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Avant-propos
L’Institut national de la jeunesse et de l’éducation populaire (INJEP) s’était déjà inté­
res­sé en 2008 au sens du volontariat en confiant à Valérie Becquet la coordination
d’un dossier d’Agora débats/jeunesses intitulé « Volontariats civils : dispositifs publics­,
expériences juvéniles ». Néanmoins, l’engouement pour cette forme d’engagement
n’est pas propre à la France (ni à l’INJEP). L’Union européenne par exemple, riche de
nombreux dispositifs (dont le service volontaire européen), célèbre­en 2011 l’Année
européenne du volontariat1.
Au-delà de l’Europe, de nombreux pays développent des services civils/civiques ou
étudient la possibilité d’en créer un. Au Guatemala, il existe un service civique obligatoire pour tous les jeunes de 18 à 24 ans, avec un choix possible entre un service
militaire ou un service social. En Argentine, après une expérimentation de service
civique volontaire dans la zone de Mendoza, le gouvernement réfléchit aujourd’hui
à son élargissement au niveau national, le principal objectif étant l’insertion professionnelle des jeunes, notamment celle des jeunes sortis du système scolaire.
Le cas argentin est fort intéressant puisqu’il revendique, sans complexe, son attachement à l’acquisition de compétences transposables dans la vie professionnelle.
Or, dans le même temps, en Europe, les réformes des systèmes d’éducation et de
formation font émerger une dynamique autour des « aptitudes et compétences ».
Plusieurs pays ont ainsi commencé à s’intéresser aux acquis non formels et informels, en les distinguant clairement des compétences développées dans l’enseignement formel. Dans ce sens, le service civil/civique peut incontestablement jouer un
rôle important.
En France, en Europe ou en Amérique latine, à propos d’un service civil/civique
volon­taire, il est possible de s’accorder sur l’existence commune d’une triple
matrice­ : citoyenneté, participation et solidarité. On y retrouve ainsi, ici et ailleurs,
la libre volonté, le compromis dans la durée, la pratique d’une intervention sociale­
favorisant la rencontre et le dialogue entre groupes ayant des identités sociales
différentes.
Par ailleurs, un autre élément attire l’attention : en cherchant à produire le changement dans les systèmes sociaux, l’accent est notamment mis sur la prévention et les
bénéficiaires sont considérés comme sujets de transformation sociale.
Bien que souvent utilisées sur une échelle microsociale, les missions de service
civil peuvent avoir des répercussions politiques au niveau macrosocial. À partir du
moment où la « rencontre » entre volontaire et public ciblé est heureuse (fructueuse),
1. Le terme est à prendre ici au sens large, à savoir incluant bénévolat et volontariat. Mais cette distinction, surtout
appliquée au contexte français, ne sera pas abordée dans cet ouvrage.
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Avant-propos
elle peut engendrer la construction et/ou la confrontation des idées et devient ainsi une
ressource pour la transformation sociale. En outre, le service civil/civique, à partir de la rencontre d’acteurs qu’il produit, peut être à l’origine d’un processus de conscientisation, à la
fois pour les jeunes volontaires et pour les bénéficiaires. C’est ce dialogue possible qui doit
questionner : en service, le volontaire et le public ciblé découvrent ensemble de nouvelles
façons de voir les problèmes et, par conséquent, des processus de participation à la vie de
la cité différents deviennent possibles.
À partir du moment où le service civil/civique implique compromis, changement social, engagement pour l’intérêt général et qu’il tente d’offrir aux jeunes la possibilité de participer
activement à la vie de la cité, ne pourrait-il pas alors se réclamer de l’éducation populaire ?
En Amérique latine encore une fois, l’histoire récente du volontariat est liée à l’activisme
populaire, et ensuite au service civil étudiant. Depuis le début des années 2000, il sert à
renouveler le sens de la solidarité dans la région et est fortement porté par les organisations
non gouvernementales (ONG) en tant que modalité d’implication des jeunes à la vie de la
cité. Le volontariat sert à mobiliser trois leviers d’actions destinées aux jeunes : l’initiative
de jeunes, l’entrepreneuriat et la participation, le postulat reconnu étant que le service
civil/civique est source à la fois de formation sociale, de compétences professionnelles, de
développement de capital social et de conscience civique.
En France, l’expérience désormais solide de l’association Unis-Cité en matière de service
civil, devenu « civique » depuis la loi du 10 mars 2010, est incontournable pour comprendre les spécificités du « modèle » français. Le travail d’évaluation mené par Valérie
Becquet dans cet ouvrage nous incite plus que jamais à interroger le(s) sens et les enjeux
possibles d’un engagement définitivement pas comme les autres.
Angélica Trindade-Chadeau
directrice de la collection, INJEP
Avertissement de lecture
Cet ouvrage présente les résultats des enquêtes réalisées sur la mise en œuvre du service civil
volontaire à l’association Unis-Cité. Le service civil volontaire a été créé au mois de mai 2006.
En mars 2010, il a été remplacé par le service civique. Les encadrés et les interviews ayant
été réalisés en 2011, le terme service civique est généralement utilisé. Les deux dispositifs
comportant de nombreuses similitudes, les termes, bien que n’ayant pas exactement le même
sens (civil/civique), se réfèrent à un cadre d’engagement proche.
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