Le quartier du pont de Noblat Sur les ponts de Noblat …

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Le quartier du pont de Noblat Sur les ponts de Noblat …
VIE DES LIEUX-DITS
Le quartier du pont de Noblat
Noblat.
Douze hectares magiques.
Une cuvette hercynienne creusée par les eaux du Déluge. La partage une voie ferrée inaccessible,
qui pigeonne en ellipse au faîte des vingt-deux arceaux du viaduc. Au fond, la métairie, le pré des Évêques.
En face, l'école, sur la collerette. La montagne de Clovis, à droite. A ses pieds, l'abbatiale.
[...]
La Vienne. L'écluse. Le pont romain. La promenade des Chambonnauds. Le lavoir des grands-mères.
[...]
Tout commence ici. Tout peut arriver. Rien de réel. Fini
Retour au point de départ. Partir, toujours. Revenir, toujours.
Maman ...
Pitié.
François-Jean Authier (La Chimère d'Arezzo, chapitre XIV)
La naissance d’un quartier : La châtellenie de Noblat
Au Moyen Age, l’évêque règne en seigneur sur le territoire de Noblat où s’appliquent ses propres lois et ses propres mesures. On parle
alors de châtellenie et, dans ce cas à Noblat, l’évêque installe plusieurs familles responsables devant lui.
Au cœur de ce territoire épiscopal se dresse une forteresse surplombant la Vienne de plus de 50 mètres et lui permettant ainsi d’avoir
un parfait contrôle sur les dangers approchant. Le gué, puis le pont médiéval, sont sous sa surveillance directe ainsi que la route dite
« Le Pavé » qui relie le quartier du pont de Noblat au centre-ville de Saint-Léonard par la porte Aumônière (Rue Georges Périn).
A l’emplacement actuel du « Chêne de Clovis » était édifié le donjon de ce château. Cette tour était l’élément le plus au bord du plateau par lequel on accédait au château après avoir emprunté les fermes actuelles du Haut et Bas Château.
Le donjon, avec sa basse cour, et les habitations seigneuriales formaient un ensemble fortifié de plus de 4 500 m2, où l’évêque possédait une maison d’habitation en plus de son palais épiscopal dans le bourg de Saint-Léonard, au sud de la Collégiale. Au XVIIème
siècle, cet ensemble est complété par une propriété sur l’arrière du plateau. Il s’agit du « Petit Château » et de la Métairie (espaces
agricoles) du Château.
Le château de Noblat aurait disparu à la fin du XIVème siècle. Ses pierres auraient permis, entre autre, la construction du Couvent
des Filles de Notre-Dame (actuel bâtiment du Foyer Rural) au XVIIème siècle.
Sur les ponts de Noblat …
A la fin du XVIIIème siècle, deux événements majeurs marquent le développement et l’évolution du quartier. Tout d’abord, la construction de la nouvelle route Limoges – Clermont-Ferrand,
vers 1780, qui nécessite la démolition de plusieurs maisons. Puis, vers 1787, la création d’un nouveau pont,
compte tenu des nombreuses réparations que le pont
médiéval doit subir régulièrement. Les grandes parcelles
attenantes à ce nouvel ouvrage d’art ne sont pas encore
bâties. Aujourd’hui, le pont médiéval, nommé vulgairement « Vieux Pont », est classé Monument Historique.
Le grand bouleversement dans le paysage du quartier
du pont de Noblat demeure la construction de la voie de
chemin de fer et du viaduc ferroviaire (voir article page
17). Cette réalisation obstrue la partie antique de la route
dite « Le Pavé », située entre la voie ferrée et la grande
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route allant de Limoges à Clermont-Ferrand, et menant en ville. Lorsque l’école du pont de Noblat est construite, « Le Pavé » sert de
limite à la cour et une nouvelle route, passant sous le viaduc, est créée pour accéder à la gare, rejoindre le Pavé ou la grande route
pour monter en ville.
A la Claire Fontaine…
Début 1900, une épidémie de fièvre typhoïde sévit violemment au pont de Noblat. Dix ans plus tard, le Conseil Municipal envisage la fermeture de la
fontaine publique principale du quartier (située à proximité de l’église Saint-Martial) dont les eaux seraient à l’origine d’une nouvelle fièvre typhoïde.
Cependant, les habitants manifestent énergiquement leur mécontentement face à cette décision.
Puis, au fil des ans, les bornes fontaines se multiplient pour disparaître progressivement au début des années 1960 avec l’arrivée de l’alimentation
en eau potable dans chaque habitation.
Bombardement du pont de Noblat : le 14 Juillet 1944
Nous sommes le 14 Juillet 1944 et le massacre du 10 juin perpétré à Oradour-sur-Glane est dans tous les esprits. Vers 19h00, le
quartier s’agite avec un va-et-vient des FFI du maquis qui s’apprêtent à faire sauter le pont neuf et le pont médiéval. La Résistance
avait ordre de retarder par tous les moyens l’avancée des garnisons allemandes. Les hommes passant à proximité des maquisards
étaient embauchés. Les ponticauds inquiets se réfugient dans le pré de M. ANO (au-dessus des Chambonneaud) sur les conseils malheureux du maquis. Ils subiront le déluge du feu incessant des Allemands qui s’abattit sur le quartier du pont de Noblat de 20h30
à 23h30. Par miracle, ils sortiront tous indemnes de leur cachette d’infortune.
