière sèche
accumulée dans les racines, mais, c’est plutôt sa destination.
En effet, celle ci sert à la production de nouvelles racines
(NRP), à la leur prolifération (VR et FR), à leur allongement
(LTR et LRPL) et à leur entretien. La réduction de la
matière sèche racinaire résulte d’une dégénérescence rapide
après la maturité ou d’une compensation résultant du
manque d’assimilats pour l’entretien par l’effet d’interaction
source puits oū les grains sont la destination d’assimilats.
Sous conditions de déficit hydrique la finesse racinaire est
particulièrement intéressante. Il renseigne sur la destination
de la matière sèche racinaire au profit de l’accroissement en
longueur des racines. Ces caractéristiques peuvent être très
bénéfiques sur deux plans, favorisant une meilleure
extension du système racinaire (Manske, 2002) et
conservant l’humidité du sol pour le remplissage des grains
vers la fin du cycle de développement. Les résultats obtenus
sont contradictoires avec ceux de Richards et Passioura,
(1981).
Le rendement en grains est un caractère polygénique.
Le système racinaire est considéré comme organe de
fixation de la plante au sol et d’absorption de l’eau et des
éléments minéraux. Sa contribution à l’élaboration du
rendement en grains reste encore mal connue. En effet, la
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supériorité de OMR sous les deux régimes ne peut être
expliquée que, d’une part, par la performance de son
système racinaire qui lui permet de s’approvisionner en eau,
et d’autre part, probablement par sa précocité suivant la
voie d’esquive. Ces résultats confirment ceux de Benlaribi
et al., (1990) et les rapports de Ludlow et Muchow, (1989)
qui émettent l’hypothèse de la sélection pour la résistance à
la sécheresse en se basant sur la longueur de la racine la plus
longue. Le rendement en grain sous stress hydrique est le
résultat de plusieurs facteurs et leurs interactions dominées
par la sensibilité au déficit hydrique, le potentiel de
production et l’esquive (Fisher et Maurer, 1978).
4. CONCLUSION
Les résultats obtenus montrent une variabilité
génétique importante au niveau des paramètres racinaires.
Excepté la LRLP, le déficit hydrique affecte négativement
tous les paramètres mesurés. Sous conditions favorables
d’alimentation en eau, il y avait un équilibre entre les
différents paramètres racinaire. Cependant, sous contrainte
hydrique les racines produites sont plus longues, plus fines
et ramifiées. Un effet compensatoire apparaît entre les
paramètres d’enracinement. La longueur de la racine la plus
longue (LRPL) et sa finesse semblent être les paramètres les
plus reliés à la résistance à la sécheresse beaucoup plus que
le volume et le nombre racinaire et peuvent être utilisées
comme indicateur de tolérance au stress hydrique chez le blé
dur. Selon Bchini et al., (2002), la longueur moyenne de la
paille est fortement corrélée à la LRPL (R² = 0,89). Elle
peut, par conséquent, être utilisée comme indicateur et
marqueur de celle ci. Toutefois, cette stratégie présente
l’inconvénient de la sensibilité à la verse. La variété OMR a
été considérée la plus résistance à la sécheresse grâce à sa
LRPL. L’amélioration de la résistance à la sécheresse
d’autres génotypes à travers le transfert de ce caractère
(LRPL) par hybridation est en cours d’essai.
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Note de recherche n°1
Remerciements
Les auteurs remercient Mr. H. Nahdi pour l’analyse
statistique ainsi que Dr M. Bensalem d’avoir accepté de
financer ce travail.
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