152 - il affronte « le chef des rois de Perse », c`est-à

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152 - il affronte « le chef des rois de Perse », c`est-à
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il affronte « le chef des rois de Perse », c’est-à-dire
l’archange affecté au royaume de Perse et ses anges rebelles
: « Les mille ans écoulés, Satan, relâché de sa prison, s’en
ira réduire les nations des quatre coins de la terre, Gog et
Magog (…)Mais un feu descendit du ciel et les dévora. » (Ap
20, 7-9 ; ME. Boismard ).
-
Il s’oppose au diable à propos du corps de Moïse, débat
évoqué par Jude : « L’archange Michel, lorsqu’il plaidait
contre le diable et discutait au sujet du corps de Moïse (…),
dit : Que le Seigneur te réprime ! » (Jude 1, 8-9 ; trad. R.
Leconte ).
-
Il est aussi vainqueur du Dragon de l’Apocalypse (Ap 12, 19) :
1
Un signe grandiose apparut au ciel : une femme ! (…) 2Elle est
enceinte et crie dans les douleurs et le travail de l’enfantement.
3
Puis un second signe apparaît : un énorme dragon rouge feu, à
sept têtes et dix cornes, chaque tête surmontée d’un diadème.
(…) le dragon s’apprête à dévorer son enfant aussitôt né. 5Or la
femme mit au monde un enfant mâle(…) ; 6et son enfant fut
enlevé jusque auprès de Dieu et de son trône tandis que la
femme s’enfuyait au désert, où Dieu lui avait ménagé un refuge
pour qu’elle y soit nourrie mille deux cent soixante jours. 7Alors
il y eut une bataille dans le ciel : Mikaël et ses anges
combattirent le Dragon. Et le dragon riposta, avec ses Anges,
8
mais ils eurent le dessous et furent chassés du ciel. On le jeta
donc, l’énorme Dragon, l’antique Serpent, le Diable ou le
Satan, le séducteur du monde entier, on le jeta sur la terre et ses
Anges furent jetés avec lui (Trad. ME. Boismard).
Le combat est décrit ici dans une vision qui montre la femme
enfantant puis poursuivie par le dragon chassé du ciel, et
protégée de ses attaques. La femme semble être dans ce passage
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l’Eglise que Satan cherche à faire périr, ainsi que ses enfants.
Mikaël est donc le protecteur de l’Eglise, comme il l’était jadis
du peuple d’Israël. C’est pourquoi, dès les premiers âges du
christianisme et jusqu’à nos jours, l’Eglise militante a eu recours
à son patronage : Byzance au IVe siècle, Rome au VIe siècle lui
ont dédié une basilique, où sa fête est célébrée tous les 29
septembre depuis 1963, à l’instigation du pape Paul VI. En
France, plus de cinq cents communes sont vouées à son
patronage.
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2. RAPHAEL
En hébreu, Raphaël, r’pa’el, signifie : « Dieu a guéri ». Son nom
exprime ainsi sa mission principale, la guérison, même s’il a aussi pour
fonction la révélation et la justice de Dieu. Il n’apparaît que dans le
livre deutéronomique de Tobie où :
-
il se présente à Tobie, fils de Tobit, et s’offre à le conduire
en Médie chez Gabaël qu’il dit bien connaître : « Tobie
sortit, en quête d’un bon guide capable de venir en Médie
avec lui en Médie. Dehors, il trouva l’ange Raphaël, debout
face à lui, sans se douter que c’était un ange de Dieu. » (Tb
5, 4 ; trad. R. Paurel )
-
il guérit Tobit de sa cécité : « 7Raphaël dit à Tobie, avant
qu’il eût rejoint son père :Je te garantis que les yeux de ton
père vont s’ouvrir. 8Tu lui appliqueras sur l’œil le fiel de
poisson : la drogue mordra et lui tirera des yeux une petite
peau blanche. Et ton père cessera d’être aveugle et verra la
lumière. » (Tb 11,7-8)
-
enfin, il délivre Sarra, la future épouse de Tobie, du démon
qu’il poursuit et neutralise : « Tobie répondit à Raphaël :
Frère Azarias, je me suis laissé dire que Sarra a déjà été
donnée en mariage sept fois, et que, chaque fois, son mari
est mort dans la chambre de noces (…). J’ai entendu dire
que c’était un démon qui les tuait (…). Raphaël lui dit : « Ne
tiens pas compte de ce démon et prends-la (…). Seulement,
quand tu seras entré dans la chambre, prends le foie et le
c œ ur du poisson, mets-en un peu sur les braises de l’encens.
