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FORMATION SUR LE FILM
LOOKING FOR ERIC de Ken Loach
Le mercredi 4 avril 2012, l’association Collège au Cinéma 37 a invité Laura Le Gall, doctorante en cinéma à
l’Université de Bordeaux III pour parler du film de Ken Loach Looking for Eric programmé aux élèves de
4ème/3ème.
IMPRESSIONS SUR LE FILM
Catherine Roux, enseignante au collège Saint Martin de Tours, a trouvé que Looking for Eric était un bon film
avec des parties moins sombres. Quant à Bernadette Schmitt, inconditionnelle du cinéma de Ken Loach, ce film
est pour elle audacieux, conte de fée moderne avec une vision plus optimiste à la fin du film. Avant de voir le
film, Carole Coudray, enseignante au collège Maurice Genevoix de Ligueil, avait peur que le film soit trop axé
sur le football mais en réalité, il fait ressortir le bon côté du sport. Paul Spillebout ajoute que ce film mélange
humour et drame social tout en véhiculant des valeurs. Sandrine Millot, enseignante au collège André Bauchant
de Château-Renault, pense que ce film va plaire à ses élèves car l’univers du film leur ressemble.
CINEMA DE KEN LOACH
Ken Loach, cinéaste britannique né en 1936, fait ses débuts et ses armes à la télévision, à la BBC tout comme
John Schlesinger qui émigrera aux Etats-Unis pour réaliser Macadam cow-boy, Peter Watkins ou Ken Russel et,
plus tard, Stephen Frears ou Mike Leigh. La télévision, et notamment la BBC, est un champ d’expérimentation, un
tremplin pour les jeunes cinéastes et c’est la particularité du nouveau cinéma britannique dans les années 1960.
Elle participe au développement des docudramas c'est-à-dire des fictions qui s’appuient sur des techniques du
documentaire.
Looking for Eric, présenté au festival de Cannes le 18 mai 2009 avant sa sortie dans les salles le 27 mai 2009,
a fait 500 000 entrées, ce qui est un joli succès pour Ken Loach. La plupart des acteurs du film viennent de la
télévision et Ken Loach travaille souvent avec des acteurs non professionnels.
Les films de Ken Loach sont beaucoup plus diffusés en France où il a une plus grande popularité. Ken Loach a
reçu plusieurs prix au festival de Cannes dont la Palme d’or en 2006 pour Le vent se lève.
Paul Laverty est le scénariste de Looking for Eric et de neuf films de Ken Loach excepté The Navigators : Carla’s
song (1995), My name is Joe (1998), Bread and roses (2000), September 11 (2002), Sweet Sixteen (2002), Just a
kiss (2004), Le Vent se lève (2006), Tickets (2007), It’s a free world (2008), Route irish (2010).
- La vague sociale du cinéma anglais :
Ken Loach est considéré en France et plus généralement en Europe comme l’un des porte-drapeaux du cinéma
social et s’inscrit dans une longue tradition anglaise ancrée dans un terreau réaliste et social à base de
documentaire et ce, depuis les années 1930, avec le père du cinéma documentaire britannique John Grierson.
Humphrey Jennings s’est penché sur les conditions de vie de la population anglaise, notamment pendant la
Seconde Guerre Mondiale.
Pendant sa période anglaise, Alfred Hitchcock avait un certain sens de la société britannique en filmant dans les
pubs ou dans les bas-fonds londonien. Ce regard social ne se retrouvera plus dans sa carrière américaine.
A la fin des années 1950, les « Angry young men » (proche de Ken Loach), issus d’un mouvement littéraire,
ouvrent la voie à ce qui va s’appeler le free cinéma. Le mouvement « free cinema » se manifeste entre 1956 et
1959 en Angleterre et préfigure les nouvelles vagues naissantes dans le monde entier. Ken Loach va s’inscrire
directement dans ce mouvement. De nouveaux acteurs beaucoup moins marqués par la tradition théâtrale et
souvent non professionnels vont émerger du « free cinema ».
Ces réalisateurs vont travailler à donner une vision plus réaliste mais aussi plus dure de la classe ouvrière
anglaise. Pour citer un extrait de leur programme manifeste de 1956 : « Nous n’avons pas à nous plier à la
convention des attitudes de classe. Implicite dans notre attitude est notre croyance en la liberté, à l’importance des
individus et à la signification du quotidien ». Une valorisation des classes dites laborieuses est faite mais il n’y a
pas de glorification de l’union nationale. Ils sont vraiment soucieux de filmer en contact direct avec la vie et vont
donner la parole à ceux qui ne l’ont pas jusqu’alors c'est-à-dire, « l’homme de la rue », des gens issus de la
classe ouvrière. Ils revendiquent un cinéma autonome et léger qui s’affranchit du personnage héros et des
scénarios pré écrits et préfabriqués : c’est aussi dans le cinéma de Ken Loach. Les situations rencontrées vont
constituer l’objet et l’intrigue même de leurs films. Le « free cinéma » est une visée contestataire aux
revendications sociales marquées afin de rendre possible une prise de conscience en redonnant aux classes
populaires le sens de leurs valeurs humaines, de leur importance et de leur dignité.
