Plurilinguisme et Traduction - Production des enseignants et des

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Plurilinguisme et Traduction - Production des enseignants et des
Plurilinguisme et Traduction
Enjeux, possibilités, limites
Cours de Philippe Blanchet
contact : philippe.blanchet@univ-rennes 2.fr
Université Rennes 2 Haute Bretagne
PLAN DU COURS
1. INTRODUCTION
2. ENJEUX DE LA PLURALITÉ SOCIOLINGUISTIQUE :
Diversité des langues et des cultures, diversité de chaque langue et de
chaque culture
3. REPÈRES POUR COMPRENDRE LA COMMUNICATION INTERCULTURELLE
Les compétences à communiquer en langues
4. ENJEUX DES FLUX DE TRADUCTION :
Circulation des textes et des discours, éléments de géopolitique des
langues
5. TRADUCTIONS ENTRE LANGUES DIFFÉRENTES :
Besoins, problèmes et fonctionnements
6. LE PROCESSUS DE TRADUCTION / ADAPTATION
7. TRADUCTION DANS UNE MÊME LANGUE :
Technolectes et sociolectes, variations et stratégies de communication
8. PARTICULARITÉS DES TRADUCTIONS TECHNIQUES ET SCIENTIFIQUES.
9. L’INTERCOMPRÉHENSION ENTRE LANGUES DIFFÉRENTES :
Une alternative à la traduction
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1. INTRODUCTION
Ce cours propose une initiation aux problèmes spécifiques des usages de
traductions intralinguales (à l’intérieur d’une même langue entre variétés différentes par
exemple dans des milieux professionnels distincts) et aux traductions interlinguales
(entre langues différentes), qu’il s’agisse principalement de recevoir, ou éventuellement
de
produire
une
brève
traduction
sans
être
traducteur
professionnel.
Les
professionnels de l’écriture (journalistes, webmasters, documents professionnels),
intervenant dans des circuits à la fois de plus en plus spécialisés et de plus en plus
internationalisés, sont confrontés à des besoins de médiation vers des destinataires
non spécialistes et entre langues distinctes. Comprendre les besoins, les possibilités et
les limites des traductions permet de les utiliser de façon consciente, distanciée et
adaptée. Ce cours n’est pas, pour autant, une formation de traducteurs.
2. ENJEUX
DE LA PLURALITÉ SOCIOLINGUISTIQUE
: diversité des langues et
des cultures, diversité de chaque langue et de chaque culture
Le point de départ qui justifie l’existence même de traductions est la constatation,
a priori banale, du plurilinguisme des humains et de leurs sociétés. On estime que sont
parlées entre 3000 et 30.000 langues différentes, chiffres qui varient selon les critères
que l’on utilise pour distinguer les langues car leur identification n’est pas simple et
leurs situations changent avec le temps (y a-t-il une ou plusieurs langues arabes ?
l’alsacien est-il une langue ou une variété de l’allemand ? le fufulde et le fulani
constituent-ils une seule langue peule ?…). Si l’on s’en tient à une moyenne, on aurait
environ 13500 langues. C’est de toutes façons l’ordre de grandeur qui importe, pas le
détail précis. Une telle diversité linguistique est généralement perçue de façon négative
et elle l’était davantage encore à des époques pas si lointaines où la diversité en
général n’était quasiment jamais perçue comme une richesse à protéger, mais au
contraire comme un obstacle néfaste à renverser. On n’avait pas encore inventé la
notion d’écologie.
Les idéologies normatives et autoritaires ont en effet toujours cherché à
uniformiser les sociétés et les humains, à éliminer les « déviants, « marginaux » et
autres « originaux » ou « minoritaires ». Les langues ont fait l’objet depuis fort
longtemps en Occident (mais aussi ailleurs) d’une interprétation réprobatrice de leur
3
diversité. Dans le monde occidental et ses extensions intensément façonnés par la
religion chrétienne pendant des siècles, la Bible a présenté la perte de la langue par
les animaux, réduits à s’exprimer par des cris, comme une condamnation par Dieu
parce que le serpent a tenté Ève… Elle a présenté également la diversité des langues
comme une punition infligée par Dieu aux humains qui, en construisant la tour de
Babel, auraient cherché à rivaliser avec lui, et ceci afin qu’ils ne puissent plus coopérer
entre eux. Ainsi donc au départ tous les êtres vivants auraient parlé une seule et même
langue et, de déchéance en déchéance, les langues auraient été multipliées. Ce mythe
de l’origine unique se retrouve dans d’autres domaines et de nombreuses cultures, par
exemple dans l’origine même de l’humanité (qui serait issue d’un seul et même couple
lui-même issu d’un Dieu unique)1, ou plus prosaïquement dans les débats sur « qui,
quand, où ? » a inventé telle recette de cuisine ou tel mot, qui auraient forcément, là
aussi, une origine unique. Beaucoup de groupes humains sur Terre se sont inventés
une origine unique dans leurs mythes fondateurs.
Politiquement, cette hantise de la diversité et cette quête d’une « pureté »
(absence de diversité, d’où absence de mélanges) a conduit à de nombreuses
tentatives de la réduire par la force, parfois par la violence ou l’extermination :
-interdiction de pratiquer telle langue, telle religion, telle orientation culturelle ou
sexuelle, obligation par la loi, la conquête, la colonisation d’en adopter une autre
(ethnocide),
-extermination
indirecte
ou
directe
de
populations
et
de
personnes
« différentes », Amérindiens, Africains, Juifs, Roms, homosexuels, handicapés,
opposants politiques, etc., la liste en est hélas épouvantablement longue (génocide).
Cela montre bien qu’au fond de nombreuses cultures et idéologies, en Occident
notamment (mais c’est vrai aussi du monde musulman pour prendre un autre grand
espace culturel), la diversité est perçue comme une faute ou au moins un problème
grave.
Dans le domaine linguistique, cela a été conforté et compliqué par le fait, en
Occident notamment et en France en particulier (puisque nous y sommes), la vision
dominante des langues qui a été progressivement construite les a réduites autant
qu’on a pu à des mécaniques homogènes déshumanisées. Pour les Grecs anciens,
inventeurs de la grammaire occidentale, il n’y avait qu’une seule « vraie » langue (la
leur !) et toutes les autres n’étaient que des bruits émis par des sauvages qu’ils ont
1 Et la précipitation avec laquelle chaque découverte d’un ossement humanoïde supposé plus
ancien est interprétée comme celle de l’origine géographique de l’humanité n’en est qu’une
4
appelés barbaros parce qu’ils n’auraient été capables que d’émettre du bruit « « barbar ») avec leurs bouches… Élaborée par des logiciens à l’idéologie totalitaire (comme
Platon, puis Aristote, dont la tradition passe évidemment sous silence les opinions
politiques), les premières études ont présenté la langue comme un ensemble de règles
logiques et ont ignoré ou condamné les usages qui ne relevaient pas de cette
rationalité. Ce mode d’analyse, pensé comme universel, n’était en fait que le résultat
d’une projection idéologique et d’une confusion (logos désignant à la fois la langue et
la logique) sur une seule langue, le grec littéraire ancien. Il a ensuite été transposé sur
le latin (classique, langue littéraire déjà morte), devenue langue sacrée de l’Europe
catholique au moyen âge, à l’époque où le latin parlé était reconfiguré en diverses
langues romanes avec l’éclatement de l’empire romain et le contact avec d’autres
langues (ibériques, italiques, celtes, germaniques). D’où une vision dominante où la
Langue (au singulier) est immuable et unifiée.
