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Conservatoire National des Arts et Métiers Chaire de BANQUE Document de recherche n°4 (GP) Le CVG (certificat de valeur garantie) comme actif patrimonial : une étude de cas Professeur Didier MAILLARD Janvier 2003 Avertissement La chaire de Banque du Conservatoire National des Arts et Métiers met à la disposition du public, sur son site, des documents présentant le résultat de recherches menées en son sein, à des fins d’information, de diffusion des connaissances et d’échanges dans les domaines visés. Bien que le plus grand soin ait été apporté à la collecte des informations et à leur traitement, les documents et éléments graphiques publiés sur ce site sont fournis en l’état et sont susceptibles de contenir des inexactitudes ou des erreurs. Les auteurs sont susceptibles d’apporter à tout moment des modifications et améliorations au contenu des documents diffusés. 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Les citations sont permises à condition que soient mentionnés clairement et explicitement les auteurs, la chaire de Banque du CNAM et les coordonnées du site sur lequel les documents sont disponibles ; et que les citations ne soient faites qu’à des fins informatives et non commerciales. 1 – Problématique Les certificats de valeur garantie sont des titres promettant à leurs détenteurs un paiement, à un certain terme, fonction décroissante de la valeur d’une action à ce terme (cf. Document de recherche n°3 : Le CVG dans les restructurations bancaires). Il est possible d’évaluer les CVG, qui sont des options ou combinaison d’options relativement simples, dont le sous-jacent est une action, à l’aide des modèles de valorisation usuels. On constate fréquemment qu’au moment de leur création, ou peu après ce moment, les CVG cotés sur un marché font apparaître un prix inférieur à celui qui ressort de la valorisation des modèles. Au moment des opérations BNP-Paribas-Société Générale, le management de Paribas, hostile à l’offre de la BNP, avait d’ailleurs fait valoir que le CVG, proposé comme partie du prix d’achat des actions Paribas, vaudrait moins une fois coté que la valeur issue des modèles dont faisait état la BNP dans son offre, et que la décote serait probablement de 40 %. C’est effectivement ce qui a été constaté une fois que l’opération sur Paribas s’est conclue et que le CVG a été coté. Si l’on fait confiance au modèle de valorisation, le CVG constitue donc peu après son émission un actif sous-évalué par le marché, qui devrait donc être recherché comme actif patrimonial ; et ceci d’autant plus que le CVG a une durée de vie limitée. A son terme, le CVG se solde par un paiement, si les conditions sont remplies, par l’émetteur. En tant que tel, le CVG constitue bien sûr un actif risqué, dont la valeur va amplement fluctuer. Mais sa valeur doit normalement baisser si l’action sous-jacente s’apprécie et 1 augmenter si l’action sous-jacent se déprécie. Il doit donc être possible, en théorie, de constituer un portefeuille, à partir du CVG et des actions sous-jacentes, dans lequel le risque s’élimine en grande partie. C’est d’ailleurs le principe de l’évaluation des options que de constituer de tels portefeuilles. Si cette construction, qui doit permettre de récupérer les avantages de la sous-évaluation initiale du CVG, est possible en théorie, qu’en est-il en pratique ? L’étude de cas présentée ici porte sur le CVG BNP Paribas. Elle conclut qu’il était effectivement possible de constituer un portefeuille rapportant sensiblement plus que le taux d’intérêt sans risque de l’époque (de l’ordre de 3,5 % par an), avec un risque relativement faible dans l’absolu d’une part, et non corrélé à celui du marché d’autre part. Il semble qu’il existe ainsi encore quelques anomalies de marché dont les investisseurs puissent tirer parti. De fait, une bonne partie des intervenants sur la marché du CVG était constitué d’arbitragistes, comme les gérants de hedge funds. Leur présence semble toutefois avoir été insuffisante pour éliminer dès le départ la probable anomalie de marché. 