Pour citer quelques noms de ce mouvement, il y a :
- Lindsay Anderson
- Tony Richardson
- Karel Reisz
Le « free cinema » ouvre la voie à un courant social et politique qui se poursuivra à la télévision dans les années
1960 et 1970.
En 1966, Ken Loach se fait connaître avec le téléfilm Cathy come home qui a connu un grand retentissement
puisqu’il est à l’origine d’une loi votée autour du logement. Le téléfilm raconte l’histoire des sans-abri à travers
l’histoire d’un jeune couple. Ken Loach passe au cinéma avec le film Pas de larmes pour Joy en 1967. A la
différence de ses comparses qui débutent à la télévision britannique, Ken Loach va rester en Angleterre et ne
sera pas tenté de poursuivre une carrière à Hollywood.
- La méthode de travail de Ken Loach :
Ces tournages suivent la chronologie de ses films : généralement, les acteurs ne connaissent pas la scène
suivante. Ils n’ont accès qu’à une partie du script : par exemple, Steve Evets (Eric Bishop) ne savait pas qu’Eric
Cantona était sur le tournage d’où sa surprise non feinte quand Eric Cantona débarque dans sa chambre. Cela
amène les acteurs à improviser une grande partie de leurs scènes ; des scènes souvent tournées en une seule
prise et renvoyant à la question du risque à prendre qui est une constante chez Ken Loach : c’est une thématique
que l’on retrouve dans le film.
Ken Loach témoigne d’un vrai respect de ses acteurs qui se trouvent au centre de son dispositif et la mise en
scène doit être entièrement à leur service, la caméra doit se faire la plus discrète possible. Extrait d’un entretien
de Ken Loach paru en 2002 dans L’Avant-scène cinéma : « Pour moi, la première qualité de la mise en scène d’un
film, c’est d’être invisible. Une mise en scène qui se verrait viendrait dresser une barrière entre le public et les
personnages. (…) La caméra ne doit pas gêner ceux qui jouent, elle doit les accompagner. » Il y a toujours une
certaine distance, comme une morale, entre la caméra et les acteurs de Ken Loach. Les acteurs sont souvent non
professionnels pour servir le réalisme même si Ken Loach préfère le terme d’authenticité. Etant donné que les
acteurs improvisent eux-mêmes une partie de leur texte, il y a tout aussi une manière de parler, un accent qui
renvoie au vécu de l’acteur et qu’il transmet à son personnage. Le cinéma de Ken Loach est un cinéma engagé
puisque ses personnages, souvent pleins de vitalité, d’énergie, sont dotés vraiment d’un humour présent dans
beaucoup de ces films. Ses personnages sont souvent issus des classes populaires ouvrières, victimes de
l’exclusion et Ken Loach donne la parole à ce type de personnages qui en sont habituellement privés au cinéma.
Ces personnages sont en lutte avec un système social venant briser l’unité d’un groupe et menacer l’intégrité de
ces hommes. Ces individus sont en lutte avec des institutions (le gouvernement, la police, les syndicats, les
dirigeants politiques…) comme dans le film, Fatherland, les parents dans Sweet sixteen viennent menacer
l’intégrité des individus, les services sociaux dans Ladybird, les hôpitaux dans Family Life. Sans jamais les
condamner, Ken Loach met en évidence les contradictions de ces personnages en lutte avec les institutions et
dans le même temps, les contradictions de ces institutions.
Looking for Eric est un film qui a beaucoup dérouté car cet humour surprenait alors qu’il est très présent dans
l’œuvre de Ken Loach. L’humour donne de l’énergie et de la vitalité à ses personnages qui acquièrent une
capacité de résistance passant par cet humour, par cette autodérision présents dans la plupart de ces films.
L’humour vient générer du lien social comme par exemple dans The Navigators et donc insuffler de l’énergie aux
personnages.
Quelques pistes intéressantes à exploiter autour du film :
- Présence d’Eric Cantona chez Ken Loach
Eric Cantona renvoie au rapport du fan à la star ce qui interpellera les élèves de 14-15 ans.
A l’origine, Eric Cantona vient soumettre un projet à Ken Loach basé sur l’un de ses fans qui avait tout quitté
pour le suivre à Manchester (travail, famille…). Cantona s’en est souvenu et avait suggéré à Ken Loach et à
Paul Laverty d’écrire un scénario autour de cette histoire. En réalité, le scénario a un peu dévié en mettant au
centre du projet un personnage inventé, un postier, Eric Bishop qui devient l’élément central du projet. La
présence d’Eric Cantona est assez surprenante puisque le « King Eric », comme les supporters l’appelaient à
l’époque, est vraiment une star du football en Angleterre. Il a joué à Manchester de 1992 à 1997 et était très
présent dans les médias.