Transposée plus tard sur les langues « modernes » (français, espagnol,
allemand, anglais…) cette grammaire latine les a filtrées comme des langues mortes et
les a fait paraitre fixées et homogènes. Cela a été renforcé par la construction des
nationalismes (d’abord aristocratiques et religieux, ensuite républicains et élitistes) qui
ont cherché à homogénéiser les nations et à filtrer l’accès au pouvoir en imposant une
langue nationale unique et des normes linguistiques aristocratiques arbitraires reprises
par la bourgeoisie pour se distinguer du « peuple ».
L’addition de tout cela se concrétise en une idéologie linguistique de la langue
unique et pure, dite « de qualité » ou « correcte » (sous-entendu les autres langues et
les autres façons de parlers ou d’écrire la langue nationale sont « mauvaises » ou
« fautives »). Dès lors, la pluralité linguistique est une deuxième fois rejetée.
Et pourtant, malgré toute cette tradition qui la déconsidère, qui cherche à la
réduire ou à l’éliminer, la pluralité linguistique est toujours là. Plusieurs milliers de
langues et des humains plurilingues en majorité impressionnante (probablement au
moins 80% de l’humanité). Et une infinie variété de formes et d’usages de chacune de
ses langues, qui varie avec chaque époque, chaque lieu, chaque groupe social,
chaque situation de communication, chaque individu. Une diversité toujours
renouvelée, notamment par les mélanges de langues et les changements sociaux.
Un tel constat nous invite à approfondir par quelques questionnements. Tout
d’abord, pourquoi les humains utilisent-ils tant de langues différentes ? Qu’est-ce qui
rend cela possible et même, apparemment inévitable voire nécessaire ? Quels en sont
variante médiatico-scientifique.
5
les conséquences ? Comment les humains se débrouillent-ils avec cette diversité
linguistique ? Cela nous conduira à mieux comprendre les enjeux de la traduction dans
la communication.
Les pratiques linguistiques des humains sont des ensembles de signaux sonores
organisés (l’oralité), éventuellement transposés en signaux visuels (l’écriture), qui
fonctionnent par convention arbitraire, un peu comme un code mais de façon
beaucoup moins rigide qu’un code. Les sons que nous émettons pour provoquer des
significations n’ont aucune raison d’avoir la forme qu’ils ont (sauf les onomatopées qui
imitent — de façon souvent distante et codifiée d’ailleurs — d’autres sons. On peut
donc utiliser n’importe quels sons pour signifier quelque chose, c’est une question de
convention relativement partagée.
Or pour qu’une telle convention soit partagée par un groupe, il faut que ce groupe
ait des motivations : des liens sociaux réguliers, des besoins de communication. Et il
se trouve que les humains vivent sur une planète tellement immense, par rapport à
eux, qu’ils ne peuvent pas matériellement constituer un seul et même groupe, mais des
groupes divers répartis sur la planète (et pendant des millénaires sans aucun moyen
d’entrer en relation). D’où l’invention et le développement de langues diverses.
Dès lors, les langues ont deux fonctions clés pour les humains. A l’intérieur d’un
groupe partageant à peu près les mêmes conventions de communication, les langues
servent à relier, à échanger, à signifier. C’est leur fonction convergente souvent
appelée « communicative ». Et l’on a pas trouvé de moyens de communication plus
performant, en quantité comme en qualité : il permet de produire, à partir d’un nombre
réduit de sons, une infinité de messages beaucoup plus nuancés et complexes que ce
que les grammaires nous ont laissé croire. Il se renouvelle souplement pour être
adapté au plus près des besoins des usagers.
Les langues ont une autre fonction, divergente, qu’on appelle souvent
« identitaire » ou « existentielle » : elles caractérisent et symbolisent l’identité
spécifique
d’une
groupe
par
rapport
aux
autres
groupes,
lesquels
parlent
« autrement ». Tout groupe humain se constitue, à des degrés divers, des
particularités linguistiques qui remplissent toujours les deux fonctions en même temps.
Et cela va même jusqu’à l’individu, puisqu’il n’y a pas deux individus qui s’expriment
exactement de la même façon. On considère en général que les pratiques linguistiques
varient toujours selon quatre axes simultanés : le temps, l’espace, les groupes sociaux,
les situations de communication. C’est dire si la variation est permanente et infinie…
6
Elle touche donc aussi, bien sûr, les pratiques linguistiques que l’on considère
constituer une seule et même langue. On parle français de façons variables et
changeantes selon les périodes, les lieux, les groupes, les conversations, les
personnes.
Enfin, cette diversité linguistique a des conséquences et soulèvent des
perspectives
importantes
pour
comprendre
les
fonctionnements
(y
compris
communicationnels) des humains. Elle permet et reflète la construction même des
identités individuelles et collectives, elle organise la diversité de nos rapports au
monde et aux autres (on n’attribue pas les mêmes significations et les mêmes
catégorisations aux éléments du monde selon les langues — et donc la cultures —
dans lesquelles on le vit et on le dit), elle est directement corrélée à nos affects et à
leurs expressions, elle participe de façon essentielle à ce qui fait notre humanité dans
toute sa complexité.
3. Repères pour comprendre la communication interculturelles : les
compétences à communiquer en langues et cultures
Les ressources linguistiques sont donc utilisées par les humains pour
communiquer, c’est-à-dire pour stimuler la production partagée de significations (y
compris les significations symboliques de différences identitaires). Traduire un énoncé,
c’est chercher à faire produire, en utilisant un certain ensemble de ressources
linguistiques (la « langue d’arrivée »), des significations proches de celles stimulées
par un énoncé préalable réalisé en utilisant un autre ensemble de ressources
linguistique (la « langue de départ »). Cela implique de définir le processus de
production de signification qu’on appelle communication.
Le principe fondamental en est que la signification se co-construit en contexte
par la combinaison de plusieurs éléments.
Le premier est la notion d’interacteurs. Les échanges verbaux ont toujours lieux
entre des personnes qui interagissent au moyen de leurs répertoires linguistiques et
d’autres langages associés (notamment le canal mimo-posturo-gestuel et les
conventions discursives à l’oral, les graphismes et les conventions textuelles à l’écrit).
Chaque interacteur est porteuse de sa subjectivité interprétative individuelle et
socioculturelle (ce sont des acteurs sociaux). Même lorsque l’échange est différé dans
le temps et dans l’espace, et même via un support écrit, il y a une personne (l’auteur)
qui interagit avec une autre (le lecteur).
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Le deuxième éléments est la distinction sens / signification. Le sens est le
contenu sémantique interne d’un énoncé, que l’on peut déduire des morphèmes (des
« mots ») qui le composent. La signification est l’interprétation de l’énoncé en contexte,
notamment en termes d’effets produits sur l’interlocuteur, interprétation que l’on peut
inférer à la fois à partir de l’ensemble de la forme de l’énoncé (variation
sociolinguistique) et de l’ensemble des paramètres contextuels dont plusieurs
typologies ont été proposées (par exemple par Kerbrat-Orecchioni, 1990-94 ou
Blanchet, 2000 et 2007). Parmi ces paramètres, les connaissances et les compétences
culturelles jouent un rôle important dans l’interprétation des échanges verbaux. Ainsi,
le sens de l’énoncé est un stimulus qui, rapporté au contexte, suscite la construction
d’une interprétation et provoque des effets. Interprétation contextuelle et effets
pragmatiques constituent la finalité de tout acte de langage.
