Réhabilitation rapide en chirurgie digestive - Chirurgie

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Réhabilitation rapide en chirurgie digestive - Chirurgie
SOMMAIRE
Modérateurs
P. FRILEUX (Suresnes)
N. DEMARTINES (Lausanne)
K. SLIM (Clermont-Ferrand)
Réhabilitation rapide. Place de la chirurgie cœlioscopique
K. SLIM (Clermont-Ferrand)
Modalités péri-opératoires pour l'anesthésiste réanimateur
M. LE GUEN (Suresnes)
La réhabilitation rapide en chirurgie diminue les complications postopératoires: pourquoi ?
N. DEMARTINES (Lausanne)
Expérience de la réhabilitation rapide au CH de Vannes
D. RIO (Vannes)
FCC 6 - Réhabilitation rapide en chirurgie digestive
REHABILITATION RAPIDE. PLACE DE LA CHIRURGIE CŒLIOSCOPIQUE
K. SLIM
CHU Estaing
Service de chirurgie digestive
Bd Léon Malfreyt
63058 Clermont Ferrand
Tél : 04 73 75 05 34
Email: [email protected]
La « révolution » cœlioscopique des années 1990 en chirurgie colorectale, n’est plus une révolution. La
chirurgie colorectale par cœlioscopie est maintenant une pratique courante et validée par des études de
qualité méthodologique peu discutable [1,2]. Les principaux avantages de la cœlioscopie par rapport à la voie
ouverte sont un meilleur confort postopératoire et un retour plus rapide à la vie active, soit une réhabilitation
plus rapide. Or ce concept (moindre agression chirurgicale) a aussi développé en dehors de la chirurgie
cœlioscopique et diffusé par l’équipe de Kehlet dès la fin des années 90 [3-5]. L’évolution de ce nouveau
paradigme s’est faite parallèlement à la diffusion de la chirurgie cœlioscopique. La chirurgie cœlioscopique est
mini-invasive (moindre douleur postopératoire, reprise plus rapide du transit, etc) ; la réhabilitation rapide est
une prise en charge multimodale péri-opératoire globale. Ces deux approches ont le même but réduire
l’agression chirurgicale.
Mais la supériorité de la cœlioscopie sur la voie ouverte a été établie dans des études randomisées ayant
comporté dans le groupe contrôle des soins péri opératoires conventionnels sans prise en charge de type
réhabilitation accélérée. D’autre part les résultats de la cœlioscopie (en termes de durée d’hospitalisation par
exemple) ne sont meilleurs que ceux de la réhabilitation accélérée avec chirurgie ouverte. Ainsi tous les grands
essais randomisés [6-9] ont montré de manière concordante des durées d’hospitalisations dépassant dans tous
les cas 5 jours, alors que dans la majorité des études sur la réhabilitation accélérée la durée d’hospitalisation
était inférieure à 5 jours [10]. Deux études randomisées ont comparé la voie cœlioscopique et la voie ouverte
dans le cadre de la réhabilitation accélérée [11,12]. Ces études avaient un faible effectif (n=60) et ont montré
des résultats contradictoires. L’étude danoise (avec une évaluation en aveugle) [11] n’a pas montré de
différence entre les deux approches alors que l’étude anglaise (sans évaluation en aveugle) [12] a montré une
supériorité de la cœlioscopie.
On peut supposer de l’aspect mini-invasif de la cœlioscopie viendrait ajouter un plus à l’approche péri
opératoire multimodale, aboutissant à un protocole thérapeutique constituant une deuxième révolution dans
FCC 6 - Réhabilitation rapide en chirurgie digestive
la prise en charge chirurgicale digestive (notamment dans le domaine des affections colorectales) [13]. Les
petits essais publiés il y a 5 ans environs, n’ont pas répondu à la question de la place de la cœlioscopie dans le
protocole de réhabilitation rapide en chirurgie colorectale, il était important de concevoir un grand essai
multicentrique. Cet important essai (essai LAFA) est venu des Pays-Bas [14], 9 centres y ont collaboré. L’essai a
inclus 400 patients répartis sur 4 bras (100 patients par bras), le critère de jugement principal était la durée
d’hospitalisation et les critères secondaires : la morbi-mortalité, le taux de réadmission et la qualité de vie. Les
patients avaient selon le tirage au sort soit une cœlioscopie avec un protocole de réhabilitation rapide ou
groupe 1, soit une cœlioscopie avec un protocole conventionnel (groupe 2), soit une laparotomie avec un
protocole de réhabilitation rapide (groupe 3), soit une laparotomie avec un protocole conventionnel (groupe
4).
