Martine Bedin / Mai-Thu Perret - Week-End à Rome
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Martine Bedin / Mai-Thu Perret - Week-End à Rome
Martine Bedin / Mai-Thu Perret - Week-End à Rome artactuel.com August 3 © Fondation Speerstra, 2014. Photographie: Annik Wetter. Pour cette nouvelle exposition, la Fondation Speerstra a provoqué la rencontre de Martine Bedin (*Bordeaux 1957) et de Mai-Thu Perret (*Genève 1976). Si la première est une des rares femmes designer qui fit partie du groupe Memphis, la seconde n'a cessé, depuis plusieurs années, de détourner les formes et les récits de la modernité. Si leur rencontre est inattendue, elle était pourtant presque naturelle. Depuis toujours, Martine Bedin dessine ses idées. Elle reporte dans des carnets noirs, avec minutie et soin, les formes qu'ont pu prendre ses réflexions sur les objets et la vie qu'ils induisent. Page à page, se feuillette ainsi le bouillonnement continuel et joyeux qui marque le parcours créatif de cette jeune étudiante arrivant par hasard dans l'Italie de la fin des années 70. De la politique à la vie familiale, de l'art à l'industrie, de l'Antiquité au Futur, la péninsule est alors saisie de soubresauts créatifs et révolutionnaires. Le monde semble à portée de main, tous les espaces ouverts. Par rencontres et affinités, Martine Bedin en vient à partager sa vie avec le foisonnant groupe de personnalités réunies autour d'Ettore Sottsass. Elle participe dès lors aux manifestations de ceux qui choisiront de s'appeler – inspirés par une chanson de Bob Dylan – Memphis pour le salon du meuble de Milan en septembre 1981. Si tous les objets de Martine Bedin ont été d'abord dessinés dans ses carnets, nombres de ces dessins n'ont jamais pris forme. Fidèle à l'optimisme drôle et volontiers bravache de ses débuts, Martine Bedin s'est mis en tête que – ses dessins conservant la fraîcheur impertinente et joyeuse des différentes périodes de son travail – elle était maître de son destin et pouvait remettre en jeu certains de ses projets anciens. C'est donc avec cette idée qu'elle a choisi de réaliser une importante série de pièces qui seront présentées pour la première fois à la Fondation Speerstra. Si le groupe Memphis produisait et produit encore des objets dans des séries non numérotées de manière à se jouer des fétiches de la société de consommation, le décalage chronologique détoure quant à lui les blafards codes du vintage. Le dessin conserve son temps propre que n'interrompt que temporairement la réalisation des objets. Martine Bedin a imaginé nombre de luminaires, dans l'idée que si l’un des enjeux du design était de changer le rapport des gens à leur espace de vie, la lumière était le vecteur parfait. Sa lampe "Super" est devenue emblématique de son désir ludique de nous inciter à penser l'objet lumineux en dehors de son carcan d'usage. Même éteint, le petit véhicule lumineux roule dans tous les coins. Mai-Thu Perret, quant à elle, a souvent reporté contre les murs des séquences formelles de la modernité, sur des céramique, des petites peintures sur bois, des tapisseries, les reproduisant en pattern ou les soulignant au néon. L'artiste se joue autant de la notion de savoir-faire que de l'éthérée vision de l'avant-garde. Des supposées formes de l'héroïsme radical deviennent alors éléments de décor d'une narration possible. Les récits de la modernité deviennent catalyseurs de fiction et d'émerveillement, une sorte de filtre souvent servi par des figures féminines. Pour cette exposition, Mai-Thu Perret présente deux séries de grands néons. Dans une première salle, un système apparemment rigoureux de grilles s'immisce dans les interstices du mur de briques, alors que dans la seconde un réseau de cercles se décentre et se brouille. Les artistes se jouent aussi des rapports attendus de hiérarchie qui voudrait que l'une pense des espaces appropriés pour l'autre. Elles ne gardent ici que le plaisir d'être ensemble, filant les métaphores de leurs intérêts communs. Week-End à Rome est aussi délicieusement hanté que certaines des chambres de notre palais de mémoire. © Fondation Speerstra, 2014. Photographie Annik Wetter. © Martine Bedin, Bureau Tranquille, 2013. Fondation Speerstra, 2014. Photographie Annik Wetter © Fondation Speerstra, 2014. Photographie Annik Wetter.