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Le Quotidien du Médecin
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ENTRETIEN AVEC LE PRÉSIDENT DE L’AMUF
Patrick Pelloux : « On enterre les PH ! »
Le président de l’Association des médecins urgentistes de France juge
avec sévérité les récentes évolutions du statut de praticien hospitalier.
Attaqué en justice par la police pour diffamation, il réclame par
ailleurs une clarification des relations policiers-pompiers-urgentistes.
LE QUOTIDIEN – La police vous attaque nommément en justice pour
diffamation, ainsi que les journaux « Charlie Hebdo » et
« Le Canard Enchaîné » auxquels vous avez collaboré, dans l’affaire
« Mupapa » (voir « le Quotidien » du 3 février). Comment réagissezvous à cette mise en cause ?
Dr PATRICK PELLOUX – Un commandant de police a effectivement porté
plainte contre moi ; j’ai été entendu la semaine dernière par la police judiciaire.
L’affaire « Mupapa », il faut rappeler les faits, avait scandalisé l’AMUF et le
monde de l’urgence : en janvier dernier, à Château-Thierry, un urgentiste de
l’hôpital, le Dr Mupapa, avait examiné à la demande de la police un patient en
état d’ébriété et délivré un certificat de non-admission. Quelques heures plus
tard, en cellule de dégrisement, le patient avait fait un arrêt cardiaque. Arrivé
au commissariat avec le SAMU, le même Dr Mupapa a été empêché de délivrer
des soins au malade par le commissaire qui a interrompu sa manœuvre de
réanimation au prétexte qu’il était le responsable de l’état du patient, ayant
signé le certificat de non-hospitalisation.
Cette affaire révèle un état d’esprit. De plus en plus, la police semble vouloir
se mêler de la médecine. Le commissaire a porté plainte contre moi pour
dénonciation par voie de presse mais dans cette affaire, il a quand même
empêché un médecin urgentiste de sauver un homme qui est mort.
Se pose aussi la question des relations des acteurs du secours. Depuis 2007,
nous avons travaillé au sein du « comité de coordination des urgences
médicales et des secours » ; un référentiel « d'organisation du secours à
personne et de l'aide médicale urgente » a été annoncé en grande pompe par
Roselyne Bachelot. Et puis ? Nous attendons toujours que cela débouche sur du
concret. Il faut clarifier les relations entre la police, les pompiers et les
urgentistes ! Ceci rejoint la problématique de l’accès aux soins des prisonniers
car là aussi, une meilleure organisation est nécessaire. Nous, médecins, ne
sommes pas là pour juger mais pour soigner !
Vous avez, avec d’autres spécialités « à garde », créé en 2007 une
Fédération de la permanence des soins hospitalière. Les dossiers que
vous défendez dans ce cadre avancent-ils ?
Il ne se passe rien. Pire, la loi HPST [Hôpital, patients, santé et territoires] et
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ses décrets d’application sont en train de détruire et d’enterrer définitivement
le statut de PH. On dépèce la bête. La situation des praticiens se dégrade ; à
l’intérieur de l’hôpital, le pouvoir appartient désormais à la technostructure et
elle s’en est emparée avec un esprit de revanche. Les médecins étouffent. Je
ne suis pas contre une organisation où chacun est dans son rôle – je pense
d’ailleurs que les médecins ne sont pas faits pour faire de la gestion – mais
l’hôpital se trompe d’échéance et de management. Le bras armé n’y est plus le
savoir mais la comptabilité. On crée des usines à gaz et des usines à
harcèlement dans les hôpitaux publics.
Pour parler de la PDS en particulier, nous repartons sur une organisation qui
ressemble à celle d’il y a vingt ans, on va à fond… en arrière ! Tout va devenir
de l’urgence or ce n’est pas du tout comme ça que les choses fonctionnent.
Nous nous sommes battus pour structurer l’urgence, pour faire un bon
maillage et que se passe-t-il aujourd’hui ? Des cliniques choisissent leurs
urgences, leurs horaires… Les malades vont en pâtir et ceux que l’on va
montrer du doigt seront ceux qui font les gardes de nuit, la PDS.
Y compris les médecins de ville ?
Les médecins généralistes, il y a des endroits où ils sont tout seuls. On ne peut
évidemment pas leur demander d’être de garde 7 jours sur 7 et 24 heures
sur 24. Il n’y aura donc de fonctionnement que coordonné.
Quelles sont, aujourd’hui, vos revendications ?
Nous vivons une période inédite. Je n’ai jamais vu aussi peu de dialogue
social, autant de mépris pour les syndicats et pour ceux qu’ils représentent.
Comment va-t-on soigner la population si, outre les contraintes horaires et les
risques médico-légaux, nos métiers ne sont plus du tout attractifs ? Il y a
quelques semaines, un interne s’est suicidé dans un hôpital parisien. Des
médecins se suicident ! 75 % des urgentistes souffrent de burnout. Je
demande à Roselyne Bachelot d’organiser une réunion sur le sujet de la
pénibilité du travail à l’hôpital public.
› PROPOS RECUEILLIS PAR KARINE PIGANEAU
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