Les résultats de cet essai viennent d’être publiés [15]. Le durée d’hospitalisation médiane du groupe 1 était de
5 (4-8) jours, de 7(5-11) jours dans le groupe 3 de, 6 (4.5-9.5) jours dans le groupe 2, et 7 (6-13) jours dans le
groupe 4 (P < 0.001). Il n’y avait de différence statistiquement significative pour les autres critères de jugement.
Une analyse multivariée (en régression logistique) a montré que la cœlioscopie était le seul facteur
indépendant de réduction de la durée d’hospitalisation et de la morbidité. Un sous-groupe de patients (n=93)
inclus dans la même étude a eu une exploration annexe de la motricité digestive par scintigraphie [16]. Cette
analyse a confirmé la supériorité de la combinaison cœlioscopie/protocole de réhabilitation rapide sur les
autres options, le transit colique y étant plus rapide. La conclusion des auteurs était que la combinaison
cœlioscopie/protocole de réhabilitation rapide était la meilleure option thérapeutique pour les patients devant
avoir une chirurgie colique. Une autre étude [communication personnelle] de la même équipe a montré que la
cœlioscopie était un facteur indépendant de réussite d’un programme de réhabilitation rapide.
L’étude hollandaise répond ainsi à une question restée sans réponse depuis 5 ans environ.
La cœlioscopie seule (c’est-à-dire associée à un protocole de prise en charge péri opératoire conventionnel) fait
aussi bien que le protocole de réhabilitation rapide avec une chirurgie ouverte. Mais elle fait encore mieux (en
termes de durée d’hospitalisation et probablement de morbidité globale) si elle est associée à un protocole de
réhabilitation rapide dont les avantages ont été bien démontrés par plusieurs essais ou méta-analyses [17] et
dont la discussion dépasse le cadre de cette présentation.
Pour conclure, il existe maintenant suffisamment de données factuelles pour considérer la cœlioscopie comme
un élément important des programmes de réhabilitation rapide après chirurgie colique. La place de la
cœlioscopie dans le cadre spécifique de la chirurgie rectale demande à être évalué par d’autres études.
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collaborative LAFA study group. Laparoscopy in combination with fast track multimodal management
is the best perioperative strategy in patients undergoing colonic surgery: A randomized clinical trial
(LAFA-study). Ann Surg 2011 May 18. [Epub ahead of print].
FCC 6 - Réhabilitation rapide en chirurgie digestive
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FCC 6 - Réhabilitation rapide en chirurgie digestive
MODALITES PERIOPERATOIRES POUR L'ANESTHESISTE-REANIMATEUR
M. LE GUEN
Anesthésiste, Hôpital Foch, Suresnes
Email : [email protected]
Le concept de « Fast-Track » ou de réhabilitation rapide après chirurgie a été développé par H. Kehlet,
chirurgien danois, afin de réduire la morbidité post-opératoire en réduisant au maximum l’impact de la
chirurgie sur le patient. [1] Dès lors, les programmes de réhabilitation ont pour objectifs l'amélioration de
l'évolution fonctionnelle des opérés en assurant
une reprise rapide de l’autonomie et en optimisant
l'organisation des soins périopératoires. [2,3] L’objectif commun de ces programmes est notamment
économique avec une réduction de la durée de séjour hospitalier et de convalescence. La mise en œuvre de
programme de
réhabilitation doit pour réussir impliquer tous les soignants, - anesthésiste, chirurgien,
rééducateur, infirmier, kinésithérapeute... -, avec une répartition précise des prescriptions et des actes
thérapeutiques de chacun. [4,5] Quand on considère l’ensemble des points (Figure 1) d’un programme de
réhabilitation tel que le promeut le groupe européen ERAS (Enhanced Recovery After Surgery), l’anesthésiste
intervient à différents stades résumés dans cette presentation. [6]
1.
