Document 1

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Document 1
Document 1 : la séparation des pouvoirs
C'est une expérience éternelle que tout homme qui a du pouvoir est porté à en abuser. [...] Pour qu'on ne puisse pas abuser du pouvoir, il faut que par la disposition des choses, le pouvoir arrête le pouvoir. [...] Il y a dans chaque État trois sortes de pouvoirs : la puissance législative, la puissance exécutrice des choses qui dépendent du droit des gens, et la puissance exécutrice des choses qui dépendent du droit civil. Par la première, le prince ou le magistrat fait des lois pour un temps ou pour toujours, et corrige ou abroge celles qui sont faites. Par la seconde, il fait la paix ou la guerre, envoie ou reçoit des ambassades, établit la sûreté, prévient les invasions. Par la troisième, il punit les crimes ou juge les différends des particuliers. On appellera cette dernière la puissance de juger, et l'autre simplement la puissance exécutrice de l'État. [...] Lorsque dans la même personne ou dans le même corps de magistrature, la puissance législative est réunie à la puissance exécutrice, il n'y a point de liberté ; parce qu'on peut craindre que le même monarque ou le même sénat ne fasse des lois tyranniques pour les exécuter tyranniquement. Il n'y a point encore de liberté si la puissance de juger n'est pas séparée de la puissance législative et de l'exécutrice. Si elle était jointe à la puissance législative, le pouvoir sur la vie et la liberté des citoyens serait arbitraire : car le juge serait législateur. Si elle était jointe à la puissance exécutrice, le juge pourrait avoir la force d'un oppresseur. Tout serait perdu si le même homme, ou le même corps des principaux, ou des nobles ou du peuple exerçaient ces trois pouvoirs : celui de faire les lois, celui d'exécuter les résolutions publiques, et celui de juger les crimes ou les différends des particuliers.
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Montesquieu, De l'esprit des lois, 1748.
Expliquez la deuxième phrase.
Quels sont les trois pouvoirs qui doivent être séparés d'après Montesquieu ? Quelles sont les institutions qui exercent ces trois pouvoirs en France aujourd'hui ?
Quel serait le risque de voir les différents pouvoirs réunis entre les mêmes mains ? Comment appellerait­on un tel régime ?
Document 2 : le système de la balance des pouvoirs
Les partisans du système de la balance des pouvoirs reprochent au procédé de la spécialisation des pouvoirs d'être instable. En effet, soutiennent­ils, le pouvoir législatif exercera une prédominance si forte sur l'autorité exécutive, qu'il sera en mesure de concentrer entre ses mains l'exercice des deux fonctions, c'est­
à­dire de devenir despotique. Ce système ne pourrait se maintenir que par la vertu des gouvernants. Mais, si l'on connaît les hommes et leurs passions, on ne peut raisonnablement compter qu'ils seront durablement vertueux. Il faut donc, estiment­ils, construire un système stable, un système si bien construit qu'il ne puisse être détruit, quelles que soient les passions des hommes. Mieux, ce système doit être fondé non sur la vertu, mais sur les vices.
La solution est inspirée de la constitution anglaise, une constitution anglaise idéalisée, telle que, à la suite de Montesquieu, la décrivent de très nombreux auteurs. Elle consiste à réaliser un équilibre, non pas entre un pouvoir législatif et un pouvoir exécutif, ce qui est évidemment impossible, mais entre plusieurs autorités, qui participent toutes à la fonction législative. Ces autorités sont donc des organes législatifs partiels. Dans la constitution anglaise, ces trois autorités sont une chambre élue, la chambre des communes, une chambre nobiliaire, et, grâce à un droit de veto, le roi, qui exerce par ailleurs, mais seul, la fonction exécutive. Dans ce système, il n'y a pas de spécialisation, puisque le roi exerce une fonction entièrement et participe à l'exercice d'une autre, mais le principe de la séparation des pouvoirs est préservé, puisque aucune autorité n'exerce tous les pouvoirs. L'équilibre se maintiendra entre les trois organes législatifs, dont les intérêts politiques et économiques sont opposés. Il sera par exemple impossible aux deux chambres d'usurper le pouvoir exécutif, parce que si elles proposent une loi en ce sens, le roi, titulaire d'un pouvoir exécutif qu'il voudra défendre, s'y opposera immanquablement.