L’odeur se répandra, il s’enfuira. » (Tb 6,14-18). Puis
: « Tobie se souvint des conseils de Raphaël, il prit son sac,
il en tira le c œ ur et le foie du poisson, et il en mit sur les
braises de l’encens. L’odeur du poisson incommoda le
démon qui s’enfuit par les airs jusqu’en Egypte. Raphaël l’y
poursuivit, l’entrava et le garotta sur-le-champ. » (Tb 8,2-3)
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3. GABRIEL
En hébreu, Gagrî’êl signifie « homme de Dieu, où Dieu s’est
montré fort ». Il est appelé « l’ange de l’incarnation » à cause de
la triple mission d’annonciation qu’il a reçue :
-
Gabriel annonce à Daniel, dans le livre de Daniel, l’époque
de l’accomplissement du mystère de la vision du bélier et du
bouc, ainsi que de la prophétie des soixante-dix semaines
(Dn 9,20-27)
-
Il annonce à Zacharie la naissance du précurseur Jean : «
Alors lui apparut l’ange du Seigneur, debout à droite de
l'autel de l’encens. A cette vue, Zacharie fut troublé et la
crainte fondit sur lui. Mais l’ange lui dit : Sois sans crainte,
Zacharie, car ta supplication a été exaucée : ta femme
Elisabeth t’enfantera un fils, et tu l’appelleras du nom de
Jean.(…). Et l’ange dit alors : Moi, je suis Gabriel, qui me
tiens devant Dieu et j’ai été envoyé pour te parler et
t’annoncer cette bonne nouvelle. » (Lc 1,11-13 et 19 ; trad.
E. Osty).
-
- Il annonce également à Marie la naissance du Messie (Lc
1,26-38).
Les archanges, bien qu'ayant chacun une fonction spécifique
(Gabriel le fort, Michel le combattant, et Raphaël le guérisseur),
ont des rôles communs qui se résument aux deux suivants : ce
sont des annonciateurs de la parole divine et des soldats de
l'armée de Dieu.
Leurs apparitions sont toujours emplies de récits merveilleux et
symboliques ; leur apparence physique elle-même tient du
fantastique (feu, fumée ou parfois une apparence humaine) ainsi
que leurs prouesses et combats. Nous pouvons penser que ces
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récits surnaturels mêlés à d'autres récits plus réels comme la vie
de personnages tels que Moïse ou Josué, ou encore Marie, ont en
réalité une portée didactique visant à démontrer la suprématie de
Dieu et de ses serviteurs sur les hommes, incapables de tels
exploits. Il est aussi possible que ces récits merveilleux et
extraordinaires laissent une trace plus importante dans la
mémoire des lecteurs de la Bible que les exploits d'un homme du
commun. Ainsi, il ne suffit pas aux archanges de combattre les
forces du Mal et de servir Dieu dans la transmission de ses
messages, mais il leur faut aussi servir la gloire de Dieu en le
montrant plus grand et plus fort au travers de leur existence
même, ainsi que de leurs actions et pouvoirs.
Ecole de Moscou, vers 1500, L’Archange Gabriel, extrait,
Nr. 6079 ? Emil Fink Verlag, D-7000 Stuttgart (carte postale)
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Le mystère de la chute des anges, Collection d'histoire religieuse médiévale, Série art 1,
Conseil général du Gard, 1989.