Le troisième point est donc la contextualisation. Les paramètres du contexte,
dans lequel les interacteurs et leurs interactions sont situés et qu’ils contribuent en
même temps à construire, incluent le lieu, le moment, les personnes, les présupposés
et les implicites, les relations interpersonnelles, etc. Il suffit que l’un des paramètres
varie pour que varie l’interprétation d’un même énoncé. Autrement dit, un même
énoncé dans des contextes différents contribue à des interprétations qui peuvent être
fortement différentes et, à l’inverse, une même interprétation peut être suscitée par des
énoncés très différents… (par exemple lors d’une traduction !).
La traduction est un cas typique de communication interculturelle. La
communication interculturelle est un processus de rencontre de l’altérité. Elle se
manifeste à travers le fait, prioritaire, qu’on met en place des procédures de rencontre
de la différence (la rencontre va au-delà du simple contact), c’est-à-dire des
procédures de dialogue avec la culture-autre (au sens anthropologique de culture), à
travers des expériences de vie et des échanges verbaux avec des personnes qui en
sont porteuses. Cette rencontre produit une intégration de et dans la culture « cible »,
c’est-à-dire une réelle appropriation de cette culture, croisée avec la ou les cultures de
départ, sans abandon de celle(s)-ci. La rencontre interculturelle produit ainsi une
modification de l’identité culturelle, dorénavant « métissée » par la culture-autre, tout
comme l’appropriation réelle d’une langue-autre produit chez l’individu ou le groupe
bilingue une « bilangue » ou interlangue métissée (par alternances et mélanges des
codes fonctionnellement intégrés sur un seul répertoire linguistique). L’interculture est
à la fois un « entre-deux » et un « dans les deux » (ou davantage) qui est plus que la
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simple juxtaposition, et même que la somme, des cultures qui la constituent : les
ressources culturelles de diverses provenance y sont articulées en une synthèse
cohérente au sein d’un même répertoire culturel.
4. ENJEUX
DES FLUX DE TRADUCTION
: circulation des textes et des
discours, éléments de géopolitique des langues
La question de l’utilisation de traductions pour communiquer notamment des
informations scientifiques, techniques, et plus largement professionnelles, n’est pas
exempte de dimensions géopolitiques.
Il faut comparer d’une part la situation relative des langues du monde et, d’autre
part, les flux de traductions, pour mesurer les rapports de forces, les convergences, les
écarts, les dominations et le rôle probable de facteurs non linguistiques dans les
causes et les effets des traductions et de leurs usages.
La plupart des sociolinguistes pensent, d’ailleurs, qu’il n’y a pas de biplurilinguisme égalitaire, parallèle concurrentiel, mais toujours diglossie, c’est-à-dire
hiérarchisation sociale des valeurs attribuées aux ressources linguistiques et
conséquemment
répartitions
fonctionnelles
de
leurs
usages,
reflet
des
complémentarités et des conflits sociaux / géopolitiques. Tous mettent également en
avant les fonctions identitaires des langues et donc de leur diversité, qui
contrebalancent leurs fonctions communicatives et développent des attachements
puissants à des langues ou autres variétés de langues éventuellement « toutes
petites ».
Voici par exemple un classement moyen des premières langues du monde en
selon divers critères quantitatifs et qualitatifs2 :
2 Source pour les 5 premières colonnes du tableau : Calvet, L.-J. et Calvet, A. « Le poids des
langues : vers un index comparatif des langues du monde », http://tice.univprovence.fr/document.php?pagendx=4884&project=dsiitice (2008) ; pour la colonne six : Index
Translationum de l’UNESCO
(http://portal.unesco.org/culture/en/ev.phpURL_ID=7810&URL_DO=DO_TOPIC&URL_SECTION=201.html)
9
par
nb
de par nb de pays par
locuteurs
par nb de prix par nb de
par nb de
comme langue présence
Nobel
traductions
officielle
littérature
sur internet
1. Mandarin
1. Anglais
1. Anglais
2. Hindi
2. Français
3. Anglais
de traductions
comme langue
source
cible
1. Anglais
1. Allemand
2. Mandarin 2. Français 12
2. Français
2. Espagnol
3. Arabe
3. Espagnol 3. Allemand 11
3. Allemand
3. Français
4. Espagnol
4. Espagnol
4. Japonais
4. Russe
4. Anglais
5. Arabe
5. Portugais
5. Allemand
5. Italien
5. Japonais
6. Portugais
6. Allemand
6. Français
5. Russe 5
6. Espagnol
6. Néerlandais
7. Bengali
7. Italien
7. Coréen
6. Italien 5
7. Suédois
7. Portugais
8. Russe
8. Russe
8. Italien
8. Danois
8. Russe
9. Japonais
9. Bahasa
9. Portugais 7. Suédois 4
9. Tchèque
9. Polonais
10. Allemand
10. Néerlandais* 10. Malais
10. Néerlandais
10. Italien
11. Pendjabi
10. Farsi*
11.
11. Polonais
11. Danois
12. Javanais
10. Croate*
Néerlandais
9. Grec 2
12. Japonais
12. Tchèque
13. Wu
10. Slovène*
12. Arabe
10. Danois 2
13. Hongrois
13. Hongrois
14.
10. Albanais*
13. Polonais
11. Japonais 2
14. Arabe
14. Finnois
Vietnamien
10. Tamoul*
14. Suédois
14. Arabe
15. Norvégien
14.
10. Swahili*
14. Suédois
12. Ex-aequo : 1
15. Norvégien
16. Suédois
Vietnamien
10. Bambara*
15. Thaï
Mandarin,
16. Portugais
17. Grec
15. Tagalog
10. Hongrois*
16. Turc
Finnois, Tchèque, 17. Hébreu
18. Bulgare
16. Tamoul
10. Mandarin*
17. Russe
Islandais,
18. Mandarin
19. Coréen
17. Min
10. Roumain*
18.
Tchèque,
19. Finnois
20. Slovaque
18. Coréen
10. Farsi*
Vietnamien
Islandais,
Arabe, 20. Bahasa
21. Roumain
19. Farsi
Provençal,
19. Francais
20. Marathi
NB : * = 3 pays
1. Anglais 24
comme langue
4. Espagnol 10
8. Polonais 4
22. Catalan
20. Roumain Yiddish,
23. Estonien
Portugais,
24. Slovène
Bengali, Hébreu,
25. Croate
Hongrois,
26. Lithuanien
Turc,
Serbo-croate
27. Turc
24. Les autres 0
Comme on le constate, il y a tendanciellement, et malgré les nuances que l’on
pourrait apporter à ces classements, des convergences très relatives (avec toujours
des différences de classement) et des décalages énormes entre les classements des
mêmes langues ou entre les langues affectées aux mêmes rangs. Il apparait
clairement que traduite depuis une langue ou vers une langue est un phénomène
largement dépendant de facteurs complexes, y compris politiques mais aussi bien sûr
10
économiques et culturels, et par conséquent que tout usage (ou non) de ces
traductions est pris dans ces enjeux.
D’ailleurs, le refus de traduction est en général le fait de groupes et d'individus
dominants qui se surestiment. Du coup, ils imposent leur langue à d'autres, sans
envisager en échange de s'intéresser à une langue-autre. Il est plus simple et
dominateur d'enseigner le français ou l'anglais dans les pays du tiers-monde que de
traduire dans leurs langues les textes qu'on leur adresse (et de rendre cela possible).
Les cultures minorisées traduisent par exemple des œuvres venues de cultures
dominantes, à la fois par besoin d'affirmation, par désir d'ouverture (pour lutter contre
l'enfermement qu'on leur impose), et par nécessité pour participer un tant soit peu aux
sphères dominantes, mais les cultures dominantes ne renvoient que très rarement
l'ascenseur… Le refus de traduire peut alors être un repli sur soi, une affirmation
exacerbée d'identité menacée.