2 – Portefeuille d’investissement dans le cas du CVG BNP Paribas. On se place dans la situation d’un investisseur en septembre 1999. L’opération de la BNP sur Paribas s’est achevée à la mi-août. Les CVG sont créés en paiement des actions Paribas et cotés début septembre. Le 10 septembre, l’action BNP Paribas vaut autour de 78 € et le CVG autour de 6,7 €. Compte tenu du terme du CVG (fin juin 2002), des taux d’intérêt sans risque alors en vigueur, de perspectives de dividende en croissance modérée sur le dernier dividende versé par la BNP, et d’une hypothèse assez standard de volatilité annuelle du cours de BNP Paribas de 30 %, la valeur du CVG donnée par un modèle de Black et Scholes est de 12 €. On constate donc une décote du prix de marché par rapport à la valorisation par le modèle de près de 44 %. L’investisseur décide d’acquérir 1000 CVG, qu’il se procure au prix de 6,59 € hors frais, 6,67 € frais compris (l’investisseur n’étant pas un professionnel et traitant de petites quantités, ses frais s’élèvent à plus de 1 % du montant de la transaction…). Par ailleurs, son modèle lui indique que le delta théorique du CGV est de –0,176, c’est-à-dire qu’une hausse de 1 euro de l’action BNP Paribas doit normalement s’accompagner d’une baisse de 0,176 € de chaque CVG qu’il a en portefeuille. Pour couvrir le risque directionnel sur ses CVG, l’investisseur décide d’acquérir 170 actions BNP Paribas (plutôt que 180 pour limiter les frais de transaction…). Elles lui coûtent 77,75 € pièce hors frais et 78,80 € frais compris. Date d'achat 10/09/1999 Actifs Actions BNP Paribas CVG BNP Total Valeur du portefeuille à l'achat (€) Nombre Prix d'achat Valeur hors frais 170 77,75 13217,50 1000 6,59 6590,00 19807,50 2 Prix d'achat Valeur frais compris 78,80 13396,16 6,67 6670,72 20066,88 Le montant de l’investissement est ainsi de 19 807,50 € hors frais, et de 20 066,88 € frais compris. Les frais de transaction ne sont, on le voit, pas négligeables. Aussi l’investisseur se fixe-t-il comme ligne de conduite de ne pas modifier sa couverture (qui consisterait à acheter ou vendre des actions BNP Paribas) tant que le delta des CVG se situe entre –0,15 et –0,20, et d’aviser si l’un des seuils est franchi. Les 1000 CVG valant selon le modèle 12 000 €, c’est environ 5 400 € que l’investisseur s’attend à récupérer sur son portefeuille du fait du retour présumé à une valorisation normale d’ici le terme. 3 – Evolution de la valeur du portefeuille d’investissement Dans les treize mois qui ont suivi la constitution du portefeuille, l’évolution de la valeur boursière du CVG et de sa valeur théorique (issue du modèle) a été la suivante. 14 12 10 8 6 4 2 00 00 00 00 00 00 06 /1 0/ 08 /0 9/ 11 /0 8/ 14 /0 7/ 16 /0 6/ 00 CVG théorique 19 /0 5/ 21 /0 4/ 00 24 /0 3/ 00 25 /0 2/ 00 99 CVG 28 /0 1/ 99 99 99 31 /1 2/ 03 /1 2/ 05 /1 1/ 08 /1 0/ 10 /0 9/ 99 0 Ecart Le CVG a connu une évolution heurtée. L’écart entre son cours boursier et sa valeur théorique s’est sensiblement réduit, à moins de la moitié de sa valeur initiale. Le delta du CVG a aussi fluctué, en restant pendant l’essentiel du temps dans la bande prescrite de –0,20 à –0,15. 3 Delta des 1000 CVG (valeur absolue) 250 225 200 175 150 10 /1 0/ 00 00 00 10 /0 9/ 10 /0 8/ 10 /0 7/ 00 00 00 10 /0 6/ 00 10 /0 5/ 00 10 /0 4/ 00 10 /0 3/ 10 /0 2/ 00 10 /0 1/ 10 /1 2/ 99 99 99 10 /1 1/ 10 /1 0/ 10 /0 9/ 99 125 A la fin de cette période, le delta a toutefois franchi le seuil des –0,20 : il aurait fallu, pour maintenir la position en delta-neutre, racheter 30 actions BNP Paribas, ce qui aurait impliqué une remise de fonds et des frais de transaction non négligeables. La valeur du portefeuille a bien augmenté en treize mois. Evolution de la valeur du portefeuille (100 à la constitution) 130,00 120,00 110,00 100,00 4 00 10 /1 0/ 00 10 /0 9/ 00 10 /0 8/ 00 10 /0 7/ 00 10 /0 6/ 00 10 /0 5/ 00 10 /0 4/ 00 10 /0 3/ 00 10 /0 2/ 00 10 /0 1/ 99 10 /1 2/ 99 10 /1 1/ 99 10 /1 0/ 10 /0 9/ 99 90,00 L’investisseur considère qu’il a enregistré une bonne moitié de l’effacement de la sousvalorisation du CVG sur treize mois, et compte tenu des réajustements nécessaires, décide de liquider la position. 