Préparation pré-opératoire :
a.
information
L’information du patient est primordiale pour obtenir son adhésion au programme. La consultation préopératoire et la visite la veille de l’intervention constituent donc deux moments clés pour valider les différentes
étapes du programme. Celles-ci sont appuyées par une visite infirmière dédiée (équipe mobile douleur dans
notre centre) afin de reformuler et de remettre au patient son tableau de bord avec les objectifs à remplir.
b.
« lutter contre le jeûne »
Le jeûne constitue un stress pour l’organisme et comme la chirurgie, il induit une insulino-résistance ayant
comme conséquences d’une part une hyperglycémie augmentant le risque de complications infectieuses et
d’autre part un catabolisme protidique. L’American Society of Anesthesiology (ASA) a proposé la libéralisation
de l’ingestion d’aliments solides (repas léger) jusqu’à 6 heures avant une anesthésie chez les patients sans
facteurs de risque de pneumopathie d’inhalation. Les liquides clairs (eau, thé, café, boissons sucrées sans pulpe
dégazéifiées) sont autorisés jusqu’à 2 heures avant l’anesthésie, ce qui réduit la sensation d’inconfort, de soif
et d’anxiété sans pour autant modifier le volume, ni le pH gastrique. Dans le cas de la réhabilitation, un apport
exogène glucidique minimum de 150 g/ jour est nécessaire pour empêcher
les mécanismes adaptatifs
aboutissant à une inhibition des voies d’utilisation du glucose au profit d’une augmentation des voies de
production. Dès lors, les patients bénéficient dès la veille de la prise de 800 ml de boissons riches en hydrates
de carbone (12,5%) et de 400 ml le jour J, deux heures avant l’intervention. Cette mesure, sans augmenter le
FCC 6 - Réhabilitation rapide en chirurgie digestive
risque d’inhalation, permet de garder le patient en phase anabolique et de restaurer ses réserves en glycogène.
D’autres études récentes proposent même le chewing-gum en pré-opératoire pour activer le péristaltisme
intestinal. [7]
c.
Prémédication :
La prémédication ne doit pas comporter de benzodiazépine et les recommandations oscillent entre absence de
prémédication et hydroxyzine.
2.
Eléments per-opératoires
a.
Gestion de la douleur :
L’analgésie repose sur le trépied suivant :
Epargne morphinique : La morphine est connue pour interagir avec le récepteur µ intestinal, responsable
d’iléus. De plus, si la morphine est efficace pour les douleurs de repos, elle l’est beaucoup moins pour les
douleurs de mobilisation.
Anti-inflammatoires non stéroïdiens : En l’absence de contre-indication absolue (allergie, clairance de la
créatinine < 60 ml/min et ulcère gastrique < 1 mois), le recours aux anti-inflammatoires non stéroïdiens sera
proposé pendant une courte durée (max. 5 jours). En effet, les AINS sont d’excellents analgésiques permettant
une épargne morphinique non négligeable. De plus, ils ont une action propre sur l’iléus puisqu’ils permettent
de diminuer l’inflammation qui a une action directe sur le système nerveux entérique.
Analgésie péridurale thoracique : La péridurale thoracique est la technique d’analgésie la plus efficace pour
soulager la douleur, surtout à la mobilisation après chirurgie abdominale par laparotomie. Combinée à une
anesthésie générale, la supériorité de l'analgésie postopératoire par voie péridurale est similaire, qu'elle soit
débutée en per- ou en postopératoire. [8] En plus de ces effets analgésiques, elle exerce des effets sur la
réponse métabolique à la chirurgie et réduit la phase catabolique permettant de réduire la fonte musculaire et
la fatigue postopératoire. Elle améliore par ailleurs la fonction diaphragmatique postopératoire et réduit les
contraintes myocardiques. Elle exerce également des effets bénéfiques sur l’iléus à la fois directement par
blocage de l’arc réflexe efférent dépendant du système nerveux sympathique et indirectement par l’épargne
morphinique et la mobilisation précoce qu’elle permet. Il convient de privilégier un mode d’administration
auto-contrôlé par le patient (PCEA) car il diminue l'incidence de survenue des blocs moteurs, des nausées et
des vomissements. Ainsi, l'analgésie péridurale par anesthésique local permet finalement de réduire la durée
de l'iléus postopératoire à 24-48 heures comparée à l'analgésie intra-veineuse morphinique. [9] Toutefois,
l’analgésie péridurale n’est pas suffisante par elle-même pour diminuer la durée d’hospitalisation, et elle doit
s’intégrer « en tant qu’outil » dans un programme plus complexe permettant la mobilisation et l’alimentation
précoces.
