RACINES182 - avril08 XP7

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RACINES182 - avril08 XP7
Dossier coordonné par
20/03/08
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Christine grandin
(Source texte : La plante du mois)
Sculptures
végétales
(Photo : La plante du mois)
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Les jolies formes des topiaires reviennent dans les jardins.
Classiques avec le buis ou le laurier, parfumées
avec la lavande et l'armoise. À vos cisailles !
L
es jardiniers d'ornement, inspirés par le talent des
sculpteurs de pierre, ont commencé, dans la Rome antique de la
moitié du IIe siècle avant J.C., à donner au cyprès, au buis et au laurier
des formes d'animaux ou de figures
mythologiques : l'art topiaire était
né. Au Moyen-Âge, à la Renaissance
et à la cour du Roi Soleil, ce
mélange de fantaisie et de rigueur
est associé aux bordures de buis des
jardins à la Française, aux somptueux parcs des villas italiennes ou
aux extravagantes compositions
anglaises. Passé de mode au XVIIIe
et XIXe siècles, il retrouve aujourd'hui
les faveurs des terrasses et des petits
jardins de ville (en pot), ou celui des
créateurs de jardins contemporains.
Buis, topiaire idéale
C'est le buis, à croissance lente
mais régulière, doté d'une végétation compacte, qui est le plus utilisé
pour la sculpture végétale, de la plus
simple à la plus complexe. Cônes,
boules ou encore pyramides sont les
plus classiques. Le buis, taillé bas, est
aussi utilisé pour les bordures délimitant des massifs au tracé géométrique.
Mais on peut aussi oser le merveilleux, avec les bestiaires végétaux, dauphin, lapin ou pourquoi pas licorne!
Placées en arrière-plan, les topiaires
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mettront aussi en valeur les graminées, les couleurs des vivaces et les
fleurs des rosiers.
En raison de ses qualités citées plus
haut, le buis réussit aussi fort bien en
pot, sans que sa longévité en pâtisse.
Sur la terrasse, ou pour marquer
l'entrée de la maison, il sera du meilleur effet, taillé en boule dans un joli
contenant de terre cuite ou de style
florentin. Sur un balcon, on préférera
des formes plus verticales, en cône
ou en spirale. De plus, ses feuilles
persistantes et vernissées résistent
bien à la pollution atmosphérique.
Il existe des grillages spéciaux
à travers lequel poussera le buis
qu’il suffira ensuite de tailler
autour de la forme. (Photo :
Sculpte-haie sur accu, Bosch).
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Comment le cultiver ?
Comment tailler ?
Le buis réussit bien dans tous les
sols riches, bien drainés, de préférence argilo-siliceux. Mais une terre
calcaire n'est pas un problème pour
lui. Par contre, l'exposition à miombre sera mieux appréciée que
celle au soleil intense. La culture est
sans souci, mais on peut lui apporter un bon engrais complet de
temps en temps (le même que pour
les rosiers). Attention : il préfère une
terre qui reste fraîche en été. Donc
n'hésitez pas à mulcher le sol avec
des écorces ou des aiguilles de pin,
de la paillette de lin ou encore des
coques de cacao.
Le seul entretien consiste à tailler les jeunes pousses pour garder
ou développer la forme désirée, ce,
deux ou trois fois pendant l'année.
Utilisez de préférence des cisailles à
lames courtes, pour garder de la
précision à votre taille.
De croissance assez lente, le buis
poussera de 5 à 7 cm par an chez
les jeunes plants, et ensuite d'environ
10 cm tous les ans. Respectez également les distances de plantation,
si vous ne voulez pas les voir dépérir: de 10 à 20 cm pour les bordures,
60 cm dans une haie et 1,50 m dans
un massif. À partir d'un jeune plant,
il faut compter cinq ans pour
créer une boule ou un cône.
Pour une forme plus sophistiquée (spirale, animaux), patien-
On cultive en topiaire essentiellement le Buxus Sempervirens, le
buis commun, qui se décline en
nombreuses variétés. À feuilles
panachées : 'Argentea', 'Argenteovariegata', 'Aureovariegata',
'Elegantissima', 'Latifolia Maculata';
à port pyramidal : 'Pyramidalis'.
À feuillage très compact :
'Handsworthensis' (buis d'An gleterre) ; À feuilles plus grosses et
à croissance plus rapide :
'Rotundifolia'.
Pour composer des bordures, le plus utilisé est le
'Suffruticosa', une variété naturellement naine, dont les feuilles ne
dépassent pas 2 cm de longueur.
En topiaire parfumée, on
peut aussi styliser, la lavande
('Angustifolia'), le romarin officinal,
l'armoise ('Artemisia abrotanum'),
la santoline et la rue.
Pour une ambiance méditerranéenne on préférera, l'if ou
le cyprès de Provence, très prisé
pour les sculptures végétales de plus
de deux mètres. Le houx, le laurier
sauce, le pittosporum à petites
feuilles et le laurier du Portugal
('Prunus lusitanica') donnent aussi
d'excellents résultats.
tez une dizaine d'années. Mais
le résultat, original et créatif, sera
au rendez-vous !
Art japonais : les Niwaki
Les jardins du Japon sont
chargés de symbolisme religieux ou spirituel, et les jardiniers japonais ont élevé
en art la taille des arbres et des
arbustes : le Niwaki(1), décliné en plusieurs disciplines. Pins, cèdres, épicéas,
sapins, if et genévriers (généralement
en sélection naturelle) deviennent Tamazukuri, arbre aux rondeurs végétales
(imaginez une maquette d'arbre
construite avec des balles de ping-pong
collées à un tronc…). Ou bien des
Daisugi, dont le tronc porte verticalement un nombre impair de branches
maîtresses où on ne laisse qu'un seul
toupet végétal à son faîte.
Les champignons, gouttes d'eau, beignets, vagues, anneaux taillés ensemble en bosquets irréguliers près du sol
s'appellent les Karikomi. On taille ainsi
les azalées, de préférence persistantes
à petites feuilles.
Formes suggérant nuages, collines
vallonnées, effets zigzag, les Niwaki
commencent à se décliner (en
pot) dans certaines pépinières
spécialisées, en France. Leur
conduite est assez longue si on
veut les sculpter soi-même, mais
pour les amateurs de végétaux
taillés, originalité garantie !
(Photo : archives Racines)
Quelles variétés choisir?
(1) Taille et conduite des arbres et des
arbustes à la japonaise.
Niwaki dans le Parc oriental de Maulévrier, dans le
Maine-et-Loire.
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Pour en savoir plus : lire le très
beau livre de Jake Hobson,
Niwaki (2007), aux éditions du
Rouergue, 29,50 €.