4 – Evaluation de la performance du portefeuille d’investissement Le 13 octobre 2000, les CVG sont revendus 7,20 € l’unité et les actions BNP Paribas à 90 € l’unité. Après prise en compte des frais, on arrive à 7,11 € pour le CVG et 89,16 € pour l’action. Date de vente 13/10/00 Actifs Actions BNP Paribas CVG BNP Total Valeur du portefeuille à la vente (€) Nombre Prix de vente Valeur Prix de vente Valeur frais compris hors frais 170 90,00 15300,00 89,16 15158,03 1000 7,20 7200,00 7,11 7112,54 22500,00 22270,57 Par ailleurs, BNP Paribas a versé un dividende de 1,75 € le 26 mai 20001, ce qui représente 297,50 € pour 170 actions. Le bilan du placement est le suivant. Achat 10/09/99 Vente 13/10/00 Plus-value 13/10/00 Dividende 26/05/00 Gain total €) Gain total/Investissement Taux de rendement interne Valeur hors frais frais compris 19807,5 20066,88 22500,00 22270,57 2692,50 2203,69 297,50 297,50 2990,00 2501,19 15,1% 12,5% 13,8% 11,4% Hors frais, le rendement du portefeuille a été de plus de 10 points de pourcentage supérieur au taux sans risque. Même avec les frais de transaction, la surperformance est importante. On a vu que l’augmentation de la valeur du portefeuille n’a pas été régulière. On peut mesurer le risque pesant sur son rendement par la volatilité ou écart-type du rendement. La mesure est faite sur des données hebdomadaires (le placement a duré 57 semaines) et les valeurs sont annualisées. La volatilité du portefeuille est ainsi ressortie en annualisé, à 9,0 %. A titre de comparaison, celle du CAC 40 sur la même période a été de 22,9 %, celle de l’action BNP Paribas de 26,2 % (et celle du CVG pris isolément a atteint 70 % !). Surtout, le rendement du portefeuille présente, comme on pouvait s’y attendre, une corrélation pratiquement nulle avec celle du marché : le coefficient de corrélation avec le rendement du CAC 40 a été de 0,027 et le béta de 0,010. 1 L’indice de valeur du portefeuille représenté précédemment inclut dans le portefeuille le dividende à partir du jour de son versement. Il n’est pas revalorisé, ce qui correspond implicitement à une absence de replacement. Compte tenu de la modestie du dividende et du faible temps qui s’écoule entre son versement et la liquidation du portefeuille, l’incidence de ce traitement simple est minime. 5 Le risque de ce portefeuille est donc normalement du risque diversifiable, qui ne devrait pas être rémunéré dans des marchés efficients. On peut donc considérer que la sous-valorisation boursière initiale du CVG a constitué assez largement une anomalie de marché. 5 – Extension On peut se demander si, en l’absence totale de coûts de transaction, il était possible à l’investisseur de mieux faire en rebalançant fréquemment son portefeuille, par exemple quotidiennement, en fonction de l’évolution du delta des CVG. Evolution de la valeur du portefeuille (100 à la constitution) 130,00 120,00 Portefeuille delta-neutre 110,00 Portefeuille effectif 100,00 00 10 /1 0/ 00 10 /0 9/ 00 00 00 00 00 10 /0 8/ 10 /0 7/ 10 /0 6/ 10 /0 5/ 00 10 /0 4/ 00 00 10 /0 3/ 10 /0 2/ 10 /0 1/ 99 10 /1 2/ 99 10 /1 1/ 99 10 /1 0/ 10 /0 9/ 99 90,00 Le rendement de ce portefeuille « delta-neutre » aurait effectivement été meilleure que celle du portefeuille effectif, mais de peu sur la période. Son risque aurait été sensiblement équivalent : la volatilité annualisée est de 8,5 %, la corrélation avec le CAC 40 de 0,007 et le béta de 0,003. Mais la possibilité de constituer un portefeuille delta-neutre, si elle avait existé, aurait permis de gagner davantage de l’effacement de la sous-valorisation en prolongeant le placement jusqu’à près du terme du CVG. 6 Evolution de la valeur du portefeuille (100 à la constitution) 140,00 130,00 Portefeuille delta-neutre 120,00 Portefeuille effectif 110,00 100,00 99 10 /0 1/ 00 10 /0 3/ 00 10 /0 5/ 00 10 /0 7/ 00 10 /0 9/ 00 10 /1 1/ 00 10 /0 1/ 0 10 1 /0 3/ 01 10 /0 5/ 01 10 /0 7/ 01 10 /0 9/ 01 10 /1 1/ 01 10 /0 1/ 0 10 2 /0 3/ 02 10 /0 5/ 02 10 /1 1/ 10 /0 9/ 99 90,00 Le plein du rendement était obtenu, sur le portefeuille delta-neutre, au début 2002. Ensuite, la performance stagne et la volatilité s’accroît : l’approche de la date d’échéance, et le fait que la cotation du CVG ait perdu de sa signification après les rachats opérés par l’entreprise (fin 2001, BNP Paribas avait racheté 50 millions de CVG sur 70 millions émis) et le caractère très hors de la monnaie qu’a pris l’option expliquent cette situation. L’indice de valeur du portefeuille effectif porté sur le même graphique montre bien qu’il était déraisonnable de continuer à le détenir sans en modifier la structure. Mais le graphique suivant indique l’importance des modifications de couverture qu’il aurait fallu opérer pour avoir le portefeuille delta-neutre. Delta des 1000 CVG (valeur absolue) 400 350 300 250 200 150 10 /0 9/ 99 10 /1 1/ 99 10 /0 1/ 00 10 /0 3/ 00 10 /0 5/ 00 10 /0 7/ 00 10 /0 9/ 00 10 /1 1/ 00 10 /0 1/ 01 10 /0 3/ 01 10 /0 5/ 01 10 /0 7/ 01 10 /0 9/ 01 10 /1 1/ 01 10 /0 1/ 02 10 /0 3/ 02 10 /0 5/ 02 100 7