Spécial Espagne!

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Spécial Espagne!
Bureau de dépôt : 5000 Namur 1
Périodique bimestriel
Belgique - Belgïe
P.P.-P.B.
5000 Namur 1
6/9348
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L’As’ Veyou
Numéro 56
Mars - Avril 2005
Éditeur responsable : Antoine Derouaux rue des Bas Prés 6 5000 Namur
Agrégation P401010
Éditorial
Par Antoine
Éditorial p.2
Calendrier p.3
Compte-rendu, Voyage en terre ibérique, p.5
Anecdote, Le combat
des chefs, p.11
Couverture : Grande
Outarde dessinée par Élise
Q
ui a vu les Jaseurs ?
Depuis quelques semaines, des Jaseurs boréaux
sont observés partout en Wallonie, souvent par petits groupes, parfois en grandes bandes (il y en a eu 400
dans un jardin à Seraing !). Ils fréquentent les endroits où
il y a de la nourriture : vergers (pour les pommes et le gui)
mais aussi les bords de routes, les jardins et les parcs dans
les villes. Ils mangent des baies de viorne, d’aubépine ou
d’églantier. Comme ils ne sont pas très farouches (ils ne
croisent jamais d’hommes dans leurs pays d’origine) on
les voit là où les autres oiseaux n’osent pas trop s’aventurer. À quelques mètres des maisons, ils sont faciles à
repérer. J’ai eu l’occasion d’en apercevoir quelques uns
à Neupré le long d’une grand route, le spectacle était joli
mais comme endroit, il y avait mieux. Une telle invasion
n’avait plus été observée depuis environ 40 ans…
À part ça, c’est la neige qui marque le début de ce mois
de mars. Cependant, certaines espèces ont déjà pondu leurs œufs depuis quelques jours,
voire quelques semaines : les hulottes, les cormorans, les ouettes, les faucons pélerins,…
et les migrateurs commencent à passer. Plusieurs centaines de grues ont survolé Arlon début mars et les pinsons commencent à bouger. Le printemps arrive et il est temps de sortir
chercher les pics, les hirondelles et les coucous.
Le printemps est aussi synonyme des reprises des balades AJ intensives : nous aurons
deux mini stages (Pâques à Virelles et un autre à Redu en mai, balade à Andenne,…). Sans
oublier l’aube des oiseaux qu’AJ organise pour la troisième fois le 1 mai. Le succès est de
plus en plus grand grâce aux guides d’Aves-Jeunes et à ceux des autres sections qui nous
épaulent partout en Wallonie et à Bruxelles. N’hésite pas à y participer pour nous aider ou
pour venir voir les oiseaux.
Après ça, ce sera les examens  mais qui seront vite suivis du stage de Virelles . Il faudra
réserver rapidement car les places sont limitées.
Allez, avant les examens, voici un petit peu de rêve… Un compte rendu d’un voyage dans
le Sud de l’Espagne que quatre AJtés ont eu la chance de faire en janvier. De belles observations apparemment, dans un texte superbement illustré...
PS : on a toujours besoin de textes, sur tout ce que tu veux, tant que ça concerne la nature.
PPS : ATTENTION aux grenouilles (et à leurs sauveteurs) sur la route.
2 • Aves-Jeunes
Calendrier des activités
J
Andenne
Dimanche 20 mars
Responsable : Fabrice Sente (0472/45.81.44 ; [email protected])
Excursion ornithologique dans les bois d’Andenne, guidée
par le garde forestier du triage.
R.V. : 9h à la gare d’Andenne (fin prévue vers 17h)
J
Du vendredi 25 au lundi 28 mars
Mini stage à Virelles
Responsable : Antoine Derouaux (0494/21.65.71 ; antoine_
[email protected])
Virelles et sa région méritent un petit détour à chaque saison de l’année.
Au printemps, les oiseaux chanteurs reprennent leurs activités vocales et
les migrateurs défilent jour après jour. Durant les trois jours du week-end
de Pâques, nous les observerons et apprendrons à les identifier.