Malheureusement, la péridurale n’est pas réalisable chez tous les patients (refus, échec de la technique,
contre-indication médicale…), des techniques alternatives réduisant le recours aux morphiniques peuvent alors
être proposées au patient. Les deux techniques actuelles semblant les plus intéressantes sont :
•
l’administration intraveineuse continue de lidocaïne [10]
FCC 6 - Réhabilitation rapide en chirurgie digestive
•
l’infusion continue par un cathéter cicatriciel multiperforé d’anesthésiques locaux [11].
Il semble que ces techniques soient moins efficaces que la péridurale, même si peu d’études ont comparé la
lidocaïne IV à la lidocaïne péridurale [12]. Par ailleurs, elles peuvent être proposées en cas de chirurgie par
laparoscopie puisque dans cette indication, l’analgésie péridurale ne montre pas de supériorité évidente.
[13,14] Au total, le choix de contrôle antalgique s’oriente désormais vers une prise en charge multimodale
associant plusieurs agents et/ou techniques analgésiques, tout en évitant les conséquences délétères de
certaines thérapeutiques.
b.
Lutte contre les nausées-vomissements : choix des agents anesthésiques et des stratégies
de remplissage vasculaire
Les nausées-vomissements post-opératoires (NVPO) sont source d’inconfort, de retard de la réalimentation
orale et d’indication à la sonde gastrique. [15] Différentes mesures peropératoires permettent d’en réduire
l’incidence telles que l’abandon du protoxyde d’azote, le recours au propofol pour l’induction et l’entretien de
l’anesthésie (TIVA). Un autre élément vecteur de NVPO est le remplissage vasculaire inadapté conduisant à un
œdème pariétal des muqueuses intestinales.
La réflexion sur la stratégie de remplissage vasculaire accompagne donc la mise en œuvre de procédures de
réhabilitation rapide. La réduction des apports liquidiens diminue la morbidité cardio-pulmonaires, améliore la
vidange gastrique et raccourcit la durée de l'iléus après chirurgie colorectale, contribuant ainsi à une réduction
de la durée d'hospitalisation. [16] Il convient donc d'éviter tout remplissage vasculaire excessif et de préférer
une utilisation raisonnée des vasopresseurs pour traiter une éventuelle hypotension artérielle.
Basse et al.
recommandent une administration totale peropératoire ne dépassant pas 1500 ml de cristalloïdes et 500 ml de
macromolécules si les pertes sanguines n'excèdent pas 500 ml. [1] Une autre stratégie consiste en la titration
des apports liquidiens par le biais de monitorage peu invasif comme le doppler transoesophagien qui permet
de déterminer la valeur maximale du débit cardiaque sans risque de surcharge. Cette approche du remplissage
vasculaire adaptée à chaque patient est décrite dans la littérature anglo-saxonne sous le terme de goaldirected therapy. [17-19] Cette stratégie est largement préconisée notamment en Grande-Bretagne pour
l’optimisation volémique [20], et les bénéfices de son utilisation ont été soulignés aux Etats-Unis par le Centers
for Medicare and Medicaid services [21], et par les recommandations du groupe de travail européen ERAS [22]
sur la prise en charge péri-opératoire des patients.
c.
Normothermie et apports en oxygène :
L’hypothermie favorisée en cas de laparotomie est un facteur de risque établi d’iléus postopératoire, de
complications infectieuses par diminution de la réponse immunitaire et de retard de cicatrisation. [23] Dès lors,
le réchauffement dès l’induction et l’obtention de la normothermie sont une priorité.
Le recours à une fraction inspirée d'oxygène (FiO2 ) à 80% reste discuter comme facteur de réduction des
complications septiques postopératoires. [24] Cet effet bénéfique est contre-balancé par l'augmentation des
atélectasies, facteur favorisant la survenue de pneumopathies postopératoires et d'un shunt intrapulmonaire
peropératoire à l’origine d’épisodes d’hypoxémie.
FCC 6 - Réhabilitation rapide en chirurgie digestive
3.
