les pensions de retraite servies au titre de l`inaptitude au travail

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les pensions de retraite servies au titre de l`inaptitude au travail
Rapports à la Commission des comptes de sécurité sociale – juin 2010 -
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COMMISSION DES COMPTES DE LA SECURITE SOCIALE - JUIN 2010
12-2
LES PENSIONS DE RETRAITE SERVIES AU TITRE DE
L’INAPTITUDE AU TRAVAIL
Le dispositif d’inaptitude concerne 19% des retraités du régime général et
représente 12 milliards d’euros de prestations vieillesse en 2009
Sur ces 12 Md€ versés au titre de l’inaptitude (cf. encadré), 5,5 Md€ et 6,7 Md€ ont été
dépensés respectivement au titre des pensions d’invalidité commuées en pension de retraite
et des pensions pour inaptitude. Rapportées à l’ensemble des dépenses de droits propres du
régime général, les dépenses liées à l’inaptitude pèsent pour 20,4%. Il ne s’agit toutefois pas
à proprement parler du coût du dispositif puisque les charges retranscrites ici ne sont pas
nettes des masses de prestations de droit commun qui seraient de toute façon versées
lorsque l’assuré aurait atteint le taux plein.
Sur l’ensemble des 11 676 000 retraités du régime général en 2009, on comptait 2 209 000
ex-invalides ou inaptes (18,9% de l’ensemble des retraités) : 687 000 bénéficiaires d’une
pension d’ex-invalides et 1 522 500 d’une pension d’inaptes et assimilés. Au cours de
l’année 2009, environ 117 500 assurés sur 642 000 sont partis en retraite en bénéficiant
d’une pension d’inaptitude ou d’une pension d’ex-invalidité (respectivement 67 800 et 49 700
liquidants), ce qui représente au total 18,3% des flux de liquidants pour cette année.
Les personnes en inaptitude sont plus fréquemment des femmes, alors que les exinvalides hommes et femmes sont également répartis
La proportion des femmes inaptes est particulièrement élevée, en raison des populations
particulières dites assimilées : ouvrières mères de famille et femmes avec 37,5 ans
d’assurance (cf. encadré) dont les effectifs étaient importants parmi les anciens liquidants, et
par ailleurs en raison des différences de mortalité entre hommes et femmes. Cette
surreprésentation des femmes continue à être observée sur les flux de nouveaux liquidants
au titre de l’inaptitude, notamment en raison des possibilités d’accès à l’inaptitude dans le
cas d’un éloignement prolongé du marché du travail : en 2009, 41,9% étaient des hommes et
58,1% des femmes, tandis qu’il y avait pratiquement autant d’hommes que de femmes
liquidant au titre de l’ex-invalidité.
De fortes disparités de niveau de pension et de durée validées selon les catégories
Les personnes en inaptitude valident moins de trimestres que les autres catégories de
pension : environ 120 trimestres tous régimes validés contre 160 pour les autres catégories
en 2008 pour les hommes (respectivement 115 contre 150 pour les femmes).
A contrario, les ex-invalides ont en moyenne un nombre de trimestres plus élevé, car ils
bénéficient de nombreuses périodes assimilées pour maladie et pour invalidité (cf.
graphique 1). Ils sont par ailleurs plus fréquemment monopensionnés, d’où une durée
d’assurance au régime général plus élevée que les autres retraités. Ils bénéficient de ce fait
1
de montants de retraite plus élevés que les bénéficiaires de pensions normales et a fortiori
pour inaptitude.
Ainsi, en 2008, la pension mensuelle moyenne des nouveaux bénéficiaires de pensions
d’inaptitude était respectivement de 410 € pour les hommes et 390 € pour les femmes, contre
710 € et 550 € pour une pension normale. De leur côté, les hommes ex-invalides avaient une
pension mensuelle moyenne égale à 790 €, tandis que celle des femmes atteignait 690 €.
Cependant, si l’on considère les seuls hommes ex-invalides monopensionnés, leur pension
moyenne est plus faible que celle des hommes monopensionnés bénéficiaires d’une pension
normale (832 € par mois contre 976 €).
1
Mais inférieurs si l’on limite l’analyse sur le champ des monopensionnés.
