Interview Gestion dans le privé, l`exemple de l`hôpital d`Antony
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Interview Gestion dans le privé, l`exemple de l`hôpital d`Antony
phar-39 3/01/07 9:52 Page 17 INTERVIEW Gestion dans le privé, l’exemple de l’hôpital d’Antony rogresser dans l’échange de nos expériences pour nous adapter à une vie médicale qui bouge toujours plus vite, tel est l’un des souhaits du Dr Denis HOVASSE, président de l’hôpital privé d’Antony, qui a répondu à nos questions sur la gestion au quotidien d’un grand établissement privé. P PHAR : Votre établissement tient une part importante dans le paysage sanitaire du sud-ouest francilien ; pouvez-vous nous le décrire brièvement ? D. Hovasse : La localisation de l’hôpital privé d’Antony (HPA) lui confère en effet une excellente accessibilité pour les résidents des communes avoisinantes, mais aussi de l’ensemble de la région. Il s’agit d’un établissement généraliste médicochirugical qui comporte 388 lits, dont 179 de chirurgie classique et 54 de chirurgie ambulatoire. En 2005, 17 200 interventions chirurgicales y ont été réalisées (en comparaison, 17 700 interventions ont été réalisées à la Pitié-Salpêtrière, avec un case-mix sensiblement équivalent). Environ 3 000 accouchements par an y sont réalisés. Notre plateau technique dispose de deux scanners, une IRM, un Pet-scan, deux scintigraphies ; la circulation de l’imagerie est informatisée dans tout l’établissement, représentant un gain de temps considérable (plus de « pochettes de radio »…). PHAR : Quel est le poids du personnel administratif par rapport à celui du personnel médical et paramédical ? D. Hovasse : Toutes spécialités confondues, 230 praticiens libéraux exercent à l’HPA, dont une soixantaine sont à temps plein. Sur l’ensemble des salariés, soit 750 équivalents temps plein, nous comptons moins de 80 personnels administratifs (20 pour 100 lits). PHAR : Comment les flux sont-ils gérés au sein des blocs opératoires ? D. Hovasse : Les règles de programmation sont mises en place par un conseil de bloc formé d’une dizaine de représentants des panseuses, des surveillantes, des anesthésistes et des chirurgiens. Ce conseil se réunit une fois par mois. Au quotidien, les plannings sont faits la veille par la surveillante et les anesthésistes, qui établissent la file opératoire et le placement des salles. Les anesthésistes assurent la transversalité et répartissent leurs équipes dans les différentes salles. PHAR : Comment réglez-vous, en tant que directeur, un éventuel dysfonctionnement : retard de praticien, programmation désordonnée, dépassement des heures d’ouverture du bloc, etc. ? D. Hovasse : Cette organisation humaine a évidemment des aléas, sources de retard, et de tensions, dans les équipes de médecins et des personnels qui les accompagnent. Les conseils de bloc essaient d’améliorer chaque année l’organisation pour que, notamment, les patients ne soient pas opérés à des heures trop tardives. Nous intervenons à chaque fois qu’il y a blocage, pour faciliter le dialogue. PHAR : Certains reprochent à l’hospitalisation du secteur libéral de ne pas, ou pas suffisamment, s’impliquer dans l’accueil de l’urgence. Quelle est votre réponse ? D. Hovasse : C’est un reproche qui n’a pas lieu d’être puisqu’il existe encore de très nombreux établissements privés dont la demande à être centre d’accueil des urgences a été refusée. Plus encore, partout où le privé a installé des urgences, on peut constater une forte attractivité et une très bonne efficacité. Par exemple, nous accueillons à l’HPA environ 35 000 urgences par an, avec une durée moyenne de prise en charge passée de 14 à 9 minutes, grâce aux efforts d’organisation de nos équipes. Autre exemple, la durée de séjour évaluée aux urgences de la clinique de Trappes pour l’accueil des personnes âgées de plus de 17 phar-39 3/01/07 9:52 Page 18 INTERVIEW 70 ans est de 2 heures, versus plus de 11 heures ailleurs. Une des forces de notre organisation est l’existence de lits strictement réservés aux urgences (11 % du total des lits) ; ainsi, 14 lits par jours restent libres et strictement réservés à l’accueil des urgences. Ceci représente un moyen relativement simple de fluidifier les urgences. PHAR : Avez-vous des tableaux de bord d’activité pour chaque segment d’activité et par praticiens ? Vous sont-ils utiles à la gestion quotidienne de votre établissement ? D. Hovasse : Oui, ces tableaux de bord nous aident pour que chaque