Une
récente
étude
a
été
pilotée
par
l’Union
Latine
(organisme
intergouvernemental réunissant les États ayant une langue « latine » officielle), intitulée
« En
quelles
langues
parle
Internet ? »
(Disponible
http://dtil.unilat.org/LI/2007/index_fr.htm). Les principaux résultats sont les suivants :
Évolution des langues sur la Toile entre 1998 et 2007
Pages web en
1998
2000
2001
2003
2005
2007
ANGLAIS
75 %
60 %
2%
49 %
45 %
45 %
ESPAGNOL
2,53 %
4,79 %
5,31 %
4,60 %
3,80 %
FRANÇAIS
2,81 %
4,18 %
4,32 %
4,95 %
4,41 %
PORTUGAIS
0,82 %
2,25 %
2,23 %
1,87 %
1,39 %
ITALIEN
1,50 %
2,62 %
2,59 %
3,05 %
2,66 %
ROUMAIN
0,15 %
0,21 %
0,11 %
0,17 %
0,28 %
ALLEMAND
3,75 %
2,85 %
6,80 %
6,94 %
5,90 %
CATALAN
RESTE
5,50
%
4,45
%
2,55
%
3,08
%
0,18
%
6,75
%
-
-
13,44 %
22,20 %
11
-
-
-
0,14 %
23,68
29,65
33,43
36,54
%
%
%
%
sur
Ce premier tableau est assorti du commentaire suivant, pertinent pour notre
problématisation géopolitique et sociolinguistique : « En 2003, l’anglais connaissait une
croissance dans l’espace indexé et cette situation semble se reproduire sur la période
2005-2007. Ce phénomène ne dénote pas une réduction de la présence des langues
latines dans le cyberespace, mais plutôt une diminution de leur présence dans les
espaces indexés par les grands moteurs de recherche, notamment en raison du
développement important de la langue chinoise sur l’Internet. Seul le roumain présente
une réelle augmentation, ce qui est certainement une conséquence de sa récente
entrée dans l’Union européenne ». Selon une autre étude (euromkyg.com), le nombre
d’usagers réputés « anglophones » d’Internet serait passé de 56,3% en 1999 à 35, 8%
en 2004, ceux d’autres langues passant dans le même temps de 43,7 à 64,2%. Le
seuil des 2 millions d’usagers d’Internet, estimé par certains experts pour permettre le
développement d’outils adaptés, aurait été atteint pour une douzaine de langues en
2001,
par
deux
douzaines
en
2004
(dont
40
millions
d’usagers
réputés
« francophones »). Toute précaution prise, ces informations nous invitent à relativiser
les discours sur une hégémonie supposée actuelle ou en développement de l’anglais :
il semble bien que, provisoirement au moins, la dynamique en cours aille en sens
inverse et qu’Internet soit devenu un espace relativement plurilingue.
Si l’on transpose cette question générale à celle de la production textuelle
professionnelle en ligne (dont on voit mal comment on pourrait la distinguer des autres
ressources d’une façon automatisée et donc la « mesurer » d’une façon comparable),
des questions surgissent aussitôt : ces potentialités d’un développement multipolaire
sont-elles exploitables ? Peut-on analyser les tenants et les aboutissants du décalage
entre ce que les moteurs de recherche représentent et le potentiel qu’ils ignorent ?
Observe-t-on, dès lors, une contradiction entre les politiques linguistiques générales
(qui tendent à promouvoir l’usage de langue-s nationale-s diverses et les stratégies
glottopolitiques professionnelles qui tendraient à promouvoir l’usage d’une langue
unique, l’anglais ? Et si oui, quelle mise en cohérence pourrait-on envisager, sachant
qu’il est évident pour tous les spécialistes des dynamiques sociolinguistiques qu’un
monolinguisme généralisé de l’espèce humaine est impossible, en tout cas dans les
prochains millénaires ? Quelle importance accorder aux phénomènes de traduction, de
formation au plurilinguisme, d’intercompréhension entre les langues dans un tel
contexte ?
12
Deux facteurs importants sont à prendre en compte. Le premier est la tendance
au monolinguisme des anglophones L1 (les termes anglophone, francophone, etc.
signifient « usager de l’anglais, du français, etc. » pas nécessairement comme langue
de compétence active principale ou dite « maternelle », contrairement au sens ethnonationaliste qu’on leur donne dans diverses idéologies occidentales, par exemple
française ou canadienne). Cette tendance est entraînée par la représentation
largement répandue selon laquelle l’anglais serait la langue de communication
internationale vers laquelle le reste du monde tendrait à converger, ce qui dispenserait
les anglophones monolingues de développer un plurilinguisme. Deuxièmement,
d’autres études (par exemple sur les milieux de travail fédéraux bilingues au Canada)
ont montré que la majorité des bilingues anglais-langue autre (par exemple anglaisfrançais) est, par voie de conséquence, constituée d’autrophones L1 (par exemple
français L1), ce qui leur garantit une certaine proportion d’emplois bilingues qui
échappent ainsi aux anglophones L1.
Faudrait-il alors développer le bi-plurilinguisme langue-autre / anglais des
professionnels afin d’attirer vers des espaces non anglophones des usagers
tendanciellement exclusivement anglophones, en leur faisant ainsi prendre conscience
de l’importance et de la qualité des activités réalisées et publiées dans d’autres
langues que l’anglais ? On touche là à un éventuel paradoxe : ce serait en aidant les
professionnels à communiquer en anglais qu’on valoriserait la diffusion non
anglophone
de
connaissances
et
de
compétences.
Les
organismes
intergouvernementaux francophones (OIF), lusophones (CPLP), ibéro-américains
(OEIA) et de langues romanes (UL) ont, en outre, lancé depuis quelques années des
programmes
de
collaborations,
notamment
pour
privilégier
les
pratiques
d’intercompréhension entre langues proches (voir plus loin). Face à l’indexation
préférentielle des pages anglophones par les grands moteurs de recherche (presque
tous états-uniens, comme Google, Yahoo…), une des propositions de l’enquête de
l’Union Latine est en effet celle-ci : « L’idée d’un moteur spécialisé pour les langues
latines apparaît comme une solution stratégique valable pour faire face à cette
nouvelle situation ».
13
5. Traductions entre langues différentes : besoins, problèmes et
fonctionnements
L'activité plurilingue est souvent composée, entre autre ou principalement, d'une
activité de traduction. La notion de traduction peut avoir un champ très large, qui va de
la traduction intralinguale (c'est-à-dire entre es variétés d’une même langue) à la
traduction
intersémiotique
(changement
de
code
communicatif,
par
exemple
transformation de signes linguistiques en signes iconiques), en passant par la
traduction interlinguale, entre deux langues distinctes, qui visent en gros à
l'équivalence de signification. Ce qui caractérise nettement la traduction interlinguale,
c'est qu'elle s'accompagne d'emblée, fortement, et inéluctablement, d'un contact avec
l'altérité, de façon plus évidente que dans d'autres types de traduction.
La question est de savoir ce qu'est une traduction : tout peut-il être dit de façon
équivalente dans n'importe quelle langue, comme une vision universaliste du langage
humain tend à l'affirmer, ou bien tout est-il culturellement relatif et donc intraduisible
dans sa totalité mais seulement adaptable au prix d'importantes réductions et
transformations ? Dans ce sens, G. Jucquois (1991 p. 10). émet l'hypothèse que
l'activité de traduction est une tension insoluble et permanente entre deux ordres de
réalité, deux paradigmes, deux représentations du monde irréductibles l'une à l'autre
Toute traduction est en effet une duction, terme où l'on retrouve la notion de
« déplacement, conduite, voyage, transfert… ». Les effets de distanciation produits par
la traduction expliquent qu'elle soit par exemple un angle d'analyse et d’indicateurs
privilégiés de la littérature comparée.