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Georges Burdeau et al., Droit constitutionnel, 25è édition, LGDJ 1997.
Expliquez la phrase soulignée.
Que garantit la balance des pouvoirs mise en place dans la constitution anglaise ? En quoi est­ce plus efficace qu'une spécialisation des trois pouvoirs ?
Document 3 : typologie des régimes politiques
1) La prééminence d'un organe
a. La prééminence d'une assemblée
Ce système est appelé tantôt « gouvernement conventionnel » tantôt « régime d'assemblée ». Il s'agit notamment du régime effectivement pratiqué en France par la Convention nationale de 1792 à 1795 et c'est de lui que dérive l'expression « gouvernement conventionnel ». Le régime pratiqué à ce moment est atypique, car c'est le seul régime d'assemblée où a été réalisée une réelle « confusion des pouvoirs ».
b. La prééminence du gouvernement
Il s'agit de régimes dans lesquels le gouvernement ou, plus souvent, le chef de l'État (roi ou président) dispose des pouvoirs les plus importants. Cette prééminence peut résulter de facteurs très divers, notamment la force militaire. On trouve dans cette catégorie les régimes fascistes, les dictatures militaires, les régimes de parti unique, les monarchies traditionnelles ou, pour certains auteurs, des systèmes comme celui de la Vè République en France, dans lesquels on constate que le Président est la figure centrale.
2) Équilibre des organes : les modalités de la séparation des pouvoirs
L'équilibre peut être réalisé selon deux modalités différentes, le régime parlementaire et le régime présidentiel. Le premier est quelquefois caractérisé de séparation souple ou collaboration des pouvoirs, le second comme une séparation rigide.
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D'après Georges Burdeau, op.cit.
Comment peut­on qualifier les régimes dans lesquels prédomine un organe ? Les régimes dans lesquels les organes sont équilibrés ?
Quels régimes aurait choisis Montesquieu ? Pourquoi ?
Document 4 : la naissance du régime parlementaire
Le régime parlementaire apparaît à un moment historique assez précis. Il exprime la naissance d'un organe nouveau, le gouvernement. Et l'histoire du parlementarisme va en réalité se confondre avec la conquête d'autonomie, ou du moins, si le terme d'autonomie paraît trop paradoxal, d'identité du cabinet, du gouvernement.
L'évolution vers le parlementarisme ne peut être comprise que si on la relie au contexte monarchique. À partir de la fin du XVIIIè siècle, deux légitimités entrent en concurrence : l'une fondée sur le principe monarchique, l'autre sur le principe représentatifa. L'apparition du parlementarisme va coïncider avec le moment où les organes incarnant chacune de ces légitimités vont bénéficier d'une égale puissance. Le régime parlementaire sera donc défini comme un régime d'équilibre des pouvoirs, tout ceci paraissant largement en accord avec les idées développées par Montesquieu à propos de la modération du pouvoir.
Aux débuts du parlementarisme, les ministres sont encore sous la dépendance exclusive du monarque. Leur « émancipation » à travers l'affirmation d'un « pouvoir ministériel » va être une des conditions d'apparition du régime parlementaire, à tel point d'ailleurs que le bicéphalisme de l'exécutif b sera communément présenté comme un élément fondamental de la définition de ce régime. En effet, à partir du moment où le ministère se détache du monarque, il peut jouer le rôle d'amortisseur entre les deux pouvoirs rivaux et servir de solution à leurs conflits. Tel est le sens de la responsabilité politique des ministres. On considère généralement que le régime devient parlementaire quand le pouvoir de révocation des ministres, dont dispose traditionnellement le monarque, devient partagé avec le Parlement. La double responsabilité du ministère devant le monarque et devant le Parlement lui permet de se prévaloir auprès de chacun d'eux de la confiance et des volontés de l'autre et de tenter de dégager par la synthèse de leurs aspirations une politique acceptable par les deux parties.
