Petit voyage dans le monde des uctuations quantiques et

Transcription

Petit voyage dans le monde des uctuations quantiques et
Petit voyage dans le monde des uctuations
quantiques et stochastiques
Conférence : Bertrand Delamotte
Compte-rendu : Laure Bruhat, Rémi Paulin, Nicolas Desreumaux
Séminaire du 10 mars 2009
Table des matières
Introduction
2
1 La théorie des perturbations
3
2 Le rôle des uctuations : deux exemples
4
1.1
1.2
2.1
2.2
Principe . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Les problèmes qui peuvent survenir dans la mise en oeuvre . .
Mécanique quantique et relativité . . . . . . . . . . . . . . . .
Un autre exemple simple . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
3
3
4
4
3 Introduction à la renormalisation à partir d'un "toy model" 6
Conclusion
9
Pour en savoir plus
9
1
Introduction
La renormalisation est une idée méthodologique utilisée dans de nombreux domaines de la physique (physique statistique, physique des particules,
électrodynamique quantique,...).
Elle est née dans les années 50 quand Hans Bethe fut le premier à calculer
un écart énergétique entre les niveaux 2s et 2p de l'atome d'hydrogène qui
ne soit ni nul, ni inni !
En eet, la renormalisation constitue un moyen de régulariser des divergences qui proviennent de l'apparition, dans certaines théories, de grandes
uctuations à partir d'une certaine échelle (en dessous de la longueur de
Compton en électrodynamique quantique ; en dessous de la longueur de corrélation en physique statistique).
Historiquement, elle a commencé à être utilisée dans le cadre de la théorie des perturbations et c'est la renormalisation perturbative que Bertrand
Delamotte a choisi de nous présenter.
Fig.
1 Hans Bethe
2
1 La théorie des perturbations
1.1
Principe
Quand on cherche à expliquer un phénomène physique, on commence par
utiliser des modèles simples et à ne considérer que les facteurs prépondérants
de manière à pouvoir calculer la solution analytique exacte.
La théorie des perturbations consiste à apporter des corrections à cette
solution en la reportant dans des équations tenant compte des inuences
secondaires et utilisant des modèles plus ns. Les termes correctifs des équations régissant le phénomène font apparaître un "petit paramètre" λ. La
solution perturbée s'écrit alors comme un développement en série entière de
λ dont le premier terme est la solution non perturbée.
Exemples :
au XIX eme siècle, on prend en compte l'inuence de la Lune sur la
trajectoire de la Terre autour du soleil en perturbant la solution obtenue
en tenant compte uniquement de l'attraction du soleil.
oscillateur anharmonique = oscillateur harmonique + λx4
1.2
Les problèmes qui peuvent survenir dans la mise en
oeuvre
On considère un problème dont la solution perturbée f (λ) s'écrit :
f (λ) = f (0) + λn an .
On peut rencontrer les problèmes suivants :
La série entière a un rayon de convergence nul (les mathématiciens
savent traiter ce genre de problème).
La constante de couplage λ est grande donc la série converge mal ou
bien diverge.
Les coecients du développement en série entière an sont innis.
Enn, il existe des fonctions non développables en série entière (comme
1
e− λ ) qui ne permettent pas d'appliquer la théorie des perturbations.
3
2 Le rôle des uctuations : deux exemples
2.1
Mécanique quantique et relativité
Les théories à la fois quantiques et relativistes sourent toutes de ces
problèmes d'innis ; ceci est principalement dû aux uctuations apparaissant
dans ces types de problèmes.
Le "mélange" de mécanique quantique et de relativité fait intervenir simultanément les trois grandeurs h̄, m (masse de la particule étudiée ; typiquement,
masse de l'électron) et c (célérité de la lumière). L'analyse dimensionnelle
h̄
et une
nous permet de construire ainsi une échelle de longueur λc = mc
2
échelle d'énergie E = mc .
L'inégalité de Heisenberg montre que sonder des distances plus petites que
λc implique des énergies plus grandes que mc2 , et donc la possibilité de créer
de nouvelles particules.
C'est ainsi de la sommation sur une innité d'états multi-particulaires (en
fait présents même si les énergies considérées sont plus petites que mc2 ) que
proviennent beaucoup de divergences.
2.2
Un autre exemple simple
Mais l'intérêt de la renormalisation s'étend à des problèmes beaucoup
plus variés, comme le montre cet exemple, d'apparence très simple, qui n'implique ni mécanique quantique, ni relativité.
On considère la diusion de particules sur une matrice carrée, l'arrivée d'une
ou plusieurs particules sur un site du réseau pouvant engendrer deux phénomènes :
création d'une nouvelle particule : A −→ 2A avec un taux σ (probabilité
par unité de temps)
annihilation de 2 particules : 2A −→ 0 avec un taux λ
La loi d'action des masses donne l'évolution du nombre de particules dans le
système :
dN
dt
= σN − λN 2
D'où l'existence d'un état stationnaire : Nstat =
σ
λ
Ce résultat est manifestement faux (à fort λ, toutes les particules disparaissent et Nstat = 0 ).