Les débats sur les théories de la traduction opposent ainsi d'un côté une vision
de la traductibilité complète et une vision de la traductibilité incomplète, l'intraductibilité
absolue étant contredite par les pratiques traductives elles-mêmes. Cette opposition,
comme
toute
réflexion
même
scientifique,
n'est
pas
exempte
d'implications
idéologiques : c'est l'universalisme contre le relativisme, avec ses ramifications
anthropologiques, psychologiques, politiques etc. Du point de vue pratique, ces options
ont des conséquences importantes. La notion de « fidélité » à l'énoncé de départ est
tout à fait relativisée, voire empêchée. Si fidélité il y a, elle ne peut être que très
partielle. Traduire l'anglais pub par « bar, café » ou quelque terme français que ce soit
est une infidélité culturelle, linguistique, etc. Ne pas ou « mal » le traduire est un aveu
14
d'intraductibilité et une infidélité à la langue « cible ». L'attitude intermédiaire consiste à
le périphraser ou à le gloser dans le texte (quelle infidélité stylistique !) ou en note
(autre aveu, énonciatif celui-là, de l'intraductibilité, puisque l'auteur de la traduction
s'immisce dans le texte, indiquant clairement qu'il s'agit d'une production d'un nouveau
texte et non la copie transparente d’un texte déjà là). L'utopie universaliste,
apparemment généreuse sous une vision réductrice de l'égalitarisme (nier les
différences c’est pratiquer un ethnocentrisme inconscient), tend vers une traductibilité
automatique (accessoirement informatisée). Cette option étroitement linguistique et
fortement idéologique postule :
-que les langues sont constituées sur des structures profondes universelles et
innées dont les structures de surfaces, observables, sont l'actualisation par des règles
logico-mathématiques de transformation propres à chaque langue.
-que les énoncés en langue peuvent toujours être découpés en constituants
minimaux porteurs de sens (les « morphèmes ») dont la combinaison selon une
certaine organisation produit le sens de l’énoncé, sens qui relève ainsi uniquement des
structures linguistiques.
Il suffit alors de connaitre les règles transformationnelles de la langue de départ
pour descendre jusqu'à la structure profonde puis remonter par les règles
transformationnelles de la langue cible jusqu'à sa surface pour, en ayant identifié les
constituants porteurs de sens en langue de départ pour y substituer leurs équivalents
dans la langue cible.
La vision relativiste, elle, insiste sur le long apprentissage humaniste des langues
et des cultures, la grande adaptabilité, nécessaires à la traduction, par ce qu’elle
s’appuie sur le principe selon lequel la signification des messages linguistiques résulte
du croisement entre leurs contenus sémantiques, leurs implicites et les contextes
extralinguistiques (situationnels, sociaux, culturels, historiques…) dans lesquels ils sont
perçus (Ladmiral, 1979 ; Pergnier, 1993 ; Peeters, 1999). Cette vision est largement
partagée aujourd’hui.
Les professionnels de la traduction connaissent bien la nécessaire augmentation
du texte cible par rapport au texte source, pour paraphraser ou développer dans la
traduction les éléments difficilement traduisibles du départ (notamment les éléments
culturels implicites). Ils ont du reste établi et adopté des coefficients de foisonnement
moyens pour les combinaisons de langues les plus courantes, afin de limiter cette
profusion (et de cadrer le prix de leur travail). Dans un son ouvrage de 1995, J.-L.
Cordonnier développe l'idée que traduire, plus que réduire les différences en
15
recherchant des équivalents linguistiques (voire culturels), c'est surtout accepter
l'étrangeté comme un aspect réel et inévitable des relations entre deux langues et deux
cultures, et donc produire une description de la culture-autre telle qu'elle se manifeste
dans un corpus langagier.
On a vu plus haut que toute communication passe par une interprétation (même
dans une seule langue partagée), et donc une forme de traduction (y compris
intralinguale). Il en va nécessairement de même est une traduction entre langues
distinctes. C’est d’ailleurs le sens principal des termes interprète, interprétariat, où
interpréter signifie précisément « traduire ». Étymologiquement, l'interprète est « celui
qui négocie le prix, la valeur, entre deux personnes », y compris donc la « valeur
sémantique », la signification.
Une traduction est alors définie comme une négociation, un compromis qui
n'atteint jamais un idéal absolu. Selon l'objectif de la traduction, et notamment selon le
type de discours (oral ou écrit) et le type de lecteur attendu, le traducteur pourra choisir
de privilégier la dénotation minimale ou relative, la connotation culturelle, les effets
stylistiques (rime, par exemple) etc., ceci en fonction du monde connu supposé du
lecteur.
Les enjeux idéologiques de la traduction sont inscrits dans son histoire. On sait
combien la traduction des textes sacrés a soulevé de débats et de conflits. On sait
combien la traduction a été et reste souvent un exercice de style hautement codifié,
autoritaire, conformiste et sélectif dans le système scolaire et universitaire français, par
exemple. Le thème latin est longtemps resté l'exercice le plus symbolique de
l’évaluation institutionnelle, exercice dont on notera en passant les connotations
idéologiques : le texte d'arrivée est écrit en latin, langue sacrée à plus d'un titre.
6. LE PROCESSUS DE TRADUCTION / ADAPTATION
On peut ainsi résumer le processus de traduction (en fait d’adaptation) selon les
étapes suivantes :
a. Interpréter le discours (oral ou écrit) de départ :
-identification socio-pragmatique (« qui s'adresse à qui pour signifier quoi
dans quel contexte et de quelle façon ? ») ;
-extraction de l'information pertinente et des actes de langage (sens détaillé
et signification globale) ;
16
b. Produire le discours d'arrivée (reformulation de l'information pertinente et
des actes de langage) :
-recherche des équivalents linguistiques et culturels ;
-compensation d'une partie des altérations produites ;
c. Contrôler le discours d'arrivée :
-confrontation des deux discours pour vérifier les équivalences de formes,
de contenu (sens) et d’effets (signification) ;
-vérification de la cohérence et de l'authenticité intrinsèque du texte
d'arrivée (son interprétabilité dans son contexte sociolinguistique et
culturel).
d. Interpréter le discours d'arrivée :
-écouter et faire écouter ou lire et faire lire le discours une fois traduit et
découvrir / vérifier les interprétations qu’il suscite en fonction de lecteurs et
de contextes divers.
L’un des problèmes auquel est confronté le traducteur, souvent à son insu, c’est
qu’étant lui-même plurilingue et pluriculturel, d’une part, il pratique inconsciemment de
l’interlangue interculturelle, et que, d’autre part, il finit par avoir du mal à identifier ce
qui est spécifique à l’une ou l’autre des deux langues-cultures en jeu et
incompréhensible ou peu compréhensible pour un monolingue de la langue d’arrivée.
