laminectomie cervicale selon la technique de roy-camille

Transcription

laminectomie cervicale selon la technique de roy-camille
ARTICLE ORIGINAL
TECHNIQUE
LAMINECTOMIE CERVICALE
SELON LA TECHNIQUE DE ROY-CAMILLE.
À PROPOS DE 20 CAS
P. ANTONIETTI*, CH. MAZEL**, L. BALABAUD**, H. RANDRIANANJA*,
R. TERRACHER**
* CENTRE DU RACHIS, CLINIQUE AMBROISE PARÉ, 27 BOULEVARD VICTOR HUGO - 92200 NEUILLY
** INSTITUT MUTUALISTE MONTSOURIS, 42 BOULEVARD JOURDAN - 75014 PARIS
Comme pour toute laminectomie, l’incision est médiane postérieure.
Elle expose de C2-C3 à C7-T1
lorsqu’une laminectomie C3-C7
est indiquée, ce qui est le cas le
plus fréquent.
Un contrôle radiographique est
réalisé au besoin, mais le plus
souvent, l’épineuse de C2 est
suffisamment caractéristique
pour être facilement reconnaissable.
Si il n’est pas envisagé d’ostéosynthèse, l’exposition latérale ne
R
oy-Camille a décrit en
1989 une technique de
laminectomie lombaire
utilisant une scie oscillante (3) :
les lames sont sectionnées à
droite et à gauche des épineuses,
et l’ensemble est retiré en bloc,
selon la technique dite de la
“carapace de homard”.
Nous avons déjà décrit cette
technique et présenté 100 cas
opérés de cette façon (1).
La même technique peut être utilisée pour la réalisation de laminectomies cervicales, en utilisant une fraise montée sur un
moteur rapide ou une scie oscillante.
Nous allons décrire les modalités techniques et indiquer brièvement les caractéristiques de
l’intervention et des suites opératoires.
INDICATIONS
Nous utilisons systématiquement cette technique dans les
laminectomies cervicales pour
myélopathie cervicarthrosique,
associées ou non à un temps
antérieur second.
Lorsqu’une libération antérieure
doit être associée, nous commençons toujours par la laminectomie (2).
Ceci permet à la moelle de reculer et minimise le risque neurologique du temps antérieur, corporectomie ou discectomie.
Les 20 cas que nous avons étudiés ici concernent des laminectomies C3-C7 isolées pour myélopathie cervicarthrosique, sans
ostéosynthèse ni temps antérieur
associé.
ANESTHÉSIE
Il est essentiel que l’intubation
soit non-violente. Nous avons
étudié en réunion de morbidité
Le Rachis - N° 1 - Janvier-Février 2012
avec les médecins anesthésistes,
deux aggravations neurologiques
post-opératoires (un BrownSéquard et une aggravation de
tétraparésie) : dans les deux cas,
l’intubation avait été réalisée de
façon laborieuse par un anesthésiste stagiaire, et le rachis cervical avait été mobilisé de façon
probablement brusque et inopportune.
Depuis, nous sommes convenus
que l’intubation doit être réalisée
systématiquement sans mobilisation du rachis cervical, soit
sous fibroscopie par voie nasale,
patient sédaté, soit au moyen
d’un système type Fasttrack.
Depuis, nous n’avons plus
constaté d’aggravation post-opératoire.
Cependant, l’anesthésie n’est
évidemment pas la seule cause
possible d’aggravation neurologique.
La mobilisation du patient anesthésié et l’installation en position opératoire doivent également être très précautionneuses
et méticuleuses : personnel en
nombre suffisant, pas d’hyperextension sur table ; la rapidité de
la laminectomie et son caractère
atraumatique sont certainement
essentiels au bon résultat neurologique.
C’est pourquoi la laminectomie à
la scie ou à la fraise présente des
avantages certains par rapport à
la laminectomie par morcellement : non-introduction d’instrument dans le canal, rapidité de
l’intervention.