Ne pas oublier en postopératoire… «Retrait de tout tuyau inutile » :
Outre une reprise plus précoce de l'alimentation qui contribue à réduire la phase catabolique, une analgésie de
bonne qualité possède comme avantages de réduire l'hyperglycémie et l'hypercorticisme réactionnels à la
chirurgie et d’accroître la synthèse protidique justifiant la reprise de boissons hyperprotéinées dès le premier
jour. Afin de permettre plus rapidement l'autonomisation et la mobilisation des patients, l'ablation du sondage
e
e
e
urinaire est réalisée entre les 24 et 48 heures postopératoires, et les cathéters veineux sont retirés dès la 24
heure postopératoire en l'absence de nausées et de météorisme. La déambulation précoce est définie par la
mobilisation des patients (mise au fauteuil) à j0 pendant deux heures dès la sixième heure postopératoire,
pendant huit heures à j1 et toute la journée à j2. Le premier lever est effectué à j1 avec au moins cinq pas en
dehors de la chambre. L’analgésie péridurale est retirée à J2 et relayée par des antalgiques oraux.
Conclusion :
La réhabilitation rapide ne s’entend qu’en tant que stratégie multimodale et multidisciplinaire où chaque
acteur doit réfléchir l’ensemble de ses actions depuis la consultation jusqu’à la sortie du patient. Ces
programmes ont ainsi permis de souligner qu’en intervenant à chaque temps du déroulement périopératoire, il
était possible de diminuer significativement le coût individuel et sociétal d'une intervention chirurgicale.
Figure 1 : Eléments du programme de réhabilitation rapide dans le cadre de la chirurgie colo-rectale adaptés du
programme ERAS.
FCC 6 - Réhabilitation rapide en chirurgie digestive
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FCC 6 - Réhabilitation rapide en chirurgie digestive
LA REHABILITATION RAPIDE EN CHIRURGIE DIMINUE LES COMPLICATIONS
POSTOPERATOIRES : POURQUOI ?
N. DEMARTINES, D. ROULIN,
Service de Chirurgie Viscérale
Centre Hospitalier Universitaire Vaudois (CHUV)
Rue du Bugnon, 46
1005 Lausanne, Suisse.
Email : [email protected]
Le développement de la réhabilitation rapide en chirurgie (fast track surgery) a constitué un profond
changement dans la prise en charge des patients chirurgicaux. Ce concept a été introduit dans les années 1990
par Henrik Kehlet qui s’est intéressé au rôle de l’antalgie postopératoire, de la motilité intestinale et de la
mobilisation afin d’atténuer la réponse au stress chirurgical [1]. Bien que ces principes s’appliquent à tout
l’éventail de la chirurgie, c’est en chirurgie digestive, et notamment en chirurgie colorectale, que l’on dispose le
plus d’évidences. C’est ainsi que le groupe de collaboration ERAS (Enhanced Recovery After Surgery) a publié un
protocole multimodal basé sur les preuves afin d’accélérer la convalescence, de réduire la durée de séjour,
ainsi que de diminuer les complications post-opératoires dans la chirurgie colorectale [2]. L’efficacité de la
réhabilitation rapide en terme de réduction des complications a été démontrée dans une méta-analyse [3] où
une réduction de près de 50% du taux de complications en comparaison avec une prise en charge
conventionnelle a été obtenue après chirurgie colorectale par voie ouverte. Les recommandations du groupe
ERAS comprennent 20 éléments qui ont tous une influence positive sur l’évolution postopératoire, bien qu’il
soit difficile de déterminer l’importance de chacun, une étude a montré que deux sont des facteurs prédictifs
indépendants de l’évolution postopératoire : les boissons carbohydratées et la restriction hydrique
intraveineuse [4]. Ainsi c’est le but principal est une amélioration de la réhabilitation par une diminution des
complications, plus que par l’aspect « rapide » de la réhabilitation.