Ce processus nécessite, de la part du traducteur, une comparaison qui permet
d’identifier en langues et cultures les points communs directement traduisibles (sens et
significations), les différences traduisibles par des équivalents indirects (significations)
et des différences irréductibles donc intraduisibles. Ces différences intraduisibles
entraînent un marquage interculturel du processus de traduction : notamment par de
l’interlangue (transferts directs d’éléments conservés depuis la langue de départ, d’où
alternances ou mélanges des langues), interlangue accompagnée ou remplacée par
des
explicitations
périphrastiques,
métalinguistiques
et/ou
métaculturelles,
qui
supposent l’immiscion manifeste du sujet traducteur dans le texte global (au moins
dans le péri-texte : notes, avertissement…) et ainsi dans l’interaction auteur-traducteurlecteur. L’augmentation usuelle de la taille du discours d’arrivée par rapport au
discours de départ est un autre indice, plus implicite et souvent moins clairement
assumé (voire invisible pour le lecteur cible), de l’intervention nécessaire du traducteur
lors du processus d’adaptation.
17
Cette place explicite assumée par le sujet traducteur, comme passeur de
significations culturellement contextualisées entre un sujet auteur et un sujet lecteur
tous deux situés, est un indice significatif d’un engagement dans une approche
interculturelle, qui prend en compte la contextualisation des interactions et la relativité
des significations. Cela implique pour le traducteur une véritable éthique de la
traduction, issue d’une fréquentation humaniste approfondie des langues, cultures et
communautés concernées.
Une traduction, du point de vue interculturel, ne vise donc pas l’assimilation (au
sens de « la ressemblance la plus complète par la négation des différences ») mais
l’intégration (au sens de « l’équivalence la plus compréhensible par la reconnaissance
et le dépassement partiel des différences »).
La démarche assimilationniste, du reste, produit un discours d’arrivée qui, à force
de vouloir rester « fidèle » au discours de départ, n’est plus un passeur de
significations : il est incompréhensible ou mal compréhensible pour qui ne peut
interpréter les signaux linguistiques et culturels dans leur contexte d’origine. Il n’est
adapté qu’à un lecteur particulier, bon connaisseur du contexte de départ et donc
probablement de la langue de départ, qui n’en a guère besoin que comme aide
ponctuelle. Ce discours peut même donner l’illusion trompeuse d’une certaine
interculturalité par son aspect visiblement « métissé » : on lit par exemple en français
un texte, un récit, des phénomènes qui ont un aspect très british. Mais ce n’est pas de
l’interculturation car cela ne permet pas l’échange de signification avec l’Autre qui n’est
pas british du tout, qui reçoit le texte dans un autre contexte linguistique et culturel, et
qui le reçoit en plein malentendu
Au contraire, une traduction interculturelle revient à s’éloigner suffisamment du
discours et du contexte de départ (autant mais pas plus que nécessaire) pour retrouver
de façon plus proche sa signification dans le discours et le contexte d’arrivée. Et reste
à prendre en compte les aspects formels, stylistiques, voire esthétiques, dont la
transposition est souvent plus difficile que celle du contenu signifiant et dont les
équivalences sont encore moins évidentes, alors même que ces aspects formels
peuvent contribuer à produire des significations culturelles (genres de discours, contes,
poésie, textes juridiques ou religieux…).
Le rapport ressemblance / différence, c’est-à-dire proximité / distance, entre les
textes de départ et d’arrivée peut alors varier en fonction du positionnement du
traducteur sur les critères principaux que constituent le sens, la signification, la forme,
le marquage interculturel, le lectorat visé, les choix interprétatifs et scripturaux, les
18
langues et cultures concernées. C’est la raison principale pour laquelle deux
traducteurs produisent nécessairement deux traductions différentes d’un même
discours.
7. TRADUCTION
DANS UNE MÊME LANGUE
: technolectes et sociolectes,
variations et stratégies de communication
Quand on pense traduction, on pense souvent à « traduire d’une langue dans
une autre, parce que c’est la variation linguistique qui nous apparait la plus évidente,
notamment parce que nous sommes éduqués à voir les différences linguistiques en
catégories « langues » et à ignorer les variations internes à ce que l(on catégorise
comme une seule et même langue. Et pourtant, il y a de bonnes raisons de nuancer
fortement cette vision un peu simpliste des choses. D’abord parce que des langues
dites « distinctes » peuvent être intercompréhensibles et ne pas nécessiter de
traduction (cf. dernier point du cours). Ensuite parce que, nous l’avons vu,
l’hétérogénéité sociolinguistique est partout : elle touche tout autant les pratiques d’une
même langue au sein de laquelle les compétences communicationnelles fonctionnent
de la même façon qu’entre langues distinctes par la gestion stratégique d’un répertoire
verbal pluriel.
On
peut
même
aller
jusqu’à
dire
que
les
incompréhensions
ou
mécompréhensions sont plus fréquentes entre usagers d’une même langue qu’entre
usagers de langues distinctes. En effet, s’ils partent du principe, auquel ils risquent fort
d’avoir été éduqués, qu’une langue est homogène donc transparente pour ceux qui la
maitrisent, ils ne feront pas d’effort de convergence, d’adaptation, de relativisation de
l’interprétation des signaux échangés, de contextualisation différenciée, et risquent
bien un malentendu par illusion de similarité. Hors on sait bien que les pratiques d’une
même langue, d’une part, varient fortement selon au moins les quatre axes vus cidessus, et que, d’autre part, cette variation est corrélée à une grande diversité
culturelle (qui a des effets puissants sur les modalités de communication) : au delà
d’usages en partie apparemment ressemblants du français, quand un Sénégalais
dialogue avec un Québécois, quand un Vietnamien écrit à un Wallon, quand un
Algérien échange des mails avec un Français, quand un Marseillais téléphone à un
Breton, c’est à chaque fois une rencontre entre des sphères culturelles et des formes
de français très différentes : Afrique et Amérique du Nord, Asie et Europe, Maghreb et
Occident, Méditerranée et monde celtique…
19
Dans les usages professionnels, en plus de cette variation géoculturelle, se
manifeste notamment une forte variation sociolectale (façon de parler propre à un
groupe social) et technolectale (propre à un domaine technique) : chaque groupe
professionnel utilise des formes de communication qui lui sont en partie spécifique, à la
fois pour des raisons de convergence communicationnelle et de divergence socioidentitaire. C’est ce qu’on appelle ordinairement un « jargon », voire un « argot ».
Si l’on ajoute à cela la variation dans le temps (qui peut concerner des
documents écrits à des périodes différentes ou des personnes de générations
différentes) et, bien sûr, la variation de chaque situation de communication, on mesure
à quel point les interactions dans une « même » langue recèlent des variations
importantes. Celles-ci se manifestent clairement, du reste, lorsque l’on doit
communiquer avec des personnes qui ne sont pas spécialistes d’une même technique,
d’un même métier, etc., ou avec le « grand public ». Des procédures du type de la
traduction (par exemple traduire un texte d’un type de français dans un autre), sont
alors utiles et même nécessaires. Et là, il n’y a pas de traducteurs professionnels, mais
soit des spécialistes de la communication au sens large, soit chaque professionnel se
débrouille… Être vigilant sur ces aspects de la communication et de la traduction
« intralinguale » est alors fort utile. C’est même une réelle compétence professionnelle,
au moins pour certains postes.
8. Particularités des traductions techniques et scientifiques
Il n’est pas dans l’objectif de ce cours de développer des éléments
professionnels pour former des traducteurs, techniques / scientifiques ou littéraires.
Nous n’entrerons donc pas dans ces questions détaillées. Il est néanmoins utile de
rappeler quelques points importants sur les usages concrets des traductions
professionnelles, techniques et/ou scientifiques.
