I. Le droit européen et national concernant l`importation dite

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I. Le droit européen et national concernant l`importation dite
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INFRACTIONS À LA RÉGLEMENTATION DOUANIÈRE DE LA PART DES
ASSOCIATIONS DE SAUVETAGE DES LÉVRIERS ESPAGNOLS
Comme nous avons déjà noté ci-dessus, une personne important des animaux domestiques en France
est considérée comme agissant à titre commerciale si elle transporte plus de cinq animaux dont elle entend
transférer la propriété une fois sur le sol national. Les règlements gouvernant ces cas étant d’origine
communautaire, ils s’appliquent aussi bien aux chiens qui sont ensuite envoyés dans des foyers d’accueil en
Belgique que ceux qui restent en France. La réglementation impose un procédé d’inspection plus strict aux
dits importateurs commerciaux, qui est souvent évité par les associations de sauvetage, qui transportent leurs
chiens en guise de particuliers voyageant avec des animaux de compagnie (I). Certaines associations
enfreignent aussi la réglementation sur l’exportation des médicaments et des produits alimentaires, qu’ils
amènent de manière informelle en Espagne (II).
I. Le droit européen et national concernant l’importation dite
commerciale de carnivores domestiques
Selon le droit en vigueur, pour transporter des carnivores domestiques d'un pays à un autre au sein de
l’UE, il faut :
1. Une identification par puce électronique/transpondeur, ou par tatouage, si ceci a été fait avant le 3 juillet
2011 et reste clairement lisible.
2. Une vaccination antirabique en cours de validité.
3. Un passeport délivré par un vétérinaire habilité par une autorité compétente attestant de l’identification et
la vaccination antirabique de l’animal.
Au cas où plus de cinq animaux voyagent, il faut également :
4. Réaliser une visite vétérinaire, notée dans la rubrique IX du passeport de chaque animal.
5. Réaliser un certificat de mouvement auprès de la direction départementale de la cohésion sociale et de la
protection des populations, sur lequel sont indiqués les numéros des passeports des animaux.
Lors de la visite vétérinaire, la présence de conditions rendant l’animal « inapte » à voyager selon les
critères de l’article R214-52 du Code rural (qui interdit le transport d’un animal malade) est également
contrôlé. Dans ces cas, le certificat de mouvement ne peut pas être accordé.
Ce système réduit les risques, mais ne peut pas empêcher le transport d’animaux malades dont la
condition est au stade de l’incubation ou ne présente pas de symptômes évidents. Ceci pose un problème
spécial dans le cas de chiens importés d’Espagne, qui sont souvent (certains vétérinaires ont estimé le taux
entre 30 à 35%) atteints de la leishmaniose, une maladie particulièrement répandue aux pays du sud de
l’Europe. Cette maladie chronique qui se propage via les piqûres de certaines espèces de phlébotomes, peut
avoir une période d’incubation allant jusqu’à un an, et est relativement difficile à identifier même une fois les
symptômes apparus. Sans traitement elle est fatale. Si les chiens atteints dont le taux d’infection est réduit
peuvent être transportés, la condition est si difficile à repérer, même dans des cas relativement avancés, que
des chiens sont souvent transportés sans que personne ne s’en rende compte.
Avec le changement climatique cette maladie se répand plus aisément qu’autrefois dans les pays du
nord de l’Europe, à tel point que le député européen Karl-Heinz Florenz a demandé en 2002 l’avis de la
Commission sur (entre autres mesures) une éventuelle interdiction à l’exportation de chiens atteints de la
leishmaniose15. Si les solutions proposés par le député ont été exclues suite à une analyse coût-bénéfice, le
risque que constitue cette maladie dans le cas d’importations importantes de chiens espagnols ne peut pas
être écarté. C’est également à noter qu’au moment de la reponse de la commission, il n’existait pas encore de
vaccin contre la leimaniose, or depuis quelques mois le vaccin Canileish est autorisé en Europe.
Le risque présenté par cette maladie ainsi que d’autres est accentué par le fait que très peu d’
associations imposent une période de quarantaine pour les chiens qu’elles importent. Souvent, les chiens sont
déposés chez leurs familles d’accueil ou leurs adoptants au cours même du voyage de retour d’Espagne, avec
des rendezvous fixés au long du trajet. Cette pratique empêche également qu’une visite vétérinaire soit faite
en France afin de préparer le certificat vétérinaire obligatoire en cas de transfert de propriété d’un animal
(voir la Section 4). Il rend également plus difficile la tâche des inspecteurs, qui n’ont pas le droit de procéder
à des contrôles inopinés chez les particuliers. Si les chiens ne transitent pas par des locaux appartennant à
l’organisme qui les transporte, la possibilité d’exercer des contrôles sur les conditions de santé et de transport
des animaux est très largement réduite. Une période de quarantaine obligatoire dans un endroit appartenant à
l’association permettrait la constation de maladies qui n’étaient pas évidentes au moment du transport, et
constituerait ainsi une protection importante pour les familles d’accueil et les adoptants. Elle permettrait
également aux associations de réaliser les visites vétérinaires réglementaires, et aux inspecteurs des services
vétérinaires de procéder à des contrôles.