Par la suite, alors que le bicéphalisme disparaît peu à peu [le Roi perd ses pouvoirs], on considérera que le régime parlementaire n'existe que s'il existe des moyens d'action réciproques. Ce qui se trouve en cause est alors l'autonomie du gouvernement par rapport au Parlement. Pour beaucoup d'auteurs, cette autonomie n'existera que s'il existe un droit de dissolution. L'existence simultanée de la responsabilité politique et de la dissolution est en effet nécessaire, sinon à mettre le gouvernement à la merci du Parlement qui est alors en situation d'organe dominant, ce qui caractérise non plus un régime parlementaire mais un régime d'assemblée.
D'après Constance Grewe et Hélène Ruiz Fabri, Droits constitutionnels européens, PUF, 1995, p. 367s
a. Principe représentatif : principe selon lequel les députés sont des représentants du peuple (ou de la Nation) et sont donc élus.
b. Bicéphalisme de l'exécutif : existence d'un exécutif « à deux têtes » (d'un côté un roi, ou parfois un président de la République, de l'autre côté un gouvernement ou cabinet).
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Pourquoi caractérise­t­on le régime parlementaire comme un régime d'équilibre des pouvoirs ? Dans quelle mesure ce régime est­il compatible avec la séparation des pouvoirs de Montesquieu ?
Qu'est­ce que la responsabilité politique de l'exécutif, et comment s'exerce­t­elle ?
Aux États­unis, existe­t­il une responsabilité politique de l'exécutif ? Le Congrès peut­il juger le Président ?
Pourquoi la disparition du monarque entraîne­t­elle une perte d'autonomie du gouvernement par rapport au Parlement ?
Comment les régimes parlementaires compensent­ils cette perte d'autonomie ? Est­ce le cas au Royaume­uni ?
Document 5 : la démission de Romano Prodi
Le chef du gouvernement italien Romano Prodi a remis jeudi soir sa démission, après avoir perdu un vote de confiance au Sénat, au chef de l'Etat Giorgio Napolitano à qui il incombera de décider ou non de nouvelles élections. Romano Prodi, à la tête du gouvernement italien depuis 20 mois, n'a reçu la confiance que de 156 sénateurs, alors que 161 l'ont désavoué. La majorité était de 160 voix. Il a aussitôt remis sa démission au chef de l'Etat, qui va maintenant engager des consultations en commençant vendredi après­
midi par les présidents des deux chambres.
Source : AFP, liberation.fr, 24 janvier 2008.
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Montrez que le régime italien est un régime parlementaire.
Document 6 : le régime présidentiel
Le régime présidentiel est décrit principalement à partir de l'exemple des États­unis et par opposition au régime parlementaire.
Aux États­unis, la fonction législative est exercée par un Congrès, composé de deux assemblées, la Chambre des représentants et le Sénat, la fonction exécutive par un président. Le président n'est pas choisi par le Congrès, mais élu au suffrage universel. Il nomme des ministres avec le consentement du Sénat et les révoque librement. Il ne peut dissoudre les chambres. Celles­ci ne peuvent révoquer ni le Président, ni les ministres. Ainsi, pense­t­on, contrairement à ce qui peut se produire dans un régime parlementaire, chacune de ces autorités exerce­t­elle sa fonction en toute indépendance, mais elle n'exerce que cette fonction.