Cette présence est surprenante d’autant plus que comme il est dit plus haut, Ken Loach prend souvent des
acteurs non professionnels sauf dans son premier film Pas de larmes pour Joy dans lequel jouait le jeune Terrence
Stamp ou Bread and Roses avec Adrien Brody. La raison pour laquelle Ken Loach fut intéressé par le projet
d’Eric Cantona est qu’il est un passionné de football. Cantona était très présent dans les médias anglais à
l’époque où il était surnommé « King Eric » mais aussi « génie chancelant », un génie avec des failles ce qui
explique peut-être la raison pour laquelle Ken Loach a accepté son projet : un côté humain chez Cantona, un
côté « Monsieur tout le monde » tout en restant un personnage mythique et médiatisé.
Au cinéma, les acteurs viennent rarement jouer leur propre rôle, c’est vraiment une présence très singulière. En
France, il y a eu Jean-Philippe avec Fabrice Lucchini autour de Johnny Hallyday ou Dans la peau de John
Malkovich mais ce sont des cas très peu fréquents. Cantona fait appel à la mémoire collective.
En quoi peut-on dire que Cantona est un personnage à part ?
Qu’est-ce qui le distingue des autres personnages du film ?
Les enseignants peuvent également étudier la place de Cantona au sein de l’intrigue : est-ce qu’il est vraiment
intégré à l’intrigue du film ? Comment son image médiatique apparaît dans le film (poster, archives filmés,
matchs, masques) ?
Ken Loach travaille à brouiller les pistes dans ce film en puisant dans des éléments biographiques que tout le
monde connaît : Cantona, le footballeur, Cantona et ses aphorismes. Il garde son nom et vient incarner son
propre personnage médiatique en le nourrissant d’éléments issus de sa propre légende. Il vient s’auto citer,
invente d’autres aphorismes comme à l’époque, il se souvient de ses propres matchs. Dans le film, cette légende
vivante est traitée sur un pied d’égalité avec Eric Bishop, le postier, parfait anonyme. Cantona est une
apparition fantastique venant pleinement s’intégrer à la réalité et au quotidien d’Eric Bishop ; le fantastique se
place au même niveau que le réel.
En définitive, Eric Cantona fait irruption dans la fiction sans y appartenir pleinement d’autant plus qu’il n’est
visible qu’aux yeux d’Eric Bishop et n’est là que pour l’aider à refaire surface dans sa vie. Cantona est son ange
gardien, un double imaginaire puisqu’il s’appelle Eric également.
- Foisonnement des genres et des registres du film :
Le film part constamment dans une direction pour revenir à un autre genre et continuer dans un autre registre.
Le film débute sur un drame psychologique : le registre du réalisme social correspond à l’état psychologique du
personnage d’Eric Bishop qui vit une période de crise. Il arrive à un moment de sa vie où il aurait aimé être
quelqu’un d’autre. Le film commence donc en plein drame psychologique. Le film opère un virage au moment de
l’apparition de Cantona : registre du fantastique.
Ensuite, en même temps que les souvenirs de sa rencontre avec Lily surviennent, le registre du drame sentimental
constitue le fil rouge du film c'est-à-dire reconquête de la femme aimée 30 ans plus tôt.
Ensuite le spectateur se retrouve dans le polar social où l’intrigue mafieuse vient se greffer à tous ces genres
donnant une teinte plus noire au film. Le film s’achève dans la comédie burlesque, familiale, avec la
recomposition du groupe, de la famille et Ken Loach se permet un happy end.
Cinq genres viennent s’entremêler et s’imbriquer tout au long du film où le spectateur hésite constamment entre
la tragédie et la comédie.
- Paternité :
La paternité est un thème qui se décline tout au long du film. D’une part, Eric Bishop se souvient de son propre
père, figure assez trouble et autoritaire qui n’a pas essayé de le comprendre à l’époque. Il entretient des liens
assez compliqués avec lui et, symboliquement, le personnage de Cantona arrive pour remplacer un peu ce père
avec une relation père-fils entre qui se crée entre Eric Cantona et Eric Bishop. Cantona vient incarner un rôle
protecteur envers Eric Bishop pour que ce dernier avance et reprenne le contrôle de sa vie.
Eric Bishop est le père biologique de Sam, sa fille qui élève seule un enfant dont nous ne savons rien du père.