P.A.F. : 30 € (35 € pour les non membres). Stage réservé aux participants âgés de 12 à 20 ans. Inscriptions au plus tard le 23 mars
2005
J
Vallée de la Dyle
Samedi 16 avril
Responsable : Daniel Nibes (0473/85.30.21 ; [email protected].
com)
Excursion ornithologique. Nous prendrons le train à 8h12 vers Oud-Everlee. Nous remonterons ensuite la vallée de la Dyle entre Oud-Everlee et
Pécrot.
R.V. : 8h à la Gare de Pécrot (fin prévue vers 16h)
O
Dimanche 1 mai
L’Aube des Oiseaux
Programme complet : www.aves.be/jeunes
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J
Samedi 21 mai
Bois de Saint-Marcoult
Responsable : Tanguy Darbé (0494/49.07.68 ; tanguy.darbe@mineco.
fgov.be )
Excursion forestière et champêtre à la découverte de notre avifaune.
R.V. : 9h devant la chapelle de Saint-Marcoult (Silly). Fin prévue vers
13h, avec possibilité de prolongation pour ceux qui le souhaitent.
J
Du vendredi 6 au dimanche 8 mai
Redu
Responsables : Nicolas Declerck (0473/45.30.66) et Antoine Derouaux (0494/21.65.71 ; [email protected])
Week-end ornithologique dans les environs de ce sympathique village
ardennais. Logement sous tente, prévoir un sac de couchage. Réservé aux
participants âgés de 12 à 20 ans.
R.V. : le vendredi à 19h devant l’église de Redu
U
J
P
O
Du samedi 2 au samedi 9 juillet
Stage de Virelles
Responsables : Anthony Rongvaux (0495/51.93.02) et Antoine Derouaux (0494/21.65.71) ; [email protected]
À vélo et à pied, nous visiterons l’Étang de Virelles et la très belle région
environnante. Oiseaux d’eau et de bocages, rapaces diurnes et nocturnes,
chauves-souris et castor, libellules et orchidées n’auront plus de secrets
pour nous. Nous effectuerons également quelques travaux de gestion dans la
réserve naturelle de l’Étang de Virelles. Stage destiné aux participants âgés
de 12 à 20 ans, nombre de participants limité à 25 (ne tarde pas à s’inscrire!).
P.A.F. : 125 € ; 146 € pour les stagiaires non membres (ou dont les
parents ne sont pas membres), ce montant comprend la cotisation à
Aves et Natagora pour une période d’un an.
4 • Aves-Jeunes
Compte-rendu
Voyage en terre ibérique
Par Adrien, photos d’Anthony
I
l y a plus de deux ans, en septembre 2002, un groupe de jeunes avésiens organisait un
voyage dans le sud de l’Espagne et revenait émerveillé par le spectacle des migrations.
Cet hiver, trois d’entre eux (Anthony, Laurent et Adrien) accompagnés de la charmante
Élise sont repartis à la découverte d’une autre facette de ce joyau ornithologique. Récit d’un
périple d’une semaine au pays du flamenco et de la San Miguel, des riches lagunes d’Andalousie aux steppes désolées d’Estrémadure...
Samedi 22 janvier
Après une nuit passée à
Bruxelles, nous prenons le
train en direction de Zaventem où nous arrivons vers
9h. Notre avion ne décolle
qu’à 11h30, ce qui nous
laisse le temps d’enregistrer
les bagages, d’avaler une
tasse de café et de faire passer une Opinel aux rayons X
comme une lettre à la poste.
Durant les 2h30 de vol nous
essayons de contenir notre
impatience lorsqu’enfin au
loin on devine le détroit
de Gibraltar et les côtes de
l’Afrique. Nous arrivons à
Malaga où nous attend notre voiture de location. À notre grande déception, les porte canettes ne se trouvent pas devant la soufflerie
de la clim comme il y a deux ans. La cerveza
sera moins fraîche cette année !