Du point de vue de la répartition du pouvoir, on considère généralement que, dans un tel système, l'organe le plus important est le Président, mais que le Congrès n'est pas pour autant abaissé et qu'il peut exercer l'intégralité de son pouvoir législatif. [...]
À partir de la notion de régime présidentiel, ainsi construite à partir de l'exemple américain et qu'on ne voit guère réalisée ailleurs, on dérive parfois deux autres notions : le régime présidentialiste et le régime semi­présidentiel.
La première catégorie regroupe un très grand nombre de régimes, en réalité très variés, situés pour la plupart dans le tiers monde, plus ou moins inspirés du système américain mais dans lesquels le Président dispose en droit ou en fait de pouvoirs plus importants encore qu'aux États­unis.
Les régimes semi­présidentiels sont ceux dans lesquels le Président est élu au suffrage universel, mais où il existe aussi un ministère responsable, comme dans les régimes parlementaires.
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D'après Georges Burdeau, op.cit.
Qu'est­ce qui caractérise un régime présidentiel ?
Dans quelle mesure ce régime est­il compatible avec la séparation des pouvoirs de Montesquieu ?
Quel est le point commun entre le régime présidentialiste et le régime d'assemblée ?
Document 7 : typologie des régimes démocratiques
La notion de séparation des pouvoirs éclaire formellement la distinction moderne entre régime parlementaire (séparation souple) et régime présidentiel (séparation rigide) dans les démocraties occidentales.
Les régimes parlementaires. On désigne ainsi les régimes comportant un exécutif dualiste (chef d'État et chef de gouvernement) et un système de responsabilité politique de l'exécutif (le gouvernement) devant les assemblées élues (le Parlement). [...] Le pouvoir législatif est assuré par le Parlement, élu au suffrage universel et qui vote la loi tandis que le pouvoir exécutif dispose des moyens d'exercice de la responsabilité gouvernementale (pouvoir réglementaire, direction de l'administration, etc.). Le gouvernement est responsable devant le Parlement : son chef est investi et contrôlé par lui (commissions, questions). En cas de désaccord, le gouvernement prend l'initiative de poser la question de confiance, ou le Parlement celle de le censurer. La contrepartie de cette responsabilité peut être l'attribution du droit de dissoudre la chambre élue au suffrage universel direct. [...] Le régime parlementaire connaît des modalités de fonctionnement variées en Angleterre, Espagne, Pays­Bas, Allemagne, Italie.
Les régimes présidentiels. Ils sont caractérisés « théoriquement » par une séparation « rigide » des pouvoirs, impliquant l'absence de toute interférence entre eux. [...] Le législatif a le monopole du vote des lois et l'exécutif n'est pas contrôlé dans sa fonction. Le « gouvernement » n'est que l'émanation du président et ne peut être renversé, pas plus que ce dernier ne peut dissoudre le Parlement. Mais la séparation n'est pas absolue. Le président peut indirectement déposer des projets de loi, négocier les votes, communiquer par des messages avec les assemblées qui peuvent tout autant contrôler l'action de l'exécutif (commissions d'enquête), voire bloquer le processus législatif. Ces traits généraux correspondent au régime américain.
Les régimes mixtes. Ils sont caractérisés par l'existence d'un président élu au suffrage universel et d'un gouvernement responsable devant le Parlement.
Dominique Chagnollaud, Science politique, Collection Cours, droit public, Dalloz, 3è ed., 2000.
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Représentez par trois schémas les relations entre l'exécutif et le législatif dans les trois systèmes.
Document 8 : les règles du régime parlementaire dans le cadre de la Constitution de 1875
Régime d'équilibre entre les pouvoirs sous le contrôle de l'opinion, le parlementarisme implique que le gouvernement et le Parlement peuvent agir réciproquement l'un sur l'autre. Sous doute les lois de 1875 ne parlaient­elles pas expressément du régime parlementaire, mais en instituant entre les organes cette interdépendance qu'il suppose, elles facilitaient son introduction.