Cette œuvre est un retable sur bois, effectué par Boterie en 1509-1510, représentant la chute
des anges rebelles. La Trinité figure au centre, entourée d'ange qui la glorifient. Autour d'eux,
le combat fait rage entre les anges rebelles et les anges bons. Les mauvais anges sont entraînés
en enfer, délimité par deux masse rocheuses. En bas de la composition, les pères représentés
par l'ange Gabriel sortent de l'Eglise à gauche ; à droite nous pouvons apercevoir saint Michel.
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II. LES DEMONS
MANIFESTATIONS
DANS
LA
BIBLE
:
SATAN
ET
SES
A. ORIGINE DE SATAN
Qui est-il ? Satan, le diable, est un être surnaturel inséparable de
Dieu dans les religions monothéistes, qui répond au problème du Mal.
Si Dieu est unique, il est à l'origine de tout, du Bien comme du
Mal. Mais si Dieu est infiniment puissant, il doit être infiniment bon.
D'où la difficulté de justifier le Mal. L'existence du Diable est donc la
solution trouvée à ce problème : plus Dieu est absolu, plus il a besoin
du diable.
Sa nature. Etymologiquement, sâtân, en hébreu, désigne
"l'opposant" ; diavbolo", en grec, désigne "l'ennemi". Satan seul n'a pas
d'existence. Il a besoin, pour se réaliser, de quelque chose ou de
quelqu'un à qui s'opposer. Il a donc en lui une nature essentiellement
combative. Il tire son origine de mythes proche-orientaux qui parlent de
combats divins. Ce sont des mythes babyloniens ou cananéens,
civilisations desquelles les Hébreux ont tiré beaucoup d'éléments qui se
retrouvent, plus tard, dans les écrits bibliques. C'est là que l'on peut
trouver les premières traces d'un être comme Satan, grâce à certaines
caractéristiques. Un mythe babylonien fort intéressant raconte comment
un gigantesque dragon, dont la queue balaie le tiers des étoiles, sera
vaincu par un héros dieu. Cette histoire se trouve avec l'épisode du
dragon dans l'Apocalypse. Une autre histoire, assyrienne, raconte une
révolte contre l'autorité du dieu suprême Enlil. Cette révolte est le fait
d'Anzue, l'oiseau-messager du dieu. Il peut être considéré comme le
prototype de l'ange rebelle, de Satan qui se soulèvera contre Dieu. Ces
mythologies présentent les premières ébauches d'un être mauvais,
révolté contre Dieu, aspirant à la toute-puissance et agent du Mal sur la
terre. Mais ce ne sont que des prémices, qui ne vont pas jusqu'à la
formation du diable tel qu'on le connaît. Ces éléments des combats
mythiques (du Bien contre le Mal) babyloniens et cananéens, datant du
deuxième millénaire avant notre ère, se retrouvent dans la Bible.
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B. ROLE DE SATAN
Le diable en tant que personnage individuel reste absent de
l'Ancien Testament. En effet, le Dieu unique de l'Ancien Testament est
ambivalent. Il peut se montrer très cruel et sans pitié. Ce n'est que plus
tard que l'on tentera de séparer le Mal de Yahvé.
On attribue ce mal aux serviteurs de Dieu, serviteurs auxquels il
confie certaines tâches comme par exemple Azazel, à qui il demande
dans le Lévitique qu'on offre des sacrifices. Mais ces anges messagers
continuent de faire partie de l'entourage de Dieu. Autre exemple dans le
Deuxième Livre de Samuel (24, 15-16) : « 15(…) Yahvé envoya la peste
en Israël depuis le matin jusqu'au temps fixé, et le fléau frappa le
peuple, parmi lequel soixante-dix mille hommes moururent depuis Dan
jusqu'à Barsabée.