Quelques courses plus tard nous fuyons au
plus vite cette barrière de béton qu’est la
côte espagnole du côté de Benidorm et de
Torremolinos, où nous irons peut être tous
mais une autre fois. Un arrêt sur les hauteurs
de Malaga nous offre nos premières observa-
tions de Fauvette mélanocéphale, de Traquet
pâtre, de jambon espagnol et de San Miguel.
Vers 18h nous retrouvons l’endroit où nous
avions observé un Aigle de Bonelli et un couple de Traquets rieurs il y a deux ans mais il
est trop tard pour entamer l’ascension vers la
petite ferme blanche qu’on aperçoit au loin.
Très vite la nuit tombe sur ce paysage escarpé et c’est à la lueur de la lune que nous
plantons notre tente au détour d’une colline
battue par un vent glacial.
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Dimanche 23 janvier
À notre réveil, vers 7h, le soleil n’est pas
encore levé mais le vent a cessé. De Ronda
à la côte, la route se faufile à travers un paysage grandiose que révèlent peu à peu les
premières lueurs du jour. Le ciel est dégagé
et le soleil est au rendez-vous sur les hauteurs de Tarifa, d’où l’on aperçoit le Maroc.
Le spectacle des rapaces en migration n’est
évidemment pas de saison et ce sont plutôt
les Merles bleus et les Fauvettes des alentours qui retiennent notre attention.
Direction La Junda, une plaine d’arrière
pays traversée par un canal riche en Talèves
sultanes et en limicoles. C’est aussi un des
derniers lieux de nidification de la Grue cendrée en Espagne. Parmi les oiseaux locaux
on aperçoit de temps à autres un hivernant
typique, telle cette Gorgebleue qui s’abreuve
au bord de l’eau. Le soleil est déjà bas dans
le ciel quand nous reprenons la route de Cadix.
Au bout de la presqu’île de Sancti Petri,
séparée de la ville de Cadix par un fin bras
de mer, les oiseaux se gorgent des derniers
rayons du jour. Paresseusement posées sur
des piquets en bois, les Sternes caugeks
observent du coin de l’œil une Sterne caspienne chasser avec frénésie, plongeant et
replongeant au pied de la langue de vase où
6 • Aves-Jeunes
se nourrissent quelques centaines de limicoles. Le soir venu, dans un petit resto de
Médina Sidonia nous attendrons jusqu’à 9h
l’ouverture de la cuisine en sirotant des cervezas et en regardant Majorque se faire battre par le Réal (3-1).
Lundi 24 janvier
À notre réveil, vers 8h, le soleil est sans
doute en train de se lever mais
on n’y voit pas à dix mètres.
En cause un brouillard dense
qui rend toute observation impossible sur la lagune de Médina. Il faudra attendre 13h
pour voir le soleil percer enfin cette purée de poix. Nous
sommes alors dans la réserve
de Doñana, sur la rive gauche
du Guadalquivir et le spectacle peut commencer ! Érismatures, Spatules, Aigle botté…
et ce n’est qu’un début ! Les
anciennes salines de Monte
Algaido regorgent de limicoles, de Flamands roses et de
canards qui s’ébrouent dans
une splendide lumière hivernale. Pour couronner cette après midi faste, un Balbuzard
posé se laisse observer à une cinquantaine
de mètres.
Mardi 25 janvier
Le Brasol del este ou Islamina, au sud de
Séville, est une zone de marais au milieu
des cultures, refuge providentiel pour une
multitude d’oiseaux qui se laissent observer
depuis les nombreuses pistes de terre qui la
parcourent en tous sens. Planqués derrière
une cabine électrique à l’abri du vent glacial
nous observons quarante Cigognes noires posées dans le champ voisin. Il fait caillant et le
Nutella refuse de se laisser tartiner. Premiers
Ibis falcinelles naviguant tant bien que mal
entre les rafales. Busards rasant les roselières à la recherche d’une proie. Gracieuses
Échasses blanches aux plumes ébouriffées.