Un des objectifs principaux de la réhabilitation rapide est d’atténuer la réponse au stress chirurgical qui
engendre une réponse neuroendocrine avec production de cortisol, glucagon, adrénaline et noradrénaline. Ces
hormones de stress ont un effet antagoniste à ceux de l’insuline, induisant ainsi une insulino-résistance. Par
conséquent, les changements métaboliques observés chez un patient opéré sont semblables à ceux d’un
patient avec un diabète de type 2 [5] Le degré de résistance à l’insuline est lié à l’ampleur de l’opération [6]. Il a
récemment été démontré qu’en chirurgie cardiaque l’insulino-résistance est associée à un risque augmenté de
complications, dont notamment d’infections, et ce indépendamment du status diabétique [7]. Ceci peut être
explique par le fait que l’hyperglycémie induit une inflammation cellulaire responsable de l’expression de
FCC 6 - Réhabilitation rapide en chirurgie digestive
cytokines pro-inflammatoires et de production de radicaux libres, pouvant ainsi favoriser une infection du site
opératoire [8] ou un sepsis avec ou sans défaillance multi-organique [9]. Vu que le jeûne préopératoire place le
patient dans un état catabolique augmentant ainsi la réponse au stress chirurgical, l’emploi de boissons
carbohydratées a été proposé en pré-opératoire. L’utilisation en réhabilitation rapide de boissons
carbohydratées données jusqu’à deux heures avant l’anesthésie permet de réduire de moitié la résistance à
l’insuline [10], et également de diminuer les pertes de nitrogène urinaire (un marqueur de catabolisme
musculaire) [11], la perte de poids et l’altération de la fonction musculaire [12, 13] L’alitement prolongé
entrainant également une résistance à l’insuline, une mobilisation précoce est donc également un élément
important pour éviter l’hyperglycémie postopératoire [14]. L’utilisation d’une péridurale permet également de
diminuer l’insulino-résistance par le biais d’une bonne antalgie [15]. Par conséquent, la réhabilitation
améliorée vise à réduire le stress chirurgical et la réponse métabolique associée, atténuant ainsi la résistance à
l’insuline postopératoire, permettant ainsi d’avoir un bon profil glycémique, et ce sans prescription d’insuline
malgré une nutrition entérale complète dès la fin de l’opération [16].
La restriction hydrique joue un rôle primordial dans les programmes de réhabilitation rapide en chirurgie. Il a
été démontré que la restriction hydrique intraveineuse postopératoire après chirurgie colique est associée à un
retour plus rapide de la fonction gastro-intestinale [17]. De plus un régime hydrique restrictif en péri et post
opératoire après résection colorectale est significativement associé à moins de complications, notamment
cardio-pulmonaires (embolie pulmonaire, œdème pulmonaire, infarctus myocardique, pneumonie, arythmies),
et favorise la guérison tissulaire en diminuant le risque d’insuffisance anastomotique, de déhiscence pariétale
ou cutanée, et d’infection de plaies [18]. Dans le cadre d’un programme de réhabilitation rapide,
l’administration liquidienne supérieure aux limites fixées est même un facteur prédictif indépendant de
complications post-opératoires après chirurgie colique par voie ouverte [19]. De plus, chaque litre
supplémentaire de perfusion intraveineuse au premier jour opératoire augmente les risques de complications
de 32% [4]. Les craintes selon lesquelles une restriction hydrique pourrait engendrer une instabilité
hémodynamique ou une dysfonction rénale ne sont pas fondées [20]. Ainsi la restriction hydrique
intraveineuse est un des piliers de la réhabilitation rapide et requiert donc une attention soutenue aussi bien
dans la période péri- que post-opératoire.
Hormis la diminution de la résistance à l’insuline et la restriction hydrique, la réhabilitation améliorée
comprend également d’autres interventions visant à réduire les complications. Une antalgie postopératoire
efficace est essentielle et peut être obtenue de façon optimale par une anesthésie péridurale dans la chirurgie
ouverte [21] ce qui diminue également les complications pulmonaires [22]. De plus, une utilisation minimale
des drains est recommandée. Par exemple, les sondes naso-gastriques doivent être retirée en fin d’intervention
car leur emploi en prophylaxie postopératoire augmente le taux d’atélectasie et de pneumonie [23]. Les sondes
urinaires chez les patients porteurs d’une péridurale peuvent être retirée au premier jour postopératoire
réduisant ainsi le taux d’infection urinaire [24]. A mentionner également l’utilisation de couvertures
FCC 6 - Réhabilitation rapide en chirurgie digestive
chauffantes qui en prévenant l’hypothermie per-opératoire permettent notamment de diminuer les infections
de cicatrices [25] et les complications cardiaques [26].