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ECLAIRAGES « RETRAITES »
Encadré : Les bénéficiaires de la pension d’inaptitude au travail
En complément du 1° de l’article L. 351-8 CSS qui garantit le taux plein de 50% aux assurés atteignant
l’âge de 65 ans même s’ils ne justifient pas d’une durée d’assurance complète, bénéficient du taux plein
dès l’âge légal (60 ans) les assurés reconnus inaptes au travail ainsi que les mères de famille ouvrières
ayant élevé au moins 3 enfants : cette reconnaissance est automatique pour les anciens travailleurs
invalides ou les bénéficiaires d’une rente AT-MP, ainsi que pour les bénéficiaires de l’AAH (L. 821-1
CSS)
La pension d’inaptitude est également versée à des sous-populations assimilées dont les effectifs sont
à présent très réduits (anciens déportés ou internés, anciens combattants prisonniers de guerre,
travailleurs manuels salariés, femmes avec 37,5 années d’assurance), certains de ces dispositifs étant
aujourd’hui fermés.
Les assurés qui considèrent être inaptes au travail et qui ne bénéficient pas d’un dispositif de prise en
compte de l’incapacité de travailler peuvent demander une reconnaissance de leur état de santé lors de
la demande de retraite, afin de bénéficier d’une retraite au titre de l’inaptitude.
L’article L. 351-7 du code de la sécurité sociale fixe les conditions à remplir pour bénéficier de la retraite
au taux plein du fait de l’inaptitude au travail : « Peut être reconnu inapte au travail l’assuré qui n’est
pas en mesure de poursuivre l’exercice de son emploi sans nuire gravement à sa santé et qui se trouve
définitivement atteint d’une incapacité de travail médicalement constatée, et dont le taux est fixé par
décret en Conseil d’État », ce taux étant actuellement de 50%. Cependant, l’inaptitude au travail est
évaluée différemment selon que l’assuré a occupé un emploi durant les cinq années précédant la
demande - dans ce cas, l’état d’inaptitude dans le cadre de la retraite est apprécié en fonction de
l’emploi occupé à la date de demande de reconnaissance, ou qu’il a été éloigné plus longtemps du
marché du travail. Dans ce cas, l’inaptitude sera reconnue par rapport à une activité professionnelle
quelconque.
Dans les statistiques présentées ici, les pensions d’inaptitude distinguent :
- d’une part les inaptes, les pensions versées aux bénéficiaires de l’allocation aux adultes handicapés
(AAH), d’une rente AT-MP, à la catégorie des sous-populations assimilées et aux mères de familles
ouvrières ;
- et d’autre part les ex-invalides.
Graphique 1 : Durée validée en trimestres d’assurances par catégorie de pension et sexe
Durée tous régimes
200
160 150
160
Durée RG
164 165
121 113
120
200
160
120
80
80
40
40
156 161
118 118
85
94
0
0
Normales
Hommes
Inaptes
Invalides
Femmes
Normales
Hommes
Inaptes
Invalides
Femmes
Source : Flux exhaustif de droit propre de 2008 en date d’effet (premiers et deuxièmes droits), CNAV.
Champ : Métropole et Dom ; durées y compris les trimestres au titre de la MDA.
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COMMISSION DES COMPTES DE LA SECURITE SOCIALE - JUIN 2010
Les évolutions récentes des effectifs et des masses de prestations
Des masses de prestations financières en faible augmentation depuis 2003
Hors revalorisation des pensions (cf. tableau 1), la somme des prestations versées au titre de
l’inaptitude a progressé de seulement 6% sur la période (passant de 11,4 à 12,1 Md€), soit
une évolution moyenne annuelle de 1%. Les prestations versées aux inaptes ont baissé de
1,6% sur la période 2003-2009, tandis que les prestations versées aux ex-invalides ont
augmenté de 16,8% sur la même période.
Une hausse limitée des effectifs liée à la baisse du nombre de femmes inaptes, et
depuis 2004 à la mise en place de la retraite anticipée
Bien que le nombre de bénéficiaires soit passé, de 2003 à 2009, de 2 130 000 à 2 210 000
(soit une hausse de 3,7%), leur part dans l’ensemble des liquidations a baissé sur cette
période (de 22,2% à 20,4%).