Issu de la majorité parlementaire, le Cabinet doit conserver avec elle des rapports qui lui permettent d'obtenir son appui. Le Parlement contrôle. À cet effet, les ministres ont le droit d'entrer dans les Chambres, et ils ont le droit d'y prendre la parole.
La dissolution est une pièce essentielle du mécanisme parlementaire, puisqu'elle arrache le ministère à la tutelle absolue des Chambres. Elle est la contrepartie de la responsabilité ministérielle : « le Président de la République peut, sur l'avis conforme du Sénat, dissoudre la Chambre des députés avant l'expiration légale de son mandat. » Le droit de dissolution ne fut utilisé qu'une seule fois par Mac­Mahon en 1877 mais aboutit à un échec.
D'après Georges Burdeau, op.cit.
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Qu'est­ce qui fait du régime de la IIIè République un régime parlementaire ?
Document 9 : les maux de la IVè République
Dans les derniers temps de la IVè République, chacun a le sentiment que les institutions fonctionnent mal. Le signe le plus évident de ce dysfonctionnement : l'instabilité gouvernementale : en moins de douze ans, d'octobre 1946 à mai 1958, vingt­et­un gouvernements se sont succédé ; compte tenu du délai nécessaire à la résolution de chaque crise ministérielle, la durée moyenne d'un gouvernement était inférieure à six mois.
Les causes de cette instabilité étaient les suivantes :
•
L'absence d'une majorité parlementaire véritable
Elle tenait au système de partis politiques. On comptait une bonne quinzaine de formations politiques représentées à l'Assemblée nationale et tout gouvernement était obligé de s'appuyer sur une coalition regroupant au moins quatre ou cinq de ces formations. Tout gouvernement se trouvait donc menacé à partir du moment où les problèmes qui avaient retenu l'attention au moment de son investiture passaient au second plan, car de nouveaux clivages se dessinaient alors en fonction d'autres problèmes.
•
L'insuffisance des moyens juridiques de l'exécutif
Le pouvoir réglementaire ne pouvait être exercé qu'en vertu d'une loi, et il pouvait donc être retiré à tout moment par le législateur. De plus, la procédure de la question de confiance permettait au Parlement de rejeter un texte de telle sorte que le gouvernement n'était pas juridiquement tenu de démissionner, mais se trouvait de fait dans l'impossibilité de rester au pouvoir.
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D'après Georges Burdeau, op.cit.
Qu'appelle­t­on l'instabilité ministérielle ? Les régimes parlementaires sont­ils souvent instables (cherchez des exemples) ?
Quelles étaient les causes de l'instabilité ministérielle sous la IVè République ?
Document 10 : la rationalisation du parlementarisme sous la Vè République
Document 10a : la rationalisation du parlementarisme
Rationaliser le parlementarisme, c'est introduire dans la Constitution des dispositifs qui renforcent la position du Gouvernement vis­à­vis du Parlement, et qui peuvent pallier l'absence d'une véritable majorité parlementaire. [...]
La Vè République est un régime parlementaire de type nouveau par rapport à la tradition française car, pour éviter le retour de l'instabilité gouvernementale, on a retiré au Parlement une partie importante des prérogatives dont il disposait sous la IIIè et la IVè Républiques : il est soumis au contrôle du Conseil constitutionnel ; il peut encore renverser le gouvernement mais il ne peut le faire qu'en suivant certaines procédures conçues de manière à ne pas rendre la chose trop facile. »
Document 10b : extraits de la Constitution du 4 octobre 1958
Article 34
•
La loi est votée par le Parlement. La loi fixe les règles •
concernant :
• les droits civiques et les garanties fondamentales [...] ;
D'après Georges Burdeau, op.cit.
la nationalité, l'état et la capacité des personnes, les régimes matrimoniaux, les successions et libéralités ;
la détermination des crimes et délits [...] ;
l'assiette, le taux et les modalités de recouvrement des Article 49
impositions de toutes natures ; le régime d'émission de Le Premier Ministre, après délibération du Conseil des la monnaie. [...]