Eric est aussi le beau-père mais d’une certaine façon un père pour Ryan et pour Zac car l’objet du film est aussi
de reconquérir une autorité et d’incarner à nouveau l’image du père auprès de ces deux beaux-fils. L’un des
deux adolescents, Ryan, qui se fait adopter par un caïd, Zac, ressemblant aussi à un père qui serait malvenu. Il
n’y a pas de relation paternelle entre eux mais quelque chose se crée au niveau de l’autorité qu’Eric n’arrive
plus à incarner auprès d’eux.
« Paternité » dans le sens où Eric et Lily qui deviennent des grands-parents sont aussi amenés à revivre des
situations vécues trente ans plus tôt en élevant leur bébé, Sam.
ETUDES DE SEQUENCES
- Séquence d’ouverture (jusqu’à 1 min 19 sec)
Après l’extrait, Dominique Roy pense que l’on ne comprend pas ce qu’il se passe, à fortiori si les enseignants ne
rappellent pas à leurs élèves que l’on roule à gauche en Angleterre.
La phrase de fin « Tout commença par une superbe passe » reste assez énigmatique à la première vision du film
mais elle fait ensuite écho au personnage de Cantona, passeur dans le sens qu’il doit faire accoucher Eric Bishop
d’une parole. La mise en scène est assez désordonnée, alternant des très gros plans sur Eric et des plans
d’ensemble où sa voiture roule à contresens. À ce moment du film, c’est une métaphore de la vie d’Eric qui tourne
en rond, très chaotique, très désordonnée. Dans la scène suivante, Eric Bishop est à l’hôpital, en plan fixe,
révélateur de toute la structure du film qui alternera entre une mise en scène très agitée avec beaucoup de
mouvements de caméra un peu saccadés avec des caméras à l’épaule et l’instant d’après, le personnage se
posant pour réfléchir à ce qui s’est passé. Dans ce plan, le personnage est à un carrefour de sa vie, perdu.
Dominique Roy trouve que cette première séquence est forte car le spectateur est lui-même dérouté, ne sachant
pas ce qu’il voit ; c’est chaotique et cela annonce bien la suite du film.
Ensuite le titre apparaît, Looking for Eric, et tout d’un coup, le spectateur se demande de quel Eric le film va
parler parce que le thème du double est également très présent. « A la recherche d’Eric » parle plutôt d’Eric
Bishop que de Cantona car Eric Bishop doit remettre de l’ordre dans sa vie.
Dominique Roy fait le lien avec l’affiche où les deux moitiés de visages d’Eric Cantona et d’Eric Bishop donnent
l’impression qu’ils vont en faire qu’un et le jeu de mots King Eric (en rouge) est incompréhensible si le spectateur
ne connaît pas le surnom de Cantona. Même en France, les producteurs ont gardé le jeu des couleurs qui fait
penser à la couleur du maillot de Manchester. Les deux moitiés de visage peuvent faire penser qu’il y a un peu
de Cantona dans le personnage d’Eric Bishop et qu’il peut apprendre de Cantona.
Dans la séquence suivante, Cantona dit à Eric Bishop « Tu dois apprendre à faire face » pour affronter son
passé afin d’avancer.
- Séquence de l’apparition d’Eric Cantona dans la chambre d’Eric Bishop (de 17 min 33 sec à 26 min 30 sec)
Cette scène montre de nouveau le malaise d’Eric Bishop qui doit pouvoir reprendre le contrôle de sa vie,
affronter le passé pour mieux appréhender le présent.
La mise en scène de l’apparition de Cantona vient aussi expliciter l’intérêt qu’a Ken Loach à aborder la relation
d’une star à un fan ; ici, parfaitement ordinaire. L’apparition d’Eric Cantona se fait par Eric Bishop qui rentre en
cachette la nuit dans la chambre de son beau-fils pour y prendre de l’herbe cachée sous une latte du plancher.
Il rentre par effraction dans sa propre maison comme un voleur ou un adolescent qui irait piquer dans le portemonnaie de ses parents. Eric Bishop est un adulte ne s’assumant pas, sans autorité dans sa propre maison et le
début de cette séquence révèle son malaise.
Lorsque Eric revient dans sa chambre, Ken Loach filme en plan rapproché poitrine. Eric Bishop fume et semble
vraiment abattu. Ensuite sur le plan plus large, la chambre ressemble à celle d’un adolescent (posters au mur,
poster de Cantona en grandeur nature). Eric se lève, semble vouloir se mesurer à Cantona en relevant son col et
se met à parler. Il s’adresse à l’image d’Eric Cantona mais cela donne l’impression qu’il s’adresse aussi à luimême, mais qu’il n’arrive plus à dire « Je » ; c’est un homme qui ne s’appartient plus, qui a perdu le contrôle sur
lui-même et qui n’assume même plus le « Je ». Ces répliques-là révèlent l’autodépréciation du personnage
jusqu’à évoquer le suicide (« Crétin hors service », « postier hors service ») et le maillot rouge flamboie vraiment
et tranche avec le décor terne de cette chambre. L’air fier du footballeur, sa tête bien haute et son allure
vraiment fringante contrastent avec l’attitude abattue d’Eric Bishop.