Nous utilisons habituellement
une têtière classique, avec les
précautions habituelles concernant les points de compression
potentielle.
Le rachis est placé en légère
flexion. La table est placée en
Trendelenbourg inversé, afin
d’horizontaliser le rachis cervical et diminuer le saignement, ce
qui facilite le geste.
doit pas altérer les capsules articulaires, afin de préserver autant
que possible la stabilité intervertébrale et éviter une déformation
post-opératoire.
Il faut donc s’arrêter à la partie
la plus interne des massifs articulaires (figures 1a et b).
L’opérateur peut changer de côté
en cours d’intervention, pour
faciliter le geste.
On peut aussi opérer à la tête du
patient.
On commence par réséquer à la
pince gouge les ligaments sur- et
inter épineux en C7-T1 et C2-
A
B
Figures 1a et b : Exposition du rachis : le trait médian indique la ligne des épineuses ; les deux traits latéraux indiquent les traits
de section, à la jonction épineuse-massifs articulaires.
3
ARTICLE ORIGINAL
C3, ce qui limitera la mobilisation lorsque les lames seront sectionnées (figure 2).
La laminectomie proprement
dite est alors entreprise.
Nous utilisons une fraise oblongue
montée sur une turbine pouvant
tourner à 50.000 tours/min (figure
3), commandé à la main ou au
pied.
Le diamètre de la fraise est de 3
mm, ce qui permet de visualiser
parfaitement le fond de la tranchée et repérer le ligament jaune
dès qu’il apparaît.
Il est logique de commencer la
laminectomie au niveau proximal, plus déclive que C7 ; ceci
évite d’être gêné par le saignement provenant de la tranche de
section osseuse.
Figure 2 : Section des ligaments sur-et interépineux proximaux et distaux.
Le trait est situé à la jonction
entre la lame et l’articulaire
(figure 4).
Trop externe, il se perdrait dans
le massif et la laminectomie
serait impossible.
De plus, le saignement épidural
serait important.
Trop interne, la libération serait
insuffisante.
Le geste est protégé par le ligament jaune ; de plus, la duremère est généralement épaisse à
ce niveau ; nous n’avons jamais
provoqué de brèche durale.
La fraise peut être discrètement
inclinée vers la ligne médiane,
afin d’éviter l’articulaire.
Comme pour la laminectomie
lombaire, la main qui tient la
fraise s’appuie sur la main opposée, posée sur les berges de la
voie d’abord, afin d’éviter tout
dérapage potentiellement vulnérant.
La poussière d’os provoquée est
éliminée par lavage et aspiration
(figures 5 et 6).
Le trait de section est réalisé de
C3 à C7, d’un côté puis de l’autre (figure 7).
En cas d’hésitation, on peut palper le fond de la tranchée au
moyen d’une petite spatule
mousse, pour évaluer si la section est complète ou non.
On voit habituellement le ligament jaune de façon nette.
Figure 3 : Fraise oblongue habituellement utilisée pour la laminectomie.
Figure 5 : Début de la section proximale droite.
Figure 6 : Section proximale gauche.
Figure 4 : Ébauche de trait de section ; la ligne supérieure marque les épineuses.
Le Rachis - N° 1 - Janvier-Février 2012
4
au moyen d’une pince gouge.
On peut alors introduire une spatule courbe mousse dans le canal
(figure 9), toujours en exerçant
une traction de l’épineuse vers
l’arrière.
On sectionne le ligament jaune
au moyen de la spatule, d’un
côté puis de l’autre.
On procède ainsi jusqu’à C3
(figures 10, 11 et 12).
La section du ligament jaune
C2-C3 permet l’ablation de la
“carapace” (figures 13 et 14).
La laminectomie a ainsi été réalisée (figure 15) sans qu’aucun
instrument soit introduit dans le
canal, le risque de traumatisme
Figure 7 : Les flèches indiquent les extrémités des deux traits de section des lames, de part et d’autre de la ligne des épineuses.