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L'ange étendit sa main vers Jérusalem pour
l'exterminer, mais Yahvé se repentit de ce mal et il dit à l'ange qui
exterminait le peuple : "Assez ! Retire à présent ta main." » (trad. R. De
Vaux)
Satan, l'opposant, n'est qu'un fils de Dieu, un serviteur fidèle
n'agissant qu'avec sa permission. Il remplit son rôle d'accusateur et
d'exécutant de basses œuvres. Il est l'accusateur dans le procès du
grand-prêtre Josué (Za 3, 1) : « (…) le satan était à sa droite [celle de
Dieu] pour l'accuser » (trad. A.Gelin). Mais, au fil des écrits bibliques,
Satan devient plus autonome, plus responsable du Mal. Prenons pour
exemple le recensement d'Israël sous le règne de David (pratique
interdite parla loi mosaïque) : dans le Second Livre de Samuel (24,1),
c'est Yahvé qui pousse le roi à faire ce recensement : « Va, dénombre
Israël et Juda » et qui le punit. Dans le Premier Livre des Chroniques
(seconde moitié du IVe siècle, époque sacerdotale), une autre version
est donnée : « Satan se dressa contre Israël et il incita David à
dénombrer Israël »(1Ch 21,1). C'est Satan qui agit ici de sa propre
initiative, commençant ainsi à assumer à la place de Dieu la
responsabilité du Mal.
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Une certaine influence dualiste de la religion perse transparaît.
Prenons pour exemple le livre d'Isaïe (27, 1 ; trad. J. Steinmann ) :
« 1Ce jour-là, Yahvé châtiera de son épée dure, grande et forte,
Léviathan, le serpent fuyard, Léviathan, le serpent tortueux. Il tuera le
dragon de la mer. » Le développement d’une imagerie propre au
personnage de Satan se conjuguera avec ces tendances dualistes pour
donner naissance au diable. Pourtant le pas décisif ne sera pas franchi
dans les textes canoniques de la Bible, où toutes ces images resteront
symboliques. Mais c'est dans le Nouveau Testament que le Diable
apparaît et restera omniprésent.
C. ORIGINE ET ROLE DES DEMONS
Les démons sont les anges déchus ainsi que leur descendance
issue de l’union avec des mortelles. Ce sont des esprits malins, les
ennemis de l'homme. Ces démons sont responsables des maladies, ils
rendent muet, aveugle, provoquent des convulsions qui sont présentes
lors des manifestations de possession. Ils tourmentent l'homme et sont
au service de Satan, c'est-à-dire du Mal. Les cas de possession sont
fréquents lors des affrontements entre le Christ et Satan. Prenons pour
exemple Luc (Lc 8, 28-33) : « 28Voyant Jésus, il se mit à vociférer,
tomba à ses pieds et dit d'une voix forte : "Que me veux-tu, Jésus, fils
du Dieu Très Haut ? Je t'en prie ne me tourmente pas." 29Jésus en effet
prescrivait à l'esprit impur de sortir de cet homme.(…)
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Jésus lui
demanda : "Quel est ton nom ?" - "Légion," répondit-il, parce que
beaucoup de démons étaient entrés en lui. »
Les démons supplient Jésus, démontrant la supériorité du Christ
face à eux. Le monde est envahi par ces démons qui tourmentent
l'homme ; selon le Talmud et le Midrash ils ressemblent d'une part aux
anges car ils ont des ailes, sont invisibles et connaissent l'avenir ;
d'autre part aux hommes, car ils boivent, se reproduisent et sont
mortels. Ils agissent sur l’ordre de Satan, ainsi chargé de tout le Mal,
dont ils ne sont que des émanations. Les démons qui, dans le texte de
Luc, parlent par la bouche du possédé, s'expriment à la première
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personne du singulier, preuve qu'ils ne font qu'un, Satan. Le diable est
multiple, les démons ne font qu'un.
III. LES ANGES ET LES DEMONS DANS LES
RELIGIONS DU LIVRE
A. DANS LE JUDAISME
Les anges, êtres spirituels intermédiaires entre Yahvé et les
hommes, apparaissent dans les chapitres les plus anciens de la Bible.
Leur existence est reconnue dans les textes juifs ; elle est nécessaire
pour atténuer le choc de la rencontre entre Yahvé et l’homme.