La première réplique de Cantona consiste à renvoyer la balle à lui-même. L’apparition s’effectue sur le mode
fantastique avec l’effet de la drogue qui fait apparaître Cantona dans l’esprit d’Eric Bishop. C’est un être créé
par son imagination et en même temps, tout au long du film, le spectateur n’en saura pas plus sur le statut de ce
personnage. Eric Cantona apparaît seulement dans les plans avec Eric Bishop ; quand il y a un troisième
personnage, Eric Cantona n’apparaît plus (ex : scène dans la cuisine). Il est vêtu d’une manière très simple avec
un blouson dans des tons ternes ; il arrive comme un visiteur, il se fond dans le décor. Ken Loach atténue l’effet
magique auquel le spectateur pourrait s’attendre à voir, comme si l’apparition d’Eric Cantona était normale. Elle
est traitée d’une manière réaliste telle que le spectateur pourrait croire que Cantona est l’ami de la famille qui
passait par là. Eric Cantona est omniscient, il connaît déjà tout d’Eric Bishop.
A l’apparition d’Eric Cantona, il y a une succession de plans champ contrechamp où les deux personnages
apparaissent dans des plans séparés. Le positionnement des personnages est assez bizarre car en champ il y a
Eric Cantona et en contre chams, Eric Bishop se trouve devant un poster de Cantona qui renvoie à son
vieillissement.
« Si on n’affronte pas le danger, on ne peut pas le surpasser » est le premier aphorisme d’Eric Cantona. La malle
matérialise les souvenirs d’Eric Bishop et il doit l’ouvrir pour se confronter à son passé. Les deux personnages
apparaissent dans le même champ donnant l’impression que Cantona et Bishop commencent à s’unir pour
affronter le passé.
Eric Bishop sort une coupure de journal « Un couple de Manchester gagne la finale de danse » : ce couple est
encore anonyme, Eric Bishop n’arrive pas encore à s’approprier vraiment ses propres souvenirs. La réplique
« J’adorais danser » contraste vraiment avec ce qu’Eric Bishop est devenu : personnage immobile, tout abattu et
n’osant pas bouger. En se remémorant ces moments de danse, le personnage récupère un peu d’entrain. Dans
cette scène, la caméra s’est considérablement rapprochée des personnages avec des gros plans. Puis, Eric
Bishop souligne le rôle du hasard dans sa rencontre avec Lily, comme si sa vie s’était déroulée comme cela mais
que finalement, Eric Bishop n’avait pas décidé sa vie.
Dans la scène du souvenir du concours de danse, il y a un fort contraste entre le présent et le passé. La caméra
se met en mouvement en même temps que les personnages se mettent à danser ce qui renforce l’impression que
le présent est dans l’immobilisme alors que le passé semble beaucoup plus vivant.
Dans cette séquence il y a deux scènes d’intimité qui se répondent – la scène entre Eric Bishop et Eric Cantona et
celle entre Eric Bishop et Lily – avec une coloration ironique.
Le fait que ce soit Eric Bishop qui prenne en charge le récit de ses souvenirs qui sont à leur tour commentés par
Cantona produit un effet très lointain faisant penser que le souvenir douloureux est profondément enfoui et qu’il
faut deux narrateurs pour le faire surgir et l’actualiser dans le temps présent.
La problématique de la scène est que le personnage doit établir un lien avec son passé pour affronter ses
problèmes actuels même s’il s’acharne encore à nier « Non, de l’eau a coulé sous les ponts, c’est trop tard
maintenant, je ne veux plus voir Lily ».
Paul Spillebout, enseignant au collège Lamartine, trouve cette scène intéressante. Par exemple, en troisième,
l’ordre de la narration, le flash-back, la place du narrateur, les indices chronologiques qui permettent de
retrouver l’histoire sont au programme. L’intérêt des chaussures bleues peut être posé à ce moment de la
narration, du film. Ken Loach sème beaucoup de petits indices que le spectateur retrouvera dans les scènes
finales.
Un clin d’œil se trouve dans le nom de Lily : « Devine » à « divine », « Lily » est le lys, c’est le blanc, c’est la
pureté et Lily est blonde. Eric Bishop parle d’un ange ; il y a donc toute une idéalisation de la femme. Lily
devient la quête d’Eric Bishop et le fil rouge du film ; il doit reconquérir Lily avec l’idéalisation de la femme
aimée. Contrairement à Lily qui a un nom relevant du merveilleux, Eric Bishop a un nom difficile à porter car
Bishop signifie « évêque » en anglais. Il y a quelque chose de sacré entre eux.