Cette évolution des liquidations au titre de l’inaptitude s’explique en grande partie par les
changements de législation. Entre 1994 et 2003, la proportion de départs au titre de
l’inaptitude est restée à peu près stable chez les hommes (entre 15,5% et 17%), mais a
baissé chez les femmes (de 24,8% à 20,8%). Depuis 2004, on observe une tendance à la
baisse de la part des liquidations au titre de l’inaptitude pour l’ensemble de la population, et
ce même après correction de l’effet joué par les départs anticipés, en décalant à 60 ans l’âge
de départ en retraite des bénéficiaires de ce dispositif (cf. graphique 2). On explique cette
tendance par l’extinction de certaines catégories d’inaptes, soit qu’il n’y ait plus de
bénéficiaires, soit que le dispositif ait été fermé (femmes avec 37,5 ans d’assurance,
travailleurs manuels salariés, anciens déportés ou internés, anciens combattants prisonniers
de guerre, travailleurs manuels salariés, ouvrières mères de famille), mais aussi par
l’amélioration des carrières des assurés qui ont des durées d’assurance plus élevées, ceci
jouant particulièrement pour les femmes. Ainsi, les femmes des générations 1946 et
suivantes arrivant à 60 ans ont une fréquence de liquidations par la durée plus élevée,
entraînant un moindre recours à l’inaptitude.
Des niveaux moyens des pensions en légère augmentation
L’évolution des montants moyens de pensions contribue à la progression des dépenses au
titre de l’inaptitude observée entre 2003 et 2009, en sus de celle du nombre des bénéficiaires
de ces prestations. Cette augmentation des pensions moyennes, soit 3,5% hors
revalorisations légales entre 2003 et 2009, reflète le renouvellement structurel de la
population des retraités, les entrants bénéficiant de pensions plus élevées que les sortants.
Elle concerne en fait uniquement les ex-invalides, dont les pensions moyennes ont progressé
de 2,8% entre 2003 et 2009, hors revalorisations légales. Les pensions moyennes versées
aux inaptes sont par contre restées stables sur la période.
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ECLAIRAGES « RETRAITES »
Tableau 1 : Evolutions des effectifs, des masses et des pensions moyennes pour les
populations inaptes et ex-invalides entre 2003 et 2009
Valeur
Inaptes
Ex-invalides
Ensemble
2003
2009
2003
2009
2003
2009
Effectifs
1 532 781
1 522 434
597 604
687 368 2 130 385
2 209 802
Masses des prestations* 6,76 Mds € 6,65 Mds € 4,69 Mds € 5,48 Mds € 11,44 Mds € 12,13 Mds €
Pensions moyennes*
383,06 €
383,8 €
700,95 €
720,84 €
472,24 €
488,64 €
Evolution 2003/2009
Inaptes
Ensemble
Ex-invalides
-0,7%
-1,6%
0,2%
15,0%
16,8%
2,8%
3,7%
6,0%
3,5%
*En euros constants 2009.
NB : La somme de la hausse des bénéficiaires et des montants moyens des pensions dépasse l’évolution observée des
masses de prestation (respectivement 7,1% contre 6%). Ceci s’explique par le fait que les masses sont appréciées ici hors
majoration (MTP, 10% enfants,…), alors que les montants moyens de pensions tiennent compte de ces majorations.
Sources : CCSS, DSS, CNAV, février 2010, champ : Métropole et DOM.
Graphique 2 : Evolution de la part des liquidations au titre de l’inaptitude, par genre 2
Hommes inaptes
Femmes inaptes
25%
25%
20%
20%
15%
15%
10%
10%
5%
5%
série initiale
avec reimputation RA
série initiale
2009
2008
2007
2006
2005
2004
2003
2002
2001
2000
1999
1998
1997
1996
1994
1995
0%
2009
2008
2007
2006
2005
2004
2003
2002
2001
2000
1999
1998
1997
1996
1995
1994
0%
avec reimputation RA
Source : CNAV Evolution des attributions des prestations de 1963 à 2007 (premiers droits en date d’attribution).
Champ : métropole uniquement.
Graphique 3 : Evolution de la part des liquidations au titre de l’exinvalidité, par genre 3
série initiale
avec reimputation RA
série initiale
2009
2008
2007
2006
2005
2004
2003
2002
2001
2000
1999
1997
1996
1995
1994
2009
2008
2007
2006
2005
2004
2003
0%
2002
0%
2001
5%
2000
10%
5%
1999
10%
1998
15%
1997
15%
1996
20%
1995
20%
1994
25%
1998
Femmes invalides
Hommes invalides
25%
avec reimputation RA
Source : CNAV Evolution des attributions des prestations de 1963 à 2007 (premiers droits en date d’attribution).
Champ : métropole uniquement.
2
Les séries « avec réimputation RA » sont calculées en décalant les âges de départ des assurés partant avec une
retraite anticipée jusqu’à l’âge de 60 ans.
3
Idem.