Bien que tous les éléments faisant partie d’un programme de réhabilitation améliorée en chirurgie n’aient pu
être revu ici en détail, il faut souligner l’importance de l’aspect multimodal de cette approche. En effet, il a été
montré que le degré d’adhérence aux vingt recommandations du groupe ERAS [2] est associée de façon
proportionnelle à une réduction des complications après chirurgie colorectale [4]. Par conséquent, le succès
d’un programme de réhabilitation améliorée en chirurgie nécessite une approche globale et multidisciplinaire
faisant intervenir aussi bien les chirurgiens, les anesthésistes, les infirmiers et les aides-soignants, et surtout les
patients eux-mêmes.
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FCC 6 - Réhabilitation rapide en chirurgie digestive
REHABILITATION AMELIOREE (RAPIDE) APRES CHIRURGIE. L’EXPERIENCE
VANNETAISE
D. RIO
Chirurgie digestive,
Centre Hospitalier Bretagne Atlantique,
56000 Vannes
Email : [email protected]
Après la coelioscopie, la réhabilitation améliorée après chirurgie ( Enhanced Recovery After Surgery ou
Fast- Track Surgery) constitue une révolution dans la prise en charge chirurgicale programmée des
pathologies digestives. Ce concept qui s’attache à combattre les effets génériques de l’agression
chirurgicale (1) est actif sur tout le champ de la chirurgie. C’est, cependant en chirurgie digestive que ces
effets positifs ont été le plus étudiés. C’est à l’équipe du Pr Kehlet au Danemark et ses travaux durant
les années 1990 (2,3,4) et à un groupe nord européen (groupe ERAS) (5) au début des années 2000
que l’on doit le développement de ce concept. En 2005 la SFCD avait publié des recommandations sur
les soins péris opératoires en chirurgie digestive (6). Dès lors une approche informelle a été débutée et
a permis de conforter ce que « disait » la littérature. En 2007 dans le cadre de la certification des
établissements de santé (deuxième version de l’HAS) une évaluation des pratiques professionnelle a
été organisée
(critère 46) dans le service. La méthodologie HAS
fut suivie et un groupe
multidisciplinaire et multi professionnel fut constitué. Le thème choisi fut l’amélioration de la prise en
charge des colectomies pour cancer et diverticulose. Un chemin clinique fut écrit (avec le Dr Fétu
anesthésiste et Mme Gierens, cadre de santé) puis évalué et validé par les experts visiteurs de la HAS.
La base du chemin clinique était le protocole de Kehlet adapté au contexte français. Le schéma ci
dessous résume le concept (in 5).
FCC 6 - Réhabilitation rapide en chirurgie digestive
L’évaluation en 2009 (communication orale au congrès de l ‘AFC) et 2010 (communication affichée au 6e
congrès de la SFCD) de ce chemin clinique a confirmé les données initiales. Aujourd’hui le travail continue.
Nous tentons d’optimiser les conditions de prise en charge des colectomies électives. Notre base de données
est constituée de la cohorte des patients opérés du premier janvier 2007 au 30 juin 2011. Durant cette
période nous avons pris en charge 255 patients pour une pathologie colique chirurgicale. Pour des raisons
d’homogénéité nous avons inclus dans cette prise en charge uniquement les patients vus pour une chirurgie
élective pour cancer (ou polypes) ou diverticulose compliquée. La cohorte comprenait 112 patients.
Nous avons adapté pour tous les points, le protocole ERAS au contexte local. En particulier une information
orale et écrite exhaustive a été fournie. Il n’y a pas eu de préparation colique. L’analgésie péridurale était
proposée et réalisée si possible. Le jeûne était limité au maximum avec apport oral 3 heures avant l’anesthésie
et reprise des apports 6 heures après la chirurgie.
Les colectomies étaient faites le plus souvent par coelioscopie. Si il n’y avait de péridurale thoracique une PCA
était installée. Les orifices de trocart étaient infiltrés à la ripovacaine (150 mg au total). Depuis septembre
2010 un infuseur élastomérique de ropivacaine était positionné pour quarante huit heures dans l’incision
servant à l’extraction de la pièce opératoire.