L’après-midi nous passons sur l’autre rive
et impériaux . Nous apprendrons
plus tard qu’un Aigle criard traîne
dans les parages…
du Guadalquivir après un passage obligé par
Séville. C’est de ce côté-là que se trouve la
majeure partie du parc de la Doñana et les
points d’observation les mieux équipés. Souvenirs souvenirs sur ces routes pleines de
nids de poules menant d’observatoire en observatoire pour finalement aboutir au centre
d’information du parc où nous accueille, fait
remarquable, une guide espagnole parlant
un peu d’anglais ! Derrière les vitres quelques Nettes rousses nagent dans les ondes
de chaleur qui s’estompent peu à peu. Souvenirs encore lorsque nous plantons notre
tente dans une pinède où, comme l’écrit
Élise dans son carnet de voyage, « les trois
vieux croûtons ont déjà campé ». Au loin, la
Chouette hulotte chante. Nuit très froide, les
moins bien équipés d’entre nous auront bien
du mal à trouver le sommeil.
C’est une intuition étrange qui
nous étreint lorsque nous sortons
de la pinède sous le regard de la
Pie-grièche méridionale, comme si
c’était là le lieu d’un rendez-vous
attendu depuis longtemps. Le
soleil commence à réchauffer la
zone ouverte parsemée çà et là de
quelques buissons et les premières ondes de chaleur apparaissent.
Dans le ciel un point blanc fait du
vol sur place, un peu comme un
faucon crécerelle. Interrogation,
suppositions, confirmation, excitation, et enfin promesses de tournées de San Miguel à
ne plus s’en relever : c’est un Élanion blanc !
Superbe dans sa robe blanche et noire, il
se pose tandis qu’un deuxième individu le
survole. On devine son œil rouge perçant la
plaine à la recherche d’une proie.
À l’entrée principale du parc, la pinède qui
jouxte le parking regorge de Moineaux et de
Pies bleues qui ne sont pas par hasard sur
cette zone de pique nique, notre chorizo en
sait quelque chose. Nous progressons sur le
caillebotis qui chemine à travers la réserve
quand un cri étrange résonne dans un buis-
Mercredi 26 janvier
Les tentes amidonnées par le givre repliées
(en craquant), nous mettons le cap sur l’observatoire de La Rocina. Tout est calme sur
le plan d’eau, lorsque soudain un Busard des
roseaux se met à houspiller agressivement
un autre rapace qui nous parait sombre et
gigantesque comparé à son agresseur! Malheureusement le Busard zélé fait rapidement
fuir l’objet de son courroux et nous avons à
peine le temps de relever l’absence des zones claires caractéristiques des Aigles royaux
son. Un cri indéfinissable aux sonorités inconnues. La source de ce jacassement n’est
autre qu’un Coucou geai adulte posé bien
en vue sur une branche ! Pique nique agrémenté de la présence d’une Huppe et nous
L’As Veyou n°56 • Mars-Avril 2005 •
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partons pour El Rocio et sa lagune où une
quantité impressionnante de Sarcelles d’hiver, Canards pilets, souchets et autres limicoles barbotent frénétiquement.
El Rocio c’est une ville de Farwest à la sauce andalouse. Les rues y sont larges et en
sable et devant chaque maison une barre en
bois permet d’attacher sa monture. La musique d’Ennio Moriconne en tête, on s’attend à
tomber nez à nez avec Billy the Kid en duel
avec Calamity Jane dans la grand rue balayée de buissons d’épines. Malgré
nos cent chevaux sous le capot nous
nous ensablons comme des bleus et
heureusement qu’Élise est là pour
nous tirer de ce mauvais pas. Après
le braquage de la banque, notre tête
est mise à prix. Nous nous enfuyons
vers les steppes de l’Estrémadure.
rir dans un champ, n’en prennent que plus
d’intensité.
Le soir venu nous trouvons refuge au coin
du feu de bois qui crépite dans la cheminée
d’un petit hôtel de Campanario. Le patron,
en bon Espagnol, est résolument unilingue
mais parvient quand même à nous faire comprendre que la viande de Grande Outarde
c’est très bon…
Vendredi 28 janvier
La nuit risque d’être à nouveau très
froide. Forts de notre expérience de
la veille, nous décidons d’opérer un
repli stratégique vers une gargote un
peu pouilleuse de Monesterio. Les
chambres ne sont pas chauffées et
finalement il y fera cette nuit là presque aussi froid que dehors !