4
En fait, le caractère erroné de cette approche provient de l'existence de uctuations spatiales dans le nombre de particules du système.
5
3 Introduction à la renormalisation à partir d'un
"toy model"
Il est possible de donner un aperçu de la procédure de renormalisation
sans se reporter à une théorie physique spécique. On considère donc une
théorie, non spéciée, qui possède un unique paramètre libre g0 .
Soit F (x) une fonction représentant une grandeur physique de cette théorie. Si on se place dans le cadre de l'électrodynamique quantique, F (x) peut
par exemple représenter la section ecace d'un processus de diusion d'un
proton sur un noyau, x le quadri-vecteur énergie-impulsion et g0 la constante
de structure ne.
F (x) est calculée perturbativement par rapport au paramètre g0 .
On peut toujours l'exprimer sous la forme :
F (x, g0 ) = g0 + g02 F1 (x) + g03 F2 (x) + ...
On suppose que ce développement en série est mal déni dans le sens où
toutes les fonctions Fi divergent.
R ∞ dt
qui présente une
Par exemple, F1 peut être de la forme : F1 (x) = α 0 t+x
divergence logarithmique en +∞.
Pour donner un sens au développement de F (x), on utilise une procédure
de régularisation.
On introduit un nouveau paramètre λ tel que Fi,λ (x) → Fi (x) quand
λ → +∞ mais ne diverge pas tant que cette limite n'est pas prise.
Pour F1 , on peut par exemple introduire la nouvelle fonction F1,λ = α
Rλ
dt
.
0 t+x
Puisque la théorie ne possède qu'un paramètre libre g0 , une seule expérience,
réalisée en x = µ par exemple, est nécessaire pour xer la valeur de g0 .
On suppose que F (x) est connue au point x = µ (l'expérience a été réalisée)
et on dénit gR tel que F (µ) = gR .
On peut alors écrire F (x) = F (x, gR , µ) = lim Fλ (x, gR , µ).
λ→∞
6
On peut maintenant passer à la procédure de renormalisation à proprement parler.
Renormalisation à l'ordre g0
et
Fλ (x) = g0 + O(g02 )
⇒ g0 = gR + O(gR2 )
F (µ) = gR
Renormalisation à l'ordre g02
On développe g0 en puissance de gR .
n
où δn g ∼ O(gR
)
g0 = gR + δ2 g + δ3 g + ...
2
A l'odre gR
,
Fλ (x) = g0 + g02 F1,λ (x) + ... = gR + δ2 g + gR2 F1,λ (x) + O(gR3 )
2
F1,λ (µ)
Puisque F (µ) = gR , on obtient pour cet ordre δ2 g = −gR
Si on reprend l'exemple de F1,λ (x) = α
2
alors δ2 g = −αgR
Rλ
dt
0 t+x
Rλ
dt
0 t+µ
Donc
λ
1
1
Fλ (x, gR , µ) = gR +
dt
−
+ O(gR3 )
t
+
x
t
+
µ
0
Z λ
dt
2
= gR + gR α(µ − x)
+ O(gR3 )
(t
+
x)(t
−
µ)
0
gR2 α
Z
Cette expression est maitenant convergente en λ → +∞
F (x) = gR + gR2 α(µ − x)
R∞
0
dt
(t+x)(t−µ)
+ O(gR3 ) est bien dénie.
On dit qu'on a renormalisé la théorie à l'ordre 2 en g0 .
La divergence est "repoussée" dans la relation entre g0 et gR (pour gR xé,
lim g0 diverge) où elle devient inoensive puisque toute la théorie peut mai-
λ→∞
tenant être exprimée en fonction du paramètre physique gR .
7
Il convient de remarquer que cette procédure de renormalisation ne marche
pas pour tous les types de divergences. Pour le "toy model" utilisé dans ce paragraphe, seules les divergences logarithmiques sont renormalisables à l'ordre
g02 .
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Conclusion
La procédure de renormalisation perturbative a connu de nombreux succès. Elle est par exemple à la base de notre compréhension de l'électrodynamique quantique (QED), qui est encore à ce jour la théorie "vériée" avec le
plus de précision. Elle est par ailleurs indispensable pour aborder de nombreux problèmes de physique statistique et de physique des solides. Notons
également que le fameux problème de la gravité quantique est essentiellement un problème de renormalisation. Il est en eet extrêmement dicile de
concilier uctuations quantiques et relativité générale.
Pour qu'elle soit renormalisable, une théorie doit vérier de nombreuses
contraintes. La renormalisation est donc devenue un outil très utile de sélection entre théories concurrentes.
Notons enn que de nombreux problèmes de physique ne peuvent pas être
traités de façon perturbative. C'est pourquoi un nombre important de physiciens s'attellent aujourd'hui à élaborer une procédure de renormalisation non
perturbative.
Pour en savoir plus
B. Delamotte : A hint of renormalization, Am.J.Phys. 72, February
2004
La gure 1 provient de Wikipédia
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