La question de l'établissement des certificats de mouvement présente aussi un problème. Si la
majorité des associations de sauvetage des lévriers agissent en conformité avec les quatre premiers règles
mentionnés ci-dessus, nous avons relévé plusieurs cas d’infraction de la dernière (voir Annexe 6). Le plus
souvent ceci est du fait des bénévoles convaincus qu’ils agissent dans une capacité privé et donc ne sont pas
soumis aux mêmes règles que s’appliquent aux commerciaux proprement dites. Ainsi ils suivent les mêmes
procédés en transportant des lots de chiens au bénéfice de leur association qu’ils utilisent pour amener leur
propre chien en vacances.
Même si « nul n’est censé ignorer la loi », il arrive assez fréquemment que les non professionnels
soient sous-informés sur le droit applicapble au transport des animaux domestiques. Comme nous avons pu
constater lors de l’élaboration de ce rapport, il existe de multiples points sur lesquels le droit lui-même n’est
pas clair. Ceci est surtout le fait de la confusion entre les définitions différentes qui existent au niveau
national et communautaire de ce qui constitue une activité économique/commercial. Si la distinction
française entre commerçants/non commerçants a la mérite d’être très exacte, le développement du secteur
associatif a souligné ses lacunes. Elle rentre en conflit avec la distinction fait au niveau de l’UE entre activités
économiques et activités non économiques. Cette conception des choses est mieux adapté aux réalités
modernes, mais son application reste floue dans beaucoup de cas, faute de jurisprudence. Le droit européen
souffre également de sa méconnaissance parmi les populations. Si une majorité des Français comprend l’idée
derrière la séparation droit commercial/droit civil (même s’ils ne sont pas au courant de tous les détails),
pour le moment ce ne sont que des spécialistes qui ont une connaissance approfondi de son équivalent au
niveau européen. Ainsi, une grande nombre d’associations, n'étant pas en mesure d’avoir recours à un avocat,
concluent simplement que « nous ne sommes pas des commerçants, alors le droit commercial ne nous
regarde pas ».
Avec l’importance croissante du secteur associatif ses acteurs doivent être sensibilisés sur le droit qui
leur est applicable. Le droit européen pèse de plus en plus sur les droits nationaux, et les acteurs
économiques peuvent s’attendre à voir la définition très large de la commercialité que prône l’UE remplacer
la vision française plus restreinte. Une information et des conseils améliorés sont d’autant plus nécéssaires
qu’un grande nombre d’associations se retrouvent actuellement « assise entre deux chaises » du fait des
activités commerciales qu’elles peuvent entreprendre.
15
E-1989/02, JO C 309 E du 12 décembre 2002 (p. 184)
II. L’exportation de produits alimentaires et pharmaceutiques de la
France vers d’autres États de l’UE
En tant que contrepartie des chiens qu’ils reçoivent des refuges espagnols, un grande nombre
d’associations françaises font des dons en argent (dont la licéité desquels sera traité dans la section 5) ou en
nature, ces dernières étant constitués de médicaments (A) et de la nourriture pour chiens (B). Comme dans le
cas du transport d’animaux vivants, le droit national et communautaire encadre strictement le transport de
ces produits, que le transporteur soit commerçant ou non.
A. Les importations de produits pharmaceutiques en Espagne
Cette activité est réglementée en détail par le droit européen et espagnol, non seulement du fait de la
dangérosité inhérente à tout médicament, mais aussi compte tenue du fait que des médicaments humains et
vétérinaires a priori peu nuisibles peuvent en certains cas être transformés en stupéfiants (les exemples les
mieux connus étant le pseuoephedrine et la kétamine). Selon la directive 2001/82/CE, est considéré comme
distribution en gros de médicaments vétérinaires « toute activité qui comprend l'achat, la vente, l'importation
et l'exportation de médicaments vétérinaires ou toute autre opération commerciale portant sur ces
médicaments, à des fins lucratives ou non, à l'exclusion de la fourniture, par un fabricant, de médicaments
vétérinaires fabriqués par lui-même, de la vente au
détail de médicaments vétérinaires par les personnes
habilitées à exercer cette activité ». Tout importateur
de médicaments vétérinaires doit obligatoirement
obtenir au préalable l’autorisation de l’État vers
lequel il entend importer, qui ne peut être livré que
si des contrôles confirment qu’il remplit les
obligations statutaires en matière de personnel,
d'équipements, d’information, de contrôle et de
locaux16. Ceci n’est le cas pour aucune des
associations que nous avons étudié, dont la majorité
fait des livraisons régulières de médicaments
vétérinaires en Espagne.