Jeudi 27 janvier
Les rivières ne coulent plus à travers le
paysage tourmenté du sud de l’Estrémadure
qui s’étale sous nos yeux. Tout est figé. La
nature elle-même ne semble pas préparée à
ce coup de froid inhabituel que lui inflige
l’hiver. Nos carcasses à moitié congelées
commencent à attirer les Vautours fauves
qui cerclent par paquets de cinquante, parfois assez bas dans le ciel. Il est encore tôt
pour les rapaces mais déjà la silhouette impériale d’un Aigle royal se découpe dans le
halo du soleil. Au fil de notre chemin le relief escarpé fait progressivement place à des
plateaux cultivés. Hormis les Pluviers dorés
en hivernage, on ne peut pas dire que les
oiseaux soient légions dans cette région de
l’Espagne, mais les quelques observations
de la journée, comme celle de cette dizaine
d’Outardes canepetières en train de se nour-
8 • Aves-Jeunes
Au-delà de Castuera, l’horizon n’est plus
qu’une étendue désolée. C’est la steppe qui
dans La Serena s’étale à perte de vue. Cà et
là des petits murets de pierres résistent tant
bien que mal aux assauts du vent, dessinant
une mosaïque bichrome et infinie. Rien ne
semble pouvoir pousser sur ces terres brûlées par le soleil et les quelques troupeaux
de moutons qui paissent aux alentours sont
la seule présence de vie. La seule ? Pas tout
à fait. Déjà le cri plaintif du Pluvier retentit
dans la lande semée de caillasse qui borde
la route tandis qu’un petit groupe d’oiseaux
rondouillards dérangé par notre présence
s’envole à tire d’ailes. La panse dodue barrée de noire, pas de doute il s’agit de Gangas
unibandes, un joli petit gallinacé que nous
ne parviendrons jamais à voir posé tant il est
mimétique et redoutablement farouche.
Au fil du temps qui s’écoule sur la plaine,
nos yeux commencent à fatiguer de scruter
les immensités à la recherche d’une hypothétique Grande Outarde. Sur les conseils de
notre excellent guide nous décidons alors de
prendre un chemin de terre perpendiculaire
à la route qui s’enfonce dans la steppe sur
des kilomètres. Décision opportune car il ne
faut pas attendre longtemps avant de tomber
sur un troupeau de vingt et une poulettes
géantes qui se pavanent majestueusement à
trois cents mètres du chemin ! Ce sont des
Grandes Outardes ! Nullement importunées
par notre présence, elles se laissent admirer
sous toutes les plumes dans des conditions
que l’on peut sans conteste qualifier d’ALNSM! Ce lieu semble bien être « the place
to be » des poulettes branchées puisque
peu après, une plâtrée de trente nouvelles
Outardes vient se poser un peu plus loin.
Leur vol battu est lourd et régulier, les ailes
barrées de blanc fortement incurvées vers le
bas. Ceci ne va pas sans attirer l’attention
de notre premier groupe qui observe la scène
le cou bien tendu puis, d’un pas militaire,
du retour à la route principale sera marqué
par le passage à toute vitesse d’un Faucon
émerillon. Sa chasse au ras du sol le mène à
une troupe de Grandes Outardes dont la silhouette se dessine au sommet d’une butte.
Face à l’oiseau le plus lourd d’Europe notre petit faucon sent bien qu’il ne fait pas le
poids et stratégiquement, choisit de battre
en retraite. Direction la Sierra de Tiros, lieu
d’hivernage important de la Grue cendrée.
Les champs aux alentours sont véritablement
remplis de Grandes Outardes. Sur la journée
nous en compterons environ cent cinquante
pour une seule Mésange bleue, ce qui représente environ un pourcent de la population
ibérique!