Il y avait 74 femmes et 58 hommes. L’âge moyen était de 69,3 ans (extrême 45-97). Le score ASA moyen était
de 2. La répartition était la suivante : ASA1 : 21 ; ASA2 : 73 ; ASA3 : 17 L’IMC moyen était de 26,4 kg /m². La
colectomie a été faite 67 fois pour un cancer, 15 fois pour un ou plusieurs polypes suspects (exérèse
carcinologique de principe) et 30 fois pour une diverticulose. L’analgésie péridurale a été faite 41 fois pour une
durée de 48 heures. Il y a eu 69 colectomies gauches et 43 colectomies droites. Il y a eu 20 laparotomies
d’emblée et 6 conversions plus ou moins rapides. Le temps moyen chirurgical était de
142
minutes
(extrêmes 75- 280). Pour les colectomies droites ce temps moyen était de 123 minutes (extrêmes : 75- 240
minutes) et pour les colectomies gauches de 153 minutes (75-280 mn) . Soixante deux patients (55%) ont été
levés à JO. Les apports oraux ont débuté à JO chez 93 patients. Il y a eu 8 poses de sonde gastrique en
postopératoire. La reprise du transit des gaz s’était fait en moyenne en 1,9 jours. Pour les selles, le délai était
de 2,7 jours en moyenne. Il y a eu 3 décès (2,7%). La morbidité était de 31% On dénombrait
5 fistules
anastomotiques dont deux avec péritonite entraînant un démontage de l’anastomose. Trois abcès profonds
péri anastomotiques furent traités médicalement (un drainage radiologique). Au début de la série avec
l’utilisation des pinces avec chargeurs « verts » on fut confrontés à des hémorragies digestives basses (7
patients / une transfusion pour un patient). Une patiente été reprise à J1 pour une plaie ponctiforme du grêle
(suites simples ensuite). Il y a eu 9 abcès de paroi (surtout avant la mise en en place systématique des « jupes
plastiques » de protection) sur le plan médical il y a eu une AVC (avec décès secondaire/ sténose carotides),
deux passages en ACFA régressifs sous traitement, 2 brèches de la dure-mère, traitées par Blood Patch) et
quelques infections urinaires. La durée moyenne de séjour postopératoire a été de 6,6 jours (extrêmes 2-42
médiane 4,5 jours).
La mise en place d’un chemin clinique de réhabilitation rapide pour les colectomies permet la réduction
significative de la durée de séjour avec un taux de la morbi-mortalité acceptable. La formalisation de cette
démarche permet l’application des recommandations de bonnes pratiques dans les soins péri opératoires
FCC 6 - Réhabilitation rapide en chirurgie digestive
(recommandations de la SFCD). De plus en pathologie colorectale la confirmation de l’efficacité de ce type de
prise en charge est confirmée (8)
Grâce à cette expérience favorable et à l’Evidence Based Médecine (9) depuis janvier 2011 nous essayons
d‘étendre cette prise en charge aux autres interventions de chirurgie digestive « lourde ». Par chirurgie lourde
il faut entendre tout ce qui ne relève pas
de
hôpital de jour, ou à l’inverse, toute intervention qui
classiquement requiert au moins une semaine d’hospitalisation. Les résultats initiaux sont encourageants en
particulier pour la chirurgie bariatrique (sleeve gastrectomy ).
Cependant le travail de coordination entre les intervenants garant de la réussite du projet est encore un
travail difficile alors que les preuves sont là .En effet on ne peut que constater, comme d’autres, que la mise en
place d’un protocole validé n’est pas suffisante (l’application complète des préconisations n’est pas de 100%)
et que tous les patients concernés ne sont pas inclus dans ces programmes (10). C’est un enjeu (11) majeur des
années à venir tant par l’amélioration de nos pratiques (évaluation) que par la qualité des soins prodigués à
nos patients. Nous devons poursuivre inlassablement cette tache de diffusion de ces pratiques auprès de nos
collègues chirurgiens et ce quelqu’ en soit la spécialité (la « «fast-track surgery » par ses fondements est
universelle), de nos collègues anesthésistes, de nos infirmières, nos aides soignant(e)s car le rôle de chacun
est primordial et indissociable de celui des autres.
Quant à nos directeurs il est important de les sensibiliser et de les convaincre de soutenir les réorganisations
parfois nécessaires dans les modes d’organisation de la Chirurgie programmée. En effet les progrès de la prise
en charge des patients devant bénéficier d’une intervention chirurgicale doivent permettre une explosion de la
chirurgie ambulatoire qui est la quintessence de la « fast track surgery « . Toute la chirurgie devrait être faite
selon ces principes dans un avenir qu’il faut souhaiter le plus proche possible. C’est à notre portée. Faisons le,
tous ensemble.
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