Ces dispositions sont renforcées en droit
espagnol par la loi du 26 juillet 2006 relative aux
produits médicaux et sanitaires17. Cette loi transpose
la directive 2001/82/CE et précise ses modalités
Image de produits pharmaceutiques transportés en Espagne tiré d’application dans le cadre espagnol, rajoutant
du site web de l'association Passion lévriers
notamment une obligation de soumission
d’échantillons en provenance de chaque lot de
médicaments importés aux autorités espagnoles ou à celles du pays d’origine18. De même, la distribution de
médicaments vétérinaires est subordonnée à une autorisation des autorités de la communauté autonome dans
laquelle elle a lieu, qui est accordée en fonction de la qualité des locaux, du personnel et des procédés utilisés19.
Celles-ci doivent aussi assurer la conformité des distributeurs aux règles sur la traçabilité des médicaments20. Il
Directive 2001/82/CE, articles 44 et 45
Ley 29/2006, de 26 de julio, de garantías y uso racional de los medicamentos y productos sanitarios
18 Idem., titre V, article 72
19 Idem., titre IV, articles 69 à 71
20 Idem, titre VI, article 87
21 Idem, titre VIII, article 101
22 Idem, titre VIII, article 102
16
17
en suit que le fait de « ne pas réaliser lors de l’élaboration, la fabrication, l’importation, l’exportation et la
distribution de médicaments les contrôles de qualité requis par le droit sanitaire ou d’effectuer la fabrication
ou le contrôle par des procédés non valides » et « l’élaboration, la fabrication, l’importation, l’exportation et la
distribution de médicaments par des personnes physiques ou morales n’ayant pas les autorisations
prescrites »21 constituent des « infractions graves », passibles d’une amende pouvant aller jusqu’à 90 000
euros22.
De manière habituelle, les bénévoles des associations de sauvetage de lévriers organisent le transport
des médicaments « à titre personnel » en Espagne, où ils seront utilisés par des refuges. Si le droit européen et
local permet de l’importation de médicaments destinés aux besoins individuels de l’individu qui les
transporte, l’interprétation d’ « usage personnel » est extrêmement restreint en ce qui concerne les
médicaments, étant le plus souvent limité à un dosage suffisant pour deux ou trois mois seulement. A
contrario, la définition de « distribution en gros » de la directive 2001/82/CE est très large.
Il en découle que les mêmes obligations incombent aux
associations important des médicaments qu’aux entreprises
commerciales. Du fait des contrôles réduits aux douanes
intracommunautaires des abus peuvent être difficiles à
constater par les autorités. Certaines associations publicisent
même leurs livraisons de médicaments en Espagne de manière
ouverte sur leurs sites web (notamment Lévriers 74, Club de
reconnaissance et d’entraide aux lévriers et SOS Lévriers ; voir
Annexe 4). Il n’en reste pas moins que ces flux de médicaments
incontrôlés constituent un risque potentiel au niveau sanitaire.
Si la réglementation dans ce domaine est si stricte, c’est
afin d’assurer la santé publique et la confiance des
Image d'aliments pour animaux prêts à être
consommateurs par la traçabilité des produits. Des
transportés en Espagné tiré du site web de
importations de quantités de médicaments « au noir »
l'association Galgos France
empêchent cette traçabilité, et peuvent, dans le cas d’un lot de
médicaments contaminés, rendre impossible de trouver les origines des produits, ni leurs destinataires. Il rend
également possible des fuites vers le marché des stupéfiants.
B. L’importation et la distribution d’aliments pour animaux en Espagne
Bien que moins clairement dangereux que les méicaments, les aliments, même destinés aux animaux,
sont aussi sujets à une réglementation importante en matière de traçabilité. Ceci est un corollaire des
méthodes de production et de distribution industrialisées, nécessaire afin de sécuriser la santé publique. En
2007 une campagne mondiale de rappel affectant des diverses marques d’aliments pour chiens et chats a dû
être lancée suite à des problèmes de contamination. Du produit à base de gluten de blé d’origine chinoise qui
avait été incorporé aux aliments a été associé à des insuffisances rénales chez les animaux. Le nombre de
decès est inconnu, mais les estimations pour les États-Unis vont de 300 à plusieurs milliers23. Ceci souligne
non seulement l’importance d’assurer un bon niveau de traçabilité des produits alimentaires, mais aussi de
veiller au contact et aux risques de contamination entre aliments.