D’une certaine façon, les énoncés techniques et scientifiques constituent un
domaine qui facilite la traduction et ses usages. En effet, si l’on situe les potentiels
d’interprétations des textes et des énoncés entre une polarité [+] où la diversité des
interprétations est la plus grande et une polarité [-] où elle cette diversité est la plus
réduite, on aurait du côté du pôle [+] les textes littéraires (et en [++] la poésie) et du
côté du pôle [-] les textes techniques et scientifiques (avec en [--] les techniques
expérimentales et les sciences « dures »). Ceci car une des caractéristiques des textes
techniques et scientifiques est l’emploi d’un lexique le plus univoque possible,
20
tendanciellement universel et fortement contextualisé (difficilement décontextualisable
– recontextualisable). A l’inverse, un texte littéraire est, par définition, riche d’un
potentiel de significations variées, ouvert, interprétable selon de multiples contextes de
réception. Les textes relevant des sciences humaines et sociales, parce que portant
sur des phénomènes beaucoup plus fluides et relatifs que les sciences dites « dures »
ou « naturelles », se situe en moyenne à mi-chemin entre les deux pôles.
En revanche, un énoncé technique / scientifique est difficilement interprétable
hors de son contexte (hyper)spécialisé, ce qui soulève à nouveau la question de sa
traduction intralinguale vue plus haut.
Selon le champ professionnel, social, technique, scientifique où l’on exerce son
activité, on utilise des textes et des discours oraux tendant plutôt vers un pôle ou vers
l’autre, ce qui permet d’anticiper les caractéristiques de ce domaine de communication
et donc des traductions inter- ou intralinguales qui y circulent
9. L’INTERCOMPRÉHENSION
ENTRES LANGUES VOISINES,
une alternative à la
traduction
La communication à travers des langues différentes est possible à travers un
autre moyen, en plus de la capacité de locuteurs à parler plusieurs langues, en plus de
la traduction qui sert d’intermédiaire entre locuteurs de langues différentes, grâce à
une troisième voie qui commence à être étudiée et exploitée clairement au niveau
européen
: celle de l’intercompréhension entre langues voisines. Il s’agit de
communiquer, à l’oral ou à l’écrit, chacun comprenant la langue utilisée par l’autre,
mais sans être en mesure ou dans l’obligation de l’utiliser pour parler ou pour écrire.
C’est une intercompréhension centrée sur la réception des discours oraux et/ou écrits.
Il y a là un potentiel important pour les professionnels devant utiliser des
documents oraux ou écrits dans diverses langues.
On sait en effet que les compétences de réception, souvent dites compétences
« passives » (mais elles font appel à une réelle activité cognitive et sociale !), sont
presque toujours supérieures aux compétence de production (dites « actives ») : on
peut comprendre beaucoup plus que ce que l’on peut dire. Et ceci est vrai quel que soit
notre niveau de compétence active (sauf rares cas de compétences instrumentales
utilitaires très réduites, tel le touriste qui ne sait que répéter par cœur trois phrases
stéréotypées).
21
La situation qui, la première, a fait l’objet de constatations, d’hypothèses et de
vérifications est celle où les usagers sont confrontées à des langues distinctes mais qui
se ressemblent fortement, parce qu’elles appartiennent à une même « famille »
linguistique, c’est-à-dire qu’elles proviennent d’une même langue à l’origine. Le cas le
plus connu, parce que le mieux documenté à travers l’histoire et relevant du domaine
linguistique le mieux connu en Europe, est celui des langues romanes. Il s’agit avant
tout des langues suivantes (par ordre alphabétique) : catalan, espagnol, français,
italien, portugais, roumain, qui sont langues officielles d’états membres de l’Union
Latine (organisation intergouvernementale) et de l’Union Européenne (à l’exception du
catalan). Les créoles d’origine française ou portugaise sont parfois langues officielles,
et relèvent partiellement de problèmes spécifiques notamment au niveau graphique
puisqu’ils sont en général écrit selon un système phonétique et non selon une filiation
latine. Enfin, les nombreuses langues romanes « régionales ou minoritaires » (par
exemple, d’ouest en est : galicien, gascon, picard, provençal, valdôtain, romanche,
frioulan, piémontais, génois, corse, sarde, napolitain, sicilien, etc.) ouvrent les mêmes
possibilités mais n’ont pas encore fait l’objet d’études spécifiques dans cette
perspective. D’autres familles linguistiques européennes ont été depuis examinées en
ce sens, les langues germaniques (allemand, néerlandais, suédois, norvégien, danois,
anglais —mais c’est une langue un peu à part, on y reviendra plus bas, ou langues
« locales » comme l’alsacien, le suisse-allemand ou le luxembourgeois…) ainsi que les
langues slaves (russe, polonais, ukrainien, bulgare, slovène, tchèque, etc.).
Mais cette vision « technique » de l’intercompréhension peut être élargie par une
vision plus large, de type sociolinguistique, centrée sur les pratiques plurilingues
effectives plus que sur l’analyse linguistique traditionnelle de langues. On se rend alors
compte que l’appartenance des langues à des familles historiques est modifiée par les
contacts entre les langues : ainsi l’anglais, dont plus de la moitié du lexique a été
emprunté aux parlers normands et picards ainsi qu’au latin, est la plus « romane » des
langues « germaniques » ; ainsi le roumain, dont le lexique et même la grammaire ont
été fortement influencés par les parlers slaves alentour, est la plus « slave » des
langues romanes. Dès lors, l’anglais est compréhensible pour un francophone et plus
facilement qu’il ne l’est pour un germanophone (surtout l’anglais technique et littéraire,
le plus romanisé), et le roumain est devenu très difficilement compréhensible pour
quelqu’un qui parle une autre langue romane. Mais ces contacts sont également à
prendre en compte selon la biographie linguistique de chaque locuteur ou groupe de
locuteurs. Les contacts avec plusieurs langues se réalisent sous des configurations
22
très variées selon les individus, soit sous la forme de compétences plurilingues, soit
sous celle de la fréquentation régulière de personnes parlant d’autres langues, du
voisinage stable avec des groupes utilisant d’autres langues, ce qui crée une familiarité
propice au développement de compétences de réception. Et cela quelles que soient
les caractéristiques linguistiques, mêmes très différentes, des langues en question. Un
exemple clé est celui des groupes frontaliers d’États dont les langues usuelles et/ou
officielles ne sont pas les mêmes. C’est la raison pour laquelle on est passé de la
notion d’intercompréhension entre langues parentes à celle entre langues voisines ou
proches.
Il y a de nombreux avantages dans une telle démarche par rapport à celle de
l’apprentissage « complet » d’autres langues (au sens de l’appropriation de bonnes
compétences de productions et dans autant de langues distinctes) et par rapport au
recours systématique à la traduction (interprétariat inclus). Chacun s’adressant à
l’autre (par oral ou par écrit) dans une langue où il se sent « à l’aise », son sentiment
de sécurité linguistique, sociale, professionnelle est plus fort : cela peut avoir des
conséquences positives sur sa communication, ses relations aux autres, son activité
cognitive et professionnelles. Cela restitue à des langues de statuts et de pratiques
très différents, souvent trop hiérarchisés et inéquitables, des fonctionnalités positives
(sous réserves de dispositions organisationnelles, cf. plus bas). Enfin, les besoins et
les couts sont réduits (voir plus bas).
Cela dit, cette capacité d’intercompréhension n’est ni immédiatement mise en
œuvre, ni nécessairement consciente, chez beaucoup de gens. On connait, d’une part,
le rôle des idéologies linguistiques (de type en général nationaliste, puriste, élitiste) qui
éduque les gens à voir des frontières tranchées entre les langues, à refuser toute
forme de pratiques « impures » voire d’ouverture à l’Autre. On connait aussi le rôle
déterminant des représentations sociales, qui incluent les idéologies. Elles orientent
l’action et filtrent les perceptions : si l’on a la conviction, renforcée parce que partagée,
qu’une langue est incompréhensible, on ne la comprend pas et on ne cherche pas à la
comprendre.