- Séquence de la cuisine et de la distribution du courrier d’Eric Bishop (de 41 min 55 sec à 49 min 26 sec)
Le football tient une place importante dans le cinéma de Ken Loach que ce soit dans Kes, Regards et sourires, My
Name is Joe. Tous ces films contiennent des séquences d’entraînement. Il faut savoir que Ken Loach est lui-même
un grand amateur de football et est même actionnaire d’une équipe de cinquième division anglaise sur laquelle
il a réalisé un documentaire en 1998, Another city : A week in the life of Bath’s football club.
En Angleterre, le football, sport historiquement populaire, est le sport de la classe ouvrière. Les plus grandes
équipes appartiennent tout ou en partie à des cités industrielles ou minières comme par exemple, Liverpool,
Manchester, Sheffield. Le football a une capacité fédératrice exceptionnelle qui génère des rassemblements de
masse, des moments de liesse collective et un engouement populaire. Ce sport est également un lieu de
l’apprentissage de certaines règles ce qui renvoie dans le cinéma de Ken Loach à filmer un microcosme de la
société. Le football peut être aussi une métaphore du cinéma :
- la durée d’un match est similaire à celle d’un film,
- les joueurs peuvent s’apparenter à des acteurs,
- l’entraîneur serait un peu le réalisateur qui devrait coordonner tout cela,
- le président du club pourrait s’apparenter au producteur de cinéma.
Il y a vraiment des correspondances entre le cinéma et le football exploitées par Ken Loach. Pour lui, le football
est un sport cinématographique.
Au début de cette séquence, l’apparition de Cantona se fait dans un endroit très privé, la cuisine; il assume
complètement son rôle de coach et apprend à Eric Bishop à dire « non ».
Le comique de cette scène repose sur le jeu de présence / d’absence d’Eric Cantona où cette absence à la fin
de cette scène donne un effet comique car Eric Bishop se retrouve tout seul à crier « non » devant ses deux
beaux-fils. Cette scène permet de montrer à quel point Eric Bishop a besoin d’extérioriser. Cette séquence fait
écho à la scène suivante (distribution du courrier par Eric Bishop) où il explique à quel point il pouvait se
défouler en toute liberté lorsqu’il allait au stade. Eric Bishop est un personnage frustré qui n’arrive pas à
exprimer ses émotions.
Pour la première fois du film, Eric Bishop semble exalté en parlant du football ; ce sport le fait réagir et lui fait
exprimer des émotions. C’est vraiment sa passion et Eric Cantona ne joue pas son côté légende, mythe vivant, il
ne se souvient pas de ces actions marquantes qui ont pourtant marqué les supporters anglais.
Dominique Roy ajoute que les deux Eric refusent quelque chose : Eric Bishop refuse d’être un homme, et Cantona,
un héros.
Quand Eric Cantona commence à s’ouvrir un peu, Eric Bishop peut quand même s’identifier. Une identification se
crée à partir de cette séquence, et le rapport star/supporter rentre en jeu. Dans cet extrait, des images
d’archives viennent démontrer qu’Eric Bishop n’a plus accès au stade. Il ne peut plus assister à des matchs de
football.
En Angleterre, au début des années 1990, il y a eu des émeutes violentes entre supporters notamment à
Sheffield en 1989 où il y a eu des dizaines de morts piétinés et asphyxiés. Les stades ont ensuite fait l’objet de
rénovation et du même coup les terrasses où les gens venaient en masse ont été supprimées. Suite à ces
rénovations, le prix des places s’est envolé et la classe moyenne ne pouvait plus s’offrir des places de match de
football. Ces images d’archives donnent donc du sens car le spectateur n’assiste pas à un vrai match de football
durant ce film, ce qui est assez rare dans le cinéma de Ken Loach, mais c’est une manière de parler de la classe
populaire et du fait qu’elle n’a plus accès à un loisir. Tout au long du film, Eric Bishop et ses amis regardent des
matchs au pub ou à la télévision ce qui est également un repli sur soi que Ken Loach déplore ouvertement. Ken
Loach critique le prix des places mais pas le transfert d’argent dans le monde du football.
Dans cette scène, trois pistes sonores se superposent. Tout d’abord, le piano en musique « de fosse » (il
n’appartient pas à l’univers de la fiction) vient amplifier les propos d’Eric Bishop, amplifier son exaltation, son
bonheur à évoquer ses souvenirs au match. Ensuite, la voix d’Eric Bishop se fait le commentateur ému de ces
images d’archives qui sont directement issues de la télévision. Enfin, le brouhaha des spectateurs de l’époque
traduit l’ambiance surchauffée, l’exaltation qui avait lieu dans ces stades de football à l’époque. La
superposition de ces trois pistes amplifie la notion de ferveur. La musique à la trompette reprise en musique de
fosse amplifie et tout d’un coup, cette musique résonne dans toute la ville jusqu’aux adolescents qui jouent au
football sur une place de parking. Il entonne la Marseillaise. Dominique Roy pense que jouer La Marseillaise est
peut-être un pied de nez car c’est sans doute la seule chanson française que les Anglais connaissent.