Il est déjà tard et les derniers rayons de soleil enveloppent la plaine de leur manteau
rougeoyant. D’un petit observatoire du village de Puerto Mejara nous assistons au spectacle grandiose du passage des vols de Grues
dans le couchant, puis il faut se résoudre
à repartir vers Malaga. Ca sent la fin et les
slows lacrymogènes que diffuse
Kiss FM achèvent de nous rendre
déjà nostalgiques.
Samedi 29 janvier
se met en marche en direction du champ
nouvellement investi. La suite serait délectable mais je ne peux la dire ici car elle fait
l’objet d’un article particulier (voir page 11).
Sous un ciel bleu intense fendu par des petits groupes de Gangas unibandes au ventre
noir ou catas à la queue pointue nous continuons notre traversée du désert jusqu’à un
gué qui ne nous inspire pas trop. Le chemin
Cette dernière nuit de camping
dans une plantation d’oliviers sera
sans conteste la plus froide du
voyage. Heureusement que nous
sommes (presque) tous bâtis comme des armoires à glace. La lagune
de Fuente de Piedra, dernier lieu
d’observation de notre voyage se
révèle décevante. Peut-être est-il
un peu tôt pour observer ? À Malaga, la voiture lavée et les orteils
dégelés nous baguenaudons dans
la ville ensoleillée, goûtant au passage les
gigantesques croissants locaux. Nous en
profitons aussi pour faire nos dernières observations de poulettes urbaines, facilement
reconnaissables à leur pantalon rouge.
Sous un ciel tout gris nous atterrissons à
Bruxelles en fin d’après midi. Notre aventure s’achève. L’ambiance indescriptible des
L’As Veyou n°56 • Mars-Avril 2005 •
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vastes étendues espagnoles baignées dans
une lumière glaciale risque de nous manquer. L’hiver est assurément une saison remarquable pour y voir en nombre des espèces venues du Nord
mêlées aux oiseaux
indigènes. Des lagunes andalouses aux
steppes d’Estrémadure, nous avons été
séduits par la multitude des paysages
et par l’immense richesse naturelle de
ces lieux préservés
de la pression immobilière qui a si bien
réussi à défigurer
toute une partie de la
côte ibérique. Dans
l’Espagne profonde,
les piscines chlorées
font place à des lagunes grouillantes de
vie où les canards du
Nord pourront passer
l’hiver parmi les Érismatures, et les terrains
de golf à des étendues sauvages à perte de
vue, refuges de l’Aigle impérial et du Pluvier doré. Et si cette région encore pauvre
de l’Europe devait connaître dans l’avenir
un développement économique important
(merci FEDER !), gageons que ce ne soit pas
10 • Aves-Jeunes
au détriment d’un environnement qu’il faut
à tout prix préserver si nous voulons encore
pouvoir assister un jour à l’envol plein de
puissance d’une Grande Outarde.
Ont participé à ce voyage : Élise Pire, Anthony Rongvaux, Laurent Luijckx et Adrien
Dewandre. ■
Anecdote
Le combat des chefs
Par Anthony
R
appelez-vous, nous sommes le 28 janvier 2005 en Estrémadure et après
une longue traversée du désert nous
tombons nez à bec avec une troupe d’une
vingtaine de Grandes Outardes...
Les oiseaux se tiennent à trois cents mètres de nous. Paisiblement, ils picorent à la
recherche de l’une ou l’autre graine égarée
dans la caillasse. Nous admirons la longueur
des moustaches des
mâles nuptiaux. L’un
d’eux soudain redresse la queue, puis les
ailes, pour ne plus
ressembler qu’à une
grosse boule de plumes blanches. Il est
malheureusement encore un peu trop tôt
dans la saison pour
pouvoir assister à la
totalité de cette parade nuptiale.