La
mise
en
œuvre
à
grande
échelle
de
compétences
d’intercompréhension à la réception nécessite donc une rééducation générale de
beaucoup de populations (ce qui implique des changements importants de politiques
linguistiques) et une formation précise et adaptée des individus qui acceptent
d’essayer, à petite échelle. Il y a en effet des méthodes, faciles à acquérir, pour rendre
un texte ou un discours plus transparent, pour élucider ses opacités. Des didacticiels
ont d’ores et déjà été élaborés (voir par exemple pour les langues romanes :
23
http://dpel.unilat.org/DPEL/Creation/IR/index.fr.asp
ou
http://www.galanet.be/
ou
encore http://w3.u-grenoble3.fr/galatea/classic.htm)
Cela dit, les procédures utilisées pour « deviner » le sens d’un message lors
d’une communication par intercompréhension réceptive sont les mêmes que celles que
l’on met en action pour toute réception / compréhension / interprétation dans n’importe
quelle
langue
et
n’importe
quel
type
de
compétences
linguistiques
et
communicationnelles. D’une manière générale, les procédures sont plus aisées à l’écrit
qu’à l’oral (à cause de la stabilité matérielle du discours et des traditions graphiques
souvent partagées… sous réserve qu’on sache lire) et pour des discours techniques /
scientifiques (à cause de l’univocité des termes spécialisés et de leur circulation entre
les langues). On considère qu’en moyenne, par exemple, un texte écrit en espagnol
est « transparent » à entre 70 et 80% pour des lecteurs francophones ou italophones,
à 90% pour des lecteurs lusophones.
Trois options sont envisageables pour l’exploitation graduelle de cette
intercompréhension potentielle :
-l’option linguistique forte où toutes les langues d’une même famille sont
supposées intercompréhensibles (par exemple y compris roumain / français, allemand
/ suédois),
-l’option linguistique faible où seulement certaines d’entre elles le sont à des
degrés divers (le roumain ne l’étant pas par rapports aux autres langues romanes, le
français l’étant moins, et réciproquement ; le néerlandais étant plus accessible aux
germanophones que le suédois ; etc.),
-l’option sociolinguistique où l’intercompréhension effective est rapportée au
contexte collectif et à la biographie langagière individuelle (y compris incluant les
langues « régionales ou minoritaires » et autres variétés linguistiques).
Dans les deux premières options, les seules « mesurables » de façon collective,
le gain en efficacité est déjà considérable : au lieu des 23 langues officielles de l’U.E.,
on passe à 12 groupes de langues en option faible et seulement 9 en option forte (peu
réaliste). Si l’on prend en compte les compétences fréquentes dans d’autres langues
chez les citoyens de l’U.E. (en anglais dans les pays scandinaves, en français dans les
pays de langue romane, en anglais en Irlande, en russe dans de nombreux pays
slaves, etc.), sans compter les compétences locales et individuelles multiples, on peut
réduire encore le nombre de « différences », c’est-à-dire le nombre d’incompréhension
et/ou de combinaisons de traductions.
24
Ainsi, au sein de l’U.E., les 23 langues officielles aboutissent à 253 paires de
langues et 506 sens de traductions possibles, ce qui est énorme (même si le cout n’est
pas aussi élevé que certains disent y compris parce que tous les documents ne sont
pas traduits dans toutes les directions). En passant à l’option linguistique faible (la plus
facile et la plus réaliste à organiser), on réduit le nombre de traductions possibles de
50%, et donc le nombre de traductions effectives (d’où des économies en millions
d’euros, même en comptant le cout de la formation à l’intercompréhension). Et c’est
autant de capacité d’intercompréhension et de communication rédactionnelle de
gagnée. Si l’on transpose cela par exemple à l’Amérique du Sud (espagnol, portugais,
français + nombreuses langues intermédiaires et amérindiennes), à la Caraïbe
(anglais, français, espagnol, nombreuses langues intermédiaires et créoles) ou à
l’Afrique (français, anglais, portugais, arabe + nombreuses langues intermédiaires et
autochtones), on voit à quel point cela peut faciliter des relations au sein d’espaces
plurilingues.
La question de l’équité linguistique (éviter de converger vers les seules langues
internationales dominantes) peut être résolue en instaurant une rotation entre les
langues au sein d’un groupe d’intercompréhension, de telle sorte que les textes /
discours entrant ou sortant soient à tour de rôle réalisés dans chacun des langues du
groupe selon une séquentialité décidée en commun.
25
BIBLIOGRAPHIE INDICATIVE
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d’Artois.
BLANCHET, Philippe, 1995, La Pragmatique d’Austin à Goffman, Paris, BertrandLacoste.
BLANCHET, Philippe, 2000, Linguistique de terrain : méthode et théorie (une approche
ethno-sociolinguistique), Presses Universitaires de Rennes.
BLANCHET, Philippe, 2007, « Quels ‘linguistes’ parlent de quoi, à qui, quand, comment
et pourquoi ? Pour un débat épistémologique sur l’étude des phénomènes
linguistiques", dans Blanchet, Ph., Calvet, L.-J. et Robillard, D. de, Un siècle
après le Cours de Saussure, la linguistique en question, Carnets de l'Atelier de
Sociolinguistique n° 1, Lesclap-Université d'Amiens (revue en ligne: http://www.upicardie.fr/LESCLaP/spip.php?rubrique31), 66 pages, version papier Paris,
L’Harmattan, 2007.
BRETON, Roland, 2004, Atlas des langues du monde, Paris, Autrement.
CALVET, Louis-Jean, 2002, Le marché aux langues. Les effets linguistiques de la
mondialisation, Paris, Plon.
CALVET, Louis-Jean, 1993, L’Europe et ses langues, Paris, Plon.
CONTI, Virginie et GRIN, François (Dir.), 2008, S’entendre entre langues voisines : vers
l’intercompréhension, Chêne-Bourg (CH), EMH/Georg.
CORDONNIER, Jean-Louis, 1995, Traduction et culture, Paris, Hatier/Didier.
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http://www.tlfq.ulaval.ca/axl/
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http://www.unige.ch/eti/recherches/groupes/elf.html
The Ethnologue (répertoire des langues du monde), site :
http://www.ethnologue.com/
Réseau Lexicologie, Terminologie, Traduction de l’Agence Universitaire de la
Francophonie, site :
http://www.ltt.auf.org/
Répertoire des traductions dans le monde de l’Unesco, site :
http://portal.unesco.org/culture/fr/ev.php
URL_ID=7810&URL_DO=DO_TOPIC&URL_SECTION=201.html
Association des traducteurs littéraires en France, site http://www.atlf.org/
Société française des traducteurs, site http://www.sft.fr/
Sur le site
http://tice.univ-provence.fr/document.php?pagendx=4884&project=dsiitice
consulter les enregistrements audio, vidéos et les textes suivants :
-Alain CALVET, Louis-Jean CALVET, Université de Provence « Le poids
des langues : vers un index comparatif des langues du monde ».
-Noël DUTRAIT, Richard JACQUEMOND, débat avec animé par Philippe
BLANCHET « Poids des langues et traduction ».
Sur l’intercompréhension entre langues voisines, voir notamment le site
l’Union Latine :
http://dpel.unilat.org/DPEL/Creation/IR/index.fr.asp
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