Ministres, engage devant l'Assemblée Nationale la La loi détermine les principes fondamentaux :
responsabilité du Gouvernement sur son programme ou • de l'organisation générale de la Défense Nationale ;
éventuellement sur une déclaration de politique générale.
• de l'enseignement ;
L'Assemblée Nationale met en cause la responsabilité du • de la préservation de l'environnement ; [...]
Gouvernement par le vote d'une motion de censure. Une • du droit du travail, du droit syndical et de la sécurité telle motion n'est recevable que si elle est signée par un sociale. dixième au moins des membres de l'Assemblée Nationale. Article 38
Le vote ne peut avoir lieu que quarante­huit heures après Le Gouvernement peut, pour l'exécution de son programme, son dépôt. Seuls sont recensés les votes favorables à la demander au Parlement l'autorisation de prendre par motion de censure qui ne peut être adoptée qu'à la majorité ordonnances, pendant un délai limité, des mesures qui sont des membres composant l'Assemblée. Sauf dans le cas normalement du domaine de la loi.
prévu à l'alinéa ci­dessous, un député ne peut être signataire Article 39
de plus de trois motions de censure au cours d'une même L'initiative des lois appartient concurremment au Premier session ordinaire et de plus d'une au cours d'une même session extraordinaire.
Ministre et aux membres du Parlement.
Le Premier Ministre peut, après délibération du Conseil des Article 44
Si le Gouvernement le demande, l'assemblée saisie se Ministres, engager la responsabilité du Gouvernement prononce par un seul vote sur tout ou partie du texte en devant l'Assemblée Nationale sur le vote d'un texte. Dans ce discussion en ne retenant que les amendements proposés cas, ce texte est considéré comme adopté, sauf si une motion de censure, déposée dans les vingt­quatre heures qui ou acceptés par le Gouvernement.
suivent, est votée dans les conditions prévues à l'alinéa précédent.
•
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Pourquoi chercher à « rationaliser le parlementarisme » ?
Rappels : que nomme­t­on le pouvoir législatif ? En théorie, est­il limité dans son étendue ? Que penser des articles 34 et 38 de la Constitution ?
Quels sont les objectifs des articles 39 et 44 ?
Commentez les trois premiers alinéas de l'article 49.
Résumez : quelles sont les principaux outils de la rationalisation du parlementarisme sous la Vè ?
Document 11 : la Vè République de 1958 à 1962, un régime parlementaire
11a. Article 6
Le Président de la République est élu pour sept ans par un collège électoral comprenant les membres du Parlement, des conseils généraux et des assemblées des Territoires d'Outre­Mer, ainsi que les représentants élus des conseils municipaux.
11b. Les relations entre les différents Premier ministre
pouvoirs dans le texte de la Constitution du 4 octobre 1958
11c. Loi constitutionnelle n° 62­1292 du 6 novembre 1962
Le projet de loi est approuvé par référendum le 28 octobre 1962 [...].
Le président de la République, conformément aux dispositions de l'article 11 de la Constitution, a soumis au référendum ; le peuple français, ainsi qu'il ressort de la proclamation faite le 6 novembre 1962 par le Conseil constitutionnel des résultats du référendum, a adopté ; le président de la République promulgue la loi dont la teneur suit :
Président de
la République
et Gouvernement
Assemblée nationale
Sénat
Conseillers régionaux, généraux, municipaux
Citoyens
Article premier.
L'article 6 de la Constitution est remplacé par les dispositions suivantes :
« Art. 6. Le président de la République est élu pour sept ans au suffrage universel direct. Les modalités d'application du présent article sont fixées par une loi organique. »
11d. Deux pouvoirs issus de la légitimité démocratique
Le propre d'un régime parlementaire de type classique, comme celui de la Grande­Bretagne ou de l'Allemagne, c'est que la volonté du peuple ne peut juridiquement se manifester qu'à travers l'élection des membres du Parlement. La majorité parlementaire, issue des élections législatives, est donc la seule force politique qui compte vraiment.