Pour Laura Le Gall, Cantona ne peut pas réellement prendre vie car il y a vraiment une distance qui se crée
due au fait que les gens n’aient plus accès au stade et qui ne permet pas à Cantona de vraiment apparaître ;
cela reste un fantasme assez lointain qui ramène Eric Bishop à une époque assez heureuse.
La passe dont parle Eric relie la phrase du début du film « Tout commença par une superbe passe ».
Quand Cantona lui dit que sa plus belle action est une passe, Eric Bishop a une réaction de surprise. L’important
est qu’il y a encore des valeurs transmises par le football, comme le cadeau, le partage, l’importance de jouer
collectif, la confiance à ses coéquipiers… Eric Cantona s’amuse avec son propre mythe : « Je ne suis pas un
homme, je suis Eric Cantona » : il le prolonge à travers son personnage et en même temps, il s’amuse avec cette
image, ce côté légende vivante. Il dévoile aussi ses doutes, permettant ainsi à Eric Bishop de s’identifier : il doit
parvenir à reprendre confiance en lui en s’identifiant à Cantona avec un échange entre les deux.
Certains enseignants n’ont pas compris la conférence de presse à la fin du film où Eric Cantona fait un
aphorisme sur les mouettes. Laura Le Gall explique que les journalistes attendaient qu’Eric Cantona s’explique
sur son agression sur le supporter et qu’Eric Cantona, personnage particulier, a préféré lancer cet aphorisme sur
les mouettes et partir. Il a un humour totalement décalé ce qui peut expliquer que les Anglais l’apprécient
autant.
- Séquence finale (de 1 h 36 min 21 sec à 1 h 46 min 12 sec)
La scène finale où les trois bus se rendent chez Zac exporte les valeurs du football et définit bien la morale du
film : « L’union fait la force ».
Au début de cette scène, le mystère entoure cette opération puisque le spectateur sait où ils vont, sans pour
autant connaître les tenants et les aboutissants de cette opération « Cantona ». L’humour est présent dans cette
scène et peut faire penser à une parodie de films d’action (plan à l’envers, manque de coordination, noms de
code…). En même temps, le nombre de participants à l’opération Cantona fait penser qu’il y a quelque chose
d’important qui se prépare. Au début du film, Eric Bishop évoque une séance chez le psychiatre où celui-ci lui
demandait la dernière fois où il s’était senti heureux et il avait eu alors ce souvenir précis d’un trajet de car
avec sa fille pour assister à un match de football.
Quand ils arrivent à destination, par la profondeur de champ, les spectateurs peuvent se rendre compte du
nombre de participants à cette opération « Cantona » et tout d’un coup, le silence, le sérieux montrent que cette
opération n’est pas à prendre à la légère. Habituellement, Ken Loach se sert très peu de la profondeur de
champ, préférant les plans rapprochés.
Ensuite, des cadrages plus serrés en « plan-poitrine » font ressentir que chacun a un rôle à jouer dans cette
opération. Cette scène alterne entre humour, comédie, registre assez léger et en même temps quelque chose de
plus grave, une tonalité plus noire, plus sérieuse. Lorsque Eric Bishop s’annonce comme facteur, encore une fois, le
réalisateur détourne le but de l’opération, créant un peu plus de suspens. Le chien est le début d’une longue
lignée d’éléments, déjà vus au long du film (lorsque Zac et ses complices lâchent le chien sur Eric Bishop), qui vont
être neutralisés par la bande « Cantona ».
Lorsqu’ils rentrent dans la cour, le plan en contre plongée sur les deux fenêtres annonce le réveil de Zac,
totalement pris par surprise. L’utilisation de la plongée de la fenêtre de Zac met en valeur le nombre de
Cantona, venus en masse. Ces derniers sont vraiment organisés et en ordre ce qui contraste avec la panique et
la précipitation régnant dans la maison puisque Zac se met en colère, se traduisant par des vociférations qui
participent au burlesque de la scène.
Ils s’emparent du terrain collectivement pour finir la métaphore avec le football et investissent le terrain de
l’ennemi. Ils se mettent à filmer, ils produisent des images. La vulnérabilité des gangsters est visible et l’équipe
Cantona commence à casser tout ce qui symbolise la puissance des gangsters comme le 4x4, le mobilier…Dans
la maison, Zac est complètement encerclé par les Cantona, il ne se maîtrise plus, il ne se contrôle plus et perd
donc la face : la partie est déjà gagnée. L’utilisation des pistolets à peinture, déjà vue dans le film, montre que
la violence est désamorcée et cette scène joue encore entre le film de gangster et le comique. Au dernier
moment ce sont des pistolets à peinture, ceci est donc une punition collective infligée à ces gangsters.