praticien puisse évaluer ses pratiques et les comparer à celles de ses collègues de même spécialité, à la fois dans l’établissement, mais aussi par rapport aux repères nationaux. Ces tableaux de bord sont intégrés au projet médical et nous pouvons donner un retour à la fois global et segmentaire. Ils servent de base de réflexion au projet médical, notamment en ce qui concerne les durées de séjour, pour lesquelles les praticiens doivent se référer à ce qui se fait au niveau national. PHAR : L’avènement de la tarification à l’activité (T2A) a-t-il bouleversé votre organisation ? D. Hovasse : La mise en place de la T2A à l’HPA date de mars 2005. L’établissement est donc financé par rapport à son activité. Je considère positivement cette connaissance plus « intime » des pathologies que nous traitons, qui nous permet de mieux connaître et de mieux réfléchir à notre activité. PHAR : Comment avez-vous organisé la gestion polaire de l’établissement ? A-t-elle fait l’objet de grande manœuvres en vue d’affirmer un éventuel pouvoir ? D. Hovasse : Il n’y a pas de chefs de service, mais des collèges de spécialités, avec des représentants. Ces derniers sont des médecins qui, souhaitant participer à l’organisation de leur environnement professionnel, se dessinent assez naturellement comme leaders. Les réunions mensuelles avec la direction permettent aux représentants de collèges de s’exprimer sur les problèmes rencontrés et les pistes d’amélioration possibles. Ces réunions, qui existent depuis 2 ans, ont considérablement amélioré les relations des praticiens entre eux et le dialogue entre les praticiens et l’administration. 18 PHAR : Les rapport avec la Cnam sont-ils toujours sereins ? Avez-vous déjà subi une décote tarifaire ? D. Hovasse : Nous avons de très bonnes relations avec la Cnam, le but commun étant de soigner avec une enveloppe budgétaire qui est fatalement finie et non extensible. En revanche, la décote tarifaire de 3 % que nous avons subie en 2006 était une décision ministérielle et elle a été la principale motivation de la journée de grève du 19 octobre 2006. Cette grève a été totalement suivie par nos praticiens, mais aussi par nos salariés. Tous avaient vécu de façon très injuste, et dans un sentiment de fierté bafouée, cette baisse des tarifs des établissements privés, et du nôtre en particulier, dont ils connaissent l’efficience. Il y a eu une réelle cohésion entre salariés et médecins pour la défense de l’outil de travail qu’est l’établissement qui les emploie. PHAR : Comment voyez-vous vos rapports avec l’hospitalisation publique : concurrence sauvage, recherche de synergies dans certains domaines, partenariat ? D. Hovasse : Les deux secteurs sont indispensables et complémentaires. Nous avons la chance, en France, de ne pas avoir un modèle unique, même si tous les médecins formés dans notre pays viennent des hôpitaux. Le monde médical actuel fonctionne grâce à des relations étroites entre praticiens. Les avis et les expériences circulent et s’échangent, ce qui a été formalisé il y a quelques années à travers les réseaux de soin et de compétences, dont les plus emblématiques sont les réseaux cancer et périnatalité. Les écarts de pratiques se réduisent grâce aux chartes de qualité et aux méthodologies communes mises en place. Les synergies entre public et privé sont ainsi beaucoup plus importantes que ce que l’on peut penser. PHAR : Quels sont, à votre avis, les atouts de l’hospitalisation en secteur libéral par rapport au secteur public ? D. Hovasse : Il est difficile de parler de supériorité de l’hospitalisation dans l’un ou l’autre secteur. Les organisations sont différentes avec, en privé, une médecine à l’acte où le budget est strictement proportionnel à l’activité. Avec la T2A, l’hôpital public va vraisemblablement rentrer dans ce même système de financement. PHAR : Avec les différentes mesures statutaires permettant la reprise de l’ancienneté de l’activité exercée dans le secteur libéral, ne risquez-vous pas une fuite de vos praticiens vers le secteur de l’hospitalisation publique ? D. Hovasse : Comme la plupart des gros établissements privés, nous ne connaissons pas de réel problème de recrutement. Peut-être allons-nous assister à des allers et retours de praticiens entre public et privé pour avoir plusieurs « vies » professionnelles. Ces échanges potentiels d’expériences me paraissent, ici encore, à encourager et je les vois comme source d’enrichissement pour chacun des secteurs.