En France, depuis 1962, il y a deux majorités qui comptent politiquement, parce qu'elles sont toutes deux l'expression d'une légitimité démocratique : la majorité parlementaire et la majorité présidentielle. Le fonctionnement du régime dépend de l'interaction de ces deux majorités. C'est pourquoi, bien que la Constitution française puisse toujours être considérée comme « parlementaire » selon certains critères juridiques (le Gouvernement étant toujours responsable devant l'Assemblée nationale), la dynamique politique du système est différente.
À la suite de la réforme de 1962, on s'est même demandé si la logique de cette réforme n'allait pas conduire la France à rompre totalement avec le modèle parlementaire britannique pour adopter le modèle présidentiel américain, qui repose également sur la confrontation de deux pouvoirs issus du suffrage universel, le Président et le Congrès.
11e. Les relations entre les différents pouvoirs dans la pratique de la Vè République
Président de
la République
1.
Premier ministre
et Gouvernement
Assemblée nationale
Sénat
Conseillers régionaux, généraux, municipaux
2.
3.
D'après Georges Burdeau, op.cit.
Remplissez le schéma 11b. avec des flèches représentant les relations suivantes : élit ; nomme ; peut dissoudre ; est responsable devant ; engage sa responsabilité ; soumet au référendum.
Remplissez le schéma 11e. avec des flèches représentant les relations suivantes : élit ; nomme ; peut dissoudre ; est responsable devant ; engage sa responsabilité ; soumet au référendum ; révoque.
En quoi la réforme de 1962 modifie­
t­elle la nature du régime de la Vè République ?
Citoyens
Document 12 : l'article 16 de la Constitution
Lorsque les institutions de la République, l'indépendance de la Nation, l'intégrité de son territoire ou l'exécution de ses engagements internationaux sont menacées d'une manière grave et immédiate et que le fonctionnement régulier des pouvoirs publics constitutionnels est interrompu, le Président de la République prend les mesures exigées par ces circonstances, après consultation officielle du Premier Ministre, des Présidents des assemblées ainsi que du Conseil Constitutionnel.
1.
Quels pouvoirs donne cet article au Président de la République ? Cet article a­t­il déjà été utilisé ?
2.
Entre le Gouvernement et le Président, quel organe a le plus de pouvoir ? Pourquoi ?
3.
Entre le Parlement et le Gouvernement, quel organe a le plus de pouvoir ? Pourquoi ?
4.
Entre le Président et le Parlement, quel organe a le plus de pouvoir ? Pourquoi ?
5.
Dans le cas où le Président de la République est issu de la même majorité que le Parlement, y a­t­il une réelle « balance des pouvoirs » ?
Document 13 : la loi constitutionnelle n° 2000­64 du 2 octobre 2000
Article unique
Le premier alinéa de l'article 6 de la Constitution est ainsi rédigé :
« Le président de la République est élu pour cinq ans au suffrage universel direct »
Document 14 : « Sarkoutine »
François Fillon a annoncé qu'il était là pour traduire le plus « scrupuleusement » possible une politique et un projet définis par l'Élysée. Le Premier ministre devient­il une sorte de super secrétaire général de l'Élysée ? Et quelles en sont les conséquences ?