Figure 9 : Section des ligaments jaunes au moyen d’une spatule courte et courbe.
Figure 10 : La moelle (flèche de gauche) apparaît progressivement lorsque l’on soulève la carapace (flèche de gauche).
Figure 8 : Au moyen d’une pince gouge ou d’un davier de Farabeuf, on commence à mobiliser la “carapace” à partir de C7.
La flèche de gauche indique l’ouverture du trait.
De la cire à os peut être mise en
place si la tranche de section
saigne.
Une fois les deux tranchées réalisées, on constate habituellement la mobilité de l’arc postérieur.
On mobilise doucement chaque
épineuse au moyen d’un davier
Le Rachis - N° 1 - Janvier-Février 2012
de Farabeuf ou d’une pince
gouge, latéralement et en exerçant une légère traction vers l’arrière, afin de ne pas provoquer
de compression de la moelle.
Ceci suffit généralement à rompre une section lamaire incomplète (figure 8).
Dans certains cas, et en particu-
lier au niveau de C3, il peut être
indiqué de rompre la pellicule
osseuse restante au moyen d’une
pince de Kerrison de 1 mm.
Une fois les lames mobilisables,
on saisit l’épineuse de la 7ème vertèbre cervicale au moyen du
davier, et l’on résèque le ligament jaune sur la ligne médiane
5
Figure 11 : Il est souvent nécessaire de sectionner à la spatule mousse des adhérences
entre la carapace et la dure-mère.
ARTICLE ORIGINAL
Figure 15 : Après résection de la carapace, la moelle s’expand correctement.
Figure 12 : La carapace peut être soulevée.
Figure 16 : Fragment retiré correspondant à une laminectomie de 5 niveaux.
Figure 13 : On récline alors l’ensemble en direction proximale et l’on sectionne le ligament jaune proximal (C2-C3) par sa face
intérieure au moyen de la spatule mousse.
per-opératoire est donc quasiment nul.
Figure 14 : Même étape, vue inférieure (flèche de gauche : moelle ; flèche de droite
carapace).
Le Rachis - N° 1 - Janvier-Février 2012
La carapace (figure 16) peut être
utilisée comme greffon si un
temps antérieur avec cages est
envisagé.
Figure 17 a et b : Aspect radiographique de la pièce.
De la cire est placée sur les
tranches de section, l’hémostase
épidurale est éventuellement
réalisée.
cas où il n’est pas réalisé d’ostéosynthèse.
La fermeture est réalisée de
façon habituelle en 4 plans.
La suture musculaire et aponévrotique doit être particulièrement soigneuse pour limiter le
risque de survenue d’une déformation post-opératoire dans le
6
BRÈVE ANALYSE DE LA SÉRIE
Nous avons étudié les 20 derniers cas de laminectomies cervicales C3-C7 isolées sur une
période de 12 mois.
Le temps opératoire moyen,
peau à peau, est de 50 minutes
(extrêmes 40 - 80 minutes).
Le temps moyen de laminectomie est de 13 minutes (de 8 à 20
minutes).
Il n’y a eu aucune brèche durale,
aucune aggravation neurologique post-opératoire.
ARTICLE ORIGINAL
Le saignement moyen est inférieur 100 ml.
ARTHRODÈSE LOMBO-SACRÉE PAR ABORD COMBINÉ,
ANTÉRIEUR PUIS POSTÉRIEUR, EN UN TEMPS
CONCLUSIONS
La technique de laminectomie à
la scie oscillante ou à la fraise
selon la méthode de RoyCamille est rapide et atraumatique.
CÉDRIC BARREY 1, 2, M.D., FRANÇOIS LUCAS 1, M.D., EURICO FREITAS 1, M.D.,
RAPHAEL BRANDAO 1, M.D., GENNARO D’ACUNZI 1, M.D., HÉLÈNE BELLIARD 1, M.D., ROMAIN DEBARGE 1, M.D.,
FRÉDÉRIC MICHEL 1, M.D., GILLES PERRIN 1, M.D.