Ken Loach filme caméra à l’épaule pour traduire l’agitation. Non seulement, le méchant est ridicule mais il est de
mauvaise foi car il dit qu’il n’a jamais vu le pistolet alors que le pistolet était la « patate chaude » que les
personnages se donnent tout au long du film.
En détruisant l’écran plasma du gangster, Ken Loach fait un pied de nez car il déplore le devenir de la
télévision où il a commencé. Il déplorait dans une interview que la télévision nuisait à la créativité. Dans le film,
la télévision véhicule des images pornographiques.
La destruction du pistolet symbolise ainsi la fin du film de gangster puisque les Cantona ont définitivement
gagné et Zac est complètement repeint en rouge, à l’image du maillot de l’équipe de football de Manchester.
La famille Bishop est enfin recomposée en tant que groupe.
Quand un des personnages se trompe sur « Youtube », c’est la dernière remarque humoristique qui achève de
faire rentrer le film dans le registre comique dans lequel il sera jusqu’à la fin. Tous les éléments scénaristiques du
film sont mobilisés pour donner une leçon à ces gangsters ; le métier de postier devient tout d’un coup une
profession de justicier masqué et peut servir aussi à donner une leçon.
A la fin, il y a la rédemption du fils. Cantona fait un geste à Eric Bishop, il n’a plus besoin de lui parler car
désormais tout va s’arranger. Il va s’éclipser et Eric Bishop fait le même geste que Cantona en relevant son col
une dernière fois et cela sera sans doute la dernière apparition de Cantona dans la vie d’Eric Bishop.
Cette scène montre que l’union est le collectif et que l’union fait la force chez Ken Loach ; ils parviennent à
vaincre les malfrats en se rassemblant et le film va s’achever dans un climat d’apaisement et de réconciliation
puisque Eric Bishop a regagné sa confiance en soi.
Laura Le Gall montre un extrait du film Kes de Ken Loach qui fait penser aux films Les 400 Coups de Ken Loach
et L’enfance nue de Maurice Pialat. Elle trouve intéressant de montrer ce film du début de carrière de Ken Loach
car il s’intéressait à des jeunes gens plutôt qu’à des adultes. Kes retrace la vie de Billy Casper, élevé par sa
mère et qui élève un faucon. Elle montre l’extrait d’un cours de football qui prend place dans la droite lignée du
film qui constitue une violente critique du système éducatif anglais qui reste sourd aux préoccupations et à la
détresse des enfants. L’entraîneur, que nous allons voir dans l’extrait, est une caricature militaire assez grotesque
et qui au lieu d’apprendre les règles du jeu aux enfants et l’esprit d’équipe, va attiser la division, les triches
pour sa gloire personnelle.
Les seules fantaisies sont le score qui s’inscrit sur l’écran.
Dominique Roy attend le retour des classes de collège après leurs projections.
L’association Collège au Cinéma 37 remercie Laura Le Gall pour sa venue à Tours et pour son analyse du film
Looking for Eric.
Sources bibliographiques
Sur Looking for Eric
Dossier CNC n°192, rédigé par Philippe Leclerc
Sur Ken Loach
Ouvrages, essais
Erika THOMAS, Ken Loach : cinéma et société, L’Harmattan, 2009, 243 p.
Erika THOMAS, Ken Loach : un regard cinématographique sur l’aliénation familiale, L’Harmattan, 2006, 102 p.
Erika THOMAS, Le Cinéma de Ken Loach : misères de l’identité professionnelle, L’Harmattan, 2005, 100 p.
Erika THOMAS, L’Univers de Ken Loach : engagement politique et rencontre amoureuse, L’Harmattan, 2004, 98 p.
Philippe PILARD, Land and Freedom : étude critique, Armand Colin, 2005.
Francis ROUSSELET, Ken Loach, un rebelle, éditions du Cerf, 2002, 204 p.
Article
Joël MAGNY, « Ken Loach », paru dans l’encyclopédie Universalis.
Yves ALION (entretien réalisé et traduit par), entretien avec Ken Loach, L’Avant-scène cinéma n°517, Paris,
décembre 2002.
Dvd
« Citizen Ken Loach » de Karim Dridi, in André S. Labarthe, Cinéma, de notre temps. 4, Paris, MK2, 2006.
Sur le cinéma britannique
Philippe PILARD, Nouvelle histoire du cinéma britannique, Nouveau Monde Editions, 2010, 334 p.
N.T. BINH, Philippe PILARD, Typiquement British : le cinéma britannique, éd. Du Centre George Pompidou, 2000, 191
p. (Notamment sur la veine sociale du cinéma britannique : Nicolas SAADA, « La tradition réaliste du cinéma
britannique », pp. 115-117)
Philippe PILARD, Histoire du cinéma britannique, Armand Colin, coll. 128, 1996, 127 p.