« Mondialisation et spécialisation de l`économie française »

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« Mondialisation et spécialisation de l`économie française »
« Mondialisation et spécialisation
de l’économie française »
Note de lecture du dossier de Sociétal n°58 (Vincent Charlet, le 10 janvier 2008).
« La spécialisation de la France », Michèle Debonneuil (économiste, IGF)
Cet article se ramène à un raisonnement
simple, moins nouveau que catégorique.
Premièrement, il est dans l’intérêt de tous
les pays de promouvoir le libre-échange.
Les tentations protectionnistes sont
nombreuses, tant dans l’histoire que dans
l’actualité. Mais elles conduisent toujours à
la catastrophe.
Deuxièmement, la mondialisation est bel
et bien facteur de déstabilisation
permanant : il est inéluctable que les pays
aujourd’hui
en
développement
parviennent rapidement à produire
absolument tout ce que produisent
aujourd’hui les pays développés.
Troisièmement, en l’absence de toute
échappatoire, il n’y a pas d’autre solution
pour la France que de consolider en
permanence ses avantages comparatifs.
Deux directions sont indiquées : les
activités innovantes et les services de
proximité [pas de surprise donc].
Quatrièmement, ceci a tout lieu de
favoriser en France une polarisation entre
emplois à haute valeur ajoutée et « petits
boulots », dont le coût social pourrait
devenir intenable. Populations et
décideurs pourraient alors se laisser tenter
par le recours au protectionnisme mais ce
serait une grave erreur [sauf erreur de ma
part, il n’est donné aucune solution pour
trouver une issue favorable à ce
processus].
« La spécialisation industrielle de la France en débat », Gilles Le Blanc
(économiste, Ecole des Mines)
L’article compare la spécialisation
industrielle de la France à celle de
quelques « grands voisins », à la fois en
termes productifs (de quels secteurs
provient la valeur ajoutée ?) et
commerciaux (d’où proviennent les
excédents commerciaux ?).
La principale conclusion est que la France
n’a pas de spécialisation marquée,
contrairement à des pays comme
l’Allemagne, le Japon ou le Royaume-Uni.
Ceux-ci sont non seulement plus
spécialisés que la France mais ils le sont
aussi de plus en plus. On ne trouve, outre
la France, de distribution « moyenne » des
activités que dans deux pays : l’Espagne et,
de manière prévisible, les Etats-Unis. A
contrario, il faut donc se défaire de l’idée
tenace selon laquelle la France serait
spécialisée dans de « mauvais » secteurs
(industries déclinantes, etc.).
Quand on compare la France à
l’Allemagne, c’est encore plus éclairant.
Les performances productives ou
commerciales des deux pays reposent en
gros sur les mêmes secteurs
(agroalimentaire, automobile, chimiepharmacie…), avec en outre une même
stabilité dans le temps (de 1992 à 2002). La
grande différence tient dans le fait que,
premièrement, l’Allemagne est bien plus
spécialisée dans ces secteurs (en raison
soit de volumes plus importants, soit
d’une orientation plus marquée vers le
haut de gamme) et deuxièmement qu’elle
a accentué ce phénomène dans la dernière
décennie.
Deuxième grande idée : les partenaires
commerciaux de la France sont
essentiellement en UE et dans le monde
développé. Sans aller jusqu’à oublier la
Chine et l’Inde, c’est donc d’abord en
référence à un positionnement européen
qu’il faut réfléchir aux avantages
comparatifs de la France.
Gilles Le Blanc semble favorable à l’idée
qu’une telle spécialisation est non
seulement nécessaire mais qu’elle peut
justifier une intervention publique. Il ne
s’aventure pas au-delà (pas de suggestion
de secteurs à considérer comme
prioritaires ou même d’un moyen de les
déterminer de façon légitime).
« La France face aux flux d’investissements internationaux : une
spécialisation à réinventer », Fabrice Hatem (AFII)
Via une autre approche (analyse des flux
d’investissements internationaux), l’auteur
redémontre les thèses dont parlent les
deux articles précédents.