1- SERVICE DE NEUROCHIRURGIE C ET CHIRURGIE DU RACHIS, HÔPITAL P WERTHEIMER, GROUPEMENT HOSPITALIER EST,
59 BOULEVARD PINEL 69394 LYON, FRANCE
2- LABORATOIRE DE BIOMÉCANIQUE, ARTS ET METIERS PARISTECH,
151 BOULEVARD DE L’HÔPITAL, 75013 PARIS, FRANCE
Elle est donc particulièrement
intéressante dans le traitement
chirurgical des myélopathies
cervicarthrosiques.
L’anesthésie et l’installation sur
table doivent être prudentes, ne
mobilisant pas le rachis cervical.
La brièveté de l’intervention et
l’absence d’introduction d’instruments dans le canal sont des
éléments importants de la nonaggravation post-opératoire de
patients présentant souvent des
symptômes neurologiques.
Néanmoins, sa réalisation peut
être techniquement délicate : il
est donc impératif de s’entraîner
sur pièces anatomiques ou de se
faire aider par un collègue la
maîtrisant avant d’entreprendre
cette technique.
L’
objectif de ce travail est de
rapporter les résultats cliniques et radiographiques
à 1 an d’une série de patients
opérés d’une arthrodèse lombosacrée par abord combiné en un
temps.
MATÉRIEL ET MÉTHODE
RÉFÉRENCES
1. Antonietti P, Mazel C, Balabaud L,
Terracher R. Laminectomies à la scie
oscillante selon la technique de RoyCamille. A propos de 100 cas. Le Rachis
Tome 6, n° 5, 3-11.
2. Mazel Ch, Trabelsi R, Antonietti P.
Abord circonférentiel (360°) systématique dans le traitement des sténoses cervicales arthrosiques majeures. Rev Chir
Orthop Reparatrice Appar Mot. 2002
Sep;88(5):449-59.
3. Roy-Camille R, Laurin C, Riley Jr L.
Atlas de chirurgie orthopédique. Tome 1 Généralités - Rachis. pp 437-441.
Masson, Paris, 1989.
Connectez-vous
à votre site internet
le-rachis.com
Le Rachis - N° 1 - Janvier-Février 2012
Quarante-huit patients ont été
opérés entre juin 2008 et décembre 2009, l’âge moyen était de
44 ± 11 ans et la série comprenait 29 femmes et 19 hommes.
Les données cliniques et radiologiques, pré et post-opératoires,
la technique chirurgicale utilisée
et les complications sont rapportées.
Les indications regroupaient une
discopathie dégénérative dans 26
cas et un spondylolisthésis de
faible grade (I ou II) dans 22 cas.
Les niveaux concernés sont
représentés dans la figure 1 : L5S1 pour 32 patients, L4-S1 pour
12 patients et L4-L5 pour 4
patients.
Les patients ont tous été opérés
par abord combiné : voie antérieure rétro-péritonéale (A) puis
voie postérieure (P) lors de la
même anesthésie générale
(figures 2 et 3).
La durée opératoire et les pertes
sanguines figurent dans le
tableau ci-contre (figure 4).
Au dernier recul, l’Oswestry
Disability Index passait de 66 en
pré-opératoire à 22 en post-opératoire et l’EVA de 7,5 à 2,5, respectivement (figure 5).
La lordose discale était mesurée
en moyenne à 5° en préopératoire contre 13° en post-opératoire, et la lordose segmentaire à
11° versus 23° en post-opératoire, p<0,01 (figures 6 et 7).
Figure 1 : Niveaux opérés.
Figure 2 : Abord antérieur rétropéritonéal pour arthrodèse de type ALIF (cage seule). Cage en PEEK remplie par de la BMP
(INDUCTOSTM).
8

Documents pareils