Ce n'est pas autre chose que la « logique » de la Vè République, mais poussée à son paroxysme, au prix d'un viol assumé de la Constitution qui dispose que « le Premier ministre dirige l'action du gouvernement ». Toutefois, cet effacement du Premier ministre ne peut pas être complet. L'Élysée n'est pas outillé administrativement pour diriger le gouvernement et animer le travail interministériel, et encore moins pour mettre en musique le travail parlementaire. Le Premier ministre garde donc un rôle essentiel de pilotage de la machine étatique et d'arbitrage au quotidien. [...] Le risque existe que l'emprise très intrusive du président de la République sur le gouvernement au quotidien conduise à la multiplication des conflits et des couacs au sommet de l'État. Sauf à basculer clairement dans un régime présidentiel à l'américaine – où le président a bien moins de pouvoirs qu'en France, car il ne peut pas imposer sa volonté au Parlement ni le dissoudre –, la Vè République ne permet pas de superposer harmonieusement l'Élysée et Matignon. Peut­on parler d'une vision sarkozyste des institutions ? Le nouveau président s'inspire­t­il du système américain ?
Il a plutôt une vision bonapartiste du pouvoir ! Contrairement à ce que l'on croit en France, le président américain n'a pas la mainmise sur l'ensemble du système politico­institutionnel. S'il paraît puissant, c'est que nous le voyons à la tête d'une superpuissance. Au­delà de certains gadgets – comme le jogging public ou la mise en place d'un Conseil national de sécurité –, Nicolas Sarkozy est très peu américain dans son mépris affiché de la séparation des pouvoirs. De ce point de vue, toutes choses égales par ailleurs, il est plutôt poutinien...
Quelles autres réformes des institutions a­t­il l'intention de mettre en place ?
Durant la campagne, il a notamment envisagé d'accroître la capacité de contrôle du Parlement sur le gouvernement, s'agissant en particulier de certaines nominations. Mais ce n'est là qu'une façon de masquer l'essentiel : le pouvoir accru du président de la République, gouvernant suprême mais totalement irresponsable. En se substituant au Premier ministre, Nicolas Sarkozy supprime du même coup, de fait, le principe parlementaire de la responsabilité politique du gouvernement. De quoi pourra être responsable un Premier ministre réduit à n'être qu'une courroie de transmission entre le président et le gouvernement ? De rien. Sera­t­il possible de contester devant le Parlement l'action du président de la République, de l'obliger à rendre des comptes ? Non, puisque la Constitution l'interdit alors même que le président conserve l'arme de la dissolution. Et puis, que se passerait­il en cas de cohabitation ? C'est l'infarctus qui menace notre système politique tous les cinq ans, et le césarisme présidentiel entre­temps. Là encore, Nicolas Sarkozy ne fait que pousser aux extrêmes la « logique » de la Vè République, le principe d'irresponsabilité qui la caractérise.
La présidentialisation du régime ne risque­t­elle pas à terme de nuire à Nicolas Sarkozy, en cas d'échec le désignant comme responsable, d'autant plus que les institutions de la Vè République sont critiquées et que la gauche et Bayrou ont réclamé une Viè République pendant la campagne ?
Il est normal que les dirigeants prennent des risques ! Le problème est de savoir ce qu'ils risquent. Et c'est là que le bât blesse. Car un président de la Vè République ne risque pas grand­chose, dès lors du moins qu'il est assuré d'une majorité parlementaire et que la Constitution interdit tout contrôle réel sur son action. Mais il est vrai qu'en supprimant de fait le « fusible » qu'a pu être jusqu'à présent le Premier ministre, le président de la République sera en permanence en première ligne. Comment se dénoueront alors les crises qu'il aura à affronter ? Ce qui est certain, c'est que cette présidentialisation du régime ne sera pas, en tout cas, le gage d'une démocratie équilibrée et apaisée, facilitant le règlement pacifique des conflits.
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Bastien François est professeur de sciences politiques à l'université Paris I.
Bastien François, « Sarkoutine ? », Les Inrockuptibles n°601, 5 juin 2007.
Quelle est la « logique » de la Vè République décrite par Bastien François ?
Expliquez l'expression soulignée.
D'après Bastien François, quels sont les risques de la pratique du pouvoir permise par la Vè République ?