Dans le judaïsme, le monde est régi par trois colonnes et dix
sphères d'énergie qui forment un arbre de vie. Entre les sphères
supérieures, royaume des archanges et du chariot.divin, et les sphères
inférieures, royaume des anges qui accompagnent les hommes,
s’effectue un échange de vie qui donne au monde la réalité divine dans
laquelle agit l’homme, protégé et guidé par les anges.
L’ange a une identité et une vie qui lui sont propres : c’est
justement dans cette tradition qu’apparaît le concept d’ange-gardien,
selon lequel chaque être humain est accompagné durant toute sa vie
d'un bon et d'un mauvais ange. L'homme est sans cesse tiraillé entre
l'influence que l'un et l’autre exercent sur ses décisions, entre le Bien et
le Mal. Il peut sembler paradoxal de parler d'un ange « mauvais », alors
que le terme d’ange a pour nous une connotation positive. Mais dans le
judaïsme, l’idée d’un ange bon et protecteur n’aurait pas de sens si le
Mal généré par Satan n'avait pas pris forme dans la révolte de cet ange
déchu. Dieu a créé Satan pour s'opposer à lui. L'ange est donc une
créature divine, certes, mais qui peut prendre les traits de l'adversaire.
Dieu a besoin d'une réalité contraire pour prouver que son œuvre est
bonne et pour mettre à l'épreuve la foi de ceux qui croient en lui : c'est
pour cela qu'il crée lui-même des créatures mauvaises. Si les hommes
se laissent influencer par l'ange mauvais davantage que par l'ange bon,
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c'est qu'ils sont trop influençables et n'ont pas une foi immuable en
Dieu.
Cette notion d'ange mauvais rejoint les différentes préfigurations
du Satan comme le serpent de la Genèse. Satan, l’ange déchu, est puni
pour sa répugnance à s’incliner, ce qui contribue à faire de lui une sorte
d’esprit du Mal indépendant. Satan et ses formes démoniaques sont
tentatrices et essaient de corrompre l’humanité créée par Dieu.
B. DANS LE CHRISTIANISME
Le personnage du Diable est nécessaire dans le christianisme car
la conception d’un Dieu absolument bon y est prédominante. Cette
religion ne peut accepter l'idée selon laquelle Dieu puisse engendrer le
Mal, ce qui explique le recours à Satan et l’omniprésence du combat
entre Bien et Mal.
On comprend dès lors les fortes tentations de dualisme qui ont
parcouru le christianisme : Bien contre Mal, ; Christ contre Satan, anges
contre démons. L’une des plus importantes est l’hérésie gnostique, qui
rejetait en partie l’Ancien Testament et modifiait la doctrine de la
création. Selon elle, le monde n’était pas créé ou gouverné par le Dieu
transcendant, mais par des puissances inférieures et aveugles, dont le
Yahvé de l’Ancien Testament, qui ne connaissaient pas ce Dieu, mais
en étaient des émanations. L’âme, asservie aux forces du monde,
pouvait être libérée et revenir à Dieu grâce à la gnosis, la connaissance
surnaturelle apportée par le sauveur. Les gnostiques furent condamnés
par l’Eglise de Rome dans les premiers siècles. Citons également le
manichéisme. Ce courant de pensée, fondé au IIIe siècle par Mani,
voulait unir le christianisme au bouddhisme mazdéiste et à la
philosophie grecque. Il changeait le dualisme proprement gnostique en
l’assimilant au dualisme grec. Le Mal était pour lui la matière, qu’il
représentait symboliquement par des figures rappelant celles de
démons. Chez lui, les deux principes de Bien et de Mal étaient
indépendants et coéternels, cela ne voulant pas dire que tous deux aient
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été divins : seul le bon était appelé Dieu. La substance des âmes était
appelée « lumière », la matière « ténèbres ».
C. OUVERTURE SUR L’ISLAM
Il est également fort intéressant de se pencher sur la religion
islamique puisqu’elle s’inscrit dans le prolongement des traditions du
judaïsme et du christianisme. L’Islam reconnaît aussi l’existence des
anges et des démons1*.Mais bien que très proches de Dieu, ceux-ci ne
sont pas supérieurs à l’homme, car ils ne sont pas dotés de libre-arbitre.