Les soldats allemands trouvèrent le sac de dynamite que Jean AUBERT avait précipitamment jeté derrière le buisson de la haie
d’aubépine entourant le jardin de Mme MAZAUD. En représailles, ils versèrent des seaux d’essence et mirent le feu. Aujourd’hui, à
la place de cette maison se trouve une pelouse au carrefour de la rue de la Vallée et de l’avenue de Limoges. Ils mirent également le
feu à l’école du pont de Noblat ainsi que dans les logements situés dans la cour de la Coop où vivaient plusieurs familles dont
M. IFFINGER, réfugié lorrain. Il faisait partie des hommes chargés de couper la route à l’armée allemande. Il leur demanda de colère
s’ils étaient des soldats ou des sauvages pour s’en prendre à des civils innocents. Conduit à la gare avec un fusil dans le dos, il répéta
ses propos aux officiers allemands et leur précisa l’existence d’un deuxième pont permettant de franchir la Vienne. Sa courageuse
intervention évita que le quartier du pont de Noblat ne disparaisse sous les flammes.
M. BARRAULT, chiffonnier aux Chambonnauds, succombant à ses blessures, fut la seule victime de cette attaque.
Fête de la Saint-Martial (années 50) : les cavaliers participants à la course à la bague
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VIE DES LIEUX-DITS
La vie des Ponticauds
Commerces et activités
Commerces, artisanats, festivités dynamisaient et faisaient vivre le quartier du pont de Noblat. Ainsi, de nombreuses activités économiques répondaient aux besoins courants et quotidiens des Ponticauds : boulangerie, épiceries, cafés, restaurants, hôtels, marchands de vin, sabotier, usines de porcelaine (avenue de Limoges) et de fabrication de papier paille (Maquetaud et Farebout), boucherie
(années 1900), carrosserie, moulins à farine, filature, teinturerie, fermes productrices de lait, forge, couturières, rythmaient la vie du
quartier.
Jusqu’au milieu des années 1960, une carrière, située à l’actuel emplacement des établissements Chenel, était en exercice. Avant la
Seconde Guerre Mondiale, l’exploitation était rudimentaire avec une taille manuelle des pierres. Beaucoup d’ouvriers habitent alors
au pont de Noblat. En revanche, après la Seconde Guerre, les moyens se sont améliorés : concasseurs et explosifs ont contribué au
développement de la carrière et ont favorisé la construction de barrages et l’empierrement de nombreuses routes. A cette époque, Jean
Chenel exploite le site mais peu d’ouvriers résident au pont de Noblat. De nombreuses plaintes de riverains, demeurant à proximité
de la carrière (poussière, pierres sur la toiture des maisons …), ont conduit à la fermeture de l’établissement.
En 1876 débutent les travaux de construction de la ligne de chemin de fer Limoges-Eymoutiers, parallèlement à ceux du viaduc ferroviaire. Cet important chantier rassemblent plus de 1 500 ouvriers qui se logent et se restaurent « Chez Rigout », devenu depuis
« La Barrière », ouvert un an plus tôt par Pierre et Marie Rigout, motivés par ce projet de construction. Durant ses 135 ans d’existence, cet établissement a toujours été exploité par les descendants du fondateur.
Fête de la Saint-Martial (années 50)
La Saint-Martial : fête emblématique du pont de Noblat !
Photo prise place Gay-Lussac devant le magasin du photographe LABOUCHET
« Filles de l’Aumônière, traversez les Prés Evêqueaux,
De gauche à droite : Gaby Piarou, Georges Morin,
Vous verrez les ponticauds, noyés dans la noisetière,
Georges Chillou (dans le char-accordéoniste),
Georges Sourdoulaud (dans le char-violoniste), M. Conchard, Raymond Fauchadour,
Ils crient tout haut : Vive la St Marsaut »
Paul Desseine et Jean Chenel.
Extrait de la chanson « Vivo lo St Marsaut »
Tel est le 1er couplet de la chanson claironnée dans les
rues du pont de Noblat en l’honneur de saint Martial.
Fête emblématique et fédératrice, « La Saint-Martial »
aurait vu le jour au XVIIIème siècle sous l’égide d’une
confrérie. Il faut attendre 1936 pour qu’elle s’organise en
association loi 1901.
Les membres de la confrérie, puis de l’association, ont
à cœur de perpétuer la tradition de l’union et de
concorde des habitants du pont de Noblat. La fête de la
Saint-Martial, que nous connaissons aujourd’hui, a
sensiblement le même visage que celle organisée par le
passé : salves d’artillerie, aubade à la population, couronnement du Roi, bal populaire sous une noisetière,
course à la bague (organisée auparavant avenue de Limoges à proximité des moulins) sont les événements marquants de cette fête. Seul le feu d’artifice est plus récent et daterait de 1946,
année à laquelle fut relancée la St-Martial suite à la guerre. A cette époque, M. Puyjoubert est un généreux mécène de l’association.
Par ailleurs, saviez-vous que ce sont des prisonniers allemands qui débutent la construction de la place Saint-Martial ? Elle s’achèvera à la fin des années 1950.
Sources :
Association Connaissance et Sauvegarde – ouvrage « Saint-Léonard de
Noblat : histoires d’une ville », M. et Mme Maurice et Alice AUTHIER,
M. Jack PEYRICHOU, M. Nicolas DUCHIER, Archives municipales
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