Premièrement, le phénomène
délocalisation-relocalisation selon
de
les
avantages comparatifs est patent. L’Europe
orientale capte ainsi 93 % des
investissements réalisés en Europe dans
des secteurs comme le textile ou
l’électronique grand public, et plus
généralement 65 % pour l’ensemble des
secteurs manufacturiers. De son côté,
l’Europe dite « de l’Ouest » capte 80 % des
IDE pour les services commerciaux et
financiers et plus généralement 73 % pour
l’ensemble des services.
Deuxièmement, la France se démarque de
ses voisins ouest-européens par une faible
spécialisation. Selon l’auteur, la diversité
de l’offre du territoire français n’est pas
nécessairement une faiblesse, pour peu
que l’on soit conscient du risque pris en
n’étant leader nulle part.
Enfin, l’auteur fait preuve d’un rare
courage en suggérant des secteurs
susceptibles de constituer de futurs
avantages comparatifs pour la France.
L’espoir du lecteur est hélas assez vite
déçu devant le caractère très général de
son énumération : environnement et
énergie, industries intermédiaires (et
notamment matériaux), secteur du vivant,
TIC, transport, « reste de l’industrie
manufacturière » (sic) et services.
Plus pertinent est son appel final pour une
pratique non seulement professionnalisée
mais surtout doublement focalisée de la
promotion extérieure de l’investissement
en France. Comme l’ont fait avec succès
des pays voisins, chaque « campagne » doit
être ciblée sur un sous-secteur finement
identifié et sur un territoire précis à
proposer, au vu de ses avantages
particuliers. Les pôles de compétitivité
sont évidemment un repère inévitable
dans une telle démarche.
« Faisons de la qualité notre force ! », Yves Cannac (Sociétal)
Article du président du comité éditorial
sous forme d’appel pour réfléchir à des
avantages comparatifs, non plus en termes
sectoriels (que pourrait-on retenir comme
domaine d’excellence durable, si ce n’est
le tourisme ?) mais en termes plus
transversaux. Il met en avant la notion de
qualité, à laquelle les Français
s’identifieraient volontiers et à laquelle les
étrangers associeraient tout aussi
volontiers la France. L’article est
malheureusement trop court et pas assez
factuel pour être convaincant.
« Spécialisation américaine : une stratégie de nouveau keynésienne ? »,
Alain Villemeur (Dauphine)
Dans cet article à la limite du hors sujet,
l’auteur montre que, depuis les années
1990, la politique économique américaine
est totalement d’inspiration keynésienne
et que les néolibéraux ont perdu toute
influence dans les administrations
fédérales.
Tel est du moins le cas sur les deux volets
classiques du keynésianisme : les
politiques monétaires (de la Fed) et
budgétaires (de l’administration). D’une
part parce que la Fed a parmi ses missions
celle de veiller au maintien du plein
emploi ; d’autre part parce que le déficit
des comptes publics n’est jamais aussi
abyssal que lorsqu’une mauvaise
conjoncture incite le Président à décider
de nouveaux investissements ambitieux.
En particulier, l’interventionnisme public
est patent dans le domaine de
l’innovation. Selon l’auteur, ce sont ainsi
les milliards publics, accordés notamment
à des laboratoires militaires (sous couvert
de lutte contre le terrorisme), qui
représentent aujourd’hui la manne de
clusters tels que la Silicon Valley. D’autres
exemples sont mobilisés à l’appui de cette
thèse : 7 milliards pour doper l’industrie
du vaccin sous prétexte de grippe aviaire,
etc. Cet interventionnisme fédéral se
mesure également à l’aune des
mécanismes auxquels il a donné lieu, Small
Business Act en tête. Tout ceci se résume à
une distorsion importante et assumée du
principe de concurrence.
En revanche, les Etats-Unis ont abandonné
d’autres outils keynésiens classiques,
comme la relance par les salaires, qui ont
fait la preuve de leur inadaptation au
monde ouvert d’aujourd’hui,
L’auteur plaide donc pour ce qu’il nomme
une politique keynésienne de « relance
endogène », qui passe par le soutien à
l’innovation.
« Pourquoi la France a un manque de croissance et un déficit
extérieur ? », Pierre-André Chiappori
Intéressant mais presque totalement hors sujet.