Au niveau européen, l’importation et la distribution de denrées alimentaires, y compris celles
destinées aux animaux, est encadrée par le « paquet hygiène », un ensemble de textes d’origine
communautaire entrés en vigueur le 1er janvier 2006, et surtout par le règlement (CE) 183/2005 sur les
aliments pour animaux.
23
Proceedings of the American Association of Veterinary Laboratory Diagnosticians, 50th Annual Conference, 18 octobre 2007
Ici comme dans sa réglementation concernant les médicaments, l’UE prend une vue large de la
commercialité, stipulant dans le règlement (CE) 178/2002 que la « mise sur le marché » sera interprétee
comme indiquant « la détention de denrées alimentaires ou d'aliments pour animaux en vue de leur vente, y
compris l'offre en vue de la vente ou toute autre forme de cession, à titre gratuit ou onéreux, ainsi que la
vente, la distribution et les autres formes de cession proprement dites ». Il en va de même pour les
« entreprises du secteur de l’alimentation animale », qui comprend toute entreprise publique ou privée
assurant, dans un but lucratif ou non, des opérations de production, de fabrication, de transformation,
d'entreposage, de transport ou de distribution d'aliments pour animaux. Autrement dit, hormis quelques
exceptions pour la consommation personnelle, les chasseurs et les petits producteurs, tout transfert de biens
alimentaires est essentiellement commercial. Dans cette optique, toute association qui transporte des
produits alimentaires pour animaux est considérée, au moins en ce qui concerne l’activité de transport,
comme une entreprise commerciale.
Dans ce contexte devront être appliqués les normes d’agrément, d’inspection, de stockage, de
documentation et de transportation listés par le règlement 183/2004, ce qui n’a pas été le cas, par exemple,
lors de bien de voyages documentés dans l’Annexe 4, qui n’observent ni les conditions d’adaptation du
moyen de transport ni celles de séparation des biens transportés24, qui visent à éviter la contamination entre
aliments et entre produits alimentaires et autres matières. Les transporteurs sont notamment obligés de
séparer les biens alimentaires et les autres biens, d'assurer la propreté des lieux et de ne pas stocker ou
transporter les produits à une température au-dessus de celle recommandé par le manufacturier. Ceci n’est
pas le cas lors de bien de transports effectués par les associations de sauvetage, qui transportent des produits
alimentaires avec des animaux, et sans protection contre la chaleur.
Ces dispositions sont renforcées dans le droit espagnol par la loi du 24 avril 200325, qui stipule que
« les établissements ou intermédiaires qui entreprennent de l’élaboration, fabrication, importation,
exportation, distribution, transport ou commercialisation de produits alimentaires destinés aux animaux (…)
seront sujets à une autorisation, qui doit être obtenu au préalable », qui est à solliciter auprès des autorités de
la communauté autonome dans laquelle l’organisme s’exerce. Le droit français exige également
l’enregistrement de ces organismes26. Or, les associations que nous avons étudié ne figurent pas sur les listes
publiés par le Ministère de l’agriculture d’entreprises agrémentées.
En France des dispositions afférentes se trouvent également dans le titre V, chapitre VIII du Code
rural, au sujet du transport de denrées alimentaires ainsi que des aliments pour animaux. Il traite notamment
de la traçabilité27 et de la nécessité pour les transporteurs qui procèdent à des mouvements
intracommunautaires de produits alimentaires d’être en mesure de fournir la documentation associée à leur
cargaison lors des inspections des douanes28 (voir la Section 3). Ces inspections étant de nature aléatoire afin
de ne pas enfreindre le droit européen sur la libre circulation des marchandises, les associations peuvent, en
pratique, agir dans une liberté relativement important. Il n'en demeure pas moins que leurs exportations sont
fréquemment de nature à aller à l’encontre de la réglementation sanitaire. Il arrive néanmoins qu'elles
subissent des inspections par la DDSV et la gendarmérie, mais ces visites se font généralement à des
moments en dehors des transports, et donc n’ont pas l’occasion de relever des infractions en rapport avec le
déplacement de biens et d’animaux. A titre d’exemple, un récit d’une de ces inspections se trouve sur le site
internet de l’association Lévriers sans frontières : http://www.levriersansfrontiere.com/article-tresmouvemente-ce-dernier-voyage-81195097.html.
Lors de nos recherches nous avons recensé au moins 10 associations (Annexe 4) dont les sites web
Voir règlement (CE) 853/2004, annexe III, section V
Ley 8/2003, de 24 de abril, de sanidad animal.
26 Arrêté du 28 février 2000 pour l’alimentation animale, arrêté du 23 avril 2007 modifié
27 Code rural, article L. 257-6
28 Code rural, article L. 236-7
24
25
contiennent des images de transports d’aliments qui ne remplissent pas, au moins partiellement, les
obligations imposées par la réglementation autour du transport de produits alimentaires pour animaux et de
la traçabilité de ces derniers.

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