C’est alors qu’arrive
Grandes outardes
un second groupe d’une
trentaine d’Outardes,
d’un vol lourd mais rapide. Le grand spectacle peut commencer. À notre gauche donc,
la troupe des Otis, forte de vingt têtes et bien
installée dans la zone depuis au moins une
demi-heure. À notre droite, le régiment des
Tarda, dont l’arrivée n’est pas passée inaperçue chez les Otis. En effet, celles-ci viennent
de se mettre en marche à la rencontre des visiteuses. L’accueil sera-t-il amical ? C’est peu
probable, à voir l’allure de l’Otis-en-chef qui
a pris la tête de la troupe : la queue dressée,
le pas décidé, elle balance mécaniquement
le cou d’arrière en avant avec amplitude.
Derrière, ses partenaires suivent le rythme.
Face à elles, les Tarda avancent assez calmement à la rencontre des Otis. Soudain,
une éclaireuse se dévoue chez les Tarda. Au
pas de course, queue dressée également, en
balançant frénétiquement la tête, elle quitte
ses partenaires, fonce droit sur les Otis et
leur prend littéralement le bec. C’est à une
véritable scène de combat de rue que nous
assistons. Les deux troupes sont maintenant
côte à côte, seuls quelques individus restant
en retrait de part et d’autre. Tête contre tête,
deux individus « jouent » à celui qui pousse
l’autre le plus fort, jusqu’à ce que l’un d’eux
lâche prise peu fièrement. Les duels se succèdent. Autour de ceux-ci, les autres Outardes tournent en rond en spectatrices, semblant encourager leur favori : « Pousse plus
fort » ; « Prends-lui le bec » ; « Arrache-lui
les plumes ! ».
Après quelques minutes d’intense agitation, les deux groupes reprennent quelque
distance. Dans cette cohue, il nous a été
impossible de suivre
les déplacements de
l’éclaireuse et nous
ne savons pas si elle
a regagné son groupe
des Tarda, au sein duquel les oiseaux ont
retrouvé leur calme
et cherchent maintenant tranquillement
à se nourrir.
Par contre, chez les
Otis, un doute subsiste, un intrus pourrait encore être pré(suivez le doigt)
sent dans la bande. Mais
s’il est là, qui est-il ? Les
combats se poursuivent, chaque individu
suscitant à son tour la colère d’un autre,
toujours sous le regard des spectatrices qui
tournent autour.
La sérénité n’est toujours pas revenue un
quart d’heure plus tard lorsque nous décidons de poursuivre notre chemin. Celui-ci
se révélera être un authentique régal. Plus
loin, nous rencontrons encore une centaine
de Grandes Outardes (à distance, on pourrait
distraitement les prendre pour des troupeaux
de moutons), des Outardes canepetières,
des Gangas catas et unibandes et nombre de
Pluviers dorés : le Big Five des Steppes !
Fascinante Estrémadure… ■
L’As Veyou n°56 • Mars-Avril 2005 •
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POSTES AU SEIN D’AVES-JEUNES
Renseignements généraux et secrétariat
Anthony RONGVAUX rue du Charmois 14 à 6810 Izel
[email protected], 0495/51.93.02
Trésorerie
Éléonore DEWANDRE rue Borbouse 35 à 5170 Bois-de-Villers
[email protected], 0498/15.91.84
Antoine DEROUAUX rue des Bas Prés 6 à 5000 Namur
[email protected], 0494/21.65.71
COA (enquête, recensements...)
Antoine DEROUAUX rue des Bas Prés 6 à 5000 Namur
[email protected], 0494/21.65.71
Organisation des gestions
Anthony RONGVAUX rue du Charmois 14 à 6810 Izel
[email protected], 0495/51.93.02
Emmanuel POMA rue Jean Damart 70 à 4163 Anthisnes
[email protected], 04/372.15.87
L’As Veyou
Antoine DEROUAUX rue des Bas Prés 6 à 5000 Namur
[email protected], 0494/21.65.71
Annonce des activités dans le calendrier Natagora et publicité
Anthony RONGVAUX rue du Charmois 14 à 6810 Izel
[email protected], 0495/51.93.02
Accueil des nouveaux
Élodie NAVEAU rue du Paradis 89 à 1400 Nivelles
[email protected], 0499/42.98.75
Compte Aves-Jeunes : 001-3126623-01
Courriel : [email protected]
Site internet : www.aves.be/jeunes