A cause de cette différence, l’un des anges se rebella contre
Dieu, refusant de se prosterner devant Adam, et il fut maudit par Allâh.
Cet ange n’est autre que Satan, en arabe al-Shaytân, nommé également
dans le Coran par le nom propre d’Iblîs, forme probablement dérivée du
grec diavbolo". Ainsi, cet ange régressa de son statut à celui de djinn,
génie ou démon.
Les djinns nous intéressent plus particulièrement car ils sont le
reflet de cette ambivalence Bien-Mal qui parcourt notre étude. Les
djinns sont les habitants d’un monde subtil et immatériel, le âlammalakût, monde assez flou, masse informe et liquide où tout élément se
confond. Les djinns peuvent être soit bénéfiques à l’homme, soit
maléfiques. Certains ont les mêmes caractéristiques que les créatures
non humaines du monde réel, alors que les autres sont comme les
hommes, dotés de libre-arbitre et d’un intellect capable de saisir la
réalité, pouvant ainsi obtenir leur salut. Ce sont ces derniers qui peuvent
apparaître sous forme visible pour aider l’homme dans certaines
situations, et c’est à eux que le Coran s’adresse. Prenons pour exemple
la sourate ar-Rahnmân : « ô hommes et génies », où Allâh s’adresse aux
deux espèces créées qui ont une forme dans le monde concret.
1
En arabe, l'ange se dit malâ'ika.Ces êtres spirituels ne peuvent commettre aucune faute. Ils
sont asexués et supérieurs aux hommes et aux prophètes,sauf à Mahomet. La religion islamique
admet une hiérarchie des anges et reconnaît le concept d'archange, dont quatre sont reconnus :
Jibrâ'il (Gabriel),l'ange de la révélation envoyé à Mahomet ; Mikâ'il (Michel)l'un des quatre
porteurs du trône sur lequel siège Allâh ; Israfîl, qui annonce le Jugement Dernier ; et enfin,
Isrâ'il, l'ange de la mort.
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On peut donc voir dans les djinns musulmans une sorte
d’intermédiaire entre le Bien et le Mal, comme l’élaboration d’une
troisième forme céleste qui conduit soit au salut, soit en enfer. La
finitude de chaque être serait alors due à son libre-arbitre, et non plus au
pouvoir divin ou à la notion de prédestination.
CONCLUSION
Nous avons pu remarquer tout au long de notre étude que la
symbolique des anges s’oppose à celle des démons, les premiers
défendant le Bien, les seconds le Mal, dans un affrontement incessant.
Mais nous avons observé également que, outre leur mission de
protection de l’homme contre le Mal, les anges avaient aussi un rôle de
messager et d’annonciateur. En ce qui concerne les démons, nous
savons qu’ils ont été créés bons et sont devenus mauvais par leur faute.
Pourquoi Dieu qui domine malgré tout les démons les a-t-il laissés
devenir mauvais ? Et surtout pourquoi ne les a-t-il pas anéantis
définitivement, puisqu’ils étaient devenus impurs et opposés à lui, alors
même qu'il en avait le pouvoir ? Il semble qu'en réalité chacune de ces
deux forces (anges et démons) ne soit pas si foncièrement opposée à
l'autre et que chacune ait besoin régulièrement de l'autre.
BIBLIOGRAPHIE
La Bible de Jérusalem, Cerf, Paris, 1973 et 1981.
La sainte Bible, Cerf, Paris, 1961.
Dictionnaire encyclopédique de la Bible, Maredsous, Brepols, 1987.
Dictionnaire encyclopédique du judaïsme , Cerf-Laffont, Paris, 1996.
Dictionnaire encyclopédique de l’Islam, Bordas, Paris, 1991.
Le Diable, "Que sais-je", PUF, Paris, oct.1998 : chap. I « Les
ébauches du Diable » ; chap. II « Jésus l’exorciste ».

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